HISTOIRE DU CHÂTEAU DE VERSAILLES

VERSAILLES AU XVIIIe SIÈCLE

 

PAR PIERRE DE NOLHAC

de l'Académie française

PARIS – ÉMILE-PAUL FRÈRES - 1918

 

 

PRÉFACE.

 

CHAPITRE PREMIER. — VERSAILLES SOUS LOUIS XV.

CHAPITRE DEUXIÈME. — LE VERSAILLES DE GABRIEL.

CHAPITRE TROISIÈME. — LES CABINETS DE LOUIS XV.

CHAPITRE QUATRIÈME. — LES APPARTEMENTS HISTORIQUES.

CHAPITRE CINQUIÈME. — VERSAILLES SOUS LOUIS XVI.

CHAPITRE SIXIÈME. — LES APPARTEMENTS DE MARIE-ANTOINETTE.

CHAPITRE SEPTIÈME. — LES JARDINS AU DIX-HUITIÈME SIÈCLE.

 

 

La menace qui a pesé sur la patrie rend ses enfants plus attentifs et plus fidèles. Désormais, chaque page que nous écrirons de l'histoire de France portera des marques visibles de notre amour. Nous ne laisserons plus, sous de vains prétextes d'esthétique ou de parti, abaisser nos traditions d'intelligence ou diminuer l'honneur de notre passé. Quelque modeste que fût le présent ouvrage, ces idées l'inspiraient déjà. On l'achève dans les sentiments d'une tendre piété, après les périls qu'a courus Versailles devant la barbarie moderne. Cette grande œuvre de l'art français nous en est devenue plus chère et paraît à tous plus précieuse. Il faut veiller à la conserver, à l'étudier, à la mettre en lumière dans ses moindres parties, puisqu'il n'en est aucune qui ne rende témoignage, aux yeux du monde, des qualités propres de notre génie.

La méthode de ces recherches et les sources qui ont permis de les poursuivre ont été suffisamment expliquées dans la préface des premiers volumes consacrés à Versailles sous Louis XIV. Celui-ci a exigé parfois plus de minutie, quand on a dû dater et décrire ces merveilles de décoration intérieure qui ont joint au premier trésor d'art accumulé à Versailles l'apport d'un siècle nouveau. Il faut se rappeler, en effet, que le Château n'est plus tout à fait celui du Grand Roi. Hors la Galerie de Le Brun, la Chapelle de Mansart, l'Escalier de marbre, les Grands Appartements du Roi et une partie de ceux de la Reine, presque tout ce qui reste d'ancien dans cette maison royale est postérieur à la mort de Louis XIV. Le règne de Louis XVI n'ayant touché qu'au détail, c'est en réalité le Versailles constitué par Louis XV qui nous est demeuré. Les jardins même ont subi, après Le Nôtre, des modifications capitales qu'il importait de ne point omettre.

On espère que l'étude de l'art national bénéficiera d'une documentation nouvelle empruntée, pour la plus grande part, aux archives du service des Bâtiments du Roi. La discussion de certains points se trouve dans Le Château de Versailles sous Louis XV et quelques autres travaux, auxquels les spécialistes ont encore intérêt à se reporter. L'illustration ne comporte que des reproductions de dessins anciens, exécutées avec sa fidélité habituelle par l'atelier André Marty. C'est une collaboration précieuse, pour l'évocation du temps, que celle de Cochin, de Slodz, de Moreau le jeune, d'Hubert Robert, et de Gabriel lui-même, qui avait rêvé de substituer son œuvre à celle de Le Vau.

L'interruption des travaux entrepris sous Louis XV a sauvé des morceaux essentiels du Versailles de Louis XIV, qu'on ne se consolerait pas d'avoir perdus. Les parties nouvelles nous laissent, en même temps, rattacher d'autres souvenirs à des lieux précis et à un décor intact. C'est là qu'ont été préparées, parmi tant d'autres desseins dignes de la France, la campagne de Fontenoy, la réunion de la Lorraine, l'acquisition de la Corse, la participation à la guerre de l'Indépendance américaine. Car ce Versailles du dix-huitième siècle, où trop souvent s'attarde l'anecdote, sait aussi rappeler magnifiquement notre plus vivante histoire.

 

Château de Versailles, décembre 1917.