HISTOIRE LA TERREUR 1792-1794

NOTES, ÉCLAIRCISSEMENTS ET PIÈCES INÉDITES

 

XI. — LISTE EXACTE DES COMMISSAIRES DES SECTIONS QUI SIÉGÈRENT A L'HÔTEL DE VILLE, LE 10 AOÛT, AVANT NEUF HEURES DU MATIN.

 

 

La liste donnée dans l'Histoire parlementaire contient près de trois cents noms. Elle comprend non-seulement les commissaires qui siégèrent à la commune dans la nuit du 9 au 10 août, mais ceux qui furent nommés, les uns vingt-quatre heures, les autres quarante-huit heures après l'événement ; on y voit aussi figurer ceux qui successivement, pendant un mois ou deux, vinrent remplacer les commissaires dont les sections, pour une cause quelconque, révoquèrent les pouvoirs. La liste, que MM. Buchez et Roux ont reproduite, ne fut évidemment dressée que deux ou trois mois après le 10 août, car plusieurs commissaires y sont désignés comme députés à la Convention, et celle-ci ne s'assembla que le 22 septembre ; Pache y est qualifié de ministre de la guerre, et il ne fut nommé à cette fonction que le 3 octobre 1792.

Notre liste comprend tous les commissaires qui, rigoureusement, peuvent être supposés avoir siégé à l'Hôtel de Ville, dans la matinée du 10 août. Toutes les fois que nous avons pu avoir quelques doutes sur l'envoi des commissaires de telle ou telle section, nous les avons considérés comme présents. Nous avons cherché avec le plus grand soin les professions des individus dont nous donnons les noms la plupart de ces renseignements ne se trouvent pas sur la liste officielle : pour les rassembler, il nous a fallu recourir aux documents les plus divers.

N° d'ordre de la liste officielle des 48 sections.

N° de la liste donnée dans l'Hist. parlementaire, tome XVI.

Sections qui n'envoyèrent pas de commissaires.

2

38

Champs-Élysées

3

44

Roule

4

31

Palais-Royal

5

39

Place Vendôme

6

40

Feydeau

7

48

Grange-Batelière

9

45

L'Oratoire,

10

30

Halle-au-Blé

12

41

Place Louis XIV

13

42

Fontaine Montmorency

17

26

Marché des Innocents

20

32

Faubourg Montmartre,

23

43

Temple

32

46

Hôtel de Ville

33

20

Place Royale

35

47

Île Saint-Louis

37

33

Henri IV

40

37

Quatre-Nations

44

36

Thermes de Julien

47

34

Jardin des Plantes

 

NOMS DES COMMISSAIRES.

1 — 14 — Tuileries. Kinggen, bottier. Michaux[1] (Antoine), comédien. Benoist[2], (Augustin) épicier.

8 — 16 — Louvre[3]. Gillet. Neufville. Deltroit[4] (Antoine), ancien meunier.

11 — 28 — Postes. Desvieux[5] (Marc-Louis), avocat. Blondel. Guiraud[6].

14 — 5 — Bonne-Nouvelle. Boulay. Hébert[7], journaliste.

15 — 18 — Ponceau. Duffort[8]. Pantaclin. Caillieux[9] (Michel-François), fabricant de gaze.

16 — 2 — Mauconseil. Lhuillier[10] (Louis-Marie), homme de loi. Gomée, marchand de toiles. Bonhommé[11] (Guillaume), marchand mercier.

18 — 29 — Lombards. Poullenot, épicier. Louvet (Baptiste), avoué. Lelièvre, avoué.

19 — 13 — Arcis. Jérôme[12] (Nicolas), tourneur. Blerzy, marchand doreur. Jacot.

21 — 21 — Poissonnière. Faro[13] (Jean-Léonard), peintre. Pelletier[14], marchand de vins. Lhermina.

22 — 17 — Bondy. Daujon, artiste. Cailly[15], homme de loi. Romée.

25 — 5 — Montreuil. Bernard[16], ci-devant ministre du culte catholique, prêtre de Sainte-Marguerite. Chauvin, chapelier. Turlot[17], horloger.

24 — 25 — Popincourt. Arnaut. Ducausel. Tourasse, fabricant de faïence.

26 — 1 — Quinze-Vingts. Huguenin[18], ancien commis aux barrières. Boisseau, menuisier. Rossignol[19] (Jean-Antoine), ouvrier bijoutier.

27 — 8 — Gravilliers. Léonard Bourdon[20], instituteur. Martin[21], homme de loi. Truchon, défenseur officieux et homme de lettres.

28 — 23 — Faubourg Saint-Denis. Collonges[22]. Oger[23], maître de pension. Landragin, employé au bureau de l'Enregistrement.

29 — 9 — Beaubourg. Dumas. Simon. Legrand.

30 — 12 — Enfants-Rouges. Norry (Bernard), chirurgien. Dufour, épicier. Rigaud.

31 — 16 — Roi-de-Sicile[24]. Lenfant[25]. Colombeau[26], homme de loi. Rumel.

34 — 3 — Arsenal. Jolyberteau. Concedieu[27], contrôleur au Mont-de-Piété.  Barucaud.

36 — 26 — Notre-Dame. Franchet, musicien. Laiguillon. Cugny.

38 — 27 — Invalides. Leroy, instituteur. Thevenot, ancien marchand mercier Lepage.

39 — 10 — Fontaine de Grenelle. Xavier Audoin[28], prêtre-vicaire de Saint-Thomas-d'Aquin. Gaudichau, homme de loi. Rivailler.

41 — 4 — Théâtre-Français. Robert, journaliste. Simon[29] (Antoine), cordonnier.

42 — 7 — Croix-Rouge. Sigaud (Brutus). Delabarre (R.-G.), serrurier. Gobeau[30], homme de loi.

43 — 19 — Luxembourg. Faucon. Chaudé. Robin.

45 — 11 — Sainte-Geneviève. Bigant[31], peintre. Croutelle. Corel, ancien inspecteur des approvisionnements des Halles.

46 — 15 — L'Observatoire. Defraisne[32], graveur. Lefèvre[33], menuisier. Paris, architecte.

48 — 12 — Gobelins : Mercier[34], libraire, Rossignol, employé. Desliens, graveur.

 

RÉSUMÉ

Sur les quatre-vingt-deux individus qui se présentèrent à l'Hôtel de Ville dans la nuit du 9 au 10 août, comme commissaires de sections, et renversèrent la commune légale, onze périrent avec Robespierre, en thermidor an II :

Deltroit,

Pelletier,

Gobeau,

Desvieux,

Bernard,

Bigant,

Jérôme,

Turlot,

Mercier.

Faro,

Simon,

Trois autres périrent de mort violente, avant ou après le 9 thermidor

Hébert,

Lhuillier,

Rossignol.

La plupart des autres commissaires ne faisaient plus partie du conseil général de la commune au 9 thermidor (27 juillet 1794), ainsi qu'on peut s'en assurer dans l'Almanach national de l'an II.

 

 

 



[1] Michaux fut arrêté comme dantoniste le 22 germinal an II, et ne recouvra la liberté qu'après la chute de Robespierre, en vendémiaire an III.

[2] Benoist fut arrêté également comme dantoniste le 11 floréal an II, enfermé au Luxembourg, puis à Bicêtre, et remis en liberté le 23 vendémiaire an III.

[3] La liste imprimée par les auteurs de l'Histoire parlementaire donne les noms de trois autres individus Legray, Ballé, Bellefond, comme ayant été nommés dans la nuit du 9 au 10 août. Ce défaut complet de concordance prouve combien fut peu régulière la nomination des commissaires du Louvre.

[4] Deltroit fut guillotiné avec Robespierre en thermidor an II. (Sous le numéro 2.665.)

[5] Desvieux subit le même sort le même jour. (Sous le numéro 2.096). Il est qualifié d'ex-noble sur la liste imprimée des guillotinés, on ne sait trop pourquoi.

[6] Guiraud est qualifié, dans l'almanach de 1793 et dans le procès de Manuel, de membre du bureau de consultation des Arts-et-Métiers. C'était une place qu'il s'était fait donner à raison de ses services démagogiques.

[7] Hébert fut élu, quelque temps après le 10 août, substitut du procureur-syndic de la commune. Quoique dans le même emploi subalterne qu'occupait avant lui Danton, il joua un rôle très-important durant toute l'année 1793 et éclipsa son supérieur Chaumette, comme Danton avait éclipsé Manuel. Hébert fut guillotiné le 4 germinal an II, sous le numéro 505. Il est porté sur la liste des condamnés comme âgé de trente-cinq ans, natif d'Alençon, demeurant rue Neuve-de-l'Égalité, cour des Forges, section de Bonne-Nouvelle, avant la révolution employé comme contrôleur de contremarques au ci-devant théâtre des Variétés et maintenant de la République.

[8] Duffort fut l'un des membres du comité de surveillance au 2 septembre 1792.

[9] Caillieux fut destitué de ses fonctions municipales par arrêté du Comité de salut public en prairial an II. Il avait été arrêté quelques jours auparavant comme dantoniste.

[10] Lhuillier fut nommé accusateur public près le tribunal du 17 août, puis procureur-syndic du département de Paris ; impliqué dans le procès de Danton, il fut le seul acquitté parmi les accusés (16 germinal an II), mais le tribunal révolutionnaire ordonna qu'il serait détenu jusqu'à la paix. Conduit à Sainte-Pélagie, il s'y suicida le 16 floréal, juste un mois après son acquittement.

[11] Bonhommé fut arrêté comme dantoniste le 16 floréal an II, et ne recouvra sa liberté qu'après la chute de Robespierre, en vendémiaire an II.

[12] Jérôme périt le 10 thermidor an n, comme l'un des complices de Robespierre. Nous n'avons pas pu retrouver son nom sur la liste des guillotinés. Il n'en est pas moins constant qu'il subit le même sort que ses collègues de la commune de Paris, car nous avons retrouvé son extrait mortuaire. Il y est désigné comme né à Paris, demeurant rue Saint-Jacques-la-Boucherie, âgé de 44 ans.

[13] Faro fut guillotiné en thermidor an n. (Sous le numéro 2.673.) Il est désigné sur son extrait mortuaire comme né a Paris, demeurant faubourg Franciade (Saint-Denis) et âgé de 31 ans.

[14] Pelletier subit le même sort. (Sous le numéro 2.671.)

[15] Cailly fut l'un des membres du comité de surveillance au 2 septembre 1792. Il fut arrêté plusieurs fois dans le cours de la révolution, mais toujours relâché. Dans des procès-verbaux d'arrestation il signe Cally.

[16] Bernard est ce prêtre dont nous avons raconté le mariage et la mort dans notre Ier volume. — Il figure sur la liste des guillotinés sous le numéro 2.645.

[17] Turlot fut guillotiné en thermidor an II. (Sous le numéro 2.738.)

[18] Huguenin. Voir la notice que nous avons consacrée à ce président de la commune insurrectionnelle, dans ce volume.

[19] Rossignol figura comme l'un des juges improvisés du prétendu tribunal établi à la Force, les 2 et 3 septembre, et où vinrent siéger successivement plusieurs membres de la commune insurrectionnelle. Il devint généra ! mais destitué pour son incapacité et sa lâcheté, il rentra dans l'obscurité, d'où il ne sortit que pour se lancer dans de nouvelles intrigues démagogiques ; il fut déporté comme septembriseur aux îles Séchelles et ensuite à l'île d'Anjouan, où la misère et le climat pestilentiel le firent mourir peu de temps après son arrivée.

[20] Léonard Bourdon, après avoir été l'un des proconsuls les plus sanguinaires de la Convention, fut employé dans les hôpitaux militaires par l'empereur et mourut à Breslau, dans la campagne d'hiver qui précéda la paix de Tilsitt.

[21] Martin fut l'un des secrétaires de la commune insurrectionnelle le 10 août au matin. Il devint bientôt juge de paix de sa section, fut arrêté le 18 germinal an III, comme ayant participé aux émeutes que les Jacobins suscitèrent pour sauver Collot-d'Herbois, Billaud-Varennes, Barrère, Vadier, mais il fut mis en liberté quelque temps après.

[22] Collonges était un individu qui se fit nommer par la section du faubourg Saint-Denis sans y être connu, que cette section désavoua deux jours après et qui, malgré ce désaveu, persista a siéger plusieurs jours encore dans le sein de la commune insurrectionnelle.

[23] Oger se retira dès la matinée du 10 août, déclarant qu'il ne voulait pas participer à la suspension de la municipalité légale.

[24] La liste imprimée par les auteurs de l'Histoire parlementaire donne, pour la section du Roi-de-Sicile, les noms de trois autres individus (Pollet, Leclerc et Mareux) comme ayant été nommés dans la nuit du 9 au 10. Ainsi que nous l'avons déjà fait observer plus haut pour la section du Louvre, cette différence entre les noms des mandataires prouve combien fut entachée d'irrégularité la nomination d'un grand nombre de ces commissaires.

[25] Lenfant fut un des membres du comité de surveillance au 2 septembre.

[26] Colombeau fut longtemps secrétaire grenier de la commune de Paris. Il fut arrêté comme dantoniste, en floréal an n, et ne recouvra sa liberté qu'après la mort de Robespierre.

[27] Concedieu : voir la notice que nous avons consacrée à ce personnage dans ce volume.

[28] Xavier Audoin fut peu de temps après nommé commissaire du pouvoir exécutif dans la Vendée ; puis, adjoint au ministère de la guerre, il devint le gendre de Pache, fut arrêté avec lui, en floréal an II, et traduit, l'an m, devant le tribunal criminel d'Eure-et-Loir (Moniteur, n° 250 de l'an III), mais il fut acquitté comme tous ses coaccusés.

[29] Simon, le geôlier-instituteur de Louis XVII, périt avec Robespierre, le 10 thermidor ; il fut guillotiné sous le numéro 2.650.

[30] Gobeau périt avec Robespierre le 10 thermidor. Il figure dans la liste des guillotinés sous le numéro 2.648 et est qualifié ex-substitut provisoire de l'accusateur public près le tribunal criminel du département.

[31] Bigant périt avec Robespierre. Il figure sur la liste des guillotinés sous le numéro 2.667.

[32] Defraisne fut emprisonné en fructidor de l'an II comme adhérent de Robespierre, mais relâché peu de temps après.

[33] Lefèvre subit le même sort que Defraisne.

[34] Mercier périt avec Robespierre, en thermidor an II. Sur la liste des guillotinés, il figure sous le numéro 2.676 et est qualifié d'administrateur de la fabrication des assignats. C'était apparemment une place lucrative que ce démagogue subalterne s'était fait donner.