LA MAIN-D’ŒUVRE INDUSTRIELLE DANS L’ANCIENNE GRÈCE

 

CHAPITRE IX. — LES AFFRANCHIS.

 

 

L’État usait parfois de sa toute-puissance pour affranchir des esclaves privés[1], au lieu de se borner à affranchir les siens[2]. Telle fut la récompense octroyée par les Athéniens aux esclaves qui avaient combattu aux îles Arginuses[3]. Après Chéronée, on promit une faveur pareille à ceux qui contribueraient à la défense nationale ; mais la prompte signature de la paix empêcha l’exécution de la loi[4]. Pendant un siège qu’ils eurent à soutenir, les Rhodiens firent espérer la liberté aux esclaves qui montreraient le plus de vaillance[5]. Justin raconte que le tyran de Syracuse Agathocle enrôla en vue d’une expédition contre Carthage tous les esclaves qui avaient l’âge militaire, après leur avoir procuré la liberté[6]. Lors de la lutte suprême des Achéens contre Rome, Diæos leur chef prescrivit aux cités de la ligue de choisir chez elles 12.000 esclaves, de les affranchir, et de les envoyer en armes à Corinthe[7]. D’après Aristote, les Samiens, pour accroître le nombre des citoyens que les tyrans avaient par trop réduit, promurent à cette dignité tous les esclaves qui furent capables de verser cinq statères par tête[8]. On remarquera que ces mesures furent toujours adoptées dans des circonstances critiques. De plus, Diodore affirme qu’à Rhodes on eut soin d’indemniser les propriétaires qu’on privait ainsi de leurs esclaves, et il est probable qu’on suivit la même règle dans tous les cas analogues. Le maître, d’ailleurs, avait la faculté de renoncer à toute compensation pécuniaire. On a dit qu’alors la cité lui marquait peut-être sa reconnaissance en l’associant à l’acte d’affranchissement ; mais ce point reste bien douteux[9].

En temps normal, un esclave isolé pouvait acquérir la liberté, en signalant à la justice l’auteur d’un crime ou d’un délit. Quand l’esclave avait témoigné contre l’inculpé, l’accusateur, pour prix qu concours qu’il lui avait prêté, l’arrachait souvent à la servitude, et le maître n’avait pas le droit d’y faire obstacle. De là cette réflexion d’Antiphon : Habituellement on donne de l’argent aux dénonciateurs libres, et la liberté aux esclaves[10]. Parfois c’était de la loi elle-même que l’esclave recevait la liberté. Un décret de Kéos décide que tout individu qui exportera le vermillon de file ailleurs qu’à Athènes, perdra if la fois le navire et la cargaison ; le dénonciateur touchera la moitié du produit de la confiscation, si c’est un homme libre, et il sera déclaré libre, si c’est un esclave[11].

Certains actes politiques conféraient à l’esclave le même avantage. Une loi d’Ilion encourage le tyrannicide en ces termes : Si le meurtrier est un esclave, il jouira de tous les droits et sera créé citoyen. La cité lui allouera trente mines le jour même ou le lendemain, et, sa vie durant, une drachme par jour[12]. Peut-être des dispositions de ce genre se retrouvaient-elles dans les autres législations helléniques[13].

A part ces exceptions, l’esclave n’avait à attendre sa liberté que du bon plaisir de son maître. On s’est demandé s’il ne pouvait pas le contraindre à la lui vendre, quand il avait de quoi la payer. Mais les textes sont loin d’avoir cette portée[14]. Au surplus, qui aurait empêché un maître récalcitrant de se soustraire à cette obligation, soit en élevant ses exigences au-dessus des ressources de l’esclave, soit en s’appropriant le pécule que l’esclave destinait à son rachat ? L’esclave n’était autorisé à secouer le joug de son maître que lorsqu’il était victime de vexations intolérables. Pourtant, même dans cette extrémité, il ne devenait pas libre ; son maître était simplement forcé de le céder à autrui[15].

Quand on voulait affranchir un esclave, on n’avait qu’une formalité à remplir, c’était de déclarer qu’on l’affranchissait. On faisait cette déclaration oralement ou par écrit, et il n’était pas rare que pour plus de sûreté On y associât sa femme, ses enfants ou ses héritiers. Si l’on choisissait le premier procédé, on manifestait son intention en public, afin que les témoins fussent aussi nombreux que possible. Voilà pourquoi l’acte était fréquemment énoncé devant l’assemblée du peuple[16], devant un tribunal[17], en plein théâtre, dans les jeux[18], ou au milieu d’une cérémonie religieuse[19]. Mais, en général, on aimait mieux qu’il laissât sa trace dans une pièce authentique. Tel individu consignait dans son testament le nom de l’esclave qu’il gratifiait de la liberté. C’était là une pratique si commune que tous les philosophes dont Diogène Laërce relate les dernières volontés eurent soin de s’y conformer. Parfois l’affranchissement s’opérait au moyen d’un contrat de vente, conclu non pas avec l’esclave, puisque celui-ci n’avait pas de capacité juridique, mais avec un tiers chargé de le représenter ; cette personne était censée acquérir l’esclave pour soi ; mais en réalité elle ne l’acquérait que pour lui donner aussitôt la liberté[20]. Ici encore la teneur du contrat fournissait la preuve qu’il y avait eu affranchissement.

Ces actes n’étaient pas à l’abri de toute chance de destruction ou d’altération, et, quand un accident pareil avait lieu, l’état civil de l’affranchi était fort précaire. Ainsi, lorsque les tuteurs de Démosthène eurent supprimé le testament de son père, il dut s’appuyer sur le témoignage suspect de sa mère et de ses servantes pour établir que l’esclave Milyas avait été réellement affranchi par le défunt[21]. Il y avait bien une manière de conjurer cet inconvénient, c’était de rédiger l’acte en plusieurs exemplaires que l’on confiait à des mains différentes, comme fit Théophraste pour son testament. Mais cette précaution semblait insuffisante, et on fut conduit à en imaginer plusieurs autres.

La plus simple consistait à graver sur la pierre la déclaration du maître ; c’était aussi la plus usuelle, car les documents rie celte espèce abondent dans l’épigraphie. Parfois l’acte était déposé dans un temple et confié à la garde du dieu[22]. Ailleurs il était remis aux magistrats de la cité, ou même passé devant eux[23]. On a des inscriptions officielles qui énumèrent, mois par mois, des noms d’affranchis accompagnés du nom de leurs anciens maîtres[24]. Dans certains pays il était de règle que l’esclave, au moment de sa libération, versât à la caisse municipale une somme fixe ; la mention de cette recette sur les registres publics attestait le changement qu’avait subi sa situation[25].

La Grèce centrale adopta un mode d’affranchissement tout à fait original[26]. Le maître cédait l’esclave à une divinité, sous forme d’offrande ou de vente. L’esclave tombait dès lors en possession du dieu ; il était qualifié ίερός et il semblait se confondre avec les hiérodules, c’est-à-dire avec les serviteurs attachés au temple. Mais ce n’était là qu’une apparence. Dans le contrat conclu avec le dieu, le maître avait spécifié qu’il lui abandonnait son esclave, pour qu’il fût libre, et le dieu renonçait immédiatement à son droit de propriété. Cette combinaison avait l’avantage de ménager à l’affranchi la protection du dieu, et d’assimiler à un sacrilège toute atteinte à sa liberté.

C’est dans les inscriptions de Delphes et des pays voisins qu’on aperçoit le mieux comment fonctionnait cette institution. Le maître se rend au temple qu’il a choisi ; là il vend son esclave au dieu, et le prêtre lui en délivre le prix. Mais dans ce marché le prêtre n’est qu’un intermédiaire, et l’argent qu’il verse, il l’a reçu au préalable de l’esclave lui-même. On passe un acte plus ou moins détaillé, où sont consignées les conditions de l’affranchissement, et on a bien soin d’y ajouter les noms des témoins du contrat ; ce sont des prêtres, des magistrats civils, et quelques particuliers[27].

Partout on multipliait les précautions pour que la liberté de l’affranchi ne courût dans l’avenir aucun risque. Dans une loi de Gortyne on lit ces mots : Que nul ne réduise l’affranchi en servitude. Si un abus pareil se produit et que les garants de l’affranchi le reprennent de force, le cosme des étrangers n’en exigera pas la restitution. Si les garants ne le reprennent pas, chacun d’eux paiera à l’affranchi cent statères, plus le double de la valeur des biens qui lui auraient été saisis. ne paient pas ces dommages-intérêts, on les portera au double, et on y joindra une amende au bénéfice du Trésor[28].

Dans la Grèce centrale on ne se contentait pas de placer l’affranchi sous la sauvegarde du dieu qui était censé l’avoir acheté, ou, comme à Stiris, de tous les dieux de la cité[29] ; on faisait encore appel à l’intervention de tous les gens de bonne volonté, et on les assurait d’avance que leur zèle ne les exposerait à aucun procès ni à aucune peine. Il y avait d’ailleurs des personnes pour qui c’était une obligation stricte de prêter leur concours à l’affranchi menacé ; c’étaient le vendeur et les cautions qu’il avait constituées[30]. S’ils se dérobaient à ce devoir, ils étaient passibles, au profit de l’affranchi, d’une amende proportionnelle à la rançon. La plupart des documents delphiques, au lieu de stipuler la Somme à payer, renvoient simplement au tarif établi par la loi[31]. Mais l’un d’eux nous apprend que l’amende légale était double du prix de l’esclave[32]. Toutefois les parties avaient la faculté d’adopter un tarif différent. Nous connaissons par exemple des amendes qui dépassent la rançon de moitié[33], et d’autres qui sont six fois plus fortes[34]. Il n’est pas question à Delphes de celle qui frappait l’individu coupable d’un attentat contre la liberté de l’affranchi ; il est à présumer qu’on lui appliquait les règles du droit commun. En revanche, c’est lui seul que visent les documents de Daulis, d’Elatée, de Stiris et de Tithora. L’amende ici est très variable. A Élatée, elle parait avoir été fixée uniformément à 60 mines, quelle que fût la rançon[35]. A Stiris, elle est tantôt de 30, tantôt de 60 mines[36]. A Daulis elle est de 10 mines[37]. A Tithora on rencontre les chiffres suivants :

Rançon :

20

mines

.....

Amende :

60

mines

5

.....

60

10

.....

10

10

.....

30

3 000

deniers

.....

4 000

1 000

.....

2 000

[38]

Dans ces villes l’amende n’est pas attribuée l’affranchi ; elle est partagée par moitié entre celui qui l’a défendu, et le dieu à qui il a été vendu.

Le maître qui affranchissait son esclave pouvait l’assujettir aux conditions qu’il lui plaisait.

Il lui était loisible de le dispenser de toute rançon. Quand Platon dit dans son testament qu’il libère Artémis[39], il est évident qu’il le fait à titre gracieux. Théophraste agit de même à l’égard de Toton, Timon et Parménon[40]. Straton traite semblablement Diophantos, Dioclès, Abous et Dromon[41]. Lycon ne se borne pas à affranchir Charès ; il lui lègue en outre deux mines et ceux de ses ouvrages qui ont été publiés[42]. Dans beaucoup d’inscriptions qui ont trait à des consécrations d’esclaves aux dieux, il n’est nullement question d’une somme d’argent à paver[43]. Mais, à en juger par les renseignements que nous fournit l’épigraphie, ces actes de générosité étaient peu communs. La plupart des textes delphiques indiquent en effet quel est pour chaque esclave le prix de sa liberté. On procède d’une façon identique à Naupacte, à Chaléion, à Tithora, à Stratus d’Acarnanie et en bien d’autres lieux[44]. Même quand l’esclave est l’objet d’une offrande, et non d’une vente à la divinité, il arrive parfois qu’un prix soit mentionné[45]. Aristote enjoint à ses héritiers d’affranchir plus tard certains de ses esclaves à leur juste valeur[46], et il est visible que Lycon libéra contre espèces plusieurs des siens[47].

L’esclave n’était pas toujours en mesure d’acquitter sur l’heure la somme convenue ; il fallait alors l’autoriser à échelonner ses paiements. Parmi les affranchis de Delphes, nous en apercevons un qui s’engage à payer trois mines en six ans, soit une demi-mine par an[48], un autre qui obtient pour treize mines un délai de treize ans[49], un troisième qui donne en à compte la moitié du prix de rachat, et qui pour le solde a le droit d’attendre l’année qui suivra la mort de son maître[50]. J’imagine qu’il en est ainsi chaque fois que le maître n’avertit pas qu’il a tout reçu en bloc[51]. Si dans l’intervalle l’affranchi se conduisait bien, on le déchargeait volontiers de la somme dont il était encore débiteur[52].

Le maître restreignait ou étendait à son gré la liberté de son affranchi. Tantôt elle était pleine et entière, et alors l’affranchi pouvait faire ce qu’il voulait, et aller où il voulait[53]. Tantôt elle était enfermée dans des limites plus ou moins étroites, qui dépendaient, exclusivement du caprice de l’affanchissant.

Les réserves formulées à ce sujet dans les documents sont extrêmement variées. La plus onéreuse de toutes était celle de la παραμονά. On entendait par là l’obligation pour l’affranchi de demeurer auprès du maître ou de telle personne que le maître désignait. Le terme de ce séjour forcé n’était pas toujours connu à l’avance. Il était incertain, quand il était subordonné à un incident éventuel, comme la conclusion d’un mariage dans la famille du patron[54], ou à un événement naturel et nécessaire, dont il était impossible de prévoir la date, comme un décès[55]. Il y avait des cas où celte période intermédiaire entre la liberté complète et l’esclavage ne durait pas moins de six, huit, et dix ans[56]. Il est même à présumer que ce délai était souvent dépassé, quand l’affranchi était soumis à celte servitude, non seulement pendant la vie du maître, mais encore pendant une partie de la vie de son fils[57]. Par contre, il pouvait arriver qu’on rompit avant le moment fixé ses derniers liens, soit gratuitement[58], soit en échange d’une indemnité pécuniaire[59], soit en lui permettant de se substituer un esclave acheté à ses frais[60].

La παραμονά était parfois une manière de garantir le paiement intégral de la rançon, quand on avait fait crédit à l’affranchi[61]. Parfois aussi c’était une charge qui s’ajoutait à la rançon, ou qui nième la remplaçait, lorsqu’elle présentait ce caractère, l’affranchi, au lieu de payer sa liberté avec de l’argent, la payait avec du travail. Tout le temps en effet qu’il restait dans la maison de son ancien maître ou de son subrogé, il était contraint de travailler pour lui[62]. D’ordinaire il remplissait à ses côtés les fonctions de domestiques ; mais, s’il pratiquait déjà un métier industriel, il continuait tic l’exercer pour son maître, quand ce dernier avait besoin de ses services. Ainsi Sosos, dont la profession nous est inconnue, doit exécuter pour Callixénos tout l’ouvrage que celui-ci lui commandera, et même dresser les jeunes esclaves qu’il lui enverra[63]. Sosas apprendra le métier de foulon, et lorsqu’il le saura, il devra manipuler pour rien les étoffes de la famille de Dromocleidas[64]. Un médecin garde la faculté de réclamer pendant cinq ans le concours de son affranchi Dromon, à condition de le nourrir, de le loger et de le vêtir[65].

Des sanctions très énergiques accompagnaient ces prescriptions. Si l’affranchi prenait sur lui de quitter son maître avant l’heure et sans avoir payé le dédit stipulé[66], il retombait presque toujours dans la servitude. Sa paresse ou sa négligence entraînaient souvent la même punition[67]. On ne tolérait de sa part qu’une excuse, la maladie, et pour peu qu’elle durât, on prolongeait d’autant la παραμονά[68].

Le maître avait un droit de correction discrétionnaire sur l’affranchi en faute[69]. Il pouvait le frapper, l’enchaîner, le traiter aussi durement qu’il voulait, sans jamais s’exposer même à une amende ou à des dommages-intérêts[70] ; mais il ne pouvait pas le vendre[71]. Cette restriction, il est vrai, n’est formulée que dans un petit nombre d’actes. Je crois pourtant, avec M. Foucart, qu’elle était partout sous-entendue ; sans quoi la liberté de l’affranchi aurait été un peu trop à la merci des caprices du maître. Un acte énonce que l’affranchi sera châtié comme une personne libre[72], c’est-à-dire avec les atténuations que comporte cette qualité. Plusieurs refusent au maître la faculté d’apprécier à lui seul si la conduite de l’affranchi est ou non sans reproches, quand il y a contestation sur ce point, on s’en remet à la décision de trois arbitres[73].

Le maître enfin pouvait, sinon dépouiller l’affranchi de ses biens pendant la vie de ce dernier, du moins en régler le sort après sa mort. Voici une femme à qui l’on confère d’emblée la plénitude de la liberté. Si elle meurt sans enfants, tout ce qu’elle possède reviendra à son maître et, par une conséquence logique, on lui défend de rien aliéner de son vivant. Il en sera de même de ses enfants, s’ils meurent sans postérité[74]. Cette incapacité n’était point particulière aux femmes, elle s’étendait aussi aux hommes[75] Dans certains cas, les droits du maître à la succession de l’affranchi dépourvu d’enfants sont également reconnus à ses héritiers[76]. C’est seulement quand l’affranchi a une famille, que le maître cesse d’élever des prétentions sur son avoir ; encore exige-t-on que les enfants soient nés depuis le jour où l’esclavage a cessé[77]. On ne veut pas non plus que l’affranchi s’en procure par l’adoption[78]. S’il lui arrive d’enfreindre ces dispositions, l’acte est nul, et parfois même l’affranchissement est révoqué[79].

Quelques individus cependant se montraient moins intéressés. Ainsi Cléon déclare que l’affranchi Nicanor sera le maître absolu de tous ses biens[80], ce qui implique forcément le droit de les céder à des tiers, et on ne voit pas qu’il se réserve de les revendiquer le jour où les enfants de Nicanor viendraient à disparaître. D’autres vont plus loin : non contents de reconnaître à l’affranchi la propriété complète de sa modeste fortune, ils lui lèguent la leur[81], à charge de leur rendre les devoirs funèbres. Ce trait prouve que ces gens-là étaient sans enfants, et peut-être sans parents.

Toutes ces clauses se retrouvaient, sous une forme plus ou moins précise, dans la Grèce entière. Les documents épigraphiques qui mentionnent l’obligation de la παραμονά sont innombrables. Théophraste affranchit par testament Manès et Callias, mais en ajoutant qu’ils ne seront tout à fait libres que dans quatre ans, s’ils ont bien travaillé et s’ils n’ont mérité aucun reproche[82]. Lycon impose pareillement à Agathon deux ans de services, et quatre ans à Ophélion et Posidonios, avant leur libération définitive[83]. Il était indispensable d’énoncer cette condition, si l’on voulait en bénéficier ; car elle n’allait pas de soi. Mais ce qui allait de soi, c’étaient les droits du maître sur l’héritage de l’affranchi. Nicostratos n’avait pas testé en faveur de Ctésis et de Cranaos ; pourtant, quand il mourut sans enfants, ceux-ci réclamèrent ses biens, en alléguant qu’il avait été leur affranchi ; et si finalement ils y renoncèrent, ce fut uniquement parce qu’ils ne purent établir ce point[84].

On a soutenu qu’à défaut du maître, ses héritiers étaient aptes à succéder ; mais le texte invoqué à l’appui de cette opinion n’est pas probant. Voici en effet le passage. Lorsqu’un individu ne laisse point d’enfants, le législateur appelle à la succession ses plus proches parents. Il convient donc que je recueille les biens de l’affranchi ; car, étant moi-même le parent le plus proche de ceux qui lui ont octroyé la liberté, il est juste que j’exerce sur lui les prérogatives d’un maître[85]. C’est là non pas l’affirmation positive de l’existence d’une loi pareille, mais un raisonnement par analogie, qui est loin d’avoir la même valeur[86].

Les lois helléniques assimilaient partout l’affranchi au métèque, c’est-à-dire à l’étranger domicilié, et la chose était assez naturelle, puisque les esclaves étaient presque tous étrangers, par leur naissance, à la ville qu’ils habitaient. Entre ces deux catégories de personnes il y avait parité de droits et de charges[87]. La principale différence portait sur la question du patron. L’affranchi avait nécessairement un patron, comme le métèque ; mais il n’avait pas, comme ce dernier, la faculté de le choisir à sa guise. Il fallait qu’il choisît son ancien maître[88].

Envers lui il était tenu à des obligations que la loi avait soin de définir. C’était d’abord l’ensemble des servitudes auxquelles l’avait astreint l’acte d’affranchissement, et l’on sait combien l’esprit ingénieux des Grecs se plaisait à les multiplier. C’étaient peut-être aussi des marques de respect et de déférence, qui restaient probablement un peu vagues et par suite un peu arbitraires. Platon les précise en ces termes : u L’affranchi ira trois fois par mois chez son patron lui offrir ses services, dans la mesure qu possible et de la justice. Il ne conclura rien au sujet de son mariage, sans son agrément. Il ne pourra pas s’enrichir plus que lui, et en ce cas le surplus sera attribué à son maître[89]. » Il y a lit sans doute des détails de son invention ; mais le fond est vrai, en ce sens que l’affranchi, même devenu entièrement libre, continuait d’avoir tout au moins des devoirs moraux à remplir.

L’arme dont le patron disposait à Athènes pour défendre ses droits était l’action appelée άποστασίου δίκη. D’après un lexicographe, elle était donnée au patron contre l’affranchi qui se détachait de lui, ou qui prenait un autre patron, ou qui ne faisait pas ce que la loi lui prescrivait. Elle rentrait dans la juridiction du polémarque. Si l’affranchi succombait, il était ramené à l’état d’esclave. Si, au contraire, il était renvoyé des lins de la plainte, il acquérait la pleine liberté[90]. Ces procès étaient très fréquents, et l’épigraphie en a conservé la trace[91]. L’usage était que l’affranchi vainqueur consacrât à Athéna une coupe en argent, d’une valeur uniforme de cent drachmes. Nous avons beaucoup d’inscriptions relatives à ces sortes d’ex-voto. Nous en avons aussi où l’auteur de l’offrande est un patron qui a gagné sa cause dans une instance semblable[92].

Les affranchis, n’étant pas citoyens[93], n’étaient pas aptes à posséder des immeubles, à moins qu’un décret du peuple leur eût conféré le droit d’acquérir des terres et des maisons[94]. Il leur l’allait donc, pour vivre, ou bien travailler les terres d’autrui[95], ou bien se livrer au commerce et à l’industrie. Le malheur : est que les textes ne distinguent pas toujours avec assez d’exactitude les affranchis et les métèques, en sorte qu’on est souvent exposé à les confondre[96]. Voici pourtant des personnes qU’il est légitime de ranger dans la première catégorie.

D’abord des nourrices. Les inscriptions en signalent plusieurs dont le nom trahit une origine servile[97] ; mais nous ignorons si elles ont rempli cet office avant ou après leur affranchissement. Beaucoup de femmes se faisaient ouvrières en lainages[98], parce qu’elles s’étaient déjà accoutumées à cette besogne pendant qu’elles servaient leurs maîtres. Nous en connaissons une qui vend des vêtements, peut-être confectionnés par elle[99], et une seconde qui travaille le cuir[100]. D’autres sont marchandes de sésame, d’encens, de sel[101], cabaretières[102], revendeuses[103], gérantes d’immeubles[104], entremetteuses[105], joueuses de cithare ou de flûte[106], acrobates[107], courtisanes[108]. Il en est enfin qui n’ont pas de profession propre, et qui partagent simplement celle de leur mari[109] quand elle n’exige pas une compétence spéciale. En somme, les affranchies n’avaient pas de nombreux débouchés au dehors, et il n’était pas rare qu’elles fussent réduites, faute de mieux, à mener une vie d’aventures. On en voyait même qui, à l’âge de la vieillesse, s’estimaient très heureuses de retourner dans la maison de leur patron, et d’y reprendre l’existence d’autrefois. Aussi quelques-unes de ces lemmes devaient-elles considérer la παραμονά plutôt comme un bien que comme un mal ; car si elle entravait leur liberté, elle les mettait en revanche à l’abri du besoin.

Les hommes étaient plus favorisés, et il est manifeste qu’une multitude de métiers leur étaient accessibles. Je ne parle pas de ceux qui faisaient un petit commerce de détail ou qui trafiquaient avec l’étranger[110], ni de ceux qui avaient la bonne fortune de s’enrichir dans les opérations de banque ; je parle seulement de ceux qui se bornaient à la pratique des arts manuels. Les plus humbles étaient de simples manœuvres, des ouvriers non qualifiés, que l’on englobait sous le terme générique de μισθωτοί[111]. Dans les documents épigraphiques on note des noms de portefaix[112], d’âniers[113], de muletiers[114], de cuisiniers[115], de domestiques[116], de boulangers[117], de corroyeurs[118], de tanneurs[119], de cordonniers[120], de forgerons[121], de doreurs[122]. Les noms des potiers Brygos, Colchos, Doris, Skythès paraissent convenir à d’anciens esclaves. Les comptes de travaux publics énumèrent fort peu d’affranchis ; je présume cependant qu’à Éleusis le tailleur de pierres Kyprios, le ravaleur Syros et le maçon Aigyptios étaient des esclaves libérés[123]. C’était encore un affranchi que, Milyas, le contremaître de Démosthène[124], et il y en avait, je pense, beaucoup comme lui. L’affranchi Pasion était à la fois banquier et armurier. Quand il se retira des affaires, il loua sa banque et sa fabrique à son affranchi Phormion, moyennant 16.000 francs environ par an, et plus tard il alla jusqu’à lui léguer sa femme par testament, en même temps qu’il lui confiait la tutelle de son fils mineur[125].

Il ne faudrait pas croire que l’affranchi eût toujours le choix de sa profession ; il ne l’avait guère que lorsqu’il n’en connaissait aucune, et alors il arrangeait sa vie comme il pouvait. Mais dans bien des cas il en était autrement. Quand le maître était un industriel, il voulait naturellement que ses esclaves l’aidassent dans sa tache, et ceux-ci, une fois libres, tiraient parti pour eux-mêmes de l’habileté qu’ils avaient acquise à son service. Si Phormion, dit un Athénien, eût été acheté par un cuisinier ou par quelque artisan, il eût appris le métier de son maître, et serait aujourd’hui fort loin de sa fortune présente. Mais il fut acheté par notre père qui était banquier, qui lui apprit à lire et écrire, et mit à sa disposition des capitaux considérables. C’est ainsi qu’il s’est enrichi[126]. Il n’y avait pourtant pas de règle absolue à cet égard, comme le prouve l’exemple de ce Sosas que son patron affranchit en stipulant qu’il irait en apprentissage chez un foulon[127].

Le maître d’ailleurs trouvait son avantage à ce que son affranchi, alors même qu’il jouissait de toute sa liberté, fût en état de gagner sa vie et de faire fortune : d’abord parce que, si cet homme tombait dans la misère, son patron avait l’obligation morale de l’assister, et en outre parce que, s’il prospérait, le patron avait quelque chance d’hériter de lui. Il est même possible qu’il s’associât parfois à ses entreprises, soit d’une façon directe et ostensible, soit par des avances de fonds. Moins que tout autre, il avait à craindre ses fourberies ; car la δίκη άποστασίου qui, on l’a vu, pouvait entraîner la mise de l’affranchi en servitude, était pour le patron la plus efficace de toutes les garanties[128]. Les documents, il est vrai, ne nous autorisent pas il affirmer qu’il y ail eu fréquemment de pareilles relations d’intérêt entre patrons et affranchis, mais la chose est très vraisemblable.

 

 

 



[1] Voir Alfred CROISET, De l’affranchissement des esclaves pour faits de guerre (Mélanges Weil, p. 67-72).

[2] Exemple d’un affranchissement en masse des esclaves publics : MICHEL, 518, l. 26 (Pergame en 133 av. J.-C.).

[3] SCHOL. D’ARISTOPHANE, Grenouilles, 786. Cf. XÉNOPHON, Helléniques, I, 6, 24. Il n’est pas sûr que la même chose ait eu lieu lors de la bataille de Marathon (G. FOUCART, De libertorum conditione apud Athenienses, p. 2).

[4] DION CHRYSOSTOME, XV, p. 265 (Dindorf).

[5] DIODORE, XX, 84.

[6] JUSTIN, XXII, 4, 5.

[7] POLYBE, XL, 2, 3.

[8] ARISTOTE, fragm. 575 (Rose).

[9] CIGS, III, 109. G. FOUCART, p. 10-11. M. Dittenberger suppose que le peuple d’Élatée est intervenu ici pour servir de κύριος à Ménécléia, qui ne devait pas avoir de parents.

[10] ANTIPHON, V, 33 ; LYSIAS, V, 5 ; VII, 16.

[11] CIA, II, 546, l. 19-20.

[12] IJ, II, p. 26.

[13] G. FOUCART, p. 9.

[14] PLAUTE, Casina, 206-208 ; DION CHRYSOSTOME, XV, p. 26 :3 ; BEAUCHET, II, p. 470-471.

[15] SCHÖMANN et LIPSIUS, Der attische Process, p. 625-627.

[16] CIGS., III, 63 (Daulis), 125 (Élatée).

[17] ISÉE, fragm. 62 (Didot).

[18] ESCHINE, III, 41. IGI, III, 336. DI, 4702. A Athènes on finit par défendre d’interrompre de la sorte les représentations dramatiques (ESCHINE, 44).

[19] SUIDAS, Κράτης c.

[20] Sur la πράσις έπ' έλευθερία, voir G. FOUCART, p. 14.

[21] DÉMOSTHÈNE, XXIX, 25-26.

[22] DI, 1346 et suiv. ; American Journal of Archælogy, XI, p. 49.

[23] CIGS., III, 375 ; AM, VI, p. 304.

[24] DI, 1451 ; AM, XVI, p. 50 ; BCH, XXI, p. 160.

[25] DI, 1448, 149, 1450, 1461 ; 1895, p. 481 et 484 ; Museo Italiano, III, p. 692, n° 133.

[26] On le retrouve aussi, tuais plus rarement, en Laconie (MICHEL, 1075, 1076, 1077), en Messénie (1388), en Élide (1389) et en Arcadie (1390).

[27] Pour tout ceci voir P. FOUCART, Mémoire sur l’affranchissement des esclaves d’après les inscriptions de Delphes (Paris, 1867).

[28] IJ, I, p. 403 et 493.

[29] DI, 1547.

[30] WF, 20 = DI, 1685.

[31] WF, 5 = DI, 1710.

[32] WF, 43 (DI, 1708) (la rançon est de deux mines).

[33] WF, 341 (DI, 2000), 341 (2012), 384 (2049), 407 (2012), 415 (2080).

[34] WF, 32 (1097), 33 (1698) ; DI, 2287.

[35] DI, 1532, 1532 b, c, d.

[36] DI, 1415, 1547 (la part du dieu a dû être aussi de quinze mines), 1518, 1548 b.

[37] DI, 1523.

[38] DI, 1555, 1555 b, c, d, e, f.

[39] DIOGÈNE LAËRCE, III, 42.

[40] DIOGÈNE LAËRCE, V, 5.

[41] DIOGÈNE LAËRCE, V, 63.

[42] DIOGÈNE LAËRCE, V, 73.

[43] DI, 382 et suiv., 421, 420, 430, 497-501, 1523, 1540.

[44] DI, 1425-1427, 1174, 1477, 1555 ; BCH, XVII, p. 451.

[45] CIGS., III, 375, 477.

[46] DIOGÈNE LAËRCE, V, 15. Peut-être les mots κατ' άξίαν signifient-ils : S’ils le méritent.

[47] V, 72.

[48] WF, 202.

[49] WF, 244.

[50] WF, 84.

[51] La formule de la quittance est : Καί τάν τιμάν έχει πάσαν.

[52] DIOGÈNE LAËRCE, V, 72.

[53] WF, 30.

[54] WF, 306. GIGS, I, 3313.

[55] WF, 21, 24, 38, 50, 51, 54, 56, 61, etc. GIGS, III, 310 ; BCH, XVII, p. 431 ; DI, 3300 ; MICHEL, 1390 B.

[56] Six ans (WF, 138), huit ans (167, 313, 350), dix ans (99, 146 ; GIGS, I, 3083 ; DI, 2209).

[57] WF, 82.

[58] WF, 86 ; DI, 2137.

[59] WF, 231 ; DI, 2192, 2200, 2219.

[60] WF, 52.

[61] WF, 202, 213.

[62] Rapprochement de la παραμονά de l’έργασία dans WF, 86.

[63] WF, 213.

[64] WF, 239.

[65] WF, 234.

[66] Dédit stipulé, dans WF, 146, et dans DI, 2219.

[67] WF, 189.

[68] WF, 167, 213.

[69] WF, 38, 42, 51, 32, 66, 83, 102, 239

[70] DI, 2210. 2156. On répète à satiété que le maître en ce cas sera άνυπόδικος πάσας καί ζαμίας (WF, 65).

[71] WF, 38. DI, 2138, 2159, 2163, 2186, 2189, 2223.

[72] WF, 49.

[73] WF, 21, 31, 167, 193, 209, 407.

[74] WF, 19. Cf. 94.

[75] WF, 31, 432.

[76] WF, 53.

[77] WF, 226 ; DI, 2197.

[78] DI, 2202.

[79] WF, 213.

[80] DI, 2197.

[81] DI, 2150. Ibid., 2178, 2337.

[82] DIOGÈNE LAËRCE, V, 55.

[83] DIOGÈNE LAËRCE, V, 73.

[84] ISÉE, IV, 9.

[85] PS.-ARISTOTE, Rhétorique à Alexandre, I, 16.

[86] Cf. G. FOUCART, p. 56. M. Caillemer défend l’opinion contraire (Le droit de succession légitime à Athènes, p. 136).

[87] Voir sur les métèques, chapitre précédent. — Distinction purement nominale de ces deux classes dans MICHEL, 402, l. 10 (Kéos), et dans IJ, I, p. 24, l. 44-45 (Éphèse).

[88] Deux actes delphiques ordonnent à l’affranchi de choisir son ancien maître ; l’un d’eux ajoute même : les descendants du maître (DI, 2172, 2251). Mais il semble que la précaution fût superflue ; car c’était là un principe de droit public. Si l’affranchissant était lui-même un affranchi, on suppose que son patron était aussi celui de ses propres affranchis. Dans  CIGS, I, 1778, l’affranchie sera libre, après la mort de son maître, de prendre qui elle voudra.

[89] PLATON, Lois, XI, p. 915 A.

[90] HARPOCRATION, Άποστασίου. M. Th. Reinach, se fondant sur un passage d’Aristote (Rhétor., III, 8), pense que même dans ce cas l’affranchi avait toujours un patron, mais qu’il pouvait désormais le choisir à son gré (Revue des éludes grecques, X, p. 112).

[91] Voir les plaidoyers énumérés dans MEIER, SCHÖMANN ET LIPSIUS, Der attische Process, p. 620.

[92] CIA, II, p.141 et suiv. ; IV, 2, p. 185 et suiv. Cf. G. FOUCART, p. 62-67.

[93] DION CHRYSOSTOME, XV, p. 264 (Dindorf) ; Cf. DÉMOSTHÈNE, XXXVI, 6.

[94] Voir mon livre sur La propriété foncière en Grèce, p. 144 et suiv.

[95] Dans les inscriptions beaucoup d’affranchis sont des γεωργοί.

[96] La même raison empêche d’évaluer, même approximativement, le nombre des affranchis dans un État quelconque de la Grèce.

[97] CIA, II, 3522, 4037, 4050, 4130.

[98] CIA, II, 772, A, col. II, l. 9 ; 773, A, col. II, l. 18, 30 ; 174, l. 6 ; IV, 2, 768 c, col. I, l. 6, col. Il, l. 7, 24 ; 772 b, A, col. I, l. 12, col. II, l. 12, 13, col. I, l. 18, 26, col. II, l. 26 ; 173 b, col. I, l. 13, col. II, l. 7, 16, 19, col. III, l. 33.

[99] CIA, II, 3630. Je crois que c’est une affranchie, à cause de son nom (Έλεφαντίς).

[100] CIA, II, 776, col. I, l. 3.

[101] CIA, II, 39 :32 ; IV, 2, 768 c, col. 1I, l. 13 ; 776 c, B, l. 2-4.

[102] Dans ARISTOPHANE (Grenouilles, 569) une cabaretière dit qu’elle a Cléon pour προστάτης.

[103] CIA, II, 768, l. 16.

[104] ISÉE, VI, 19-20.

[105] Il n’est pas sûr que l’Antigona du plaidoyer d’Hypéride contre Athénogène soit une affranchie ; mais c’est très probable.

[106] CIA, II, 773, A, col. II, l. 20 ; WF, 177. Une τεχνίτις est affranchie dans DI, 2134, 2177.

[107] CIA, II, 4112.

[108] DÉMOSTHÈNE, LIX, 10-20.

[109] CIA, II, 773, A, col. II, l. 10 et suiv. ; IV, 2, 769, col. II, l. 7 et suiv.

[110] CIA, II, 773, A, col. II, l. 22, 834 b (add.), col. I, l. 70.

[111] CIA, II, 769, col. II, l. 4.

[112] CIA, IV, 2, 773 b, l. 25 ; 775 h, col. III, l. 9.

[113] CIA, IV, 2, 772 b, A, col. II, l. 3.

[114] Ibid., l. 16 ; B, col. I, l. 5.

[115] CIA, IV, 2, 775 b, col. II, l. 4, col. III, l. 30.

[116] CIA, IV, 2, 768 c, col. III, l. 11.

[117] CIA, II, 772, B, col. I, l. 5.

[118] II, 772, B, col. I, l. 14 ; 773, A, col. II, l. 43 ; IV, 2, 776 c, A, l. 9.

[119] CIA, IV, 2, 776 c, A, l. 5.

[120] IV, 2, 772 b, A, col. I, l. 24.

[121] IV, 2, 768 c, col. I, l. 10-11.

[122] IV, 2, 772 b, B, col. I, l. 13.

[123] CIA, II, 834 b (add.), col. I, l. 49, col. II, l. 5 et 53.

[124] DÉMOSTHÈNE, XXVII, 19.

[125] Idem., XXXVI, 4 et 8.

[126] DÉMOSTHÈNE, XLV, 71-72.

[127] WF, 39.

[128] G. FOUCART, p. 73.