RICHELIEU ET LA MONARCHIE ABSOLUE

 

TOME QUATRIÈME. — ADMINISTRATION GÉNÉRALE (SUITE).

LA JUSTICE (SUITE).

CHAPITRE III. — JURIDICTIONS SPÉCIALES ET TRIBUNAUX EXTRAORDINAIRES.

 

 

Les officialités diocésaines. — Maréchaussée, prévôts des maréchaux ; tribunal de la table de marbre. — Chambre des comptes et Cour des aides. — Juridictions diverses : Eaux et forêts ; Cours d'amirauté, des monnaies, des salines ; capitaineries, grand prévôt de l'hôtel. — Conseil privé. — Les tribunaux extraordinaires : grands jours de Poitiers, Chambre de justice contre les financiers. — La justice de Richelieu ; les commissaires. — Arbitraire accepté par la noblesse, repoussé par les parlements. — Maréchal de Marillac.

 

Certaines classes d'individus tels que les soldats ou les prêtres, certaines catégories de procès formant le contentieux financier ou maritime, certains morceaux du territoire comme les grands chemins, les forêts et les maisons royales, étaient soustraits à la justice ordinaire et soumis à des tribunaux spéciaux. Plusieurs de ces exceptions subsistent de nos jours, principalement dans les cas où le gouvernement est pris à partie par les particuliers, auxquels la législation actuelle n'offre pas, à dire vrai, plus de garantie que l'ancienne.

Chaque diocèse avait son officialité[1], seule en pouvoir de juger les ecclésiastiques, et dont la juridiction s'étendait sur les clercs, même mariés. Il était toutefois interdit aux officiaux d'emprisonner aucun prêtre sans information et réquisitoire du promoteur[2]. Le tribunal religieux, devant qui les laïques comparaissaient pour tout ce qui touchait au côté sacramentel du mariage, ne connaissait pas seulement des causes spirituelles, puisque nous voyons celui de Mende condamner, pour faux, un notaire à trois ans de prison, et procéder contre un homme marié accusé d'avoir entretenu des rapports criminels avec une femme[3]. Les châtiments ordinaires de l'officialité ne sont pas bien rigoureux : des jeûnes (que personne ne surveille), la récitation des psaumes à genoux, quelques jours de prion. Dans ce code, certaines rigueurs contrastent singulièrement avec certaines indulgences. Le clergé demandait pourtant, aux États de 1614, la permission de condamner aux galères. Le peuple, disait-il, n'est point satisfait des peines spirituelles qui lui sont inconnues[4]. Aux moines États le tiers se plaignit que les juges d'Église étaient souvent des laïques ; il réclama contre le nombre des degrés de la juridiction ecclésiastique, quatre ou cinq parfois avant d'arriver au Pape[5] — reproche qui pouvait s'adresser, comme on l'a vu, à la justice royale. — Il demandait enfin l'expédition des sentences en français. Le clergé de son côté protestait contre les parlements qui ne laissaient exécuter les jugements des prélats qu'après les avoir revus, et au besoin corrigés, qui prétendaient faire la police intérieure de l'officialité, imposaient des choix, s'opposaient à des révocations, etc. ; bref, l'évêque payait cher, par l'invasion de la surveillance civile dans sa juridiction religieuse, l'extension de celle-ci à quelques matières laïques[6].

Comme les gens d'Église, les gens de guerre étaient en dehors du droit commun. La connaissance des délits militaires, de ceux même commis par des civils au préjudice des militaires, appartenait aux prévôts des maréchaux — vice-baillis et vice-sénéchaux, selon les divers noms qu'ils portent. Supposez la gendarmerie actuelle joignant à ses attributions multiples une autorité judiciaire, le maréchal des logis ou le lieutenant condamnant les voleurs ou les meurtriers qu'ils ont arrêtés, prononçant jusqu'à la peine de mort, et vous aurez une idée assez exacte de la maréchaussée du dix-septième siècle[7]. Tantôt l'intendant met les prévôts en queue à quelque criminel qui mérite la corde, tantôt le gouvernement leur ordonne de se tenir avec leurs archers à la suite des soldats qui traversent une province, pour les faire vivre en bon ordre et discipline, et punir les déserteurs ; tantôt il les fait monter à cheval, les forme en corps de troupes comme les gendarmes en 1870[8]. La maréchaussée est hiérarchisée ; dans chaque province elle obéit à un prévôt général, office sérieux et honorable pour un homme d'épée. La charge de prévôt de l'Ile-de-France, achetée 36.000 livres vers 1630, en valait plus de 200.000 en 1660[9].

Les prévôts étant censés lieutenants des maréchaux, c'est à la table de marbre de Paris, cour supérieure, unique même à certains égards[10], qu'ils viennent de tous les coins du royaume prêter serment ; c'est elle qui réforme leurs sentences au nom des connétable et maréchaux de France, selon l'antique formule maintenue jusqu'en 1789, cent cinquante ans après la suppression des connétables[11]. Il ne parait pas que ces robes courtes fussent, dans les bas grades, des personnages exemplaires. Leurs sommaires jugements, les emprisonnements qu'ils font dans leurs domiciles privés, aussi bien que les élargissements arbitraires qu'ils ordonnent sont l'objet de vives critiques. Il faudrait pour les grands jours, dit Talon, un ou deux prévôts des maréchaux, gens de bien s'il s'en trouve[12]. Soi-disant pour appuyer et fortifier ces officiers, lesquels, épars comme ils sont, pourraient s'altérer, mais en réalité pour avoir quelques charges à vendre, l'État songea à créer quatre visiteurs généraux qui, assistés d'un tribunal ambulant et de vingt-cinq archers, auraient parcouru les provinces donnant avis de tout ce qu'ils apprendraient contre le service du Roi[13]. Ces projets, fort peu viables, demeurèrent enfouis dans les portefeuilles du premier ministre.

Notre territoire regorgeait déjà de magistrats : les bois royaux, les rivières et les moulins, avaient pour juges les grands maîtres enquêteurs des eaux et forêts avec le cortège ordinaire de lieutenant, procureur et sergents[14]. S'il s'agissait d'un délit de chasse, c'était à la capitainerie d'en connaître. Les faits maritimes étaient de la compétence exclusive des sièges d'amirauté, une cour souveraine des Salines établie à La Rochelle (1639) avait la police des marais salants et des crimes relatifs au sel. La cour des Monnaies, souveraine aussi, étendait sa sollicitude sur tout ce qui concernait le maniement des espèces d'or et d'argent, et sur les métiers qui de près ou de loin s'y rattachaient[15]. Enfin le grand prévôt de l'hôtel était juge de la maison du Roi, c'est-à-dire de nombreux palais habités par des milliers de gens[16].

La Chambre des comptes ne se bornait pas à juger des chiffres comme de nos jours, elle-même procédait à l'exécution de ses arrêts contre les comptables ; elle décrétait de prise de corps. Ses membres jusqu'aux plus infimes ne pouvaient être traduits qu'à sa barre ; ses huissiers se transportaient dans les provinces pour exécuter les saisies féodales ; ses commissaires allaient opérer le recouvrement des débets en souffrance[17]. Les cours des aides qui tranchaient, comme notre conseil d'État, les réclamations suscitées par les impôts, jouissaient aussi des prérogatives de la justice ordinaire. Arbitres entre les citoyens et l'État, ils n'étaient pas dans la dépendance de ce dernier, ainsi que les membres révocables de nos tribunaux administratifs ; le gouvernement ne pouvait rien sur ces magistrats propriétaires[18]. Mais il pouvait les déposséder du litige, en l'évoquant au Conseil privé. Par ces évocations[19], plaie profonde dont souffrait l'organisme judiciaire, le pouvoir exécutif expropriait n'importe quel tribunal, petit ou grand, pour juger seul, sans contrôle et sans appel ce qu'il lui plaisait de juger. Cette juridiction, exercice abusif de l'absolutisme, ne fonctionnait du moins qu'en matière civile ; pour se rendre maure de la justice criminelle, Richelieu créa les commissions extraordinaires.

Nous ne comprenons pas dans cette catégorie ces tribunaux exceptionnels, chargés d'une mission temporaire : les Grands Jours de Poitiers ou la Chambre de 1624 contre les financiers. La licence de commettre des malversations est si grande, dit le Roi, qu'elle se rend commune et quasi publique, comme si elle était du droit des charges. Exclusivement composée de membres des cours souveraines, choisis sans esprit de parti, la chambre de justice n'était qu'une délégation de la haute magistrature française ; mise en présence du personnel véreux des finances, elle n'eut en vérité qu'à enregistrer les restitutions, provoquées par la menace d'un examen un peu approfondi. Les peuples, chargés à l'extrémité, estimèrent être soulagés par la saignée des traitants, qui ne rapporta pourtant que dix millions au Trésor, mais la chambre, dissoute l'année suivante, n'avait aucun moyen de prévenir le retour des abus[20].

Il en était de même des Grands Jours, tenus à Poitiers pendant cinq mois de l'année 1634. Les seize conseillers du parlement de Paris qui constituèrent ce tribunal avaient, avant de quitter la capitale, pris soin pour ne pas manquer de besogne d'enjoindre aux baillis d'informer en toute diligence des meurtres, assassinats, voleries, rapts, enlèvements, violements de filles et femmes, levées de deniers, etc. Ces vagues arrêts, ayant en vue une lessive générale de l'arriéré, n'eurent qu'un mince résultat. On n'offrit aux juges quand ils arrivèrent qu'un menu fretin ramassé pour la circonstance. Après une réception splendide — le gouverneur de Poitiers était venu à la rencontre de la cour dans la forêt de Châtellerault accompagné de trois à quatre cents gentilshommes, les plus lestes, les mieux montés et équipés de la province — après force compliments et civilités, lorsque les affaires furent échauffées, chacun songea à s'en retourner. D'ailleurs les captures, dans lesquelles consistait la principale utilité de l'affaire, dépendaient des prévôts, gens corrompus et sans foi[21]. Magistrats, avocats, prévenus surtout, s'éclipsèrent par conséquent de bonne heure. En une autre circonstance, le cardinal avait institué des juges spéciaux pour confisquer les biens de ceux qui adhéraient aux Anglais et aux rebelles de la Rochelle. Ces mesures, à coup sûr irrégulières, ont été approuvées par l'opinion de l'époque et par l'histoire[22]. Elles avaient en vue la vindicte publique, et non des vengeances particulières.

Il n'en fut pas ainsi des commissions politiques, dont le caractère partial et agressif justifia la colère des contemporains, comme il a mérité la réprobation de la postérité. En respectant ce cours ordinaire de la justice dont il parle avec éloge, lorsqu'il s'en sert, Richelieu eût obtenu la condamnation de ceux de ses ennemis qui étaient vraiment coupables ; quant à ceux qui étaient innocents et qui eussent été acquittés, l'homme d'État eût épargné à sa mémoire la tache de leur sang injustement répandu. L'archevêque de Toulouse, Montchal, raconte que Son Éminence aurait demandé au Pape un bref permettant de faire mourir sans forme de procès des personnes en prison, quoiqu'il n'y eut preuve concluante contre eux, ni assez de charges pour les condamner[23]... Les assertions de ce prélat, adversaire déclaré de Richelieu, ne peuvent être admises qu'avec réserve ; niais la conduite et le langage du cardinal les rendent vraisemblables. Aussi souple que personne à l'occasion, comédien parfait, si l'on en croit la Reine Mère, le premier ministre était, quand la nature reprenait le dessus, d'un caractère violent, sujet à battre ses subordonnés, ses confidents les plus intimes ; Séguier et Bullion en firent, dit-on, l'expérience. Celui qu'en sa conscience il' estime coupable, est à ses yeux hors la loi. Tout retard alors dans la sentence l'exaspère ; il parle d'exécution avant même que les commissaires soient réunis pour juger[24]. On dit que toutes les personnes considérables, lui rapporte un de ses agents secrets, sont exposées par le moyen de ces commissaires à souffrir tout ce qu'on voudra à la cour. Vis-à-vis de la noblesse, l'emprisonnement ou l'exil selon le bon plaisir du maître devient si usuel que les intéressés ne s'en offusquent plus trop. Monseigneur, écrit l'un de ces détenus, bien que les courtoisies et le bon traitement que je reçois en cette maison me doivent plutôt faire désirer la continuation d'une vie si douce que le changement, néanmoins puisque la prison, pour belle qu'elle soit, est toujours diffamante, etc. De semblables correspondances vont et viennent, fort exactement polies, entre l'exilé et l'exilant, le prisonnier et l'auteur de sa captivité. Mais si l'aristocratie française, fidèle à sa constante indifférence politique, prenait son parti du despotisme, le Parlement ne l'admettait pas. il décrétait avec une ardeur qui n'était pas sans péril, contre ceux qui exécutaient les commissions illégales[25]. Importe-t-il, en effet, qu'un prévenu soit jugé par cens de biens et affidés, le ministère refuse de le livrer à la cour souveraine, où l'on ne peut obtenir l'assurance qu'il sera condamné à la peine capitale. On l'offre au Châtelet, mais le prévôt de Paris n'est pas assez accrédité pour répondre de sa compagnie, et ne pourrait garantir davantage qu'on le juge à mort ; on remet alors le malheureux aux commissaires. Ceux-là, qu'ils s'appellent Châteauneuf, Laubardemont ou Laffemas, vont plus rondement. Le dernier, après avoir dans l'après-midi condamné à mort le P. Chanteloube, exprime le soir ses regrets au cardinal de ce que l'arrêt n'ait pas été beaucoup plus exemplaire[26].

Un coupable puni est un exemple pour la canaille, un innocent condamné est l'affaire de tous les honnêtes riens. Ce mot de La Bruyère nous est revenu à la mémoire en parcourant, aux Archives des Affaires Étrangères, les pièces du procès de Marillac, procès dirigé par Châteauneuf, le plus plat personnage de l'époque. Il n'est pas de lecture plus touchante que celle des lettres écrites par le brave soldat à ses amis, à sa femme qu'il adorait, et qui mourut de chagrin pendant sa détention[27], à Richelieu même auquel il dit : Ce m'a été un coup de poignard bien rude que de voir votre nom au bas de la commission, en vertu de laquelle on agit ici contre moi. En effet, le cardinal et la Reine Mère unis, les amis de l'un étaient les amis de l'autre ; mais ils se brouillent, et le maréchal qui l'ignore meurt victime d'une intrigue de cabinet, dont il n'eut la clef peut-être que le cou sur le billot. Marillac, comme plus tard de Thou, payèrent de leur tête les deux jours de la plus rude frayeur qu'ait éprouvée Richelieu pendant sa vie[28].

 

 

 



[1] Composée d'un official, d'un lieutenant, d'un promoteur et d'un greffier. Comme seigneur féodal le prélat a, de plus, un tribunal laïc. — En Provence, les contestations survenant entre le clergé et les seigneurs feudataires étaient l'objet d'une enquête devant l'évêque du diocèse et un gentilhomme nommé par le corps de la noblesse, qui statuaient de concert. Arch. Bouches-du-Rhône, C. 107.

[2] Arrêt du Parlement 15 juillet 1632. — Arch. Aube, G. 136. — Aff. Étrang., t. 179, f. 68.

[3] Arch. Lozère, G. 930. — BASSOMPIERRE, Mémoires, 77. — Pour les Mariages, v. notre t. I.

[4] Arch. Sarthe, G. 489. — PICOT, États Généraux, III, 492, 494, 503. A la prison épiscopale de Valence les détenus sont en danger de se sauver pendant la peste (1629), le geôlier menaçant de s'en aller à cause de la contagion. Aff. Étrang., t. 794, f. 31.

[5] En principe, trois décisions conformes valaient une décision souveraine.

[6] Règlement du 14 avril 1636. — Déclaration du 28 septembre 1637. — Arch. Haute-Garonne, B. 508.

[7] Chaque siège avait un prévôt des maréchaux, lieutenant, assesseur, procureur, exempt, greffier, commissaire, contrôleur du commissaire et huit archers. Édit de janvier 1638. — Arrêt du conseil privé du 24 mars 1623.

[8] Arch. Guerre, XXIV, 170, 171 ; XXXII, 55, 163. — Aff. Étrang., t. 790, f. 40 ; t. 805, f. 6. — Le Bohémien Dodo a été pris, écrit Marillac à Richelieu ; il y a contre lui une montagne d'informations par plusieurs prévôts de diverses provinces.

[9] Déclaration du 2 août 1634. — TALLEMANT, X, 218. — Aff. Étrang., t. 811, f. 264. — On créa, par édit de décembre 1644 des prévôtés provinciales dans sept généralités, mais elles furent supprimées l'année suivante et remplacées par 41 résidences nouvelles de maréchaussée.

[10] Il y avait une table de marbre à Rouen, et en 1641 il en fut institué une à Dijon à l'instar de Paris, mais l'une et l'autre n'avaient qu'une autorité maritime et forestière. Arch. com. Avallon, FF. 3.

[11] Arch. dép. Lot-et-Garonne B. 12. — DANIEL, Hist. de la Milice, II, 12. — Le grand prévôt de la connétablie sous Louis XIII est le Sr de Montifaut, son lieutenant général est le Sr de Sainte-Marthe.

[12] TALON, Mémoires, 40. — Arrêts du Parlement du 22 janvier 1624, du grand conseil du 29 juillet 1632. — Déclaration du 22 avril 1636. Quelques-uns de ces offices avaient des propriétaires qui n'exerçaient pas ; ainsi Marillac fut jusqu'à sa mort prévôt de Montfaucon en Argonne. Aff. Étrang., t. 808, f. 256. — Le tiers état voulait borner la juridiction prévôtale aux gens de guerre.

[13] Aff. Étrang., t. 808, f. 228.

[14] Arrêt du conseil privé, 15 avril 1636. — Déclaration du 9 juillet 1622.

[15] Arrêt du Parlement 17 avril 1635 (conseils d'amirauté). — Édit de décembre 1639. — Mss Godefroy CLXI. La création de la cour des Salines rapporta 50.000 écus au trésor. Elle fut supprimée en 1643. Sur la cour des Monnaies, v. notre t. I, et Édits de juin 1635, de novembre 1641. — Arch. nat. KK. 201.

[16] Arrêt du conseil privé du 22 septembre 1627. — Aff. Étrang., t. 812, t. 230. Le grand prévôt de l'hôtel ne relevait que du grand conseil. Cette charge fut vendue (1643) 430.000 livres, par M. d'Hocquincourt à M. de Sourches.

[17] V. l'Introduction de M. DE BOISLISLE aux Pièces justificatives de l'histoire des premiers présidents de la Ch. des comptes de Paris. — Plumitif du 3 février 1620. — Lettres patentes du 26 septembre 1628. — CABASSE, Parlement de Provence, II, 228.

[18] Arrêt du 6 mars 1630. Il y avait, outre celle de Paris, 4 cours des aides à l'avènement de Louis XIII : à Rouen, Clermont-Ferrand, Bordeaux et Montpellier. De plus les Chambres des comptes de Dijon et Aix, les parlements de Grenoble, Rennes, Metz et Pau avaient dans leur ressort compétence de cour des aides, comme aujourd'hui les tribunaux civils sur les matières commerciales, là ois il n'existe pas de tribunal de commerce. On établit, sous le ministère de Richelieu, les cours de Vienne (en Dauphiné), de Cahors, d'Agen, de Lyon et de Caen. Ces deux dernières furent supprimées peu après.

[19] V. à ce sujet notre t. I, Le conseil d'État.

[20] On voit aux Aff. Étrang., t. 778 passim et 780, f. 190, que les taxes furent faites par J. de Beaufort, l'auteur du Trésor de France volé à la couronne, cité par nous (t. II, p. 101). — Édits d'octobre 1624 et de mai 1625. — RICHELIEU, Mém., L. I. — Bibl. nat., Ms Français 18510, f. 240. Bibl. de l'Institut, Mss Godefroy CXXX. 287, 390. La chambre de justice présidée par de Mesme comprenait cinq maîtres des requêtes, un conseiller au parlement, deux maîtres des comptes, deux conseillers à la cour des aides. On avait décidé de réunir une chambre semblable tous les dix ans. — Par édit d'avril 1635, on se borna à taxer les officiers de finance au conseil à proportion du temps de leur maniement, supposant que plus ils ont exercé leur charge, plus ils ont dû voler. — Une nouvelle chambre de justice qui fonctionna en 1661, fit rentrer dans les caisses de l'État 91 millions.

[21] TALON, Mémoires, 35, 39. Talon remplissait la fonction d'avocat général aux grands jours. — Édit de février 1631. Le ressort de la cour s'étendait sur la Touraine, l'Anjou, le Maine et l'Angoumois. — Arrêt du 26 avril 1634 ; lettres patentes du 19 août 1634. — Les conseillers députés avaient une indemnité de déplacement de 20 livres par jour.

[22] Le tiers état en 1614, les notables en 1627, demandent la tenue des grands jours dans les provinces les plus éloignées, tous les deux ou trois ans. Ils repoussent la proposition, faite par Richelieu conformément au vœu de l'assemblée de 1617, d'une chambre ambulatoire et permanente. PICOT, États Généraux, IV, 23, 31.

[23] Mémoires, I, 19. — Montchal affirme que Souvré, évêque d'Auxerre, tenait le fait du nonce Bagni. Nous voyons proscrire des particuliers que selon l'état des procédures, il y aurait peine à mettre en procès devant les juges. Aff. Étrang., t. 789, f. 171. V. notre t. I, La monarchie absolue.

[24] Lettres et papiers d'État, V, 308. — TALLEMANT, II, 163, 194. — Les commissaires, quand ils ne vont pas assez vite sont accusés de favoriser les coupables, et deviennent suspects à leur tour. Aff. Étrang., t. 797, f. 74.

[25] Aff. Étrang., t. 784, f. 10 ; t. 799, f. 75, 239 ; t. 800, f. 33.

[26] Aff. Étrang., t. 802, f. 266. Laffemas était cruel, non cupide ; il ne s'est pas enrichi. Annonçant l'arrêt de mort de l'abbé de Boulemont, il ajoute en post-scriptum : Ses quatre abbayes sont vacantes, le Roi en disposera. Pour moi, je n'y ai et n'y aurai jamais aucune prétention, ne voulant pas profiter des dépouilles de ceux que je condamne. Aff. Étrang., t. 809, f. 81. — TALLEMANT, II, 188, 224. — Lettres et papiers d'État, I, 194.

[27] Catherine de Melun, Dc de Marillac. Mon cher cœur, lui écrit-il, recherchez la permission de me voir, car là nous serait une extrême consolation à l'un et à l'autre. J'en ai de grandes de la part de Dieu (j'espère qu'il en sera autant de vous), sans cela je ne serais plus du nombre des vivants, car jamais prison ne fut plus dure que la mienne, toujours malade et tenu si serré... Je vous aimerai toute ma vie plus que moi-même. Aucune de ces lettres — elles sont fort nombreuses — ne fut remise à leur adresse. On avait ordonné au maréchal de les faire passer par Bouthillier, à qui il les envoyait, et qui, sans doute, les garda, puisqu'elles se retrouvent toutes dans les papiers de Richelieu. Il est navrant de voir le prisonnier continuer à écrire, même après la mort de sa femme, qu'on lui cache. Peut-être espérait-on surprendre quelque confidence utile à l'accusation. Aff. Étrang., t. 798, f. 30 et suiv.

[28] Aff. Étrang., t. 799 et 800. — Marillac était si peu au courant qu'il espère que la Reine ne dédaignera pas de travailler pour lui auprès du Roi et de M. le cardinal. Lettres de BALZAC (éd. Moreau), J88. — TALLEMANT, II, 237.