GODEFROI DE BOUILLON

 

CHAPITRE X. — DÉFENSE D’ANTIOCHE CONTRE KERBOGHA. Juin et juillet 1098.

 

 

Les derniers débris de la garnison d’Antioche, ralliés par l’émir Schems-Eddaula, fils d’Aki-Sian, s’étaient réfugiés dans la citadelle. Les princes voulurent leur livrer assaut immédiatement, et vers onze heures du matin, les hérauts parcouraient les rues et les places, appelant sous les bannières de leurs chefs respectifs les soldats encore dispersés en quête de butin. Mais en vain essaya-t-on, tout le reste du jour, de gravir cette pente escarpée : la position était inexpugnable.

La montagne du château, dominant toute la cité, en était séparée par une vallée profonde d’où elle surgissait à pic. Vue de l’orient ou du septentrion, c’est-à-dire du quartier Saint-Paul et de la ville neuve, elle semblait un promontoire surplombant un gouffre. Mais du côté du rempart, au contraire, le plateau allait s’élargissant et s’inclinant en une pente douce, couverte de vignobles. La forteresse, ceinte de murailles, flanquée de tours massives, occupait l’extrême bord du plateau, au-dessus de la ville. Elle n’avait qu’une descente, partant de sa face occidentale. La déclivité y était un peu moins abrupte, et une seconde colline, épaulant en quelque sorte la première à mi-côte, formait une rampe par où courait un sentier étroit et roide.

L’ennemi ne pouvant être délogé que par la famine, il importait de lui couper cette communication, pour l’empêcher de tenter des sorties. Aussi les princes firent sans délai, sur la hauteur accessible, des ouvrages défensifs ; ils y établirent même leur quartier général et le siége du conseil suprême.

Godefroi de Bouillon, seul, n’y résida pas : sa place était toujours au point le plus menacé. On lui confia la garde du rempart du levant, où il devait former les avant-postes contre l’armée de Kerbogha, dont l’arrivée de ce côté était imminente. Il occupa la porte Saint- Paul et la redoute que Boémond avait bâtie devant cette porte pendant le siége. Dans cette position, il complétait le blocus de la citadelle et devait fermer à Schems-Eddaula la retraite vers les montagnes.

Les autres corps de troupes eurent quelques jours de repos, qu’ils passèrent en folles réjouissances. Les rares provisions restées à Antioche à la suite d’un investissement de neuf mois furent alors gaspillées dans des festins où les croisés, au dire d’un témoin oculaire[1], appelèrent les danseuses des païens, et oublièrent entièrement Dieu, qui les avait comblés de tant de bienfaits.

Mais l’ivresse fut courte : Au bout de moins d’une semaine, on vit arriver les rapides cavaliers du Khoraçan, avant-garde de l’émir de Mossoul. Superbement montés et équipés, ils poussaient leurs reconnaissances jusqu’au pied des remparts, jetant en l’air et ressaisissant au vol leurs lances et leurs cimeterres, exécutant enfin, si l’on peut s’exprimer ainsi, une sorte de fantasia provocatrice, sous les yeux d’un ennemi terrifié, hors d’état de les affronter ; car il ne restait aux chrétiens que quelques centaines de chevaux, et ils n’avaient pas encore eu le temps de dresser à leur usage et d’habituer à l’éperon ceux qu’ils avaient pris aux Turcs[2]. Brusquement arrachés à leur torpeur, ils employèrent les derniers moments de répit, avant que l’émir eût formé ses lignes, à rentrer dans les murs de la ville toute la cargaison de la flottille européenne qui mouillait au port Saint-Siméon ; ils y attirèrent également, autant qu’ils purent, les paysans syriens des environs avec leurs denrées et leurs troupeaux ; mais les ressources comme le temps manquèrent pour réunir des approvisionnements en quantité suffisante.

Le lendemain de l’apparition de ses éclaireurs, au lever du soleil, Kerbogha déboucha dans la plaine avec ses innombrables escadrons. Si loin que le regard pût se porter, étincelaient les casques et les cimeterres. Il sembla vouloir d’abord mettre son camp à cheval sur le fleuve, en amont d’Antioche, en déployant ses ailes sur les deux rives ; mais trois jours après il se rapprocha de la citadelle, afin de concerter son action avec Schems-Eddaula. Il vint alors s’établir devant la porte orientale, et commença l’attaque par la redoute de Boémond. Le détachement lorrain qui l’occupait fit une défense énergique et soutint plusieurs assauts. Godefroi, voyant sa gent sur le point d’être écrasée sous les flèches des Sarrasins, s’élança, pour la dégager, à la tète de ses meilleurs cavaliers. Ils luttèrent héroïquement, dix contre un, sans pouvoir s’ouvrir un passage, et furent finalement repoussés en laissant deux cents morts sur le champ de bataille. La petite garnison de la redoute continua néanmoins de tenir bon, et conserva aux assiégés cet ouvrage important.

Cependant l’échec du duc eut des conséquences morales bien plus graves que les pertes matérielles qu’il entrains. Quand les Turcs apprirent que l’homme qu’ils avaient vaincu était Godefroi de Bouillon, celui que l’on considérait comme le principal chef des armées chrétiennes[3], ils sentirent croître leur audace et devinrent beaucoup plus entreprenants. Ils réussirent plusieurs fois à se joindre aux assiégés de la citadelle, en s’introduisant sans doute par la porte Saint-Georges, ouverte dans les montagnes et fort mal gardée par les croisés. Ils suivaient de là des chemins couverts, tournaient le fort du mamelon qui servait de quartier général aux princes, et faisaient des irruptions jusqu’au cœur de la ville. Il périt beaucoup de monde dans ces surprises. Pour y remédier on prolongea la contrevallation intérieure sur le versant sud-est de la grande montagne. Boémond, gouverneur d’Antioche, de concert avec le comte de Toulouse, qui s’associait à lui plutôt dans le dessein de le contrôler que de le servir, y fit creuser une profonde tranchée, munie en avant d’une redoute. Lei Provençaux eurent la garde de cette position, qui devint pour quelque temps le principal objectif des ennemis de la citadelle et de ceux du dehors. Un jour, violemment assaillie, elle allait tomber entre leurs mains, malgré les efforts désespérés de Boémond et de plusieurs autres vaillants chevaliers, quand le duc accourt, accompagné des comtes de Flandre et de Vermandois, et de Robert de Normandie, culbute les Sarrasins et les taille en pièces.

Dès lors Kerbogha comprit qu’il n’arriverait à rien en continuant ses attaques du côté de l’orient, où s’était justement porté tout l’effort de la résistance ; et comme ses chevaux manquaient de fourrage dans les montagnes, il redescendit pour la seconde fois en plaine. Mais là encore se trouvait une redoute extérieure qui paralysa ses opérations et l’empêcha de serrer d’assez près le rempart. C’était celle qui avait été établie vers la fin du siége à la tête du pont de l’Oronte. Occupée maintenant par le comte de Flandre, elle commandait le cours du fleuve et servait en quelque sorte de bastille en avant de la principale entrée de la ville. Elle avait une importance capitale, et Kerbogha voulut s’en emparer à tout prix. Il y employa l’élite de son armée. Malheureusement le nouveau gouverneur d’Antioche, à qui son titre ne conférait pas de droits sur les troupes particulières des autres princes, ne put renforcer la garnison flamande. Celle-ci fit des prodiges de valeur ; mais sûre d’être à la longue écrasée par le nombre, après un jour de résistance héroïque, elle profita de la nuit pour brûler le fort et rentrer dans la ville.

De ce moment les Turcs, serrant de près le rempart, coupèrent toutes les communications des assiégés avec leur flottille de ravitaillement. Pour la seconde fois, la disette sévit parmi les chrétiens. On ne trouve en nulle histoire, dit un chroniqueur, que jamais si hauts princes et si grandes armées aient souffert telles angoisses de faim. Et il trace du fléau ce tableau lamentable : Faute de victuaille saine, on s’accommodait de tout ce qui se présentait. Qui trouvait un chien mort ou un chat, le dévorait avec délices ; car ventre affamé ne choisit pas. Les seigneurs les plus fiers ne rougissaient pas de venir s’asseoir, sans y être semons (invités), à la table d’autrui, d’où maintes fois ils se voyaient éconduits. Les nobles dames et demoiselles s’abaissaient aussi à mendier. Pâles, décharnées, gémissantes, leur aspect avait de quoi émouvoir un cœur de pierre. Il s’en rencontrait cependant qui, se souvenant de quel lignage ils étaient, se résignaient à toutes les tortures, plutôt que d’aller quérir leur pain par les huis. Ceux-là cachaient leur misère au fond de leurs logis, fuyant les secours étrangers et attendant la mort. On voyait la plupart des chevaliers et des sergents qui avaient été forts et preux dans les combats, maintenant épuisés de besoin, l’œil morne, sans voix, appuyés sur des bâtons, se traîner le long des rues, implorant l’aumône. Troupeaux de mendiants qui sollicitaient d’autres mendiants ! Les mères, arrachant à leurs mamelles arides et desséchées les enfants nouveau-nés, les abandonnaient et les exposaient dans les carrefours à la charité des passants. Les hauts barons, accoutumés à tenir de grandes cours et à faire beaucoup de largesses, se cachaient alors pour manger à la dérobée ce qui leur tombait sous la main. Ils souffraient plus encore que le menu peuple, car chaque jour ils rencontraient leurs chevaliers et les gens de leur terre qui mouraient de faim, et ils n’avaient plus rien à leur donner[4].

Godefroi de Bouillon ne fut point de ceux qui se renfermèrent pour jouir à huis clos d’un reste d’opulence. Il tint table ouverte aux malheureux et se ruina généreusement à leur service. Les historiens de la croisade citent de lui des traits touchants, qu’on regrette de ne pouvoir reproduire dans la pure naïveté de leur langage suranné. Le comte Hermann, riche seigneur de Germanie, rapporte l’un d’eux, tomba en si grande pauvreté, que le duc Godefroi, plein de compassion, lui donnait chaque jour un pain ; un pain bien mince, il est vrai, mais le duc ne pouvait faire davantage, et le comte le tenait à (pour) grande largesse. — Henri de Hache (son cousin) mourait de faim tout pleinièrement, quand le duc voulut qu’il fût de sa table, et lui dit qu’il lui départirait (partagerait) sa pauvreté[5].

Le pain vint bientôt à manquer, et la multitude fut réduite à manger le cuir des bêtes fraîchement abattues, puis celui même de ses Chaussures, qu’on faisait ramollir dans l’eau bouillante, et qu’on accommodait avec du poivre, du cumin et d’autres épices[6].

Il fallait, en effet, une fortune quasi princière pour se procurer de la chair d’un animal vivant. Des témoins oculaires m’ont affirmé, dit Albert d’Aix, que le duc Godefroi donna quinze marcs d’argent pour la viande d’un vil chameau ; il est certain que Baudri, son sénéchal et maître d’hôtel, paya une chèvre trois marcs d’argent[7]. Or le marc valait une demi-livre.

Lorsque enfin il n’y eut plus de bétail d’aucune sorte, force fut de tuer les chevaux de bataille. Godefroi, ayant dépensé des premiers toutes ses ressources en approvisionnements et surtout en aumônes, dut lui-même se résigner à ce pénible sacrifice, si bien qu’il fut plus tard obligé d’emprunter, et Dieu sait avec quelle peine, un destrier pour marcher aux Turcs.

Malgré l’étroite surveillance des assiégeants, la détresse poussait encore parfois de pauvres gens à essayer de traverser les lignes ennemies pour aller chercher des vivres au port Saint-Siméon. Une bande de ces malheureux fut un jour surprise par des coureurs turcs et amenée devant Kerbogha. L’orgueilleux musulman contempla avec dédain leur triste accoutrement. Ils avaient de méchants arcs de bois, des épées rouillées, des vêtements en loques. Voilà donc, s’écria- t-il, ce peuple qui devait conquérir des royaumes étrangers ! Ces gens-là seront trop heureux de partager le pain des vils esclaves ! Voilà donc les armes dont on menaçait les libres Orientaux ! Mais elles ne tueraient pas un passereau. Allez, conduisez ces captifs enchaînés, dans l’équipage où ils sont, vers mon maître qui m’a envoyé. Il jugera si notre triomphe est douteux, et ce qu’il faut penser de ceux qui se sont laissé vaincre par un peuple aussi misérable. Qu’il s’en rapporte à moi : bientôt ces chiens immondes auront disparu de la terre, et ne compteront plus parmi les nations[8]. Le sultan se pressait trop de chanter victoire, et le moment n’était pas éloigné où ces paroles présomptueuses devaient tourner à sa confusion.

Cependant tout semblait alors lui réussir. Il priva les croisés des faibles ressources que leur procurait encore accidentellement la flottille. Assaillis à l’improviste par une troupe considérable, les vaisseaux amarrés à l’embouchure de l’Oronte furent pillés et brûlés, et leurs équipages massacrés. Ce désastre effraya les marchands de l’Asie Mineure et des villes de la Méditerranée, accoutumés jusque-là à entreprendre ces expéditions de ravitaillement, et qui n’osèrent plus se hasarder sur les côtes de Syrie.

Dans la ville, la misère était arrivée au dernier degré d’horreur. Les soldats ne faisaient plus même la garde de ses remparts. Un jour, une tour se trouva absolument dégarnie de défenseurs. Des Turcs, s’en étant aperçus, l’escaladèrent à la faveur des ténèbres ; ils s’apprêtaient à y introduire leurs compagnons, et la surprise qui avait rendu les chrétiens maîtres de la place allait les en chasser à leur tour, sans la vigilance et le dévouement de quelques chevaliers de l’armée lorraine. A l’appel d’une sentinelle voisine, Henri de Hache, cousin du duc Godefroi, accourt avec deux de ses parents, nommés Francon et Siegmar, originaires de Saint-Mihiel sur la Meuse. A eux trois ils arrêtent trente Sarrasins bien armés, en tuent quatre et jettent les autres par-dessus les créneaux. Mais cet acte héroïque, qui sauva l’armée chrétienne, coûta à l’ost du duc deux de ses meilleurs barons, Francon et Siegmar, tous deux blessés à mort, et qui expirèrent après le combat[9].

De tels exemples de vaillance étaient alors bien rares, même parmi les gentilshommes formés au métier des armes. Plusieurs qui s’étaient signalés par maintes prouesses et qui avaient affronté les plus grands périls sur les champs de bataille ne purent supporter le jeûne et prirent lâchement la fuite. Les historiens ont recueilli les noms de ces félons, du nombre desquels fut Rothard, bouteiller du duc Godefroi[10]. Ils se laissaient glisser, la nuit, par des cordes, le long des remparts et s’enfuyaient à l’aventure. On les flétrit de l’épithète de sauteurs de corde[11]. La plupart tombèrent aux mains des Turcs, et pour prix de leur désertion ne trouvèrent qu’une mort sans gloire ou une honteuse captivité. Il y en eut même chez qui la souffrance et le découragement avaient étouffé à ce point le sentiment de l’honneur, qu’ils renièrent leur foi et embrassèrent le mahométisme. Ils renseignèrent l’ennemi sur l’affreuse situation de la place assiégée, et Kerbogha put se flatter de l’espoir que la famine ne tarderait guère à lui en ouvrir les portes, sans coup férir.

Cependant les princes chrétiens redoublaient d’ardeur pour suppléer à la lassitude et à l’incurie de leurs hommes. Le légat et le gouverneur d’Antioche surtout, investis l’un et l’autre, à des titres divers, d’une sorte d’autorité générale, exerçaient une surveillance de jour et de nuit sur les gardiens des tours. Ils craignaient qu’il ne se trouvât un nouveau Firouz, disposé à recommencer, au profit des musulmans, la trahison du premier. Afin de donner plus d’ensemble à l’exécution des mesures d’ordre que prescrivaient les circonstances et d’en centraliser la direction entre les mains de Boémond, Adhémar décida tous ceux, grands ou petits, qui étaient de service aux remparts, à jurer fidélité au prince sicilien. Tous s’engagèrent à lui obéir, comme à leur chef hiérarchique, jusqu’à quinze jours après l’issue du siége[12]. Godefroi de Bouillon, à raison de son commandement dans le quartier de l’est, dut aussi prêter ce serment[13]. Il n’était pas homme à compromettre les intérêts de la guerre sainte pour des questions d’amour-propre et de préséance. Il était assez notoirement le premier capitaine et, si l’on peut parler ainsi, la cheville ouvrière de l’expédition, pour ne pas craindre de paraître amoindri en acceptant, dans cette grave nécessité, un rôle de subordonné. Savoir obéir était un des genres de mérite les plus rares dans le baronnage de France. En cela comme en toute chose, Godefroi fut un modèle, malheureusement trop peu imité.

Les déserteurs qui avaient pu s’échapper à travers les lignes ennemies se dirigèrent vers la Cilicie, et allèrent trouver à Alexandrette le comte Étienne de Blois. Il était toujours retenu dans cette ville par la maladie qui lui avait fait quitter quelques semaines auparavant le siége d’Antioche : c’est-à-dire la peur de Kerbogha. Pour déguiser leur couardise, ils lui présentèrent comme imminent et sans remède l’entier anéantissement des armées croisées. On décida alors de rentrer de compagnie en Europe. Le comte Étienne et les autres s’empressèrent de mettre à la voile et de fuir une terre qu’ils considéraient comme le tombeau de tous les hommes de leur race. En abordant en Asie Mineure, ils rencontrèrent l’empereur Alexis, conduisant à Antioche une armée de secours, forte, dit-on, de quarante mille hommes. Elle se composait en partie de troupes mercenaires fournies par le Bas-Empire lui-même, auxquelles s’étaient jointes de nombreuses recrues envoyées par les royaumes latins. De vagues rumeurs, annonçant la destruction de la grande armée dans les plaines d’Antioche, avaient déjà jeté la terreur parmi ces nouveaux venus, et déterminé Alexis à suspendre sa marche jusqu’à ce qu’il eût reçu des nouvelles plus certaines. La rencontre des fugitifs vint à propos confirmer ses craintes, ou peut-être ses secrets désirs, et lui fournir un prétexte d’abandonner une entreprise qui ne souriait sans doute guère à son courage, et où il ne s’était jeté que pour partager avec ses alliés accidentels, en cas de succès, le fruit de leurs travaux. Le comte de Blois, du reste, lui fit un rapport bien propre à l’effaroucher. On raconte qu’interrogé par Comnène sur les forces de Kerbogha, il lui aurait répondu : Seigneur, si votre armée était servie en un repas à celle des Perses, il n’y aurait pas une bouchée pour chacun d’eux[14]. Il n’en fallait pas tant pour le déterminer à la retraite. Grecs et Latins reprirent le chemin de Constantinople.

L’émir de Mossoul avait tremblé au bruit des armements de l’empire. Il fut transporté de joie en apprenant le service, que le comte Étienne et sa compagnie venaient de lui rendre, et il prit soin d’en faire instruire les assiégés, comptant bien que ce dernier coup les mettrait à sa discrétion. En effet, le désespoir et l’accablement furent immenses : ce fut d’abord un concert de malédictions contre les déserteurs, puis on attendit l’événement dans une morne stupeur. Les Turcs livraient chaque jour de vigoureux assauts : il fut impossible de mener les soldats aux remparts, et sur plusieurs points la ville ne fut plus défendue que par la force de ses murailles. Le prince Boémond parcourait vainement les rues et les places, en faisant crier son ban : ni les appels des hérauts, ni même les coups[15], ne pouvaient tirer les sergents des maisons où ils se tenaient cachés. Le prince alors recourut à un moyen énergique il mit le feu à plusieurs quartiers d’Antioche[16], et la foule dut aller camper sur les fortifications.

Mais les barons eux-mêmes ne le secondaient plus. Ils n’avaient plus l’espoir de la victoire ni le courage du sacrifice. Moult leur venoit en remembrante souvent, dit un ancien auteur, quelles richesses et grandes aises ils avoient laissiées en leur pays por le service Dame Dieu. Or leur en rendoit ce guerredon (cette récompense) qu’ils mouroient chaque jour de faim, et ne gardoient (échappaient) l’heure que ces chiens, qui Dame Dieu ne créoient, les descoupassent tous, en despit et en reprouche de la foi crestienne. En ceste manière souloient tancier à Dame Dieu moult souvent, comme gens qui ne savoient ne quedire ne que faire[17]. Plusieurs même formèrent secrètement le projet de déserter en masse durant la nuit, et de se sauver vers un port de mer, abandonnant le peuple à la merci des Sarrasins. Mais le duc Godefroi eut connaissance de ce complot. Il manda l’évêque du Puy, tous les barons et une grande partie des simples chevaliers. Il les requit que, pour Dieu, ils n’eussent jamais cette pensée, car si Dieu les haïssait tant qu’ils pussent la réaliser, ils perdraient’ leurs âmes, comme des serviteurs dédaignés de Notre-Seigneur et à qui il retirerait sa besogne. Ils perdraient aussi les avantages du siècle, car jamais ils n’y seraient honorés, et leur lignage même, sans avoir forfait, serait honni et montré au doigt[18].

Ces remontrances, si nobles et si chaleureuses qu’elles fussent, n’auraient peut-être pas suffi à réconforter les cœurs abattus et irrités par tant de souffrances. La sagesse humaine ne pouvait prêcher que la résignation ; or c’était une explosion d’enthousiasme qu’il fallait aux croisés pour s’élever à la hauteur du péril qui les menaçait, l’attaquer de front, en triompher ou s’y engloutir dans un élan sublime. Leur foi accomplit ce miracle de régénération. Au plus fort de la détresse, quand la disette sévissait déjà depuis trois semaines et faisait chaque jour des victimes plus nombreuses, le bruit se répandit tout à coup que la miséricordieuse assistance de Dieu se manifestait par des apparitions et des prodiges. Plusieurs pèlerins racontèrent des visions qu’ils avaient eues.

Dieu s’était montré à un clerc qui fuyait par crainte de la mort : Ne fuis pas, lui avait-il dit, retourne en arrière, et dis à tes compagnons que je les soutiendrai dans le combat. Apaisé par les prières de ma mère, je serai favorable aux Francs ; mais parce qu’ils ont péché, ils se verront sur le point de périr. Que cependant ils conservent en moi une ferme espérance, et je les ferai triompher des Turcs. Qu’ils se repentent, ils seront sauvés. C’est moi, le Seigneur, qui te parle. Une autre fois, un homme descendant aussi de la muraille, son frère, mort depuis quelque temps, lui apparut et lui dit : Où fuis-tu, mon frère ? Demeure, et n’aie aucune crainte, le Seigneur sera avec vous au jour de la bataille, et ceux de vos compagnons dans ce pèlerinage qui vous ont précédés au tombeau combattront avec vous contre les Turcs[19].

L’imagination populaire s’enflammait à ces récits. Tout le monde aspira bientôt à la bataille qui s’annonçait sous de si heureux auspices. Les princes, Godefroi en tête, jurèrent solennellement sur les Évangiles, en présence de tout le peuple, de ne pas abandonner le pèlerinage de Jérusalem jusqu’à la délivrance des saints lieux[20]. Ce serment accrut encore la confiance et l’ardeur de l’armée.

Un nouveau gage de la protection céleste, visible aux yeux de la multitude entière, y mit bientôt le comble. Un prêtre provençal, pauvre homme, de bas lignage et de peu de lettres, se présenta devant l’évêque du Puy et le comte de Toulouse, et leur déclara que messire saint André lui avait révélé, durant son sommeil, la place où se trouvait la lance dont fut percé le flanc du Sauveur sur la croix. Elle était enfouie dans l’église Saint-Pierre d’Antioche, près du maître autel. On y courut aussitôt, on creusa le sol à l’endroit indiqué, et on y vit briller la bienheureuse relique[21]. Les Francs pouvaient maintenant attaquer avec assurance Kerbogha. Ils étaient en possession du signe par lequel ils devaient vaincre !

Toutefois, avant d’en venir aux mains, le conseil fut d’avis d’offrir à Kerbogha un moyen d’épargner le sang des deux peuples, en vidant la querelle dans un combat singulier entre l’émir et l’un des princes chrétiens. Godefroi de Bouillon de plus renommé de tous pour sa force, son adresse et son sang-froid, était le champion naturellement désigné de la chevalerie. Ce bizarre message fut confié à Pierre l’Ermite, à qui on adjoignit, comme interprète, un certain Herluin, homme de grand sens, qui bien savoit parler sarrazinois et nommément le langage de Perse[22].

Le farouche émir sourit de dédain aux propositions de l’Ermite. Il ne me semble pas, dit-il, que la situation de ceux qui t’ont envoyé leur donne le droit de m’offrir des conditions. Je les ai réduits à ne pouvoir choisir pour eux-mêmes leur propre destinée. Va donc leur dire que, parmi les chrétiens, tous ceux des deux sexes qui seront encore dans la force de l’âge sont réservés au service de mon maître, et que les autres tomberont sous le cimeterre, comme des arbres inutiles.

A la rentrée de Pierre, tout le monde se précipita à sa rencontre et fit cercle autour de lui. Mais le duc, bien sûr d’avance de l’insuccès de l’ambassade, et redoutant l’effet que produiraient sur les esprits les détails de cette entrevue avec un ennemi aussi puissant qu’orgueilleux, tira l’Ermite à l’écart. Il l’invita à ne point raconter publiquement son voyage au camp des Sarrasins, et à en faire connaître seulement le résultat. Le peuple apprit qu’il devait se préparer à une sortie générale pour le lendemain matin. C’était le vœu unanime, et l’on répétait de toutes parts : Nous voulons la bataille, de par Dieu[23].

Le reste du jour et pendant toute la nuit, la ville d’Antioche fut en proie à une agitation inusitée. La foule encombra les églises, priant et se confessant. Les logis retentissaient de chants guerriers. Chacun raccommodait tant bien que mal son armure, fourbissait et aiguisait son outillement de combat. Ce qui restait de vivres fut distribué aux soldats. Les rares chevaux qui se trouvaient encore dans l’armée reçurent aussi ce soir-là une bonne ration ; les approvisionnements de fourrages mis soigneusement en réserve par quelques seigneurs économes, furent entièrement consommés. Le lendemain, c’était la fin des privations : tout pèlerin avait en perspective sa part dans les dépouilles des Sarrasins ou dans la béatitude céleste.

Au milieu de la joie universelle, le duc de Lorraine éprouvait un terrible embarras : il n’avait pas de destrier. Il s’adressa au vieux Raimond, que sa mauvaise santé empêchait de prendre part à l’action. Mais les Provençaux n’étaient pas prêteurs, leur chef moins que tout autre ; et Godefroi n’obtint qu’après de longues et pressantes instances une monture des écuries du comte.

Le lendemain, 28 juin, au lever du soleil, au son des trompettes et des tambours, les troupes se rassemblèrent à la porte du Pont. Outre les corps réguliers d’infanterie, la plupart des gentilshommes étaient contraints de marcher à pied, faute de chevaux. D’autres montaient des ânes on de misérables bêtes de somme.

Les évêques et les prêtres, vêtus comme pour messe chanter, parcouraient les rangs, tenant d’une main le crucifix et de l’autre bénissant le peuple : ils donnaient l’absolution et assuraient remise entière de leurs péchés à ceux qui mourraient dans le combat. L’évêque du Puy se faisait surtout remarquer par ses chaleureuses exhortations. Il avait dépouillé la robe de moutier et caracolait sur un grand destrier, armé et le heaume en tête.

La longue colonne fut partagée en douze corps, en douze batailles, comme on disait alors, qui devaient, en s’échelonnant dans la plaine, tromper l’ennemi sur l’importance réelle des forces chrétiennes. Le duc Godefroi commandait le septième de ces corps, composé de deux mille hommes. Il avait devant lui lingues le Grand, qui, avec les deux Robert, conduisait l’avant-garde ; puis l’évêque du Puy, formant à peu près le centre. Boémond venait le dernier ; mais sa troupe était la plus nombreuse et la meilleure. Il avait pour mission de protéger les derrières de l’armée et de maintenir ses communications avec la place. Enfin quelques centaines de Provençaux, restant auprès de leur comte malade, étaient chargés de garder la redoute placée au-dessous de la citadelle, et d’arrêter les tentatives d’incursion des Turcs de Schems-Eddaula.

Quand l’ordre de marche et d’attaque fut bien établi, la porte s’ouvrit, et la masse tout entière s’ébranla. Dans chacun des douze corps, les fantassins formaient les premières lignes, et la cavalerie ne venait qu’après, pour les soutenir. C’était le renversement des lois ordinaires de ‘la stratégie féodale : mais le nombre trop restreint des cavaliers ne permettait pas de leur laisser le principal rôle.

Dès le commencement de ce mouvement, un grand drapeau soir avait été hissé sur la plus haute tour de la citadelle. C’était le signal convenu entre Schems-Eddaula et Kerbogha pour prévenir ce dernier en cas de sortie des chrétiens. L’émir de Mossoul avait aussitôt envoyé deux mille archers fermer l’issue du pont. Les Français de Hugues le Grand s’y engageaient en même temps. Les Turcs, par une sorte de bravade, se trouvant en présence de fantassins, mirent pied à terre, et l’on tirailla de part et d’autre à armes égales ; mais les croisés visaient surtout les chevaux de leurs adversaires et en abattaient un grand nombre. Ceux-ci, incapables de les refouler dans la ville, se hâtèrent de sauter en selle et de se replier sur le camp.

Le premier corps déboucha alors dans la plaine : les autres passèrent le pont à sa suite. Le rempart de ce côté de la ville était couvert de peuple. Les femmes, les enfants, les malades y étaient accourus pour assister de loin au combat. Des prêtres en aubes et en étoles, des clercs en surplis, s’y tenaient aussi debout, en oraison, recommandant au Seigneur les champions de sa cause.

Une pluie fine et légère tomba alors d’un ciel longtemps embrasé : lés combattants, pénétrés d’une vigueur nouvelle, crurent que c’était la grâce du Saint-Esprit qui se répandait sur eux sous une forme visible[24].

Kerbogha, après la déroute de ses deux mille archers, ne fit aucun autre effort pour empêcher la sortie. Il resta tranquillement à jouer aux échecs dans sa tente. Sur le rapport de transfuges, il croyait ses ennemis beaucoup moins nombreux qu’ils n’étaient ; il les croyait surtout plus accablés par les privations, et incapables de supporter une lutte sérieuse en rase campagne. Il chargea le sultan de Jérusalem, Soukman-ibn-Ortok, de les tourner du côté de la mer avec une forte troupe et de leur couper la retraite vers la ville, pendant que le gros des forces musulmanes les repousserait donc la même direction. Il cherchait, dit une chronique, à les broyer entre deux meules ; mais cette illusion fut courte ;

Ses coureurs vinrent lui annoncer que les bataillons chrétiens se succédaient sans cesse dans la plaine, et présentaient un aspect inquiétant. Les bannières des hauts barons, les pennons armoriés et les banderoles flottant aux lances des chevaliers, coupaient en lignes parallèles, jusqu’à une grande profondeur, les masses sombres des gens de trait et des hommes d’armes à pied. L’émir devint soucieux. Il monta- sur une colline pour embrasser le champ de bataille, fit amener quelques captifs chrétiens et leur demanda de qui étaient tous ces étendards. En entendant énumérer les vasselages de France, de Flandre, de Normandie, de Provence, de Lorraine et d’Italie, il fut saisi de crainte. Il ne s’était pas attendu à avoir sur les bras des troupes à peu près aussi fortes que les siennes ; il n’était pas prêt. Il envoya alors offrir aux chefs le combat singulier d’un certain nombre de Turcs contre autant de chrétiens ; mais il n’était plus temps : son inquiétude ne faisait que redoubler l’ardeur et l’espoir des croisés. Ce fut à leur tour de rejeter ses propositions et de demander l’engagement général.

Un instant après, les deux armées se rencontraient à portée de flèche. Malgré le tir bien nourri des musulmans, les Francs s’élancent tête baissée contre leurs lignes et les enfoncent. Les trois premiers corps s’y engouffrent à la fois. Le légat y pénètre après eux, presque immédiatement suivi par Godefroi et ses Lorrains, et la mêlée commence. Les clameurs des soldats, le son des trompettes, le cliquetis des épées, le choc des masses d’armes, s’unissent dans un vacarme indescriptible. Les hommes se martèlent dans une lutte corps à corps. Godefroi paraissait partout au plus épais des escadrons ennemis, les fauchant de sa terrible épée[25]. Au bout d’une heure à peine, les infidèles étaient en pleine déroute. Soudain un courrier vient prévenir le duc de Lorraine que le corps de réserve, confié à Boémond, se trouve dans le plus grand péril.

Soukman, renforcé par les sultans de Damas et d’Alep, avait accompli son mouvement tournant avec autant d’habileté que de promptitude[26]. Il avait gagné la rive de l’Oronte et était tombé brusquement sur Boémond, au moment où tous les autres princes chrétiens étaient aux prises avec les troupes de Kerbogha. Il le tenait cerné et l’accablait de flèches, quand le duc et Tancrède arrivent au galop, à la tète d’une vaillante cavalerie. Le sultan ne peut soutenir leur choc ; il recule, mais, pour protéger sa retraite, il met le feu aux grandes herbes desséchées qui couvraient la plaine. Une épaisse fumée enveloppe aussitôt les chrétiens et les aveugle, sans arrêter leur élan. Ils poursuivent quand même leurs ennemis débandés, et les repoussent jusque sur le gros des forces turques, dont ils augmentent encore la confusion. De ce moment la victoire fut complète. Les fuyards essayèrent vainement de se rallier sur un tertre, derrière le lit d’un torrent. Les croisés les en délogèrent et les chassèrent devant eux, la lance dans les reins, l’espace de plus d’une lieue.

Le fier Kerbogha n’avait pas attendu la fin de l’action pour se mettre en sûreté. Dès qu’il avait vu les siens mollir et battre en retraite, il avait déserté lâchement le champ de bataille. Il courut ventre à terre jusqu’à l’Euphrate, le franchit dans une barque, et arrivé dans le Khoraçan il se crut à peine hors d’atteinte. Ainsi, dit Guillaume de Tyr, un peuple pauvre et affamé triompha avec l’aide de Dieu d’une immense multitude d’hommes vaillants, et, malgré toutes les probabilités, l’Éternel confondit en une seule bataille tout l’Orient soulevé contre ses serviteurs[27].

Si l’on en croit quelques historiens, les pertes des infidèles s’élevèrent à cent mille hommes I Du côté des chrétiens on compta quatre mille morts.

Le camp de Kerbogha tomba tout entier aux mains du vainqueur. Il regorgeait d’or, d’étoffes précieuses, de chevaux, de bétail et d’approvisionnements de toutes sortes. Les quinze mille chameaux qui s’y trouvaient transportèrent, durant plusieurs journées, dans l’intérieur de la ville le reste du butin. La plus curieuse des dépouilles fut la tente de l’émir de Mossoul. Elle estoit faite, raconte un chroniqueur, en la forme d’une cité ; tours y avoit et créneaux de diverses couleurs, ouvrés de bonne soie. Du maître-palais mouvoient (rayonnaient) allées ès autres tentes, faites comme rues en une grande ville ; plus de deux mille hommes eussent pu seoir dans la grande salle[28].

Le soir même de la défaite de Kerbogha, la citadelle d’Antioche capitula. Sa vaillante garnison avait tenu durant huit mois contre les chrétiens. On lui accorda la liberté de s’en aller en paix avec armes et bagages. Mais si grand était alors le prestige des guerriers occidentaux, que trois cents de ces musulmans, frappés des merveilles accomplies par les soldats de la croix, et peut-être aussi épouvantés à la pensée d’avoir à lutter encore contre de tels ennemis, demandèrent le baptême et embrassèrent la foi des vainqueurs.

Boémond prit alors, du consentement de ses collègues, le titre de prince d’Antioche. Le comte de Toulouse, seul, continua à lui disputer la souveraineté de la ville et retint obstinément, pendant plusieurs mois, comme sa part de conquête, la porte du Pont et les tours voisines qu’il avait eu à défendre pendant le second siége. Godefroi et les autres princes de la France septentrionale qui s’inspiraient ordinairement de sa conduite et de ses avis demeurèrent étrangers à cette querelle[29]. Dans cette circonstance ni dans aucune autre, le duc de Lorraine n’eût voulu manquer au serment qu’il avait fait à Alexis Comnène de ne pas usurper les anciens domaines de l’empire ; mais il laissait à l’empereur lui-même le soin de faire respecter, s’il le jugeait à propos, ses droits par le Sicilien.

On s’occupa en grande pompe de restaurer les églises d’Antioche, et de rétablir le culte de Jésus-Christ dans la vieille cité où il avait été inauguré. Ensuite les princes envoyèrent des messagers en Europe pour faire part de leur triomphe au pape et à l’empereur de Constantinople. Le message adressé à Alexis avait pour objet de lui rappeler ses engagements, et de l’inviter à joindre en hâte ses alliés pour marcher contre Jérusalem. Deux des principaux seigneurs, les comtes de Vermandois et de Hainaut, furent chargés de le porter. Baudouin de Hainaut disparut dans un combat avec les Turcs en traversant l’Asie Mineure. Quant à Hugues le Grand, lorsqu’il eut passé le Bosphore, il ne se soucia pas de retourner s’associer aux fatigues et aux périls de la guerre sainte. Il regagna ses terres de France, méritant ainsi d’âtre comparé par ses anciens compagnons d’armes au corbeau de l’Arche.

 

 

 



[1] Raimond d’Agilers.

[2] Albert d’Aix, liv. IV.

[3] Guillaume de Tyr, liv. VI, ch. III.

[4] L’Estoire d’Eracles, liv. VI, ch. VII.

[5] L’Estoire d’Eracles, liv. VI, ch. XIV.

[6] Albert d’Aix, liv. IV.

[7] Albert d’Aix, liv. IV.

[8] Guillaume de Tyr, liv. VI, ch. VI.

[9] Albert d’Aix, liv. IV.

[10] Albert d’Aix, liv. IV.

[11] Baudri, cité par Michaud, Hist. des croisades, t. I, p. 330.

[12] Raimond d’Agilers.

[13] Le comte de Toulouse était alors malade, ce qui se trouva fort à propos pour empêcher une nouvelle querelle.

[14] Raoul de Caen, ch. LXXII.

[15] Guillaume de Tyr, liv. VI, ch. XIII.

[16] Raoul de Caen, ch. LXXVIII.

[17] L’Estoire d’Éracles, liv. VI, ch. XIII. Le texte est rajeuni en quelques-unes de ses formes orthographiques, qui pourraient dérouter certains lecteurs et n’ajouteraient rien à la couleur de la citation.

[18] L’Estoire d’Éracles, liv. VI, ch. XIII.

[19] Foucher de Chartres (un des croisés), ch. XII et XIII.

[20] Tuebœuf, dans le Recueil des historiens latins des croisades, t. III, 70.

[21] Le 14 juin 1098. Voici comment Raimond d’Agilers, témoin oculaire, raconte cette découverte : On creusa du matin au soir sans rien trouver ; beaucoup désespéraient. Raimond était déjà sorti de l’église. Lejeune homme qui avait parlé de la lance, voyant que nous nous fatiguions, ôta sa ceinture et ses souliers et descendit en chemise dans la fosse, nous suppliant d’implorer Dieu afin qu’il nous livrât la lance, pour rendre le courage à son peuple. Enfin le Seigneur nous montra sa lance ; et moi qui écris ceci, au moment où l’on n’en voyait encore que la pointe paraître au-dessus de la terre, je la baisai.

[22] L’Estoire d’Éracles, liv. VI, ch. XV.

[23] L’Estoire d’Éracles, liv. VI, ch. XVI.

[24] Guillaume de Tyr, liv. VI, ch. XIX.

[25] Guillaume de Tyr, liv. VI, ch. XIX.

[26] Albert d’Aix, liv. IV.

[27] Guillaume de Tyr, liv. VI, ch. XXI.

[28] L’Estoire d’Eracles, liv. VI, ch. XXII.

[29] Albert d’Aix, liv. V.