HISTOIRE DE CHARLES VII

TOME PREMIER

LIVRE III. — DEPUIS L’AVÈNEMENT DE CHARLES VII AU TRONE (21 OU 22 OCTOBRE 1422), JUSQU’À LA VENUE DE LA PUCELLE (MARS 1429).

CHAPITRE III. — PÉRIODE CRITIQUE DU RÈGNE DE CHARLES VII (Du 18 août 1424 au mois de mars 1429).

PREMIÈRE PARTIE. — Faits politiques et de l’ordre civil (1424 août-1425 mars).

 

 

L’époque à laquelle nous sommes parvenus marque, au plus haut degré, la période critique de ce règne. Nettement délimitée par de notables événements, cette période s’étend du mois d’août 1424 au printemps de l’année 1429 : entre la bataille de Verneuil et la venue de la Pucelle. Durant ce laps de temps, le spectacle que nous avons eu précédemment sous les yeux, ne change point tout à coup. La lutte continue des deux parts, avec ses vicissitudes, ses compensations. Mais les péripéties revêtent chaque jour un caractère plus sérieux, plus funeste : La main de la Providence ou du destin s’appesantit sur le roi Charles. Du côté des Anglais, l’avantage ou la supériorité devient visiblement prépondérante. Le succès définitif semble se dessiner en leur faveur.

De plus en plus, la royauté, dans la personne de ce prince, s’amoindrit ou recule. La ligne d’invasion s’élargit et s’étend. Les forces de l’ennemi se renouvellent : elles s’accroissent, surtout moralement, par le triomphe. La monarchie, que représente un jeune homme inactif, semble se démoraliser devant l’imminence et l’extrémité du péril. Près de devenir la proie des conquérants, elle se scinde elle-même et se dépouille pour se sauver. Ses dernières provinces, ses derniers écus sont, par elle, livrés en gage à ses derniers défenseurs.

L’abbaye de Saint-Denis, sanctuaire de la dynastie capétienne, placée aux portes de sa capitale, appartenait, comme la capitale, aux Anglais. C’est là que depuis le dixième siècle, s’écrivaient les annales officielles de la monarchie. La charge de chroniqueur royal est vacante. L’histoire elle-même interrompt son récit. A l’aspect du ciel noir de l’adversité, les courtisans s’enfuient à tire-d’aile. Les grandes charges de la couronne, faute de payement, sont désertées. Charles VII, le 12 juin 1426, révoqua tous les dons et mandements de finances précédemment accordés. Il retint pendant un an les gages de tous ses officiers, qui demeurèrent ainsi sans traitement. Les membres du parlement de Poitiers, les maîtres des requêtes et les gens de guerre, furent seuls exceptés de cette mesure[1].

Ainsi se désorganisait en quelque sorte spontanément, l’appareil vital et administratif du gouvernement ou du royaume. Aussi, les témoignages écrits, vestiges et produit quotidien de cette existence, nous font-ils défaut. Les archives de la cour des comptes, les registres de la chancellerie ou trésor des Chartes, sont muets pour cette période. Quelques relations hostiles, étrangères, quelques fragments de chroniques domestiques et rétrospectives : telle a été la principale ressource historique de la postérité. Cette sombre période n’a guère, jusqu’ici, reçu d’autre lumière. Le désordre de l’époque se fait sentir, même dans ces fragments écourtés, où règne une chronologie fautive et bouleversée.

Charles VII résidait au château d’Amboise chez un de ses familiers[2]. Ce fut là qu’il apprit le désastre de Verneuil. Suivi de ses favoris, Pierre Frotier, le président Louvet et T. Duchatel, il revint prendre sa demeure à Poitiers. Le jeune roi, dès qu’il eut été informé de ce dernier revers, en conçut un extrême déplaisir[3].

Mais la douleur de Charles était dépourvue de ce généreux aiguillon, qui l’ennoblit et qui la féconde. La nature, l’éducation, une nécessité factice, mais irrésistible, conspiraient pour retenir, jusque-là, le représentant de la monarchie, dans une sorte de longue enfance et de minorité. En examinant de très près la vie entière du fils de Charles VI, en considérant avec attention les images authentiques de ses traits, qui nous sont restées, on doute si la terrible maladie du père ne transmit point au fils quelque trace héréditaire.

Cette éducation molle, énervante, solitaire ; l’exemple contagieux de mœurs licencieuses ; le spectacle perpétuel de ces bassesses intimes, qui forment si souvent, chez les grands, le tissu de la vie quotidienne ; le poison de la flatterie, que les courtisans versent aux princes et qui les berce de sa monotone ivresse : telles furent les leçons qui l’initièrent au sévère apprentissage de la vie ; aux épreuves que lui réservait la Providence.

Depuis la folie de Charles VI, peuples et ministres étaient accoutumés à voir la puissance suprême, passer, telle qu’un talisman, de main en main, et s’exercer au gré des circonstances. Pour l’heure, les conseillers de Char-les VII se trouvaient nantis de ce talisman. Au risque même ou au prix de la ruine universelle, ce pouvoir suffisait à leur fortune, ainsi qu’à leur orgueil. Ils n’avaient garde de s’en dessaisir, en rendant au roi son initiative.

Ces favoris mettaient au contraire leur entente et leur sollicitude à maintenir le prince, par les liens et l’attrait du plaisir, au sein de sa captivité dorée. Une raison spécieuse enfin et même d’une certaine gravité, leur servait de prétexte, pour justifier, au besoin, leur conduite. A la veille de chaque journée périlleuse, dit un historien du temps, ils avaient toujours soin d’emmener le roi dans quelque bonne ville, située à une certaine distance : dont ils firent preuve de grand sens[4]. Charles, en effet, dernier rejeton de la branche royale qui constituait sa lignée, ne laissait après lui qu’un enfant au berceau et la redoutable perspective d’une régence.

Toutefois, la détresse osait frapper à la porte du royal séjour et de la prison dorée. Cette ironique invasion de la Pauvreté, venant s’asseoir au banquet du prince, fut le premier trait qui le toucha. Le commencement de la sagesse pénétra dans le cœur de Charles VII, par cette initiation, par ce véhicule salutaire de la souffrance. Un tel spectacle émut aussi, vivement, l’imagination populaire. Le doyen de Saint Thiébault, de Metz, a noté dans sa chronique lorraine, l’écho de cette impression morale. Certain crouvexier, ou cordonnier, dit-il, fut mandé à cette époque par le roi. Déjà le marchand lui avait chaussé une jambe, lorsqu’il fut averti que le prince n’avait pas de quoi le payer comptant. Incontinent et plutôt que de faire crédit au roi de France, il s’empressa de le déchausser et de remporter sa marchandise[5].

Un jour que La Hire et Poton

Le vindrent voir par festoiement,

N’avoient qu’une queue de mouton

Et deux poulets tant seulement.

Ainsi s’exprime Martial d’Auvergne, poète contemporain, dont les vers, à la fin du quinzième siècle, étaient répétés par cœur et se chantaient dans nos campagnes[6].

Ces allégations se présentent sous une forme, il est vrai, familière et frivole. Elles s’accordent néanmoins avec les témoignages les plus sérieux de l’histoire[7].

Jean, duc de Bedford, après la bataille de Verneuil, rentra en triomphe dans Pâris. Partout les rues étaient tendues sur son passage. Des processions vinrent au-devant de lui. A Notre-Dame, les chanoines, chantant les hymnes et les psaumes, le reçurent comme si ce fust Dieu. Bref, on ne vit oncques plus d’honneur faire quand les Romains faisoient leur triomphe, qu’on lui fit à cette journée... Cependant un second motif appelait aussi le triomphateur au sein de la capitale. Après cette victoire, ajoute un autre historien, le régent retourna promptement à Paris, où il y avoit eu une sédition pendant son absence ; il en fit punir les auteurs par le dernier supplice. Deux mois plus tard, la conspiration était toujours menaçante. Philippe de Bourgogne arriva le 20 octobre à Paris. Sa présence dans cette ville calma l’émeute qui s’y étoit formée contre le régent[8].

On se rappelle la défection des seigneurs normands, le matin même de la bataille de Verneuil. Peu de temps auparavant, un grand nombre de seigneurs picards s’assemblèrent à Roye en Vermandois. Le duc de Bourgogne, dont ils étaient vassaux, leur avait donné, en la personne de Jean de Luxembourg, une sorte de vice-roi. Cet étranger faisait peser sur eux tout le poids d’un commandement despotique. Les gens d’armes de Jean de Luxembourg foulaient et détruisaient, sans ménagement, les terres de ces gentilshommes. Outrés de ces excès, les confédérés se décidèrent à former une ligue et à se révolter contre la tyrannie qui leur était imposée[9].

Jean de Luxembourg, instruit de cette conspiration, redoubla de rigueur altière, dans son attitude. Quelques-uns des conjurés furent intimidés par ses menaces. Mais d’autres levèrent ouvertement la bannière de l’insurrection. Ils se déclarèrent avec éclat en faveur du roi Charles et firent guerre de jour et de nuit au duc de Bourgogne. Jean de Luxembourg et Philippe le Bon mirent au ban les révoltés. Parmi ces derniers, on remarquait Charles et Regnauld de Longueval, Jean Blondel, le seigneur de Saint-Simon, Jean de Mailly, le sire de Maucourt et plusieurs autres. Après la victoire de Verneuil, Jean de Luxembourg se retourna vers les seigneurs rebelles, armé de nouvelles forces. Les plus compromis furent arrêtés, décapités, écartelés, et cette ligue fut ainsi dissoute[10].

Vers le même temps, la ville de Tournay, fortement travaillée par les agents de Philippe le Bon ; se prononça de nouveau en faveur de Charles VII[11].

Bedford faisait toujours au Bourguignon mille caresses. La bataille de Verneuil avait rouvert la route de Normandie. Les états de la France anglaise furent convoqués à Paris pour voter de nouveaux subsides. Jean de Lancastre ne manqua pas d’associer son beau-frère de Bourgogne à la haute direction des affaires. Néanmoins le moment approchait où cette alliance allait, pour la première fois, recevoir de graves atteintes[12].

La guerre continuait entre le roi Charles et Philippe le Bon. Deux petites places, Tournus et Bussière en Mâconnais, furent reprises par le duc. Mais, de l’un et l’autre côté, les hostilités se relâchaient de leur précédente animosité. Le duc de Savoie, Amédée VIII, commençait à redouter pour ses propres états les progrès de l’invasion anglaise. Le 28 septembre, il proposa et fit accepter des deux parts une trêve de sept mois, à partir du 5 octobre, et qui devait être renouvelée dans l’avenir[13].

L’union précédemment formée, entre les ducs de, Bourgogne et de Bretagne, contre Charles VII, était en voie de se dissoudre. Arthur, comte de Richemont, avait été associé à cette alliance. Frère de Jean VI, il était fils de Jean V, qui avait successivement épousé deux princesses d’Angleterre. Lui-même était né de Jeanne de Navarre. Or sa mère, veuve de Jean V, s’était remariée à Henri IV, de Lancastre, père d’Henri V. La couronne de Bretagne, vassale en Angleterre comme en France, tenait par de nombreuses attaches à la première. Arthur, prisonnier d’Azincourt en 1415, fut à Londres, l’hôte de sa propre mère. Jeune et puîné de famille, il se vit dépourvu de tout grand établissement. On sait comment il recouvra vers 1420 sa liberté, avec la faculté de retourner en France. Arthur avait dû payer ces biens au prix d’un serment de fidélité envers le roi d’Angleterre[14].

La mort de ce dernier vint, en 1422, le délier de ses obligations. Les avances de Bedford et de Philippe le gagnèrent une seconde fois au parti anglais. Lorsqu’il épousa Marguerite de Bourgogne, veuve du dauphin Louis, cette princesse répugnait à accepter pour mari un comte sans fortune. Elle s’y résigna, sur les grandes espérances qu’on lui fit concevoir. Marguerite y mit toutefois cette condition expresse, qu’elle conserverait ses nom et titre de duchesse de Guyenne. Vers le mois de mars 1424, un grand commandement militaire fut à donner. Il s’agissait de protéger la capitale contre les incursions des troupes de Charles VII. Arthur de Richemont, appuyé par son beau-frère, Philippe, sollicita ce poste auprès du régent. Le duc de Bedford, en ce rencontre, faillit à l’habileté de langage et de conduite qui lui était accoutumée. Il écarta le prétendant, en lui faisant sentir avec peu de ménagements son insuffisance et les motifs de son refus[15].

Humilié de toutes parts, Richemont se détacha du parti anglais. Il se retira, le cœur ulcéré, près de son frère, en Bretagne. L’influence d’Yolande s’exerçait alors sur le faible Jean VI. Elle s’étendit aisément de ce duc à son frère. L’intérêt, joint au dépit, triomphèrent du scepticisme, ou des incertitudes d’Arthur. Désormais, il fixa définitivement son adhésion en faveur de la France. Esprit judicieux et solide, nature peu brillante d’ailleurs, et, même au physique, dépourvu de distinction ou du moins de toute élégance[16], le comte Arthur rachetait ces lacunes par de l’application et par son opiniâtreté bretonne[17]. Une fois rallié à cette ligne politique, qui satisfaisait à la fois sa conscience et sa raison, il n’en dévia plus. Les difficultés qu’il y rencontra éprouvèrent sa fermeté, en réparant ce qu’il put manquer de noblesse au premier mobile de sa conversion.

La reine Yolande, au mois d’octobre 1124, réunit dans une entrevue les princes bretons et son beau-fils le, roi de France. Charles VII, le 19 de ce mois, entra solennellement à Angers. Il était accompagné de Béraud III, comte-dauphin d’Auvergne ; des sires de Montlaur, de la Tour, et autres seigneurs de cette province. Pierre d’Amboise, vicomte de Thouars ; Jean Louvet, président de Provence ; Tanguy Duchatel et Guillaume d’Avaugour, se trouvaient également dans la société du prince. Le roi, escorté, sous un dais, par six des principaux bourgeois, se rendit à la cathédrale, où il fut admis comme chanoine[18].

Là reine Yolande, duchesse d’Anjou, au nom de Louis III, avait précédé le roi et tout disposé pour cette assemblée. Le 19, Charles reçut le serment de fidélité des habitants et confirma les privilèges de l’évêché. Le vendredi 20, Richemont arriva de son côté, accompagné d’une suite nombreuse de gens de guerre. Le roi était logé à Saint-Aubin. L’entrevue de Charles VII et d’Arthur eut lieu dans un jardin et vraisemblablement hors de l’assistance de ses principaux favoris. Le lendemain 21, le roi s’obligea par lettres-patentes à payer les cent mille francs de dot promis en mariage, à Louis III d’Anjou (qui habitait Naples), pour son union avec Isabeau, fille du duc de Bretagne. A cet effet, le roi engagea le duché de Touraine, comme garantie, entre les mains de la reine de Sicile[19].

Charles VII, entraîné par ses favoris, ne demeura que trois jours à Angers. Le 22, il retourna en Touraine par le Pont de Cé, après avoir gratifié la cathédrale d’une riche tapisserie. Yolande, ce même jour, reçut à sa table au château d’Angers, Arthur de Richemont, qui dîna chez la reine, en compagnie du comte de Vendôme et du vicomte de Thouars. Deux points essentiels avaient été résolus dans le cours de ces négociations. Le premier fut la décision du mariage, antérieurement promis ou projeté entre Isabelle de Bretagne et Louis III. Les contractants arrêtèrent, en second lieu, la prochaine élévation d’Arthur au poste de connétable de France, demeuré vacant depuis la bataille de Verneuil[20].

Les princes bretons, avant de traiter personnellement avec le roi Charles, avaient exigé que Jean, bâtard d’Orléans, et Guillaume d’Albret se rendissent en Bretagne comme otages. Les places de Lusignan, Chinon et Loches, étaient les principales forteresses qui restaient dans ces parages, au roi de France. Elles furent engagées à titre de garantie, entre les mains du connétable. Moyennant ces nantissements, Arthur de Richemont prit part à l’entrevue d’Angers. Le comte Arthur n’accepta point non plus sans réserve l’épée de connétable. Il y mit deux conditions : l’une, que le roi renverrait de sa cour ceux de ses, favoris qui avaient appuyé les Penthièvre. Il se réserva pour seconde condition, de soumettre sa conduite, ainsi que toute décision en cette affaire, au jugement et à l’approbation de son beau-frère, Philippe le Bon. En conséquence, Arthur de Richemont, peu de jours après la réunion d’Angers, se dirigea vers la Bourgogne. Déjà, il s’y était fait précéder de mandataires ou ambassadeurs[21].

Dans les premiers jours de novembre, la cour, fort avide en tout temps de plaisirs, eût à Paris des fêtes magnifiques. Jean de la Trimouille, seigneur de Jonvelle, grand maître d’hôtel et chambellan de Philippe, duc de Bourgogne, épousa Jacqueline d’Amboise, dame de la reine Isabelle et nièce de Pierre II, d’Amboise (qui accompagnait Charles VII à Angers). Le duc de Bourgogne vint à Paris pour ces noces, qu’il fit célébrer à ses frais dans son hôtel d’Artois. La reine Isabeau, le duc de Bedford régent, la duchesse Anne régente, le comte et la comtesse de Salisbury, le comte de Suffolk, y prirent part avec un grand nombre d’autres seigneurs, dames et damoiselles. Georges de la Trimouille assista, muni d’un sauf-conduit, au mariage de son frère[22].

Philippe le Bon, pour la licence des mœurs, était un autre Louis, duc d’Orléans. Très habile comme lui dans les exercices qui font briller devant les dames, il excellait à la joute de lance et à danser. Le duc Philippe, à cheval, jouta contre le duc de Bedford et se donna carrière dans son double talent. II poursuivit spécialement de ses instances, durant le cours de cette fête, la belle Éléonore Holland, comtesse de Salisbury. Veuf depuis peu de temps, le duc Philippe, en ce moment même, était à la veille de contracter un second mariage. Le comte de Salisbury, personnage sérieux et d’un âge mur, prit ombrage de ces galanteries irrespectueuses. Il en éprouva contre le duc de Bourgogne un grave ressentiment, qui devait bientôt se faire jour sur le théâtre de la vie publique[23].

C’était la première fois, remarque un historien du temps, que Bedford paraissait dans ce genre de lutte ou d’exercice. Oncques mais, n’avoit jousté, dit Fenin. Si l’on en croit certains documents qui paraissent, dignes de toute confiance, ces jeux de courtoisie recouvraient déjà, perfidement, entre Bourguignon et Anglais, un antagonisme mortel. D’après ces documents, Glocester instruit de la défection de Richemont, en avait aussitôt informé le duc de Bedford. Il lui fit connaître en même temps les négociations qui tendaient à réconcilier les ducs de Bretagne et de Bourgogne avec le roi de France. Glocester concluait en conseillant à son frère de faire arrêter le duc Philippe. Bedford répondit qu’il vaudrait mieux le tuer dans les joutes qui devaient accompagner les noces parisiennes. Après le mariage du sire de Jonvelle, il écrivit à Glocester que l’occasion avait manqué, mais qu’il trouverait moyen d’attirer le duc de Bourgogne et de le faire enlever au passage[24].

Dans le même temps, une autre cause, non moins grave, de division, s’émut entre le duc de Bourgogne et les Anglais. Jacqueline de Bavière, fille de Guillaume de Bavière et de Marguerite de Bourgogne, était la cousine germaine de Philippe le Bon. Née vers 1401, elle avait été unie, toute enfant, à Jean de France, quatrième dauphin. Jean et Guillaume moururent en 1417. Le premier laissait Jacqueline veuve sans avoir connu le mariage. Cette jeune princesse demeura en même temps l’unique héritière de Guillaume, pour les comtés de Hollande et de Hainaut[25]. Philippe le Bon s’empressa de la marier à un prince de sa famille, Jean de Bourgogne, duc de Lothier, de Brabant et de Limbourg. Cet adolescent, plus jeune que Jacqueline, était faible et chétif de corps, ainsi que d’intelligence. Philippe, en négociant leur alliance, avait compté sur cette double infirmité. Le duc de Bourgogne y voyait, dans le présent, le moyen de tenir sous sa main deux beaux comtés. Dans l’avenir, il espérait qu’à défaut d’héritier direct, ses riches états s’agrandiraient encore, par l’adjonction de la Hollande et du Hainaut[26].

Jacqueline, belle, vive, galante, veuve du dauphin de France, ne subit qu’avec une extrême répugnance, cette nouvelle union. La discorde éclata bientôt entre les époux, accompagnée, de rixes et de scènes quelquefois sanglantes. La querelle du duc-comte et de son épouse agitait à la fois leur demeure et les pays soumis à leur domination. Jacqueline professait pour le duc Jean une aversion ouverte et déclarée. Le duc, âgé de dix-sept ans, introduisit, dit-on, dans le palais conjugal ; la fille d’un chevalier brabançon, qu’il entretenait comme concubine. La duchesse prit texte de là pour quitter Bruxelles et s’éloigner de son mari. Elle vint alors trouver sa mère à Valenciennes, et résolut de se créer, elle-même, ultérieurement, sa destinée[27].

La comtesse de Hollande et de Hainaut avait pour confident Louis Robsaert ou Robersart, chevalier du Hainaut. Ce dernier, habile courtisan, capitaine éprouvé, fit sa fortune à suivre le parti des Anglais. Admis dans la privauté d’Henri V, il se rendit en Angleterre, afin de préparer les voies à l’aventureuse princesse. Jacqueline, de concert avec Robsaert, s’enfuit de Valenciennes, à l’insu de sa mère. Elle partit à cheval, suivie de quelques femmes, se dirigeant, sous l’escorte de Robsaert et de nombreux hommes d’armes, vers Calais. Là, elle prit la mer, et passa le détroit. La comtesse vint débarquer à Douvres, où elle fut reçue par Humphroy de Lancastre, duc de Glocester, frère du roi d’Angleterre Henri V[28].

Conduite à la cour, elle se fit place tout d’abord dans l’intimité royale. Vers le mois de mars 1423, Jacqueline épousa le duc de Glocester. Une bulle qu’elle avait obtenue de l’antipape Benoît XIII, servit à rompre, sous prétexte de contrainte, son mariage avec le duc de Brabant. Humphroy, devenu l’époux de Jacqueline, signifia au duc de, Brabant, qu’il eût à se désister de toute prétention sur la personne et les biens de cette princesse[29].

Philippe le Bon avait suivi pas@ à pas les progrès de cette manœuvre politique, compliquée d’une romanesque intrigue. Henri V ; tant qu’il vécut, sut pallier avec art la conduite de son jeune frère. Par ses protestations, par ses caresses, il endormit ou écarta les réclamations du duc Philippe et gagna du temps. Après Henri V, le duc de Bourgogne reproduisit ses instances auprès du régent, duc de Bedford. Celui-ci obtint des deux parties belligérantes, à savoir d’une part, Humphroy, duc de Glocester, avec Jacqueline, et, de l’autre, Jean duc de Brabant, d’accepter, pour arbitres de leur différend, lui-même, duc de Bedford et Philippe le Bon, duc de Bourgogne. La sentence que rendit ce tribunal, fut agréée sans peine par le duc de Brabant. Mais Humphroy de Lancastre refusa de s’y soumettre[30].

Du 1er au 4 novembre 1424, pendant que Philippe le Bon faisait libéralement à ses hôtes les honneurs de son hôtel d’Artois, Humphroy et Jacqueline débarquaient à Calais. Le duc de Glocester avait pris le commandement de cinq à six mille soldats, destinés primitivement à poursuivre la conquête de la France. A la tête de ces forces ; Humphroy de Lancastre entreprit de soumettre à sa domination le Hainaut[31].

Philippe, instruit de cette invasion, prit immédiatement fait et cause pour le duc Jean. Des troupes bourguignonnes, réunies sans délai, reçurent ordre d’entrer en Hainaut et de repousser les Anglais. Le duc de Bourgogne, en quittant Paris, se rendit en Nivernais. Il épousa, le 30 novembre, à Moulins-Engilbert, Bonne d’Artois, comtesse de Nevers. Arthur, comte de Richemont, était allé d’Angers, rejoindre à Montbard madame de Guyenne. Par les soins du duc de Savoie, une nouvelle conférence s’ouvrit à Mâcon, dans les premiers jours de décembre[32].

Trois prélats, R. de Chartres, archevêque de Reims, l’évêque du Puy G. de Chalençon, et Robert dauphin, de la maison d’Auvergne (évêque de Chartres, nommé par Charles VII), assistaient à cette entrevue, comme ambassadeurs du roi de France. Le duc de Savoie et ses conseillers, ainsi que le comte Arthur, s’y réunirent au duc de Bourgogne. Le moment paraissait opportun pour fléchir le prince de la fleur de lis et pour le réconcilier avec la couronne. Les envoyés de Charles, dans ce but, ne crurent pas devoir épargner, non seulement les offres de paix, mais les avances morales et les explications propres à justifier la conduite, antérieure du roi ou du dauphin[33].

Vers le même temps, Arthur de Richemont, assisté de divers personnages, délégués par le duc de Bourgogne, s’était rendu auprès d’Amédée VIII, à Montluel en Bresse. Ils y rencontrèrent l’évêque de Clermont (Martin Rouge de Charpaignes), et d’autres ambassadeurs du roi de France. Des propositions de paix furent également discutées dans ce congrès. D’après les données mises en avant par ces diplomates, il fut question de marier le dauphin Louis, âgé de deux ans, à l’une des princesses de Savoie. Une seconde fille d’Amédée VIII devait être épousée par François de Bretagne, fils aîné de Jean VI. Mais rien ne pouvait se conclure, sans l’assentiment décisif du duc de Bourgogne[34].

Le duc Philippe, vivement indisposé par l’agression de Glocester, balançait entre ce sentiment d’irritation contre les Anglais, et l’hostilité qu’il avait jusque-là manifestée à l’égard du prince Charles. La joie et l’orgueil du vassal, tenant à sa merci le roi de France, l’emportaient, dans sa vanité, sur le devoir, que semblait lui prescrire la piété filiale. Philippe ne se laissa vaincre que partiellement. Il repoussa les propositions de paix, qui lui étaient faites. Les ambassadeurs excusèrent le prince Charles, sur le jeune âge où il se trouvait, lorsque avait eu lieu le meurtre de Montereau. Philippe le Bon répondit à cet égard, en exigeant du roi le renvoi des conseillers, qui avaient pris part à ce crime. Cependant les trêves furent prolongées. Le duc décida en outre le mariage de sa sœur, Agnès, avec le comte de Clermont, partisan du roi Charles. Enfin le comte Arthur obtint l’autorisation d’accepter l’épée de connétable[35].

Tels furent les importants résultats de cette conférence.

Arthur de Richemont revint en Bretagne. Une seule espèce d’entraves ou de difficultés désormais s’opposait à ce que le prince breton fournît à Charles VII le précieux appui de ses services. Ces obstacles provenaient des conseillers intimes du roi de France. On se rappelle les injonctions, respectivement émises, comme préliminaires indispensables de tout arrangement, par les ducs de Bretagne et de Bourgogne. Plusieurs des favoris apercevaient avec une mortelle appréhension la fin de leur règne. Dans l’accession du connétable au conseil, ils voyaient, pour eux, le signal de la retraite.

Un document inédit peint, sous des traits frappants, les mesquines terreurs et les sentiments d’égoïsme qui, à cette époque de péril pour la France, animaient les tristes conseillers de la monarchie. Vaincus par la nécessité, les ministres de Charles VII se résignèrent à faire place au comte de Richemont. Mais ils crurent devoir prendre vis-à-vis de lui certaines garanties. Les conditions en furent stipulées dans l’acte que nous reproduisons ci-après.

Ce sont les choses que Monseigneur le comte de Richemont jure et promet au roy sur les saints Évangiles de Dieu, par le baptesme qu’il apporta des saints fonts, par sa part de paradis et sur son honneur, en prenant l’office de la connestablerie de France.....

Item, jure et promet que pour quelconque chose qui puisse advenir, ne consentira en manière quelconque, ainçois (au contraire) de tout son pouvoir l’empêchera, que la personne du roy soit nulle part qu’il y ait seigneur plus fort que le roy, mais sera toujours le roy le plus fort, à son pouvoir, ou à tout le moins aussi fort, s’il lui plaît ; et sera le roi accompagné, en ce cas, de telles gens comme il plaira au roy.

Item, jure et promet que de tout son pouvoir, il aidera à tenir la personne du roy en franchise et liberté, en usant de sa seigneurie franchement et pleinement en toute chose comme il (le roi) a fait jusqu’à présent.

Item, jure et promet que les serviteurs du roy c’est assavoir M. T. Duchastel, prévôt de Paris, le président [Louvet], le sire de Giac, G. d’Avaugour et Pierre [Frotier] aimera, soutiendra et portera ; ni, pour quelconque chose qui soit, [ne viendra] au dommage de leurs personnes, ou de leurs biens et état. Et pareillement feront serment de vouloir le bien de monseigneur le duc de Bretagne et le pourchasseront à leur pouvoir, comme ils feroient le bien du roi ; et avec ce, le bien de mon dit seigneur le comte de Richemont, ainsi qu’il leur promet.

Item, jure et promet que pour quelconque paix traictée ou à traiter, ne souffrira, ni ne consentira, pour quelconque cas advenu (Montereau, — Penthièvres), l’éloignement des serviteurs du roy dessus dits d’avecques le roy, ni le dépointement de leurs états ; ainçois, qui en parleroit, empeschera la chose.

Item, des gens d’armes pour être entour du roy et l’accompagner, s’en rapportera au roi.

Item, le roy lui baille la connestablerie en la forme et comme ses prédécesseurs.

En témoin des quelles choses, le dit monseigneur le comte de Richemont a cy mis son sein manuel et y a fait mettre son scel le 7e jour de février l’an [1425 N. S.]. ARTHUR[36].

Charles VII, après avoir traversé la Touraine, avait passé l’hiver en Auvergne. Les états du royaume, convoqués dans la ville du Puy, votèrent une aide de 150,000 livres. A la fin de la mauvaise saison, le roi de France et ses conseillers se rapprochèrent des frontières de Loire[37].

Le 7 mars 1425, Arthur de Richemont prit en grande pompe l’épée de connétable et fit hommage au roi Charles VII. Cette cérémonie eut lieu dans la prairie de Chinon, qui s’étend entre le coteau de Saint-Mesme et la Vienne. Louis de Bourbon, comte de Vendôme, Martin Gouge, évêque de Clermont, chancelier de France, les archevêques de Reims et de Sens, l’archidiacre de Reims, l’évêque d’Angers, le maréchal de Séverac et toute la cour, s’étaient réunis pour en être témoins. Jean de Beaufort, président ou chancelier de Savoie, et Gaspard de Montmayeur maréchal de Savoie, délégués par le duc Amédée VIII, y représentaient spécialement ce prince auprès du roi de France[38].

 

 

 



[1] Jean Chartier, t. I, p. 3. Charles VII et ses conseillers, p. 33. Ordonnances, t. XIII, p. 117 et suiv.

[2] Pierre d’Amboise, vicomte de Thouars.

[3] Raoulet, p. 188. Monstrelet, chap. XX, p. 199. Charles VII, le 17 août, à Amboise ; le 22, à Poitiers. Itinéraire.

[4] Fenin, p. 222.

[5] Les malveillants (les adversaires du roi), ajoute la chronique messine, en firent une chanson par dérision, et étoit le commencement de la dicte chanson :

Quand le roy s’en vint en France

Il fit oindre ses houssiaulx (ses bottes de voyage).

Et la royne lui demande :

Où veut aller ce damoisaulx ? (Ms. 10.318, 5. Cangé, 222, f° 5, v°.)

Pour goûter le sel de cette plaisanterie, il faut se rappeler que les chaussures, au quinzième siècle, étaient de cuir moins solide, et aussi beaucoup moins chères qu’aujourd’hui. On les renouvelait beaucoup plus souvent. Des houseaux neufs n’avaient pas besoin d’être oints ; mais cela était nécessaire pour une vieille chaussure.

[6] Les Vigiles de Charles VII, édition Consteller, in-12, t. I, p. 56.

[7] La détresse du roi, après la bataille de Verneuil, apparaît sous les traits les plus positifs dans les comptes de la maison de la reine, 1422-7. (K. K., 56.)

[8] Journal de Paris, 667. Plancher, IV, 92, 95.

[9] Monstrelet, liv. II, chap. XVII.

[10] Monstrelet, chap. XX. Fenin-Dupont, p. 217, 219.

[11] Monstrelet, chap. XXI. Voir sur Tournay, Collection des chroniques belges, in-4°. Chroniques de Flandres, t. III, p. 560 et suiv.

[12] Beaurepaire, États, p. 23.

[13] D. Plancher, p. 92 et suiv. Preuves, p. xliv. D. Vaissète, liv. XXXIV, chap. XXXI.

[14] Anselme. Gruel.

[15] D. Plancher, p. 87. Monstrelet, p. 175. Fenin-Dupont, p. 204.

[16] Voir dans Gaignières un excellent crayon, d’après un portrait évidemment plus ancien et original : Rois de France, t. VI, p. 48. Il a été gravé dans les deux éditions de l’Histoire de Bretagne, 1707, t. I, p. 665 ; l-,50, t. II, p. 67 ; et par Montfaucon, Monuments de la monarchie française, t. III, pl. LI, fig. 10.

[17] L’un des poursuivants au service de Richemont avait pour nom d’armes Qui que le veuille. Il fut dépêché en novembre 1424 vers le duc de Bedford. Preuves de Bretagne, t. II, col. 1194.

[18] Labbe, Alliance chronologique, t. II, p. 706. Bourdigné, II, 154.

[19] Ordonnances, t. XV, p. 147. Labbe, p. 707. — P. P. 18 (21 octobre), f°, 9. -J. 409, f° 49. Chalmel, Histoire de Touraine, t. II, p. 190. — D. Morice, t. I, p. 494. Preuves, t. II, col. 1145, 1194.

[20] Auteurs cités. Itinéraire.

[21] Anselme aux ducs de Longueville (Jean d’Orléans). Preuves de Bretagne, t. II, col. 1163. Gruel, p. 360. — D. Plancher, t. IV, p. 37. Montreuil, p. 231.

[22] Journal de Paris, p. 667. Monstrelet-d’Arcq, t. IV, p. 200.

[23] Les mêmes. Fenin, p. 225. Au mois de septembre 1428, le comte de Salisbury et le duc de Bourgogne, baillistre des enfants de Nevers, plaidaient l’un contre l’autre au parlement de Paris. (X. X. 1480, f° 444.)

[24] L’analyse de ces lettres se conserve aux Archives de Lille (Chambre des comptes, inventaire, t. VIII, année 1424). Les pièces originales ont été soustraites au commencement de ce siècle. Voy. Michelet, Histoire de France, t. V, p. 189. Des documents analogues subsistent dans les Archives de Bourgogne. Gachard, Dijon, p. 60, n° 115.

[25] Anselme, Art de vérifier les dates.

[26] Portrait physique et moral de Jacqueline et de Jean de Brabant, son époux. Voir, sur ce sujet, Chastelain, p. 60, et le portrait de Jacqueline, au musée d’Amsterdam, cité par M. Renouvier, Gravure aux Pays-Bas, 1860, in-8°, p. 10.

[27] Monstrelet, p. 206 et suiv. Chastelain, p. 67. S. Remi, p. 453 et suiv.

[28] Les mêmes. Gachard, Dijon, p. 58, 116 et suiv.

[29] Ibid. Rymer, t. IV, part. IV, p. 102. Grafton, t. I, p. 551.

[30] Auteurs cités. D. Plancher, t. IV, p. 90 et suiv. Beaurepaire, Administration, p. 7 et suiv.

[31] D. Plancher, p. 95.

[32] Ibid.

[33] Ibid.

[34] Berry, dans Godefroy, Charles VII, p. 373. Abrégé bourguignon, ibid., p. 330. Guichenon, Histoire de Savoye, p. 462. D. Morice, t. I, p. 494. Charles VII songea vers le même temps (de 1424 à 1426) à marier son fils aîné avec la fille aînée de Jean II, roi de Castille. Ms. fr. 5053, f° 137-8. Ces divers projets ne furent point réalisés.

[35] D. Plancher, ibid., p. 97, et Preuves, p. xlviij. Fenin-Dupont, p. 227, note 1. Monstrelet, liv. II, chap. XXXVI, t. II, p. 250.

[36] Archives du chapitre d’Angers ; copie dans D. Housseau, t. IX, n° 3351.

[37] D. Vaissète, liv. XXXIV, chap. XXIX et XXXII. K. K. 56, f° 68, 81, v°. Le roi, par lettres données à Montferrand (du 1er au 6 déc. 1424), confirme les privilèges des habitants de cette ville. (Ordonnances, t. IV, p. 224.) Le 16 décembre, à Espaly, immunité de droits en faveur de l’abbaye de Saint-Antoine de Vienne. (Ibid., p. 264.) Le 6 janvier 1425, il rend le consulat aux habitants de Béziers. (D. Vaissète, chap. XXXIII et XXXIV.)

[38] Raoulet, p. 188. Cagny, chap. 83. Gruel, p. 361. Cougny, Notice sur le château de Chinon, p. 56. Communication de M. le marquis de Costa, membre de l’Académie impériale de Savoie, etc.