HISTOIRE DE CHARLES VII

TOME PREMIER

LIVRE III. — DEPUIS L’AVÈNEMENT DE CHARLES VII AU TRONE (21 OU 22 OCTOBRE 1422), JUSQU’À LA VENUE DE LA PUCELLE (MARS 1429).

CHAPITRE II. — (Du 3 juillet 1423 au 17 août 1424).

 

 

Le 3 juillet 1423, la reine, Marie d’Anjou, mit an monde un fils, le premier des fruits nombreux que devait porter son union avec Charles VII. Cet enfant naquit à Bourges vers trois heures de l’après-midi. La jeune mère avait à ses côtés sa propre mère, arrivée récemment à la cour. Par honneur pour Yolande, et par son influence, vraisemblablement, le prince nouveau-né fut nommé Louis, en remembrance de S. Loys de Marseille, le saint Louis de la France méridionale[1].

Aussitôt, le roi, par lettres closes, manda cette nouvelle à toutes les bonnes villes et à toutes les communautés de son obéissance. En tous ces lieux, notamment à Tournay, des feux de joie et des réjouissances populaires répondirent à cette notification. La gésine (les couches) des reines de France entraînait avec elle un cérémonial presque public et réglé. A cette date, le siégé archiépiscopal de Bourges était vacant : les solennités accoutumées eurent pour théâtre le palais de l’archevêché, qui avait servi de demeure à la reine pour son enfantement. La salle où la princesse-mère se tenait comme en représentation, était tendue de drap d’or de Chypre vermeil et d’autres tapisseries, appartenant au duc d’Orléans[2].

Le roi de Bourges, comme on voit, ainsi que la reine, vivaient, même à Bourges, d’hospitalité ou d’emprunts. Ce notable événement, toutefois, fut célébré avec autant de pompe ou de luxe, que le comportait la situation financière de la couronne. Au bruit des cloches sonnant à toutes volées, la cérémonie eut lieu dans la cathédrale. Guillaume de Champeaux, évêque-duc de Laon, pair de France, membre du grand conseil, administra le baptême. Le prélat était assisté de Pierre Hutin, chapelain du roi. Celui-ci tenait les deux bassins d’argent : conformément aux droits de sa charge et à la coutume, il conserva pour son profit la valeur de ces deux joyaux. Les parrains furent Jean duc d’Alençon, prince du sang, et Martin Gouge de Charpaigne, évêque de Clermont (suffragant de Bourges), chancelier de France. Le catéchumène eut pour marraine, une jeune, belle et bonne dame, de la compagnie de la reine, Catherine de l’Ile Bouchard, femme de Hugues de Châlons, comtesse de Tonnerre[3].

Les astrologiens du temps s’empressèrent d’interroger le ciel à leur manière et de pronostiquer l’avenir du nouveau dauphin. Un horoscope latin, composé à cette intention, nous a été conservé. L’enfant, dont ces faux prophètes interprétaient aveuglément la destinée, devait continuer sur le trône la postérité de son père. Par des moyens bien différents, il était destiné à poursuivre l’œuvre monarchique de Charles VII. Cet enfant, depuis, fut Louis XI[4].

Le jeune roi continuait de demeurer à Bourges. Il quittait cette résidence à d’assez rares intervalles. Ce n’était pas toutefois pour se montrer aux populations insoumises, ni pour prendre le commandement des armées. Les états de chaque province, les villes fidèles à l’autorité du prince, assemblaient au moins une fois par an leurs comices, et délibéraient sur les demandes de finances, qui leur étaient incessamment adressées. Au mois d’août 1423, les trois états du royaume, réunis à Selles en Berry, votèrent un impôt de 200.000 livres. Le 13 décembre suivant, une aide pour trois années consécutives fut allouée au roi dans un conseil analogue, tenu à Chinon. Le 16 mars 1424, les trois états du Languedoc furent convoqués à Selles. Ils octroyèrent au roi une aide d’un million de livres. Charles VII, assisté de sa famille et de son conseil, présida successivement ces trois assemblées[5].

Vers la fin d’octobre 1423, Charles se transporta de Bourges à Tours, accompagné de Marie d’Anjou. Tous deux célébrèrent dans cette ville, non plus comme duc et duchesse de Touraine, mais comme roi et reine de France ; leur joyeux avènement. Cette cérémonie avait pour conséquence nécessaire des subventions, fournies par les habitants. La ville de Tours présenta au roi dix pipes de vire, dix muids d’avoine, cent moutons gras et cent livres de cire, en cinquante torches. Moindre de moitié, le présent offert à la reine consista dans cinq pipes de vin, cinq muids d’avoine, cinquante moutons et vingt-cinq torches de cire. Le S novembre, Charles VII fut reçu, comme roi, à Saint-Martin de Tours. En cette qualité, il prêta un nouveau serment devant le chapitre de cette insigne collégiale[6].

Les actes d’administration intérieure, édictés par le prince français, dans cette période désastreuse, se font remarquer par une grande stérilité relative.

Quelques efforts ou prescriptions furent tentés pour opérer progressivement la restauration de la monnaie. Diverses ordonnances promulguées du 3 août 1423 au 10 août 1424, confirmèrent les biens, libertés ou prérogatives de l’abbaye de Beaulieu, près de Loches, de Marmoutiers, ou Saint-Martin de, Tours ; de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem ; de la Sainte-Chapelle de Bourges ; des villes d’Azat, de la Rochelle ; de Poitiers, et de Saint-Jean d’Angely[7].

Le roi rendit une ordonnance le 30 janvier 1424, pour casser et renvoyer définitivement de son service tous les capitaines, gens d’armes et de trait quelconques, exceptés les Écossais et Lombards. Cette résolution avait été inspirée au gouvernement royal par les désordres sans nom, il faut le dire, et par l’indiscipline barbare des corps francs. Or, ces milices des pays composaient alors la seule armée nationale. Cependant, au moment même où cette mesure extrême était prise, les Écossais, objet de toute la prédilection royale pour le service militaire, répandaient également la terreur parmi les pays qu’ils défendaient[8].

Charles VII ou son conseil, et ce fut l’erreur fatale de cette partie de son règne, portait exclusivement ses yeux, son espoir, du côté de l’étranger. Les épreuves que lui infligeait la Providence affectaient spécialement l’amour-propre du jeune prince ; et l’avaient irrité, aigri, rebuté. Charles négligea les ressources profondes que recèle, dans ses généreuses entrailles, un pays tel que la France. Il méconnut des dons, qu’il avait pour ainsi dire sous la main. Il les méconnut jusqu’à demeurer, longtemps encore, insensible et ingrat, lorsque le ciel, par miracle, ouvrit la terre, en quelque sorte, pour faire surgir ces trésors, pour les manifester, et pour en combler ce même prince.

Le Portugal, allié à la maison de Bourgogne et ami des Anglais, était en guerre contre la Castille, auxiliaire et confédérée du roi de France. Charles VII, par lettres données en mars 1426, prorogea pour dix ans l’exemption de tous impôts, antérieurement accordée aux Castillans qui venaient trafiquer dans le royaume[9].

Le gouvernement français, après la défaite de Cravant, s’était de nouveau retourné vers l’Écosse[10]. Archibald Douglas, père du connétable Bucan, fut sollicité de venir au secours du roi de France. On lui promit, à titre de récompense, le duché de Touraine. Déjà ce grand apanage avait naguère subi, à titre d’engagement ou de transport, des mutations fréquentes. De là, pour les habitants, des’ prestations renouvelées, et, sous le rapport administratif, une instabilité désastreuse. A la nouvelle de ce dernier changement, qui leur imposait un prince étranger, les fidèles Tourangeaux s’émurent plus vivement qu’ils ne l’avaient fait jusqu’alors. Ils députèrent auprès du roi, des procureurs, chargés de leurs pouvoirs et de leurs humbles sollicitations. Mais ces délégués arrivèrent trop tard. Les conseillers de Charles VII n’avaient point reculé, précédemment, devant le mensonge officiel, pour leurrer les plaignants, de protestations décevantes. Le duché de Touraine, pour la troisième fois dans le cours d’environ une année, fut transporté, par lettres du 19 avril 1424, à ce capitaine d’Écosse. Nos Tourangeaux réclamèrent ; mais des lettres de jussion, et l’admirable esprit qui inspirait à ces populations un humble et patriotique dévouement, firent bientôt évanouir ces murmures[11].

Charles VII, par lettres du 16 septembre 1423, envoya une ambassade au duc de Milan. Il confia la charge de cette négociation à l’abbé de St-Antoine de Viennois, Artaud de Granval ; personnage considérable par sa prélature et qui parait avoir joué un rôle politique marquant dans ces temps difficiles[12].

L’abbé de St-Antoine conduisit heureusement cette affaire. Le 26 février 1424, il conclut au château d’Abbiate-Grasso, près Milan, un traité avec Philippe-Marie Visconti, duc de Milanais. Cet acte inaugura, dans la carrière diplomatique, le règne de Charles VII, qui devait être si fécond, plus tard, en relations de ce genre. Les alliances sur lesquelles pouvait alors s’appuyer le nouveau roi étaient rares et précaires. Le traité du 26 février 1424 servit du moins à les constater et à les réunir en faisceau. L’acte d’Abbiate-Grasso stipulait une ligue offensive et défensive dans laquelle s’obligeaient mutuellement le roi de France, le duc de Milan, le roi de Castille Jean II, le roi d’Écosse[13], le roi Louis III de Sicile ; le duc d’Orléans, le comte d’Angoulême, le duc de Bourbon[14] et son fils ; le duc d’Alençon ; René d’Anjou et Charles ; frères de Louis III ; le comte Jean d’Armagnac ; Richard de Bretagne ; Charles II, sire d’Albret ; la reine Jeanne de Naples ; Amédée VIII, duc de Savoie ; Jean-Jacques, marquis de Montferrat, marié à Jeanne de Savoie, fille d’Amédée VII ; Francesco Foscari, doge de Venise ; Nicolas III, marquis d’Est, et enfin Jean-François de Gonzague, marquis de Mantoue[15].

Benoît XIII anti-pape étant mort, le gouvernement de Charles VII résolut de se rallier à Martin V. Au mois d’avril 1424, durant les fêtes de Pâques, une ambassade solennelle qui comptait onze cents chevaux, entra dans Rome et vint faire obédience, envers le souverain Pontife, au nom du roi de France[16].

Les actes administratifs du gouvernement anglais portent le caractère d’une politique plus activé, plus vigilante, en ce qui concerne les intérêts positifs et généraux des populations. On y voit fonctionner un pouvoir qui dicte ses lois du sein de la capitale ; une autorité exercée par des mains fermes ; un pouvoir habile à faire peser, sur des vaincus, une domination savamment calculée.

Les Anglais, maîtres de la France du nord et rois par la grâce de la force, auraient pu lever, de leur autorité, les tributs que le vaincu, d’ordinaire, paye au victorieux. En matière d’impôts, le traité de Troyes stipulait que les anciennes coutumes de la nation seraient respectées. Les populations elles-mêmes voulaient maintenir l’ordre matériel, indispensable à toute administration publique. Par là, elles étaient portées à consentir spontanément les subsides qui devaient leur assurer ces bienfaits élémentaires. Habitués d’ailleurs à la pression douloureuse et violente du mécanisme financier de la monarchie, les timides représentants des institutions populaires se montraient, en général, de composition peu redoutable. Le gouvernement de Bedford rendit à la morale, à la foi jurée, cet hommage, auquel ses intérêts prêtaient un appui tout à fait identique : les états généraux et provinciaux furent conservés. Ils lui servirent à battre monnaie. Les Anglais remplirent exclusivement jusqu’aux moindres charges militaires. Mais les vainqueurs abandonnèrent aux Français la majorité des offices administratifs, qui touchaient à l’assiette et à la perception des finances[17].

Les ordonnances rendues au nom du gouvernement d’Henri VI font partie d’un grand recueil historique, connu sous ce même titre. Nous pouvons donc, nous dispenser d’en reproduire ici l’analyse. Il nous suffira de rappeler les matières principales qui en forment le sujet.

Indépendamment de la question, sans cesse renouvelée, des monnaies, les édits émanés de l’autorité anglaise, à cette époque, sont relatifs à l’organisation de l’ordre judiciaire inférieur, ou juridiction du Châtelet ; à l’exercice de la chirurgie dans la capitale ; aux courtiers de chevaux : à la police extérieure des mœurs dans Paris ; aux spéculations sur les rentes hypothécaires à la draperie de Beauvais, à l’union des chambres des comptes de Caen et de Paris ; à la draperie de Rouen ; et autres objets semblables. Un diplôme, en date du mois d’août 1424, confirme les privilèges de la marine portugaise, qui venait commercer à Harfleur[18].

La Loire formait alors la limite septentrionale et orientale des états de Charles VII. Elle circonscrivait ainsi le théâtre d’incessantes hostilités. La guerre sévissait toujours sur la rive droite de ce fleuve, ou sur quelques points de son long parcours.

Après la bataille de Cravant, les Anglais s’emparèrent des châteaux de Coucy et de la Roche. Le comte de Salisbury marcha de nouveau sur la Champagne, et le comte de Suffolk sur le Nivernais, pour disputer aux troupes de Charles VII la possession intégrale de ces provinces. Un mouvement tenté par les Français, du côté de Guise, fat repoussé avec perte. Vers le mois de décembre 1423, Perrinet Grasset, Bourguignon, leur enleva la Charité-sur-Loire. Compiègne, pris et repris, tomba au pouvoir des ennemis. La Fère en Tardenois capitula le 14 février 1424. Sur la fin du même mois, Montaiguillon[19] en Champagne et le Crotoy, citadelle de Jacques d’Harcourt, se rendirent aux Anglais[20].

Jacques d’Harcourt, jusque dans ces derniers temps, avait porté haut et honorablement le drapeau de son parti. Les Anglais vinrent assiéger définitivement le Crotoy à la Saint-Jean (24 juin) 1423. Se voyant assailli par des forces supérieures, Jacques d’Harcourt s’avisa d’un heureux stratagème. Pendant la nuit, il simula une sortie. En ce moment, deux de ses émissaires traversaient la ligne des assiégeants, sans être aperçus. Ces envoyés se rendirent à Bourges auprès du roi, qui leur promit du secours. Mais bientôt les sollicitations du bâtard de la Baume et la malheureuse expédition de Cravant ne permirent pas à Charles VII, ou à son conseil, de réaliser cette promesse[21].

Jacques d’Harcourt, instruit de ces faits, désespéra de la situation. Il capitula le 5 octobre et s’obligea de rendre la place, au plus tard le 4 mars suivant, si d’ici là, selon la formule d’usage, il n’était point secouru. Sous ce rapport, le défenseur du Crotoy ne conservait pour ainsi dire aucune illusion. Il partit vers la fin d’octobre, peu après la signature du traité. Ce contrat stipulait, en faveur du capitaine français, une retraite accompagnée des honneurs de la guerre. Jacques s’y réserva également le droit de continuer à défendre sa cause au delà des rivières de Seine et de Loire. Sept navires de la marine du Crotoy lui étaient assurés pour son transport.

Il commença par envoyer ses deux frères Jean d’Harcourt, évêque d’Amiens, et Christophe d’Harcourt, en Hainaut, pour y prendre et ramener ses enfants, qui habitaient cette province. Dans l’intervalle, Jacques vendit à Abbeville et ailleurs tout ce qu’il possédait. Ayant ainsi réalisé sa fortune, il la chargea sur ses navires et s’embarqua lui-même, suivi d’une certaine compagnie de gens d’armes[22].

Jacques d’Harcourt avait épousé en 1417 Marguerite de Melun, seule fille et héritière de Guillaume de Tancarville, vicomte de Melun, seigneur de Montreuil-Belley en Anjou, grand bouteillier de France, mort à la journée d’Azincourt. Ses enfants l’avaient précédé à Montreuil-Belley[23]. Pour ce qui est de Jacques, il cingla d’abord vers le Mont-Saint-Michel en Normandie. Le capitaine fit une station dans ce poste, qui obéissait au roi de France. Puis, poursuivant sa route par le littoral de l’Océan., il remonta la Loire et vint rejoindre sa famille. à Montreuil. De là, il prit le chemin du Poitou[24].

Marguerite de Melun était la propre nièce de Jean Larchevêque, seigneur de Parthenay en Poitou. Le riche héritage de ce grand feudataire devait un jour appartenir aux enfants de Jacques et de Marguerite. Le seigneur d’Harcourt se rendit à Parthenay, auprès de son oncle d’alliance. Jean Larchevêque, avancé en âge, avait essuyé dans sa province toutes les vicissitudes de la guerre civile. Il tenait et avait toujours tenu pour la cause bourguignonne. Jacques d’Harcourt sonda les sentiments du vieillard, et tenta de l’émouvoir à embrasser le parti du roi Charles. Le sire de Parthenay repoussa les ouvertures de son neveu, ainsi que ses instances. Il congédia le comte, après lui avoir témoigné d’ailleurs la plus cordiale et la plus gracieuse hospitalité[25].

L’hôte éconduit se rendit alors à la cour de Charles VII, qui résidait à peu de distance. Après avoir conféré sur ce sujet, avec le conseil royal, il retourna, suivi d’une compagnie de «gens de fait, » armés en guerre, à Parthenay. Mais le sénéchal, averti, se tenait sur ses gardes. Jacques d’Harcourt posa une embûche aux portes de la ville. Puis il se présenta de nouveau près de Jean, qui lui fit le même accueil que par le passé.

En sortant de table, le capitaine interpella son amphitryon et le somma de lui livrer ce que Jacques appelait son héritage. Sur le refus du sénéchal : Bel oncle, lui dit Jacques, je vous fais prisonnier du roy ! A ces mots, il mit la main sur Jean Larchevêque. Les compagnons du capitaine tirèrent leurs épées. Beau neveu, répliqua le vieillard, gardez que vous faites ! Pendant que les assaillants cherchaient à s’emparer de Jean Larchevêque et de ses officiers, une cloche, mise en mouvement par de fidèles serviteurs, se fit entendre[26].

A ce signal convenu, des soldats apostés par le sire de Parthenay, les hommes de la ville, accoururent en foule. Jacques d’Harcourt, à son tour assiégé, poursuivi, se réfugia dans la salle basse d’une tour étroite, où se trouvaient quelques harnois de bataille. Il eut d’abord les deux cuisses percées d’un coup de lance, qui lui fut porté, du dehors, à travers une lucarne. Les soldats de Jean Larchevêque pénétrèrent enfin dans sa retraite et le mirent à mort, lui et vingt-sept de ses compagnons[27]. Jacques d’Harcourt termina ainsi, misérablement, dans une expédition au moins équivoque, la noble carrière qu’il avait jusque-là fournie.

Quand le terme du 4 mars fut expiré, le Crotoy, demeuré sans défense, tomba au pouvoir des Anglais. Rue et Abbeville éprouvèrent le même sort. Noyelles et Saint-Valéry furent rasés[28]. Le parti de Charles VII ne subit pas toutefois sans compensations ces pénibles revers de la fortune, En, août 1423, les Anglais et Bourguignons furent défaits dans une rencontre près de Bourges. Le 17 du même mois, eut lieu la journée de Bussière, près Mâcon. Jean de Toulongeon, maréchal de Bourgogne, y fut pris avec cent soixante chevaliers ou écuyers de nom. Cette capture importante servit de base à un échange, dans lequel le connétable des Écossais et le comte de Ventadour, prisonniers de Cravant, recouvrèrent la liberté[29].

Le 26 septembre, Jean VIII d’Harcourt, comte d’Aumale, remporta la victoire dite de la Broussinière ou de la Gravelle, au Maine[30].

Yolande d’Aragon, reine de Sicile, habitait le château d’Angers. Elle fut informée que le comte de Suffolk, suivi d’environ trois mille hommes, venait de s’établir à Ségré en Anjou. Delà, il portait ses ravages dans les alentours. La reine avertit aussitôt Ambroise de Loré. Ce dernier accourut à Tours, se concerter avec le comte d’Aumale, lieutenant pour le roi dans ce district militaire. Une expédition fut immédiatement dirigée sur le point indiqué[31].

Anne de Laval (fille de Jeanne de Laval, veuve du grand Du Guesclin), était dame du lieu o allait se passer cette action. A la demande du comte d’Aumale, Anne lui envoya son fils, André de Laval, pour y faire ses premières armes. L’aïeule, en se séparant de son petit-fils, lui ceignit elle-même l’épée qu’avait portée l’illustre connétable et lui dit : Dieu te fasse aussi vaillant comme celui à qui ceste épée estoit ![32]

Le futur maréchal de Lohéac, André de Laval, âgé, de douze ans[33], dit-on, reçut à la. Gravelle, l’ordre de chevalerie sur le champ de bataille.

Ambroise de Loré, le bâtard d’Alençon, Jacques de Montenay, Louis de Tromargon, Jean de la Haye, baron de Coulonces, et beaucoup d’autres, se distinguèrent parmi les Français, aux côtés du capitaine-général. La journée, inaugurée sous les auspices de Du Guesclin, fut heureuse. Les Français remportèrent un avantage complet et signalé. Les Anglais perdirent au moins quinze cents morts[34] et trois ou quatre cents prisonniers. Parmi ces derniers, se trouvaient le commandant en chef des forces ennemies, John Pole, son frère, et la plupart des capitaines anglais, qui gardaient les villes et châteaux de la Normandie[35].

La victoire de la Gravelle causa, dans le parti royal, une impression de joie d’autant plus vive, qu’il était moins accoutumé à de pareils succès. Charles VII, en ce moment, habitait le château de Loches. Le 28 au soir, il fut informé de cet heureux événement. Le lendemain 29, il écrivit aux autorités de Lyon, pour leur transmettre cette nouvelle, en les invitant à la propager autour d’elles. Jean d’Harcourt, comte d’Aumale, fit vœu d’élever une chapelle commémorative sur le lieu même de la bataille. Le roi, quoique pauvre, contribua, par lettres du 27 octobre, à cette fondation, pour une somme de 4.050 livres tournois[36].

Le vainqueur de la Gravelle, poursuivant sa marche, se porta devant. Avranches et tenta le siège de cette ville, mais sans y réussir. De là, il poussa jusqu’à Saint-Lô et retourna, muni de quelque nouveau butin, dans le Maine. Le 3 octobre suivant, Poton de Saintrailles s’empara de la ville de Ham sur la Somme[37].

Au printemps de 4124, les parties belligérantes se disposèrent à se porter réciproquement de nouvelles atteintes. L’archevêque de Reims, Regnauld de Chartres, venait, pour fruit de son ambassade en Écosse, de ramener au roi le comte de Douglas, accompagné de dix mille Écossais. Le duc de Bedford reçut également des recrues d’Angleterre. Jean de Lancastre n’avait cessé de parlementer auprès de Jean VI, duc de Bretagne. Il témoigna une incessante condescendance au duc de Bourgogne, afin de maintenir intacte l’alliance que l’un et l’autre avaient formée[38].

Cependant la reine Yolande reprenait, de son côté ; l’ascendant de son influence et le cours de ses rapports affectueux avec son parent et allié, le duc de Bretagne, En novembre 1423, l’éloquente princesse résidait à Nantes, entourée des hommages et de l’hospitalité de Jean VI. Quelques mois plus tard, selon le témoignage de Berry le héraut, les ports de Bretagne s’ouvrirent au débarquement des Écossais, auxiliaires du roi de France[39].

Le légat du pape Albergati, cardinal de Sainte-Croix, tentait au nom du Saint-Père, des efforts vraiment religieux, pour rétablir la paix entre la France et l’Angleterre. En même temps, le duc Amédée de Savoie poursuivait ses instances auprès de Philippe le Bon, afin de réconcilier ce prince de la fleur de lis avec la couronne. En Bourgogne même, Charles VII comptait aussi d’autres partisans dont l’aide ne devait pas lui être inutile[40].

Odette de Champdivers, la petite reine, était originaire de cette contrée. Une fille, nommée Marguerite naquit, vers 1407, de sa liaison avec le roi Charles VI. Tant que ce prince vécût, les ressources ne manquèrent pas à la compagne de sa vie souffrante et intime. Odette reçut en présent deux beaux manoirs, ainsi que toutes leurs dépendances et leurs revenus ; l’un sis à Créteil et l’autre à Bagnolet près Paris. En 1418, le roi alloue à Odette et à sa fille devenue grande, les produits du péage de Saint-Jean de Lône et du rouage[41] de Troyes. Par acte de 1422, une somme annuelle de cinq cents livres, sur le péage de Saint-Jean de Lône, devait être spécialement et viagèrement attribuée à la princesse Marguerite[42].

Charles VI étant mort, Odette de Champdivers se retira en Bourgogne, à Saint-Jean de Lône, près Champdivers, terre patrimoniale de sa famille. Mais bientôt l’Anglais mit la main sur le domaine de Charles VI. Le péage de Saint-Jean de Lône (8 septembre 1423) fut transporté à Philippe le Bon. Odine ruinée se tourna vers le duc de Bourgogne. Elle demanda et obtint quelques secours. En octobre 1423, le duc accordait à la mère de Marguerite, une libéralité de vingt livres ; puis, en décembre, pour elle et sa fille, autre libéralité : trente livres !

La honte finit par monter au front des suppliantes, Charles VII, dans son enfance, avait parfaitement connu, à Paris la petite reine. Sa sœur naturelle, Marguerite, avait grandi devant ses yeux. A cette époque, les liens du sang unissaient dans un étroit faisceau les membres de la famille, légitimes ou autres. Ces traditions vivaient et s’observaient particulièrement au sein de la dynastie royale. L’intérêt froissé, l’humiliation, éveillèrent, dans le cœur de ces deux femmes, des sentiments d’un ordre plus élevé. Une cause plus grande que la leur et non moins juste, la cause de la France et du fils de Charles VI, émut leur sympathie. Marie de Berry, duchesse de Bourbonnais, gouvernait ce duché, en l’absence de son mari, le duc Jean, prisonnier des Anglais depuis la journée d’Azincourt. La princesse Marie avait aussi l’âme française. Odette et Marguerite nouèrent des intelligences avec la cour de Bourges, avec la duchesse Marie. Elles ourdirent une conspiration, dont le réseau s’étendait jusqu’en Suisse. François Surrat, marchand de Genève, c’est-à-dire banquier, prêtait de l’argent au roi de France et comptait au nombre des affiliés[43].

Dans les premiers jours d’avril 1424, Odine habitait Dijon. Là, se trouvait également de passage, frère Étienne Charlot, natif du Bourbonnais et cordelier du couvent de, Beuvray-lès-Autun. Frère Étienne était un émissaire secret, envoyé par Charles VII, pour épier les mouvements politiques et militaires de Philippe le Bon. Odine, instruite de sa présence, lui dépêcha son écuyer, qui pria ce religieux de venir la trouver. Le moine et Odette conférèrent ensemble au logis de la petite reine. Odine de Champdivers apprit à l’envoyé que des notables de Lyon avaient secrètement vendu cette cité au comte de Salisbury. Né sujet du duc de Bourbon, lui dit-elle, portez en toute hâte ces nouvelles à madame de Bourbon.

Le cordelier se rendit aussitôt près de la duchesse, au manoir de Chentelle[44]. Cette princesse le dirigea sans délai sur. Bourges, porteur d’une lettre. Charles VII, ayant pris connaissance de la dépêche, écrivit immédiatement au sénéchal et autres autorités de Lyon. La ville fut ainsi préservée du péril. En même temps, le roi expédia un gentilhomme à madame Odine, pour lui répondre et pour lui adresser de nouvelles instructions.

Le 10 avril 1424, au moment où le Franciscain rentrait à son couvent, il fut arrêté et interrogé. Conduit, le 26, à Dijon, pour être confronté avec Odette, il subit devant le bailli de cette ville un nouvel interrogatoire. Le même jour, mademoiselle de Champdivers et sa fille étaient appelées également en justice. Mais on y mit plus de forme que pour le religieux. Ainsi qu’il était d’usage, lorsqu’un témoin appartenait au sang royal, Odette et Marguerite comparurent devant le chancelier de Bourgogne, assisté du grand conseil de Philippe le Bon.

Toutes deux surent ménager, avec un art vraiment féminin, le duc bourguignon, dont l’aide parcimonieuse leur était encore indispensable. Elles déployèrent toutefois, dans cet interrogatoire, beaucoup d’intelligence et de fermeté. Elles confirmèrent les aveux du cordelier, revendiquant la droiture des sentiments qui avaient guidé leur conduite. Odette déclara enfin qu’ayant perdu tout son bien et celui de sa fille, elle ne vouloit pas perdre son âme ; et se justifia hautement de ce qu’elle avait fait.

Nicolas Raulin, chancelier de Bourgogne, prêtait, dans ce temps même, une oreille favorable à l’intervention du duc de Savoie en faveur du roi de France. Odette et sa fille recouvrèrent leur liberté. Au mois de septembre 1424, l’une et l’autre habitaient encore la Bourgogne. Mais douze mois ne s’étaient pas écoulés, qu’elles avaient trouvé un asile en Dauphiné, Sur le domaine propre du prince Charles, dans cette noble contrée, si fermement unie, de tout temps, à la cause nationale.

Odette disparaît dès lors ; et, probablement, elle mourut bientôt, dans un pénible état d’abandon et de détresse. Mais sa fille, Marguerite de France, devait lui survivre. Charles VII ne l’avait point perdue de vue : il ne tarda pas, comme nous le dirons prochainement, à lui donner les marques d’une véritable sollicitude[45].

Les deux armées reprirent la campagne au printemps de 1424. Charles VII avait convoqué son ban à 6ergeau pour le 15 mai. Les états de Languedoc accordèrent une nouvelle aide de 150,00q livres, et ceux de Dauphiné un subside de quatorze mille florins. La Saintonge s’imposa une contribution analogue. Au moment où le roi licenciait les milices des pays, il donna, par exception, une marque de spéciale confiance à sa fidèle province du Dauphiné. Le gouverneur Randon de Joyeuse assembla les gentilshommes : il avait ordre de répondre à l’appel du prince, suivi de deux cents hommes d’armes. Randon en amena plus de mille[46].

Malgré les efforts et les prouesses de La Hire, de Saintrailles et de Raoulet, en Picardie, les Français éprouvèrent de nouvelles pertes, faiblement compensées par quelques succès[47].

Oisy en Thiérache, près de Laon, se rendit le 6 mai 1424 aux Anglais. Sézanne fut assiégée du 6 avril au 24 juin, par le comte de Salisbury et le seigneur de Châtillon, capitaine bourguignon qui commandait, sous les ordres de l’Anglais, en Champagne. Cette petite ville avait pour défenseur un écuyer du pays, nommé Guillaume ou Gille Marin, d’une bravoure éprouvée. Le capitaine était assisté de Roger de Criquetot, chevalier normand. Trois ou quatre cents combattants, au plus, composaient les forces des assiégés. L’ennemi, après avoir bombardé la ville, leur proposa de capituler : mais tous refusèrent de se faire Anglais. Salisbury alors donna l’ordre de creuser la mine. Pressés par cette extrémité, les assiégés se précipitèrent au dehors, en opérant contre les assiégeants une irruption des plus meurtrières et désespérées[48].

Il fallut toutefois céder à la force et au nombre. Gille Marin et plus de deux cents de ses compagnons d’armes périrent dans cette rencontre. Criquetot et les autres demeurèrent prisonniers. Les Anglais entrèrent dans la ville, pillèrent les biens, violèrent les femmes et démolirent les fortifications de la place. Gaillon en Normandie, dont le célèbre château appartenait à l’archevêque de Rouen, fut pris par les Français, le 16 avril et assiégé par les Anglais le 10 mai. Ceux-ci, le 8 juillet, s’en emparèrent définitivement et rasèrent la forteresse. Vers le même temps, Nesle-en-Tardenois, Braine, Pontarcy, Tours-sur-Marne, La Folie, Basoches en Champagne, furent le théâtre de semblables hostilités[49].

Cependant, les Anglais occupaient au Bec-d’Allier, confluent de cette rivière avec la Loire, une place forte nommée Cufy. De ce point frontière, les Anglo-Bourguignons causaient de grands dommages au roi Charles. Une expédition, dirigée contre Cufy-sur-Loire, fut confiée à l’amiral de France, Louis de Culan. Ce haut personnage militaire avait sous ses ordres le vicomte de Narbonne, Borno Cacaran et Théodore de Valperga, Lombards ; le fameux Rodrigo de Villa-Andrando, Castillan, qui paraissait pour la première fois au delà du Rhône, et d’autres étrangers. La place de Cufy se rendit par traité. au roi de France. Deux forteresses, la Guerche et Thuisyen-Nivernais, situées dans le voisinage de Cufy furent également recouvrées par les Français[50].

En 1424, le château d’Ivry[51] en Normandie redevint aussi français. Cette place forte, avec le titre de comté, appartenait au prince Arthur de Richemont, qui les tenait en fief du roi d’Angleterre. Géraud de la Pallière, capitaine gascon, s’en empara pour le roi Charles VII. Suffolk, par ordre du duc de Bedford, vint y mettre le siége le 15 juin. Quatre cents hommes composaient seuls toute la garnison. Le 5 juillet, Géraud capitula. Il promit conditionnellement de rendre la place au 15 août et fournit, comme garantie, dix otages. En même temps, il écrivit au roi pour lui demander du secours[52].

Le conseil assemblé résolut de porter la guerre de ce côté. Des gens d’armes furent mandés de toutes parts. Le duc de Touraine, assisté du connétable Bucan, partit de Tours, suivi des Écossais. Ils se portèrent vers Châteaudun, où s’opéra leur jonction avec le duc d’Alençon, le comte d’Aumale, le vicomte de Narbonne, et le maréchal de la Fayette. Tous se dirigèrent ensuite par Bonneval, Chartres, Dreux, et vinrent se poster à Nonancourt. En traversant le pays ennemi, ces troupes désordonnées exercèrent toutes sortes de ravages. Arrivés à Nonancourt, les chefs de l’expédition envoyèrent devant Ivry des coureurs, pour éclairer et reconnaître la place. Ceux-ci retournèrent bientôt, annonçant que le duc de Bedford en personne assiégeait Ivry, avec toutes les forces de l’occupation. Les assiégeants s’étaient en outre fortifiés dans une position naturellement inexpugnable[53].

A ces nouvelles, en dépit des promesses, formelles et scellées, de secours, que Giraud de la Pallière avait entre les mains, les capitaines passèrent outre, abandonnant le siége d’Ivry. Au lieu de marcher au nord-est vers cette place, ils firent diversion au sud-ouest et prirent Verneuil aux Anglais, par stratagème. Des Écossais contrefirent des prisonniers ou blessés anglais. Ils se teignirent de sang à plaisir, comme faisaient les Malandrins dans les cours des Miracles et se lièrent par des cordes à la queue des chevaux[54].

Dans cet équipage, ils se présentèrent aux portes de Verneuil, poussant de grandes lamentations et s’écriant, à hante voix, dans le meilleur anglais possible, que le régent Bedford et ses gens venaient d’être exterminés par les Français devant Ivry. Verneuil faisait partie du domaine ou héritage du jeune duc d’Alençon, qui était aussi comte du Perche. Jean, duc d’Alençon, se trouvait parmi les capitaines assiégeants. A la vue de leur seigneur naturel, les habitants n’hésitèrent plus. Les portes de la ville, puis du château, s’ouvrirent au duc et au roi de France[55].

Cependant Géraud de la Pallière, au jour dit (15 août), évacua le château. Bedford, après avoir pris possession de la place, continuait d’occuper fortement sa position, attendant toujours ses adversaires. Gommé il ne les voyait point paraître, il envoya le comte de Suffolk en éclaireur. Ce lieutenant, orienté par des épies, s’avança progressivement à Damville et à Baiseux[56], puis à Breteuil-en-Perche. Bedford, pendant ce temps, s’était établi à Évreux[57].

De leur côté, les chefs qui occupaient Verneuil au nom du roi, mirent sur les champs Guillaume de Peliége, capitaine expérimenté du Berry. En chevauchant pour explorer le pays, Guillaume rencontra un religieux, qui avait, le matin, chanté la messe devant le duc de Bedford. Conduit au camp, ce religieux annonça que le régent anglais marchait sur Verneuil, avec toutes ses forces[58].

Le 17 août 1424, les deux armées furent en présence, sous les murs de cette ville. Forte d’environ quatorze mille hommes, l’armée du duc de Bedford se composait d’Anglais et des gens du commun, fournis par les diverses contrées de la France soumises à l’étranger. Tels étaient les contingents de Paris, Rouen, Chartres, Senlis ; de la Normandie, de la Picardie et autres. Toutefois une portion des nobles de Normandie, sans s’arrêter au danger de perdre leurs fiefs et même la vie, désertèrent, ce jour même, le drapeau anglais et se refusèrent à combattre le roi de France[59].

L’armée anglaise, très aguerrie et disciplinée, comptait dans son sein huit mille de ces archers, qui s’étaient, depuis plus de cent ans, montrés si redoutables, en mainte occurrence, et qui jouissaient d’une renommée européenne. Elle avait pour commandants, les chefs de guerre bourguignons les plus accrédités et l’élite des capitaines anglais : les comtes de Suffolk, de Warwick, de Salisbury, Scales, Talbot, etc. etc.[60]

Supérieure en nombre, l’armée qui soutenait la cause de Charles VII, s’élevait au moins à vingt mille combattants. Les Français proprement dits, Dauphinois, Bretons et autres, en formaient. la minime partie. On y voyait, dans une plus forte proportion, des Espagnols et des Lombards. Les Écossais enfin composaient le fond principal. Dans son ensemble, cette multitude, incohérente et mal armée, n’avait ni unité, ni discipline. Le sentiment moral qui, seul, mérite en fait de guerre, l’estime et l’intérêt, n’existait point pour la masse de ces soldats rassemblés. Les Écossais étaient des troupes très braves, pleines d’audace et qu’animait contre les Anglais une haine de frères, la plus fanatique et la plus inexorable. Mais leur courage offrait tous les périls de la fougue sans frein, sang mesure, et de la témérité[61].

Parmi les chefs placés à la tête de ces forces, il faut citer les comtes de Douglas et de Bucan, Borno Cacaran, le duc et le bâtard d’Alençon, les comtes d’Aumale, de Tonnerre et de Ventadour ; le vicomte de Narbonne, La Fayette, La Hire, Saintrailles, Le Roussin ou Roncin, le seigneur de Graville, etc. Après s’être emparés de Verneuil, les capitaines avaient délibéré sur la ligne de conduite qu’ils devaient tenir. Affronter en bataille rangée les Anglais et leurs formidables archers, était une imprudence que déconseillaient à la fuis l’expérience et la raison. C’est ce que reconnut tout d’abord la meilleure et la plus saine partie du conseil. L’avis contraire fut émis avec chaleur par les Écossais. Ces derniers eurent pour échos ou pour appui, quelques jeunes gentilshommes français de grande volonté et courage, mais qui n’avoient pas cognoissance des faits de guerre et qui venoient droit de leurs maisons[62].

Les Écossais jouissaient de l’omnipotence. D’ailleurs, pendant ces débats, l’ennemi était à quatre lieues de distance et en marche. Il n’y avait plus qu’à combattre. L’armée de Charles VII se forma en un seul corps, sans avant-garde et flanquée de deux ailes. Le corps principal ou bataille devait agir à pied. Placée à droite et à gauche, la cavalerie avait pour mission de tourner l’ennemi à un moment favorable et de rompre les redoutables archers. L’une des ailes fut confiée à Cacaran, Valperga et Lurquin Ruz, Lombards. Elle était placée près du lieu patibulaire de la ville ou justice. Le baron de Coulonces, Saintrailles, La Hire et le Roussin eurent la charge de l’autre aile, qui se déployait du côté de la forêt[63].

Le duc de Bedford rangea également son ost en un seul corps de bataille, marchant à pied. Les chevaux, les vivres, un peu d’artillerie et le reste du charroi, furent placés à l’arrière, sous la garde des pages et varlets. Ce vaste carré était bordé de tous côtés par des archers. Chacun de ces soldats, sur le front de bandière, plaça devant lui en terre un pieu aigu et fixé obliquement. Ainsi fut formée une palissade qui présentait toutes les pointes à l’ennemi. Le régent de France, durant cette campagne, marchait à la tête des troupes. Vêtu d’une robe de velours bleu, il portait à la poitrine une grande croix blanche ou croix de France, sur laquelle se dessinait, un peu plus petite, la croix rouge d’Angleterre. Quatre bannières, sans compter sa bannière propre, le précédaient, confiées à un pareil nombre de chevaliers. Deux de ces enseignes offraient les armes de France, pleines sur la première, et sur l’autre, écartelées d’Angleterre, pour signifier aux yeux de tous la réunion des deux couronnes[64].

Arrivé près de la Justice de Verneuil, Bedford reconnut le général écossais, duc de Touraine. Il lui envoya un héraut pour le complimenter et l’inviter à boire. Douglas répondit dans les mêmes formes à cet acte de courtoisie. Puis les deux batailles marchèrent à la rencontre. Le vicomte de Narbonne, s’élançant avec une pétulance méridionale, ne put être suivi qu’avec peine des chefs écossais. Ces derniers toutefois étaient jaloux d’aborder les premiers. Les Anglais, au contraire, s’avançaient pesamment et lentement, mais en bon ordre, conservant leur assiette et ménageant leurs forces. Quand la jonction eut lieu, déjà les Écossais et les Espagnols arrivaient presque hors d’haleine et débandés[65].

Il était trois heures de l’après-midi, lorsque le cri universel et accoutumé des Anglais se fit entendre. Le vicomte de Narbonne alla frapper au centre, contre le comte de Salisbury, qui soutint, en ce jour, le principal effort et le poids le plus lourd de la bataille. L’aile des Lombards attaqua l’un des coins du carré anglais, sans réussir à l’entamer. Repoussés de ce côté, les Italiens tournèrent en effet l’ennemi, comme il leur avait été ordonné. Ils parvinrent à pénétrer en partie jusqu’au charroi et autres impedimenta. Mais les archers qui défendaient cette face ne leur permirent pas de désorganiser le carré. Les Lombards, avides surtout de pillage, se souciaient médiocrement de l’issue générale. Ils tuèrent des pages, détachèrent quelques chevaux et se chargèrent de butin. Puis, se voyant harcelés cruellement par les archers, ils s’enfuirent, de toute la vitesse de leurs coursiers, dans la direction de Chartres. Les Lombards abandonnèrent ainsi sans retour le champ de bataille[66].

L’aile des Français, conduite par La Hire, Saintrailles, etc., entama l’ennemi, le culbuta et traversa le carré de part en part, en lui causant un dommage effroyable. Mais parvenus à la seconde extrémité, ou à l’issue de cette trouée, les cavaliers qui composaient cette aile, crurent à la déroute des Anglais. Ils se détournèrent à la poursuite des fuyards, qu’ils chassaient devant eux. Leur départ priva le reste des combattants d’une précieuse assistance. Parmi les capitaines de cette aile, se trouvait le baron de Coulonces, qui devait exercer le commandement, comme lieutenant du roi. Une querelle de préséance s’éleva entre lui et le duc d’Alençon. Forcé de céder le pas au prince du sang, ce chevalier quitta la place en présence de l’ennemi. Pendant toute la durée du conflit, il se tint avec sa compagnie, sur un monticule, témoin immobile de la bataille[67].

L’infanterie de Charles VII, ou les combattants à pied, se virent ainsi réduits à leurs propres forces et privés du secours qu’ils attendaient de la cavalerie, contre les archers. Les Anglais de la face antérieure et du centre s’étaient couchés dents contre terre, au passage des cavaliers. Une fois délivrés de cette arme spéciale, ils se remirent debout et recommencèrent la lutte. Les archers de l’arrière, après avoir vu fuir les Lombards, se rallièrent avec les archers de la ligne antérieure. Aux cris de Saint-Georges d’une part et de Saint-Denis de l’autre, la mêlée s’établit entre les Anglais et leurs ennemis.

Pendant trois quarts d’heure, la lutte se balança des deux parts, avec une telle puissance que l’issue resta indécise. Le duc de Bedford, tête énergique couronnant un robuste corps, dominait les siens de la pensée comme du geste. Armé d’une hache d’armes qu’il agitait à deux mains, il était le centre qui attirait à lui le principal effort de l’attaque. Le comte de Douglas, notamment, dirigea ses continuels efforts vers le point où il apercevait lé duc, afin de lui répondre en personne, au sujet du message que lui avait apporté le héraut. Le redoutable Bedford, frappant de mort tous ceux qui l’approchaient, demeura comme invulnérable et inaccessible[68].

Un instant la bannière de. Saint-Georges fut foulée aux pieds. Les Anglais plièrent, et la victoire sembla pencher pour leurs adversaires. Mais bientôt l’étendard fut relevé. L’ordre et le sang-froid se rétablirent parmi les soldats. Partout, les Écossais engagés dans le combat déployèrent une bravoure admirable et luttèrent jusqu’à l’extermination. Les Dauphinois et la plupart des capitaines français méritèrent les mêmes éloges. L’avantage enfin se décida du côté des Anglais. Le sang coulait par grands ruisseaux. D’après les historiens du temps, la journée de Verneuil fut l’une des plus imposantes et des plus meurtrières qui pussent être citées de mémoire d’homme[69].

Plus de neuf mille combattants, au dire des hérauts, périrent du côté de Charles VII. Presque tous appartenaient à la nation d’Écosse. Cette victoire coûta aux Anglais environ quatre mille hommes. Les vainqueurs firent en outre quelques centaines de prisonniers. Au nombre de ces derniers, se trouvèrent le maréchal de la Fayette, les seigneurs de Gaucourt et de Mortemar, A. de Chabannes, page du comte de Ventadour, etc. Saintrailles, menacé dans la déroute, dut son salut à la vitesse de son cheval. La plupart des chefs de l’expédition succombèrent[70].

Ainsi finirent le comte de Bucan, connétable de France ; Archibald Douglas, duc de Touraine ; James, son fils ; les comtes d’Aumale, de Tonnerre, de Ventadour ; Guillaume, le dernier des vicomtes de Narbonne de la maison de Lara ; Perron de Luppé ; Antoine de Sourches, sire de Malicorne ; Le Roussin, Louis de Braquemont, Gilles de Gamaches, les seigneurs de Montenay, de Graville, etc., etc. Le vicomte de Narbonne fut exhumé d’un fossé où il gisait sans vie. Jean, duc de Bedford, néanmoins, pour complaire à Philippe le Bon, fit pendre le noble vicomte, comme ayant participé en 1419, au meurtre de Jean sans Peur. Après ce que ledit duc de Bedford eut obtenu la victoire,... si, rassembla ses princes autour, et en grande humilité remercia son créateur, ses mains jointes et les yeux levés vers le ciel, de la bonne aventure qu’il lui avait envoyée. Après, furent dénués et dévêtus grande partie des morts et fut pris ce qu’il y avait de bon. Le lendemain 18 août, la ville se rendit par composition au roi d’Angleterre. Le 8 septembre suivant, Bedford retourna triomphant à Paris, où des réjouissances publiques devaient célébrer cet événement[71].

Quelques années plus tard, un Français, qui avait combattu à Verneuil, se rendit ermite, au lieu qui avait été témoin de la bataille. Il fit bénir le champ, fonda une chapelle, et là, recueillit pieusement, pour l’honneur de la cause qu’il avait défenduc, les ossements des victimes. En 1426, les états du Dauphiné instituèrent un service perpétuel destiné à consacrer ce souvenir, dans l’abbaye célèbre de Saint-Antoine de Viennois. On appelait cet office quotidien, la messe de Verneuil[72].

 

 

 



[1] Ms. 9667, 2, 2, à la fin. Berry, Charles VII, p. 370. Montreuil, p. 220. Anselme, etc.

[2] Lettres closes datées du 3 juillet, environ cinq heures après midi. Archives de Saint-Vincent du Mans ; Ms. Blancs-Manteaux, t. VIII, f° 99. Duclos, Histoire de Louis XI. Recueil, 1756, p. 1. Les honneurs de la cour, 1759, p. 216 et s. Monstrelet, éd. d’Arcq, t. IV, p. 173. Bibliothèque de l’École des Charles, 2e série, t. III, p. 137.

[3] Gagny, chap. 79. K. K. 56, f° 27 v°, et 51 v°. Gallia christiana, t. IX, col. 551. Godefroy, Charles VI, p. 798. (Ces deux bassins servaient l’un à l’aspersion, par le moyen d’une petite gargouille, et l’autre à recevoir le liquide tombant du front du baptisé.) Archon, Histoire ecclésiastique de la chapelle des rois de France, t. II, p. 257. Cousinot de Montreuil, p. 239. Ms. fr. 5024, f° viij.

[4] Duclos, Recueil cité, p. 2.

[5] Itinéraire. K. K. 56, f° 49. D. Vaissète, liv. XXXIV, chap. XXIX. K. K. 244, pièce annexée au feuillet 23.

[6] Archives de Tours. Cabinet historique, 1859, p. 104. Ces présents faits au roi et à la reine étaient des profits pour les gens de cour. Les prestations ci-dessus énumérées furent rachetées, eu argent et au rabais, par la ville, des officiers du roi et de la reine. Dom Housseau, t. XV, f° 7 v°.

[7] D. Vaissète, liv. XXXIV, chap. XXIX. Mémorial H. Bourges. P. P. 118, f° 17. Ordonnances, t. XIII, p. 43 ; XV, 4, 211, 277, 330, 679 ; XVI, 67, 70 ; XVII, 474. Redet, Mélanges (documents inédits, in-4°), t. III, p. 235, etc. Azat, sénéchaussée de Toulouse, jugerie de Villelongue.

[8] Ms. Doat, t. IX, p. 279. Quicherat, Aperçus nouveaux sur la Pucelle, p. 19, note 1. Acte du 23 juillet 1423, attestant que les chemins du Poitou n’offrent plus de sécurité publique, par l’occupation des Écossais et autres gens d’armes (Archives des Deux-Sèvres). Aux mois d’août et de novembre 1423, les officiers de la reine en Touraine et en Berry se rendent d’une ville à l’autre, afin de faire rentrer les deniers nécessaires aux dépenses de la maison de cette princesse. Ces officiers marchent sous escorte, par les chemins, pour doubte des Escossais et autres gens de guerre. K. K. 56, f° 31 v°, 35 v°, etc. Cf. Jean Chartier, t. III, p. 318 (f° 13), et Th. Basin, Mémoires, t. I, chap. IV, p. 52.

[9] Ordonnances, t. XIII, p. 44. Sauval, Antiquités de Paris, t. III, p. 233 (Ambassade de Simon Morhier). Ms. fr. 5024, f° 85.

[10] Lettres de Walter Stewart, fils du duc d’Albanie et gouverneur d’Écosse, pendant l’absence et captivité de Jacques I, données à Sterling, le 6 octobre 1423, par lesquelles il jure d’observer les alliances conclues entre la France et l’Écosse. (Trésor des Chartes, carton J, n° 617, pièce 20, Cabinet historique, 1859, p. 24, n° 4829.)

[11] Archives de Tours. Cabinet historique, 1859, p. 25, n° 4830 ; p. 103, n° 2 et suiv. P. P. 118, p. 9. Ms. Baluze, 9987, 3, pièce 1. Cousinot, ch. 211. History of Stuarts, p.138. Chalmel, Histoire de Touraine, II, 187.

[12] Du Mont, Corps diplomatique, t. II, part. II, p. 176. Gallia vetus, t. IV, col. 58. Boudet, Mémoires pour l’abbé de St-Antoine, Lyon, 1746, in-4°, p. 14 et 41. — Par lettres données à Espaly, le 26 décembre 1424, Charles VII confirme à l’abbé de St-Antoine, en faveur de son monastère, l’exemption de toute espèce de tributs. (Ordonnances, t. XIX, p. 264.) 1425, mars, 15, le roi distribue 1.200 florins entre l’abbé de St-Antoine et autres qui s’étaient entremis à la tenue des États du Dauphiné. (Ms. Gaignières, n° 649, 2, pièce 47 bis.)

[13] Sous la régence Murdac. (Interrègne.)

[14] Ces trois derniers princes étaient captifs en Angleterre.

[15] Ms. Harlay, n° 211, f° 10 et suiv. Art de vérifier les dates, Ms. fr. 5053, f° 132, 135, 137.

[16] Pâques, le 23. Saint-Remy, p. 470. Rainaldi, Annales, 1752, in-f°, t. XXVIII, p. 14, § XX.

[17] Comptes de Pierre Surreau, receveur général de Normandie. Ms. de l’ancien fonds français, 9336, 4 ; 9436, 6 ; Bigot, 113 et 119. Voir sur ce sujet deux excellents écrits de M. Charles de Robillard de Beaurepaire, archiviste de la Seine-Inférieure : 1° les États de Normandie, in-8°, et 2° De l’administration de la Normandie, sous la domination anglaise, in-4°, Rouen, 1859.

[18] Trésor des Chartes, J. J., registre 172, pièce 497, f° 641. Ordonnances des rois de France, t. XIII, p, 36 à 88. Lettres des rois et reines, t. II, p. 404. Journal de Paris, p. 664. Félibien, Preuves, t. II, p. 547 b, 549 b, 552 a. P. Cochon, p. 364, note 8. Notice historique sur S. Morhier, prévôt de Paris pour les Anglais ; dans le tome 25 des Mémoires de la société des antiquaires de France, Ms. fr. 5024, f° iiij xx v.

[19] Les ruines de ce château se voient encore sur la commune de Louan (Seine-et-Marne), 19 kilomètres N.-E. de Provins.

[20] Monstrelet, édit. d’Arcq, ibid., p. 173 et suiv. Wavrin, t. I, p. 249 et suiv. Fenin-Dupont, p. 198, 210 et suiv. P. Cochon, p. 449. Journal de Paris, p. 604. Ms. Fontanieu, vol. 113, au 14 février 1424. Religieux, t. VI, p. 460. Ursins, p. 391. Abrégé français, p. 247, 248. Cousinot, chap. 206, 207. D. Plancher, t. IV, p. 76, etc.

[21] Monstrelet, même édition, ibid. Wavrin, t. I. p. 216. Joursanvault, t. II, n° 3388.

[22] Monstrelet, p, 175. M. de Beaurepaire, Administration, p. 45.

[23] Arrondissement de Saumur.

[24] Fontanieu, Titres originaux, portefeuille n° 629, 630, à la date du 13 octobre 1417, b1onstrelet. Saint-Remy. Bonfils, Histoire du Crotoy, p. 107 et suiv. René de Belleval, la Journée de Mons-en-Vimeu et le Ponthieu après le traité de Troyes, 1861, in-16, p. 2 et suiv.

[25] Les mêmes. Bélisaire Ledain, Histoire de Parthenay, p. 221. Fenin-Dupont, p. 206.

[26] Cousinot, p. 188. Fenin.

[27] Les mêmes. Montreuil, p. 254. Berry, Charles VII, p. 328, 375. Saint-Remy, p. 409.

[28] Monstrelet. Beaurepaire, Administration, etc., p. 7, 8, 45.

[29] Cagny, chap. 79. Monstrelet, ibid., p. 105. D. Plancher, IV, 78. Cousinot, chap. 203. Montreuil, p. 221. Berry, Charles VII, p. 370.

[30] Canton de Loiron, arrondissement de Laval (Mayenne). Cousinot, chap. 204.

[31] Bourdigné, II, 153 et suiv. Cagny, chap. 80. Monstrelet, p. 145. Grafton’s Chronicles, t. I, p. 555.

[32] En 1371, Du Guesclin avait été le parrain de Louis, duc d’Orléans. Lorsqu’il tint le prince sur les fonts, il mit dans sa petite main son épée de connétable, et lui dit : Monseigneur, je prie à Dieu qu’il vous doint un tel et si bon tueur, que vous soyez aussi preux et aussi bon chevalier, comme fust oncques roy de France, qui portast espée ! Claude Dormay, Histoire de Soissons, 1664, in-4°, t. II, p. 356.

[33] ...Andry de Laval... lors estant jeune de l’aage de douze ans... (Montreuil). Anselme adopte cet âge et le fait naître en 1411. Perceval de Gagny, toutefois, dit : De l’aage de seize ans ou environ.

[34] La Chronique de Normandie donne, seule, il est vrai, à cette affaire, des proportions beaucoup plus grandes. François (dit-elle) qui estoient petite compagnie, par grand hardement se frappèrent parmy Anglois, en faisant merveilleuse occision, tant que l’honneur leur demeura... Et là, moururent de la partie des Anglois de six à sept mil hommes, sans les prisonniers. Des François peu y moururent, mais plusieurs [furent] navrez (blessés). Comparez Grafton, loc. cit.

[35] Les mêmes. Montreuil, p. 214, chap. 5. Berry, p. 370. Jean Chartier, t. I, p. 33. Chronique de Normandie, f° 181.

[36] Dépêche originale sur parchemin (cabinet de l’auteur). Cousinot, p. 193, note 4. La Roque, Histoire de la maison d’Harcourt, t. II, p. 496.

[37] Journal de Paris, p. 663 b. Cagny, chap. 81. Prise de Ham : Monstrelet. Cette action eut lieu le 3 octobre, éditions Buchon (Panthéon, p. 551), et autres antérieures. M. D’Arcq dit le 13 (t. IV, p. 112). Fenin, p. 212. Le 11 octobre 1423, les Armagnacs s’emparent du château de Hault, près Braisne-le-Comte, saccageant le pays et menaçant la ville de Braisne. (Mémoire du temps cité par M. Stanislas Prioux, Monographie de Saint-Yved de Braisne, 1859, in-fol., p. 89.)

[38] Beaurepaire, Administration, p. 7 ; États, p. 20. Cousinot, chapitres 208, 209. Montreuil, p. 221. Preuves de Bretagne, t. II, col. 1124. Fontanieu, Ms. 113, au 28 avril 1424. Chorier, Histoire du Dauphiné, t. II, p. 421. Le 8 septembre 1423, le gouvernement anglais alloue à Philippe le Bon 2.000 livres de revenus sur le péage de Saint-Jean de Lône et autres produits. (D. Plancher, t. IV, p. 79.) Le 21 juin 1424, Henri VI transporte au même duc la jouissance des comtés d’Auxerre, de Mâcon et de Bar-sur-Seine. (Ibid., p. 76, et Preuves, p. xlj. Lavirotte, Odette, etc., p. 13.)

[39] Lobineau, 1707, t. II, colonne 924. Berry, p. 370.

[40] D. Plancher, t. IV, p. 82 et suiv. Preuves, p. XXXIV et XXXV. Le 25 février 1424, traité de mariage entre Charles de Bourbon, confédéré de Charles VII, et Agnès de Bourgogne. (S. Remi, p. 471. Fenin-Dupont, p. 227.)

[41] Droit sur le transport des marchandises.

[42] Odette de Champdivers, dans la Bibliothèque de l’École des Chartes, 4e série, t. V, p. 176 et suiv.

[43] D. Plancher, t. IV, p. 89.

[44] Arrondissement de Gannat (Allier).

[45] La Barre, Mémoires de Bourgogne, t. II, p. 206, note b. Archives de Dijon. Lavirotte, Mémoire sur Odette, et autres sources réunies et allé huées dans la Bibliothèque de l’École des Chartes, loc. sup. citat.

[46] Lavirotte, Odette, p. 113. (1424, mai et juin.) K. K. 56, f° 67 v°. Chorier, t. II, p. 421.

[47] Monstrelet-d’Arcq, p. 181. Fenin, p. 213. S. Remy, p. 478, etc.

[48] Monstrelet, p. 179 et suiv. Fenin, p. 209 et suiv. Journal de Paris, p. 664.

[49] Les mêmes. Jean Chartier, t. I, p. 38. Cousinot, chap. 210. D. Plancher, IV, 90. Beaurepaire, Administration, p. 45 et suiv. P. Cochon, p. 448 et suiv. Berry, Charles VII, p. 371. Monstrelet, Panthéon, p. 555. Archives de Reims : Lettre du 11 août.

[50] Les mêmes. Raoulet, 183. Quicherat, Rodrigo de Villa-Andrando (Bibl. de l’Éc. des Chart., VI, 119 et s.). Montreuil, 222. Berry, 371.

[51] Successivement appelé Ivry la Chaussée, ou le Cauchie, Ivry-le-Château, et actuellement Ivry-la-Bataille, canton de Saint-André, arrondissement d’Évreux (Eure).

[52] Cousinot, p. 190, chap. 213. Journal de Paris, p. 661. Beaurepaire, Administration, p. 41. Grafton, p. 555.

[53] Les mêmes. Berry, p. 371. Montreuil, chap. 9. Raoulet, p. 184.

[54] Les mêmes. Journal. Monstrelet d’Arcq, p. 189. Chronique de Normandie, f° 180. Wavrin, t. I, p. 256.

[55] Les mêmes. Montreuil, p. 223. Gagny, chap. 182.

[56] Wavrin (témoin oculaire), p. 260. Monstrelet, que Wavrin copie en le contrôlant, dit Vaisseux. Mademoiselle Dupont, dans ses notes sur Wavrin, identifie cette localité avec celle qui porte aujourd’hui le nom de Piseux.

[57] Monstrelet. Fenin, p. 219. S. Remi, p. 470. Basin, t. I, p. 48.

[58] Raoulet, p. 186.

[59] Monstrelet, liv. II, chap. XX. Cousinot, p. 197. Fenin, p. 222. Basin, t. I, p. 48.

[60] Les mêmes.

[61] Les mêmes. Basin.

[62] Les mêmes. Montreuil, p. 223, 224.

[63] Berry, 371. Raoulet, 186. Monstrelet, chap. XX.

[64] Monstrelet, Wavrin, p. 255 et suiv. Les deux autres enseignes étaient celles de Saint-Georges et de Saint-Édouard. Ces quatre pavillons sont représentés en couleur, dans l’ouvrage de sir Harris Nicolas, The battle of Azincourt, 1832, in-8°, p. 330 à 331. Pour la bannière de Bedford (Voyez son livre d’heures, Ms. Lavallière, n° 82).

[65] Berry. Montreuil, p. 225. Cagny, chap. 28.

[66] Montreuil, Raoulet. Journal de Paris, p. 666, 667.

[67] Les mêmes, Montreuil, Raoulet, Berry, 372. Chronique de Normandie, f° 180, v°.

[68] Portraits de Bedford, Monstrelet. S. Remi. Fenin. Wavrin, 267.

[69] Chronique de Normandie, et autres, ci-dessus. Chorier, Histoire du Dauphiné, t. II, p. 421, 422. Le Jouvencel, p. xcj.

[70] Journal de Paris. Raoulet, Chronique Martinienne, f° cclxxv, v°. Beaurepaire, Administration, p. 47. Grafton, p. 556. The names of Frenchmen slayn and Scottes, etc. Ms. Harleyen, dans Delort, Essai critique sur Charles VII, etc. 1524, in-8°, p. 246.

[71] Bourdigné, t. II, p. 155. Monstrelet. D. Vaissète, liv. XXXIV, chap. XXXII. Biographie Didot, au nom d’Aumale. Journal de Paris, p. 667. Félibien, t. II, Preuves, p. 589, b. Montreuil, p. 226.

[72] Chronique de Normandie, Chorier, loc. cit.