L'EUROPE ET LES BOURBONS SOUS LOUIS XIV

AFFAIRES DE ROME. — UNE ÉLECTION EN POLOGNE. — CONFÉRENCES DE GERTRUTDENBERG. — PAIX D'UTRECHT

 

CHAPITRE II.

 

 

Mission de l'abbé de Polignac en Pologne. — Difficultés excessives de cette mission. — Son arrivée à Varsovie. — Sobieski. — Marie-Casimire, sa femme. — La Pologne. — Sa société, sa constitution et ses mœurs. — Trois vices principaux dans sa constitution : nécessité du consentement unanime, droit de confédération et système électif. — Coup d'œil général sur le règne de Sobieski. — Le désir d'assurer l'hérédité dans sa famille est la seule cause de ses fautes et de son impopularité.

 

Plaire à une nation qui n'avait alors ni nos mœurs ni nos habitudes, empêcher chacun des fils d'un héros qui avait été un des plus grands rois de la Pologne d'être élu pour remplacer son père, contrebalancer l'influence d'un souverain voisin dont l'armée menaçante occupait les frontières du royaume, imposer à un peuple chatouilleux et ombrageux un prince étranger, presque inconnu, peut désireux de la couronne, et parvenir à le faire nommer roi, telle fut la mission extraordinaire confiée à l'abbé de Polignac. J'essayerai de montrer qu'il fut toujours à la hauteur des difficultés inouïes qu'elle présenta ; qu'isolé, sans appui, mais éloquent, adroit, résolu, il l'emporta au Milieu de l'anarchie sur un peuple marchant sans règle et sans direction, et que, si quatre années de luttes, d'artifices, d'éloquence, d'intrigues, de courage, ont abouti à un résultat négatif pour le prince de Conti, il est juste d'en attribuer la cause non au négociateur qui a pu saisir la couronne et l'offrir au prince, mais bien à celui-ci dont l'extrême réserve, les perpétuels délais, les désolantes lenteurs et l'indifférence non dissimulée ont paralysé l'action de son zélé et habile représentant.

Le 2 juillet 1693, l'abbé de Polignac quitte la France. Dès ce moment, le but qui lui a été indiqué par Louis XIV est devant ses yeux, et dès les premiers jours de son ambassade, il le poursuit avec une vigueur qui fait déjà présager le succès. A Copenhague, il fixe, avec Bonrepos, notre ambassadeur, les bases d'une alliance de cette cour avec celles de France et de Pologne, alliance qui menaçait tout autant l'électeur de Brandebourg que l'Angleterre et la Hollande. A Dantzig, il termine très-heureusement un différend qui s'était élevé entre les armateurs français et les commerçants anglais, et il donne, de la part de Louis XIV, une distinction enviée à l'abbé d'Oliva, courtisan adroit et insinuant, auquel ses connaissances littéraires et son habileté ont assuré à Varsovie une haute influence qui appartiendra désormais au parti français[1]. A Holowick, il gagne l'affection, qui lui sera plus tard très-précieuse, du primat de Pologne appelé à présider aux élections, du cardinal Radziéjouwiski, dont l'éducation a été dirigée par une reine française, Marie de Gonzague ; qui, comme Polignac, a étudié au collège d'Harcourt et dans la mémoire reconnaissante duquel le souvenir de la France est demeuré cher et vivace. Enfin, le 29 juillet, il fait son entrée à Varsovie.

Jean Sobieski y régnait encore, mais il n'était que le débris de lui-même. Ce héros, admirablement doué de la nature et dont l'illustre famille avait puissamment contribué à l'exercice de ses milles vertus, auquel ses ancêtres avaient légué les plus' glorieux exemples, et qui avait trouvé chez sa mère même les sentiments d'une Spartiate, avait de bonne heure ouvert son âme aux influences les plus patriotiques, et, dès son jeune âge, il avait voué aux ennemis de son pays une de ces haines vigoureuses qui, lorsqu'elles animent un génie puissant, engendrent une longue suite de victoires. Aussi, quoique vivant dans le siècle qui a vu le plus de grands guerriers, c'est à lui qu'il a été donné d'accomplir les actions les plus extraordinaires. Barrière redoutable contre les Turcs, il a sauvé et la Pologne, et Vienne, et la chrétienté. Ses exploits tenaient tellement du prodige que le nom seul de Sobieski jetait l'épouvante parmi les infidèles. Porté par acclamation sur ce trône qu'il avait si noblement défendu, il a été le seul roi peut-être qui n'ait pas emprunté d'éclat au rang suprême. Isolé sur la scène, n'ayant pas de grands hommes pour appui, il a fait rejaillir sur la Pologne une gloire qui appartient tout entière à lui-même. Mais le héros, intrépide et indomptable sur le champ de bataille, n'était plus qu'un homme dans son pays. Trop faible pour résister aux moindres désirs d'une femme qu'il idolâtrait et dont il a toujours été l'esclave ; se résignant trop facilement aux vices de la constitution de la Pologne et déplorant le mal sans oser y porter remède ; n'ayant ni assez de volonté pour assurer l'hérédité dans sa famille, ni assez de désintéressement pour ne pas exiger ce témoignage de reconnaissance de ses sujets ingrats ; ne voulant déplaire à aucune des grandes familles polonaises dont il était ou l'allié, ou l'ami, ni à une classe de laquelle il sortait ; voyant déjà s'annoncer terrible et impitoyable l'anarchie de l'interrègne ; ne pouvant plus reposer ses regards, de près ou de loin, dans l'État comme dans sa famille, que sur des rivalités ; des dissensions, des misères, infirme, embarrassé par un embonpoint incommode ; malheureux comme roi, plus malheureux encore comme époux et comme père, Sobieski expiait sa gloire.

A côté de lui, Marie-Casimire Lagrange d'Arquien occupait le trône. Cette femme, que Louise de Gonzague avait amenée de France quand elle était venue épouser Wladislas Wasa, n'avait pas tardé à exercer autour d'elle par son éclatante beauté une irrésistible séduction et un empire inexprimable. Unie à Sobieski, et plus ambitieuse que lui, elle avait cherché dès ce moment par ses intrigues à lui assurer la couronne, pendant qu'il la méritait par ses victoires. Trop fière pour être éblouie par le rang suprême, l'honneur d'être la femme de Sobieski ne lui avait pas suffi ; elle avait voulu gouverner, et, tandis que son trop tendre époux, séparé d'elle par de lointaines expéditions, lui écrivait du camp les lettres les plus affectueuses, insensible à la gloire de l'illustre vainqueur, étrangère aux intérêts de son pays d'adoption, elle ne considérait que les siens propres et remplissait le palais et l'État de complots, de menées, de discordes et de vénalité. Ne se contentant pas d'un rôle secondaire, elle s'était ingérée dans toutes les affaires de la république, troublant l'intérieur du roi par son inquiète mobilité, plus jalouse de la confiance de son mari que de sa tendresse, blessant l'orgueil national par des prétentions exorbitantes, et tirant vanité de sa beauté qui, chez elle, avait survécu aux années et qui lui faisait une cour d'esclaves. Mais, de plus en plus emportée dans ses caprices à mesure qu'elle entrevoyait, avec la mort de Sobieski, l'abandon dans lequel elle serait laissée, elle avait mis au service de l'élection de l'un des siens toute sa fougue et son ardente passion. Accusant une préférence dangereuse pour sa réputation[2], elle avait fixé son choix, délaissant l'aîné qu'elle détestait, sur le second de ses fils, l'objet de ses prédilections et de ses plus profondes tendresses. Compromettant ainsi à la fois et celui-ci par ses préférences, et l'aîné par sa haine passionnée, et tous les siens par ses cabales, assombrissant l'intérieur de celui qui l'avait couronnée, et auquel elle enlevait toute sa popularité en lui faisant suivre une politique antinationale, cette femme devait être le fléau de sa famille, après avoir été le mauvais génie de Sobieski.

Quelle était donc cette cour au milieu de laquelle pouvait dominer par ses intrigues une femme perverse ? Quelles étaient ces institutions qui, le roi vivant encore, autorisaient sa famille, la Pologne et l'Europe entière à se disputer par avance son héritage ?

Composée uniquement de deux classes, l'une faite pour la guerre et jouissant de l'indépendance, l'autre condamnée au travail et à la servitude, la société polonaise avait traversé les siècles sans subir aucune transformation, et elle s'était à peu près maintenue telle qu'elle avait existé dès le principe. République ayant un roi pour chef, monarchie ayant conservé les coutumes antiques des Slaves, la Pologne ne jouissait complètement ni des avantages du premier régime, ni des garanties qu'offre le second. Tandis que, dans le reste de l'Europe, s'établissait à la suite de la conquête la féodalité qui, par ses hiérarchies compliquées, joignait le trône à la glèbe et qui ne tarda pas à mettre en présence la noblesse, les communes et la royauté dans des luttes d'où sortiront l'unité monarchique et la fusion des classes, en Pologne les mœurs des plus anciennes peuplades s'étaient fidèlement conservées et étaient restées tout à fait immobiles. Le sentiment d'une fière indépendance et de la plus rigoureuse égalité s'était perpétué parmi deux ou trois cent mille privilégiés qui, se croyant nés pour la liberté comme d'autres leur paraissaient l'être pour l'esclavage, se réservèrent, à l'exclusion de la bourgeoisie qui fut étouffée, la défense des limites de l'État et l'exercice de tous les droits politiques, entre lesquels le temps n'amena qu'une inégalité de fortune, dont les uns étaient les domestiques des autres mais non les vassaux, qui, se nommant frères, ne se reconnaissaient sujets que de la république, et dont un seul, égal à tous, avait le pouvoir de contrebalancer l'opinion générale.

C'est afin de conserver à l'ordre équestre cette indépendance et de respecter cette égalité qui étaient dans les mœurs, que s'introduisirent dans les lois la nécessité du consentement unanime, le droit de confédération et le système électif, trois principes auxquels, malgré de vives mais trop tardives remontrances, on ne se résigna jamais à renoncer, et dont l'application, souvent reconnue dangereuse, mais toujours respectée, devait avoir des conséquences si désastreuses. De ces trois vices, le premier, qui conférait à chaque gentilhomme, par le liberum veto, le pouvoir absolu de neutraliser, et le second, qui organisait régulièrement une insurrection et légalisait pour ainsi dire les soulèvements, eussent été certainement moins dangereux, si le troisième n'eût rendu tout à coup plus fréquent l'exercice de ces droits extrêmes.

Tandis que partout ailleurs la dignité royale s'élevait de plus en plus hors de l'atteinte des sujets et qu'elle atteignait avec Louis XIV l'expression la plus haute de l'autorité monarchique, en Pologne la couronne s'offrait pour la première fois à tous. Ce n'est pas que les gentilshommes polonais eussent jamais renoncé au droit d'élection. Mais, commandés d'abord par leur Krol, ils s'étaient facilement habitués à le choisir dans une même famille qui fut pendant longtemps celle des Piast, et plus tard celle des Jagellons. Bien plus, ils recherchèrent avec soin, pour les placer sur le trône, les princes dont l'origine se rattachait, même de loin, à cette illustre famille[3]. Mais le dernier des Jagellons disparut à son tour, et c'est alors que le régime électif, qui avait été toujours celui de la Pologne, montra pour la première fois, après huit siècles de durée, ses dangereux défauts. Les Polonais se trouvaient en effet dans l'alternative de prendre un roi dans la nation et alors de le tenir en esclavage, de peur qu'il ne les y réduisit lui. même pour assurer l'hérédité dans sa famille, ou de choisir parmi les princes du dehors un étranger, contraint d'employer, pour parvenir au trône, la corruption et l'intrigue, y montant grâce aux pacta conventa, transactions modifiées à chaque changement de règne et limitant de plus en plus son autorité, s'y maintenant par des concessions humiliantes ou, ce qui sera pis, par l'influence des puissances voisines, et auquel les intérêts du pays seront inconnus d'abord, indifférents presque toujours.

Sobieski le premier[4], sans que rien le rattachât aux grandes familles qui avaient régné jusque-là, fut tiré de la foule et appelé à être le chef de ces nombreux gentilshommes, braves, entreprenants, généreux, mais susceptibles à l'excès, hautains, turbulents, qui ne voyaient en lui que le premier d'entre eux auquel ils permettaient de régner, mais défendaient de commander ; qui se disaient fièrement électeurs de rois, mais destructeurs de tyrans[5], et qui, jaloux de leurs anciennes et chères prérogatives, entourèrent le pouvoir royal d'une barrière d'autant plus élevée que, dans l'Europe entière, il l'avait déjà franchie.

Et pourtant, malgré ces entraves, Sobieski serait peut-être parvenu à écarter les périls résultant pour la nation des défauts de son caractère.-Élevé par sa gloire au-dessus de ses compatriotes sans que le sentiment de l'universelle égalité pût en être blessé, simple et bon, conciliant, disposé à des concessions, nul mieux que lui n'était plus propre à établir une nouvelle dynastie et à recommencer l'ère glorieuse des Jagellons. Mais les institutions s'y opposèrent, et la certitude que ses enfants seraient précipités, après sa mort, des marches du trône dans la foule des citoyens, lui fit suivre une ligne de conduite qui fut fatale à sa popularité. Après avoir sauvé à Vienne de trois cent mille Turcs et Tatares Léopold Ier dont il ne se fit ni un allié fidèle, ni même un ami reconnaissant, et qui, blessé dans son orgueil de devoir son salut à un souverain électif, évita de lui témoigner sa gratitude même par des paroles[6], Sobieski persista dans cette alliance et, au lieu de se maintenir indépendant, neutre et par conséquent recherché et puissant entre l'Autriche, qui pouvait encore avoir besoin de lui, et la Turquie, affaiblie par son récent et éclatant échec, il entre dans la ligue chrétienne, croyant assurer à ses fils des alliés puissants qui les aideront à le remplacer sur le trône. Mais à peine a-t-il envahi la Moldavie, d'après le conseil intéressé de Léopold, que celui-ci refuse de lui envoyer les secours promis. Contraint par son grand âge de quitter le commandement de l'armée, il le cède à des généraux inhabiles qui succombent. Un de ses fils échoue dans une expédition ; et c'est alors que, se voyant sans véritables alliés et menacé par de puissants ennemis, il signe, en versant des larmes sur l'avenir de sa patrie, le traité de Moscou qui devait en effet lui être si funeste. Sa popularité en fut d'autant plus compromise qu'on n'ignorait pas l'influence de jour en jour plus grande qu'exerçait sur son trop tendre époux une reine demeurée étrangère en Pologne, que son origine rattachait à la France, que ses alliances unissaient à l'Autriche, et dont les menées, les cabales et les intrigues étaient, aux yeux d'une noblesse méfiante et soupçonneuse, une menace pour ses plus précieuses prérogatives et une atteinte à la liberté de la prochaine élection.

Ce régime électif, auquel il devait le trône, fut ainsi, pour Sobieski, une des causes de ses fautes. Si le pouvoir avait été héréditaire, tranquille sur le sort de ses fils il ne leur aurait pas cherché une alliance antinationale, et le père rassuré aurait laissé agir le roi ; la noblesse et le clergé appelés non à élire à chaque changement de règne, mais seulement à obéir, auraient soutenu le monarque de leur dévouement au lieu d'exiger de lui de la reconnaissance ou de le menacer de leur hostilité, et, réduits à un rôle secondaire, ils seraient entrés dans la dépendance commune. Enfin, tout sujet de division aurait disparu ; le roi n'aurait placé que dans la Pologne ses affections et ses intérêts, comme la Pologne n'aurait vu les siens que dans la même famille ; la mort du souverain n'aurait pas été désirée par quelques-uns, sa maladie la cause et le point de départ d'intrigues et de cabales ; la Pologne eût été homogène et forte. Quel besoin, en effet, n'aurait-elle pas eu alors de l'union la plus parfaite ! Pendant que, pour éviter le pouvoir absolu d'un seul, elle perpétuait la souveraineté tumultueuse et anarchique d'un grand nombre ; pendant qu'elle empêchait, par une crainte exagérée de la tyrannie, l'ordre de pénétrer dans l'administration et la régularité dans le gouvernement ; pendant que la licence et l'anarchie s'introduisaient peu à peu sous les apparences de la liberté, dont on exploitait les abus au lieu d'en régler l'usage, deux royaumes, gouvernés par une autorité absolue et d'une complète homogénéité, se formaient autour d'elle, et ce peuple aussi imprévoyant qu'infortuné paraissait insensible à leurs progrès permanents. Il ne voyait pas qu'un jour viendrait où, placé entre les deux, il ferait obstacle à leur agrandissement, et, brave mais indiscipliné, chevaleresque mais mobile, brillant mais désuni, il resterait sans défense et deviendrait la proie facile de ses avides et trop puissants voisins !

Mais les choses doivent avoir leur cours, et les peuples comme les hommes se précipitent vers leur perte par une accumulation de fautes et un aveuglement qui étonnent et devraient instruire la calme et lointaine postérité. C'est en vain qu'un des derniers rois[7] avait supplié la noblesse de remédier aux malheurs que ses prétendues élections libres attiraient sur le pays et de renoncer à ses privilèges personnels. C'est en vain qu'il avait annoncé à la Pologne qu'elle serait dévorée par les autres nations et partagée entre le Moskovite et le Brandebourgeois[8]. Ces paroles prophétiques étaient restées sans effet. Des diètes toujours tumultueuses se succédaient sans apporter de remèdes aux maux existants. Le plus souvent, elles n'arrivaient pas à leur terme et étaient brusquement rompues par un membre mécontent ou vendu, sans qu'il eût été possible de rien conclure. De puissantes oppositions surgissaient contre le roi, à l'égard duquel la nation était constamment méfiante. Des cabales se formaient dans lesquelles ne craignaient pas d'entrer les membres eux-mêmes de la famille royale. L'influence pernicieuse de l'étranger s'accroissait et chaque élection inclinait de plus en plus l'État vers sa ruine.

Au surplus le mal ne paraissait pas à la surface, et le lustre jeté sur la Pologne par les victoires de Sobieski la faisait briller encore d'un éclat qui trompait et les Polonais et l'Europe entière à qui leur gloire déguisait leur faiblesse.

 

 

 



[1] Lettre de l'abbé de Polignac à M. de Croissy, ministre des affaires étrangères.

[2] Cette préférence, hautement manifestée et que rendait plus saillante la haine réelle de Marie-Casimire à l'égard du prince Jacques, avait donné une certaine consistance au bruit répandu depuis longtemps et qui faisait d'Alexandre le fils non de Sobieski, mais de Jablonowski.

[3] Entre autres Michel Wisniowski.

[4] Déjà, il est vrai, Étienne Bathori avait été proclamé en 1575 sans qu'il fût allié aux Jagellons. Mais on lui avait imposé l'obligation sine qua non d'épouser Anne Jagellon, sœur de Sigismond-Auguste, quoiqu'elle fût sexagénaire et partant incapable d'avoir des enfants. (Histoire et relations du voyage de la reine de Pologne, Marie de Gonzague, par Jean de Blérauval ; Paris, Toussaint Quinet, 1648.) — Quant à Henri de Valois, élu en 1573, il appartenait à une famille régnante.

[5] Paroles de Zamoïski à Sigismond III.

[6] Après la défaite des Turcs, leur vainqueur et l'orgueilleux empereur se virent dans la campagne, à peu de distance de Vienne. Léopold, indécis, avait demandé à ceux qui l'entouraient comment ils pensaient qu'il dût recevoir le roi, qui n'était qu'électif. A bras ouverts, avait répondu le duc de Lorraine. L'Empereur ne goûta point un si noble conseil, et, croyant mettre son amour-propre à couvert, il n'adressa à Sobieski que de vagues remercîments sur la délivrance de Vienne. Le mot reconnaissance ne sortit pas même de sa bouche. Sobieski lui fit sentir d'une manière piquante et spirituelle le ridicule de son procédé : Mon frère, lui dit-il en remontant à cheval, je suis bien aise de vous avoir rendu ce petit service.

[7] Jean-Casimir.

[8] Voici les paroles prononcées par Jean-Casimir dans la diète de 1661 : Dieu veuille que je sois un faux prophète ; mais si vous ne vous hâtez pas de remédier aux malheurs que vos prétendues élections libres attirent sur le pays, si vous ne renoncez pas à vos privilèges personnels, ce noble royaume deviendra la proie des nations. Le Moskovite vous arrachera la Russie et la Lithuanie ; le Brandebourgeois s'emparera de la Prusse et de Posen, et l'Autriche, plus loyale que ces deux puissances, sera obligée de faire comme elles : elle prendra Krakovie et la Pologne. u Il était impossible de mieux prévoir, et l'événement ne devait que trop réaliser cette prophétie singulièrement exacte.