HISTOIRE LA TERREUR 1792-1794

NOTES, ÉCLAIRCISSEMENTS ET PIÈCES INÉDITES

 

XIII. — NOTICE SUR LES GÉNÉRAUX ET OFFICIERS QUI JOUÈRENT UN RÔLE DANS LES ÉVÉNEMENTS DU 1er AU 5 AVRIL 1793.

 

 

Nos recherches pourraient paraître incomplètes si nous ne donnions des renseignements sommaires sur la destinée des généraux et officiers, qui ont figuré à un titre quelconque dans les deux derniers livres de ce volume. Pour plus de clarté, nous les avons divisés en plusieurs catégories

1° Généraux arrêtés avant le 1er avril, c'est-à-dire antérieurement à la rébellion de Dumouriez

2° Généraux et officiers arrêtés comme complices de Dumouriez

3° Généraux qui ont suivi la fortune de Dumouriez et ont émigré avec lui

4° Généraux et officiers livrés par Dumouriez aux Autrichiens ; 5° Généraux et officiers qui se sont déclarés contre Dumouriez et sont restés fidèles au parti républicain.

 

PREMIÈRE CATÉGORIE

GÉNÉRAUX ARRÊTÉS AVANT LE 1er AVRIL 1793.

 

LANOUE avait près de soixante ans en 1793. Il était colonel depuis 1771, maréchal de camp depuis 1783 ; lieutenant général depuis février 1792. Le 10 mars 1793, à la suite de l'échec d'Aldenhoven, il fut mandé à la barre d'e la Convention. Il y comparut le 28, et fut renvoyé au tribunal révolutionnaire — le Moniteur contient in extenso son interrogatoire —. Si peu de charges s'élevaient contre lui que le tribunal rendit le 10 mai une ordonnance de non-lieu. li ne reprit pas de service.

 

STENGEL avait 50 ans en 1793. Il était né dans le Palatinat et était sous-lieutenant au régiment d'Alsace dès 1760. Il fut fait maréchal de camp le 13 septembre 1792. Sa qualité d'étranger ameuta contre lui tous les démagogues, Marat, Robespierre, Rühl, Turreau, le dénoncèrent à l'envi comme le principal coupable de l'échec d'Aldenhoven. Traduit devant le tribunal révolutionnaire, il fut acquitté le 16 mai 1793 mais il resta suspendu de ses fonctions jusqu'en nivôse an III. Envoyé à l'armée d'Italie, il y commandait la cavalerie, lorsque Bonaparte vint en prendre le commandement ; deux mois après, il tombait glorieusement sur le champ de bataille de Mondovi.

 

MIRANDA, né en 1754, à Caracas, dans l'Amérique du Sud, fut fait maréchal de camp au commencement de 1792 et lieutenant général le 9 octobre de la même année. Arrêté le 26 mars 1793, il fut conduit à Paris et demanda à paraître à la barre de la Convention pour se disculper. Voici la lettre qu'il écrivit à cette occasion :

Paris, le 4 avril 173, l'an 2e de la République.

Citoyen président,

 

Ayant été appelé par deux décrets de la Convention nationale à la barre pour y être entendu en justification de ma conduite et en réponse à des inculpations militaires dont il me sera facile de démontrer l'erreur ou l'injustice ; ayant attendu chaque jour, depuis le 29 mars, sans que la gravité et la multitude des affaires qui sont survenues m'aient permis d'obtenir le moment si désiré par moi ; réfléchissant d'ailleurs que la connaissance des faits que je me proposais de donner à la Convention nationale et dont j'avais instruit quelques-uns de ses membres devient encore intéressante depuis que la conjuration a éclaté dans toute sa noirceur, je prie la Convention nationale de me renvoyer à ses comités militaire et de défense générale pour y être entendu et le rapport lui en être fait.

J'offrirai cette dernière réflexion à la justice de la Convention nationale : celui que Dumouriez a victime parce que, de son ami, il devint son antagoniste dès l'instant qu'il le reconnut conspirateur, est encore accusé et détenu.

Votre concitoyen, MIRANDA.

 

Renvoyé devant le tribunal révolutionnaire, il comparut le 12.mai ; son procès dura cinq jours et se termina par un acquittement. Suspect, à raison de ses anciennes relations avec Pétion et quelques autres girondins, il ne recouvra sa liberté qu'après le 9 thermidor. Dégoûté de la liberté qu'il était venu chercher en France et qui ne lui avait valu que misère et proscription, il retourna en Amérique, où il est mort.

HARVILLE, né le 23 avril 1749, comptait, en 1793, plus de vingt-cinq ans de service et était lieutenant général depuis le 6 février 1792. Il commandait la ville et le château de Namur lors de la retraite de Dumouriez et s'apprêtait à les défendre vigoureusement, lorsqu'il reçut l'ordre formel du général en chef de se retirer sur Maubeuge ; il ramena toute son artillerie, douze cents malades et six mille sacs de blé. Quelques bateaux chargés de vieux matériel étant tombés, par la négligence des gens du pays, entre les mains de l'ennemi, les représentants du peuple, Hentz et Laporte, qui étaient à Mézières à vingt-cinq lieues de là, le firent arrêter et conduire à Paris. Sur le rapport de Lecointre, fait au nom du comité militaire, Harville fut déféré au tribunal révolutionnaire. Mais Fouquier-Tinville trouva les charges si peu graves qu'il déclara qu'il lui était impossible de traduire le prévenu devant le tribunal. L'affaire, renvoyée devant le Comité militaire, fut l'objet d'un nouveau rapport de Camille Desmoulins qui conclut tout à fait en faveur d'Harville. Mais celui-ci ne put obtenir sa mise en liberté et resta en prison jusqu'au 9 thermidor. Il fut réintégré dans son grade par décret du 28 ventôse an lit. Il fit, de l'an III à l'an X, les campagnes de Sambre-et-Meuse, de Rhin et Moselle et d'Italie. Il fut fait sénateur en l'an XI et mourut pair de France en 1815.

 

BOUCHET, né à Besançon en 1731, avait fait les campagnes de Flandre de 1747 et 1748, commandé en 1761 le génie à la défense de Belle-Ile. Il fut employé aux Iles-sous-le-Vent de 1763 à 1766, et nommé lieutenant général du génie en 1791. Hentz et Laporte le firent arrêter en même temps que le général Harville, pour avoir fait travailler aux fortifications de Namur le jour même de l'évacuation de cette place : Ce qui évidemment, disait l'arrêté des représentants, était une preuve de connivence avec l'ennemi, puisque ces réparations ne pouvaient profiter qu'à ceux qui allaient occuper Namur. Bouchet répondait avec beaucoup de raison qu'il avait fait continuer les travaux jusqu'à la dernière heure pour ébruiter le moins possible la nouvelle de la retraite des Français qu'au reste les travaux qui faisaient l'objet de l'accusation n'avaient eu rien d'utile. Il fallut plus de quinze mois pour faire rendre justice au malheureux Bouchet. Enfin un arrêté du Comité de salut public en date du 30 messidor an II, provoqué par Carnot, vint mettre fin à sa longue détention. Il est mort en l'an X, sans avoir repris de service.

 

DEUXIÈME CATÉGORIE

GÉNÉRAUX ET OFFICIERS ARRÊTÉS COMME COMPLICES DE DUMOURIEZ.

 

LESCUYER, maréchal de camp, était âgé de cinquante ans en 1793 ; il comptait à cette époque trente ans de service. Traduit devant le tribunal révolutionnaire, il obtint trois remises successives pour faire entendre plusieurs témoins qui se trouvaient à Valenciennes, dans ce moment assiégée par les Autrichiens. Il espérait que le général Ferrand lui viendrait en aide et s'empresserait de témoigner que, dans tous les événements de la journée du 2 avril, le grand prévôt de l'armée du Nord n'avait fait que suivre ses indications. Mais le général déclina toute solidarité, et, après avoir contribué à compromettre te malheureux Lescuyer, le laissa se débattre avec le tribunal révolutionnaire, qui le condamna à mort et le fit exécuter le 14 août 1793 (Bulletin du tribunal, n° 42, 43 et 81). Voici la correspondance échangée à ce sujet entre Lescuyer et Ferrand :

Le général de brigade Lescuyer au général Ferrand, commandant à Valenciennes.

 

A l'hôtel de la Force, ce 7 mai 1793, an 2e de la République une et indivisible.

Citoyen général,

Vous n'avez point oublié ma translation dans les prisons de Paris où je suis détenu maintenant, à l'effet d'y être interpellé sur tous les motifs qui se sont trouvés insérés dans une lettre dont vous avez eu connaissance et que j'ai ensuite, de concert avec vous, envoyée à Dumouriez.

Je n'ai donc agi que d'après vos conseils tendant à faire échouer les infâmes projets du traître et perfide Dumouriez.

Vous vous rappellerez aussi sans doute, général, l'ordre que vous m'avez donné, signé de votre main, à l'effet de m'autoriser à faire sortir de la ville de Valenciennes et à l'endroit que vous m'aviez vous-même indiqué, un détachement de gendarmerie nationale pour se rendre et pour surveiller les quatre hussards, qui étaient les créatures de Dumouriez, décidés à servir ses projets il fallait donc tromper leur vigilance vous vous rappellerez également, général, l'ordre que vous avez donné, ainsi que le commandant temporaire, au maître des postes aux chevaux de Valenciennes, et portant défense de fournir des chevaux à qui que ce fût, pas même aux députés, sans une permission expresse de vous.

Qui pourrait croire, général, que d'après la conduite la mieux réfléchie, que nous avons tenue ensemble, tant pour nous préserver de la fureur de Dumouriez que pour garantir la ville de Valenciennes de sa fureur et de sa férocité, je me trouve aujourd'hui personnellement, exposé à une procédure criminelle devant le tribunal révolutionnaire. Ce tribunal ne peut m'en imposer, puisque non-seulement j'ai pour moi la pureté de mon cœur. mais encore des témoins irréprochables qui sont en état de déposer la vérité de tous les faits ci-dessus, et je suis convaincu, général, que vous vous empresserez à me rendre toute la justice qui m'est due.

On me soupçonne d'avoir voulu flotter entre deux eaux ; que dans le cas où Dumouriez aurait eu les forces nécessaires j'aurais servi ses projets, et, dans le cas contraire, que je serais resté dans l'inaction.

Vous sentez, général, d'après la conduite que j'ai tenue, combien cette assertion est calomnieuse ; je m'en réfère et référerai toujours aux sentiments d'honneur qui vous caractérisent et qui m'ont décidé à vous donner mon entière confiance.

Il m'est bien facile de détruire l'erreur dans laquelle on est tombé, puisque je n'ai point attendu cette décision et que j'ai remis, moi, au citoyen Bellegarde, l'ordre qui m'autorisait à m'assurer de sa personne, en ayant même refusé le reçu qu'il m'en a offert. Ce fait important ne peut être désavoué, puisque j'en avais conféré et fait confidence à son intime ami Aubert, comme à vous vingt-quatre heures avant.

Comme je présume qu'il y aura une commission rogatoire à l'effet de vous interroger sur les lieux, .ou bien un ordre pour que vous vous transportiez au tribunal révolutionnaire à l'effet de déposer la vérité, dans l'un et l'autre cas, je suis fort tranquille sur la conduite que votre équité et votre conscience vous dicteront.

C'est dans ces sentiments et ceux du plus tendre, sincère et respectueux dévouement, que je vous embrasse fraternellement, mon général,

Le général de brigade, LESCUYER.

Je vous prie, mon général, d'offrir mon hommage à la citoyenne votre épouse dont les vertus me sont également connues.

 

Le général Ferrand au général de brigade Lescuyer.

 

Valenciennes, le 13 mai 1793, l'an 2e de la République française.

J'ai reçu votre lettre, citoyen général, écrite à l'hôtel de la Force le 7 de ce mois ; vous vous trompez à quelques égards dans l'exposé que vous me faites. Je vais vous rappeler ce qui s'est passé entre vous et moi, relativement à l'ordre que vous me présentâtes pendant la nuit de la part du traître Dumouriez.

Vous êtes venu chez moi à 2 ou 3 heures après minuit avec le commissaire Beauvallon étant entré dans ma chambre à coucher, vous renvoyâtes mon domestique, vous me demandâtes ou logeait le député Bellegarde, ; après vous avoir indiqué sa demeure, vous me demandâtes ma façon de penser à l'égard de la situation actuelle ; je répondis que je pensais comme je l'avais toujours fait, que j'étais toujours dans les sentiments d'un républicain. Vous vous tournâtes alors du côté du commissaire Beauvallon : Et vous, Beauvallon ? — Il vous répondit : Je dors et vais me coucher. Vous reprîtes alors la parole et me dîtes que vous portiez un ordre du général Dumouriez qui m'enjoignait de vous donner main-forte, lorsque vous la requerriez.

Vous me dites aussi que vous aviez ordre d'arrêter le député Bellegarde. Je vous répliquai : Pourquoi celui-là et non les autres ? Alors vous me dites : Est-ce qu'il y en a d'autres ? Quels sont-ils ? Réponse de ma part : Lequinio et Cochon. — Où logent-ils ? me demandâtes-vous. Répondu : Chez la veuve Fiseaux.

Comme vous étiez entré dans la place nuitamment, à mon insu, craignant que vous n'eussiez des forces avec vous, en outre que l'armée était corrompue en partie, je crus qu'il était instant d'user de feintise afin de sauver la République et les députés. C'est pourquoi je signai l'ordre que vous me présentâtes de la part du traître pour vous fournir main-forte.

Je vous proposai d'envoyer cette force armée hors de la ville sur la route de Paris, et que je défendrais au maître de la poste aux chevaux d'en donner à qui que ce fût sans ma permission.

Rappelez-vous bien que vous ne m'avez pas fait part que vous eussiez des hussards au dehors de la place, dont vous me parlez dans votre lettre.

Vous ne m'avez pas non plus communiqué la lettre dont vous me parlez. Je ne vous cache pas que je fis prévenir les députés de ne pas sortir de la ville.

Après avoir réfléchi, vous verrez que je ne pouvais pas me conduire autrement dans cette circonstance, voulant sauver la place et les députés, n'étant pas sûr de la façon de penser de tous ceux qui m'entouraient. Je suis persuadé que votre démarche était pure. La vérité n'est qu'une ; en la faisant connaître à vos juges, ils sauront l'apprécier, et la loi vous rendra à la liberté.

Le général de division commandant la place de Valenciennes, FERRAND.

 

MIACZINSKI, maréchal de camp, était âgé de quarante-deux ans en 1793. Il avait été longtemps mêlé aux négociations de la Pologne avec la Suède et la Bavière et était entré au service de France le 25 juin 1792, en qualité de maréchal de camp.

Dans le cours de notre récit, nous avons fait grand usage de la procédure intentée contre Miaczinski devant le tribunal révolutionnaire. Nous avons même donné plusieurs pièces extraites de ce dossier. Nous nous bornerons donc à mettre sous les yeux de nos lecteurs la lettre que Miaczinski adressa de Lille, le 3 avril, au président de la Convention et par laquelle il espérait racheter sa vie.

Le citoyen maréchal de camp Miaczinski au citoyen président de la Convention nationale.

 

Ce 3 avril 1793.

L'assemblée des représentants d'un peuple libre, citoyen président, a dû recevoir, par un courrier, l'événement malheureux qui vient d'arriver aux commissaires, vos collègues, ainsi qu'au citoyen ministre. Le général Dumouriez, le 2, à huit heures du matin, m'avait envoyé un ordre dans lequel il avait voulu, ainsi que le brave général Duval, m'associer à son crime. Le général Duval étant prévenu par le colonel Saint-Georges, à qui j'avais communiqué la lettre, je me suis porté sur Lille avec une partie de la division que je commandais. J'ai arrêté la troupe hors de la ville et je me suis rendu avec mon escorte à l'hôtel de ville. J'ai remis la lettre de Dumouriez sur la table ; j'ai renouvelé le serment de fidélité, de n'obéir qu'à la loi j'ai donné ordre sur le champ à ma division (se concertant avec les membres du district) de faire camper toute ma troupe sous les murs de la ville par cette conduite, j'avais sauvé près de quatre mille hommes qui oront pu être corrompus et passé à l'armée de Dumouriez.

Je ne suis ni politique ni intrigant je ne connais que combattre les ennemis de la République ; c'est mon devoir ; ce sentiment est dans mon cœur.

MIACZINSKI.

 

Cette soumission tardive ne sauva pas Miaczinski. Traduit le 25 avril devant le tribunal révolutionnaire, il sollicita une remise qui lui fut accordée. Son procès commença le 7 mai et dura onze jours ; il fut condamné à mort le 18. Ayant déclaré qu'il avait a faire d'importantes révélations pour le salut de la République, il obtint un sursis de trois jours. Ses révélations ne portèrent sur rien de bien important et tendirent seulement à compromettre la probité de Lacroix, l'un des commissaires de la Convention. Ce fut un motif de plus pour faire hâter son exécution, qui eut lieu le 22 mai à midi. Miaczinski mourut très-courageusement après avoir crié tout le long de la route : Vive la Nation, vive la République. (Voir le Bulletin Tribunal révolutionnaire, n° 18, 26, 37, 38, 39 et 40.)

 

DEVAUX (Philippe) était, en 1793, colonel adjudant général ; il fut traduit au tribunal révolutionnaire le lendemain du jour où son compagnon d'infortune, Miaczinski, montait sur l'échafaud. Son procès ne dura qu'un jour, il fut condamné à mort et exécuté le 23 mai. (Voir le Bulletin Tribunal révolutionnaire, n° 40, 41 et 42.)

 

TROISIÈME CATÉGORIE

GÉNÉRAUX QUI ONT SUIVI LA FORTUNE DE DUMOURIEZ ET ONT ÉMIGRÉ AVEC LUI.

 

LIEUTENANTS GÉNÉRAUX

VALENCE avait été promu au grade de général de division Je 20 août 1792 et nommé général en chef de l'armée des Ardennes le 12 octobre, suivant. !I rentra en France en l'an IX, reprit du service et fut nommé sénateur le 31 décembre 1807 et mourut pair de France en 1821.

 

MARASSÉ était né en 1726 ; il avait donc 67 ans en 1793. Maréchal de camp en 1780, il fut promu au grade de général de division le 7 septembre 1792. Il n'était pas auprès de Dumouriez dans les journées des 1er au 5 avril. Il avait commandé la place d'Anvers et rentrait avec l'armée de Hollande. Apprenant les événements de Saint-Amand, il ne voulut pas franchir la frontière et revint trouver Dumouriez à Bruxelles. Fort attaché à son général en chef, il fut mêlé aux intrigues que celui-ci noua en Belgique dans le courant de 1793 (voir la note XIV). Par les ordres du gouvernement autrichien, Marassé fut interné à Teineswar, en Hongrie. Il y mourut en 1803, sans avoir revu sa patrie.

 

Le duc de CHARTRES (Louis-Philippe) était colonel propriétaire du 1er dragons depuis le 21 novembre 1785 ; il fut nommé maréchal de camp le 7 mai 1792, et lieutenant général le 11 septembre suivant. Au seuil même de l'exil, il se sépara de Dumouriez, se réfugia en Suisse et se déroba à toutes les recherches dans le collége de Reichenau, près Coire, où il enseignait l'histoire et la géographie. Après bien des vicissitudes, il rentra en France en 1814 et fut élu roi des Français en juillet 1830. Tous les partis s'accordent aujourd'hui à reconnaître que les dix-huit années de son règne doivent être comptées parmi les plus prospères dont nous ayons joui depuis la Révolution.

 

MARÉCHAUX DE CAMP

VOUILLERS comptait 37 ans de service en 1792. Il fut fait maréchal de camp le 22 juillet de cette année. Il commandait l'avant-garde de l'armée de Dumouriez et l'accompagna dans sa fuite. Mêlé en Belgique aux intrigues de son général en chef, il fut, a la fin de 1793, interné par ordre du gouvernement autrichien à Temeswar, en Hongrie, et y resta jusqu'en 1808. A cette époque, il rentra en France, ou il mourut en 1821.

 

MATHIEU DUMAS DE SAINT-MARCEL était né à Montpellier en 1755. Sous-lieutenant en 1773, il fit toutes les campagnes de l'Inde de 1781 à 1785, fut nommé colonel du régiment d'Auvergne en 1791 et maréchal de camp le 5 septembre 1792. De retour en France en 1800, il entra dans l'administration civile comme inspecteur général des douanes et conserva ce poste pendant tout le temps de l'Empire. A la fin de 1813, il se jeta avec sept cents douaniers dans Maubeuge et défendit cette place contre le duc de Saxe-Weimar jusqu'au moment où le gouvernement de la Restauration fut régulièrement établi. Il est mort le 1er mai 1826. Il était frère du lieutenant général Mathieu Dumas qui siégea à plusieurs reprises dans nos assemblées législatives.

 

RUAULT était âgé de quarante-neuf ans en 1793. Colonel en 1786, il fut nommé maréchal de camp le 30 novembre 1792. Comme Marassé, il faisait partie de l'armée de Hollande ; comme lui, il alla retrouver, à Bruxelles, Dumouriez qu'il n'avait pas vu depuis un mois. Il est mort en 1809, sans avoir repris du service.

 

DEBANNES avait cinquante ans en 1793. Il était lieutenant-colonel du 71e régiment depuis le 5 février 1792, colonel du même régiment depuis le 1/[ janvier 1793 et maréchal de camp depuis le 8 mars. Il rentra en France sous l'Empire. Son âge l'empêcha de reprendre du service, mais il fut président du collège électoral de la Haute-Loire en 1810 et mourut en 1818.

 

BERNERON était encore un vieux soldat qui comptait plus de trente ans de service en 1793. Il était maréchal de camp depuis le 8 mars. Mêlé aux intrigues.que Dumouriez noua en Belgique dans le cours de l'année 1793, il fut mis en prison pendant quelque temps ; nous n'avons pu savoir ce qu'il devint par la suite.

 

LEVASSEUR DE NEUILLY était né le 17 mars 1743. Dès l'âge de dix-sept ans, il était entré dans les gendarmes. Il était lieutenant-colonel le 20 avril 1788, colonel le 23 novembre 1791, maréchal de camp le 3 février 1793. Nous l'avons vu jouer un rôle important dans les événements de Valenciennes et de Condé. Après avoir hésité entre le parti conventionnel .et son affection pour Dumouriez, il suivit !a fortune de ce dernier ; mais nous perdons sa trace au camp de Leuze et nous ne savons ce qu'il devint après que ce camp eut été dissous.

 

SECOND avait fait toutes les guerres d'Amérique, puis était passé au service de la Hollande et ensuite de la Russie. Il eut ainsi occasion de faire la campagne contre les Turcs. Rentré en France, il fut, sur la recommandation du général La Fayette, nommé colonel en 1791. Segond fut l'un des chefs du camp de Leuze, où l'on réunit les troupes qui avaient émigré avec Dumouriez. Mais ces fonctions lui furent bientôt retirées sur la dénonciation suivante que celui-ci envoya à Cobourg :

Bruxelles, le 9 juin 1793.

Mon prince,

Parmi les officiers passés avec moi se trouve un M. Segond, que j'avais fait maréchal de camp, deux jours avant mon passage, pour le récompenser du faux zèle qu'il montrait pour la bonne cause ; il commandait alors un très-beau bataillon de chasseurs, et je croyais être sûr de lui et de son bataillon. Il s'était même chargé d'attaquer brusquement et de surprendre Valenciennes. Non-seulement il n'a rien exécuté de ce qu'il avait promis avec beaucoup de jactance, mais il a empêché que le trésor de plus de deux millions en numéraire, qui était resté à la garde de son bataillon, ne nous arrivât, non-seulement en n'exécutant pas, mais en empêchant d'exécuter les ordres qu'il avait reçus pour amener, le trésor.

Depuis mon arrivée à votre armée, j'ai appris qu'il avait même écrit alors aux commissaires de la Convention résidants à Valenciennes pour les avertir d'envoyer reprendre ce trésor, qu'il avait fait rester à Fresnes, près Condé.

Votre Altesse pourra se procurer des détails plus étendus sur cette conduite criminelle par le général Thouvenot, d'après les dépositions du régiment Bourbon-Dragons.

Cet officier me parait douteux, et je crois devoir avertir Votre Altesse du danger qu'il peut y avoir à le conserver à la solde avec la troupe française qui est à Leuze.

De nouveaux détails qui me sont revenus sur sa conduite factieuse, sur la méfiance qu'il inspire à ses camarades, m'engagent à vous en donner avis, pour que vous puissiez, mon prince, le faire rayer du contrôle des troupes françaises, en lui faisant signifier de quitter ce cantonnement. Il ne faut pas, dans un si petit nombre d'hommes, en conserver dont les sentiments soient douteux.

J'ai l'honneur d'être, avec le plus tendre et le plus respectueux attachement,

Mon Prince,

De Votre Altesse,

Le très-humble et très-obéissant serviteur,

Le général DUMOURIEZ.

 

Le prince de Cobourg fit aussitôt droit à la requête de Dumouriez. Quatre jours après, il écrivait au général Ruault, commandant le camp de Leuze, la lettre suivante :

Au quartier général de Hérin, ce 13 juin n94.

Le maréchal prince de Cobourg a appris qu'il se trouve parmi les officiers passés avec M. Dumouriez un M. Segond, qui avait été fait maréchal de camp deux jours avant cette époque, et s'est alors conduit directement d'une manière opposée au parti qu'a pris M. Dumouriez et le reste de L'armée française qui se trouve à Leuze. M. de Ruault aura donc à le rayer incessamment du contrôle des troupes françaises, en lui faisant signifier de quitter ce cantonnement et les Pays-Bas.

COBOURG.

 

Depuis cette époque, nous avons perdu les traces de Segond, qui ne paraît pas être rentré en France.

 

THOUVENOT (Pierre) était né à Toul le 9 mars 1757. Il était sous-lieutenant d'artillerie en 1780, et fit les campagnes de 1782 et 1783 aux Îles-sous-te-Vent. Il était colonel-adjudant général en 1792, lorsque Dumouriez se l'attacha comme chef d'état-major et lui accorda toute sa confiance. Arrêté par ordre du gouvernement autrichien en juillet 1793, il fut conduit à Nuremberg. De là, il se réfugia dans le duché de Brunswick et y resta jusqu'en 1800. Autorisé, à cette époque, à rentrer en France, il demanda immédiatement du service et fut désigné pour faire partie de l'expédition de Saint-Domingue. A raison des services éminents qu'il y rendit, il fut fait général de brigade en vendémiaire an XI revenu en France avec les débris de l'expédition, il fit, à la grande armée, les campagnes de 1805, 1806 et 1807, passa en Espagne en 1808, et y resta jusqu'à la fin de l'Empire. En 1813, il fut fait général de division et baron.

 

SOLIVA, né le 17 mars 1738, était depuis 1756 dans le commissariat des guerres. En janvier 1793, il fut nommé administrateur en chef de l'armée. des Ardennes. Depuis sa sortie de France avec Dumouriez, il nous a été impossible de retrouver ses traces.

 

BEAUVALLON était né le 17 mars 1727 et comptait plus de vingt-cinq ans de service, lorsqu'il accompagna Dumouriez dans sa défection. Depuis cette époque, nous n'avons pu recueillir aucun renseignement sur lui.

 

QUATRIÈME CATÉGORIE

GÉNÉRAUX ET OFFICIERS LIVRÉS PAR DUMOURIEZ AUX AUTHICHIENS.

 

BEURNONVILLE était lieutenant-général depuis le commencement de 1792. Comme les quatre commissaires de la Convention, il resta trente mois dans les prisons de la coalition comme eux aussi, il fut échangé contre la fille de Louis XVI, le 5 décembre 1795. A peine avait-il été livré aux Autrichiens par Dumouriez, qu'il était dénoncé à la Convention comme un traître par Dubois-Crancé et Robespierre (13 avril) ; bien lui en prit de n'être plus à leur portée, car on le dévouait à l'échafaud au moment où il affirmait son amour pour la patrie par une rude et longue captivité. Rentré en France, il fut employé aux armées, devint ambassadeur en Prusse, sénateur. La restauration le fit maréchal de France.

 

PILLE fut élu lieutenant-colonel du premier bataillon de la Côte-d'Or au moment de la première réquisition. Il était adjudant général lorsqu'il fut arrêté, le 2 avril, au camp de Bruille par ordre de Dumouriez. Rentré en France six semaines après, ainsi que nous le verrons plus bas, le ministre de la guerre, Bouchotte, le nomma un de ses adjoints. Lorsque les ministères furent absorbés par le Comité de salut public, Pille resta à la tête de la commission spécialement chargée du mouvement des troupes et devint de fait ministre de la guerre. Dans les annuaires officiels, il est inscrit en cette qualité du 10 prairial an II à brumaire an IV. Il fut plus tard nommé inspecteur général aux revues et créé comte sous l'Empire.

 

CHÉRIN était le fils du fameux généalogiste de la cour de Louis XVI et avait succédé à son père très-peu de temps avant la Révolution. L'abolition des titres ayant rendu son emploi inutile, il partit avec la première réquisition en qualité de sous-lieutenant de volontaires ; il était adjudant générai lorsque Dumouriez donna l'ordre de l'arrêter avec Pille. Chérin avança rapidement, devint chef d'état-major de Hoche, puis de Masséna. Il fut nommé/en fructidor an V, général de division et commandant de la garde constitutionnelle des Conseils. Deux ans plus tard, Chérin tombait glorieusement sur le champ de bataille de Zurich.

 

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Les noms des volontaires livrés aux Autrichiens sont ainsi indiqués dans une lettre du lieutenant général, comte de Welderen, gouverneur de Maëstricht et dans le rapport de Camus, p. 58 :

Lecointre, capitaine de canonniers ;

David, lieutenant au 2me bataillon de Saône-et-Loire ;

Montigny, Dubois, Luquet, Leblond, sergents-fourriers au même bataillon ;

Charve, canonnier au 1er régiment d'artillerie.

Le prince de Cobourg, auquel on les avait livrés comme des assassins, les envoya à Maëstricht, après leur avoir fait mettre les fers aux pieds et aux mains.

La Convention s'émut à plusieurs reprises du sort de Lecointre et de ses compagnons. Par ordre du Comité de salut public, le ministre des affaires étrangères, Lebrun, écrivit au prince de Cobourg la lettre suivante :

Paris, le 30 avril 1793.

Monsieur, par un décret de !a Convention nationale dont vous trouverez la copie ci-jointe, le Conseil exécutif provisoire de la République française a été chargé de réclamer la liberté du citoyen Lecointre, capitaine des canonniers du 1er bataillon de Seine-et-Oise, actuellement détenu dans votre armée comme prisonnier de guerre. Les circonstances qui ont accompagné l'arrestation de cet officier ne vous laisseront aucun doute sur la justice de cette réclamation. Voici le fait :

Le 2 de ce mois, le perfide Dumouriez fit porter, par une ordonnance de son quartier général de Saint-Amand, au citoyen Lecointre une invitation de se rendre auprès de lui pour prendre communication d'une lettre que le général supposait avoir reçue du citoyen Lecointre père ; le fils, ayant reçu le même soir le billet du général, se rendit le lendemain au quartier générai, d'où il fut enlevé et livré par Dumouriez au général autrichien.

Ce qui distingue, Monsieur, les nations civilisées des hordes sauvages, c'est que, même au milieu des horreurs de la guerre, elles reconnaissent des lois qu'un usage constant des peuples a sanctionnées. Si ces lois étaient méprisées, l'Europe retomberait bientôt dans la barbarie d'où elle n'a été tirée que par les efforts 'd'un grand nombre de générations.

Vous honorez trop, Monsieur, les armes dont vous faites profession, pour ne pas rendre hommage à cette vérité. Lecointre vous a été livré par la trahison la plus atroce. Attiré dans les filets d'un général perfide par le sentiment le plus cher à la nature, par la tendresse filiale, et en même temps par son obéissance aux ordres de son chef, il ne peut être considéré comme prisonnier de guerre. Je puis vous le dire avec la franchise d'un républicain sa détention serait un opprobre pour l'armée que vous commandez.

Ce n'est pas à votre indulgence, c'est à votre justice que j'en appelle. Le peuple .français, et c'est en son nom que j'ai l'honneur de vous écrire aujourd'hui, ne connaît pas les sollicitations il demande ce qui lui paraît juste, il le demande avec énergie, et en cas de refus il connaît le droit des représailles. Quelque terrible qu'en soit l'exercice, le blâme retombera sur ceux qui les auront provoquées ; la postérité impartiale en jugera.

Si des succès passagers pouvaient éblouir les ennemis de la France, ils devraient se souvenir qu'ils les ont principalement obtenus par la trahison de quelques généraux. Les exploits de la dernière campagne attestent l'énergie et les ressources du peuple français. De nouveaux succès pourront lui rendre sa supériorité, lorsque les armées seront purgées de tous les traîtres. Je ne sais où le portera alors la juste indignation contre des ennemis qui, abusant d'un moment de prospérité, auront foulé aux pieds tous les droits de la guerre et donné à une armée victorieuse l'exemple funeste de ne consulter que son ressentiment.

Je n'insisterai pas davantage, Monsieur, sur l'illégalité de la détention du citoyen Lecointre. Comme ministre des affaires étrangères, je suis chargé de vous demander le renvoi de ce prisonnier, et, en cas de refus, de vous déclarer que le peuple français usera de tous les moyens qui sont en son pouvoir pour venger cette infraction gratuite des droits de la guerre, et qu'il en rendra responsables ceux qui auront nécessité cette juste vengeance. J'aime à croire, Monsieur, qu'après avoir mûrement pesé les suites fâcheuses qu'entraînerait cette détermination, vous rendrez justice aux motifs d'humanité qui ont engagé le conseil exécutif provisoire à vous prévenir des intentions du peuple français, et que vous prendrez toutes les. mesures qui dépendront de vous pour ne pas ajouter de nouvelles calamités à la guerre actuelle.

J'ai l'honneur d'être, avec une considération distinguée,

Monsieur,

Votre très-humble et très-obéissant serviteur.

LEBRUN.

 

Cette lettre émut Cobourg ; il ordonna de faire revenir des prisons de Maëstricht Lecointre ainsi que ses compagnons d'infortune, et daigna même prescrire quelques égards en leur faveur. Comme ils ne pouvaient faire la route à pied à raison de leur longue détention, est-il dit dans la lettre du gouverneur de Maëstricht, ou plutôt à raison des traitements inhumains dont ils avaient été l'objet, on fut obligé de les reconduire en voiture. Cobourg, qui voulait bien rendre les prisonniers de peur de représailles, mais qui tenait à injurier la République et ses défenseurs, écrivit en les renvoyant la lettre suivante, dont l'insolence n'a pas besoin d'être signalée. :

Au général Dampierre.

 

Il m'est parvenu, il y a quelques jours, une lettre de M. Lebrun de Paris, dans laquelle il m'adresse de longs raisonnements et de longues menaces pour m'engager à rendre la liberté au capitaine Lecointre. Comme je n'ai pas l'honneur de connaître M. Lebrun, et qu'en qualité de général d'armée je ne corresponds qu'avec les généraux ennemis, je vous prie, Monsieur, de vouloir bien lui répondre en mon nom que sur les détails qu'il m'a adonnés sur un objet dont la multitude d'affaires beaucoup plus importantes m'avaient empêché de m'occuper, et d'après les recherches que j'ai faites à cet égard, je donnerai des ordres pour que le capitaine Lecointre soit reconduit avec égard aux avant-postes français. Non-seulement je ne fais aucune difficulté de rendre cet officier, mais je suis prêt aussi à renvoyer avec lui cinq autres personnes parmi lesquelles est un lieutenant-colonel. On me les avait remis comme des assassins ; je vous abandonne le soin de les récompenser ou de les punir...

 

Pille et ses sept compagnons d'infortune furent rendus aux avant-postes français le 14 mai. Trois mois après, les six volontaires de Saône-et-Loire paraissaient à la barre de la Convention pour recevoir chacun un brevet de sous-lieutenant et une indemnité pécuniaire. Malheureusement toutes nos recherches pour savoir ce que ces six officiers et le capitaine Lecointre sont devenus ont été infructueuses.

 

CINQUIÈME CATÉGORIE

GÉNÉRAUX ET OFFICIERS QUI SE SONT DÉCLARÉS CONTRE DUMOURIEZ ET SONT RESTÉS FIDÈLES AU PARTI RÉPUBUCAIN.

 

Pour mettre plus d'ordre dans la nomenclature des généraux et officiers compris dans cette catégorie naturellement de beaucoup la plus nombreuse, nous rangerons les personnages, non d'après leur grade, mais d'après les événements auxquels ils furent mêlés.

 

1° ÉVÈNEMENTS DE LILLE.

 

DUVAL avait trente-cinq ans de service en 1793 ; il fut nommé le 23 mars 1792 colonel du 6e dragons ; le 7 septembre 1792, maréchal de camp ; le 3 janvier 1793, lieutenant général. Suspect à raison de ses anciennes liaisons avec Dumouriez, il fut suspendu de ses fonctions par Bouchotte en septembre 1793, et ne reprit plus de service. Il mourut en l'an XI à Montreuil.

 

SAINT-GEORGES, né à la Guadeloupe le 25 décembre 1745, avait organise ses frais, mais avec subvention dù gouvernement, en vertu de la loi du 7 septembre 1792, la Légion franche des Américains du Midi, qui devint bientôt le 13e chasseurs. ll s'en fit naturellement nommer colonel. Durant la Terreur, il fut arrêté et ne fut mis en liberté que le 9 thermidor. Il rentra dans la vie privée et mourut à l'âge de cinquante-quatre ans, le 12 juin 1799.

 

DUMAS (Thomas-Alexandre) était dragon de la reine en 1786. Saint-Georges le prit pour son lieutenant-colonel lorsqu'il organisa la Légion des Américains du Midi. Le 30 juillet 1793, Dumas fut nommé général de brigade, et le 3 septembre de la même année, général de division. II fut un instant général en chef de l'armée des Pyrénées-Occidentales, puis des Côtes de Brest. Lors de l'expédition d'Egypte, il fut fait prisonnier par des corsaires barbaresques, rentra en France en l'an X et y mourut en 1806, à Villers-Cotterêts.

 

MACDONALD (Alexandre). Nous nous dispenserons de faire la biographie de cet homme célèbre. Nous nous bornerons à indiquer les grades qu'il occupa pendant les années 1792 et 1793.

17 juin 1792, aide de camp de Beurnonville ;

12 novembre 1792, aide de camp de Dumouriez ;

1er mars 1793, colonel du 2e régiment d'infanterie ;

26 août 1793, général de brigade.

Nous avons retrouvé les deux-pièces suivantes, toutes deux relatives à la part que prit Macdonald à l'affaire de la Madelaine :

Nous, représentant de la nation, député par la Convention national aux armées du Nord et des Ardennes, sur la demande qui nous a été faite par le général La Mortière du citoyen Macdonald actuellement colonel du 2e régiment d'infanterie pour adjudant général de son armée, et d'après le compte avantageux qu'il nous a rendu des services et des talents dudit citoyen, qui s'est porté le premier à un acte de vrai civisme après la trahison de Dumouriez en arrêtant lui-même son complice Devaux. nous autorisons le général La Mortière à prendre pour adjudant général le citoyen Macdonald, le chargeons de le faire remplacer sur le champ dans son emploi de colonel dudit 2e régiment par le citoyen Bournet, lieutenant-colonel dudit régiment, nommé provisoirement adjudant général par le général Dampierre, et de faire exécuter de suite le remplacement à ce corps conformément aux lois militaires.

GASPARIN.

Lille, 13 avril 1793.

 

ARMÉE DE LA RÉPUBLIQUE UNIE AUX LILLOIS.

Macdonald, chef de demi-brigade, au citoyen Félix, adjoint du an ministre de la guerre pour la 6e division.

 

Quartier général du faubourg de la Madelaine, le 15 avril 1793.

J'ignore, mon cher Félix, les raisons qui engagent les commissaires de la Convention nationale à me faire adjudant-général et a donner le 2e régiment à Bournet ; celui-ci se plaint qu'on lui fait un passe-droit. Je ne quitterai cependant pas !e régiment à moins de passer dans un autre. Mais, pour être adjudant général, je refuse net. Ils n'ont rien à me reprocher, ils ont pris des informations sur ma conduite qu'ils ont trouvée CONFORME (sic). Avant que le traître ne se démasquât, j'avais énoncé mon .opinion sur la singulière démarche que l'on nous avait fait faire d'Orchies à Lille j'ai arrêté moi-même le complice Devaux, quoique mon ami ; c'est moi qui ai organisé et formé le camp de la Madelaine.

En voilà trop long, vous verrez la conduite que j'ai tenue ; tout est à l'impression,

MACDONALD.

 

2° ÉVÈNEMENTS DE VALENCIENNES ET DE CONDÉ.

 

FERRAND était un vieux militaire qui avait été fait général de brigade le 8 mars 1793. Il fut nomme général de division, au moment même où, après la défection de Dumouriez, les Autrichiens investissaient Valenciennes. Il défendit vigoureusement cette place. Ce ne fut qu'après un -siège de trois mois et un bombardement de quarante-trois jours, qu'il se rendit prisonnier de guerre avec toute sa garnison. Traduit au tribunal révolutionnaire, Il fut acquitté, mais ne recouvra sa liberté qu'après le 9 thermidor. Sous le consulat, il fut, pendant dix-huit mois, préfet de la Meuse-Inférieure.

 

DAVOUT. Nous n'avons pas l'intention de refaire une biographie qui vient d'être si bien faite par M. de Chénier, neveu d'André Chénier : Histoire de la vie militaire, politique et administrative du maréchal Davout, duc d'Auerstædt, prince d'Eckmühl. Nous préférons, donner quatre pièces authentiques qui montrent quel cas on faisait, en 1793, des services du jeune officier bourguignon, et quelles difficultés éprouvaient les officiers les plus distingués par leur courage et leur civisme, s'ils avaient le malheur d'appartenir à ce qu'on appelait alors la caste nobiliaire.

Aux représentants du peuple près l'armée des côtes de la Rochelle réunis en Commission centrale d'Angers.

 

Sur l'observation faite par un membre de la Commission, que le ministre de la guerre, ayant tardé trop longtemps à employer dans cette armée, ainsi qu'il en avait été requis par le Comité de Salut public de la Convention nationale, le citoyen Louis Davout, lieutenant-colonel du troisième bataillon de l'Yonne et chef de brigade dans l'armée du Nord de concert avec le citoyen Ronsin, adjoint du ministre, il lui avait écrit de se rendre sans délai auprès de la Commission pour être, par elle et par le citoyen Ronsin, employé en qualité d'adjudant général, dans le cas où le ministre ne lui en aurait point encore donné l'ordre ; qu'il vient d'arriver à l'instant et qu'il demande à être mis promptement en activité.

Considérant que le citoyen Davout (Louis) a donné, en plus d'une occasion, des preuves non équivoques de patriotisme et de courage, et notamment en poursuivant avec vigueur dans sa fuite le .traître Dumouriez, ce que la Convention nationale a reconnu en décrétant que le bataillon qu'il commandait avait bien mérité de la patrie ; considérant aussi que ses talents militaires lui ont valu plusieurs succès l'année dernière en attaquant différents postes autrichiens, que dans une armée nouvellement organisée, telle que celle des côtes de la Rochelle, il est essentiel d'avoir des agents militaires qui aient déjà beaucoup d'expérience dans le métier des armes, arrêtent que le citoyen Louis Davout sera employé provisoirement en qualité d'adjudant général chef de brigade dans l'armée des côtes de la Rochelle et que te général en chef Biron est invité à lui faire connaître promptement à quelle brigade il peut être attaché.

BOURBOTTE, RICHARD, président, L. TURREAU, A. GOUPILLEAU, TALLIEN, P. CHOUDIEU.

A Angers, le 8 juillet 1793.

 

Louis Davout à Bouchotte, ministre de la guerre.

 

Le conseil exécutif provisoire, par un arrêté pris dans le courant de juillet de cette année, m'ayant nommé général de division auprès de l'armée du Nord, je déclare que je ne puis accepter cette place, parce que j'ai été noble. Je donne, par la même raison, ma démission de ma place d'adjudant général chef de brigade, à laquelle j'avais été promu par les représentants du peuple près de l'armée des côtes de la Rochelle, étant chef du troisième bataillon de l'Yonne qui était à l'armée du Nord.

Je vous prierai, citoyen, de me donner un reçu du contenu de la présente lettre,

Louis DAVOUT.

Paris, le 29 août 1793, l'an II de la république une et indivisible.

 

Le ministre de la guerre à Louis Davout.

 

J'ai reçu, citoyen ; votre lettre du 29, par laquelle vous déclarez que vous ne pouvez accepter le grade de général de division, auquel le conseil exécutif provisoire vous avait nommé, parce que vous avez été noble vous donnez par la même raison votre démission de la place d'adjudant général chef de brigade à l'armée des côtes de la Rochelle, à laquelle vous avez été promu par les représentants du peuple près l'armée du Nord, étant chef de bataillon au troisième de l'Yonne. La manière distinguée dont vous vous êtes conduit dans ce bataillon, le républicanisme et l'énergie que vous y avez développés contre le traître Dumouriez qui n'a échappé que par hasard au feu que vous avez fait faire sur lui, tout nous faisait espérer que vous pouviez rendre de bons services à la patrie dans ce moment. Mais vous avez pensé que l'opinion générale et le vœu des sociétés populaires, fortement prononcées pour l'exclusion des ci-devant nobles des premières fonctions militaires, ne vous permettaient pas, quant a présent, d'inspirer dans l'armée le degré de confiance nécessaire pour y être aussi utile que vous le désireriez. Je me rends avec beaucoup de regrets à la résolution que vous avez prise de vous retirer chez vous, en applaudissant à votre projet de vous y livrer à l'étude militaire et à la pratique des vertus civiques, jusqu'à ce que le souvenir de votre origine ne soit plus un obstacle à la confiance publique, qui vous est due personnellement. Vous pouvez vous présenter au bureau des fonds, première division de la guerre, à M. Gustetibre, à qui j'ai donné ordre pour vous rembourser de votre transport de l'armée du Nord à cette des côtes de la Rochelle et retour.

Nota. Le ministre a accordé 1.000 fr.

 

Tureau, représentant du peuple près les armées des Alpes et d'Italie, au citoyen Pille commissaire du mouvement des armées de terre.

 

L'an II de la République, le 20 vendémiaire.

Tu te rappelles sans doute, citoyen, qu'avant mon départ pour l'armée d'Italie je l'ai entretenu du citoyen Davout, ancien lieutenant-colonel du troisième bataillon de l'Yonne, et ton camarade de guerre à l'armée du Nord. Carnot, à qui j'ai remis les notes les plus avantageuses sur son compte, m'a dit qu'il était au nombre des citoyens mis en réquisition, et que son intention était de l'employer à l'armée des côtes de Cherbourg ; ne perds pas un instant à rappeler à Carnot cette affaire qu'il m'a assuré être terminée. Sous tous les rapports, Davout, que tu connais, a des droits acquis à l'honneur de la réquisition ; ces droits sont révolutionnaires, et tant qu'il y aura un ci-devant noble dans les armées, celui-ci, qui n'a eu que le malheur de la naissance sans avoir jamais exercé les droits iniques qu'elle assurait, qui en était au contraire la victime, ne doit pas être condamné à une inactivité nuisible à la chose publique qu'il peut défendre, et injuste pour lui. Si Carnot n'a point encore assuré sa destination,.dis-lui que la seule crainte de Davout serait d'être employé dans une armée ou il n'aurait pas une grande activité.

Je crois avoir oublié dans les notes recueillies sur son compte, son adresse ; la voici Davout, à Ravières, par Ancy-le-Franc, département de l'Yonne.

Je n'ai pas besoin d'exciter d'avance ta sollicitude sur cette affaire, qui, je le répète, tient beaucoup plus à l'intérêt de la République qu'à celui de l'individu.

Vois Carnot, vois Delmas ; ce dernier connaît particulièrement Davout ; communique-leur ma lettre et fais avec eux disparaître toutes les longueurs qui pourraient exister.

Je t'embrasse et te saine fraternellement.

TUREAU.

 

3° CAMP DE BRUILLE.

 

ROSIÈRES avait été au service de la Belgique pendant tout le temps des troubles de 1787 à 1789. Il était alors lieutenant-colonel dans la légion de Maillebois. Pour obtenir un grade de plus, il passa au service de Belgique en 1792 et fut le président de la députation bruxelloise qui vint à la barre de !a Convention demander l'annexion. Après les événements d'avril 1793, il fut nommé au commandement de la place de Douai ; mais il fut bientôt suspendu de ces fonctions comme ayant un fils émigré. Il mourut à Paris en 1808.

 

KERMORVAN comptait, en 1793, vingt-cinq ans de service. Il passa comme maréchal de camp, en novembre 1792, au service de Belgique. Suspendu en août 1793, il ne reprit pas de service et mourut en 1817.

 

DAVESNE, né à Roulers en Belgique, avait été mêlé aux troubles de 1787 à 1789. Ces troubles apaisés, il s'était fait amidonnier dans sa ville natale. Aussitôt après l'invasion de la Belgique en novembre 1792, il avait été employé dans les remontes, puis nommé général de brigade le 19 février 1793, et, peu de temps après les événements d'avril, général de division. Lorsqu'il commandait dans la Flandre maritime, il encourut la disgrâce du représentant du peuple Duquesnoy, qui prit contre lui l'arrêté dont la teneur suit :

Le représentant du peuple Duquesnoy, informé que le général de division Davesne, au lieu de faire exécuter les ordres du général en chef dans l'expédition qui devait avoir lieu dans la Flandre maritime, y a mis, par mauvaise foi ou ineptie, des entraves très-préjudiciables au succès des armes de la République :

Considérant qu'une faute de cette nature ne peut rester impunie.

Arrête que le général Davesne est suspendu de ses fonctions, qu'il sera mis en arrestation et conduit dans la ville d'Arras ; que le général Souham prendra provisoirement le commandement des troupes depuis Dunkerque jusqu'à Douai.

Beaumont, le 7e jour du 2e mois de l'an 2e de la République française une et indivisible.

DUQUESNOY.

 

Davesne fut renvoyé au Tribunal révolutionnaire. Là encore Duquesnoy se porta son accusateur et le fit condamner à mort. Davesne fut exécuté le 16 ventôse avec deux autres lieutenants généraux qui n'étaient pas plus coupables que lui, Chancel et O' Moran.

 

CHANCEL servait depuis 1769. Il fut nommé général de brigade le 3 février 1793 et général de division le 11 septembre suivant. Mais, deux mois après, il fut accusé par le représentant du peuple Duquesnoy d'être resté inactif au moment du déblocus de Maubeuge. Traduit au Tribunal révolutionnaire, il fut condamné à mort et périt le 16 ventôse an II.

 

PINON était, avant la Révolution, valet de chambre du roi. En septembre 1792, il rejoignit l'armée de Dumouriez comme commandant en chef de la section armée de la Fontaine-Montmartre. Le 26 janvier 1793, il était lieutenant-colonel le 15 mai de la même année, adjudant-général le 22 thermidor an Ht, général de brigade. Il prit sa retraite en l'an XI.

 

4° CAMP DE MAULDE.

 

LEVENEUR était né en 1746, et avait déjà trente ans de service en 1793. Il avait été nommé général de division en juin 1793. A la suite des événements d'avril 1793, il fut suspendu de ses fonctions et gémit longtemps dans les prisons de la Terreur.

Nous donnons ici deux pièces qui nous paraissent intéressantes autant par les événements qu'elles précisent que par le nom de Hoche qui s'y trouve mêlé.

Paris, le 2 mai 1793, an 2e de la République.

Citoyen ministre,

Une proclamation, émanée de vous, ordonne le départ instantané de Paris à tous les officiers venus des armées. Je vous prie dans cette circonstance de me donner ou un congé d'un mois dont j'ai besoin pour rétablir ma santé, ce que j'ai déjà nombre de fois demandé, ou un ordre pour rester à Paris jusqu'à ce que le Conseil exécutif, auquel je suis renvoyé par un arrêté du Comité de salut public, ait prononcé à mon sujet. Enfin, de quelque manière que ce soit, il est nécessaire que je sois mis à l'abri d'être arrêté, comme je ne manquerais pas de l'être en vertu de votre proclamation de ce jour.

J'ai avec moi ici mon aide de camp Hoche, lieutenant au 58e régiment. Sa personne m'est absolument nécessaire ; je demande également pour lui que vous vouliez bien lui donner l'ordre ou la permission de rester avec moi jusqu'à la terminaison de.mon affaire.

Le général de division, LEVENEUR.

 

Pétition présentée le 6 germinal an III.

 

Le citoyen Alexis Leveneur, général de division des armées de la République, suspendu par un ordre injuste et arbitraire de l'ex-ministre de la guerre, Bouchotte, demande à votre justice la levée de sa suspension et sa réintégration dans son grade. Celui qui, depuis le commencement de la Révolution, n'a cessé de la servir et de dévouer sa personne et sa fortune pour elle ; qui, depuis le commencement de la guerre en 1792 jusqu'au 26 juillet 1793, époque de sa suspension, a toujours combattu pour elle à la tête des divisions et armées de la République ; qui a pris d'assaut, lui soixantième, les forts de Namur ; qui a combattu avec gloire à Nerwinde en commandant la droite de l'armée qui fut victorieuse, puis le 22 mars 1793 protégea la retraite de l'armée française en combattant depuis quatre heures du matin jusqu'à sept heures du soir, vérité incontestable malgré les calomnies de Dumouriez ; qui a été arrêté par ce traître pour être conduit à Cambrai pour l'avoir, dès le 3 avril, dénoncé à la Convention à laquelle il dépêcha Hoche, son aide de camp ; qui a couru les plus grands dangers pour se sauver des mains de ce scélérat et rester fidèle à la République, ainsi qu'il a été reconnu par un décret du Comité de salut public du 2/t avril 1793 dont il est porteur ; il n'est pas juste, dis-je, que le général, que toute l'armée des Ardennes honore de sa confiance, reste plus longtemps dans les liens d'une flétrissure imméritée, qui a été suivie de quatorze mois d'arrestation injuste. Le citoyen Leveneur, jaloux de l'estime de ses concitoyens, demande avec empressement que cette justice lui soit rendue. Et vous ferez justice.

Alexis LEVENEUR, ci-devant général de division.

 

STETENOFFEN était né à Vienne en 1739 ; il comptait trente ans de service en 1793 et était maréchal de camp depuis le 12 octobre 1792. Ce fut lui qui détermina la retraite de Dumouriez au camp autrichien par une dernière démonstration faite le 5 avril au soir sur Rumegies et racontée dans la lettre suivante :

Aux citoyens commissaires de la Convention nationale à Valenciennes.

 

Rumegies, 11 heures du soir, 5 avril 1793.

Citoyens,

Le général Dumouriez ayant aujourd'hui abandonné son armée et tous les régiments de ligne s'étant successivement mis en marche pour Valenciennes, j'ai assemblé les différents chefs de corps qui se trouvent sous mes ordres pour voir le parti que nous avions à prendre. Au moment que nous délibérions, il est arrivé une lettre du général Thouvenot au colonel du 67e qui l'engageait à mener le trésor de l'armée à Tournay. Nous avons clairement aperçu alors que nous étions vendus, et de suite je nie suis déterminé à faire ma retraite sur Condé, craignant ne pouvoir l'effectuer assez vite sur Valenciennes par l'engorgement prodigieux qui se trouvait sur cette route.

Le 3e régiment de dragons qui, d'après les ordres du général, avait ramené à l'armée le trésor que les grenadiers de ce régiment avaient amené sans ordre, continueront à l'escorter, et je me flatte qu'ils le rendront en France intact.. Prenez des mesures pour qu'on vienne à sa rencontre à midi.

STETENOFFEN.

 

Malgré sa conduite dans cette circonstance mémorable, Stetenhoffen fut suspendu de ses fonctions par le Conseil exécutif en juin 1793, il fallut toute l'influence de Carnot pour le faire maintenir dans ses fonctions au camp de Cassel. Voici le certificat que Carnot lui délivra :

Nous, représentant du peuple près l'armée du Nord, certifions que le général Stetenhoffen nous a toujours paru animé des sentiments du plus pur civisme, qu'il a maintenu de toutes ses forces la discipline et le bon ordre parmi les troupes qu'il a commandées ; qu'il jouit de l'estime des citoyens en général et de la confiance du soldat et que, dans l'attaque de Furnes, seule occasion où nous avons eu lieu d'observer sa conduite dans l'action, il a déployé toute la bravoure qu'on peut attendre d'un bon militaire et toute la prudence que doit avoir un bon général.

Bergues, le 18juin 1793.

L. CARNOT.

 

Réintégré dans son commandement, Stetenhoffen fut nommé général de division le 15 frimaire an Il peu de temps après il fut mis à la retraite et mourut en 1809.

 

SONGIS (Charles-Louis-Didier) était, en 1793, lieutenant-colonel d'artillerie ; il sauva le matériel de siège lors de la retraite devant Maëstricht, il le sauva encore dans la journée du 5 avril. Sa belle conduite fut récompensée par la délivrance du brevet dont la teneur suit :

Au nom de la République française,

 

Nous, Henri Dampierre, général en chef de l'armée du Nord, en vertu des pouvoirs qui nous ont été donnés par le Pouvoir exécutif de la République, avons nommé et établi le citoyen Charles-Louis-Didier Songis, lieutenant-colonel d'artillerie, sous-directeur du parc de l'armée du Nord, au grade de colonel d'artillerie, directeur du parc de l'armée des Ardennes.

Ordonnons qu'il soit reconnu en ladite qualité et qu'il jouisse des honneurs et émoluments attachés à ladite place jusqu'à ce que son brevet lui ait été expédié par le Pouvoir exécutif.

Au quartier général de Bouchain, le 11 avril 1793.

Le général en chef de l'armée du Nord,

DAMPIERRE.

 

Nous, commissaires de la Convention nationale aux places frontières de Nord, attestons que le citoyen Didier Songis a beaucoup contribué à ramener le parc d'artillerie, qui était à Saint-Amand et sous les ordres de l'infâme Dumouriez, à Valenciennes.

Bouchain, ce 11 avril, an 2e de la République.

BELLEGARDE, Charles COCHON, LEQUINIO.

 

L'artillerie a compté dans ses rangs deux frères qui ont illustré le nom de Songis. L'aîné (Charles-Louis-Didier) était né en 1752. Le second (Nicolas-Marie) était né en 1761. Celuici.eut une carrière moins longue mais plus brillante. Général de brigade en floréal an VII, général de division le 16 nivôse an VIII, il fut fait par l'Empereur premier inspecteur général d'artillerie et comte de l'Empire. il mourut en 1810. L'aîné était général de division depuis le 2 fructidor an II. Il fut mis à la retraite en l'an IX et mourut seulement en 1836. Ce fut lui qui se trouvait au camp de Maulde en avril 1793. Le second était alors employé à l'armée des Alpes.

 

DAMPIERRE. Nous n'avons pas à retracer la brillante carrière de ce général dont le nom couronne cette notice. Elle se trouve dans toutes les biographies. Nous nous contenterons de citer les dates de ses promotions. Né le 20 août 1756, entré au service en 1772, il était lieutenant-colonel le 25 juillet 1791 ; maréchal de camp le 7 septembre 1792 ; lieutenant général le 8 mars 1793. Nommé commandant en chef de l'armée du Nord le 10 avril 1793, il fut tué le 8 mai suivant aux avant-postes.