HISTOIRE LA TERREUR 1792-1794

NOTES, ÉCLAIRCISSEMENTS ET PIÈCES INÉDITES

 

II. — PIÈCES INÉDITES CONCERNANT LES PREMIERS MOMENTS DE LA CAPTIVITÉ DE LOUIS XVI ET DE SA FAMILLE.

 

 

DÉLIBÉRATION DE L'ASSEMBLÉE DES COMMISSAIRES DE LA MAJORITÉ DES SECTIONS AVEC PLEINS POUVOIRS DE SAUVER LA CHOSE PUBLIQUE[1].

 

Du vendredi 10 août 1792.

L'assemblée des commissaires réunis avec pleins pouvoirs pour sauver la chose publique, délibérant sur les grandes circonstances où se trouve la capitale, considérant que l'intérêt de l'empire, que celui de la capitale peuvent exiger que Louis XVI et sa famille restent en otage ; considérant que le salut même de Louis XVI exige qu'il soit mis en lieu de sûreté sous la sauvegarde de la force publique, demande que vous prononciez, qu'en attendant les mesures ultérieures que le salut public pourrait exiger, il soit mis en état d'arrestation.

L'assemblée a nommé pour commissaires, pour porter son vœu, MM. Real, Truchon, Mesles, Deslieux, Guillot.

HUGUENIN, président ; TROCHON, secrétaire.

 

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EXTRAIT DU REGISTRE DES DÉLIBÉRATIONS DES COMMISSAIRES DE LA MAJORITÉ DES SECTIONS.

 

10 août 1792.

Sur la motion de M. Sergent, il a été arrêté qu'il serait fait une affiche au nom du peuple pour déclarer qu'il sait respecter la loi ; que Louis XVI, malgré sa perfidie et ses trahisons, n'a point à redouter sa colère, et qu'il restera sain et sauf au milieu de lui.

 

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LETTRE DU PROCUREUR-GÉNÉRAL-SYNDIC AU PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE.

 

Paris, le 11 août 1792.

En conséquence de l'article 8 du décret d'hier, qui charge le département de donner des ordres pour faire préparer, dans le jour, pour le roi et sa famille, un logement au Luxembourg, où ils seront mis sous la garde des citoyens et de la loi, le directoire du département a fait les démarches nécessaires. D'après les renseignements qu'il a pris, il existe au Luxembourg un mobilier convenable disposé pour le lieu et qui y est tout transporté ; c'est celui qui a été sous les scellés après l'émigration du frère du roi. Pour hâter et faciliter notre mission, il conviendrait que nous pussions obtenir la levée de ces scellés, ce qui ne se peut sans une autorisation spéciale de l'Assemblée nationale. Nous mettons ces observations sous ses yeux et nous attendons ses ordres.

Je suis, avec un profond respect, monsieur le président, etc.

Le procureur-général,

RŒDERER.

 

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LETTRE DU DIRECTOIRE DU DÉPARTEMENT AU MAIRE DE PARIS.

 

Paris, le 11 août 1702.

Monsieur le maire,

Nous vous envoyons la copie d'un décret de l'Assemblée nationale, donné aujourd'hui, par lequel le département est autorisé à faire lever les scellés apposés sur les meubles du Luxembourg, et à les employer dans les appartements qui doivent être disposés pour le roi. Une autre copie du même décret a été adressée au juge de paix de la section du Luxembourg, chargé de lever ces scellés. Vous voudrez bien, monsieur, lorsque le juge de paix aura fait son office, vous charger de préparer le local le plus promptement possible et en donner avis au département.

Les administrateurs composant le directoire du département de Paris,

DE JUSSIEU et DUMONT.

 

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EXTRAIT DU REGISTRE DES DÉLIBÉRATIONS DE L'ASSEMBLÉE DES COMMISSAIRES DES SECTIONS.

 

Du 12 août 1792, an IVe de la liberté, 1er de l'égalité.

L'Assemblée, considérant que, dans les circonstances, il importe autant à la sûreté de la ville de Paris qu'à celle de tout l'empire, de conserver avec la plus scrupuleuse attention, jusqu'à la prochaine convention nationale, celui que tous les départements regarderont sans doute comme un otage important ;

Considérant que sans des précautions multipliées, et dont la sévérité est commandée par la sûreté de vingt-cinq millions d'hommes, on pourrait, si, par une manœuvre quelconque, Louis XVI échappait à la surveillance du peuple armé, inculper le zèle et peut-être la fidélité de ses gardiens ;

Comparant l'importance du dépôt dont la ville de Paris est chargée, spécialement par les décrets du corps législatif, avec les moyens qui peuvent seuls l'assurer ;

Arrête que Louis XVI sera déposé dans le Temple, qu'il y sera transféré sous la sauvegarde de la loi et sous celle de la loyauté française.

Arrête pareillement que l'adresse présentée par les commissaires à l'Assemblée nationale et le décret qui a été rendu sur cette adresse, relatif à l'arrestation de Louis XVI, seront imprimés, publiés, affichés et envoyés aux quarante-huit sections, ainsi que le présent arrêté.

LÉONARD BOURDON, président ; TRUCHON, secrétaire.

 

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LETTRES DE PÉTION À SANTERRE.

 

Paris, le 12 août 1792, an IVe de la liberté.

Avez-vous, monsieur le commandant-général, assez de forces auprès de l'Assemblée nationale et pour garder le roi et sa famille ; c'est là le poste important, et à cet égard on ne peut pas prendre trop de précautions. Envoyez des renforts pour peu que vous ayez les plus légers doutes, et ne perdez pas un instant.

Le maire de Paris,

PÉTION.

 

Paris, le 12 août 1792.

Je vous prie, monsieur le commandant, de mettre autour de l'Assemblée nationale et du roi une garde très-imposante et dont vous soyez sûr. Les patriotes, cette nuit, ont conçu des inquiétudes ; j'en ai plusieurs à la mairie qui me recommandent avec instance cet objet.

Le maire de Paris,

PÉTION.

 

RÉPONSE DE SANTERRE.

Garde nationale parisienne, état-major général.

12 août 1792.

Monsieur le maire,

D'après les ordres de la commune, je viens d'organiser la garde ; je vous ferai passer mes opérations. Les forces sont commandées comme vous le désirez. J'aurai l'honneur de vous voir.

SANTERRE.

 

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EXTRAIT DU REGISTRE DES DÉLIBÉRATIONS DU CONSEIL GÉNÉRAL DE LA COMMUNE.

Séance du 14 août.

 

On arrête que les citoyens devant former la garde du roi seront à l'avenir choisis par les sections, qui s'assureront de leur civisme.

L'Assemblée arrête que les citoyens proposés pour la garde du roi seront nommés par la nation, afin que les citoyens ne soient pas obligés de se déplacer.

 

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EXTRAIT DU REGISTRE DES DÉLIBÉRATIONS DE LA SECTION POISSONNIÈRE.

Séance du 21 août.

 

L'Assemblée, instruite qu'un membre du conseil général de la commune avait déshonoré son caractère au point de rattacher le bouton de culotte de Louis XVI, a arrêté qu'elle inviterait les quarante-sept autres sections à se réunir à elle pour exiger que le substitut du procureur de la commune fasse connaître le membre qui s'est avili à ce point, afin qu'il soit promptement expulsé du conseil général, et nomme comme commissaires, pour porter son vœu aux quarante-sept autres sections sur l'arrêté ci-joint, avec pouvoirs, MM. Bouin, Benoist, Damia, Masse, Panin, Petit et Delorme.

 

 

 



[1] Cette délibération n'est pas inscrite sur les registres officiels de la commune ; nous en avons retrouvé l'original, qui fut remis par les commissaires délégués sur le bureau du président de l'Assemblée législative.