L'armée du Rhin s'unie
à celle du Danube sous les ordres de Moreau. — Répartition des forces. —
Désertion des conscrits. — Bonaparte arrête la composition des divisions. —
L'armée divisée en quatre corps. — Instructions complémentaires du Premier
Consul. — Organisation définitive de l'armée. — Le corps de réserve sous les
ordres directs de Moreau. — Emplacements et composition de l'armée le 1er
floréal (21
avril 1800).
Depuis
sa création jusqu'à son entrée en campagne, l'aimée du Rhin passa par
plusieurs réorganisations qui furent l'œuvre combinée de Bonaparte et de
Moreau. Un Arrêté
du Directoire exécutif du 17 messidor an VII, groupait sous le nom d'armée du
Rhin toutes les forces échelonnées sur ce fleuve, depuis Neuf-Brisach jusqu'à
Düsseldorf, et en confiait le commandement à Moreau[1]. Les Consuls décidaient le 3
frimaire an VIII, que l'armée du Danube, comprenant les troupes stationnées
en Helvétie et entre Bâle et Neuf-Brisach, serait également placée sous ses
ordres, et que la masse unique ainsi constituée continuerait à s'appeler
armée du Rhin dont « la ligne s'étendra depuis Genève jusqu'à Oppenheim[2] ». En réalité, elle resta
répartie sur un espace bien plus considérable depuis le Saint-Gothard, par
Coire, Constance, Bâle, Mayence, jusqu'à Düsseldorf, et fractionnée en deux
ailes. L'aile
droite, sous le commandement de Lecourbe, comprenait 7 divisions
d'infanterie (Montchoisy, Turreau, Loison, Lorge, Mortier, Bastoul, Müller) de force variable[3] : deux divisions de cavalerie (Nansouty, Boyer)[4] ; un parc d'artillerie (Lemaire) ; les troupes et dépôts
stationnés sur le territoire de la 6e division militaire[5]. Son effectif s'élevait à 66.110
fusils, 10.542 sabres, 4.809 canonniers et sapeurs[6]. Elle occupait l'Helvétie, sauf
les 4e et 5e divisions cantonnées le long du Rhin, entre Huningue et Coblentz[7]. L'aile gauche, sous le
commandement de Baraguay d'Hilliers, se composait de 5 divisions d'infanterie
(Leval,
Tharreau, Colaud, Ney, Hardy) d'effectifs également variables[8] ; d'une division de cavalerie (d'Hautpoul)[9] ; d'un parc d'artillerie (Lacombe
Saint-Michel) ; des
3e, 4e, 5e et 26e divisions militaires[10]. Elle comptait 52.176 fusils,
10.240 sabres, 6.966 canonniers et sapeurs[11]. L'effectif
total de l'armée du Rhin était donc de 151.143 soldats, dont 108.000 hommes
environ de troupes aptes à faire campagne ou à constituer les garnisons des
places fortes de première ligne. Le 13
frimaire, Bonaparte avait donné au Ministre de la Guerre l'ordre de la
renforcer des 4e, 15e, 42e, 51e, 54e demi-brigades de ligne, de deux
demi-brigades françaises, de deux demi-brigades bataves, et de trois
régiments de cavalerie de l'armée de Batavie ; de tous les régiments de
cavalerie que Berthier pourrait distraire de l'intérieur ; enfin, de tous les
bataillons de conscrits qu'il serait possible d'y envoyer et qu'on
incorporerait au moment de leur arrivée[12] dans les trois bataillons de
guerre des demi-brigades[13]. Mais on éprouva de ce chef, et
dans toutes les armées de la République, de graves mécomptes. Les bataillons
auxiliaires arrivèrent très réduits, a la fois par les désertions dont le
nombre était considérable[14] et par l'abus des certificats
d'exemption trop facilement délivrés aux conscrits[15]. Le gouvernement, déclarait
Moreau, « ne saurait prendre des mesures trop promptes et trop sévères
pour faire cesser cet état de choses déplorable et renvoyer les conscrits à
l'armée[16] ». Les Consuls rendirent, le 14
pluviôse (3
février), un Arrêté
dans ce sens[17]. Afin de
ne laisser on première ligne que des éléments capables de combattre
vigoureusement, Bonaparte prescrivit au Ministre de la Guerre de placer des demi-brigades
dans les principales places de l'arrondissement de l'armée du Rhin, en
choisissant les corps qui avaient le plus souffert[18]. Ces dispositions, écrivait-il
à Moreau, « vous mettront à même de précipiter sur l'ennemi l'élite des
troupes qui vous obéissent[19]... » Le 26
pluviôse, le Premier Consul donna à Moreau des instructions sur la
composition en infanterie, cavalerie, artillerie, des divisions de l'armée du
Rhin. Les plus fortes devaient être composées de quatre demi-brigades de
bataille et d'une légère ; les plus faibles de quatre demi-brigades au total.
Les premières auraient, au plus, trois généraux de brigade et un adjudant
général ; les autres, au plus, deux généraux de brigade et un adjudant
général. On adjoindrait à chaque division douze pièces d'artillerie au
maximum, et « le moins de cavalerie possible... tout au plus un régiment de
hussards ou de chasseurs ». Tout le reste de la cavalerie de l'armée
serait formé en divisions « composées de quatre, ou au plus de six régiments
et quelques bataillons d'infanterie légère », commandées par un général de
division assisté de deux généraux de brigade et d'un adjudant général.
Bonaparte recommanda à Moreau de ne laisser dans toutes les places du Rhin et
la 6e division militaire[20] que « les compagnies
auxiliaires et les dépôts » ; de constituer les garnisons de Kehl, de Mayence
et d'Ehrenbreitstein au moyen des corps « les plus fatigués » et de réunir,
en dix ou quatorze divisions actives, 120 ou 130.000 hommes[21]. A cette
époque, Moreau ne pensait pas pouvoir réunir des forces aussi considérables.
Abstraction faite de ce qu'il croyait devoir laisser à Mayence, en Helvétie
et dans quelques places, il comptait entrer en campagne avec une centaine de
bataillons à 700 hommes chacun, environ 12 à 13.000 chevaux et 120 bouches à
feu environ, dont moitié artillerie légère[22]. Moreau
ne manifesta, dans sa correspondance avec le Premier Consul, aucune humeur de
ces instructions étroites dont bien des détails eussent dû être laissés à son
initiative. Il n'y fit même aucune allusion, opposant ainsi une sorte de
force d'inertie, et chargea, le 6 ventôse[23], son chef d'état-major de faire
connaître au Ministre de la Guerre l'organisation de l'armée qu'il venait « de
prononcer définitivement[24] », et qui différait
sensiblement de celle qu'avait ordonnée le Premier Consul. Elle
était fractionnée en quatre corps : l'aile droite, aux ordres de
Lecourbe, forte de 28.000 hommes d'infanterie et de 2.000 chevaux ; le centre,
dont Moreau se réservait le commandement direct, comprenait 28.000 fusils et
7.000 sabres ; l'aile gauche, commandée par Saint-Cyr, avait 26.000
hommes d'infanterie et 4.000 chevaux ; enfin le corps du bas Rhin, confié à
Sainte-Suzanne, dont l'effectif ne s'élevait qu'à 18.000 fantassins et 2.000
cavaliers[25]. 40 bouches à feu étaient
affectées à chacun des trois premiers corps ; 20 seulement à celui du bas
Rhin. Le 10
ventôse, le Premier Consul chargea le Ministre de la Guerre d'envoyer à
Moreau, pour l'organisation de l'armée, des instructions complémentaires qui
modifiaient celles du 20 pluviôse et eurent pour effet d'approuver
implicitement les mesures dont Dessolle avait fait connaître l'exécution.
L'infanterie sera partagée en dix divisions, chacune de 10.000 hommes. Elles
seront groupées en quatre corps d'armée comprenant : le 1er et le 3e, deux
divisions ; le 2e et le 4e, quatre divisions. Le 4e corps portera le nom de
corps de réserve : « Il est, en effet, écrit Bonaparte, destiné à servir de
corps de réserve aux trois autres corps, à garder la Suisse et à combiner ses
opérations avec ceux d'Italie[26]. » Aussi
désigna-t-il nominativement son chef : ce sera Lecourbe qui, dans la campagne
précédente, s'était illustré en Helvétie, et qui connaissait parfaitement la
région où le corps de réserve devait être appelé à intervenir. Moreau
eut toute latitude pour distribuer sa cavalerie comme il le jugerait
convenable, en affectant toutefois au 4e corps trois mille sabres, dont la
plus grande partie se composerait de cavalerie légère, chasseurs ou hussards,
plus aptes à rendre des services en pays de montagnes. Toute
l'armée devait être « le plus concentrée que faire se pourra, avant le 1er
germinal, entre Bâle et Constance, la gauche pouvant s'étendre jusqu'à
Strasbourg, pour la facilité des subsistances. » Elle sera pourvue de tout le
matériel nécessaire « pour pouvoir jeter trois ponts, dont l'étendue sera
calculée sur la largeur du Rhin, entre Schaffouse et Constance[27] ». Bien
que Moreau désapprouvât, en principe, la concentration préalable des forces,
et fût opposé d'ailleurs, à ce qu'elle s'effectuât en Helvétie, il obéit et
donna immédiatement des instructions à cet effet. Le fractionnement de
l'armée devait se poursuivre simultanément. Mais le 24 ventôse (15 mars), tout fut ajourné, marches de
rassemblement et organisation, en raison des difficultés que suscitait
l'alimentation des troupes. Provisoirement, l'armée fut divisée en trois
corps : aile droite (Lecourbe), centre (Saint-Cyr), gauche (Sainte-Suzanne). A la
suite de conférences qui eurent lieu à Paris du 22 au 26 ventôse, entre le
général Dessolle, chef d'état-major de Moreau, et le Premier Consul, celui-ci
dicta à Bourrienne le Ier germinal, une Note destinée à servir de base à
l'organisation définitive de l'armée du Rhin[28]. L'infanterie serait divisée ii
en quatre grands corps d'armée » : le premier et le troisième, composés de
trois divisions, l'une de 10.000 hommes, les deux autres de 5.000 ; le second
et le quatrième de quatre divisions, deux d'entre elles de 10.000 hommes, les
deux autres de 5.000. Les trois premiers corps porteraient le nom de « corps
d'armée du Rhin, le quatrième, de corps de réserve ». La cavalerie
serait partagée en divisions fortes de 2 à 3.000 chevaux[29] ; celle du corps d'armée de
réserve serait de 3.000 chevaux, les deux tiers composés de chasseurs ou
hussards, le troisième tiers de dragons et cavalerie proprement dite. Chaque
division de 5.000 hommes aurait six pièces d'artillerie, chaque division de
10.000 hommes, douze pièces. Enfin l'artillerie du corps de réserve se
composerait de « six pièces de 4 sur affûts de traîneaux et le nombre de
traîneaux nécessaires pour charrier le reste de son équipage[30] ». On ne
saurait reprocher au Premier Consul d'entrer dans le détail de l'organisation
du corps de réserve qui, dans sa pensée, devait seconder l'armée d'Italie et,
de ce fait, différer des trois autres afin d'être plus apte aux opérations en
pays de montagne. Mais il semblait logique de laisser à Moreau le soin de
donner aux grandes unités de l'armée du Rhin la composition qui lui
paraîtrait la plus rationnelle, dès l'instant où il était responsable de leur
emploi et où il n'existait pas, comme de nos jours, une organisation type.
Aussi, la Note du Premier Consul fut-elle l'objet, de la part de Dessolle,
d'observations très justifiées qui décidèrent Bonaparte à laisser à Moreau
une certaine latitude, et à l'autoriser à faire les modifications qu'il
croirait convenables[31]. En
réalité, Moreau usa de l'initiative qui lui était laissée et ordonna le 11
germinal (1er
avril) une
organisation de l'armée quelque peu différente. L’aile
droite (Lecourbe)
était forte de quatre divisions d'infanterie (Montchoisy, Vandamme, Lorge,
Montrichard), la
première occupant le Valais, les trois autres échelonnés le long du Rhin, de
Coire à Säckingen. La réserve,
aux ordres directs du général en chef, se composait de trois divisions
d'infanterie (Delmas, Leclerc, Richepance) cantonnées entre Lœrrach, Bâle, Cernay, Schlestadt,
et d'une division de cavalerie (d'Hautpoul) répartie entre Mirecourt,
Épinal, Saint-Dié, Charmes. Le centre
(Saint-Cyr) comprenait trois divisions
d'infanterie (Ney, Baraguay d'Hilliers, Tharreau) et une division de réserve,
établies entre Brisach, Colmar, Obernai, Plobsheim, Marekolsheim[32]. L’aile
gauche (Sainte-Suzanne) était constituée au moyen de trois divisions d'infanterie (Colaud, Souham,
Legrand)
stationnées entre Kehl, Strasbourg, Germersheim, Frankenthal ; les deux
divisions Delaborde et Leval, affectées à la défense des places de Landau, Mayence
et Cassel, lui étaient rattachées. Dans
celte organisation, par une dérogation aux règles habituelles et à la logique
même, Moreau avait cru devoir assumer le commandement direct du corps de
réserve, pour des raisons qu'il est difficile de discerner. D'après
Saint-Cyr, il y fut poussé par l'adjudant général Lahorie, « homme d'esprit
et d'intrigue », dit-il, qui avait pris un grand ascendant sur le général en
chef, qui aspirait à être son confident et son conseiller, et qui, dans ce
but, ambitionnait le poste de chef d'état-major d'un corps d'armée placé sous
les ordres immédiats de Moreau[33]. D'après
Dessolle, au contraire, Moreau aurait pris ce parti « pour ne pas choquer
l'amour-propre de quelques anciens généraux de division », Delmas, Leclerc, Richepance
et d'Hautpoul, qui auraient pu se trouver froissés d’être subordonnés à Lecourbe,
à Saint-Cyr ou à Sainte-Suzanne[34]. Quel qu'en soit le motif,
cette mesure fut adoptée et, dans les deux hypothèses, elle est un indice
d'une certaine faiblesse de caractère de la part de Moreau. Saint-Cyr
lui fit observer avec raison que c'était multiplier, sans utilité, la
correspondance du général en chef. Moreau risquait ainsi de ne pouvoir se
trouver sur tous les points où sa présence serait nécessaire, en restant, à
poste fixe, au centre du corps d'armée dont il se réservait la direction,
pour en régler les mouvements et les diverses attaques. Il négligerait ainsi,
nécessairement, ou les fonctions de commandant de ce corps, ou, ce qui serait
plus grave, celles de général en chef. Saint-Cyr déclara qu'en maintenant une
telle organisation, « sans exemple dans les armées modernes, il
semblerait se faire le rival ou l’émule de ses lieutenants ; que ce serait
s'abaisser sans qu'il pût en résulter le moindre bien pour l'armée ». Si
Moreau, ajoutait-il, croyait qu'en commandant directement des troupes, la
réussite des opérations fût plus certaine, rien ne l'empêcherait de le faire
à chaque fois qu'il le jugerait utile, mais qu'il ferait naître de graves
mécontentements dans toute l'armée en adoptant particulièrement certains
corps de troupes qui seraient fatalement privilégiés. « On devait présumer
que les affaires les plus brillantes lui seraient réservées, et que l'on
ferait servir les autres à les assurer, car comment exposer le corps du
général en chef à être battu ou même n'avoir que des succès moins marquants ?[35] » Les
inconvénients d'une telle organisation parurent si graves à Saint-Cyr, qu'il
manifesta hautement sa résolution de quitter l'armée si elle n'était pas rapportée.
Sa santé ébranlée par les fatigues de la dernière campagne, disait-il,
exigeait d'ailleurs qu'il prit quelque repos. Moreau
ne répondit que faiblement aux observations de son lieutenant général.
Toutefois, il rejeta la supposition qu'on lui prêtait de vouloir se ménager
les affaires brillantes, et affirma qu'il ne gardait le commandement direct
d'un corps que pour avoir plus de certitude de l'engager au mieux des
circonstances. Il supplia Saint-Cyr, qu'il appréciait beaucoup, de commencer
au moins la campagne, l'assurant que si sa santé ne lui permettait pas de la
faire tout entière, il ne s'opposerait pas à ce qu'il se retirât. Saint-Cyr
se décida à rester à l'armée, mais il ne tarda pas, dit-il, « à s'en
repentir, car le corps dont Moreau avait conservé le commandement, quoique
désigné sous le nom de corps de réserve, fut, comme les autres, en première
ligne[36]. » Le 1er
floréal (21
avril), l'armée
française s'étendait, le long du Rhin, depuis Coire, par le lac de Constance,
Râle et Strasbourg, jusqu'aux abords de Mannheim. Elle occupait, par des
détachements, les vallées supérieures du Rhône, du Rhin et de la Reuss ; ses
divisions, dites stationnaires, avaient leur quartier-général à Besançon (6e), Nancy (4e), Metz (3e), Strasbourg (5e), Mayence (corps du bas
Rhin), Coblentz (26e), celle-ci gardant à l'extrême
gauche Bonn et Düsseldorf. Le
grand quartier général avait été transféré le 29 germinal, de Haie à Colmar[37] et, de sa personne, Moreau
s'était rendu à Strasbourg dans la nuit du 28 au 29 germinal[38], pour donner le change aux
Autrichiens sur ses projets, en attirant leur attention vers le Rhin moyen. L'aile
droite (quartier général Zürich), commandée par le lieutenant général Lecourbe, se
composait de quatre divisions d'infanterie, une division dite de réserve et
un parc d'artillerie. Son effectif était de 35.377 fusils, 3.146 sabres, 2.920
canonniers et pontonniers. La première division occupait Berne, Lausanne, le
Valais, la haute vallée de la Reuss ; les autres étaient stationnées entre le
Rhin, les lacs de Constance, de Wallenstadt, de Zürich et l'Aar. Le corps
de réserve, placé sous les ordres directs de Moreau, comprenait trois
divisions d'infanterie, une de cavalerie, un parc d'artillerie. Sa force
était de 19.938 fusils, 4.823 sabres, 615 canonniers. Il était cantonné entre
Bâle, Colmar, Belfort ; sa cavalerie sur le versant occidental des Vosges. Le corps
du centre (quartier général Strasbourg), avait pour chef le lieutenant général Saint-Cyr
et se subdivisait en trois divisions d'infanterie, une division dite de
réserve, un parc d'artillerie. Son effectif était de 28.817 fusils, 3.599
sabres, 1.835 canonniers. Il était établi entre Colmar, Brisach, Strasbourg,
Schlestadt. L’aile
gauche (quartier général Strasbourg), commandée par le lieutenant général
Sainte-Suzanne, se composait de quatre divisions d'infanterie et d'un parc
d'artillerie. Elle comptait 12.797 fusils, 3.910 sabres, 1.454 canonniers et
pontonniers. La zone de ses cantonnements était limitée par Molsheim,
Strasbourg, Kehl, Germersheim, Landau, Saverne. La
force totale de l'armée du Rhin disponible pour des opérations de campagne
s'élevait donc, le 1er floréal, à 119.237 hommes[39] et 29.247 chevaux[40]. Le nombre des bouches à feu
attelées était de 116. À la
même date du 21 avril, l'armée autrichienne s'étendait en cordon de Heidelberg,
par Dürlach, Gengenbach, Fribourg, Säckingen, Schaffouse, Feldkirch, à Coire.
Les réserves, comprenant à peine le dixième des forces totales, se trouvaient
sur le versant occidental de la Forêt-Noire dans la région de Villingen,
Freudenstadt, Stockach, Messkirch. Le grand quartier général était à Donaueschingen. L'effectif de l'armée était de 131.000 hommes environ, dont 98.000 fantassins, 25.000 sabres, 7.500 canonniers, pionniers, sapeurs-mineurs[41]. |
[1]
Minute de l'Arrêté, Arch. nat., A FIV, 613.
[2]
AULARD, Registre
des délibérations du Consulat provisoire, 37.
[3]
La division la plus forte était la 5e (Mortier) : 16.996 hommes ; la plus
faible était la 7e (Müller) : 2.027 hommes.
[4]
Cantonnées : la division de dragons Nansouty à Remiremont, Épinal,
Rambervillers, Saint-Dié ; la division de cavalerie légère Boyer, entre Luxeuil
et l'Isle-sur-le-Doubs, pour la facilité des subsistances.
[5]
Départements de l'Ain, du Jura, du Doubs, du Mont-Terrible, de la Haute-Saône.
[6]
A. H. G., Bulletin historique du 1er au 30 nivôse. — Dans ces chiffres
sont compris les troupes de la 6e division militaire.
[7]
A. H. G., Bulletin historique du 1er au 30 nivôse.
[8]
La division la plus forte était la 2e (Tharreau) : 11.095 hommes ; la plus
faible était la 4e (Ney) : 3.512 hommes.
[9]
Cantonnée, comme celles de l'aile droite et pour la même raison, sur les
derrières de l'armée, entre la Sarre et la Blies.
[10]
3e division militaire : départements des Forêts et de la Moselle. 4e : Vosges
et Meurthe. 5e : Haut et Bas-Rhin. 26e : Les quatre départements réunis de la
rive gauche du Rhin.
[11]
A. H. G. Bulletin historique du 1er au 30 nivôse. — Dans ces chiffres
sont compris ceux des 4 divisions militaires.
[12]
Correspondance de Napoléon, n° 4413.
Le recrutement de l'armée était assuré par la loi du 19
fructidor an VI qui avait établi la circonscription. La loi du 23 fructidor an
VII avait créé 100 demi-brigades d'infanterie de bataille, 26 demi-brigades
d'infanterie légère, 6 demi-brigades d'Helvétie à la solde de la République.
Elles se composaient toutes, en vertu d'un Art été du Directoire du 14 prairial
an VII, de trois bataillons de guerre et d'un dépôt destiné, à les alimenter.
La loi du 10 messidor an VII avait mis en activité de
service les conscrits de toutes les classes ; celle du 14messidor an VII avait
organisé des bataillons auxiliaires en bataillons de conscrits fini portaient
le nom de leurs départements respectifs ou de celui qui avait fourni le plus
grand nombre de recrues. Ces lois avaient été complétées par des Arrêtes du
Directoire du 12 et du IV fructidor an VII. Un Arrêté du 3 brumaire an VII
attachait un bataillon auxiliaire à chaque demi-brigade, mais il fut rapporté
par les Consuls.
Le 6 frimaire an VIII, une commission d'officiers
généraux émit le vœu que les bataillons de conscrits fussent incorporés dans
les demi-brigades de bataille ou d'infanterie légère jusqu'à épuisement total.
Un Arrêté des Consuls fut pris à cet effet le 4 pluviôse an VIII. Il ne devait
plus en exister au 1er ventôse (Correspondance de Napoléon, n° 4540,
4583). — Cf. Berthier à Macdonald, 8 pluviôse, A. H. G. (Correspondance
générale, 15 au 30 janvier 1800.)
Les inspecteurs généraux de l'infanterie, attachés à
l'armée du Rhin, Schauenbourg pour l'aile droite, Dupont-Chaumont pour l'aile
gauche, furent chargés des détails de l'incorporation des bataillons
auxiliaires dans les demi-brigades. L'opération fut terminée le 29 pluviôse
(Dessolle au Ministre de la Guerre, 6 ventôse, A. H. G.).
[13]
Le Ministre de la Guerre au général Dupont-Chaumont, inspecteur général de
l'infanterie, Paris, 28 frimaire (A. H. G.).
[14]
Dessolle au Ministre de la Guerre, Bâle, 18 nivôse (A. H. G.) ; Moreau à
Bonaparte, Strasbourg, 2 pluviôse (Ibid.) ; Moreau au Ministre de la Guerre, 4
pluviôse (Ibid.) ; Châteauneuf-Randon commandant la 3e division militaire au Ministre
de la Guerre, 4 pluviôse. (Ibid.)
Ce dernier mande que « les conscrits et
réquisitionnaires déserteurs se réfugient dans les communes d'idiome allemand »
où ils trouvent la protection des agents de l'administration municipale «
ennemis du nouvel ordre de choses ». La situation est tellement grave, qu'il
réclame le pouvoir de mettre en état de siège les communes incriminées et même
la ville de Metz, qui, manquant d'une police convenablement organisée, offre
aux déserteurs un abri sûr.
Le 2e bataillon de la Côte-d'Or qui comptait, le 19
nivôse, 22 officiers et 780 sous-officiers et soldats n'avait plus, lors de son
incorporation dans la 23e demi-brigade, que 9 officiers et 547 sous-officiers
et soldats (Dessolle à l'adjudant-général Coussaud, chef de l'état-major de la
5e division,25 nivôse).
Le bataillon auxiliaire du Mont-Terrible, qui était
fort de 1.100hommes, se réduisit à 150 (Dessolle au Ministre de la Guerre,
Bâle, 13 pluviôse, A. H. G.).
La désertion sévissait, dans des proportions non moins
fortes, à l'armée d'Italie. (Le Ministre de la police générale au Ministre de
la Guerre, 11 frimaire, A. H. G., Correspondance générale, 1er au 15 décembre
1799) lui janvier 1800, huit bataillons auxiliaires ne présentaient plus, au
total, au moment du passage du Var, que 310 hommes sur un effectif initial de
10,250. (Masséna à Bonaparte, 28 pluviôse, A. H. G., armée d'Italie.)
La désertion des conscrits avait commencé à sévir, dans
de grandes proportions, sous le Directoire. (SCIOUT, Le Directoire, IV, 540-541,
d'après les Archives nationales, F7, 7685 ; P7, 7685 ; FIC 9.)
[15]
Dans une lettre adressée à Bonaparte le 25 nivôse an VIII, Lecourbe évaluait à
60.000 le nombre de ceux qui avaient été abusivement congédiés par ce qu'il
appelait « de honteux trafics ». Il importe, ajoutait-il, « non seulement
de compléter nos cadres, mais encore de nationaliser l'armée, ce que vous
n'obtiendrez pas tant que l'homme riche, le citadin surtout, seront toujours
sûrs de s'exempter du service pour de l'argent. » Il citait le cas du
département du Bas-Rhin où, sur 2.300 congés présentés à la révision, 1.800
avaient été annules, et leurs détenteurs renvoyés à l'armée (A. H. G.). — Cf.
Carnot à Bonaparte, 23 prairial an VIII. (Arch. nat., A FIV 1372.)
[16]
Moreau au Ministre de la Guerre, 4 pluviôse (A. H. G.).
[17]
D'après cet Arrêté, un tableau nominatif des conscrits, fourni par
chaque département, et établi par les soins du commissaire du gouvernement près
de charpie administration centrale, devait être adressé au général commandant
la division militaire dans laquelle était compris le département. Les chefs des
demi-brigades ayant incorporé ou devant incorporer les bataillons de conscrits,
étaient chargés de l'aire parvenir aux généraux commandant les divisions
militaires intéressées, les noms, signalements et domiciles des conscrits
déserteurs ou réfractaires. Les généraux, commandant ces divisions devaient
alors donner des ordres aux gendarmeries pour faire conduire au chef-lieu de la
division les conscrits absents irrégulièrement de leurs corps et les diriger sur
leurs demi-brigades respectives.
[18]
Correspondance de Napoléon, n° 4531.
[19]
Correspondance de Napoléon, n° 4531.
C'est ainsi que : la 5e de bataille, arrivant d'Italie
et stationnée à Bâle fut envoyée à Luxembourg, la 12e à Strasbourg, les 17e et
27e à Mayence. La 8e de bataille, cantonnée à Frankenthal, envoyée à Landau. La
29e cantonnée à Spire, envoyée à Düsseldorf. La 76e cantonnée à Bâle, envoyée à
Ehrenbreitstein.
(Le Ministre de la Guerre au général Dupont-Chaumont,
Paris, 22 nivôse, A. H. G.).
[20]
Départements de l'Ain, du Jura, du Doubs, du Mont-Terrible, de la Haute-Saône.
[21]
Correspondance de Napoléon, n° 4596.
[22]
Moreau à Bonaparte, Bâle, 27 pluviôse (A. H. G.).
[23]
La lettre du Premier Consul du 26 pluviôse lui était déjà parvenue.
[24]
Dessolle au Ministre de la Guerre, Bâle, 6 ventôse (A. H. G.).
[25]
Le corps du bas Rhin avait été constitué par Moreau le 10 pluviôse, par
prélèvement sur l'aile gauche. — « Les chances diverses des opérations
militaires qui peuvent avoir lieu sur ce point rendent cette disposition
nécessaire », écrivait Moreau, à cette date, à Baraguay d'Hilliers. —
Sainte-Suzanne, désigné pour commander le corps dit bas Rhin, était arrivé à
Mayence le 19 pluviôse. « La grande distance à laquelle Mayence se trouve de la
masse de l'année, lui avait écrit Moreau, le 10 de ce mois, ne me permet pas de
m'en reposer, pour ce commandement, sur un autre que sur vous qui le connaissez
parfaitement. » (A. H. G.)
[26]
Correspondance de Napoléon, n° 4626.
[27]
Correspondance de Napoléon, n° 4626.
[28]
Cette Note existe aux Archives de la Guerre. (Armée du Rhin,
Correspondance, mars 1800), corrigée de la main du Premier Consul et annotée en
marge par Dessolle. Elle a été publiée dans la Correspondance de Napoléon, sous
le n° 4694, avec la date du 1er germinal an VIII, et le titre : « Plan de
campagne pour l'armée du Rhin. » Cette date ne parait pas exacte, car Dessolle
qui a écrit plusieurs observations marginales n'a séjourné à Paris que du 22 au
26 ventôse. Le titre qui lui conviendrait mieux serait d'ailleurs : « Plan
de campagne pour les armées du Rhin et de réserve. »
[29]
Observation marginale de la main de Dessolle : « Ces corps, à l'exception de la
réserve, ne peuvent être commandés que par des généraux de brigade, par le
manque d'officiers généraux de celte arme ; il faudrait encore deux ou trois
généraux de cavalerie pour avoir des remplacements et pour surveiller les
depuis de cavalerie de l'armée. »
[30]
Correspondance de Napoléon, n° 4694.
Observation marginale tic la main de Dessolle : « Je
doute que l'on puisse mettre en campagne une aussi grande quantité d'artillerie
que le comporte l'organisation prescrite. Il fallait, selon les calculs du
commandant de l'artillerie, 9.000 chevaux pour traîner 120 pièces de canon avec
leurs munitions ; nous n'en avions que 7.000 au moment où je suis parti. La
levée peut avoir fourni quelques chevaux de plus, mais n'arrivera pas au
complet de 9.000 chevaux pour le courant de la campagne. »
[31]
Une observation marginale dictée ou inspirée par Bonaparte sur la Note
précitée disait : « Non seulement on ne voit pas d'inconvénient, mais on croit
bon que le général Moreau fasse telles modifications qu'il jugera convenable à
l'organisation des corps de l'armée. »
[32]
On remarquera que les cantonnements de certains éléments de la réserve
chevauchent sur ceux du centre.
[33]
GOUVION SAINT-CYR, Mémoires pour
servir à l'Histoire militaire sous le Directoire, le Consulat et l'Empire,
II, 114, note 1.
[34]
Observation marginale, écrite de la main de Dessolle sur une Note dictée par le
Premier Consul à Bourrienne et publiée dans la Correspondance de Napoléon
sous le n° 4694.
Dessolle ajoutait : « D'après ce que m'a dit le Consul,
il parait approuver cette mesure. »
[35]
GOUVION SAINT-CYR, loc. cit.,
II, 111-112.
[36]
GOUVION SAINT-CYR, loc. cit.,
II, 113-114.
[37]
Ordre du jour du chef d'état-major général du 27 germinal (A. H. G.).
[38]
Moreau à Bonaparte, Bâle, 28 germinal (A. H. G.).
[39]
Infanterie et sapeurs : 96.929 hommes (123 bataillons). — Cavalerie : 15.478
hommes (137 escadrons). — Artillerie et pontonniers : 6,830 hommes (61
compagnies).
[40]
3.986 chevaux d'officiers, 18.653 chevaux de troupe, 5.744 d'artillerie, 864 «
de charrois ».
[41]
Oesterreichische militärische Zeitschrift, Vienne, 1836, I, Der
Feldzug 1800 in Deutschland nach œsterreichischen Originalquellen, 243 et
suiv.