CHARLES DE VALOIS (1270-1325)

LIVRE PREMIER. — LA VIE POLITIQUE DE CHARLES DE VALOIS

 

CHAPITRE VII. — CHARLES DE VALOIS ET PHILIPPE V

 

 

I

La mort de Louis X posa de très graves questions, et agita violemment la France : la question de l'exclusion des femmes de tout droit à la couronne de France fut tranchée, mais seulement après une vive agitation dont profitèrent les ligues d'Artois et les Flamands. Philippe[1], comte de Poitiers, l'aîné des frères de Louis X, était à Lyon auprès du conclave qui devait choisir le successeur de Clément V. A la nouvelle de la mort de son frère, Philippe se hâta de revenir à Paris où de graves événements allaient se passer : Louis X ne laissait que deux filles, mais sa femme Clémence était enceinte ; qui serait régent ou héritier ? La question, si importante au point de vue du droit public, allait recevoir une réponse pour la première fois depuis l'avènement des Capétiens. Aucun texte ne la tranchait. Les événements qui ont amené la solution que l'on a appelée loi salique ont été étudiés à plusieurs reprises[2] : la conclusion qui s'impose, c'est que l'habileté de Philippe régla en fait la question pendante et créa ainsi le droit.

Dès le début, Philippe agit en régent, ce qui était son droit, en recevant, le 6 juin, le serment d'hommage du comte de Forez, qu'il chargea de garder le conclave[3] ; d après les Chroniques de Saint-Denis, Philippe n'aurait rencontré aucune résistance[4], mais la Chronographia[5] et quelques chroniques de valeur médiocre[6] nous racontent que sur son chemin[7] il rencontra Charles de Valois, Charles de la Marche et Gui de Saint-Pol, qui lui demandèrent d'abandonner la régence à Charles de Valois comme au plus âgé des royaux. Philippe, habile et prudent, accorda de bonnes paroles, et s'enfuit en cachette à Paris. La ville était gardée au nom de son oncle et de son frère : Gaucher de Chatillon, connétable de France, dut employer la force pour le faire entrer dans le palais de la Cité[8].

Nous n'admettons pas tous ces récits, évidemment développés après coup, pas plus que la version officielle qui laisserait croire à une union constante entre les royaux : il y a dans chacun de ces récits une part de vérité qu'il faut démêler.

Deux documents, qui se trouvent à Paris, n'ont pas obtenu l'attention qu'ils méritaient, car ils prouvent l'existence d'une régence exercée par les royaux en l'absence de Philippe. En effet, le 10 mars 1317[9], Philippe V déclara que les marchands italiens, qui trafiquaient aux foires de Champagne, avaient refusé de payer le sou pour livre imposé par son frère Louis X[10], parce que d'après des conventions faites apres son deces et avant que nous venissiens au gouvernement des diz roiaumes, aveuques nos chiers oncles et frere Charles de Valois, Loys de Evreus et Charles de la Marche, contes, fils de roy de France, ils étaient dispensés de cette redevance. Et cela en vertu de lettres scellées des seiaux des devandiz noz chiers oncles et frere desuz diz, lesquieus il requeroient que fussent veues par nous, confermées et approvées ; de plus, les marchands réclamaient le remboursement de 5.000 l. t. prêtées aux susdits pour les besoignes de nostre royaume. Philippe V ratifia la concession pour l'avenir, et s'engagea à rembourser la dette. Le second document prouve que les clefs du trésor royal avaient été remises à Henri de Sully, bouteiller, sous les sceaux de Charles de Valois et de Charles de la Marche[11]. Quant au mobilier et aux joyaux de la couronne, ils étaient entre les mains de Philippe V, qui, le 15 avril 1317, en fit déposer, dans le trésor de la cathédrale de Bourges, une partie notable[12]. Henri de Sully devait en avoir aussi la garde, car, le 6 juillet 1319, en présence de Charles de Valois[13] et de son conseil, le roi lui donna quittance de tout ce qui avait pu en être distrait dans plusieurs circonstances[14].

Il y avait donc eu, de la part des royaux, exercice des fonctions de la régence, mais était-ce contre Philippe V ? Les royaux ont très bien pu, en l'absence de Philippe V, gouverner en son nom avec l'intention de lui remettre le pouvoir. Quant à Clémence de Hongrie, elle était incapable de résister : plongée dans la plus profonde tristesse, elle craignait pour ses enfants, et Charles l'aurait rassurée, paraît-il, en lui promettant de la défendre, elle et l'enfant qui naîtrait d'elle[15]. Mais comme Philippe était le plus fort et faisait bon accueil à tous[16], chacun s'empressa de lui porter ses hommages[17], plus ou moins rapidement, mais toujours avec le désir d'en être récompensé.

Qu'allait être l'attitude de Charles de Valois ? La régence pouvait appartenir à Eude de Bourgogne, tuteur des enfants de Clémence, M. Lehugeur a mis ce point en lumière[18]. Charles n'avait aucun parti pris contre Eude ou contre Philippe et, à notre avis, s'il s'est rallié de suite à Philippe, c'est surtout parce que Philippe avait pour lui la force. Car, Charles de Valois n'a jamais prétendu à être le chef d'un parti féodal, et chercher ce motif à l'attitude de Charles c'est attacher plus d'importance que lui aux principes. Nous allons voir, au contraire, que toute sa conduite a été dictée par ses intérêts matériels, et n'a eu d'autre but que d'obtenir du roi la plus grande somme d'avantages.

Philippe s'empressa de consolider sa situation avec habileté et sans scrupules : le 17 juillet 1316, il traita avec Eude de Bourgogne, tuteur de Jeanne, fille aînée de Louis X, ne réservant à celle-ci, au cas où il ne naîtrait pas de fils, que la Navarre et la Champagne. Jeanne et sa sœur furent confiées à Agnès, leur tante[19], mère d'Eude, qui jura, le 9 août 1316, de ne pas les marier sans l'assentiment du régent, des comtes de Valois, d'Évreux et de la Marche, ou à leur défaut de leurs fils aînés ou des plus proches princes du sang[20]. Il était évident que s'il naissait un fils de Clémence de Hongrie, ce fils serait roi, mais en prévision du cas contraire Philippe se créait des partisans. Une assemblée, tenue le 16 juillet à Paris, avait d'avance ratifié les conditions du traité du 17 juillet, et contraint Eude à accepter l'usurpation[21]. Eude se laissa d'ailleurs gagner par la promesse de la main de Jeanne, fille de Philippe V, qu'il épousa le 22 septembre[22].

Charles de Valois, les comtes d'Évreux, de la Marche, de Clermont, et tous les grands seigneurs, continuèrent à être appelés dans le conseil étroit par l'ordonnance de Saint-Germain-en-Laye[23], et restèrent associés au gouvernement. Charles de Valois et Louis d'Évreux accompagnèrent le roi au sacre de Jean XXII, le 8 septembre 1316[24], et les cadeaux reçus par Charles à cette occasion attestèrent l'union de la famille royale[25].

 

II

Au mois de novembre 1316, la reine Clémence mit au monde un fils, auquel on donna le nom de Jean, et Philippe fut régent. Mais quelques jours après, toute la cour le conduisit à Saint-Denis, où il fut enterré auprès de son père. Cet événement favorisait trop le régent pour qu'on ne le soupçonnât pas d'avoir abrégé les jours de son pupille. Les accusations se tournèrent contre sa belle-mère, Mahaut d'Artois, qui, d'après Isabelle de Fiennes, aurait étouffé[26], ou piqué d'une épingle dans la tête[27], le jeune roi. Telle fut la force de ces bruits que l'on fut obligé d'instruire l'affaire. Mais il ne faudrait pas croire qu'il y eût là une pression de l'opinion publique : l'instigateur de tout ce scandale était le propre frère du roi, Charles de la Marche, dont l'opposition était avouée et incessante. La preuve est fournie par plusieurs bulles de Jean XXII, dont l'une ordonnait à Charles de ne pas soulever de tels scandales, en s'appuyant sur des témoins et agents de bas étage racolés pour la circonstance[28]. D'autres bulles priaient Charles de Valois et d'autres personnages[29] de peser sur l'esprit de Charles le Bel pour le faire renoncer à ses accusations[30]. Des documents, dont les originaux sont aujourd'hui perdus[31], nous font connaître ce procès, jugé par les pairs[32], et qui se termina par un acquittement. L'accusation ne portait pas seulement sur la mort de Jean, mais aussi sur celle de Louis X, et sur la confection d'un philtre employé pour réconcilier jadis Philippe V et sa femme[33]. Le roi déclara qu'il n'avait jamais été brouillé avec sa femme et les pairs, au nombre desquels siégea Charles de Valois, déclarèrent ces accusations mal fondées et acquittèrent Mahaut[34].

A ces bruits se rattache la légende de Giannino, prétendu fils de Louis X. Cet aventurier italien se fit passer pour ce Jean, sauvé à travers des péripéties romanesques, mais spolié par Mahaut, qui aurait mis un enfant mort à sa place dans le berceau royal. Le roi de Hongrie, Rienzi et la république de Sienne le reconnurent, et le problème de ses origines a été étudié plusieurs fois[35].

La mort de Jean Ier posait nettement la question[36] : qui allait être roi ? Philippe V, arguant du traité du 17 juillet qui le déclarait dégagé de toute convention s'il naissait un fils, prit le titre de roi de France[37], auquel il ajouta bientôt celui de roi de Navarre[38]. Si la régence avait été acceptée sans débat, il n'en fut pas de même de la royauté : le droit des femmes n'était pas réglé, et les prétentions de Philippe ne pouvaient se prouver[39]. Philippe le Bel avait proclamé l'exclusion des filles de Philippe pour son apanage de Poitiers, mais Louis X, dont on allait spolier les filles, avait renoncé à ce principe, et reconnu le droit des femmes, parce que raisons et drois naturez donnent que en deffautes de hoirs males les femelles doivent aussi bien heriter et avoir succession es biens et es possessions des peres de cui elles ont esté procréées et descendues en loyal mariage comme font li malle[40].

Philippe V rejeta ce principe dont il n'avait plus besoin, et, sacrifiant ainsi ses filles avec ses nièces, il prit le titre de roi et convoqua ses vassaux à son sacre pour le 6 janvier 1317[41]. Comme pair de France, Charles de Valois devait tenir une grande place à ce sacre : en effet, parmi les autres pairs, le comte de Bretagne était indifférent, Robert de Flandre et Édouard II[42] étaient hostiles ; quant au duc de Bourgogne, bien que secrètement favorable, il était obligé par ses devoirs de tuteur de protester avec Agnès, sa mère, et de refuser l'hommage[43]. Pour Mahaut, Robert d'Artois et les nobles de son comté lui disputaient son droit, et son comté était, de ce fait, entre les mains d'arbitres : et cependant elle était le meilleur appui de Philippe.

Mais qu'allait faire Charles de Valois ? Jusque-là, il avait prêté son appui au régent, au moins dans les affaires importantes : ce que suffisent il prouver les récits des historiens parisiens contemporains[44], la version officielle[45], et enfin les déclarations de Jean XXII[46]. Mais il y a une part de vérité chez les chroniqueurs[47] qui soutiennent le contraire : Charles a dû certainement feindre parfois contre Philippe une mauvaise humeur qu'ils ont exagérée dans leurs récits. L'attitude véritable nous est expliquée par une série de bulles contenues dans les registres de Jean XXII, et qui n'ont pas encore été utilisées : on y voit le pape supplier sans cesse Charles de ne pas refuser au roi l'appui prêté par lui tant pendant la régence qu'après le sacre[48] : ce qui prouve qu'en apparence Charles servait le roi, mais qu'au fond on craignait une défection. Charles était retenu dans l'union avec le roi par la crainte des ligues en Anjou, mais d'autre part, voyant le roi faible, ayant contre lui la Bourgogne, la Champagne, l'Artois et la Flandre, soulevées par le comte de Flandre et par Robert d'Artois, il voulait vendre cet appui.

De là, à notre avis, cette attitude, incertaine en apparence, mais dont le but était très précis : que lui dit en effet Jean XXII, non pour le ramener dans le parti du roi, mais pour l'empêcher de le quitter ? Le pape déclare accepter les raisons qu'il donne de son éloignement de l'entourage du roi[49], mais les arguments dont il se sert pour le rapprocher du roi ne sont nullement politiques : après des appels aux sentiments d'un oncle pour son neveu, il lui dit en propres termes : Nous espérons, en effet, que le roi ouvrira les mains de sa largesse à tes besoins, et nous croyons pouvoir l'y amener par nos paternels conseils[50]. Et c'est là, en somme, comme on le voit constamment, le lien qui rattache Charles, criblé de dettes, et l'avouant d'ailleurs sans vergogne, à tous ceux qu'il croit susceptible de les payer. Sous les rois précédents qu'il sentait forts, il s'était contenté de supplier : avec le nouveau roi, qui avait besoin de lui, il bouda la cour pour se faire payer plus cher son adhésion. Telle est toute l'explication des tergiversations qui ont rempli les années 1317 et 1318.

C'est dans ces conditions qu'eut lieu le sacre : la ville de Reims était fermée et gardée par des troupes imposantes ; sept pairs seulement — cinq pairs ecclésiastiques, Charles de Valois et la comtesse d'Artois — assistaient au sacre. Au grand scandale de tous[51], Mahaut, seule pour représenter les pairs laïques, soutint la couronne sur la tête de son gendre, dont le propre frère s'était enfui de la ville le matin même[52]. Charles de Valois avait assisté au sacre[53], mais pourquoi n'avait-il pas porté la couronne ? M. Lehugeur nous semble tomber dans l'exagération, en voyant dans ce fait un défi[54]. Philippe V, que l'on sait si habile, aurait-il vexé le seul pair laïc présent, surtout quand il faisait solliciter son appui par le pape ? L'initiative du refus venait donc plutôt de Charles qui avait probablement soulevé quelque difficulté de protocole : il avait pu, par exemple, refuser d'admettre une femme à la pairie, puisqu'on ne les admettait pas à la royauté.

En tout cas, pour contre-balancer l'effet de ce sacre, le roi, bien reçu des bourgeois de Paris[55], convoqua, en février 1317, une assemblée de prélats, barons, bourgeois et délégués de l'Université[56]. Tandis qu'Agnès protestait contre cette assemblée au nom de sa pupille, et réclamait le jugement des pairs[57], Philippe travaillait à se faire des adhérents ; il y réussit à merveille.

 

III

Les adversaires que pouvait rencontrer Philippe V étaient les royaux, les alliés et les Flamands : parmi les premiers, Louis d'Évreux était toujours resté lié au roi qui lui avait accordé la pairie[58] et de fortes augmentations domaniales[59]. Charles de la Marche faisait une opposition d'autant plus inexplicable que l'exclusion des femmes pouvait lui être profitable[60]. Il cherchait sans doute un profit immédiat. Nous avons vu sa fuite brusque de Reims : depuis, il se tenait à l'écart, et Jean XXII conseillait au roi de le ramener à lui, par de bons offices et de bons procédés[61]. Ce fut ce qui arriva[62], et, le 17 mars, Charles de la Marche et Louis d'Évreux s'allièrent pour défendre les droits du fils aîné qui naîtrait de Philippe V[63]. C'était là prendre des précautions contre une usurpation plus grave que celle de Philippe V et en même temps contre une tentative de régence de Charles de Valois dans le cas de mort de Philippe. Charles de Valois, rallié au roi depuis longtemps, n'avait pas à figurer dans cet acte ; mais il a probablement dû être froissé des préoccupations qui y perçaient.

Il faut voir dans cet acte une vengeance de Louis d'Évreux qui avait fiancé sa fille à Louis, fils du comte de Nevers[64], quand Charles offrit à Louis une de ses filles[65]. Ce dernier mariage, projeté en 1308, avait été rompu, à cause de la révolte de Louis. Les pourparlers furent repris, Louis et Charles se rencontrèrent à Bonny-sur-Loire[66], le 28 février, et y renouvelèrent leurs conventions de 1308[67]. Mais il fut décidé, le 1er mars, que Louis épouserait une des filles du troisième mariage de Charles, et non Isabelle[68]. Charles, s'engageait de plus, si le mariage ne se faisait pas avant le 15 août, à rendre à Louis de Nevers son fils qu'il lui avait confié, et à ne le remettre à aucune autre personne[69]. Philippe V ne pouvait voir d'un bon œil cette alliance qui fortifiait le comte de Nevers et froissait Louis d'Evreux[70]. A sa demande, Jean XXII pria Charles de ne pas marier sa fille à Louis, fils d'un ennemi du roi et de la France[71]. En même temps, Philippe accorda la paix à Louis de Nevers, reçut son hommage, lui rendit ses biens confisqués[72] et accorda à son fils la main de sa fille Marguerite[73]. Pour apaiser Louis d'Évreux, le roi lui accorda pour son fils Philippe la main de Jeanne de France[74]. Charles de Valois se voyait joué dans cette affaire, il n'y souscrivit qu'en juillet 1320[75], après de longues négociations qui retardèrent le mariage de Marguerite de France.

Pendant toute cette période, Jean XXII entretint avec Charles de Valois une correspondance active : il reçut de lui en ambassade Jean de Cherchemont, doyen de Poitiers. Le pape lui répondit qu'il verrait sans doute Charles de Valois dans une entrevue ménagée avec les rois de France et de Sicile, et il pria Charles de remettre à cette date leurs explications[76]. Puis le pape sollicita Charles, à plusieurs reprises, de ne pas s'écarter du roi, de ne pas donner cette arme à ses adversaires ; le 17 avril[77], puis le 29[78], il lui écrivit dans ce sens. Dans la dernière bulle, après l'avoir prié d'aider ses légats envoyés pour ramener les alliés à l'obéissance, il lui dit que sa présence près du roi serait agréable, et ses conseils acceptés sans hésitation[79]. Pareilles prières se renouvelèrent le 8 mai, accompagnées de la demande de ramener Charles de la Marche dans l'obéissance[80] : on comptait donc sur l'influence de Charles de Valois et sur ses bonnes dispositions. Cet acte prouve de plus que Charles de la Marche était de nouveau hostile au roi, et que l'acte d'alliance du 18 mars n'avait nullement brouillé Charles de Valois et Charles de la Marche. De pareilles lettres étaient adressées à ce dernier : elles parlaient aussi de mansuétude, et laissaient toujours espérer que la réconciliation serait généreusement payée[81]. La paix se fit car, le 9 juin 1317, Jean XXII félicitait Charles de Valois de l'union qui régnait enfin dans la famille royale, et le priait de la maintenir[82].

A plusieurs reprises toutefois, Jean XXII renouvela encore à Charles ses conseils d'union[83], et c'est seulement en 1321 qu'une mention de la Chronique Parisienne anonyme[84] place la paix définitive. Mais c'est sans doute de la fin de l'année 1317 que datent — car elles sont sans date dans les registres pontificaux — les bulles les plus importantes au sujet de l'attitude de Charles de Valois : au roi, Jean XXII rappelait les services rendus par Charles, et ceux qu'il pouvait attendre de lui dans la situation critique où il se trouvait. Jean XXII priait Philippe de se rattacher son oncle par des faveurs, pour le lier entièrement à sa cause, et l'intéresser à ses affaires[85]. A Charles, le pape adressait des félicitations sur sa fidélité passée, mais en se plaignant de le voir se retirer en Anjou alors que le roi avait besoin de ses conseils et de son aide[86]. Le 23 octobre 1317, Jean XXII, se préoccupant de ménager les susceptibilités de Charles de Valois, le priait, s'il avait à se plaindre du roi, de n'en rien dire qu'à lui-même qui se chargerait de porter ses doléances au roi en feignant d'en prendre l'initiative[87]. Charles de Valois aurait eu mauvaise grâce à résister à ces prières ; il continua donc de rester en paix avec le roi.

Tout d'abord qu'a fait Charles au sujet de Jeanne de France : le sort de Jeanne était entre les mains du roi ; il fut réglé par l'assemblée de février 1317[88]. Dans celle-ci, selon l'expression nette et décisive du continuateur de Nangis, il fut déclaré qu'une femme ne succéderait pas à la couronne de France[89]. C'était un texte de loi que Philippe V venait d'imposer par son habileté[90] ; quant à Clémence de Hongrie, le pape fit ses réserves au sujet du douaire auquel elle avait droit, et qu'il pria Charles de Valois de lui obtenir[91]. Pour vaincre les dernières résistances, le roi requit[92] les comtes de Valois, d'Évreux et de la Marche, et un grand nombre de seigneurs, de juger sur le fait de la résistance des alliés révoltés et de les contraindre à lui rendre hommage ; ils acceptèrent, en juillet 1317[93], et le procès fut porté, le 15 novembre, devant un tribunal où siégea Charles[94]. Enfin, Eude renonça, le 27, mars 1318, aux couronnes de France et Navarre, à la Champagne et à la Brie, au nom de Jeanne qui devait ratifier cette renonciation, quand elle aurait douze ans, sans qu'elle pût refuser, droit qui lui avait été réservé en 1316[95]. Son mari, qui devait être Philippe d'Évreux, ratifierait aussi, et Eude scellait la paix en épousant une fille du roi[96].

 

IV

En Flandre, l'éternel conflit continuait, avec des alternatives de guerre et de paix[97] : au début du règne, Robert de Flandre avait espéré s'appuyer sur les ligues, et profiter de la faiblesse d'une régence[98]. Mais un premier traité lui avait été imposé, le 1er septembre 1316[99], après une rapide incursion de Louis d'Évreux et de Béraud de Mercœur[100]. Une trêve fut conclue, et le pape devait se prononcer sur les garanties à fournir au sujet de l'observation des clauses du traité qui réglerait les questions pendantes[101]. Les négociations continuèrent, toujours avec la même mauvaise foi de la part des Flamands[102] qui obligèrent même le roi à convoquer l'ost contre eux[103] et contre le comte de Nevers[104]. Louis de Nevers céda et fut reçu à l'hommage pour son comté, le 13 septembre 1317[105], et son fils fut fiancé à Marguerite, fille du roi, qu'il épousa en 1320[106], après la renonciation de Charles de Valois à la promesse échangée avec Louis au sujet du mariage de leurs enfants[107].

Avec la Flandre, les difficultés furent réglées par une sentence pontificale du 8 mars 1318[108] qui ne contenta personne : les Flamands refusèrent de se soumettre, et les gens du roi de France acceptèrent avec peine certaines clauses insolites[109]. Charles de Valois fut cité, le 11 avril, pour venir juger comme pair[110] sur les nouvelles difficultés soulevées par le comte de Flandre, bien que les conditions offertes par le pape eussent été dictées par la plus extrême condescendance. Charles répondit favorablement à cette citation[111], et le roi chargea Thomas de Marfontaine et Philippe de Pray d'aller sommer Robert de comparaître devant le Parlement suffisamment garni de pairs[112]. Quant à la promesse de ne pas suivre Philippe V s'il attaquait les Flamands, Charles la fit, le 29 juillet 1319, conformément à l'arbitrage du pape, mais sous réserve que les Flamands rempliraient toutes les conditions prescrites, et en stipulant qu'il le faisait : bien que ou dit conseil soient aucunes choses contenues estranges et non acoustumées des rois, ne du lignage, ne des pers de France[113]. D'ailleurs, Jean XXII était intervenu auprès de Charles pour le prier de travailler à la paix en Flandre[114]. En conséquence, le 7 janvier 1320, à Paris, Charles de Valois, les royaux et les pairs jurèrent de ne pas suivre Philippe V s'il contrevenait à la paix[115].

Robert de Béthune et les procureurs des communes de Flandre[116] vinrent alors à Paris pour sceller une paix définitive. Mais dans une assemblée tenue à Paris le 4 mai en présence des royaux, des pairs et des conseillers de la couronne, Robert prétendit qu'on devait lui restituer Lille, Douai et Béthune, conformément aux promesses d'Enguerrand de Marigny, et parce qu'il ne les avait remises au roi que comme à un juge[117]. Philippe V protesta avec véhémence contre cette imputation, et fit confirmer son dire par les serments de Charles de Valois et de Louis d'Évreux, garants du Transport de Flandre. Robert, se voyant déjoué, s'enfuit de Paris, mais les procureurs des communes le ramenèrent, et il fut contraint par eux et par le légat de ratifier la paix[118]. Cette paix a été aussi vaine et inutile que les précédentes : pourquoi donc en opposer la sagesse à l'inintelligence[119] qu'aurait montrée le vainqueur de Cassel ?

 

V

En Artois, Philippe V intervint pour restaurer le pouvoir de sa belle-mère, Mahaut d'Artois : Robert d'Artois, son neveu, profitant de l'agitation fomentée par les ligues, et du trouble qu'il espérait voir naître à l'occasion de la régence de Philippe V, avait envahi l'Artois, pris Arras, chassé Mahaut[120] et pillé ses biens[121]. Mahaut se plaignit : le pape ordonna à tous d'obéir au roi[122] qui vint à Amiens[123]. Là, Robert d'Artois dut faire sa soumission le 6 novembre[124] ; emprisonné quelque temps, il fut relâché à la demande de sa mère et du comte de Bretagne, son oncle[125]. L'Artois fut mis sous séquestre entre les mains de Charles de Valois et de Louis d'Evreux[126], jusqu'à ce que le sort du comté eût été réglé définitivement.

Mais les nobles n'avaient pas fait leur soumission, et au contraire l'année 1317 marqua une recrudescence d'agitation entretenue par l'hostilité du comte de Flandre et du duc de Bourgogne[127]. Philippe V négocia longuement avec les alliés, et de la même manière que Louis X, mais en profitant de ce que celui-ci avait déjà fort affaibli les ligues. Philippe V visita plusieurs villes, où il fut très bien reçu[128], et dans un parlement tenu au mois de mai à Paris par le devant dit comte de Valoiz la paix entre le roy et les barons aliez, par aucunes condicions entregetéez, fut refourmée et faite[129]. Charles de Valois sur ce point continuait son rôle : s'il avait pu marchander son concours à Philippe V, il n'avait rien de bon à attendre des ligues. Ce fut alors, en effet, qu'il triompha de la ligue d'Anjou qui menaçait sa propre autorité : en 1317, Maurice de Craon, Henri d'Avaujour et Jean de Vendôme se prononcèrent contre cette ligue[130].

La mort du fils de Mahaut d'Artois, en faisant de la reine l'héritière de l'Artois[131], intéressait davantage le roi au triomphe de sa belle-mère. En 1318, le Parlement, où siégea Charles de Valois[132], se prononça en faveur de Mahaut[133], Cette fois encore, Robert se soumit, et son oncle Jean de Bretagne et le comte de Namur se portèrent garants de l'exécution du traité conclu[134]. Leur déclaration fut confirmée le même jour par Charles de Valois, et les royaux promirent d'aider Mahaut à maintenir ses droits[135]. Robert d'Artois, rentré en grâce, reçut l'ordre qu'il amast la dite contesse comme sa chiere tante, jet la dite contesse le dit Robert comme son bon neveu[136]. En même temps, Jean XXII autorisait le mariage de Robert avec Jeanne de Valois[137], mariage qu'il avait interdit tant que Robert ne serait pas réconcilié avec sa tante[138]. En conséquence, la main royale fut levée de l'Artois[139], et les pourparlers poussés activement avec les révoltés, qui se soumirent enfin le 26 mars 1319, à l'entrevue de Compiègne[140]. Mahaut célébra sa victoire, et scella la paix en offrant au roi, à Conflans[141], un repas somptueux auquel assistèrent notamment Charles de Valois, Charles de la Marche et Robert d'Artois[142].

Toutefois, il fallait que Mahaut ratifiât les conditions arrêtées avec les ligues d'Artois, et cela donna lieu à une scène dont nous avons le récit par un acte notarié[143]. Aymard de Poitiers et Hugue de Chalon lui dirent qu'on la soupçonnait de mauvaise foi, et qu'il fallait qu'elle prêtât serment de nouveau, sous peine de perdre ses États. Mahaut, tout en faisant des réserves, vint à Longchamp où, devant le roi, Charles de Valois, Mile de Noyers, Anseau de Joinville et plusieurs autres personnes, elle jura d'observer les conditions contenues dans un acte non scellé qu'on lui présenta ; mais elle ne le fit que sur l'ordre exprès du roi, et avec des réserves. Puis elle rentra triomphalement dans ses Etats[144], avec Thierri d'Hirson comblé de bienfaits et vengé par le roi[145]. Philippe V acheva la pacification de l'Artois, distribua les faveurs et les supplices[146], et en même temps récompensa les provinces fidèles, par des chartes animées du même esprit que celles de son prédécesseur[147].

Les affaires d'Artois eurent un dernier épilogue : plusieurs seigneurs de Picardie et d'Artois, pour se venger du comte de Nevers et rentrer en grâce auprès du roi, accusèrent Louis d'avoir voulu empoisonner son père le comte de Flandre[148]. Le malheureux Louis de Nevers fut de nouveau emprisonné, et cette fois il y resta jusqu'à l'avènement de Charles IV qui lui rendit la liberté[149]. Quant à son fils, gendre de Philippe V, il reçut le comté de Nevers et les droits d'héritier présomptif du comté de Flandre. Le but de cette intrigue s'aperçoit facilement : pour régler enfin les affaires de Flandre, Philippe V faisait revenir directement le comté à son gendre, au détriment de Louis de Nevers.

Philippe V fit d'ailleurs de sérieux efforts pour pacifier et rendre la justice : Enguerrand de Marigny fut enlevé du gibet, en 1317, avec son autorisation[150]. En mai 1319, un arrêt rendu par les commissaires royaux, et approuvé par le roi, proclama l'innocence de la femme et de la sœur d'Enguerrand[151]. Les biens confisqués furent restitués[152]. Charles de Valois assistait à cette réhabilitation, et s'honora en s'y associant : on sait d'ailleurs qu'à sa mort il manifesta ses remords d'une manière encore plus éclatante, Philippe V ne manquait pas de fermeté : Béraud de Mercœur, déjà pardonné une fois[153], fut disgracié sous l'inculpation de complicité avec les nobles de Bourgogne, et ses biens furent confisqués[154], malgré l'intervention personnelle du pape en sa faveur[155], Béraud était l'oncle par alliance de Charles, fils de Charles de Valois, qui l'avait déjà fait rentrer en grâce auprès de Philippe IV[156]. La même année, de l'avis de son frère et de ses conseillers, Philippe V avait supprimé, jusqu'à présentation de titres indiscutables, les rentes perçues sur le Trésor par plusieurs des conseillers de son père : Pierre de Chambly, Hue de Bouville, Guillaume Flotte, les héritiers de G. de Nogaret et de G. de Plaisians, et bien d'autres encore[157]. Chaque roi, en effet, avait ses favoris à contenter aux dépens de ceux des règnes précédents, et le procédé était le même, quel que fût le souverain.

 

VI

Charles de Valois continua à jouir d'une certaine influence : Jean XXII exempta ses terres du subside payé au roi, et lui attribua les annates à percevoir pendant quatre ans dans tout son domaine[158]. Comme les gens du roi prétendaient que cette concession ne comprenait pas les annates des cathédrales d'Angers, de Chartres et du Mans, Jean XXII prévint Charles qu'il avait écrit au roi pour protester contre cette prétention[159]. Jean XXII, nous l'avons vu, s'adressa fréquemment à lui et lui recommanda une foule de petites affaires : il le pria de faire la paix entre Béraud de Mercœur et Henri de Sully[160], de protéger ce dernier contre Philippe de Valois, et de lui pardonner[161] ; il lui recommanda à plusieurs reprises ses légats[162]. En 1320, il lui demanda de faire restituer aux exécuteurs testamentaires de l'évêque de Winchester les biens de ce dernier, saisis à Paris lors de la dernière guerre[163]. D'autre part, à la demande de Charles, Jean XXII accorda à Charles de la Marche ce qu'il demandait pour Pierre de Mortimer[164], et pour son entourage plusieurs faveurs[165].

Édouard II reconnut également son crédit à la cour en s'adressant à lui à différentes reprises[166]. Jean XXII le mêla d'ailleurs aux affaires anglaises en le désignant à ses légats comme le meilleur arbitre à proposer dans la lutte entre le roi d'Angleterre, le roi d'Écosse et le comte de Lancastre[167]. De même, Jean XXII fit appel à son intervention dans le conflit entre le roi de Sicile et celui de Trinacrie[168].

Les projets de croisade renaquirent après la mort de Louis X[169] : une ambassade fut envoyée au pape[170]. Jean XXII ayant accordé une décime, mais à condition de réserver 100.000 florins pour la croisade[171], un nouveau plan fut élaboré : le 13 septembre, Philippe V remit le soin de diriger la croisade à Louis de Clermont, stipulant toutefois qu'au cas où Charles de Valois, Louis d'Évreux ou Charles de la Marche voudraient aller à la croisade, ce serait à celui d entre eux qu'il désignerait, que Louis devrait obéir[172]. Ce plan resta lettre morte, comme tous les précédents. Louis de Clermont alla toutefois à Rome, et à son retour rapporta à Charles de Valois les réponses du pape[173]. Philippe V légua par son testament 100.000 l. t. à Charles de Valois, ou, à son défaut, à Philippe de Valois, pour aller en Terre-Sainte[174], et un don était pour eux l'essentiel.

Aux affaires d'Orient se rattachait un conflit entre le roi de Sicile et Eude de Bourgogne. Jean XXII pria Philippe V de ne pas intervenir pour soutenir les prétentions injustes de ce dernier[175]. Le pape avait besoin du roi Robert contre les Gibelins, il appela à son aide le roi de France qui envoya ses cousins[176]. Philippe et Charles de Valois emmenèrent avec eux une partie des Pastoureaux[177], qui furent massacrés en route, et toute une brillante et aventureuse noblesse : le comte de Roucy, Olivier de Clisson, Béraud et Girard de Mercœur[178]. Philippe de Valois passa à Avignon[179], et arriva, après un trajet fort aisé, devant Verceil qu'il dut bloquer[180]. Alors arriva Galéas Visconti qui lui fit dire qu'il ne voulait pas attaquer le sang royal de France, mais seulement ravitailler ses amis. Les deux armées se préparèrent à la lutte ; mais les Guelfes ne soutinrent pas Philippe de Valois[181] qui se trouva avec des forces dérisoires en face d'un ennemi à la générosité duquel il dut se remettre[182]. Galéas le reçut d'ailleurs avec honneur, et capta si bien sa faveur que Philippe fut accusé d'avoir trahi les Guelfes[183]. Galéas lui aurait promis, dit-on, un riche domaine en Italie, s'il voulait l'aider[184]. De leur côté, les Gênois gagnèrent aussi les bonnes grâces de Philippe[185] qui, après un triste trajet, rentra en France inglorieux et sans rien faire, dolent et courrouché[186]. Il y avait du moins gagné de l'argent, car il avait reçu du pape[187] et de Robert, roi de Sicile, des subsides fort importants[188]. Des difficultés s'élevèrent d'ailleurs avec Robert au sujet de cette solde ; elles furent portées devant le pape qui, le 15 décembre 1321, demanda des délais pour trancher la question[189].

 

VII

Sans régner sur l'esprit du roi, Charles de Valois n'en eut pas moins une certaine influence[190] : ne tenait-on pas assez, en effet, à le ménager pour payer son adhésion ? Il nous reste donc à voir ce qu'il obtint, grâce à son attitude : dans une bulle que l'on peut dater du 14 juin 1320, Jean XXII implore le roi en faveur de Charles, criblé de dettes, et le prie de lui accorder quelque chose sur ce que lui doivent les Flamands[191]. Ses dettes avaient été contractées, disait-il, tant au service du roi que pour tenir son rang et marier ses filles[192], et le roi aurait raison de lui ouvrir une main secourable pour le rendre encore plus dévoué et plus zélé[193]. On voit là apparaître le fil directeur de toute la politique de Charles, et ce besoin d'argent qui le liait au roi quel qu'il fût. Philippe répondit favorablement à ces ouvertures et n'épargna ni l'argent ni les faveurs pour contenter son oncle, dont lès velléités d'opposition n'étaient que le prélude d'une demande d'argent.

Tout d'abord, Philippe dota généreusement Marie de Valois, dès que Charles de Valois eut renoncé à son traité avec Louis de Nevers[194]. Marie épousa le duc de Calabre : le 6 octobre 1321, il lui accorda 60.000 l. t. qui devaient revenir, si elle mourait sans enfants, aux autres enfants de Charles et de Mahaut, ou à leurs héritiers, et cette lettre est cotée au dos : C'est la lettre de la recompensation que monseigneur le roy Philippe fist a madame la duchesse de Calabre pour le mariage de Flandre[195]. En 1323, son ancien fiancé lui donna pour le même motif 20.000 l. t.[196]. D'autre part, nous voyons le roi s'occuper activement à marier ses cousines : le 18 octobre 1320, refusant au roi de Castille la main de sa fille, qu'il se réservait pour se rattacher la Flandre, il écrivit à la mère de ce roi de le marier à une fille de Charles de Valois, car il ne pouvait trouver d'épouse plus noble, ni plus proche de lui par le sang[197].

Philippe V songea aussi à aider Charles : il lui avait donné, pour faire partie de son conseil, 10.000 l. p. de gages annuels[198] ; en 1319, il lui fit don de 50.000 l. t. comme indemnité des dépenses faites à son service[199]. A côté de ces faveurs pécuniaires, citons celles qui marquent la part d'influence faite à Charles[200] : en 1320, il obtint du roi la remise, en faveur de Venise, du denier pour livre dû par ses nationaux qui commerçaient en France[201]. Naturellement, Charles continua à faire partie du conseil royal après la réforme de 1318[202], et à prendre part à la rédaction des ordonnances royales[203]. Il fut aussi au nombre des princes du sang qui ratifièrent la donation du comté de Bourgogne à la reine Jeanne[204] ; de plus, il connut avec quatre ou cinq personnes les clauses secrètes qui rendaient cette concession illusoire[205]. On a vu qu'en 1317, Philippe V, en ratifiant une concession accordée par son oncle aux Lombards, avait pris à sa charge une dette de 5.000 l. t. contractée par lui et par Charles son frère[206] ; de plus, il veilla attentivement à ce que Charles de Valois perçût le neuvième qui lui avait été attribué sur les biens du Temple[207].

En juillet 1319, Charles siégea dans le conseil, pour entendre les comptes d'Henri de Sully[208], et pendant le même mois ce fut chez lui, à Villers-Cotterêts, que Philippe V accorda la noblesse à Jean Billouart[209], qui était trésorier et maître des eaux et forêts de Charles. L'entourage de Charles de Valois continua à profiter du crédit de son maître : son propre chancelier, Jean de Cherchemont, obtint les sceaux royaux en janvier 1321[210] ; le 1er juin 1318, l'argenterie royale fit les frais d'une robe pour une des filles de Charles de Valois[211]. A la fin de la même année, Charles, son fils, obtint de ressortir directement du parlement de Paris[212], et Philippe V fit payer à Catherine de Valois une partie de ce qui restait dû[213] sur les sommes promises par Philippe le Bel[214].

Charles de Valois lui-même rencontra beaucoup de bienveillance chez le roi dans une délicate affaire : celle du rachat de son droit de battre monnaie. En 1315, il avait fait circuler sa monnaie jusqu'à Paris[215] ; des abus constants se produisirent ensuite dans toutes les monnaies seigneuriales. Philippe V prit des mesures énergiques pour les réprimer[216]. Voyant Charles à court d'argent et menacé de procès, il lui offrit de lui acheter le droit de monnayage qu'il possédait à Angers et à Chartres. Il lui accorda remise de toutes amendes et contraventions encourues, il y joignit 50.000 l. t. pour le rachat des deux monnaies, et une somme égale pour récompenser les services rendus[217]. Le 15 mai, Charles de Valois ratifia[218] l'acte du roi qui lui accordait ces divers avantages.

Philippe de Valois, qui conservait la monnaie du Mans, était au nombre des délinquants qui durent s'en remettre au jugement du roi[219]. D'autres vendirent plus tard leur droit de battre monnaie[220], mais il faut noter que Charles, dépeint comme si rétrograde, ne faisait, sur ce point, qu'appliquer ses propres conseils. En effet, en juillet 1321, Philippe V, désirant payer l'argent promis au prince de Tarente et entreprendre la croisade, cherchait des ressources[221]. Charles de Valois, Henri de Sully et Anseau de Joinville lui conseillèrent de demander une aide aux bourgeois réunis à Paris : en échange, ils lui proposèrent de promettre aux bourgeois le rachat des monnaies féodales et l'unité de poids et de mesures. Malgré les discours des gens du roi[222], les bourgeois ne se laissèrent pas toucher, ils répondirent que l'achat des monnaies ne les regardait pas, qu'il leur suffisoit assez leurz aunez, qu'ils consentaient à suivre le roi outremer, bien armés et à leurs frais, mais qu'ils ne pouvaient faire aide[223]. Ce refus provoqua une vive colère dans l'entourage du roi ; quelques conseillers, entre autres le seigneur de Sully, songèrent, paraît-il, à transférer le siège du gouvernement à Orléans, mais la dernière maladie du roi les en empêcha[224].

 

VIII

L'importance de Charles de Valois avait été accrue par la mort de son dernier frère, Louis, comte d'Évreux[225] : en dehors de Charles de la Marche, si étroitement lié à Charles, tous les autres membres de la famille royale n'étaient apparentés qu'à des degrés plus éloignés. Louis laissait deux fils : Philippe, marié à la fille ainée de Louis X, et Charles ; ces deux princes étant mineurs, Charles de Valois fut nommé tuteur. Le roi régla par un acte d'août 1319 les profits fort importants que Charles devait retirer de ses fonctions[226]. Charles obtint quittance de tout ce qu'il devait à Louis d'Évreux et reçut 25.000 l. t. ; de plus, il garda pour lui les chevaux, tentes et pavillons de son frère. En échange, Charles de Valois devait administrer les domaines de ses neveux ; le 26 octobre 1319, Martin des Essarts manda en son nom à Jean de Condé et à Pierre Honoré de remettre à Simon de Rambouillet les documents et comptes provenant de Louis d'Évreux[227]. Simon en donna quittance le 30 octobre, date à laquelle il les avait reçus dans un coffre scellé, en même temps qu'un hanap d'argent reçu de Mathieu Hoël[228]. Les jeunes princes furent d'abord élevés à la cour : l'hôtel du roi fut modifié pour leur faire un hôtel[229]. Mais, peu après, Charles de Valois fit rédiger une ordonnance réglant l'organisation de leur cour[230] ; elle contient cette mention : L'en parlera de ces choses a monseigneur de Valloys, et en sera fait ce qui li en plaira a ordener[231].

Telle est l'histoire de Charles de Valois sous le règne de Philippe le Long : si l'on renonce à faire de Charles le chef d'un parti féodal, on voit qu'il a peut-être songé un instant à exercer la régence, mais que de suite il se rallia à Philippe. Celui-ci, plus habile que ses frères, ne fut pas dominé par une influence unique, et régna par lui-même[232]. Mais Charles de Valois ne fut jamais tenu à l'écart, et ne fit qu'une bien légère opposition ; aussi les bienfaits reçus du roi furent-ils aussi abondants que sous les autres règnes[233]. Cela ressort de ce qui précède, et d une anecdote qui circula au temps des persécutions contre les lépreux[234]. On accusa entre autres choses ces malheureux de vouloir communiquer leur maladie à tous les chrétiens, pour régner sur le monde ; l'un d'eux aurait été roi, un autre, comte de Valois, et d'autres auraient occupé toutes les hautes situations[235]. Le rang donné ainsi à Charles de Valois, en 1321, montre bien qu'à cette date il jouissait du plus grand prestige : plus grand peut-être que celui de l'héritier présomptif, Charles de la Marche.

 

 

 



[1] Sur Philippe V, v. surtout le livre de M. Lehugeur ; aux sources utilisées par cet auteur, il faut ajouter la Chronique Parisienne anonyme et les registres de Jean XXII.

[2] G. Servois, Ann. Bull. de la Soc. de l'hist. de France, 18642, p. 44-77 ; Viollet, Mém. de l'Ac. des Insc. et Belles-Lettres, XXXIV2 (Compte rendu, B. E. C., 1895, p. 106).

[3] Lehugeur, o. c., p. 31-33.

[4] Des barons de France receu paisiblement, H. F., XX, p. 698 ; de même : Geoffroi de Paris, XXII, p. 164.

[5] I, p. 231.

[6] Istore, I, p. 308 ; Anc. Ch. de Flandres, H. F., XXII, p. 406 ; Desnouelle, XXI, p. 197. Remarquons que toutes ces chroniques sont de valeur inférieure à la Ch. de Saint-Denis ; pour n'en donner qu'une preuve : Desnouelle compte Mahaut d'Artois et Jean de Valois, ce dernier mort depuis quinze ans, au nombre des ennemis de Philippe V. M. Lehugeur, qui accepte la physionomie traditionnelle de Ch. de V., chef de la réaction féodale (p. 24), admet naturellement le récit de cette entrevue fort douteuse (p. 33).

[7] Les textes disent à Chartres ; mais c'est une invraisemblance de plus, car Philippe V, pressé de rentrer à Paris, ne peut avoir passé par Chartres.

[8] Lehugeur, o. c., p. 34. Et non pas du Louvre, que le roi occupa sans résistance, Chronographia, I, p. 231.

[9] A. N., JJ 53, f° 52 v° ; Du Tillet, o. c., II, p. 607.

[10] 2 et 9 juillet 1318, Ordonnances, I, p. 582 et 1384. — Philippe V Tenait, par ordonnance du 14 février 1317, de renouveler l'ordre de lever les taxes, Ordonnances, I, p. 630 ; Mémoriaux, n° 38.

[11] 7 juillet 1317, B. N., Brienne, 144.

[12] Comte de Soultrait, Inventaire, c. 626.

[13] Comte de Soultrait, Inventaire, c. 626 ; Du Chesne, Hist. des cardinaux français, II, p. 286.

[14] Comte de Soultrait, o. c., p. 618-626.

[15] Geoffroi de Paris, H. F., XXII, p. 164 :

En seur que tout monseigneur Karle

De Valois ne li fist pas farle ;

Mes de si bon cuer la regarde

Que lui et son fruit prist en garde.

Jean XXII, d'ailleurs, l'avait imploré en faveur de cette princesse, dès son avènement, A. Coulon, o. c., n° 58.

[16] Anonyme, H. F., XXI, p. 151 ; J. de Saint-Victor, XXI, p. 675.

[17] J. de Saint-Victor, H. F., XXI, p. 675 ; Chronographia, I, p. 231 ; Lehugeur, o. c., p. 35-36.

[18] P. 29. — Ch. de V. était si peu l'ennemi irréconciliable de Philippe V, que le chroniqueur qui a écrit sous son inspiration fait de ce roi un très bel éloge, et le compare à Auguste, H. F., XXI, p. 151.

[19] A. N., J 258, n° 7 ; Secousse, Mémoire sur les troubles... Ch. le Mauvais, p. 2 ; Plancher, Hist. de Bourgogne, II, pr., p. 163. Philippe stipulait ses émoluments pour le cas d'une régence qui devait durer vingt-quatre ans, J. de Saint-Victor, H. F., XXI, p. 663.

[20] Arch. Pas-de-Calais, A 61, n° 5 ; Lehugeur, o. c., p. 43. Le bail des terres de Jeanne fut donné à Eude, A. N., J 254, n° 77.

[21] Viollet, o. c., p. 136 ; Servois, o. c., p. 43 ; M. Lehugeur prouve (p. 40 en note) que cette assemblée fut antérieure au traité avec Eude, et la date du 16 juillet 1316.

[22] Plancher, o. c., II, pr., p. 170-174.

[23] Juillet 1316, A. N., JJ 57, f° 40 v° ; Noël Valois, Etude historique sur le conseil du roi, p. XVII.

[24] Ch. de Saint-Denis, H. F., XX, p. 699. Jean XXII avait notifié son élection à Ch. de V., A. Coulon, o. c., n° 6.

[25] Douët d'Arcq, Comptes de l'argenterie, p. 20 et 23.

[26] A. N., JJ 53, n° 355 ; Viollet, o. c., p. 147 ; Lehugeur, o. c., p. 72-78.

[27] Jean d'Outremeuse, VI, p. 220.

[28] 20 septembre 1317, A. Coulon, o. c., n° 256.

[29] A. Coulon, o. c., n° 256 et 257.

[30] A la même date, Jean XXII annonçait au roi ses démarches dans cette affaire, Ibidem, n° 390.

[31] De la collection de Mesnil-Glaise, édité par Godefroi de M.-G., p. 186-191 ; Leibnitz, Codex diplomaticus, III, p. 98. D'autres documents font connaître ce procès, dont l'issue faillit être remise à un combat judiciaire, A. N., JJ 53, n° 325.

[32] 20 juillet 1317, Philippe V déclara que, bien qu'accusée hors jugement, Mahaut ne pouvait être jugée que par les pairs, B. N., Dupuy, 338, f° 154.

[33] 9 octobre 1317, De Mesnil-Glaise, p. 186-191.

[34] Le 9 octobre 1317, De Mesnil-Glaise, p. 188-191.

[35] Monmerqué, Dissertation historique sur Jean Ier, roi de France, Paris, 1844, in-8° ; Bréhant, Revue contemporaine, 2e série, XVII, p. 5 et 238 ; Tavernier, Mém. Académie d'Aix, XII, p. 211 ; Rodocanacchi, Nouvelle revue, L, p. 614 ; Maccari Masi (v. B. E. C., 1874, p. 278), etc. M. Lehugeur (p. 75-78) expose nettement les faits.

[36] Mort le 15 novembre.

[37] Il notifia son avènement le 1er décembre, Servois, o. c., p. 62 ; mais, dès novembre 1316, il prit le titre de roi dans ses actes, Lehugeur, o. c., p. 80.

[38] Viollet, o. c., p. 138.

[39] Hoc tamen probari non poterat evidenter, J. de Saint-Victor, H. F., XXI, p. 665.

[40] Arch. Pas-de-Calais, A 60.

[41] Servois, o. c., p. 54 ; Lehugeur, o. c., p. 79-81.

[42] Lehugeur, o. c., p. 81.

[43] Servois, o. c., p. 67 ; Lehugeur, o. c., p. 81.

[44] Geoffroi de Paris, H. F., XXI, p. 164.

[45] Ch. de Saint-Denis, H. F., XX, p. 698.

[46] Il dit de Charles : Tam eo tempore quo regentis gerebas officium quam eo quo recepisti regni Francie diadema et etiam in susceptione illius ubilibet astitit quam fideliter etiam in prestationibus homagiorum et aliis bonum ceteris exemplum prebendo se gessit..., A. Coulon, o. c., n° 349.

[47] Chronographia, I, p. 231 ; Anc. Ch. de Flandres, H. F., XII, p. 406.

[48] A. Coulon, o. c., n° 349, 351, 358, 365, 501, 959, 973, etc.

[49] 14 août et 13 décembre 1317, A. Coulon, o. c., n° 351 et 358.

[50] A. Coulon, o. c., n° 973.

[51] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 617.

[52] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 617 ; Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 26 ; après une véritable tentative de chantage, Lehugeur, o. c., p. 82.

[53] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 617. Ch. était le 14 janvier au Vivier-en-Brie, A. N., JJ 66, f° 37.

[54] P. 84.

[55] J. de Saint-Victor, H. F., XXI, p. 665 ; Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 28.

[56] Viollet, o. c., p. 139 ; Lehugeur, o. c., p. 85. Cette dernière rendit une sentence en faveur du roi, ibidem.

[57] 10 avril 1317, Du Breuil, Style du Parlement, éd. Lot, p. 31 ; Jourdan, Index cartarum, p. 73 ; B. E. C., XLV, p. 74.

[58] Vingt ans après Ch. de V., A. N., P 2763, n° 206.

[59] B. N., Moreau, 222, f° 229.

[60] Le fils unique de Philippe V mourut au début de 1317.

[61] Arch. Vat., Reg. 109, f° 116.

[62] Il reçut une augmentation d'apanage, Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 27.

[63] Servois, o. c., p. 60.

[64] A. N., J 561A, n° 24.

[65] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 618.

[66] Plusieurs compagnons de ce voyage sont connus, R. D., I, 22-26.

[67] A. N., J 411, n° 38 ; De Limburg-Stirum, o. c., II, p. 83.

[68] A. N., J 411, n° 39 ; Vredius, Corpus chronicorum Flandrie, II, p. 192 ; De Limburg-Stirum, o. c., II, p. 295.

[69] B. N., lat., 9124, f° 338.

[70] Jean XXII intervint auprès de Ch. de V., et lui demanda de se réconcilier avec Louis, Arch. Vat., Reg., 1102, f° 7.

[71] A. Coulon, o. c., n° 209 et 394.

[72] A. N., J 562A, n° 4 ; Leibnitz, Codex..., p. 100.

[73] Ce mariage, célébré le 21 juillet 1320, était conclu dès 1317, Servois, o. c., p. 61. Peut-être faut-il rattacher à ce mariage la prisée de Dunkerque et autres lieux, faite par L. de Nevers en 1318, B. N., Clairambault, 306, f° 363.

[74] Mariage célébré le 27 mars 1318.

[75] Philippe V notifia alors que Ch. de V., et L. de N. avaient renoncé solennellement à toutes conventions antérieures. A. N., J 377A n° 13.

[76] 20 mars 1318, A. Coulon, o. c., n° 503.

[77] A. Coulon, o. c., n° 174.

[78] A. Coulon, o. c., n° 208.

[79] 29 avril 1317, tua nimirum circa latus suum accedet et tua grata presentia, tuaque sibi directiones et consilia erunt indubitanter accepta, A. Coulon, o. c., n° 208.

[80] Arch. Vat., Reg. 109, f° 64 v° et 79 ; Reg. 110, f° 54 v°.

[81] Le roi non seulement se : pium regem se exibebit et dominum set in omni mansuetudine et caritate germanum, A. Coulon, o. c., n° 352.

[82] A. Coulon, o. c., n° 617.

[83] A. Coulon, o. c., n° 959, 973, etc.

[84] XI, p. 37.

[85] A. Coulon, o. c., n° 350.

[86] A. Coulon, o. c., n° 349.

[87] A. Coulon, o. c., n° 959

[88] Ordonnances, I, p. 635.

[89] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 617.

[90] M. Lehugeur nie cette habileté, et soutient la parfaite correction de Philippe le Long, en s'appuyant sur la résistance que rencontrait dans l'opinion le règne d'une femme. Ses raisonnements ne détruisent pas les résultats des travaux antérieurs, et il reste certain que ce fut surtout à son habileté que Philippe dut la couronne. Toutefois, M. Lehugeur a mis en lumière avec raison le tort fait à Jeanne par les doutes trop fondés sur sa légitimité qui l'ont fait sacrifier même à la fille de Clémence de Hongrie, Lehugeur, o. c., p. 90.

[91] A. Coulon, o. c., n° 178 et 1174. — Clémence avait été, à plusieurs reprises, tentée de résister, ibidem, n° 293.

[92] Ordonnances, I, p. 635.

[93] A. N., J 254B, n° 78.

[94] A. N., J 204, n° 2.

[95] A. N., J 410, n° 40 ; Servois, o. c., p. 59 ; Viollet, o. c., p. 143 , Lehugeur, o. c., p. 103.

[96] Le 16 juin 1318, Continuateur de Frachet, H. F., XXI, p. 50 ; Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 33 ; Secousse, Mémoire, etc., p. 16.

[97] Lehugeur, o. c., p. 122-159 ; Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 53.

[98] Dufayard, o. c., II, p. 269 ; Lehugeur, o. c., p. 51.

[99] A. N., J 563A, n° 24 ; Leibnitz, Corpus, p. 88.

[100] Compte de cette campagne, Mémoriaux, n° 44.

[101] Ch. de Saint-Denis, H. F., XX, p. 700 ; le 17 octobre 1316, Ch. de V. donna un sauf-conduit au comte de Flandre et aux députés des villes, pour venir près du régent, B. N., lat., 9124, p. 333.

[102] Lehugeur, o. c., p. 122-138.

[103] D'abord pour le 1er mai, puis au 29 mai et au 15 juillet, H. F., XXIII p. 807. On remarque sur les listes : Premièrement, mons. de Valois, C hommes d'armes... ; monseigneur Philippe de Valois, XL ; monseigneur Ch. de Valois, XX. M. Lehugeur s'étonne de voir le roi convoquant même ceux qui ne sont pas ses plus fidèles amis, et notamment Ch. de V. (p. 293). Mais d'abord remarquons que Ch. lui fournit le plus gros des contingents ; ensuite il n'avait jamais été en état de révolte, et était strictement obligé de répondre à cette convocation, sous peine d'être considéré comme rebelle.

[104] Saisie des terres de ce dernier, A. N., JJ 33, f° 20 v° ; Continuateur de Frachet, H. F., XXI, p. 50 ; compte de cette saisie, B. N., lat. 9069, p. 1010.

[105] A. N., J 562A, n° 4.

[106] A. N., J 408, n° 28.

[107] A. N., J 377A, n° 13.

[108] A. N., J 562B, n° 35.

[109] Par exemple la promesse de faire jurer la paix par le frère et les oncles du roi et les pairs de France.

[110] B. N., Brienne, 236, p. 46.

[111] A. N., J 562A, n° 13 ; cet acte date de 1318, car Charles est cité pour le samedi 20 mai, coïncidence qui se produit cette année-là.

[112] Lehugeur, o. c., p. 123-126, Jean XXII avait recommandé à Ch. son légat chargé de régler cette affaire, A. Coulon, o. c., n° 187 et 204.

[113] A. N., J 563A, n° 41 ; Lancelot, Recueil... pairs de France, p. 294 ; P. Anselme, o. c., II, p. 822.

[114] 29 avril 1317, Arch. Vat., Reg. 110, f° 64.

[115] A. N., J 563A, n° 39.

[116] A. N., J 562B, n° 46.

[117] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 625 ; Ch. de Saint-Denis, XX, p. 703.

[118] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 625 ; Ch. de Saint-Denis, XX, p. 703.

[119] Lehugeur, o. c., p. 165.

[120] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 616-7 ; Continuateur de Frachet, XXI, p. 46 ; Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 23-25.

[121] De Mesnil-Glaise, o. c., p. 219-220.

[122] Rayn., XV, 1317, n° 6.

[123] A. N., JJ 55, n° 61 ; Arch. Pas-de-Calais, A 61.

[124] A. N., JJ 55, n° 61 ; Arch. Pas-de-Calais, A 61.

[125] Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 23 ; Continuateur de Frachet, H. F., XXI, p. 47. La mère de R. d'Artois avait épousé en secondes noces le comte de Saint-Pol, beau-père lui-même de Ch. de V.

[126] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 616 ; Continuateur de Frachet, XXI, p. 46.

[127] Le 29 avril 1317 Jean XXII recommanda à Ch. de V. ses légats, chargés de faire la paix entre les alliés et le roi, Arch. Vat., Reg. 109, f° 51.

[128] Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 27.

[129] Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 27.

[130] A. N., J 179A, n° 90 ; Martène, Thesaurus anecdotorum, I, c. 1350.

[131] Lehugeur, o. c., p. 174-175.

[132] A. N., J 439, n° 1 ; Arch. Pas-de-Calais, A 63.

[133] Arrêt du 28 mai 1318, A. N., J 439, n° 5 ; Arch. Pas-de-Calais, A 63.

[134] A. N., J 439, n° 2 ; Arch. Pas-de-Calais, A 63.

[135] Arch. Pas-de-Calais, A 63, n° 29.

[136] A. N., J 439, n° 5 : Arch. Pas-de-Calais, A 63.

[137] A. Coulon, o. c., n° 674.

[138] A. Coulon, o. c., n° 46.

[139] 18 septembre, Arch. Pas-de-Calais, A 63, n° 20.

[140] Compte de Jehan Pasté et Thomas de Marfontaine, B. N., fr. 23256, f° 43-50 ; A. N., KK 1, f° 51.

[141] Arch. Pas-de-Calais, A 374, f° 5 r° ; dépenses en vin : 48 l., 6 s., 7 d.

[142] Peu après elle envoyait à Charles un millier de harengs valant 4 livres, et un faucon qu'elle avait reçu de Tournehem, Arch. Pas-de-Calais, A 374, f° 29 v° et 32 v°.

[143] Arch. Pas-de-Calais, A 64, n° 3 ; M. Lehugeur donne un autre récit, qu'il n'accompagne d'aucune référence, p. 182-184.

[144] Arch. Pas-de-Calais, A 64, n° 3.

[145] Arch. Pas-de-Calais, A 65, 66, 67.

[146] Arch. Pas-de-Calais, A 64. Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 59 ; Dufayard, o. c., II, p. 266 et ss. ; Lehugeur, o. c., p. 185-191.

[147] Aux nobles d'Auvergne par exemple, Baluze, Hist. générale de la maison d'Auvergne, II, p. 151.

[148] Continuateur de Nangis, H. F., p. 621 ; J. de Saint-Victor, XXI, p. 673.

[149] Continuateur de Nangis, H. F., p. 621 ; J. de Saint-Victor, XXI, p. 673 ; sur sa libération et sa mort en 1322, Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 631.

[150] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 619 ; Ch. de Saint-Denis, XX, p. 700.

[151] A. N., JJ 59, f° 80 v°.

[152] A. N., JJ 56, f° 17 ; JJ 59, f° 80 v°.

[153] Le pape remercia Charles, A. Coulon, o. c., n° 1076.

[154] A. N., JJ 55, n° 16 ; Lehugeur, o. c., p. 276. — Il était accusé d'avoir appelé Henri de Sully architofel ; il répondit que c'était parce qu'il soupçonnait celui-ci de l'avoir accusé à tort du soulèvement de la Bourgogne. Charles déclara alors que aus paroles qui furent dites il fu presenz, mais, en l'ame de li, li sires de Suily n'en parla onques ; alors Béraud accepta cette parole, et s'excusa, A. N., JJ 55, f° 16.

[155] Le pape intercéda pour lui auprès du roi, de Ch. de V., et d'autres personnages, A. Coulon, o. c., n° 1083.

[156] 1309, J. de Saint-Victor, H. F., XXI, p. 653.

[157] Mémoriaux, n° 230 et 231.

[158] A. N., J 713, n° 3 et J 722, nos 7 et 7 bis ; JJ 55, n° 99 ; Mémoriaux, n° 634 ; A. Coulon, o. c., n° 26, 27, 385.

[159] A. N., J 722. n° 7 bis ; A. Coulon, o. c., n° 446 et 447.

[160] A. Coulon, o. c., n° 1076 ; sur leur lutte, v. p. 186 ; citons aussi la demande d'intervention pour le vicomte de Lomagne, Guérard, Doc..., p. 123.

[161] A. Coulon, o. c., n° 394 et 395.

[162] En dehors de ceux cités ailleurs, cf. A. Coulon, o. c., n° 517, 1099 et 1186 ; il lui recommanda aussi des agents des Bardi, Arch. Vat., Reg. 109, f° 16 v°.

[163] Arch. Vat., Reg. 110, f° 50 v°.

[164] A. Coulon, o. c., n° 400.

[165] Par exemple à Robert Brion, clerc de Charles et chanoine d'Evreux, A. Coulon, o. c., n° 973.

[166] Rymer, II2, p. 35, 125 et 126 ; Public Record Office, Vascon rolls, 917, ma 10 v°.

[167] 20 mars 1318, A. Coulon, o. c., n° 503.

[168] A. Coulon, o. c., n° 365.

[169] Sur ces projets : Renan, Hist. Litt., XXVII, p. 381 et ss. ; De Boislisle, Ann.-bulletin de la Soc. de l'Hist. de France, 1872, p. 230 et 246.

[170] L'ambassadeur était peut-être Henri de Sully, dont les comptes furent réglés en 1319, A. N., JJ 59, f° 94 v°.

[171] A. N., L 298, n° 13 ; Ch. de V. avait aussi sa part des subsides, A. Coulon, o. c., n° 26.

[172] A. N., JJ 56, n° 413.

[173] 5 août 1321, annonce à Ch. de V. du retour de Louis, porteur d'une cédule à son adresse, Arch. Vat., Reg., 111, f° 17 v°.

[174] 26 août 1321, A. N., J 404A, n° 26.

[175] A. N., L 300, n° 56.

[176] Lehugeur, o. c., p. 211-213 ; v. un curieux rapport sur létal des Guelfes en Lombardie, par Bertrand de la Tour et Bernard Gui, Arch. Vat., Miscell. Vat., 1317.

[177] Chronographia, I, p. 250 ; Lehugeur, o. c., p. 214.

[178] Lehugeur, o. c., p. 213.

[179] Avril 1320, il y rencontra le roi de Sicile, et le pape offrit à tous deux des esturgeons, Arch. Vat., Introitus et Exitus, 38, f° 16 et 26 v°.

[180] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 62 ; J. de Saint-Victor, XXI, p. 672 ; Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 54 ; Villani, liv. IX, c. 107 et 108.

[181] 6 mai 1320, appel aux habitants de Brescia, Rayn., XIV, c. 995.

[182] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 627 ; Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 54 ; Villani, liv. IX, c. 108.

[183] Villani, liv. IX, c. 108.

[184] Fournier, Le royaume d'Arles, p. 383.

[185] Lehugeur, o. c., p. 215-216.

[186] Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 54.

[187] 19 mai 1320, 2.000 florins d'or pour Philippe de Valois, et 1.000 florins pour Charles, Arch. Vat., Introitus et Exitus, 19, f° 160.

[188] Quittance de Philippe en 1321, Arch. Bouches-du-Rhône, A 454.

[189] Bulle à Philippe de Valois, Arch. Vat., Reg. 111, f° 2 v°. — A Charles de Valois, Arch. Vat., Reg. 111, f° 3.

[190] Il joua aussi un rôle important comme arbitre dans des affaires privées, B. N., Clairambault, 69, n° 5337.

[191] A. Coulon, o. c., n° 1092.

[192] Rappelons qu'il en a eu dix.

[193] A. Coulon, o. c., n° 1092, P. J., n° XVII ; des bulles dans ce sens furent adressées à la reine, au bouteiller, au légat et à Ch. de V.

[194] Juillet 1320, B. N., J 377A, n° 13.

[195] A. N., J 164B, n° 41. Le 9 novembre 1323, il était encore payé 10.000 l. t. sur cette somme, A. N., KK 1, p. 402.

[196] Arch. Bouches-du-Rhône, B 457. Les termes employés prouvent que son père avait dû promettre de les donner dès le règne de Philippe V : comme par cause de nous et de nostre personne très haute, noble et puissant dame, madame Marie, fille de tres haut et tres puissant prince, nostre tres chier seigneur et oncle mons. de Valloys et de madame Mahaut, sa famé, ayt esté empeschié sans cause de son assignement en voye de mariage u temps passé, autrement que a raison...

[197] A. N., JJ 58, f° 67 ; Philippe V offrit de plus ses bons services au roi de Castille, ibidem, f° 67 v°.

[198] B. N., fr. 2838, f° 76 r°.

[199] Brussel, I, p. 210. Le pape refusa de nouveaux dons, car Charles lui demandait aussi des secours : le 15 décembre 1321, il déclara qu'il ne pouvait lui donner ni annate, ni décime, bien qu'il en eût besoin pour fournir les hommes d'armes requis par le roi, Arch. Vat., Reg. 111, f° 2. Citons aussi parmi les menus dons du roi, le droit de faire passer en franchise le vin acheté pour lui en Gascogne, B. N., Clairambault, 4, n° 113.

[200] Le 5 juillet 1317, Philippe ordonna à ses agents de contraindre plusieurs monastères du domaine de Ch. de V. à recevoir les moines présentés par Charles, A. N., J 164B, n° 37.

[201] De Mas-Latrie, Commerce et expédition..., p. 60.

[202] 1318-1319, Ordonnances, I, p. 668 ; Noël Valois, o. c., p. XVIII ; Lehugeur, o. c., p. 185-187.

[203] A. N., K 40, n° 23 ; B. N., fr. 3910, f° 79.

[204] A. N., J 408, n° 27 ; Lehugeur, o. c., p. 220.

[205] A. N., J 250, n° 8.

[206] 10 mars 1317, A. N., JJ 53, f° 52 r° ; Du Tillet, o. c., II, p. 607.

[207] Accord de mars 1318, Delisle, Mém. sur op... Templiers, p. 83.

[208] A. N., JJ 59, f° 94 r° ; JJ 60, f° 30 v°.

[209] A. N., JJ 59, f° 27 r°.

[210] A. N., J 228, n° 11 ; JJ 60, n° 66.

[211] Douët d'Arc, Nouveau recueil..., p. 10.

[212] 18 décembre 1318, A. N., JJ 56, f° 175 v°.

[213] 50.000 l. t., le 7 octobre 1321. A. N.. J 509, n° 21.

[214] A. N., J 411, n° 42 ; J 509, n° 21 bis ; Jean XXII avait recommandé à Ch. de s'occuper de cette affaire lors de la venue en France du prince de Tarente, mari de Catherine, juillet 1320, Arch. Vat., Reg. 1102. f° 49 v°

[215] Continuateur de Nangis, H. F., XX, p. 615 ; Continuateur de Frachet, XXI, p. 45 ; interdiction de Louis X, Ordonnances, I, p. 609 ; Mémoriaux, n° 621.

[216] Lehugeur, o. c., p. 326-328.

[217] On peut voir, par les dons que nous énumérons, que Philippe V se montrait fort généreux, contrairement à l'opinion de M. Lehugeur, o. c., p. 377, note 9.

[218] A. N., J 459, n° 14 ; L 299, n° ; Brussel, o. c., I, p. 240 ; Mémoriaux, n° 575.

[219] Duchesne, Hist. de la maison de Chatillon, pr., p. 79 ; A. N, JJ 58, f° 53 v°.

[220] Philippe de Valois en 1326, A. N., KK. 1, p. 920 ; Gui de Chatillon en 1328, Engel et Serrure, II, p. 397. Mais à des prix bien moins lucratifs : le premier 6.000 l. t., le second 5.000 l. t.

[221] Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 60.

[222] Boutaric, Revue des Soc. savantes, 1880, III, p. 321 ; Mémoriaux, p. 147.

[223] Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 60.

[224] Ch. Parisienne anonyme, XI, p. 60.

[225] 20 mai 1319, Ch. de Saint-Denis, H. F., XX, p. 702.

[226] A. N., J 164B, n° 39 ; JJ 59, f° 54 v°.

[227] A. N., J 164°, n° 38 bis. Charles gardait dans ses archives, où elle se trouvait en 1328, une coppie de l'inventaire et de l'assiete et du testament de monseigneur d'Evreus, A. N., fr. 5284, f° 53 v° ; ce document fut brûlé en 1737.

[228] A. N.. J 164B, n° 38.

[229] B. N., Dupuy, 532, f° 513.

[230] Brutails, Doc. de la Ch. des Comptes de Navarre, p. 33-36.

[231] Brutails, Doc. de la Ch. des Comptes de Navarre, p. 35.

[232] C'est la très légitime conclusion de M. Lehugeur, o. c., p. 455.

[233] Le 26 août 1321, Philippe le Long lui légua encore par son testament 100.000 l. t. ; pour entreprendre une croisade, il est vrai. Mais Charles, sans faire de croisade, a touché ces 100.000 l. t., A. N., KK 1, p. 1, 37, 45, 50, etc. Ch. était au nombre des exécuteurs testamentaires, A. N., J 40f, n° 26.

[234] Lehugeur, o. c., p. 417-429.

[235] Martène, Thesaurus anecdotorum, III, c. 414 ; Lehugeur, o. c., p. 423.