CHARLOTTE DE MONTMORENCY

LE DRAME HÉROÏ-COMIQUE

 

I. — LE MARIAGE.

 

 

Un astrologue avait prédit le dernier amour de Henri IV ; or, autrefois, parole d'astrologue, parole sacrée, inéluctable.

Marie de Médicis étant accouchée, le 25 avril 1608, de Gaston, le futur duc d'Orléans, il prenait fantaisie à Henri IV de faire tirer l'horoscope de l'enfant. Il exhumait alors de l'oubli, où il était tombé depuis qu'était morte Catherine de Médicis, le fameux Cosme Ruggieri[1] que le procès de la Môle, plus particulièrement, avait rendu célèbre. Le nécromancien répondit :

Il sera d'une moyenne et fort belle stature, de corps assez beau et de bonne grâce, un peu brusqué en visage, mais, néanmoins, de belle majesté.

Outre qu'il sera naturellement doué de belles et gracieuses manières.

Aura les yeux grands et noirs, les cheveux aucunement frisés ; sa complexion sera humide et chaude.

Sera marié à une princesse veuve, ou attendra longtemps avant de se marier et ainsi, plein de raisonnable âge, épousera une fille ; au reste, sera extrêmement paillard et adonné aux changements en matière d'amour et sera fort heureux, étant beau, grand, libéral en ses plaisirs.

Cette nativité, Sire, augmente l'heure de vos plaisirs, mais plus avec jeunesse puérile qu'avec autres car, comme vous ai écrit plusieurs fois, il y a quelque menée de femmes entièrement contraire au bien et repos de l'État. Je crois aussi, par cette nativité, que bientôt vous aurez quelque nouvelle amour qui vous fera oublier de laisser toute ancienne affection[2].

 

L'étincelle qui fit jaillir cette flamme ardente dans ce cœur de monarque où toujours le feu couvait fut le Ballet des nymphes de Diane — pour Madame — ou plutôt, la répétition de ce ballet, dansé en mars 1609, à Saint-Germain.

 

BALLET DE MADAME[3].

De petites nymphes qui mènent l'Amour prisonnier.

 

A la fin, tant d'amants dont les âmes blessées

Languissent nuit et jour,

Verront sur leur auteur leurs peines renversées

Et seront consolées aux dépens de l'Amour.

Ce public ennemi, cette peste du monde

Que l'erreur des humains

Fait le maître absolu de la terre et de l'onde

Se trouve à la merci de nos petites mains.

Nous le vous ammenons dépouillé de ses armes,

Ô roi, l'astre des rois !

Quittez votre bonté, moquez vous de ses larmes

Et faites-lui sentir la rigueur de vos lois.

Commandez que sans grâce on lui fasse justice.

Il sera malaisé

Que sa vaine éloquence ait assez d'artifice

Pour démentir les faits dont il est accusé.

Jamais ses passions, par qui chacun soupire

Ne nous ont fait d'ennui,

Mais c'est un bruit commun, que dans tout votre empire

Il n'est point de malheur qui ne vienne de lui.

Mars, qui met sa louange à déserter la terre

Par ses meurtres épais,

N'a rien de si tragique aux fureurs de la guerre,

Comme ce déloyal aux douceurs de la paix.

Mais, sans qu'il soit besoin d'en parler davantage

Votre seule valeur

Qui de son impudence a ressenti l'outrage

Vous fournit-elle pas une juste douleur ?

Ne mêlez rien de lâche à vos hautes pensées,

Et, par quelques appas

Qu'il demande merci de ses fautes passées,

Imitez son exemple à ne pardonner pas.

L'ombre de vos lauriers admirés de l'envie

Fait l'Europe trembler.

Attachez bien ce monstre ou le privez de vie,

Vous n'aurez jamais rien qui vous puisse troubler[4].

 

La reine-mère, — raconte Tallemant des Réaux — fit un ballet dont elle mit les plus belles de la cour ; pensez qu'elle n'oublia pas Mlle de Montmorency qui pouvait, alors, avoir quatorze ans. On ne pouvait rien voir de plus beau ni de plus enjoué ; mais il y en avait bien d'autres aussi spirituelles, pour le moins. Il y eut quelques démêlés entre la Reine et le Roi sur ce ballet... A la fin pourtant la Reine l'emporta. Pendant ce petit désordre, elle ne laissait pas de répéter son ballet. Pour y aller on passait devant la chambre du Roi ; mais, comme il était en colère, il la faisait brusquement fermer, dès qu'elle venait pour passer.

Un jour, il entrevit par cette porte Mlle de Montmorency ; et, au lieu de la faire fermer, il sortit lui-même, et alla voir répéter le ballet. Or, les dames devaient être vêtues en nymphes ; en un endroit elles levaient leur javelot, comme si elles eussent voulu le lancer. Mlle de Montmorency se trouva vis-à-vis du Roi quand elle leva son dard ; et il semblait qu'elle l'en voulait percer. Le Roi a dit, depuis, qu'elle fit cette action de si bonne grâce, qu'effectivement il en fut blessé au cœur et pensa s'évanouir. Depuis ce moment l'huissier ne ferma plus la porte et le Roi laissa faire à la Reine tout ce qu'elle voulut[5].

De longue date Charlotte de Montmorency était promise à Bassompierre : sous l'ancien régime, princes et princesses, reines et rois étaient fiancés dès le berceau.

Un jour, raconte Bassompierre, dans ses fort curieux Mémoires, étant allé chez M. le Connétable — le père de Charlotte — qui m'aimait fort, il me dit qu'il voulait, le lendemain, me donner à dîner, et que je ne manquasse pas de m'y trouver : ce que je fis. Il avait, aussi, convié MM. d'Epernon, de Roquelaure, Zamet, un maître des requêtes nommé La Cave.

Quand nous fûmes arrivés, il commanda qu'on fermât la porte et qu'il voulait que rien ne l'interrompît de cette joyeuse compagnie de ses amis familiers, et ne voulût que personne, autre ses officiers, fût en sa chambre, que M. du Tillet, Girard et Rauchin, son médecin, auxquels il fit donner à dîner dans sa garde-robe, pour pouvoir, après-dîner, être auprès de lui.

Après que nous eûmes fait bonne chère et que nous nous fûmes levés de table, il nous fit seoir dans la ruelle et fit sortir tout le monde, commandant à Rachin de se tenir à la porte et la refuser à tous ceux qui y voudraient entrer.

Nous ne savions ni ne doutions pas seulement de ce qu'il voulait faire. Enfin, après que toutes choses furent dans l'ordre qu'il désirait, il nous dit :

— Messieurs, il y a longtemps que je pense à vous assembler pour le sujet présent, comme de mes plus chers et meilleurs amis auxquels je n'ai rien sur le cœur qui vous puisse être caché. Pour vous dire que j'ai reçu, pendant ma vie, infinies grâces et faveurs de Dieu qui, m'ayant fait naître d'un père grand et illustre, m'a conduit par la main durant une longue et heureuse vie, au sommet des plus grands honneurs, charges et dignités. Ce n'est pas qu'elle n'ait souvent été entremêlée de grandes traverses et déplaisirs parmi lesquels, par la grâce de Dieu, j'ai souffert avec patience ou surmonté avec courage et générosité les désordres survenus à notre maison, sur la fin de la vie du roi Charles et durant le règne du roi Henri III, qui m'ont donné le moyen d'exercer la souffrance et louer Dieu de m'en avoir si heureusement tiré. J'eus aussi plusieurs afflictions domestiques, comme la perte de feu mon fils et la mort de feue ma femme qui me laissa sur le bras deux enfants de bien bas-âge. Le mariage de mes deux filles aînées, qui n'ont pas été trop heureux, encore que j'eusse cherché des partis avantageux pour moi et pour elles. Néanmoins, étant avancé en âge, déjà, Dieu m'a fait la grâce de me donner un fils qui promet beaucoup pour la conservation de notre Maison, et une fille bien née, qui étant désormais en état de la pouvoir marier, j'ai cherché de le faire selon son consentement et le mien. Ce qui me fait chercher un mari pour ma fille et un gendre pour moi selon notre cœur et notre désir. Et bien que je pense avoir le choix de tous les princes de la France, je n'ai point tant regardé de la loger en éminence qu'en commodité, et pour y vivre le reste de mes jours et le cours des siens avec joie et contentement. Et l'estime que je fais de longue main de la Maison, personne, biens et autres avantages que la naissance donnait à M. de Bassompierre, que voici, m'ont convié de lui offrir que je n'y pense pas, ce que d'autres de plus grande qualité que lui rechercheraient.

— Ce que j'ai voulu faire en présence de mes meilleurs amis, qui sont aussi les siens en particulier, et vous dire, Monsieur de Bassompierre — s'adressant à moi — que vous ayant, depuis que je vous connais, chèrement aimé comme mon enfant, je vous en veux encore donner cette présente preuve de vous le faire être en effet, vous mariant avec ma fille que j'estime devoir être heureuse avec vous, con naissant votre bon naturel, et que vous serez honoré d'épouser la fille et petite-fille de Connétable, et de la. Maison de Montmorency, et que je le serai aussi le reste de mes jours si je vous vois tous deux heureux et contents ensemble. Je lui donnerai cent mille écus en mariage, présentement et cinquante mille que mon frère lui léguera après sa mort. Et si rien ne vous empêche de vous marier, je donne maintenant charge à Girard, que voilà, de traiter avec vos gens ou avec votre mère, si elle est ici, des articles eh des conventions nécessaires[6].

Il avait les larmes aux yeux de joie quand il acheva ce discours ; et moi confus de cet honneur inopiné qui m'était si cher, je ne savais quelles paroles employer qui fussent dignes de ce que j'avais à lui dire.

Enfin, je lui répondis qu'un honneur si grand, si inespéré, que sa bonté me faisait présentement recevoir, m'ôtait la parole et ne me laissait qu'une admiration de ma bonne fortune. Que, comme ce bien était au-dessus de mon attente et de mon mérite, qu'il ne pouvait être payé que par de très humbles services et des soumissions infinies. Que ma vie serait trop courte pour y satisfaire et que je ne lui pouvais offrir qu'un cœur qui serait éternellement esclave de ses volontés. Qu'il ne donnerait pas un mari à Mademoiselle sa fille, mais une créature dont elle serait incessamment adorée, comme une princesse, et respectée comme une reine, et qu'il n'avait pas tant choisi un gendre comme un serviteur domestique de sa Maison, de qui toutes les actions dépendront de ses seules intentions et volontés, et que si en l'excès que la joie faisait en mon cœur, il me restait encore quelque sorte de considération, je lui demandai permission de lui dire mon unique appréhension, qui était que Mlle de Montmorency n'eût regret de quitter la qualité de Princesse, dont elle doit avec raison être assurée, pour occuper celle d'une simple dame, et que j'aimerai mieux mourir et perdre la grâce présente que M. le Connétable me faisait que de lui causer le moindre mécontentement.

Sur ce, comme j'étais sur un siège assez bas proche de lui, je mis un genou à terre et lui pris la main que je baisai ; et lui, m'embrassant, me tint assez longtemps en cet état. Après quoi il me dit que je ne me misse point en peine de cela ; qu'avant de me parler, il avait voulu pressentir l'intention de sa fille, qui était très disposée à faire les volontés de son père, et particulièrement en celle-là qui ne lui était pas désagréable.

Incontinent le bruit de mon mariage[7] courut par la Cour, et le Roi, pour m'obliger, voulut aller le lendemain chez Mme d'Angoulême après avoir vu le matin M. le Connétable à qui il fit bonne chère... Mais, je sus cependant la mauvaise intention de M. de Bouillon contre moi, et il dit à M. de Roquelaure, qui me le dit après, que M. de Bassompierre voulait avoir sa charge de premier Gentilhomme de la Chambre et ne lui en parlait point ; qu'il voulait épouser sa nièce, et ne lui en disait mot, mais qu'il brûlerait ses livres, qu'il n'aurait ni sa charge ni sa nièce. Et pour ce, en effet, commença à mettre les fers au feu vers Monsieur le Prince lui proposant son mariage avec Mlle de Montmorency[8]. Que cette alliance lui donnait pour parents tous les grands de la France, et que des parents d'une personne de sa qualité étaient ses créatures ; qu'il devait préférer ce parti à un plus grand à cette occasion ; et que s'il le perdait il ne pourrait plus se marier, parce que le Roi ne lui souffrirait point de se marier hors de France. De sorte qu'il ébranla son esprit à consentir qu'il en parlât de sa part à M. le Connétable, auquel j'avais déjà donné avis que M. de Bouillon me voulait traverser. Mais M. le Connétable me dit que je ne devais pas me mettre en peine de cela. Que quelque parti qu'on lui proposât il le refuserait et qu'il connaissait trop bien l'esprit de M. de Bouillon pour s'y laisser séduire. Ainsi lui répondit-il fort aigrement lorsqu'il lui en parla et lui dit que sa fille n'était point à chercher parti, puisqu'elle en avait un tout trouvé et qu'il avait honneur d'être grand-oncle de Monsieur le Prince, ce qui lui suffisait.

Pendant la goutte du Roi il commanda à Monsieur le Grand de veiller une nuit près de lui, Grammont une autre nuit, et moi une autre ; et nous relever ainsi de trois nuits en trois nuits durant lesquels nous lui lisions le Livre d'Astrée[9] qui lors était en vogue ; et nous l'entretenions lorsqu'il ne pouvait dormir, empêché par son mal.

C'était la coutume que les princesses le venaient voir ; et Mme d'Angoulême plus principalement que pas une. Le Roi en était bien aise et entretenait sa nièce, quand Mme d'Angoulême parlait à quelqu'un de nous ; lui disant qu'il la voulait aimer comme sa fille ; qu'elle demeurerait au Louvre, l'année de mon exercice de premier Gentilhomme de la Chambre, et qu'il voulait qu'elle lui dît franchement si ce parti lui agréerait ; parce que, s'il ne lui était pas agréable, il saurait bien rompre ce mariage et la marier à Monsieur le Prince, son neveu, si elle voulait.

Elle répondit que, puisque telle était la volonté de son père, elle s'estimerait bien heureuse avec moi.

Il m'a dit depuis que cette parole le fit résoudre à rompre mon mariage ; craignant qu'elle ne m'aimât trop, à son gré, si je l'épousais. Il fut veillé, cette nuit-là, par M. de Grammont et ne dormit guère, car l'amour et la goutte tiennent ceux qu'ils attaquent, fort réveillés.

Il m'envoya chercher le lendemain, dès huit heures, par un garçon de la Chambre ; et, comme je le fus venu trouver, il me dit pourquoi je ne l'avais pas veillé la nuit précédente.

Je lui répondis que c'était la nuit de M. de Grammont et que la prochaine était la mienne.

Il me dit qu'il n'avait jamais su fermer l'œil et qu'il avait souvent pensé à moi ; puis, me fit mettre à genoux sur un carreau devant son lit, où il continua à me dire qu'il avait pensé à moi et de me marier.

Moi, qui ne pensais rien moins qu'à ce qu'il me voulait dire, lui répondis :

— Sans la goutte de M. le Connétable c'en serait déjà fait.

— Non, ce dit-il, je pensais vous marier à Mlle d'Aumalle et, moyennant ce mariage, renouveller le duché d'Aumale, en votre personne.

Je lui dis :

— Me voulez-vous donner deux femmes ? Lors il me répondit après un grand soupir :

— Bassompière, je te veux parler en ami. Je suis devenu non seulement amoureux, mais furieux et outré de Mlle de Montmorency. Si tu l'épouses et qu'elle t'aime, je te haïrai. Si elle m'aimait tu me haïrais. Il vaut mieux que cela ne soit point cause de rompre notre bonne intelligence, car je t'aime d'affection et d'inclination[10].

— Je suis résolu de la marier à mon neveu le Prince de Condé ; et de la tenir près de ma famille. Ce sera la consolation et l'entretien de la vieillesse, où je vais désormais entrer. Je donnerai à mon neveu, qui aime mieux, mille fois, la chasse que les dames, cent mille livres par an pour passer son temps, et je ne veux autre grâce d'elle que son affection, sans rien prétendre davantage.

Comme il me disait cela, je considérais que quand je lui répondrais que je ne voulais pas quitter ma poursuite, ce serait une imprudence inutile parce qu'il était tout-puissant. Je m'avisai de lui céder de bonne grâce et lui dis :

— Sire, j'ai toujours ardemment désiré une chose qui m'est arrivée lorsque je m'y attendais le moins, qui était, par quelque preuve signalée, témoigner à Votre Majesté l'extrême et ardente passion que je lui porte, et combien véritablement je l'aime. Certes ! il ne s'en pouvait rencontrer une plus haute que celle-ci, de quitter sans peine et sans regret une si illustre alliance, une si parfaite Dame et si violemment aimée de moi ; puisque, par cette pure et franche démission et résignation, que j'en fais, je plais en quelque sorte à Votre Majesté. Oui, Sire, je m'en désiste pour jamais et souhaite que cette nouvelle amour vous apporte autant de joie que la perte me causerait de tristesse si la considération de Votre Majesté ne m'empêchait de la recevoir.

Alors le Roi m'embrassa et pleura, m'assurant qu'il ferait pour ma fortune comme si j'étais un de ses enfants naturels ; et qu'il m'aimait chèrement, que je m'en assurasse, et qu'il reconnaîtrait ma franchise et mon amitié[11].

Là-dessus, l'arrivée des Princes et Seigneurs me fit lever ; et comme il m'eût appelé et encore dit qu'il voulait me faire épouser sa cousine d'Aumalle, je lui dis qu'il avait eu la puissance de me démarier mais, que de me marier ailleurs, je ne le ferai jamais et, là dessus, finit notre dialogue[12].

J'allai dîner chez M. d'Epernon, et lui dis ce que le Roi m'avait dit le matin, lequel me dit que c'était une fantaisie du Roi qui passerait comme elle était venue.

— Ne vous en alarmez pas, car Monsieur le Prince qui connaîtra le dessein de Sa Majesté, d'abord ne s'y engagera pas.

Ce que je me persuadais aussi, parce que je le désirais ; et n'en dis plus mot à personne.

Il est vrai que, comme sous le Ciel, il n'y avait rien de si beau que Mlle de Montmorency, ni de meilleure grâce, ni de plus parfaite, elle était fort dans mon cœur ; mais, comme c'était un amour réglé de mariage, je ne le ressentais pas si fort que je le devais. Il arriva que, le soir, le Roi joua à trois dés, selon sa coutume, ayant fait mettre une table à la ruelle de son lit. Comme nous jouions avec lui, Mme d'Angoulême arriva avec sa nièce qu'elle avait envoyé quérir, laquelle il entretint fort longtemps de l'autre côté du lit. Cependant je regardais sa nièce, qui ne savait rien de toute cette affaire et je ne pouvais m'imaginer qu'elle fut pour réussir en telle sorte. Après qu'il eut parlé à la tante, il entretint longuement sa nièce, puis ayant repris la tante, comme Mlle de Montmorency se retira, moi la regardant, elle haussa à mon avis ses épaules pour me montrer ce que le Roi lui avait dit. Je ne mens point de ce que je vais dire : cette seule action me perça le cœur et me fut sensible que, sans pouvoir continuer le jeu je feignis de saigner du nez et sortis du premier cabinet et du second.

Les valets de chambre m'apportèrent sur le petit degré mon manteau et mon chapeau. J'avais laissé mon argent à l'abandon que Beringhem serra ; et, ayant rencontré au bas du degré le carrosse de M. d'Epernon, je montai dedans et dis au cocher qu'il me menât à mon logis. Je rencontrai mon valet de chambre avec lequel je montai dans mon appartement ; lui défendant de dire que j'y étais et y demeurai deux jours à me tourmenter comme un possédé, sans dormir, boire ni manger. On crut que j'étais allé à la campagne, comme je faisais souvent de pareilles équipées. Enfin mon valet craignant que je ne mourusse, ou que je ne perdisse le sens, le dit à M. de Pralin qui me mena le soir même à la Cour où chacun fut surpris de me voir en deux jours si amaigri, et si changé que je n'étais pas reconnaissable.

Deux ou trois jours après Monsieur le Prince se déclara de vouloir épouser Mlle de Montmorency et, me rencontrant, me dit :

— Monsieur de Bassompière je vous prie de vous rencontrer ce soir chez moi, pour m'accompagner chez Mme d'Angoulême, où je veux offrir mon service à Mlle de Montmorency.

Je lui fis une grande révérence, mais je n'y allai point.

Cependant, pour ne demeurer oisif et me réconforter de ma perte, je me divertis en me raccommodant avec trois dames que j'avais entièrement quittées, pensant me marier ; une desquelles fut Entragues que je vis chez Mme de Senteni ; les autres par rencontre sans y penser ; et m'y rembarquai.

Sur le commencement de l'année 1609 ma mère s'en retournait en Lorraine. Monsieur le Prince, enfin, fiança sa maîtresse. J'étais, un matin, chez le Roi, qu'il vint me dire, comme à plusieurs autres :

— Monsieur de Bassompierre, je vous prie de vous trouver cette après-dînée chez moi pour m'accompagner à mes fiançailles.

Le Roi qui le vit parler à moi me demanda ce qu'il m'avait dit.

— Une chose, Sire, lui répondis-je, que je ne ferai pas. Que je l'accompagne pour se venir fiancer ! N'est-il pas assez grand pour y aller tout seul ? Ne saurait-il se fiancer sans moi ? Je vous réponds que s'il n'a d'autre accompagneur que moi, il sera fort mal suivi.

Le Roi dit qu'il voulait que je le fisse et moi je lui répondis que je le suppliai très humblement de ne me le point commander, car je ne ferai pas. Que Sa Majesté se devait contenter que j'avais abandonné ma passion au premier de ses désirs et de ses volontés, sans me vouloir forcer d'être mené en triomphe après m'avoir ravi ma femme prétendue et tout mon contentement.

Le Roi qui était le meilleur des hommes me dit :

— Je vois bien, Bassompierre, que vous êtes en colère, mais je m'assure que vous ne manquerez pas d'y aller, quand vous aurez considéré que c'est mon neveu, premier Prince du sang qui vous en a prié lui-même.

Et, sur cela, me quitta et prit MM. de Pralin et de Termes en leur commandant de venir dîner avec moi, et me persuader d'y aller, puisque c'était de mon devoir et de la bienséance.

Ce que je fis après leurs remontrances ; mais ce fut de sorte que je ne partis que lorsque les princesses ammenèrent la fiancée au Louvre, et qu'elle passa devant mon logis : ce qui m'obligea de l'accompagner avec ces Messieurs qui avaient dîné chez moi. Et puis, de la porte du Louvre, nous nous en retournâmes trouver Monsieur le Prince, que nous rencontrâmes, comme il sortait du Pont neuf, pour y venir.

Les fiançailles se firent en la galerie du Louvre[13] et le Roi, par malice, s'appuyant sur moi me tint contre les fiancés tant que la cérémonie dura. Deux jours après je tombai malade de la fièvre tierce et après (lue j'en eus eu quatre accès, en un matin, après avoir pris médecine, un Gentilhomme gascon, nommé Noé, me vint trouver au lit et me dit qu'il désirait se battre avec moi quand je serais en santé. Je répondis que j'en avais à revendre quand c'était pour me battre et me levai sur l'heure avec ma médecine dans le corps, et l'allai trouver au rendez-vous qu'il m'avait donné et qui était à Bicêtre, par un extrême brouillard et y ayant deux pieds de neige sur la terre. Comme nous fûmes en présence, deux gascons, nommés la Graulas et Carbon, et un nommé le Fai, vinrent passer près de nous, pour nous arrêter, et lui me dit : — A une autre fois !

Je lui criai qu'il montât à cheval ; c'est ce qu'il fit, mais nous ne nous pûmes approcher, ni reconnaître qu'à notre parole. Comme j'arrivais, Carbon qui nous voulait séparer rencontra le cheval de Noé, en flanc, et le porta par terre. C'était un grand embarras, dans l'épaisseur de ce brouillard, car je faillis à tuer la Graulas, le prenant pour Noé. Enfin, je m'en allai à Chantilly, ne pouvant plus supporter ma médecine. Reigni, la Feuillade, et quelques autres arrivèrent qui me ramenèrent bien malade en mon logis.

Toutefois, parce qu'il y avait un ballet de filles qui se dansait le soir à l'Arsenal, où le Roi, la Reine, et les Princesses étaient, et que je fus convié de m'y trouver ; je ne laissai pas d'y aller, en l'état que j'étais, et d'y demeurer jusqu'au lendemain ; dont je fus si malade que j'en pensais mourir ; et ne me levai du lit que le Mardi-Gras, pour aller à l'Arsenal où l'on courait une bague que Mlle de Montmorency donnait[14]. Je ne courus point parce que j'étais encore trop faible ; mais le Roi m'appelait auprès de lui pour lui aider à entretenir la dame qui donnait la bague ; ce que je fis assez bien. Mais il y eut une brouillerie pour un galant qui lui manquait, lequel Dandelot, sans son sçu, donnait à Monsieur le Grand, qui le porta sur son chapeau en courant ; ce que je fis voir au Roi.

Le ballet de la Reine se dansa le premier Dimanche de Carême, qui fut le plus beau et le dernier aussi, de ceux qu'elle a dansés. Après quoi le Roi s'en allait à Fontainebleau... Peu de temps après Monsieur le Prince s'alla marier à Chantilly. Le Roi revint de Fontainebleau à Paris. Deux jours après M. le Connétable fut un peu malade et je le vis[15].

 

Autant les fiançailles avaient été magnifiques autant le mariage fut discret. Malherbe écrit à Peiresc :

Le mariage de Monsieur le Prince s'est fait avec peu de frais, mais avec bien de la gaieté. M. le Connétable et Mme d'Angoulême[16] y ont dansé ; jugez par là comme la débauche y a été grande. Toutes les dames sont de retour depuis quatre ou cinq jours ; je veux dire Madame la Princesse et Mesdames les princesses de Condé et d'Orange[17]. Elles s'en vont cette semaine prochaine à Fontainebleau...

 

 

 



[1] EUGÈNE DEFRANCE, Catherine de Médicis. Ses astrologues, Paris, Mercure de France, MCMXI.

[2] Dans H. DE LA FERRIÈRE, Henri IV, op. cit., p. 330, d'après Bibl. Nat., fonds Dupuy, n° 89, p 280.

[3] Madame était Elisabeth, l'aînée des filles du roi, née en 1602, qui devint plus tard reine d'Espagne.

[4] MALHERBE, I, p. 149, op. cit., édition Lalanne des Grands écrivains de la France. Voir aussi III, p. 21, lettre à Peiresc.

[5] TALLEMANT DES RÉAUX, I, pp. 177-178, op. cil. Sur ce ballet Tallemant revient encore dans son Historiette de Mademoiselle Paulet : Elle y chanta des vers de Lingendre, qui commencent ainsi :

Je suis cet amphion...

Or, quoique cela convînt mieux à Arion, elle était pourtant sur un dauphin et ce fut sur cela qu'on fit ce vaudeville :

Qui fit le mieux du ballet ?

Ce fut la petite Paulet,

Montée sur un Dauphin (Louis XIII)

Qui montera sur elle enfin...

Mais ç'a été un pauvre monteur que ce Monsieur le Dauphin. Son père y montait au lieu de lui. Henri IV, à ce ballet, eut envie de coucher avec la belle chanteuse. Tout le monde tombe d'accord qu'il en passa son envie. Il allait chez elle le jour qu'il fut tué.

On pourrait aussi consulter sur ces amours avec Charlotte de Montmorency, notamment : GOURDON DE GENOUILLAC, le Dernier Amour de Henri IV ; PAUL HENRARD, Henri IV et la Princesse de Condé.

[6] Le mariage se serait immédiatement célébré si le Connétable n'avait été subitement pris d'un douloureux et long accès de goutte. Quelque temps après c'était une goutte, aussi, qui immobilisait Henri IV dans son lit. Ces deux mêmes maux changèrent, pour ainsi dire, la face des événements. Encore le nez de Cléopâtre !

[7] Dans Duc D'AUMALE, I, p. 255, op. cit. : Comme Charlotte avait perdu sa mère elle était conduite par sa tante, Mme d'Angoulême. Elle fut aussitôt entourée d'hommages et, dans cette foule d'adorateurs, elle distingua, assure-t-on, le hardi et brillant Bassompierre. Du moins leur mariage semblait-il arrêté. Le Roi y avait consenti et voulait même donner au marié, comme cadeau de noces, la charge de premier gentilhomme de sa chambre — dont était titulaire le duc de Bouillon. Inde iræ.

[8] Condé, lorsqu'on le consulta, commençait par refuser net. Il était timide, sans expérience, gauche même et de peu de galanterie ; petit de taille et figure, en somme, assez insignifiante, qui n'a guère, dans l'Histoire, d'autre intérêt que d'être le père du vainqueur de Rocroi. Dans MERKE, la Marquise de Verneuil, p. 225. Plon, éditeur, Paris, 1912.

[9] De d'Urfé, continué par Balthazar Buré. Jamais, dit Faguet, livre ne fut plus lu et n'eut une influence plus grande. Cette interminable pastorale est aujourd'hui à peine feuilletée et mérite, du moins pour nous, cette juste indifférence.

On a voulu trouver dans l'Astrée, sous les bergers et les bergères, les personnes de la Cour de Henri IV ; mais il ne faut recevoir les clefs qu'avec défiance... On peut, si l'on veut, reconnaître Henri IV dans Euric, et dans Alcidon ou Daphnide le duc de Bellegarde ou la duchesse de Baufort ; à coup sùr le ton n'y est pas. Le succès de ce roman fut l'un des plus prodigieux dans l'histoire de no.tre littérature. Je ne peux indiquer tous les hommages enthousiastes que cette œuvre valut à son auteur pendant deux siècles. Saint François de Sales, évêque de Genève, et Pierre Camus, évêque de Belley, disaient que parmi la livres d'amour, Astrée était le plus honnête et le plus chaste. Mme de Sévigné, pendant son séjour à Vichy, évoquait sur les rives de l'Allier les héros du Lignon, et, au siècle suivant, sa petite-fille, Pauline de Simiane, rêvera encore au druide Adamas... Huet, évêque d'Avranches n'osait plus ouvrir l'Astrée de peur d'être obligé de la relire jusqu'au bout. Patra, qui avait connu d'Urfé, nous a laissé dans une lettre, la preuve du juvénile enthousiasme qu'il éprouvait pour l'auteur et pour le roman. Tallemant raconte que dans la société du cardinal de Retz on se divertissait à écrire des questions sur l'Astrée, et à reconstituer la géographie exacte du Forez. La Fontaine, qui composait un opéra sur ce sujet, appelle vraiment exquise l'œuvre de d'Urfé.

Étant petit garçon, je lisais son roman.

Et je le lis encore, ayant la barbe grise.

Boileau lui-même, qui n'a pas été tendre pour les romans, reconnaît dans l'Astrée une narration vive et fleurie, des fictions ingénieuses, des caractères imaginés et bien suivis. Segrais nous dit que, pendant près de quarante ans, on a tiré de l'Astrée les sujets de presque toutes les pièces de théâtre ; il pouvait ajouter : aussi de la plupart des romans. Détail curieux, en Allemagne, il s'était formé, du vivant même de d'Urfé, une Académie des vrais amants, composée des vingt-neuf princes ou princesses et de dix-neuf seigneurs ou dames de la Cour, qui avaient pris les noms des héros de l'Astrée. Ils écrivirent à d'Urfé, pour le prier de prendre le nom de Céladon qu'ils ne se jugeaient pas dignes de porter. Le succès de l'Astrée se prolonge jusqu'au milieu du XVIIIe siècle : l'abbé Prévost, auteur de Manon Lescaut, s'enthousiasmait encore pour les aventures de Céladon, et Jean-Jacques Rousseau, de passage à Lyon, voulait aller visiter le Forez et rechercher sur les rives du Lignon l'ombre des Dianes et des Sylvandres ; comme il se renseignait auprès de son hôtesse, elle lui dit que le Forez était un bon pays de forges et qu'on y travaillait fort bien le fer. Quelle désillusion ! Cette bonne femme, ajoute mélancoliquement Rousseau, a dû me prendre pour un apprenti serrurier... D'autres livres ont fait davantage pour le XVIIe siècle ; je ne sais pas s'il en est un qui lui fasse, au fond, plus d'honneur, et en qui il reconnaisse plus exactement son image. MOUILLOT, le Roman en France, pp. 24-28, Paris, Masson.

[10] Une des plus illustres amourettes de Bassompierre, juste en ce moment, était celle de Mademoiselle d'Entragues, sœur de Madame de Verneuil, alors maîtresse de Henri IV. Il eut l'honneur d'avoir quelque temps le Roi pour rival. Testu, chevalier du guet, y servait Sa Majesté. Un jour, comme cet homme venait lui parler, elle fit cacher Bassompierre derrière une tapisserie, et disait à Testu qui lui reprochait de n'être pas si cruelle à Bassompierre qu'au Roi, qu'elle ne se souciait non plus de Bassompierre que de cela : et, en même temps, elle frappait d'une houssine, qu'elle tenait, la tapisserie à l'endroit où était Bassompierre. Je crois que le roi, pourtant, en passa son envie, car un jour le roi la baisa je ne sais où, et Mlle de Rohan, la bossue, sœur de feu M. de Rohan, sur l'heure, écrivit ce quatrain à Bassompierre :

Bassompierre, on vous avertit,

Aussi bien l'affaire vous touche,

Qu'on vient de baiser une bouche

Dans la ruelle de ce lit.

Il répondit aussitôt :

Bassompierre dit qu'il s'en rit

Et que l'affaire ne le touche.

Celle à qui l'on baise la bouche

A mille fois baise son ...

Je mettrai quand vous voudrez la rime entre vos belles mains.

Henri IV dit un jour au P. Cotton, jésuite : Que feriez-vous si on vous mettait coucher avec Mlle d'Entragues ?Je sais ce que je devrais faire, sire, mais je ne sais ce que je ferais. — Il ferait le devoir de l'homme, dit Bassompierre, et non celui du P. Cotton... Les Historiettes de TALLEMANT DES RÉAUX, t. V, pp. 199-200, édition Monmerqué, Paris, Garnier, 1861.

[11] Bassompierre était frivole, débauché, médiocrement amoureux. D'ailleurs, courtisan avant tout, il comprit qu'il fallait céder et ne chercha qu'à faire valoir son sacrifice. Condé était sans expérience, insouciant, peu clairvoyant encore ; il avait une certaine crainte du Roi et, quand ce dernier lui eut fait connaître sa volonté, il se soumit plus facilement qu'on ne l'avait espéré.

[12] Pour m'animer davantage à le servir, écrit Bassompierre, — quelques pages plus loin dans ses Mémoires, — le Roi m'offrit de me marier à Mlle de Chémilly qu'il venait de se démarier d'avec M. de Montmorency à qui il voulait faire épouser Mme de Vendôme sa fille. Il m'offrit aussi de faire rétablir en ma faveur la terre de Baupréau en duché et pairie ; mais j'étais, lors, tellement éperdu d'amour, que je lui dis que s'il voulait me faire quelque grâce, ce ne serait point par le mariage, puisque par mariage il m'avait fait tant de mal. De sa maitresse — qu'il refusa toujours d'épouser — Charlotte-Marie de Balzac d'Entragues, sœur de la marquise de Verneuil, maîtresse de Henri IV, Bassompierre eut un fils qui fut aumônier de Louis XIII, puis évêque de Saintes ; et de son union secrète avec la princesse de Conti, un autre fils : François de la Tour. — Colonel général des Suisses, Grand maître de l'artillerie, ambassadeur en Espagne, négociateur du traité de la Valteline, maréchal de France, ambassadeur en Angleterre et en Suisse, prenant une part active au siège de la Rochelle et à la bataille du Pas-de-Suze, enfermé à la Bastille — où il rédigeait ses Mémoires — parce que impliqué dans le complot de la Journée des dupes, puis rentré en grâce, Bassompierre fut (1646) trouvé mort dans son lit à Provins. Voir son Historiette, IV, pp. 194-208, op. cit. de TALLEMANT DES RÉAUX.

[13] En décembre 1608. — A la page 414. — Appendice de l'Histoire des Princes de Condé, op. cit., est résumé le contrat.

Le roi donnait aux futurs époux 150.000 livres.

Les futurs époux seraient mariés communs de biens, sauf certaines réserves.

L'oncle de la future épouse lui donnait les trois quarts de la terre de Saint-Lyébault, sise au bailliage de Troyes, et la terre d'Orvilières sise près Montdidier, mais s'en réservant l'usufruit.

Le Connétable donnait à sa fille 300.000 livres et une rente annuelle de 5.000 livres tant que durerait l'usufruit de l'amiral.

La future épouse renonçait à la succession de son père et de sa mère, sauf le cas où, son frère mourant sans enfants, elle serait rappelée, avec ses sœurs, au partage des dites successions.

Une rente annuelle de 12.000 livres et la jouissance d'un des châteaux de Valery-Luz (?) ou Muret étaient assignes à la future épouse à titre de douaire en cas de prédécès de son mari.

Les expéditions du contrat, revêtues du scel de la prévôté de Paris, furent faits et passés doubles en l'hôtel de Montmorency, à Paris, rue Saint-Avoye, le 3 mars 1609.

A Charlotte le roi offrait un magnifique présent de pierreries et de splendides habits de noces. Des réjouissances publiques eurent lieu : un édit concéda la création et érection d'une maîtrise jurée de chacun art et métier en toutes les villes, bourgs et faubourgs et lieux du royaume et pays de l'obéissance du Roi.

Voir dans Économies royales de SULLY, édit., Michaud, II, p. 299 : Certificat de Mme d'Angoulême : Je certifie que Messier, orfèvre, m'a fourni et livré des pierreries pour Madame la Princesse ; desquelles j'ai fait prix avec le dit Messier, et promet bailler icelles à la dite dame, pour les représenter humblement Sa Majesté. En foi de quoi, j'ai signé la présente de ma main. A Paris, le 20 Mai 1009 : DIANE DE FRANCE.

[14] Le Roi, dans sa passion, fit toutes les folies que pouvaient faire les jeunes gens. Quoiqu'il eût cinquante-trois ans, ou environ, il courait la bague avec un collet de senteurs, et des manches de satin de la Chine. TALLEMANT DES RÉAUX, op. cit., I, p. 178. — Voir à l'Appendice : Historiette de Madame la Princesse.

[15] Mémoires du Maréchal de Bassompierre, I, pp. 136-146. A Cologne chez Jean Sambix le jeune, à la Couronne d'Or. MDCC, XXI. — Cf. les Galanteries des Rois de France, III, pp. 64-72. A Cologne, chez Pierre Marteau. — Voir Appendice. — Et aussi les Amours de Henri IV, op. cit., pp. 232 et 59.

[16] Les lettres de dispense n'arrivèrent qu'en avril 1609. C'est le 17 mai que fut célébré le mariage, à Chantilly, chez le Connétable. — V. MALHERBE, op. cit., III, p. 88.

Mme d'Angoulême, dont nous avons si souvent parlé, et que nous rencontrions autour du lit de Henri IV alors qu'on lui lisait l'Astrée, était Diane, duchesse de Châtellerault, d'Étampes et d'Angoulême. Née en 1538 de Henri II, roi de France, et d'une jeune Piémontaise, Filippa Duc. Mariée le 13 février 1552 à Orazio Farnèse, duc de Castro, puis, le 3 mai 1557, à François de Montmorency, maréchal de France, devenant ainsi la tante par alliance de Charlotte. Elle mourut le 11 janvier 1619, à Paris. — Voir Appendice.

[17] La princesse d'Orange, que bientôt nous retrouverons, était sœur de Henri II de Condé devenant la belle-sœur de la nouvelle épousée.