HISTOIRE DE LA RÉGENCE PENDANT LA MINORITÉ DE LOUIS XV

TOME TROISIÈME

 

CHAPITRE LVI. — Le sacre du Roi (23 août - 25 octobre 1722).

 

 

Applaudissements. — Plan de travail de Dubois. — Éducation du Roi. — Rapports du Régent et de Dubois avec le Roi. — Pressentiments du public sur le jeune Roi. — Le camp de Porchefontaine. —L’imprimerie du Cabinet. — Intrigue nouée contre Dubois. — Les préparatifs du «acre. — L'attouchement des écrouelles. — Voyage du Roi. — Le Roi arrive à Reims. — Décoration de la cathédrale. — Entrée des pairs. — Le réveil du Roi. — La procession. — Arrivée de la sainte ampoule. — Les serments. — Les onctions. — L’intronisation. — La messe. — Le festin royal. — Les jours suivants. — La fête de Villers-Cotterêts.

 

Applaudissements

Parvenu au but de son ambition, Dubois ne songea pas un seul instant à en esquiver l’écrasant labeur, l’insipide cérémonial et la redoutable responsabilité. En signe de réjouissance, il distribua10.000 livres aux officiers de la chambre du Roi[1] et, le 27 août, commença de travailler avec le jeune Louis XV[2]. Les journées qui suivirent se passèrent en représentation. Compliments, harangues, poésies, lettres et dépêches affluèrent ; députations, délégations se succédèrent. Tour à tour défilèrent le Prévôt des marchands, l’Académie française, la Chambre des comptes, la Cour des aides, l’Université, la Sorbonne ; seul le Parlement continue à bouder et s’interdit toute démarche. De l’étranger les félicitations arrivent chaleureuses et le jésuite Daubenton, « pénétré de la plus vive satisfaction », escompte « ce degré d’honneur et de crédit » au profit de « la bonne cause » qui en « a besoin pour triompher enfin absolument de l’erreur... Le roi d’Espagne marque une joie particulière de cette élévation, espérant qu’elle sera très avantageuse à l’Église[3] ». Tencin, qui a depuis longtemps son opinion faite sur les sentiments religieux de son ministre, ne s’attarde pas aux bagatelles mais il feint la surprise à la vue d’un événement si singulier et si flatteur pour Dubois que de voir la France et les étrangers tomber d’accord pour lui offrir une dignité jadis odieuse à la nation et redoutable aux puissances de l’Europe[4]. Enfin, l’honnête Le Dran admirait de bonne foi et trouvait « beau à la France de fournir de tels sujets, que le seul mérite élève aux places les plus éminentes[5]. »

 

Plan de travail de Dubois

Attentif aux éloges sans se laisser distraire par eux, le premier ministre réglait, dès le lendemain de son entrée en charge, le travail de tous les ministères. Sa passion de centraliser et d’accaparer allait se donner carrière sans tenir compte de la limite des forces humaines. « Le temps, s’était permis de lui écrire un modeste érudit, est le seul bien que vous puissiez désirer[6] » ; et Dubois se refusait à compter avec le temps, et le temps lui manquerait ! Aucun de ses collaborateurs ne devait rapporter d’affaires au duc d’Orléans qu’en sa présence et après l’avoir prévenu. Toutes les demandes de grâces ou d’emplois lui seraient préalablement transmises ; aux Affaires Étrangères, moins que nulle par ailleurs, on ne ferait rien sans l’agrément du cardinal[7]. Quant à lui, il serait debout chaque jour dès cinq heures, et, après avoir consacré deux heures au dépouillement de son courrier et répondu à quelques lettres particulières, il se présenterait à huit heures trois quarts au lever du Roi. C’était l’affaire de quelques instants. Les dimanches, lundis et samedis il recevrait les ministres ou les personnages mandés, les mercredis seraient réservés aux ambassadeurs, les jeudis aux audiences publiques. Entre temps, il signerait les dépêches, écouterait les rapports des premiers commis et, à onze heures, assisterait aux Conseils : Conseil de Régence, le dimanche ; de conscience, le lundi ; des finances, le mardi ; des dépêches, le samedi. Dans l’après-midi le travail reprenait entre trois heures et huit heures, faisant comparaître devant lui au moins une fois la semaine chaque branche distincte d’administration[8].

 

Education du Roi

Parmi tant d’affaires, Dubois n’oubliait pas la plus importante, qui était de se maintenir au pouvoir. Or Louis XV atteindrait dans quelques mois à peine sa majorité légale et cette date pouvait devenir colle d’une disgrâce éclatante, si on ne disposait tout pour la prévenir. Le cardinal, au sein de son élévation, n’oubliait pas qu'elle était le couronnement de l’art séducteur qu’il avait déployé pour conquérir et dominer l’enfant qu’il avait ou jadis comme élève, et il songeait à exercer sur le jeune Roi le moine prestige. Malgré l’attachement de celui-ci pour son maître, l’évêque Fleury, le cardinal vint à bout de lui faire souhaiter de devenir son élève[9]. En persuadant au jeune prince que le successeur de Louis le Grand se devait d’imiter ses exemples, Dubois se trouva tout placé pour entrer dans le personnage de Mazarin. Dès le 23 août, l’abbé de Targny avait reçu l’ordre de rechercher dans les livres de la Bibliothèque du Roi ce qui concernait l’éducation politique de Louis XIV et le cérémonial observé[10]. On se mit à l’œuvre. Le Blanc, secrétaire d’État à la pierre, et son premier commis Briquet, rédigèrent une instruction militaire[11] ; Le Dran, chef du dépôt des affaires étrangères, disserta sur la diplomatie et les pièces dont il avait la garde[12] ; Fagon et d’Ormesson, intendants des finances, abordèrent ce sujet[13], mais les instructions sur les finances furent l’ouvrage de l'un des frères Paris[14]. Le plan de travail quotidien comporte cinq leçons par semaine, d’une demi-heure chacune[15]. La première leçon commença le mercredi 26 août 1722, à dix heures et demie du matin. Le Roi s’assit dans un fauteuil devant sa petite table, ayant à sa droite le duc d’Orléans, à sa gauche le duc de Bourbon. En face du Roi, le premier ministre s’assit sur un pliant, avec le duc de Charost, gouverneur, à sa droite et un peu en arrière, et l’évêque Fleury, à sa gauche. Dubois entreprit la lecture d’un mémoire dans lequel il parlait au nom du Régent et justifiait ou glorifiait son administration[16]. Ensuite on passait à une exposition plus détaillée et le cardinal lisait une étude sur les revenus du Roi, les impositions[17]. De temps en temps, le Régent interrompait et donnait une explication en quelques mois avec sa grâce coutumière.

 

Rapports du Régent et de Dubois avec le Roi

« Rien de si désagréable que l’énonciation, le forcé et faux palpable de toutes les manières et de tout l’extérieur de l’abbé Dubois, même en voulant plaire, a écrit Saint-Simon. Rien de plus gracieux ni de plus agréable que renonciation, l’extérieur et toutes les autres manières de M. le duc d’Orléans, même sans penser à plaire ; cette différence qui fait une impression naturelle sur tout le monde, frappe et affecte encore plus un roi de dix ans. Rien encore de si naturellement glorieux que les enfants, combien plus un enfant couronné et gâté ! Le Roi était, en effet, très glorieux, très sensible, très susceptible là-dessus, où rien ne lui échappait sans le laisser voir. Dubois le voyait et lui parlait avec un air de familiarité et de liberté qui le choquait et qui découvrait aisément le dessein de s’emparer de lui peu à peu. Le duc d’Orléans, au contraire, n’approchait jamais de lui en public et en quelque particulier qu’ils fussent, qu’avec le mémo air de respect qu’il se présentait devant le feu Roi. Jamais la moindre liberté, bien moins de familiarité, mais avec grâce, sans rien d’imposant par l’âge et la place, conversation à sa portée, et à lui et devant lui, avec quelque gaieté, mais très mesurée, et qui ne faisait que bannir les rides du sérieux et doucement apprivoiser l’enfant. Travaillant avec lui, il le faisait légèrement, pour lui marquer que rien ne se faisait sans lui rendre compte, ce qu’il proportionnait et courtement à la portée de l’âge, et toujours avec l’air du ministre sous le Roi. Sur les choses à donner, gouvernements, places de toutes sortes, bénéfices, pensions, il les proposait, parcourait brièvement les raisons des demandeurs proposait celui qui devait être préféré, ne manquait jamais d’ajouter qu’il lui disait son avis comme il y était obligé, mais que ce n’était pas à lui à donner, que le Roi était le maître, et qu’il n’avait qu’à choisir et à décider. Quelquefois même il l’en pressait quand île choix était peu important ; et si, rarement, le Roi lui paraissait pencher pour quelqu’un, car il était trop glorieux et trop timide pour s’en bien expliquer, et M. le duc d’Orléans y avait toujours grande attention, il lui disait avec grâce qu’il se doutait de son goût, et tout de suite : « Mais n’êtes vous pas le maître ? Je ne suis ici que pour vous rendre compte, vous proposer, recevoir vos ordres et les exécuter. » Et à l’instant la chose était légèrement donnée sans la faire valoir le moins du monde, et il passait aussitôt à autre chose. Cette conduite en public et en particulier, surtout cette manière de travailler avec le Roi, charmait le petit monarque ; il se croyait un homme et il comptait régner[18]. »

Avec Dubois, au contraire, il se sentait un enfant et un enfant qu’on fait jouer. Moins de six semaines après l’ouverture des leçons de politique, Dubois ne songeait plus qu’à distraire et à dissiper son élève. « Je vous prie, Monsieur, écrivait-il à Destouches, de faire rechercher par quelque ami... toutes les curiosités des Indes, de toutes espèces, de grand prix ou de peu de valeur, soit chose naturelle, soit ouvrage, et d’en faire une liste que vous m’enverrez *de huit en huit jours. Vous aurez la bonté de charger quelqu’un de prendre le même soin à l’égard de tous les bijoux, montres singulières et autres curiosités qui se font à Londres... Vous ferez la même chose à l’égard des estampes... L’objet que j’ai en cela est, en premier lieu, d’avoir mille choses pour ma commodité ; mais le principal est de trouver et de faire venir de temps en temps des choses agréables et dignes de la curiosité du Roi, selon le goût de son âge dont je puisse faire de petits présents journaliers pour lui faire ma cour[19]. »

 

Pressentiments du public sur le jeune Roi

Certains louaient encore, en public, l’assiduité et le zèle du jeune Roi au travail[20] ; d’autres s’exprimaient sur son compte de façon très différente. Un jour du mois de septembre, l’avocat Barbier va se promener à Versailles et s’y place sur le passage de l'adolescent « qui se porte bien, dit-il, a un bon et beau visage, a bon air, et n’a point la physionomie de tout ce qu’on dit de lui : morne, indifférent et bête. Je le vis se promener à pied dans les jardins, son chapeau sous son bras, quoiqu’il fît vent et froid : il a une très belle tête[21]. » Quoiqu'il en dise, Barbier revient, quelques pages plus loin, sur la taciturnité du Roi, dont « on se plaint fort. On ne sait de quel caractère cela provient[22] » ; mais on selon ne et on s’inquiète de découvrir en lui « le plus secret et le plus discret enfant qui ait jamais été, chacun cherche à le pénétrer, mais inutilement[23]. » Tandis que la petite Infante, sa fiancée, conquiert tous tes cœurs par sa vivacité et sa gentillesse[24], le jeune garçon maussade garde le silence et ne détourne même pas la tête. Un soir que tous deux assistent à un feu d’artifice, la fillette s’agite, s’exclame, interroge, insiste et n’arrache en réponse à ses questions qu’un « oui » bien sec. — « Mais vraiment, s’écrie-t-elle, il m’a pourtant parlé ![25] »

C’est déjà un enfant vicieux, que les jeunes courtisans, admis dans son intimité, ont instruit et initié de bonne heure à goûter des plaisirs solitaires[26]. Dès lors, « il cherche à éviter le monde qu’il n’aime point ; il craint et veut être presque seul[27] » ; on le prive de ses compagnons pervers, il le trouve bon ; on le sépare de son gouverneur, il se tait ; on lui fait entendre que le bien de l’Etat réclame la confirmation de l’exil du vieillard, il approuve et signe tout ce qu’on lui présente, et « le public est fâché contre Sa Majesté[28] ». Il se demande si cette taciturnité n’est que dissimulation ou si c’est imbécillité. Ses maîtres qui lui ont appris à être « secret » trouvent qu'il l’est trop. Un jour il reçoit une lettre, la glisse dans sa poche, attend pour la lire l’heure de son coucher et la brûle à l’instant. Le Régent, en ayant été informé, le prie le lendemain de le faire son confident de cette affaire qu’il affecte de croire être une galanterie ; Louis XV ne lui répond pas et s’éloigne. Le cardinal en parle à son tour au Roi qui, tirant un papier, dit : « Voilà l’enveloppe », et la jette dans le feu[29].

 

Le camp de Porchefontaine

La musique, la comédie, la danse, îles ballets et les bals inspirent au jeune Roi une aversion qui le rend déjà inamusable[30]. Pour le divertir selon son rang, on imagine la réunion d’un camp à Montreuil, près de Versailles, au lieu dit Porchefontaine. Le 10 septembre, Louis XV alla marquer son camp pour l’attaque du fort et visita ensuite le parc d’artillerie placé sous les ordres de M. de Bessons. La moitié du régiment du Roi, commandé par M. d’Esclavelles, lieutenant-colonel, défendrait le fort contre Faillir moitié dont les attaques seraient conduites par M. de Pezey, colonel. Celui-ci tenait table ouverte, soir et matin, de cent couverts. Le 19, le fort fut investi ; le 20, la tranchée fut ouverte, et le Roi ayant fait le tour de la place avec son escorte, fut fait prisonnier, mené dans le fort et relâché moyennant une gratification. Tout Paris allait voir la « petite guerre », et chaque après-midi le Roi s’y rendait à cheval. On se battait avec des bombes en carton, chargées de sable et pesant six livres ; on faisait sauter des mines, chose très curieuse pour les gens qui ne seront jamais que spectateurs. Quelques-uns attrapèrent des bombes ou brûleront leur perruque, parmi la foule, plusieurs furent blessés. Tous les jours on inventait quelque épisode nouveau, on relevait les morts et les blessés par persuasion et on transportait les officiers sur des civières, les soldats sur les épaules, au milieu des éclopés boitant et geignant. Le Roi paraissait prendre intérêt à ce jeu ; il entra dans le fort après la capitulation et accorda à la garnison les honneurs de la guerre. M. d’Esclavelles gagna à ce divertissement le cordon rouge[31].

 

L’imprimerie du Cabinet

Une autre distraction, moins bruyante, imaginée pour l’enfant-roi avait été, dès 1718, l’« Imprimerie du Cabinet », à laquelle il prit un certain plaisir. Jacques Collombat, qualifié « imprimeur ordinaire du Roy, Suite, Maison, Bâtiments, Arts et Manufactures de Sa Majesté » se donna beaucoup de mouvement pour intéresser son élève à l’art typographique, composa et imprima un manuel à son usage, en quatre pages, ainsi que d’autres productions sur feuilles volantes ou placards de différents formats[32]. Outre les dernières paroles du feu Roi à son petit-fils[33], les autres impressions du Cabinet du Roi offrent des textes de maximes et sentences morales diverses ; ce sont sans doute là les seuls essais de typographie qu'on puisse avec vraisemblance attribuer à Louis XV lui-même :

Un Roy doit ses plus précieux moments, au gouvernement de son état, c'est la son obligation principale, et dont Dieu lui demandera un compte rigoureux.

Le Prince ne doit user des moyens rigoureux qu'après avoir employé inutilement les plus doux.

Le Prince qui se laisse emporter par ses passions devient bientôt le jouet de celles de ses ministres.

Deux thèmes latins, les commandements de Dieu et de l'Église, les Préceptes de Sagesse, la mesure du Roi : Trois pieds dix pouces et trois lignes, le seizième jour de juillet 1718. Puis c’est le Cours des principaux fleuves et rivières de l'Europe, composé et imprimé par Louis XV, et après ce gros effort d’un livre de soixante-douze pages, on ne trouve plus guère que des pièces relatives aux jeux et divertissements, badinages et récréations. En 1717, on avait imaginé l’Ordre du Pavillon, à l’usage des petits compagnons du Roi ; en 1718, on dresse l’état des gouvernements de la Terrasse qui confère la direction des jeux, tentes, cahutes, volières, etc. ; en 1723, il sera un moment question de l’Ordre de la Moustache et déjà on en rédige les statuts lorsqu’on s’avise que cette plaisanterie pourrait bien avilir le cordon bleu et donner naissance à un vrai ordre[34].

 

Fâcheux symptômes

Les actions du Roi, dit-on, ne sont que des « enfances » ; car on commence à s’alarmer à son sujet et ceux qui souhaitent la majorité avec impatience, se prennent à craindre en même temps que le caractère de Louis XV ne soit mauvais et féroce ; il lui est arrivé une vilaine aventure qui a donné à réfléchir. On a parlé déjà d’une biche blanche qu’il avait nourrie et élevée, laquelle ne mangeait que dans sa main et qui l’aimait fort ; il la fait mener à la Muette et a dit qu’il la voulait hier. Il l’a fait éloigner, l’a tirée et l’a blessée. La biche est accourue vers lui, il l’a fait remettre au loin et l’a tirée une seconde fois et tuée. Le public trouve cela bien dur[35]. Il n’est pas plus indulgent à certaines espiègleries déplacées. Un jour, devant le duc de Louvigny, on dit à ce Roi de onze ans que Mme de Louvigny est grosse ; à quoi il répond qu’il souhaite que l’enfant naisse posthume. « Sire, dit un courtisan, savez-vous bien qu’on ne peut rien dire de plus offensant pour M. de Louvigny. — « Je l’ai fait exprès », répond Louis XV qui continue sa partie de reversi[36]. Un autre jour, « il demande au marquis de Nesle s’il était au service ; Nesle répond qu’il n’y était plus, mais qu’il avait servi dans la gendarmerie. « Pourquoi n’avez-vous pas acheté un régiment quand vous l’avez quitté ». — Il n’y en avait point alors à vendre », répondit-il. — « Bon, dit le roi, on en a vendu plus de cent depuis » ; et il ajoute en langage suisse : Ly être poltron ; ce qui a bien étonné et le marquis et toute la Cour, qui voit, selon la remarque de Marais, que le Roi, qui parle si peu, ne parle que pour dire une chose très piquante à un homme de qualité. Louis XIV, pendant soixante-dix ans n’en a jamais tant dit à personne[37]. »

 

Intrigue nouée contre Dubois

Pendant que Louis XV alternait les leçons avec les jeux, Dubois connaissait de plus graves soucis. A peine était-il nommé premier ministre qu’un des hommes les plus attachés à sa fortune, Hémond, introducteur des ambassadeurs, lui faisait connaître un projet ourdi contre lui. Les principaux membres de la famille royale y étaient engagés : le duc de Bourbon, le comte de Toulouse et le duc de Chartres propre fils du Régent. La marquise de Prie, maîtresse déclarée du duc de Bourbon s’essayait à prendre la direction d’une politique et d’un parti, la marquise du Deffand groupait les oppositions, la maréchale d’Estrées et la duchesse de Rohan mettaient leurs rancunes au service de ceux qu’elles croyaient devoir jouer un rôle dans une nouvelle Fronde. Tous ces gens eussent été très peu redoutables et même tout-à-fait négligeables s’ils n’avaient obtenu ou espéré le concours d’un collaborateur de Dubois, le secrétaire d’Etat Le Blanc. Celui-ci se trouvait fâcheusement associé à une très méchante affaire : Le premier commis de La Jonchère, trésorier général de l’Extraordinaire des Guerres, disparut et, après trois semaines, fut retiré de la Seine, proche de Marly, avec sa veste, mais sans culotte ni bas et percé de deux coups de poignard[38]. L’opinion publique se passionna à l’occasion de ce crime mystérieux et accusa Le Blanc de cet assassinat, qui le délivrait d’un témoin de ses malversations dans la caisse de l’Extraordinaire[39]. On désignait Pâris-Duverney comme le trop vigilant ennemi contre lequel Le Blanc avait voulu se prémunir et dont les manœuvres avaient fait nommer une commission d’enquête. Aussi longtemps que Dubois avait eu besoin de Le Blanc, celui-ci n’avait eu rien à craindre, mais le cardinal-premier ministre parlait maintenant de son dessein « de rétablir l'ordre et la règle dans les affaires de finances avec le concours des frères Paris, et Le Blanc ne pouvait se faire aucune illusion sur la disgrâce qui le menaçait.

Le Blanc s'avisa d’opposer an tout puissant ministre le fils du duc d'Orléans, personnage d’une insignifiance trop parfaite pour en attendre un concours utile. M. le Duc et le comte de Toulouse ne servaient qu’à étoffer un peu ce fantoche princier et derrière eux, Le Blanc, aidé du comte de Belle-Isle, organisait l’intrigue sous laquelle, croyaient-ils, succomberait Dubois. Tous ensemble devaient, répandre le bruit que les détournements imputés à Le Blanc avaient été ordonnés par de très hauts personnages : — le Régent et Dubois, — dont ils servaient la politique. Le Blanc pensait faire un coup de partie et grouper autour de lui toutes les principales charges militaires de façon à se rendre redoutable au cardinal. Le surcroît d'occupations qu’apportaient à ce dernier les préparatifs du sacre du Roi, sembla favoriser les nouveaux frondeurs qui voulaient mettre Dubois dans l’impuissance physique de s’acquitter des obligations de sa charge[40]. La police secrète de Dubois ne lui fit pas défaut en cette occasion, Rémond, le comte de Hoym, Schaub, Mme de Tencin veillaient pour leur ami. La Tencin allait de Choisy à Chantilly et de là à Rambouillet, écoulant ce qu’on voulait bien lui dire, découvrant ce qu’on croyait lui cacher. Dubois eut encore d’autres alliés, le duc et surtout la duchesse du Maine, toujours vigilante à rendre à son neveu, M. le Duc, les coups qu’elle en avait reçus[41]. Avant de se mettre en route pour Reims, Dubois avait partie gagnée et le Régent admettait que « toutes les parties du gouvernement, toutes les fonctions et toutes les grâces devaient être rattachées uniformément sans aucune exception » aux droits du premier ministre[42].

 

Les préparatifs du Sacre

Depuis six mois au moins il était question du sacre du Roi à Reims. Annoncé d’abord pour le mois de septembre, cette date souleva l’opposition des Champenois qui députèrent pour la faire remettre, à cause de la vendange et des vignes qui seraient maltraitées et perdues. La raison parut bonne et fut agréée, et le sacre remis au 20 octobre. Aussitôt chacun se mit en quête des livres, des estampes et des cérémonies. Louis XV voulut voir une gravure représentant la cavalcade de la Sainte-Ampoule, on ne put la retrouver ; force fut de se rabattre sur une taille-douce de l’année 1655 retraçant la cérémonie tout entière. Tailleurs, brodeurs, tapissiers, carrossiers se mirent en campagne pour être prêts au jour dit[43], et ; les conflits s’élevèrent comme par enchantements entre dignitaires et entre officiers[44], quant aux bourgeois, qui paieraient à beaux deniers comptants les frais de la fête, ils s’en consolaient en lisant le cérémonial et les dissertations mises a leur portée[45]. Petit à petit les détails du voyage se précisent. Marais apprend d’un contrôleur-général de la maison du Roi qu’on a passé marché pour la viande du festin royal à Reims à 900 livres, pour le lard 300 liv., et il en coûtera pour faire piquer cette viande seule 3.400 liv. parce qu’il n’y a dans Paris que quatre-vingts hommes qui sachent piquer et qu’on sera obligé de les emmener et de les nourrir[46]. Beaucoup de criminels feront le voyage de Reims pour y être graciés de tout ce qui n’est pas assassinat, rapt, viol ou duel[47]. Barbier, non moins curieux que son confrère, va chez le joaillier du Roi admirer la couronne du sacre, sur laquelle sont montés le Sanci et le Régent[48] ; Barbier se fait montrer aussi la nef d’or qui sert au sacre pour le dîner du Roi et dans laquelle est enfermé son couvert. Tout sera là- bas d'une magnificence surprenante : le Roi offre à l’église métropolitaine un soleil d’or du poids de cent marcs[49] ; le duc d’Orléans envoie soixante-deux mille bouteilles de vin pour abreuver le Roi à Villers-Cotterêts[50] ; le duc de Bourbon achète des sangliers pour offrir une chasse aux toiles dont on n’a pas eu d’exemple[51] ; enfin le sacre fut fixé au 25 octobre et, dès le 16, le Roi quitta Versailles et vint coucher à Paris[52].

 

L’attouchement des écrouelles

Le premier ministre s’était complu à faire servir le sacre à l’apothéose de Guillaume Dubois ; en conséquence, les moindres démarches avaient été discutées et réglées par lui. Quelques ducs ombrageux, et Saint-Simon à leur tête, s’abstinrent d’aller à Reims, on les laissa faire ; les bâtards légitimés ne s’y montrèrent pas et boudèrent dans leurs maisons[53], on insista mais pour la forme seulement. Une question plus sérieuse occupa le conseil : Devait-on retrancher des cérémonies du sacre l'attouchement des écrouelles ? Plusieurs milliers de malades étaient rangés à genoux, sur deux lignes d’une immense étendue, et le Roi avait l’obligation de les toucher tous l’un après l’autre, tandis que, pour sa sûreté, leurs mains étaient tenues par le capitaine des gardes et leurs têtes par le premier médecin. Quelques personnes craignirent pour la santé du jeune prince cette longue et fatigante journée, pendant laquelle la vue et l’odorat avaient beaucoup à souffrir. Leurs appréhensions ne furent pas prises en considération par la majorité du conseil qui estima que la multitude serait bien plus frappée de l’attribution surnaturelle du Roy, que choquée de la constante inefficacité du remède. La cérémonie devait se faire quelques jours après le sacre à Corbeny[54], devant la châsse de saint Marcoul et le jeune Roi se promettait un vif plaisir de ce pèlerinage. Dubois n’y voulait pas aller, il invoqua le précédent sacre de Louis XIV et fit apporter la châsse à Reims[55], mais afin de ne pas mécontenter son jeune maître il fut arrangé que le pont construit sur l’Aisne pour faciliter le voyage serait emporté par la rivière dans la nuit du 27, et que la faute retomberait tout entière sur l’intendant de la province[56], qui s’offrait lui-même en victime.

 

Voyage du Roi

Tout étant prévu, le Roi quitta Versailles à deux heures après midi et arriva à Paris à cinq heures entouré des ducs de Chartres et de Bourbon, du comte de Clermont, du prince de Conti et du duc de Charost, son gouverneur ; escorté par les Gendarmes, chevau-légers, Mousquetaires, Gardes du Corps et le vol, du Cabinet qui suit le Roi dans ses voyages. Le 17 octobre, Louis XV quitta Paris accompagné de la même manière[57] et alla coucher à Dammartin, d’où, le 18, il gagna Villers-Cotterêts et repartit le lendemain pour coucher à Soissons où il fut reçu solennellement, logé à l’évêché et régalé de harangues, discours et compliments. La journée du 20 lui en réservait d’autres, mais dans l’après-midi on alla visiter les églises et le petit Roi, voyant ouverte la porte étroite d’un clocher, s’y glissa, on l’y voulut suivre, mais les sveltes purent seuls passer. « Gare les gras », criait l’enfant riant aux éclats[58]. Ce fut l’éclaircie d’un instant ; les sermons continuaient. « Sire, disait l’évêque Languet, les ministres de Dieu croient vous devoir autre chose que des respects vulgaires et des applaudissements flatteurs. Cette aimable jeunesse qui gagne les cœurs inquiète par ses charmes même ceux qui savent combien il est facile d’en abuser. Ils n’envisagent point sans quelque effroi ce moment trop flatteur qui s’approche où Votre Majesté jouira de ce droit funeste à tant de rois jeunes, de pouvoir tout sans contrainte[59]. »

 

Le Roi arrive à Reims

Le 21, le cortège entra à Fismes et le 22, sur les deux heures après-midi, le Roi arriva à quelque distance de Reims où se trouvait un camp assez considérable[60]. Les troupes, rangées en bataille sur le passage du Roi, entrèrent avec lui dans la ville où on le fit passer sous trois arcs de triomphe que gardaient les bourgeois en armes. Reçu par l'archevêque et par le Chapitre sur le seuil de la cathédrale, Louis XV baisa le livre des Évangiles et pénétra dans l’auguste basilique où un prie-Dieu sous un dais l’attendait dans le sanctuaire. Ensuite il monta a l’autel et y déposa l’ostensoir dont il faisait présent à l’Église métropolitaine. La soirée et la journée du lendemain se passèrent en visites officielles et en réceptions. Le 24, Louis XV entendit la messe à Saint-Pierre et les premières vêpres du sacre à la cathédrale. L’évêque d’Angers prêcha à l’issue des vêpres sur ce texte : « Samuel prit une corne remplie d’huile et l’oignit[61] » ; ensuite le Roi revint à l'archevêché et se confessa au P. de Linières.

 

Décoration de la Cathédrale

La cathédrale avait été tendue jusqu’à la voûte des plus belles tapisseries de la Couronne : le maître-autel était paré de drap d'argent galonné d’or et chargé des armes de France et de Navarre en broderie. Le Roi en avait fait présent la vrille, ainsi que des chapes et dalmatiques en toiles d’or et d’argent garnies de point d’Espagne. Le sol était couvert de tapis. Vis-à-vis de l’autel, un prie- Dieu, un fauteuil et un dais placés sur une estrade étaient tendus de velours violet semé de lys d’or brodés. Les sièges et les stalles disparaissaient sous des tentures de velours semblable. Au milieu du Jubé, magnifiquement tendu, s’élevait sous un dais de velours violet le trône du Roi et son prie-Dieu, de chaque côté du trône les bancs des pairs ecclésiastiques et laïques, et, au bas du prie-Dieu, les sièges du grand chambellan et du premier gentilhomme de la chambre, toujours tendus de velours fleurdelisé. Sur une plate-forme avancée entre les deux escaliers par lesquels on montait au trône, se voyait le siège du connétable, et plus avant deux sièges l’un à droite pour le Carde des Sceaux, l’autre à gauche pour le Grand Maître de la Maison du Roi. A l'extrémité droite du Jubé, s'élevait un autel sous un Jais où on célébrerait une messe basse pendant la messe du chœur ; à l’extrémité gauche prendraient place le duc de Charost, gouverneur du Roi et le prince Charles de Lorraine, grand écuyer de France. Entre les piliers des deux côtés du chœur, par-dessus les stalles des chanoines, on avait bâti des galeries en amphithéâtre pour les personnes de distinction. Une tribune à droite de l’autel était destinée à Madame, mère du Régent ; une tribune à gauche était réservée au nonce du Pape et aux ambassadeurs. La musique b entassait derrière l’autel et le chœur ainsi que la nef avaient reçu lustres et girandoles à profusion.

 

Entrées des Pairs

Le dimanche 20, vers six heures du matin, les chanoines, tous en chape, pénétrèrent dans la cathédrale et le grand-prieur, le trésorier et un moine de Saint-Denis apportèrent les insignes.de ta royauté. Pendant la récitation de Prime, l’archevêque-duc de Reims s’alla revêtir à la sacristie des habits pontificaux et revint ii l’autel, précédé du chantre et du sous-chantre tenant leur bâton d’argent, des évêques de Sentis, Verdun, Nantes et Saint-Papoul en chape et en mitre ; derrière eux, l’évêque d’Amiens, diacre, et l’évêque de Soissons, sous-diacre, en mitre, enfin l’archevêque de Reims escorté de deux de ses chanoines à ce désignés par leurs confrères. Les cardinaux, archevêques et évêques invités étaient arrivés peu auparavant et avaient été conduits à leurs places. Les cardinaux de Rohan, de Bissy, de Gesvres, Dubois et de Polignac, en rochet et chape cardinalice occupaient un banc un peu en arrière des pairs ecclésiastiques, mais poussé assez haut pour qu’il n’y eût rien entre ce banc et l’autel et que M. de Polignac ne fut pas effacé par l’archevêque de Reims[62]. Les archevêques d« Toulouse, de Bordeaux, de Sens, d’Albi et l’archevêque nommé de Tours, tes évêques de Metz, d’Angers, de Chartres, de Rennes, de Blois, de Troyes, de Sisteron, d’Avranches, du Puy et de Lectoure, en rochet et camail violet occupaient les stalles derrière le banc des pairs ecclésiastiques. Derrière eux se voyaient des aumôniers du Roi, des chanoines de Reims ; devant eux avaient pris place des conseillers d’État, les maîtres des requêtes et des secrétaires du Roi, ceux-là en rochet et manteau noir, ceux-ci en robe de cérémonie.

Les pairs ecclésiastiques, en chape et en mitre, occupèrent leur banc, du côté de l’épître, pendant que les maréchaux de France d’Estrées, Tessé, d’Huxelles, de Matignon, de Bezons, les ministres La Vrillière, Maurepas et Le Blanc et quelques seigneurs occupaient quelques places adroitement ménagées pour les satisfaire sans indisposer les « Honneurs » et les pairs. Bientôt la tribune diplomatique reçut le nonce et les ambassadeurs d’Espagne, de Sardaigne et de Malte pendant que Madame, la duchesse de Lorraine sa fille, l’infant de Portugal et les enfants de lorraine envahissaient l’autre tribune.

 

Le réveil du Roi

Vers sept heures, les pairs laïques arrivèrent et prirent place sur le banc du côté de l’évangile. Ils étaient vêtus d’une tunique de drap d’or tombant jusqu’à mi-jambe, retenue par une ceinture tramée d’or, d'argent et de soie violette ; par-dessus, le manteau ducal de drap violet, doublé et brodé d’hermine avec collet d’hermine. Tous portaient la couronne sur un bonnet de satin violet. Les ducs d’Orléans, de Chartres et de Bourbon tenaient la place des ducs de Bourgogne, de Normandie et d’Aquitaine ; les comtes de Charolais et de Clermont et le prince de Conti représentaient les comtes de Toulouse, de Flandre et de Champagne. Quand tous les pairs furent en place, ils s’approchèrent de l’archevêque de Reims et convinrent de députer l’évêque-duc de Laon et l'évêque-comte de Beauvais pour aller quérir le Roi. Une procession composée de tous les chanoines, la musique, le chantre et le sous-chantre se forma aussitôt et s’ébranla, suivie du marquis de Dreux, grand-maître des cérémonies et des évoques de Laon et de Beauvais. Elle gagna la grande salle de l'archevêché et le chantre frappa de son bâton d’argent la porte de la chambre du Roi. L’évêque de Laon demanda : « Louis Quinze », et le prince de Turenne, grand chambellan répondit : « Le Roi dort ! » Nouvelle demande et même réponse, troisième appel de l’évêque demandant « Louis Quinze que Dieu nous a donné pour Roi ». Alors les portes s’ouvrent et les deux évêques s’approchent de l’enfant couché sur son lit de parade et vêtu d’une robe longue de drap d’argent en forme de soutane ; sous cette robe une camisole de satin cramoisi, sur la tête une toque de velours noir garnie d’une touffe de plumes blanches d’où sortait une aigrette noire de héron ; au retroussis de la toque,- sous le bouquet de plumes, une agrafe de diamants ; des mules de drap d’argent. On présenta l’eau bénite et, après une prière, les deux évêques soulevèrent Louis XV de son lit par les bras et la procession se dirigea vers l’église dans l’ordre suivant :

 

La procession

Les gardes de la Prévôté de l’Hôtel et le Grand Prévôt ; les chanoines ; les Cent-Suisses de la Garde ; les hautbois, tambours et trompettes de la Chambre. Six hérauts d'armes, vêtus de velours blanc, chausses troussées et rubanées, pourpoints et manteaux, cotte d’armes de velours violet timbrée de l’écu de France, toque de velours blanc ; le caducée à la main. Le grand-maître des cérémonies et le maître des cérémonies. Quatre chevaliers de l’ordre en manteau chargés de porter les offrandes. Le maréchal de Villars entre deux massiers. Le Roi soutenu par les deux évêques. Le prince Charles, le duc de Villeroy, le duc d’Harcourt. Six gardes de la compagnie écossaise, vêtus de satin, la pertuisane à la main, flanquaient la personne du Roi. Le Garde des Sceaux d’Armenonville, remplaçant le Chancelier, vêtu d’une soutane de salin cramoisi sous an grand manteau d’écarlate avec l’épitoge retroussée et fourrée d’hermine ; sur la tête, le mortier de drap d’or bordé d’hermine. Puis venaient le Grand Maître, le Grand Chambellan, le Premier Gentilhomme de la Chambre d’année, vêtus comme les pairs laïques ; enfin les Gardes du Corps.

 

Arrivée de la sainte ampoule

A mesure que le Roi avançait dans la cathédrale, son cortège se dispersait ; à l’entrée du chœur, les deux évêques le menèrent au pied de l’autel où, après une prière, il fut conduit au fauteuil sous le dais au milieu du chœur, pendant que chacun prenait la place qui lui était assignée. On présenta l’eau bénite et on chanta le Veni Creator après lequel les chanoines récitèrent Tierce et quand ce fut terminé la sainte ampoule arriva à la porte de l'église avec son somptueux cortège de seigneurs à cheval gardant le dais d'argent brodé sous lequel chevauchait le prieur de Saint-Rémy, dom Gaudart, enveloppé dans sa chape de drap d’or. L’archevêque de Reims alla recevoir l’ampoule vénérable sur le seuil, jura de la restituer et vint l’apporter sur le grand autel où le prieur et le trésorier de Saint-Rémy prirent place afin de ne pas la perdre de vue.

 

Les serments

Alors l'archevêque alla derrière l’autel revêtir les vêtements sacerdotaux et revint précédé de six chanoines diacres vêtus de dalmatiques et six chanoines sous-diacres vêtus de tuniques. Après les révérences ordinaires à l’autel et au Roi, l’archevêque assisté des évêques de Laon et de Beauvais reçut du Roi, assis dans son fauteuil, et couvert, promesse de protection pour toutes les églises. Ensuite les deux évêques soulevèrent le Roi dans son fauteuil et demandèrent le consentement de l’assemblée et du peuple. Alors le Roi, tenant ses mains sur le livre des évangiles fit les serments du royaume, de l’ordre du Saint-Esprit, de l’ordre de Saint-Louis et de l’observation de ledit contre les duels.

Les deux évêques conduisirent le Roi au pied de l’autel, on lui ôta sa robe longue et sa toque, il demeura vêtu seulement de sa camisole de satin. L’assistance émue, attendrie, n’avait d’attention que pour ce radieux adolescent dans son vêtement candide de néophyte ou de roi candidat ; son visage d’une beauté achevée, la grâce de tous ses mouvements le faisait ressembler à 1 Amour, tandis que le souvenir des périls auxquels son enfance avait échappé laissait croire que la Providence avait ses desseins sur lui et, à cotte vue comme à cet espoir, les yeux en devenaient humides de tendresse[63].

On apporta le fauteuil entre le prie-Dieu et l'autel, le Grand Chambellan chaussa au Roi des bottines de velours violet fleurdelisé et le duc d’Orléans y attacha les éperons d’or et les retira sur-le-champ. L’archevêque bénit l’épée de Charlemagne déposée sur l’autel, la ceignit au Roy et l’enleva à l’instant, puis la tira du fourreau, pria, la remit nue au Roi qui la tint, la baisa et l’offrit à Dieu sur l’autel. L’archevêque la rendit à Louis XV qui la reçut à genoux et la confia à Villars qui la tint la pointe levée pendant le sacre, le couronnement et le festin royal.

Les onctions

L’archevêque et dom Gaudart ayant ouvert la sainte ampoule il mélangea une parcelle avec du saint-chrême sur la patène d’or du calice de Saint-Rémi, et après le chant des litanies, que le Roi entendit étendu sur un carreau au pied de l’autel, à côté de l'archevêque étendu de même, le Roi et l’archevêque se relevèrent à ces mots : Ut obsequiam... Les prières achevées, l’archevêque s’assit et le Roi agenouillé devant lui ne portant que sa camisole de satin ouverte à la place des onctions reçut celles-ci sur le sommet de la tête, sur la poitrine, entre les deux épaules, sur l’épaule droite, sur la gauche, à la jointure du bras droit, à celle du bras gauche. Ces sept onctions appliquées, l’archevêque, aidé des deux évêques de Laon et de Beau vais, referma les petits cordons d’or et de soie des, ouvertures de la chemise et de la camisole. Alors le Roi reçut debout la Tunique, la Dalmatique et le Manteau royal de velours violet fleurdelisé d’or, fourré et bordé d’hermines. Agenouillé de nouveau, il reçut l’onction dans la paume de la main droite et dans la paume de la main gauche. Après avoir mis l’anneau et les gants bénis, Louis XV reçut dans la main droite le sceptre et dans la gauche la main de Justice.

L’intronisation

Le Garde des Sceaux, remplaçant le Chancelier monta à l’autel, du côté de l’évangile, le visage tourné vers la nef et interpella les pairs laïques et ecclésiastiques représentant les douze pairs ; ceux-ci s’approchèrent du Roi et portèrent la main à la couronne de Charlemagne que l’archevêque posait sur la tête de Louis XV. Cela fait, l’archevêque conduisit le Roi par le bras droit jusqu’au trône élevé sur le Jubé, tout s’ébranlant pour le suivre et y prendre place. Quand l’ordre fut rétabli, l’archevêque fit asseoir le Roi, et le tenant toujours par le bras, récita les prières de l’intronisation, quitta sa mitre, s’inclina et baisa son jeune maître en disant : Vivat Rex in aeternum. Tous les pairs ecclésiastiques et laïques firent de même avec les mêmes cérémonies et regagnèrent leurs places. Alors les hérauts d’armes montèrent au Jubé ; on ouvrit les portes de l’église et le peuple s’y engouffra, mêlant ses cris au roulement des tambours et au nasillement des hautbois. Parmi ce vacarme, des paniers s’ouvraient lâchant des oiseaux, des pigeons tournoyant affolés et, au dehors, gardes suisses et gardes françaises, rangés sur le parvis et dans les ruelles voisines, liraient des salves de mousqueterie. Une rumeur immense planait sur la basilique, l’emplissait tout entière, et par-dessus toutes les clameurs perçait le cri de : « Vive le Roi ! »

 

La messe

On distribuait les médailles d’or et d’argent, les cloches sonnaient à toute volée, les cœurs débordaient de joie, de confiance et d’espoir, les voix vibraient à l’unisson de la musique du Roi qui entonnait le Te Deum. Quand il fut fini, la messe commença, le jeune Roi communia et fut reconduit au palais archiépiscopal et s’y déshabilla. Ses gants et sa chemise furent jetés au feu à cause des onctions qu’ils avaient touchées et tout se prépara pour le festin royal.

 

Le festin royal

Cinq tables avaient été dressées ; celle du Roi placée devant la Le festin cheminée sur une estrade élevée de quatre marches et sous un royal dais de velours violet fleurdelisé d’or. Les tables des pairs laïques et ecclésiastiques, des ambassadeurs et des grands officiers s’étendaient à droite et à gauche de la salle[64]. Le duc de Brissac, Grand Pannetier de France fit mettre le couvert du Roi et se rendit au Gobelet d’où il apporta le Cadenas, escorté du Grand Echanson, porteur de la soucoupe, des verres et des carafes, et du Grand Ecuyer Tranchant armé de la cuiller, de la fourchette et du couteau du Roi. Alors le Grand Maître des cérémonies vint avertir que la viande était prête et le Roi donna ordre de servir. Un moment après on apporta le premier service. Hautbois, Trompettes et Flûtes de la Chambre jouaient en tête, suivaient les hérauts d’armes, le Grand Maître et le Maître des cérémonies, les douze maîtres d’hôtel du Roy marchant deux à deux et tenant leurs bâtons, le premier maître d’hôtel, le Grand Maître tenant son bâton, le Grand Pannetier portant la viande du Roi et les gentilshommes servants portant les plats. Le Grand Ecuyer Tranchant rangea les plats sur la table, les découvrit, les essaya, les recouvrit et le prince de Rohan avec tout le cortège partit avertir le Roi qu'il était servi. Tout s’ébranla et les maréchaux, les pairs, les évêques, le Roi, enfin, arrivèrent dans la salle du festin. La couronne de Charlemagne, le sceptre, la main de justice furent déposés sur la table du Roi ; Villars, toujours l’épée haute à la main, fit face au monarque, les autres prirent leurs places et l’archevêque récita le Benedicite. Après le repas il récita les Grâces.

 

Les jours suivants

Le 26, le Roi alla entendre la messe à l’abbaye de Saint-Rémi, dont il vénéra les reliques ; le 27, après la messe chez les Jésuites et le dîner, le Roi se rendit à l’heure de vêpres dans l’église métropolitaine et fut reçu grand maître de l’Ordre du Saint-Esprit. Louis XV ayant quitté son manteau de novice, reçut de l’archevêque le cordon bleu et le grand collier, ensuite il signa le serment de l’Ordre et la profession de foi. Aussitôt après, on lui amena le duc de Chartres et le comte de Charolais et il leur donna le cordon et le collier. Le 28, visite au camp sous Reims et revue des troupes, avec les acclamations et libéralités d’usage en de telles occasions.

Le 29, le Roi se rendit devant la châsse de Saint-Marcoul, entendit une messe basse, communia, déjeuna et toucha plus de deux mille scrofuleux rangés en bel ordre dans les allées de l’abbaye de Saint-Rémy. A chacun il disait : « Dieu te guérisse, le Roi te touche[65]. » L’après-midi, le cardinal de Rohan, Grand Aumônier, alla aux prisons de la ville libérer, au nom du Roi, plus de six cents coupables. Ce fut le dernier épisode du sacre. Dubois, qui en avait été l’ordonnateur, essaya de le représenter comme un événement d’une magnificence inouïe[66] ; Saint-Simon, qui n’y parut pas, avance que « le désordre fut inexprimable[67] », tous deux exagèrent : il s’y trouva peu de monde parce qu’on s’était figuré le contraire, « et cette idée avait empêche bien des gens d’y aller, ce qui fait qu’il y avait bonne place[68] » ; dans la cathédrale il y eut entre quatre à cinq cents places restées vides[69]. Bien des personnages tinrent table ouverte sans avoir lu satisfaction de les voir remplies[70] ; le premier ministre étala un train magnifique : trois chaises, trois carrosses à six chevaux avec cocher, postillon et quatre laquais chacun, mulets, chevaux de selle, chevaux de main harnachés, caparaçonnés de velours cramoisi, maître d’hôtel, officiers, pourvoyeurs, valets de chambre, suisses, courriers, etc.[71]

 

La fête de Villers-Cotterêts

Le 30 octobre, le Roi quitta Reims et coucha à Fismes, passa la fête de la Toussaint à Soissons, où l’évêque prêcha devant lui et « ne fit rien qui vaille. Toute la Cour trouva le sermon bas et ridicule[72]. » Le jour des Morts, Louis XV arriva à Villers-Cotterêts, chez le duc d’Orléans qui s’ingénia à le distraire et à l’amuser : danseurs de corde, coureurs de bague, comédie italienne, illumination, fête villageoise occupèrent cette soirée. Le lendemain chaise au sanglier le matin, chasse au cerf l’après-midi et, dès cinq heures, ouverture d’une foire dans la cour intérieure du château. Des boutiques avaient été adossées aux quatre faces et par-dessus courait une galerie remplie d’orangers et dont la balustrade était garnie d’une infinité de bougies. Une boutique était remplie de toutes sortes de porcelaines du Japon, de la Chine et des Indes en loterie ; en face, un théâtre pour les comédiens italiens ; sur les autres côtés de la cour, un jeu de marionnettes et un saltimbanque, un pharaon et un biribi, deux buffets où on distribuait café, chocolat, glaces et limonades, puis encore un joueur de gobelets, des marchands de bijoux, de rubans, de masques, d’habits de bal, de liqueurs chaudes, de dragées, de pâtisseries et tous ces marchands étaient des acteurs et des actrices de l’Opéra. Chaque boutique était ornée de glaces, éclairée par des girandoles et des lustres Dès que le Roi parut dans la cour chaque boutique s’employa à l’attirer par tous les efforts possibles.

Le Roi regarda un moment les comédiens italiens, s’attarda aux marionnettes, joua le biribi et le pharaon, admira et écouta le saltimbanque qui lui offrit une tablette magique renfermant tous les secrets, qui n'étaient que différents bijoux d’or que le saltimbanque distribua aux princes du sang et aux courtisans. Après un regard donné au Tableau changeant et au joueur de Gobelets, le Roi vint tirer la loterie qui se termina par un divertissement mêlé de danses et de musique. Ensuite on soupa et on distribua « à profusion, à ceux qui se présentaient, tout ce qu’ils pouvaient désirer ». Ainsi s’exprime la Relation de la Gazette[73] et nous savons qu’elle n’exagère rien. Voici ce qu’on consomma à Villers-Cotterêts en moins de quarante-huit heures : 100.809 livres de lard ou saindoux. On employa pour 14.039 liv. 6 sols de marée et poissons d’eau douce pour varier les mots et embellir le service ; 36.464 œufs ; 6.063 liv. de beurre sans y comprendre 600 liv. de beurre de Vannes ; 100.096 liv. de pain ; 80.000 bouteilles de vin de Bourgogne et de Champagne ; 200 muids de vin pour le commun ; 800 bouteilles de vin de Rhin ; 1.400 bouteilles de cidre et de bière d’Angleterre ; 3.000 bouteilles de vins de liqueurs, eau des Barbades, ratafia et autres liqueurs. Il s’est consommé dans les offices 8 milliers de sucre ; 2 milliers de café ; 1.500 liv. pesant de chocolat sans y comprendre le thé ; 65.000 citrons ou oranges douces ; 800 grenades et150.000 poires et pommes de toute espèce ; 16.000 liv. pesant de toutes sortes de confitures ; 2 milliers de dragées fines qui ont été distribuées à la foire ; 4 milliers pesant de bougies. La quantité de pièces de porcelaines fines des Indes, du Japon qui ont servi à dresser le fruit cru et sec pour le dessert monte à 30.000 pièces et 20.000 pièces de cristal ; 115.000 verres ou carafes ; 50.000 pièces de vaisselle d’argent ou de vermeil ; 3.300 nappes pour les tables, les buffets, les offices et 900 douzaines de serviettes ont été aussi employées[74]. »

 

 

 



[1] X à Mme de Balleroy, 3 septembre 1722, dans Les correspondants de la marquise de Balleroy, t. II, p. 484.

[2] Ibid., 3 septembre 1722, op. cit., t. II, p. 484 ; M. Marais, Journal et Mémoires, t. II, p. 338.

[3] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 321, fol. 57 : le P. Daubenton à Dubois, 14 septembre 1722.

[4] Arch. des Aff. Etrang., Rome, t. 641, fol. 236 : Tencin à Dubois, 5 septembre 1722.

[5] Bibl. Mazar., ms. 2354, fol. 431 ; Vie de Dubois.

[6] Arch. des Aff. Etrang., France, Mémoires et Documents, 1252, fol. 39 : Raquet à Dubois, 23 août 1722.

[7] Arch. des Aff. Etrang., France, Mémoires et Documents, 1252, fol. 48 : Mémoire « pour concentrer tout le travail entre les mains de Son Eminence », 23 août 1722.

[8] C. de Sévelinges, op. cit., t. II, à la fin ; J. Buvat, Journal, t. II, p. 513-514.

[9] Bibl. Mazar., ms. 2534, fol. 419 ; Vie de Dubois.

[10] Arch. des Aff. Etrang., France, Mémoires et Documents, t. 1252, fol. 88 : Targny à Dubois, 20 août 1732.

[11] Arch. des Aff. Etrang., France, Mémoires et Documents, t. 1252, fol. 94 : Dubois à Le Blanc, 26 août 1722.

[12] Arch. des Aff. Etrang., France, Mémoires et Documents, t. 491, Mémoire de Le Dran.

[13] Lémontey, Histoire de la Régence, 1832, t. II, p. 76.

[14] Mis de Luchet, Histoire de MM. Pâris, in-8°, Paris, 1776, p. 75.

[15] Arch. des Aff. Etrang., France, Mémoires et Documents, t. 1252, fol. 51.

[16] Bibl. nat., ms. Clairambault, n° 529 : Recueil de Cangé.

[17] Ibid., Mémoire sur les finances en général, Première partie : des Revenus du Roi, p. 300-315.

[18] Saint-Simon, Mémoires, 1858, t. XVII, p. 359-362.

[19] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 339, fol. 341, Dubois à Destouches, 3 octobre 1722.

[20] V. de Seilhac, L'abbé Dubois, t. II, p. 270 ; J. Buvat, Journal, t. II, p. 478 ; X à Mme de Balleroy, 3 avril 1723, dans op. cit., t. II, p. 529.

[21] Barbier, Journal, t. I, p. 238 ; 3 septembre 1722.

[22] Barbier, Journal, t. I, p. 257 ; février 1723.

[23] X à Mme de Balleroy, 23 décembre 1722, dans Les correspondants, etc., t. II, p. 500 ; Lémontey, op. cit., t. II, p. 79, note 1.

[24] Barbier, Journal, t. I, p. 258 ; février 1723 ; Lémontey, Histoire de la Régence, t. II, p. 79, note 1.

[25] Journal du marquis de Calvières, dans E. et J. de Goncourt, Portraits intimes du XVIIIe siècle, p. 14 ; 25 mars 1722 ; M. Marais, op. cit., t. II, p. 266 ; 23 mars 1722.

[26] M. Marais, Journal et Mémoires, t. II, p. 322, août 1722 ; J. Buvat, Journal, t. II, p. 410 ; 1er août 1722.

[27] M. Marais, Journal et Mémoires, t. II, p. 443 ; avril 1723.

[28] Barbier, Journal, t. I, p. 260 ; février 1723.

[29] X à Mme de Balleroy, 23 décembre 1722, dans op. cit., t. II, p. 509 ; M. Marais, op. cit., t. II, p. 306 ; juillet 1722.

[30] Barbier, Journal, t. I, p. 259 ; Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVIII, p. 230 ; M. Marais, op. cit., t. II, p. 370.

[31] Barbier, Journal, t. I, p. 239-241 ; M. Marais, op. cit., t. II, p. 359-360 ; X. à Madame de Balleroy, 18 sept, et oct. 1722, dans op. cit., t. II, p. 487, 491 ; P. Narbonne, Journal, édit. J.-A. Le Roi, 1866, p. 70-72 ; V. Dutilleux, Le fort, le siège de Montreuil et le camp de Porchefontaine, dans Versailles illustré, 1901-1902, t. VI, p. 119-122, 129-134, gravures.

[32] H. Omont, L'Imprimerie du Cabinet du Roi au Château des Tuileries Louis XV (1718-1730), dans Bulletin de la Société de l'Histoire de Paris et de l’Ile-de-France, 1891, t. XVIII, p. 35-45.

[33] Ibid., p. 42-43 ; voir plus haut, t. I, chap. III, du présent ouvrage.

[34] M. Marais, Journal et Mémoires, t. II, p. 443 ; avril 1723 ; ces ordres avaient un insigne, voir Delorme, Médaille de l’ordre de la Mouche à miel (Sceaux 1703), dans Bulletin de la Société archéologique du Midi de la France, 1888, t. I, p. 110-113.

[35] Barbier, Journal, t. I, p. 211-212, avril 1722. Voir plus haut, t. II, p. 502.

[36] M. de Balleroy à Mme de Balleroy, 5 janvier 1721, dans op. cit., t. II, p. 234-235.

[37] M. Marais, op. cit., t. II, p. 427-428, mars 1728. Voir plus haut, t. II, p. 503.

[38] Barbier, op. cit., t. I, p. 212 ; J. Buvat, op. cit., t. I, p. 377 ; avril 1722.

[39] M. Marais, op. cit., t. II, p. 277 ; 21 avril 1722.

[40] Arch. des Aff. Etrang., France, Mémoires et Documents, t. 1202, fol. 179 : Rémond à Dubois, 12 septembre 1721 ; C. Sévelinges, op. cit., t. II. p. 295 ; Ibid., t. 1253, fol. 107 : Rémond à Dubois, 14 octobre 1722 ; C. de Sévelinges, op. cit., t. II, p. 306, 309 ; Ibid., t. 1253, fol. 1 : Hoym à Dubois, 1er octobre 1722.

[41] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 318, fol. 222 : le duc de Maine à Dubois, 10 juin 1722 ; Dubois au duc du Maine, 15 juin 1722.

[42] Arch. des Aff. Etrang., France, t. 1253, fol. 99 : Mémoire lu à S. A. R. le 14 octobre 1722 ; C. de Sévelinges, op. cit., t. II, p. 300, 305 ; Saint-Simon, Mémoires, édit. Chéruel, 1858, t. XIX, p. 396-400.

[43] M. Marais, op. cit., t. II, p. 278-279 : avril 1722.

[44] M. Marais, op. cit., t. II, p. 283 ; avril, mai 1722 ; E. Boutaric, Mémoire de M. le duc de Saint-Simon, présenté à S. A. R. Mgr. le dur d'Orléans l’année du sacre, dans Revue des questions historiques, 1874. XVI, p. 538-542.

[45] M. Marais, op. cit., t. II. p. 287 ; mai 1722 ; J. Buvat, Journal, t. II, p. 419, tous deux lisent la dissertation de l'abbé de Vertot sur la sainte Ampoule ; en outre, on fit paraître : De Camps, Dissertation historique du sacre, in-12 ; L. Ph. Haller, De unctione Remensi, in-4, Trajecti ad Rhenum ; Menin, Traité historique et chronologique du sacre... in-12 ; R[egnault], Histoire des Sacres et couronnements..., in-12, Reims ; quant au grand album publié par A. Dauchet, Le sacre de Louis XV, il ne parut qu’après le sacre, à petit nombre, et son prix élevé le rendit peu abordable au public. H. de Chennevières, La décoration du livre, Le livre du sacre de Louis XV, dans Revue des arts décoratifs, 1886, t. VI, p. 207.

[46] M. Marais, op. cit., t. IT, p. 349 ; septembre 1722.

[47] M. Marais, op. cit., t. II, p. 351 ; septembre 1722 ; X à Mme de Balleroy, 9 octobre 1722, dans op. cit., t. II, p. 492.

[48] Barbier, Journal, t. I, p. 242 ; octobre 1722 ; on donnait alors au « Régent » le sobriquet de « Millionnaire ».

[49] X à Mme de Balleroy, 5 octobre 1722, dans op. cit., t. II, p. 495 ; La Gazette de France, p. 545, dit « cent vingt-cinq marcs ». C’était un ostensoir en vermeil.

[50] X à Mme de Balleroy, 16 octobre 1722, dans op. cit., t. II, p. 494.

[51] X à Mme de Balleroy, 5 octobre 1722, dans op. cit., t. II, p. 492.

[52] J. Buvat, Journal, t. II, p. 418.

[53] Saint-Simon, Mémoires, 1858, t. XIX, p. 404-407.

[54] Ed. de Barthélémy, Notice historique sur le prieuré de Saint-Marcoul de Corbeny, dépendant de l'abbaye de Saint-Rémy de Reims, dans Annales de la Société académique de Saint-Quentin, 1876, 3e série, t. XIII, p. 198-290 ; Ledouble, Notice sur Corbeny, son prieuré et le pèlerinage à Saint-Marcoul, in-8°, Soyons, 1883 ; C. Cerf, Du toucher des écrouelles par les rois de France, dans Travaux de l'Académie de Reims, 1865, t. XLIII, p. 224-288 ; E. Marquigny, L'attouchement du roi de France guérissait-il des écrouelles ? dans Études relig. hist. litt., 1868, 4e série, t. I, p. 374-390.

[55] X à Mme de Balleroy, 16 octobre, dans op. cit., t. II, p. 495.

[56] P.-E. Lémontey, Histoire de la Régence, t. II, p. 74-75.

[57] Relation de la cérémonie du sacre et couronnement du Roy, dans Gazette de France, 1722, n° 47, p. 541-564 ; n° 49, p. 577-599 ; n° 52, p. 624- 636 : n° 54, p. 651-708 (2e édition).

[58] M. Marais, Journal et Mémoires, t. II, p. 365 ; octobre 1722.

[59] Discours fait au Roy lorsque Sa Majesté allant se faire sacrer à Reims et son entrée dans l’église de Soissons, le 20 octobre 1722, dans Recueil de plusieurs pièces d'éloquence présentées à l’Académie française, 1723, t. XXV, p. 145 ; Mercure de France, janvier 1723.

[60] Barbier, Journal, t. I, p. 243 ; octobre 1722.

[61] I Rois, XVI, 13.

[62] Saint-Simon, Mémoires, 1858, t. XIX, p. 408.

[63] M. Marais, op. cit., t. II, p. 364 : « en habit de novice il ressemblait à l’Amour » ; Journal et Mémoires du marquis d’Argenson, édit. Rathery, 1860, t. II, p. 87 : « il ressemblait à l’Amour à son sacre de Reims ».

[64] Saint-Simon, Mémoires, 1858, t. XIX, p. 414-415.

[65] Gazette de France, 1722, p. 697 ; Ch. Cerf, dans Travaux, t. XLIII, p. 228 ; Lémontey, op. cit., t. II, p. 74, note 1, mentionne un individu guéri par l’attouchement du Roi ; d’Argenson, Journal, édit. Rathery, t. I, p. 47, parle d’un habitant d’Avesnes également guéri ; le curé et l’intendant relatèrent ces cas à la Cour où on leur fit tel accueil qui leur apprit à ne pas insister.

[66] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 321, fol. 217 : Dubois à Maulévrier, 26 octobre 1722 ; Ibid., Rome, t. 642, fol. 323 ; Dubois à Tencin, 26 octobre 1722.

[67] Saint-Simon, Mémoires, 1858, t. XIX, p. 407.

[68] Barbier, Journal, t. I, p. 243 ; octobre 1722.

[69] M. Marais, Journal et Mémoires, t. II, p. 365 ; octobre 1722.

[70] Barbier, Journal, t. I, p. 243-244, octobre 1722.

[71] Dubois, Relation du sacre de Louis XV, dans V. de Seilhac, op. cit., t. II, p. 256.

[72] M. Marais, op. cit., t. II, p. 305.

[73] Gazette de France, 1722, p. 703 ; voir aussi Mercure de France, novembre 1722.

[74] H. Dusevel, De l'utilité du Mercure de France pour l’histoire de la Picardie, in-8°, Amiens, 1859, p. 6-7.