HISTOIRE DE LA RÉGENCE PENDANT LA MINORITÉ DE LOUIS XV

TOME TROISIÈME

 

CHAPITRE XLVII. — L'enregistrement de la Déclaration (8 septembre 1718-4 décembre 1720).

 

 

Appel du cardinal de Noailles. — Écho dans les Parlements et le clergé. — Tracasseries. — Pamphlets. — L’évêque Languet de Gergy, de Soissons. — L'archevêque de Mailly, de Reims. — Le Corps de Doctrine. — Le Parlement à Pontoise. — Refus d’enregistrement. — Enregistrement au Grand-Conseil. — Juridiction du Grand-Conseil récusée. — Intervention du président Hénault. — Le Parlement exilé à Blois. — Intervention de Daguesseau. — Le cardinal de Noailles cède. — Visite du Premier Président au Régent. — Retour à Pontoise. — Discussions. — Messe rouge. — L’abbé Pucelle. — Enregistrement.

 

Appel du cardinal de Noailles

La fastidieuse querelle de la Bulle Unigenitus avait pris une ardeur nouvelle après la publication de la lettre Pastoralis officii. Le Régent, excédé de cette dispute, écoutait les cardinaux de Rohan et de Bissy, de préférence au cardinal de Noailles, subissant en ceci comme en tout le reste l’influence de l’abbé Dubois, et ne cachait plus « qu’il voulait se déclarer en faveur des plus forts et qu’il ne voulait pas se brouiller avec le Pape[1] » (10 septembre 1718). Dubois défendait le point de vue des deux cardinaux, tout en avouant « qu’il n’était pas du tout instruit de la matière » et « ne laissait pas d’être à corps perdu contre le cardinal de Noailles. Il allait de porte eh porte crier contre lui, comme contre un hérétique qui troublait mal à propos l’Église et l’État[2]. » Sans s’émouvoir des clabauderies de cet homme, Noailles avertit le Premier Président qu’il allait incessamment publier-son appel, le magistrat l’en félicita et dit que le Parlement était disposé, dès l’apparition du Bref, à appeler comme d’abus au futur concile, et désireux d’agir de concert avec le prélat[3]. Le 16 septembre, le cardinal obtint son audience hebdomadaire du Régent qui lui présenta un nouveau projet du cardinal de Rohan. Noailles, poussé à bout, publia son appel et abandonna le Conseil de Conscience. Il eut la satisfaction d’être suivi par son chapitre à l’unanimité sauf une voix[4] et de recevoir l’adhésion des curés de Paris par un acte qui fut affiché le jour même et annoncé au prône le lendemain dans plusieurs paroisses[5]. Le 26 septembre, la Faculté de théologie s'assembla et cent huit docteurs sur cent dix furent d’avis d’adhérer à l’appel, puis ce fut le défilé des ordres religieux Carmes de la place Maubert, Feuillants, Oratoriens, Bénédictins, Prémontrés et différents chapitres. Le Parlement était très disposé à interjeter appel, lui aussi, au futur concile[6] ; les Universités de Paris, de Reims, de Caen, de Nantes s’associaient à l’appel. Tous ces corps, et les individus qui y formaient la majorité, fulminaient à l’envi.

 

Echo dans le Parlement et le clergé

Le procureur général, Joly de Fleury, s’exprimait avec une âpreté qui se retrouve chez presque tous ceux qui prenaient alors la parole ou la plume : « Après tous les ménagements qu’on a eus pour le Pape, disait-il, et pour tout ce qui est émané de la Cour de Rome depuis la Constitution, il n’est plus permis de garder le silence... On voit aisément les véritables motifs qui ont donné lieu à une pareille condamnation. Le prétexte du défaut d’acceptation de la Constitution n’est pas le seul que le Pape ait eu en vue. Cette idée d’infaillibilité que la Cour de Rome recherchait depuis quelques siècles à établir, lui fait regarder avec horreur les voies les plus canoniques. Sa délicatesse sur ce point, va jusqu’à ne pouvoir tolérer qu’on ait recours à lui pour lui demander des explications sur les Décrets... Avant que cette opinion d’infaillibilité fût née, on voyait sans étonnement d’illustres évêques refuser de se soumettre aux décisions des Papes, mais disposés en même temps de marquer leur soumission et leur obéissance à tout ce qui serait jugé par l’Église universelle. On voyait les plus grands évêques s’adresser aux Papes pour les prier d’expliquer leurs décrets. On voyait les plus saints Papes, les Pélage et les Grégoire répondre favorablement à ces demandes... La Cour de Rome ayant voulu introduire l’infaillibilité du Pape a tâché de détruire la force de ces exemples par une conduite et par des exemples contraires. Ses démarches ont été si loin qu’il a fallu l’autorité des conciles de Constance et de Bâle pour opposer une digue à de pareilles prétentions ; mais ils n’ont pas été capables de détromper la Cour de Rome. Elle s’est portée jusqu’à vouloir révoquer en doute l’autorité de ces conciles... » A l’arrêt rendu, en conséquence de ces principes, par le Parlement de Paris du 5 octobre[7], faisaient écho les arrêts des Parlements Rouen (13 octobre), d’Aix (21 oct.), de Metz (25 oct.), de Grenoble (26 oct.), de Rennes (4 novembre), de Bordeaux (15 nov.), de Toulouse (3 décembre). De même les curés se groupaient pour faire appel ; on imprima plus tard des recueils de lettres[8], on répandit les requêtes présentées pour demander à être reçus appelants[9] et dans le public on se disait : « Voilà un schisme en France ! » et « sans la politique du Régent qui, pour le bien de l’État, appréhende les brouilleries, nous serions séparés de la communion romaine par rapport à la Constitution. Et que sait-on ? Si de fil en aiguille la séparation ne serait pas entière[10]. »

Croyant n’avoir plus à garder aucune mesure, le cardinal de Noailles avait fait afficher et mettre en vente son acte d’appel ; le premier jour il se vendit dix mille exemplaires[11]. Mais ce succès eut son revers. Le parti constitutionnaire ne se laissait pas décourager. Le P. Simon Gourdan, chanoine de Saint-Victor de Paris, en grande réputation de savoir et de piété, écrivit lettre sur lettre au cardinal, allant jusqu’à lui dire : « Je doute si dans ces conjonctures si fâcheuses, plusieurs saints évêques de l’antiquité, n’auraient pas quitté leurs sièges pour faire cesser les troubles de l’Église[12]. »

 

Tracasseries

Le complot de Cellamare valut un court répit à Noailles, qu’il fut impossible d’y impliquer, ni aucun Janséniste, de l’aveu du Régent, qui laissa entendre qu’il n’en était pas de même des Constitutionnaires[13]. Cet événement les calma, mais pour peu de temps. Mais alors s’ouvraient avec l’année 1719 des préoccupations si nouvelles et si différentes de celles des années précédentes que la dispute religieuse cesse d’occuper l’opinion publique entièrement attachée à l’agiotage. Les conférences continuent, mais l’attention s’en est détournée ; le conflit se rapetisse, se racornit pour ainsi dire à la taille d’une chicane inextricable où » les magistrats et les ecclésiastiques s’égosillent dans une polémique sans issue possible. Des violences mesquines illustrent cette discussion chétive ; ce sont moins des violences que des tracasseries et, pour tout dire d'un mot, des « niches ». Le jour de la Fête-Dieu, le curé de la paroisse de Saint-Louis à Grenoble ? veut pénétrer avec la procession dans l’église des Jésuites, dont il trouve la porte fermée ,il réclame l’entrée, on s’obstine à la lui refuser, il se plaint au Régent qui blâme les religieux et leur impose d’aller présenter des excuses à l’évêque[14] ; l’évêque de Boulogne interdit au P. Gardien des Capucins la célébration de la messe, le religieux désobéit et, pour sa peine, est exilé[15] ; à Toulon, on affiche sur la porte de l’église des Récollets « qu’on n’y recevra aucun prêtre pour dire la messe ayant appelé de la Constitution[16] ». Le reste n’est ni plus intéressant ni plus audacieux ; ce sont des Carmélites qui ferment l’accès de leur église à des Oratoriens[17], ou bien des Parlements qui font lacérer et brûler des mandements[18].

 

Pamphlets

Plus dignes d’attention sont quelques actes comme l’arrêt du Parlement du 14 janvier 1719 condamnant divers écrits instructifs sur l’état des esprits. Un de ces pamphlets attaquait la déclaration de 1682, contestait le « dogme nouveau » de la supériorité des conciles sur le Saint-Siège ; un autre revendiquait l’infaillibilité du Pape « dans les décisions dogmatiques » et comparait le refus de recevoir la bulle à la négation de la divinité de Jésus-Christ ; un autre encore défendait les thèses opposées, notamment la suprématie des conciles qu’on ne saurait mieux comparer, était-il dit, qu’aux États-Généraux qui sont en possession de tous les droits de la souveraineté lorsqu’ils sont assemblés. Maxime singulièrement audacieuse et que n’eussent pas admises les théoriciens de l’autorité royale, même pour porter un coup hardi à la puissance pontificale. On devait s’attendre à voir l’abbé de Saint-Pierre prendre parti dans cette contestation ; il se prononçait dans une Instruction familière, et c’était lui qui invoquait l’analogie entre le concile général et les Etats-Généraux, ce qui lui attirait cette réfutation catégorique de Guillaume de Lamoignon : « Les Etats-Généraux n’ont que la voie de la remontrance et de la très humble supplication. Le Roi défère à leurs doléances et à leurs prières suivant les règles de sa prudence et de sa justice. S’il était obligé de leur accorder toutes leurs demandes, il cesserait d’être roi[19]. » On ne pouvait nier que des idées étaient en marche et il eût été permis de douter de l’efficacité des obstacles qu’on élèverait devant elles pour les arrêter.

 

L’évêque Languet

Le 5 juin 1719, une Déclaration royale appliquait une fois de plus la tactique favorite de Régent ; elle imposait un nouveau silence d’une année sur les disputes théologiques, avec la promesse d‘arriver, pendant ce laps de temps à un accommodement. Les Appelants ne voyaient là qu’un artifice pour les empêcher de pousser à bout les Constitutionnaires qui, de leur côté, s’indignaient d’avoir à subir un règlement qui les mettait sur le même rang que leurs contradicteurs. Languet de Gergy, évêque de Soissons, un des plus remuants de son parti et dont la bruyante orthodoxie escomptait pour récompense le cardinalat, se plaignait publiquement parce que, à l’en croire, « le silence prescrit dans les causes qui intéressaient la foi, n’avait jamais été utile qu’aux ennemis de la foi », et il introduisit une distinction inattendue et qui fit scandale entre les lois promulguées pendant la minorité des rois et les volontés affirmées par le monarque majeur. Son écrit fut condamné à être lacéré et brûlé par le bourreau au pied du grand escalier du Palais[20]. On signifia cette condamnation à l’évêque, biographe de la sœur visitandine Marie Alacoque, il répondit aux deux notaires envoyés vers lui qu’« il était moins touché de cet arrêt que de la mort d’un faisan qu’il venait de perdre ». L’arrêt portait que le délinquant aurait à s’avouer l’auteur de la lettre condamnée ; il fit plus que de l’avouer, il s’en glorifia et cela lui attira une amende de dix mille livres ; mais le Régent empêcha l’exécution, pour ne pas, disait-il, lui procurer un chapeau de cardinal[21]. Toute la Cour s’était égayée d’une anecdote dont Languet était le héros. Il était à table chez le ministre Le Blanc lorsque celui-ci arriva dîner, fort en retard, et s’excusa auprès des convives par les mesures qu’avait rendues nécessaires la promotion des dix cardinaux. Chacun s’empressa de lui demander le nom des nouveaux promus, il les nomma ; au nom de Mailly, de Reims, l’évêque de Soissons le fit répéter, les yeux hors de la tête, puis se la prenant à deux mains, s’écria de toute sa force : « Ah ! il m’a pris mon chapeau[22] ! »

 

Mailly

Languet et Mailly rivalisaient d’ambition et faisaient assaut de pétulance. « J’avais regardé l’évêque de Soissons comme un fort brave homme, écrit la vieille Madame, je l’ai connu lorsqu’il était encore abbé, mais l’ambition de devenir cardinal rend fous lu plupart des évêques ; il n’en est aucun qui ne pense que plus il fera d’impertinences à l’égard de mon fils et en faveur de la Constitution, plus il se mettra dans les bonnes grâces de la Cour de Rome et deviendra ainsi cardinal. » L’archevêque de Reims, rival heureux de son premier suffragant, n’avait guère d’autres titres à faire valoir pour revêtir la pourpre romaine. Mis dans l’Église malgré lui et avec les plus cuisants regrets, il ne prit d’ecclésiastique que ce qu’il n’en put laisser et sut tirer parti de toutes les circonstances pour se pousser. Fort pauvre, il se tira de misère, puis d’ennui, en devenant aumônier du Roi, et s’éleva, à force de bras, sur le siège d’Arles. S’y trouvant à proximité d’Avignon, il fit toutes sortes d’avances au vice-légat Gualterio qui s’y morfondait dans l’espoir de la nonciature de France, gage du cardinalat. La liaison tourna à l’amitié intime, Gualterio eut sa nonciature et Mailly se crut tout permis. Il se découvrit à Rome des amis et en prit prétexte d’écrire au Pape, de qui il reçut des reliques et un bref. C’était alors un crime pour un évêque d’écrire à Rome sans une permission expresse qui passait par le ministre des Affaires Étrangères. Louis XIV, instruit de cette incartade, faillit faire un éclat, Mailly ne fut sauvé que par l'entremise de Mme de Maintenon et de Gualterio, il se tint coi mais l’affaire lui fut utile à Rome. Lorsque la querelle de la Bulle eut amené le relâchement des anciennes règles sur la correspondance épiscopale avec Rome, Mailly ne se fit pas faute d’écrire dans le style le plus outré, réclama les rigueurs les plus extrêmes et aurait pu faire figure d’inquisiteur si ses mésaventures ne lui avaient retiré l’autorité d’un docteur. Dans une lettre adressée à ses collègues de l’épiscopat, il qualifiait les appelants de nouveaux « Luther, sectateurs d’Arius, de Nestorius, d’Eutychès », les dénonçait pour « païens et publicains », repoussait toute conciliation et proposait de réduire le gouvernement par la famine à une adhésion complète à la Constitution ; il suffirait de supprimer le « don gratuit » que votait chaque assemblée du clergé. Ce factum fut poursuivi, condamné par le Parlement et brûlé au pied de l'escalier du Palais. Mailly exulta, fonda une messe en action de grâces d’avoir été jugé digne de participer aux opprobres de Jésus-Christ. Il espérait que le Parlement l’attaquerait là-dessus, mais on pensa le mieux punir en le laissant en paix.- Cela ne faisait pas son affaire, il se retourna vers Rome et pria le Pape de lui faire présent de ses « homélies ». C’était le faible de Clément XI de se croire grand orateur et latiniste impeccable. Il goûta la flatterie et, malgré l’exclusion donnée à Mailly par le gouvernement du Régent, lui donna le chapeau dans la promotion des dix.

Le Régent sentit la provocation, s’emporta et fit défense à Mailly de porter le titre ni aucun insigne de sa dignité. En même temps il lui envoya un enseigné aux gardes, Villeron, avec ordre de ne pas quitter Reims. Mailly, averti par son neveu La Vrillière, se montra fort souple lorsqu’il rencontra sur le chemin, près de Paris, l’enseigne Villeron. Ayant reçu l’ordre de rétrograder, ils vinrent tous deux coucher à Soissons. Le lendemain, Mailly s’apprêtait de si bonne grâce à regagner Reims, que l’officier jugea superflu de l’y conduire et reprit la route de Paris. Aussitôt Mailly le suivit à distance et vint, le soir même, se blottir à Paris. L’abbé de la Fare, son grand vicaire, alla trouver Dubois et fut reçu comme un goujat. La Fare laissa dire et répliqua qu’un ministre tel que Dubois devait être cardinal, et pour cela ne pas contrarier le Pape avec lequel il lui faudrait compter. Dubois sentit l’habileté de ce conseil et puisqu’il fallait une médiation il s’en réserva le mérite. Le lendemain, il rappela l’abbé de la Fare, affecta un accueil plus doux, mais la Fare brusqua l’affaire :

— « Monsieur, dit-il, je vais vous parler franchement, je n’ai aucun ressentiment de la manière dont vous me traitâtes hier ; je vis bien que vous parliez en ministre. Vous autres, grands politiques, vous ne pouvez pas faire autrement ; mais vous n’êtes sûrement pas fâché de faire quelque chose d’agréable au Pape dont vous aurez incessamment besoin car on voit bien que vous ne pouvez pas manquer d’avoir bientôt le chapeau.

— « Vous êtes trop clairvoyant, l’abbé, répliqua Dubois, il faut bien que j’avoue que vous m’avez deviné, laissez-moi ramener M. le Régent ; mandez seulement à votre archevêque de se rendre secrètement ici, et de s’y tenir caché, jusqu’à ce que je l'avertisse, cela ne sera pas long. »

Mailly attendait le signal, se laissa introduire au Palais-Royal par les derrières, fit sa soumission au Régent et regagna Reims, où il ne prendrait point la qualité de cardinal ni aucune marque de cette dignité et ne devait signer, dans le royaume, que « l’archevêque de Reims », mais, à l’étranger, il pourrait signer le « cardinal de Mailly ». Rentré à Reims, Mailly se claquemura, s’interdit toute fonction publique où il ne se fut avoué qu’archevêque et languit plus de trois mois sans autre consolation que de tirer de sa poche la calotte rouge, de la regarder, de l’admirer, de la baiser, de l’essayer devant un miroir, mourant d’impatience de la montrer en public. Il se croyait oublié, mais l’abbé de la Fare veillait à Paris et quand il apprit que le cardinal de Noailles avait fait agréer le Corps de doctrine par les cardinaux de Rohan et de Bissy, il songea que l’approbation de Mailly serait d’autant plus précieuse qu’on le savait fort mal avec Noailles. On recherchait les signatures épiscopales, l’abbé fit savoir que celle de Mailly dépendait de la permission de porter les insignes cardinalices. En outre, on envoyait des ecclésiastiques du second ordre solliciter les signatures, il suggéra d’envoyer le Corps de doctrine à Reims par le premier suffragant Languet, de Soissons. Celui-ci ne put s’y dérober, il lui fallut subir la mortification et, le 17 mars, on sut à la Cour la mission de Languet. Dangeau ignore qu’il emportait deux lettres cachetées du Régent. Dans la première, le prince ordonnait à l’archevêque de signer sur le champ sous peine d’exil et de renoncement au chapeau ; dans la deuxième, il l’invitait à signer, mais le laissait libre et lui annonçait qu’il pouvait venir recevoir la calotte des mains du Roi. Mailly signa le Corps de doctrine, montra la deuxième lettre à tout le monde, supprima la première et le 19 mars « porta sa calotte au Roi qui la lui mit sur la tête[23] ».

 

Le Corps de doctrine

Le Corps de doctrine avait été élaboré, dès les premiers mois de l’année 1720, par le cardinal de Noailles, l’évêque de Clermont, Massillon, et le P. de la Tour supérieur général de la Congrégation des pères de l'Oratoire. Cet écrit contenait des explications sur les propositions condamnées et devait être soumis à la discussion des cardinaux et des évêques constitutionnaires dans l’espoir de terminer la querelle par un accommodement qui rétablît la paix dans l’Église[24]. Cet accommodement fut signé le 13 mars au Palais-Royal par les cardinaux de Noailles, de Rohan, de Bissy, de Gesvres et de Mailly et par plusieurs archevêques et évêques[25]. Deux jours après circulait une « formule envoyée aux appelants de la Constitution Unigenitus pour les engager à persister dans leur appel[26] », quelque explication et quelque corps de doctrine qu’on pût joindre à la Bulle et de quelque expression qu’on pût se servir pour les réunir. Sans s’émouvoir de cette protestation, Noailles tenait la paix pour rétablie et annonçait aux curés du diocèse que « par un bon Corps de doctrine et par une acceptation relative, on avait pris toutes les précautions que l’on pourrait désirer pour mettre la vérité à couvert, aussi bien que les libertés de l’Église gallicane... Il n’y a plus, ajoutait-il, qu’à prier Dieu qu’il bénisse les bonnes intentions de ceux qui n’ont eu d’autre vue que d’assurer pleinement la vérité et la paix[27] ». Malgré ces bonnes paroles, le cardinal de Noailles dut bientôt s’avouer qu’il n’était ni approuvé ni suivi par son parti. Le premier jour d’avril, il se rendit à la Sorbonne pour la prima mensis et fut étonné de voir que pas un des docteurs de cette maison n’était venu à sa rencontre ni ne l’avait accompagné en sortant[28]. La nouvelle de cet accommodement ne causa pas moins de surprise dans les provinces[29], d’ailleurs pendant que Colbert, de Montpellier, branlait la tête, déclarait la pièce « bien éloignée d’être telle qu’on la pouvait désirer », Languet, de Soissons, s’écriait : « La citadelle est prise par ruse, par mine et par assaut. » On disputait sur le nombre, l’autorité, la sincérité des signatures, et les brochures de courier[30], les lettres épiscopales de se croiser[31], les mandements de se multiplier. Pendant trois mois le Corps de doctrine a tous les honneurs de la dispute, sa célébrité fait tort au Système ; mais l’opposition est presque générale et l'hostilité des partis plus envenimée. Les évêques de Montpellier, de Boulogne, de Marseille, de Mirepoix, de Pamiers, de Lectoure, de Nîmes, de Saintes, de Verdun, d’Acqs repoussent le Corps de doctrine[32], le synode des curés et le chapitre de Paris lui font mauvais accueil[33], la Sorbonne représente au cardinal combien vivement elle désire qu’il n’autorise point cet écrit[34]. Surtout on relève les contradictions du cardinal de Noailles, sa faiblesse, et on réduit son acceptation à cette formule : « Nous acceptons avec respect l'erreur relativement à la vérité dont nous ne nous soucions guères[35]. » Celui, dit-on, qui conduit le cardinal dans cet accommodement est l’abbé Couët, qu’il a fait son grand vicaire, homme savant, dévot de la dévotion qui s’accommode au temps, et que l’on a vu dans un parti tout à fait contraire à la Constitution. Le cardinal ne sait plus où il en est. On lui a promis des lettres patentes d’une certaine façon. On les veut expédier d’une autre, et on dit que si quelque chose peut excuser l’accommodement, c’est que la Constitution étant une affaire d’intrigue, on la pouvait dénouer par une autre intrigue[36]. »

 

Le Parlement à Pontoise

Nonobstant tout ce qu’on pouvait dire et le décri où tombait le Corps de doctrine, Dubois continuait à y voir la paix de l’Église et le gage de la pourpre attendue. Après avoir exilé le Parlement à Pontoise, il ne doutait pas d’en obtenir l’enregistrement pur et simple de la bulle Unigenitus. Le premier acte du Parlement laissa voir qu’on n’obtiendrait rien sans peine[37], ces gens, disait-on, sont plus incorrigibles que jamais, dépensent comme les agioteurs, font une chère terrible ; leur punition, au lieu de les corriger, ne fait que les confirmer dans leur entêtement. Ils sont incompréhensibles. Barbier et Marais nous disent, en effet, qu’on fait à Pontoise une dépense considérable. Le Premier Président y est avec toute sa famille, logé dans la maison du duc d’Albret qui est très belle et a un jardin magnifique. Il tient une table de trente à cinquante couverts qui n’est pas délicate à son ordinaire, mais on y a, en quantité, poulets, poulardes, chapons, aloyaux, gigots et autres viandes. On joue un lansquenet aux vingt sous sans passer au-delà et quantité de quadrilles qui est un hombre à quatre[38].

 

Refus d’enregistrement

Les lettres patentes du 4 août prescrivaient au Parlement l’enregistrement de la Bulle et la cassation des appels faits à son sujet[39]. Cette déclaration souleva une protestation presque unanime. Les magistrats riaient sous cape à la vue du gouvernement obligé de reconnaître que le Parlement n’est pas uniquement fait pour juger les procès[40]. La Compagnie, suivant l’usage pratiqué dans les affaires difficiles, avant d’enregistrer la Déclaration ou de la rejeter, nomma des commissaires pour l’examiner et lui présenter un rapport ; mais dans le temps où elle allait être enregistrée avec des modifications, La Vrillière vint à Pontoise la retirer des mains du Parlement (7 septembre). Hénault se fait probablement illusion lorsqu’il croit que les modifications suggérées par le Parlement « auraient peut-être concilié les deux partis ». Les esprits étaient montés au point que les pires sottises se débitaient comme des sentences. L’évêque Belzunce imputait aux appelants la peste de Marseille[41] et l’archevêque d’Arles, Forbin-Janson, dans un mandement contre les sauterelles attribuait ce fléau à la résistance de ceux qui repoussaient la Constitution ; à l’en croire, ces insectes, par leurs sauts et leurs « intercadences successives » marquaient l’inquiétude de ceux qui ne se fixent pas aux sentiments du pape et s’abandonnent à tout vent de doctrine[42].

 

Enregistrement an Grand Conseil

Le 23 septembre, le Régent fit enregistrer la Déclaration du Roi sur la Constitution portant que 1° la Constitution Unigenitus serait observée par tout le royaume avec défenses aux Universités e ! Facultés de théologie de rien écrire, distribuer ni produire qui y fut contraire, non plus qu’a l'Instruction pastorale ; 2° il était défendu d’appeler de cette Constitution au futur concile et tous les appels passés étaient réputés nuls et de nul effet, sans préjudice des maximes gallicanes ; 3° on déférait aux archevêques et évêques connaissance et jugement de la doctrine avec injonction aux Parlements, Chambres et juridictions de s’y conformer ; 4° on interdisait de s’attaquer par les vocables de schismatique, janséniste, novateur, hérétique. Suivant les anciens arrêts, la Déclaration renouvelait tous les délits et arrêts contre le jansénisme et enjoignait aux évêques de se comporter avec modération dans son exécution. « La lecture de cette Déclaration si surprenante où le Roi met la main à l’encensoir, juge l’acceptation des évêques uniforme et décide les appels, qui ne peuvent être jugés que par le concile, en disait plus que toutes les réflexions que l’on pouvait faire[43] », disait l’avocat Marais qui concluait : « Le pyrrhonisme avec le schisme vont entrer dans l’Église. »

« Le Régent, voyant donc qu’il n’y avait rien à faire au Parlement[44] » se résolut « à un coup d’éclat et d’autorité auquel on ne s’attendait pas. Avec tous les princes du sang et le comte de Toulouse, il alla voir la séance du Grand Conseil. Le Chancelier y était venu présider. On y fit venir treize ducs et pairs, cinq maréchaux de France, cinq conseillers d’État, quatre maîtres des requêtes, et ils étaient dix-huit du Grand Conseil, en comptant le Premier Président. La Compagnie assemblée, le procureur général, M. Hénault, présenta une lettre de jussion pour délibérer de nouveau, qui fut enregistrée, ensuite il laissa sur le bureau ses conclusions pour l’enregistrement de la Déclaration et fit un discours éloquent sur la dignité de l’assemblée, sur les lumières du Régent, et sur l’espérance que les obscurités allaient être dissipées. Le Chancelier prit les voix et tous opinèrent à l'enregistrement pur et simple. Le Chancelier et le Premier président ont été du même avis, ainsi que les officiers et conseillers du-Grand-Conseil. Quelques-uns proposèrent des modifications, le Régent dit qu’il n’était plus temps, puisqu’ils n’avaient pas fait de remontrances. Trois conseillers furent d’avis des remontrances, mais revinrent à l’avis des autres. Enfin les voix ayant été comptées, il s’en est trouvé trente-trois pour l’enregistrement pur et simple contre seize. Tout cela s'était passé à huis-clos depuis neuf heures et demie jusqu’à midi et demi. Ensuite, on ouvrit la grande audience et le procureur général lut en public la Déclaration et les lettres patentes, puis le Chancelier prononça l'arrêt. C’était fini. Paris apprit avec surprise cette forme nouvelle de séance, d’enregistrement et de jugement[45].

 

Juridiction du Grand Conseil récusée

La Déclaration fut criée et débitée dans les rues avec l’enregistrement[46] ; reste à savoir, disait Barbier, si le pape sera content d’un pareil enregistrement qui ne vaut rien, le Grand Conseil n’étant ni en possession ni en droit de le faire[47]. Néanmoins tout parut tranquille de la part de la Cour, lorsque le 4 novembre, on apprit à Pontoise que le Régent méditait un parti violent contre le Parlement. Le lendemain, le président de Nassigny alla dire à M. de Mesme que le seul remède était dans quelques démarches du cardinal de Noailles auprès du Régent pour lui faire entendre que la publication de son mandement ne dépendait pas absolument de l’enregistrement de Parlement. L’accommodement projeté entre les évêques supposait une condition préalable : c’est que l’archevêque de Paris donnerait son mandement par lequel il acceptait la constitution Unigenitus en y joignant des explications ; sans ce mandement, point d’accommodement, les deux partis allaient reprendre les armes et combattre tout de nouveau. Le cardinal ne voulait donner ce mandement qu’à condition que la Déclaration serait enregistrée au Parlement, car pour l’enregistrement au Grand Conseil il n’en faisait point de cas. Le Pape non plus, qui ne voyait là qu’une entreprise que les esprits ne pouvaient ratifier parce qu’elle était étrangère aux formes du droit.

Dubois sentit qu’il ne triompherait pas de cette double opposition et se vit obligé d’abandonner l’enregistrement fait au Grand Conseil ; c’était chose malaisée puisqu’il n’y avait décidé le Régent qu’en le persuadant que cette formalité terminerait la querelle religieuse. Mais rien ne pouvait rebuter Dubois du moment qu’il s’agissait pour lui d’obtenir le chapeau. Il décida le Régent à réclamer avec instance au cardinal le mandement promis. « Que le Parlement enregistre et je donnerai mon mandement, répondit Noailles, que V.A.R. mande le Premier Président, qu’elle convienne avec lui de lui l'envoyer la Déclaration, que le Parlement la révise et je ferai ce que j’ai promis. » Alors le Régent se fâcha, il pensa qu’on voulait le contrecarrer, que c’était un concert entre le cardinal et le Parlement et qu’on voulait profiter du désir qu’il avait de la publication du mandement pour le forcer à rappeler cette Compagnie. « Le Parlement est lié avec le cardinal, disait-il, s’ils sont si fort d’accord, je n’ai qu’à menacer de perdre le Parlement, j’alarmerai le cardinal ; ils ont cru m’embarrasser en s’unissant, ils m’ouvrent une voie pour réussir, c’est un côté par où attaquer le cardinal. » Ce fut alors que la perte du Parlement fut résolue. Dès qu’il en fut instruit le Président de Mesme promit de s’entremettre auprès du cardinal ; le président Hénault, également averti, se chargea d’agir de son côté.

 

Intervention du président Hénault

Son embarras était grand ; il ne connaissait pas assez le Chancelier ni ses intentions pour l’aller voir ; ayant entendu dire que l’abbé Menguy tenait les fils d’une sorte de négociation, il l’alla voir. Menguy était un homme qui ignorait le repos, on eût dit qu’il était toujours en présence de son génie : ses yeux brillants annonçaient l’éloquence qu’il conduisait à son gré, tant les idées, tours, expressions lui étaient soumis, associant la force à la grâce. A ce beau talent il joignait des mœurs irréprochables. Hénault le trouva qui dînait chez le cardinal de Noailles, ils déplorèrent ensemble la déchéance de la Compagnie qui ne tenait plus à rien dans le royaume, l’indifférence du peuple pour l’exil de ses magistrats, l’hostilité de Law qui allait jusqu’à dire qu’un roi de France ne serait jamais vraiment roi, s'il ne supprimait tous les Parlements du royaume. Cependant, disait Menguy, tout n’était pas perdu, et il s’avisa que l’accommodement projeté dépendait du mandement du cardinal qu’ils allèrent voir sur le champ. Noailles dit à Hénault : « Secourez-moi ou vous êtes perdus. »

Hénault répondit que tous les ministres ne leur étaient pas hostiles. Dubois était intéressé à rendre les magistrats nécessaires, un autre — qu’il ne nomma point, c’était Le Blanc — avait sondé le gouffre creusé par Law et voulait renverser cet homme pernicieux à l’État, mais n’osait présenter cette vue au Régent de qui la prévention pour Law était un enchantement que rien ne pouvait dissiper. Il fallait donc perdre l’Écossais sans paraître l’attaquer et le seul moyen c’était le retour du Parlement. Hénault alla entretenir Le Blanc qui, à son tour, entretint Dubois, et déclara que toute l’affaire se réduisait à faire donner le mandement au cardinal, à renvoyer la Déclaration au Parlement et à l’y faire enregistrer ; le mandement était un préalable nécessaire sans lequel le Régent n’entendrait à rien, qu’ainsi il fallait y déterminer Son Éminence. Hénault et Menguy y allèrent sur l’heure, nommèrent cette fois M. Le Blanc, dirent à quoi tenait le salut de la Compagnie qui leur importait moins que celui de l’État prêt à périr. Le cardinal pouvait tout sauver en donnant son mandement. Il répondit qu’il ne s’y refusait pas, mais que ce mandement serait inutile pour la paix et déshonorant pour lui-même sans l’enregistrement du Parlement : « Êtes- vous sûrs, demanda-t-il, de cet enregistrement. » Nous n’eûmes garde de lui répondre rien, dit Hénault ; nous lui dîmes seulement qu’il pouvait voir le Premier Président et celui-ci voir le Régent. — « Mais qu’il vienne donc, interrompit le cardinal, dans quatre jours c’est la Saint-Martin, vous devez faire votre rentrée à Pontoise, les moments sont chers et si on a du mal à vous faire, on ne voudra pas attendre que vous soyez rassemblés. » Mais les magistrats souhaitaient que le Premier Président reçut l’ordre du Régent de faire cette démarche. Le cardinal répondit qu’il avait plusieurs fois essayé sans y réussir. M. le Régent croit, dit-il, qu’on veut tirer au bâton avec lui ; néanmoins il promit de lui en reparler, tandis que Hénault et Menguy prenaient la décision d’aller trouver le Premier Président à Pontoise, le péril était si prochain qu’il n était guère permis d’hésiter.

Le 7 novembre, Hénault et Menguy partirent pour Pontoise ou devait arriver en même temps qu’eux un ordre du Régent au Premier Président de venir le visiter au Palais-Royal. Cependant cet ordre tardait et n’arrivait point, le chancelier Daguesseau s’était refusé à l’expédier, mais M. de Mesme avait résolu de venir sans être mandé. Le dimanche 10, à onze heures, le Premier Président se rendit au Palais-Royal, il trouva l’antichambre pleine des ennemis du Parlement qui attendaient avec crainte et impatience l’issue de cette entrevue. Le Régent reçut fort bien le Premier Président ; comme ils étaient ensemble, M. Le Blanc les interrompit pour engager le Régent à suspendre ses ordres contre le Parlement. Le prince acquiesça. Après un quart d’heure de conversation, le duc d’Orléans congédia le Premier Président chargé de sa part d’aller prier le cardinal de donner son mandement. Il y alla et en sortit disant que le cardinal ne donnerait son mandement que quand le Parlement l’aurait enregistré ; M. de Mesme envoya cette réponse au Régent, prêt à tous les événements. Cette lettre fut remise à la sortie du conseil de Régence, lue et brûlée, ensuite M. de La Vrillière fut appelé pour recevoir les ordres.

 

Le Parlement exilé à Blois

Le lendemain matin. Il novembre, jour de la rentrée, chaque membre du Parlement reçut vers neuf heures une lettre de cachet sur ce modèle :

« A M. Hénault, président en ma cour de Parlement séant à Pontoise.

« Monsieur Hénault ayant pour de bonnes considérations résolu de transférer ma cour de Parlement séant à Pontoise en ma ville de Blois, je vous fais cette lettre de l’avis de mon oncle le duc d’Orléans Régent, pour vous enjoindre et ordonner de vous y transporter, toutes affaires cessantes, pour assister à l’ouverture de mon Parlement qui s’y fera le deux décembre prochain, pour cette année seulement et sans tirer à conséquence et pour y être instruit de mes intentions et y rendre la justice votre ordinaire en vertu de la déclaration qui y sera envoyée, vous faisant cependant défense de vous assembler nulle part ailleurs, sous quelque prétexte que ce soit, sous peine de désobéissance et de privation de votre charge, et la présente n'étant à autre fin, je prie Dieu qu’il vous ait, Monsieur Hénault, en sa sainte garde.»

Cet exil du Parlement à Blois quelque rigoureux et quelqu’extraordinaire qu’il fût n’était que le commencement des maux qu’on préparait à la Compagnie, et le projet était de rendre l’administration de la justice tellement difficile du fait de cet exil nécessaire qu’on serait amené à prononcer la suppression. Pendant toute la journée du 11, M. le cardinal avait été assailli de gens qui essayaient de le persuader de donner son mandement afin de donner la paix à l’Église et de sauver l’État qui allait devenir la proie de Law. Le mardi matin, 12 novembre, le Premier Président monta en carrosse.

 

Intervention de Daguesseau

Cependant le Chancelier Daguesseau, qui, jusque là, avait paru regarder avec indifférence tout ce qui arrivait au Parlement, parut se réveiller à la nouvelle de l’exil à Blois. En l’allant chercher à Fresne, Law avait, fait rejaillir sur ce grand magistrat une partie de l’indignation qui l’atteignait lui-même, les honnêtes gens s’attristaient, ses dernier amis s’obstinaient à la défendre encore : « Il n’est pas temps qu’il se déclare, il attend un moment plus favorable ; s’il s’opposait trop fortement, il courrait risque de sa perte et d’être renvoyé encore une fois, et il ne veut pas laisser occuper sa place par quelque homme qui serait absolument vendu à Law ; voyez ce qui est arrivé au garde des sceaux d’Argenson pour avoir voulu le perdre, il s’est perdu lui-même. On ne sait pas les coups que M. Daguesseau pare tous les jours, c’est le sublime de la vertu d’immoler jusqu’à sa réputation au bien public. » Quoiqu’il en soit, le mardi 12, il alla trouver le Régent et lui dit qu’il avait dissimulé jusqu’à présent tous les malheurs dont il avait été témoin et quelquefois même l’instrument, mais que le mal était enfin venu à son comble, que l’État perdu et la justice détruite l’avertissaient de se retirer et que, n’étant point en situation de faire le bien ni de réparer le mal, il ne lui restait plus qu’à remettre les sceaux, et qu’ainsi, il suppliait Son Altesse Royale de vouloir bien recevoir sa démission. »

« Va te faire f… avec tes sceaux », répondit le Régent ; ce qui était une manière assez nouvelle de laisser les sceaux à un chancelier. Pendant que l’intrigue cherchait à exploiter cette situation, et de longtemps intrigue de Cour n’avait été plus vive, tout ce qui, de près ou de loin, appartenait à la magistrature et au clergé prenait parti dans la querelle. Les avocats n’étaient pas les moins courageux et les plus silencieux ; pas un d’eux n’avait paru à la chambre des vacations, pas un à Pontoise et pas un n’irait à Blois. « Gloire immortelle pour notre ordre, que cette conduite, et qui marque bien la liberté d’une si belle profession » s’écrie Mathieu Marais.

 

Le cardinal de Noailles cède

Au milieu de cette effervescence, on parlait toujours de réconciliation. Le cardinal mollissait. Le 14 novembre, il fut au Palais-Royal et donna parole au Régent de lui remettre son mandement et de le publier dans deux jours. Le 15, Villars s’en mêla, on prit confiance, on se dit : « Il a la main bonne pour les grandes affaires, témoins Denain et Rastadt » ; et le bruit courut que l’affaire était accommodée. Le 16, au matin, Noailles se rendit au Louvre et au Palais-Royal, portant son mandement imprimé, qu’il avait préalablement fait lire au Premier Président. La condescendance du prélat fit effet sur le cœur du Régent, plusieurs lui remontraient dans quelle fâcheuse entreprise il était engagé, il songea dès lors à réparer le mal qu’il avait fait. La difficulté consistait à annuler l’ordre d’exil à Blois sans que le Parlement eut demandé grâce. Le Blanc trouva un expédient. Il rencontra le Premier Président dans une maison tierce et le ministre conseilla au magistrat de faire-visite le lendemain au Palais-Royal avec quelques personnes de sa Compagnie. En conséquence, le soir, le Premier Président envoya avertir plusieurs de ces messieurs de se trouver le lendemain 17, à dix heures, chez lui, en robe, pour aller au Palais-Royal prendre congé du Régent. Il était convenu de ce qu’il dirait, et les uns appelaient cette démarche faiblesse, les autres nécessités ; même certains allaient jus- qu’a dire que la translation de Blois était un arrangement pris avec les chefs du Parlement qui avaient promis d’enregistrer s’ils étaient contraints.

 

Visite du Premier Président au Régent

Le 17, le Premier Président avec vingt-un présidents et conseillers entrèrent en carrosse dans la cour du Palais-Royal et furent Régent introduits sans attendre dans la petite galerie où les attendait le Régent qui les reçut avec toutes les grâces dont les princes sont capables quand ils veulent plaire. Il répondit au compliment du Premier Président qui annonçait le départ pour Blois, malgré le grave préjudice qui devait en résulter pour tous ceux qui avaient à obtenir une sentence. « Je n’avais pas prévu tous ces inconvénients, répondit le prince, quand je me suis déterminé à vous envoyer à Blois et c’est avec peine que j’avais pris ce parti ; mais on a tenu dans le Parlement des conversations si extraordinaires qu’il ne m’a pas été possible de les souffrir ; je sais bien que cela ne regarde point tout le Parlement et que cela ne tombe que sur quelques-uns de ses membres, aussi je vous assure que je ne veux point de mal à la Compagnie en général, et M. le Duc pense comme moi ; mais je suis fâché contre ceux qui tiennent de très mauvais discours. Je sais bien que cela ne regarde aucun de ceux qui sont ici présents, mais on s’est très mal comporté dans les dernières assemblées et surtout dans l’affaire de la Constitution. Cette affaire est enfin terminée, car j’ai le mandement ; le Roi veut donc bien vous renvoyer à Pontoise où je vous enverrai la Déclaration pour l’enregistrer convenablement et je prendrai pour cela avec vous des mesures au moyen desquelles j’espère que tout se passera bien. »

Le Régent demanda encore dans quel temps le Parlement avait coutume de rentrer.

— « C’est le 22 de ce mois, lui répondit le Premier Président.

— « Eh bien, dit le prince à La Vrillière, faites expédier des ordres pour Pontoise et envoyez-les à M. le Premier Président cette après-dîner. » La Vrillière dit qu’il expédierait ceux-là plus volontiers qu’il n’avait fait les autres. M. de Mesme salua le Régent et en s’en allant se retourna du côté de M. le Duc et lui dit qu’ils se flattaient qu’il s’accordait avec M. le Régent sur les sentiments qu’il avait pour la Compagnie. M. le Duc répondit qu’il avait toujours parlé au Régent sur ce ton-là.

 

Retour à Pontoise

Le 19, toutes les lettres de cachet pour le retour du Parlement a Pontoise furent expédiées au Premier Président qui les fit remettre à chacun en particulier par les buvetiers de chaque chambre. De son côté, le Chancelier gardait les sceaux. Sa vertu, disait-on au Palais, s’est ressuscitée. Ayant dit qu’on lui couperait le poing plutôt que de lui faire sceller la translation à Blois, le Régent répliqua qu’il la lui ferait sceller ou qu’il l’enverrait à la Bastille. A quoi Daguesseau répondit : « J’irais pour obéir à vos ordres ; mais s’il m’est permis d’instruire VotreAltesse, je lui dirai que V. A. ferait en cela ce qui n’est ni de son pouvoir ni de son devoir et qu’elle n’aurait point d’exemple dans la monarchie. »

— « Allez donc au diable ! » cria d’Orléans, et ils se séparèrent. « On en ferait de bons contes, disait Mathieu Marais, si on avait envie de rire. » Pendant qu’ils conversaient de la sorte les colporteurs criaient dans les rues de Paris le mandement du cardinal, et les libelles pullulaient.

 

Discussion

Il n’était plus question que d’enregistrer la Déclaration, il s’en fallait de beaucoup qu’on y pût compter, vu l’esprit régnant parmi les conseillers. Les uns étaient partisans de la conciliation, les autres ne voyaient pour eux de carrière ni dans l’érudition, ni dans l'éloquence, mais dans une fausse fermeté qui attirait sur eux l’attention car la Compagnie aimait tout ce qui sortait des voies ordinaires et il suffisait qu’on y proposât un parti singulier pour qu’il fut adopté avec ardeur. Un des plus signalés parmi les boutefeux était l’abbé Pucelle, capable de former un grand parti qui l’aurait suivi aveuglément. Aussi eut-on bien de la peine à surmonter cette opposition.

 

Messe rouge

On célébra la messe rouge le 25 novembre à Pontoise, il s’y trouva cent cinquante conseillers et huit présidents à mortier, ce qui était sans exemple ; le Premier Président invita tout ce monde et le dîner coûta quatorze mille francs. Après le dîner, il dit aux convives que le Parlement rentrerait à huitaine et qu’on s’assemblerait le 2 décembre pour l’affaire de la Déclaration. Ce fut une semaine remplie de démarches et de négociations pour obtenir quelques modifications favorables aux appelants. Dubois se donnait, dit-il, tous les mouvements imaginables pour que la Déclaration fut enregistrée avec des modifications satisfaisantes, il servait d’intermédiaire entre Noailles d’une part, Rohan et Bissy d’autre part et faisait agréer par le Régent les modifications convenues. Tout ceci se faisait en secret et ce ne fut que le dimanche 1erdécembre qu'on fut d’accord. Le lendemain, le Parlement se réunit à Pontoise et entendit un long discours du Premier Président, reçu avec un applaudissement général, ensuite on lut la lettre de cachet renvoyant la Déclaration par devant le Parlement et on nomma des commissaires ; la décision étant remise au mercredi 4.

 

L’abbé Pucelle

La journée du 3 se passa en conférences. L’abbé Pucelle disait et répétait incessamment : « Mais que vont devenir les appelants si nous les abandonnons ? Le gouvernement est contre eux ; on les désarme, ils n’ont plus de défense, la Déclaration n'est pas assez claire en leur faveur. Laisserons-nous périr tant de gens de bien pour avoir eu la généreuse fermeté de s’opposer aux entreprises de Rome, et oublierons-nous que nous avons appelé comme eux ? » On lui répondit à cela que les modifications les mettaient à couvert, que le seul risque qu’ils pussent courir c’était que le Parlement n’enregistrât pas, parce que le Grand Conseil, devenu juge de cette affaire ne pouvait juger que conformément à la déclaration qu’il avait enregistrée purement et simplement, que si cette Déclaration ne lui paraissait pas pourvoir suffisamment à la sûreté des appelants, il fallait donc se presser de l’expliquer suffisamment en leur faveur et y ajouter de quoi les défendre à l’avenir. Tout le monde entoura l’abbé Pucelle, on le conjura de ne point s’opposer à la consommation d'un ouvrage que le public attendait avec impatience, que tous les intérêts étaient réunis dans cette occasion, que non seulement on donnait la paix à l’Église, mais qu’on ôtait tout prétexte à la prolongation du séjour à Pontoise et que le retour à Paris changerait la face des choses et forcerait Law à partir.

Enfin l’abbé Pucelle se rendit, les huit commissaires vinrent en avertir ceux qui les attendaient. Le mercredi 4, la Compagnie assemblée, le rapporteur donna lecture de l’enregistrement : « Registrées, ouï, ce requérant, le procureur général du Roi, pour être exécutées aux mêmes clauses et conditions portées par l'arrêt d'enregistrement, lettres patentes de 1714, et conformément aux règles de l’Église et aux maximes du royaume sur l’autorité de l’Église, sur te pouvoir et la juridiction des évêques, sur l’acceptation des bulles des Papes, et sur les appels au futur concile, lesquelles règles et maximes demeureront dans Heur forme et vertu. Et pour être la cessation de toutes poursuites portées par la présente déclaration, pour raison des appels interjetés, inviolablement observée.

 

Enregistrement

« En Parlement, séant à Pontoise, le 4 décembre 1720. »

Ainsi fut sauvé l'État prêt à périr, dit le président Hénault, et ainsi fut rouvert le chemin de Paris devant les parlementaires dont la pénitence prenait fin. Il s’en fallait de beaucoup que la satisfaction fut complète et générale. Marais dénonçait cet enregistrement « en termes suspendus, équivoques, disant tout et ne disant rien, et qui veulent autant dire que si on n’enregistrait point ». Barbier disait que « c’était n’avoir rien fait, jeu que tout cela. » Le vrai et le seul triomphateur était le Premier Président dont l’autorité avait tout conduit. A quelques jours de là, il maria sa fille au duc de Lorges et le Régent envoya à la mariée de Pontoise un collier de perles et une croix de diamants de vingt mille écus pour présent de noces. Comme tout le monde était à souper, Séchelles apporta la nouvelle que le samedi matin 14, Law était parti pour Guermande et que la Compagnie rentrerait le lundi suivant[48].

 

 

 



[1] Dorsanne, Journal concernant tout ce qui s'est passé à Rome et en France, in-4°, 1753, t. I, p. 426.

[2] Ibid., t. I, p. 427.

[3] Ibid., t. I, p. 428.

[4] Ibid., t. I, p. 430.

[5] Ibid., t. I, p. 430.

[6] Mathieu Marais, Journal et Mémoires, t. I, p. 426 ; 5 octobre.

[7] Arrêt du Parlement de Paris appelant d’abus un décret intitulé : Sanctissimi Domini nostri Clementis papae XI, litterae ad universos Christi fideles datae adversus eos qui Constitutioni Sanctitatis suae quae incipit Unigenitus... debitam obœdientam praestare hactenus recusaverunt aut in posterum recusaverint.

[8] Témoignage des Curés de la Ville et du Diocèse de Paris.

[9] Dorsanne, Journal, t. I, p. 433.

[10] Gazette de la Régence, p. 286-287 ; 23 septembre 1718, p. 287-288 ; 3 octobre ; p. 288, 10 octobre.

[11] Buvat, Journal, t. I, p. 333 ; 24 septembre 1718.

[12] Villefore, Anecdotes, t. III, p. 231-232.

[13] Dorsanne, Journal, t. I, p. 445.

[14] J. Buvat, Journal, t. I, p. 399-400, juin 1719.

[15] J. Buvat, Journal, t. I, p. 401.

[16] J. Buvat, Journal, t. I, p. 406, juillet 1719.

[17] Buvat, Journal, t. I, p. 455.

[18] Buvat, Journal, t. I, p. 403, 410.

[19] Arrêt du Parlement, du 14 janvier 1719, condamnant au feu l'Instruction familière sur la soumission duc à la Constitution Unigenitus, et supprimant le Traité du schisme par Longueval, ainsi que l’Instruction pour calmer les scrupules que l'on s'efforce de jeter dans les consciences timorées au sujet de la Constitution Unigenitus et de l'appel qui en a été interjeté.

[20] Arrêt du Parlement du 9 août 1719 condamnant au feu une Lettre de Mgr l'évêque de Soissons à S. À. R. Mgr le duc d'Orléans, Régent du royaume, au sujet de l'arrêt rendu au Parlement le 7 juin contre quelques écrits de cet évêque.

[21] Villefore, Anecdotes ou mémoires secrets sur la Constitution Unigenitus. A Trévoux, 1733, t. III, p. 224-235.

[22] Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVIII, p. 176.

[23] Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVIII, p. 172-177 ; Dangeau, Journal, t. XVIII, p. 180, 185, 188, 193, 252, 253 ; 11, 19, 22,31 décembre 1719 ; 17, 19 mars 1720 ; Madame à la raugrave Louise, 7 octobre 1719, dans Correspondance, édit. G. Brunet, t. II, p. 165 ; Saint-Simon, Mémoires, édit Chéruel, 1858, t. XVII, p. 325-349.

[24] Buvat, Journal, t. II, p. 46.

[25] Buvat, Journal, t. II, p. 51, 67-68 ; M. Marais, Journal et Mémoires, t. I, p. 267.

[26] Buvat, Journal, t. II, p. 53-55 ; 15 mars 1720.

[27] Buvat, Journal, t. II, p. 55-56 : Lettre circulaire de M. le cardinal de Noailles à MM. les curés de son diocèse, 18 mars 1720.

[28] Buvat, Journal, t. II, p. 67.

[29] M. Marais, Journal et Mémoires, t. I, p. 242 ; 4 avril 1720.

[30] Lettre d'un chanoine à un homme retiré du monde sur l’accommodement au sujet de la Constitution, 15 pages ; Réflexions succinctes sur l'acceptation au sujet de la Constitution, 16 pages ; Réflexions succinctes sur l'accommodement ; Observations sur la lettre du cardinal à ses curés ; Remarques sur le dispositif dressé pour l'acceptation de la bulle ; Explications sur la bulle Unigenitus, 33 pages ; Mémoires sur la paix de l'Eglise.

[31] Lettre de MMgrs de Montpellier et de Boulogne à M. le Card. de Noailles, 12 mars 1720 ; Lettre circulaire des [mêmes] aux évêques appelants en envoyant la lettre précédente ; Lettre de M. le cardinal de Rohan à M. l’évêque de Langres ; Lettre de Mgr de Blois à M. Le Robien, grand vic. de Vannes, 14 mars 1720.

[32] M. Marais, Journal et Mémoires, t. I, p. 244, 245, 251, 254, 255, 257.

[33] M. Marais, op. cit., t. I, p. 244, 256.

[34] M. Marais, op. cit., t. I, p. 251, 260 ; 15 avril, 10 juin 1720.

[35] M. Marais, op. cit., t. I, p. 267 ; juin 1720.

[36] M. Marais, op. cit., t. I, p. 267, 269 ; juin 1720.

[37] M. Marais, op. cit., t. I, p. 352-354 : Déclaration royale du 21 juillet portant translation du Parlement à Pontoise et l'Enregistrement.

[38] M. Marais, Journal et Mémoires, t. I, p. 358, 362 ; Barbier, Journal, t. I, p. 56 ; Buvat, Journal, t. II, p. 119 : « Les procureurs n’y firent pas un long séjour pour le prix excessif du logement, des vivres et des denrées, le pain y ayant valu vingt sols la livre les trois premiers jours du marché, et le moindre vin jusqu’à vingt-cinq sols la pinte. »

[39] Isambert, Recueil des anciennes lois françaises, t. XXI, p. 187, 188 ; L'exil du Parlement à Pontoise (1720). Journal inédit du Président Hénault, dans Souvenirs et Mémoires, 1899, t. II, p. 504-523 ; t. III, p. 145-165, 308- 337 ; L. Perey, [= L. Herpin]. Le Président Hénault et Mme du Deffand, La Cour du Régent, La Cour de Louis XV et de Marie Leczinska, in-8°, Paris, 1893, p. 35-69 (abrégé avec beaucoup de fautes).

[40] M. Marais, Journal et Mémoires, t. I, p. 363 ; 5 août 1720.

[41] M. Marais, op. cit., t. I, p. 369 ; 9 août 1720.

[42] M. Marais, op. cit., t. I, p. 290 ; 15 juin 1720.

[43] M. Marais, op. cit., t. I, p. 444.

[44] Barbier, Journal, t. I, p. 73 ; septembre 1720.

[45] M. Marais, op. cit., t. I, p. 444-446 ; 23 septembre 1720.

[46] M. Marais, op. cit., t. I, p. 448 ; 24 septembre 1720.

[47] Barbier, Journal, t. I, p. 74 ; septembre 1720.

[48] Journal rédigé par M. le Président Hénault de ce qui s’est passé au Parlement et à la Cour à l’occasion de l’enregistrement de la Déclaration de loi du 4 août 1720 touchant la Conciliation des évêques au sujet de la Constitution Unigenitus depuis le commencement de novembre 1720 jusqu’au retour du Parlement à Paris, dans Souvenirs et Mémoires, 1899, t. II, p. 504- 523 ; t. III, p. 145-165, 308-337. Sur ce manuscrit et d’autres relations, voir M. Marais, Journal et Mémoires, t. I, p. 484, note 1 ; Ibid., t. I, p. 477 à 504 ; t. II, p. 3-6. Barbier, Journal, t. I, p. 81-88 ; A. de Boislisle, signale une dissertation dans Le séjour du Parlement à Pontoise en 1720, dans Revue des Sociétés savantes des départements, 1880, 7e série, t. I, p. 101.