HISTOIRE DE LA RÉGENCE PENDANT LA MINORITÉ DE LOUIS XV

TOME DEUXIÈME

 

CHAPITRE XXI. — La Quadruple-Alliance (19 juin — 2 août 1718).

 

 

Dubois mis en quarantaine. — Manœuvre de d'Huxelles. — Schaub quitte Paris. — Convention nouvelle. — Voyage de Stanhope à Paris. — Réception par le Régent. — Entretien prive. — Objection du Régent. — Conférence et accord. — Activité d'Alberoni. — Dérobade de d'Huxelles. — Retour offensif des Anglais. Sommation à d'Huxelles, qui se soumet. Le lendemain, il refuse de nouveau. — Embarras du Régent. — Recours au Conseil de Régence — Préparatifs. — Séance du 17 juillet. — Signatures. — Signatures à Londres, le 2 août. — Traité entre l'Empereur et le roi d'Espagne. — Traité entre l'Empereur et Victor-Amédée. — Traité de la Quadruple Alliance. — Les articles secrets. — Le Protocole. — Utilité du traité. — L'opinion publique. — Gratifications. — Prévisions et retour de Dubois.

 

Dubois mis en quarantaine

Ce jeu de bascule ne pouvait s'éterniser. Dubois était mis en Dubois quarantaine et réduit à l'impuissance et à l'inutilité. Le commis quarantaine Pecquet prenait la revanche des bureaux sur l'intrus qui leur avait passé sur le corps « M. l'abbé Dubois, disait-il, ne manque pas de lumières ; il en a plus que tout autre, et ce que M. le maréchal d'Huxelles lui manderait ne ferait que troubler son repos ; et si cela se trouvait contraire à ce qu'il pense, il n'en ferait ni plus ni moins : ainsi cela ne servirait de rien[1]. » Traité avec cette désinvolture, Dubois ne pouvait compter sur quelques amis tièdes ou pétulants, mais sans réelle influence sur le Régent, comme Saint-Simon, alors enthousiaste de l'abbé dont, à l'entendre, il « adorait la besogne[2] ». Il devenait nécessaire de frapper un coup décisif.

 

Manœuvre de d'Huxelles

Schaub, arrivé le 18 juin à Paris, visita lord Stair qui lui montra l'ordre du roi Georges de faire agréer au Régent les modifications au traité introduites à Vienne. Dès leur première audience, Stair et Schaub obtinrent l'acquiescement du prince à la plupart des changements, sauf sur l’article des garnisons de sûreté dans les duchés. Après une longue discussion, le duc d’Orléans proposa d’y employer des troupes neutres procurées par le roi d’Angleterre. Stair fut flatté de cette proposition, il le fut moins d’apprendre que les ministres français substituaient aux Anglais des Suisses. Lorsque Stair et Schaub obtinrent leur deuxième audience du Régent, ils rencontrèrent le maréchal d’Huxelles bourré de contre-remarques renchérissant sur celles d’Angleterre, mais présentant des exigences nouvelles que Vienne n’accepterait jamais. On s’entendit néanmoins ou bien on fit semblant de s’entendre et les ministres anglais prièrent le Régent de leur désigner quelqu’un avec qui ajuster le projet, dans les termes dont ils venaient de convenir avec lui, il les adressa à Pecquet, secrétaire du Conseil des Affaires étrangères et promit de donner ensuite des ordres à Dubois. Ils attendirent en vain la visite de Pecquet et apprirent bientôt qu’on envoyait les contre-remarques de d’Huxelles à Londres, à l'abbé Dubois, comme un ultimatum pour y conformer le projet de traité. Sans hésitation ni discussion, Schaub partit pour Londres.

 

Schaub quitte Paris

Auparavant, il fallait prendre congé du Régent. Le prince, averti de la présence des deux Anglais, prolongea dans son cabinet des audiences insignifiantes ; et, lorsqu’au bout de deux heures, il vint prendre son chocolat dans le cercle de la Cour, il les vit avec tout le monde et se retira sans avoir ouvert la bouche sur les affaires. Comme eux-mêmes s’éloignaient, il leur envoya demander s’ils n’avaient rien à lui dire, et ils se rapprochèrent. II ne fallait pas se séparer, leur dit-il, sans un mot d’explication. Eux se plaignirent du procédé qui dévoyait la négociation vers Dubois dans le temps où ils croyaient avoir tout terminé avec le prince lui-même ; en conséquence, Schaub ne pouvait mieux faire que d’aller informer le Roi de l’état des affaires et des vrais sentiments de S. A. R. Le Régent répondit qu’en effet il n’y avait plus rien qui dût le retenir. Il offrit de leur donner copie des apostilles qu’il avait mises de sa main aux contre-remarques, dans le sens qu’on avait arrêté ensemble. Lord Stair dit qu’il suffisait que l’abbé les eut de sa main, qu’elles ne leur serviraient de rien à eux puisqu’ils savaient déjà en quoi elles devaient consister. Ils lui représentèrent avec force à quel but tendaient les manœuvres de ses ministres ; que, de la manière dont on s’y prenait ; le traité ne pouvait plus guère réussir que par une espèce de miracle. En tout cas, ni le Roi leur maître, ni l’Empereur n’auraient rien à se reprocher. Le Régent répliqua qu’il espérait qu’on ne lui reprocherait rien non plus. « Non pas à V.A.R., dirent-ils, mais à vos ministres, lesquels ayant d’autres vues qu’elles agissent aussi différemment ; et nous n’avons à nous plaindre d’autre chose, si ce n’est que V.A.R. les laisse faire. » Le Régent prit la défense du maréchal, et après divers autres propos de cette nature, il les congédia avec des compliments. Son attitude leur parut très suspecte, celle d’un homme songeant à dénouer poliment l’alliance[3].

Tel fut le récit qu’à Londres, Schaub fit à Dubois réduit au désespoir et qui exhalait ses plaintes sans ménagement[4].

 

Convention nouvelle

En cette détresse, il ne restait qu’une ressource. « Il faudrait, avait écrit Nocé, quelque démarche du roi de la Grande-Bretagne qui donnât plus de confiance et de certitude, au cas que l’Empereur ne veuille pas accepter, qu’on resterait intimement uni avec l’Angleterre et la Hollande pour maintenir la paix de l’Europe[5]. » Telle était bien l’opinion des Anglais et de Stanhope avec qui Dubois établit les articles d’une convention particulière que résumât en quatre articles l’essentiel de la Quadruple Alliance : 1° Renonciation de Charles VI au trône d’Espagne ; 2° Renonciation de l’Espagne à la Sardaigne en faveur de l’Empereur qui la céderait contre la Sicile, au duc de Savoie ; 3° Cession éventuelle de Parme et de la Toscane aux enfants d’Elisabeth Farnèse, garantie par des garnisons neutres, suisses ; 4° un délai de trois mois à Philippe V et à l’Autriche pour accéder à ces conditions volontairement. Enfin, entente étroite de l’Angleterre et de la France, pour y contraindre celle des deux puissances qui refuserait[6]. Tout ceci se ramenait à une alliance étroite entre la France et l’Angleterre, ou plus exactement entre Philippe d’Orléans et Georges Ier, et c’est à l’instant où elle se négociait que Dubois, sentant ses adversaires victorieux, courut à Hampton Court et pria « comme à genoux », le Roi qu’il envoyât lord Stanhope à Paris. L’abbé triompha et, sur-le-champ, reprit espoir. Dès le 22 juin, il avertit Nocé, Chavigny, les priant de taire ce voyage « de peur que la cabale et M. de Torcy ne le détournent[7] ».

 

Voyage de Stanhope à Paris

Le 22 juin également, Stanhope informa Stair que devant le péril de voir le Régent s’engager avec Philippe V et Victor-Amédée, leur roi l’envoyait avec pleins pouvoirs pour ajuster le plan en conformité des changements qu’on a fait à Londres et pour régler l’article des garnisons (à mettre dans les duchés). M. de Pendtenriedter en était instruit et en cas de succès, le roi Georges jugeait bon que Stanhope poussât jusqu’en Espagne. « Car, disait-il, si je suis autorisé à parler au nom de Sa Majesté avec l'appui de sa flotte et si j’ai permission de produire l’instrument signé du Régent, on pense ici que le cardinal Alberoni, en dépit de toutes ses rodomontades, réfléchira plus sérieusement et en viendra à des mesures plus prudentes et plus pacifiques que celles qu’il se propose actuellement. » Il fallait, jusque-là, tenir bon et compter sans réserve sur Dubois. « Je regarde comme évident, disait encore Stanhope, d’après toute cette conduite de l’abbé, qu’il est parfaitement sincère, car il se met tout-à-fait à notre discrétion ; attendu que le moindre indice que l’on donnerait au Régent de la méfiance qu’il a conçue de son maître, et de sa franchise à nous mettre au courant et à nous avertir, le ruinerait totalement. Cette manière d’agir lui donne droit, selon moi, à toute la réciprocité possible de confiance de notre part ; elle a été pour nous un motif de lui communiquer très librement toute notre pensée, et j’ose dire qu’il n’en a pas fait d’autre usage que d’avancer au mieux de son habileté la conclusion de cet ouvrage. » Jusqu’à l’arrivée de Stanhope, il était recommandé à Stair de ne pas ralentir ses efforts auprès du Régent, car « un prince de ce caractère peut être, un certain jour, en humeur de conclure, ce qu’on aurait ensuite grand’peine à obtenir de lui, une fois l’occasion échappée[8]. »

Les instructions données à Stair lui prescrivirent de prendre comme base le projet porté à Vienne par Schaub au printemps, d’accepter l’article des garnisons suisses et d’offrir des troupes anglaises jusqu’à ce que les premières fussent au complet. On écartait les autres modifications émanées du cabinet de Vienne. Par-dessus tout il devait éviter de rompre la négociation[9].

Stanhope accompagné de Schaub, quitta Londres le 25 juin porteur de cette lettre du Roi : « Mon frère et cousin, ayant trouvé à propos, dans cette conjecture délicate, de faire partir incessamment le comte Stanhope, un de mes principaux secrétaires d’État, je l’ai chargé de vous renouveler, de la manière la plus forte, les assurances de mon amitié et de mon estime très parfaite pour votre personne. Il vous exposera plus au long avec le comte Stair, le sujet de son voyage et mes sentiments pour la grande affaire à laquelle nous travaillons ensemble pour le bien de l’Europe. Je me persuade que vous apporterez toutes les facilités possibles à l’accomplissement d’un ouvrage si nécessaire et je vous prie d’ajouter une entière foi à ce que ledit comte vous dira de ma part, et principalement aux assurances que je lui ai ordonné de vous faire de mon amitié constante et de la sincérité très particulière de mes sentiments pour vous[10]. » Le Régent manifesta la joie la plus vive et Chavigny s’empressa d’écrire à Dubois : « Le voyage de M. Stanhope est notre salut. Son Altesse Royale est ravie de le voir arriver ; il lui est échappé plus de dix fois des exclamations de joie[11]. »

 

Réception par le Régent

A Calais, les deux voyageurs trouvèrent une lettre de lord Stair très alarmante. Deux postes plus loin, à Marquise, autre lettre de Stair annonçant le revirement du prince, son désir de traiter et son mécontentement des retards apportés par Dubois à propos des duchés. Le 29 juin, Stanhope et Schaub étaient reçus au Palais-Royal avec de grandes démonstrations de joie[12]. Stanhope remit au Régent une lettre dans laquelle le roi de la Grande-Bretagne, prêtant aux querelles parlementaires dont Paris était le théâtre, une gravité que les idées anglaises attachent au nom de Parlement, et croyant son allié en péril lui offrait tous les secours d’hommes et d’argent nécessaires en ces circonstances[13].

Dès le premier entretien tout paraissait aplani. Cependant lorsque Stair et Stanhope revinrent au Palais-Royal avec les changements dont on était tombé d’accord, ils s’aperçurent que le prince recommençait son manège. Le parti « vieille Cour » ne renonçait pas à la lutte, mais sa tactique consistait à fuir Stanhope afin de retarder la discussion. M. de Châteauneuf, maintenu par d’Huxelles à son poste de la Haye avait monté la tête des Hollandais assez pour qu’on put invoquer leur attitude pour éloigner la signature du traité et gagner un nouveau délai de deux mois environ[14]. Mais Stanhope n’était pas homme à attendre ni à reculer. Le Régent affecta de lui faire comprendre qu’il ne voulait pas être talonné de cette façon. Il l’admit au cercle de la Cour, l’entretint de sujets indifférents plus d’une heure et demie et ne l’emmena pas dans son cabinet. Toutefois, en se retirant, il donna rendez-vous pour le lendemain.

 

Entretien privé

Nocé avait introduit Stanhope dans les petits cabinets du Régent à raison de leur amitié nouée jadis en Espagne, mais cette faveur ressemblait à un traquenard. Le prince se ménageait ainsi un moyen d’exclure lord Stair, pour qui il ne pouvait être question d’une si étroite intimité, toutefois Stanhope se tenait sur ses gardes. « Cette affectation de vouloir entamer une négociation séparée avec moi, et plusieurs autres finesses que l’on remarque font que je me défierai extrêmement d’eux jusqu’à ce que l’affaire soit entièrement finie. En attendant, il faut s’accommoder à leur manière[15]. » Dans l’après-midi du 1er juillet, Nocé introduisit Stanhope chez le Régent par les derrières et un escalier dérobé. Le duc d’Orléans confirma les décisions prises dans le premier entretien, relativement aux changements à introduire dans le traité et aux garnisons neutres. Il refusa de donner l’ordre à l’abbé Dubois de signer dès que M. de Pendtenriedter serait prêt, sans s’attarder à attendre les Hollandais dont la temporisation légendaire, exploitée par M. de Châteauneuf en une sorte de méfiance jalouse, rendait l’accession au traité extrêmement douteuse[16]. Néanmoins, après quelques jours, le Régent passa outre.

Une autre question s’était élevée à propos des garnisons neutres dans les duchés italiens. Le ministre autrichien à Paris, M. de Koenigsegg, tenu au courant des pourparlers par les Anglais, avait accepté en principe et les changements et les garnisons neutres, sauf approbation de sa Cour. Comme, de jour en jour, on introduisait des prétentions nouvelles et qu’on n’en pouvait préjuger le terme, il demanda qu’on prît l’engagement de n’apporter plus aucun changement au texte du traité et de n’en laisser introduire aucun par l’Espagne.

 

Objection du Régent

Il y eut dès lors en discussion deux sortes d’instruments diplomatiques : d’une part, les articles publiés et secrets de la future Quadruple-Alliance, réglant les questions territoriales que tenait en suspens dans la Méditerranée le furieux et cauteleux antagonisme de l’Autriche, de l’Espagne et de la Savoie ; d’autre part, une convention préparatoire, dite aussi Ultimatum, dans le sens requis par l'envoyé impérial, c’est-à-dire excluant toute modification ultérieure au traité principal, et constituant immédiatement entre la France et l’Angleterre un pacte défensif, à étendre à la Hollande et à l’Autriche, à imposer à l’Espagne et à la Savoie, fallût-il en venir à la guerre. Le maréchal d’Huxelles s’y opposa de toutes ses forces et fit composer deux mémoires. Le Régent en avait un dans la poche de son habit ; on lui apporta l’autre tandis qu'il s’entretenait avec Stanhope. Parmi beaucoup de critiques, il s’en trouvait une qu’on ne pouvait esquiver : Si la France et l’Angleterre signaient sur-le-champ elles pourraient être obligées à la guerre contre l’Espagne, tandis que l’Empereur ne serait pas lié. Or si l’Empereur ne signait pas, les hostilités survenant entre la flotte anglaise et les Espagnols ne résulteraient pas de la Quadruple-Alliance mais du traité de Westminster (5 juin 1716), auquel la France n’était d’aucune façon intéressée. Stanhope reconnut la justesse de l’observation et, quelques jours plus tard, y donna satisfaction. Au cours de la conversation, Stanhope rappela que la flotte anglaise n’avait été envoyée dans la Méditerranée que pour satisfaire aux instances de Nancré et de l’abbé Dubois. Le Régent en convint[17].

 

Conférence et accord

Cette conversation fut suivie, le même jour, d’une conférence officielle où le Régent fut accompagné par d’Huxelles et Pecquet. De son côté, Stanhope était flanqué de Stair et de Schaub. On s’entendit à merveille. Le maréchal et Pecquet approuvèrent tout, louèrent tout, applaudirent tout[18]. « Tout ce que nous proposions fut agréé après quelques légères disputes, écrit Schaub, et le maréchal nous comble d’applaudissements[19]. » Il arriva même que dans ces contestations tout amicales, le Régent soutint contre ses propres ministres « avec netteté et solidité » les sentiments du roi d’Angleterre. Toutes choses se trouvèrent « ajustées » dit Stanhope, l’Ultimatum aussi bien que le traité. Pecquet et Schaub reçurent mission d’insérer les modifications adoptées et de procéder à la mise au net pour l’envoyer à Dubois avec l’ordre de signer dès que Pendtenriedter consentirait, lui aussi, à signer.

 

Activité d’Alberoni

Bien qu’on renonçât à compter les revirements d’idées du duc d'Orléans, celui-ci semblait le plus grave de tous parce qu'il décidait la partie si disputée. Les nouvelles arrivées d'Espagne avaient eu ce résultat. Dès le 9 mai, Alberoni avait annoncé ses projets au duc de Parme : « Trois cents voiles se verraient dans la Méditerranée, trente-trois mille hommes de troupe, cent pièces de vingt-quatre et vingt-quatre canons de campagne, vingt mille quintaux de poudre, cent mille balles, soixante-dix mille instruments à remuer la terre, des bombes, des grenades et tout ce que comportait une pareille expédition largement formée de trente-trois mille combattants sans compter six mille chevaux ; un convoi d'un million et demi de pièces de huit, auquel s'ajouterait pour la solde des troupes une somme portée déjà de Gênes en Sardaigne et remplacée aussitôt par un dépôt d'argent formé des sommes destinées à l'achat de vaisseaux en Hollande et non employées[20]. Tout le mois de mai se passa à presser ces préparatifs. Le 6 juin, Alberoni annonça à son ami Rocca l'action prochaine[21]. Le 15 juin l'ordre de mise à la voile fut donné et, le 17, la flotte appareilla[22]. Le 22, Alberoni démasqua ses projets. « La foudre, écrivit-il au duc de Parme, va frapper la Sicile, conquête indispensable à nous donner à Naples les garanties nécessaires, et à empêcher le duc de Savoie de nous jouer un mauvais tour. Votre Altesse dira que me voilà un ennemi de plus ; il n'en est pas moins vrai que voilà aussi une conquête facile à conserver et le moyen de gagner Je temps nécessaire à semer les discordes en France et en Angleterre où j'espère trouver des bonnes dispositions pour des intrigues que ces deux nations préparent actuellement contre le duc Régent et le roi Georges[23]. » Philippe d'Orléans n'avait pas ignoré ce dessein du cardinal de l'occuper suffisamment en France par des embarras intérieurs[24] et ça résolution en avait été affermie.

 

Dérobade de d’Huxelles

Le maréchal d’Huxelles cependant n’avait pas capitulé. Apres que Pecquet et Schaub eurent terminé leur travail décollation, Stanhope et Stair allèrent demander au maréchal l’heure qui lui plairait pour l’échange des signatures. D’Huxelles leur dit tout net qu’il ne signerait pas[25]. Les deux Anglais ne firent qu’un bond jusqu’au Palais-Royal où le Régent lisait, stupéfait, un billet du maréchal remis à l’instant. Il lui annonçait son refus de signer parce que l’abbé Dubois avait renvoyé le traité de Londres à Paris pour ne pas.se compromettre en signant ; lui, de son côté ne voulait pas plus se compromettre en signant à Paris[26]. Ce refus était consigné dans une lettre « tellement ridicule, que le duc d’Antin, son meilleur ami, la retira par pitié des mains du prince et ne put s’empêcher de l’appeler une jalousie de femme[27]. » Huxelles se croyait intangible et nécessaire, le Régent était d’un avis opposé. Après s’être soulagé, — car c’était sa façon — en couvrant son ministre absent des plus viles injures, il le remplaça par le comte de Cheverny, membre du Conseil des Affaires Étrangères, pour tenir la plume. Le plein pouvoir fut expédié, le jour de la signature fixé. On ne saurait admettre que ce fut une scène arrangée pour faire valoir aux Anglais la bonne volonté du Régent[28], le maréchal dupé dans son calcul, invité à s'effacer devant Cheverny chargea Nocé de raccommoder l’affaire et Cheverny se déroba ; il vint déclarer au Régent qu’il signerait comme son serviteur, sur un ordre écrit de sa main, mais point comme ministre. Il y avait dans tout ceci une vanité sénile à entraîner et à ménager à la fois. Dangeau, toujours si nuancé dans sa concision, insinue l’affaire en une phrase : « On fera signer [le traité] par M. de Cheverny ; mais le duc d’Orléans espère que le maréchal signera ; ...ce qui sera de meilleure grâce pour le traité[29]. » Tout ceci n’était pris au sérieux par personne et « on disait à Paris que [les signatures avaient été données] peu de jours auparavant (la veille, 5 juillet, exactement) dans un souper que le Régent avait donné à Stanhope au château de Saint-Cloud[30]. »

 

Retour offensif des Anglais

Il fallait en revenir à l'abbé Dubois. Le Régent songeait à lui et proposait de lui envoyer ordre à Londres de signer avec le ministre anglais. Stanhope, l’homme aux décisions soudaines et aux mesures rapides apercevait d’un coup d’œil Huxelles renvoyé et Dubois mis à la tête des affaires étrangères à la place maréchal[31] » ; mais lui et Stair sachant le faible du prince avec lequel ils traitaient lui adressèrent les remontrances les plus vives sur le sort qu’il se causerait à lui-même s’il reculait devant résolution prise, annoncée au vu et au su de tout Paris, Le Régent se rendit et l’échange des signatures fut fixé au douze juillet. Stanhope alla se délasser deux jours, le week-end anglais, 9 au 11 juillet, chez lord Stair à Montfermeil[32]. Au retour il apprit que d’Huxelles avait de nouveau assiégé le Régent et obtenu de lui le renvoi à Londres pour les signatures. Le prince, son entourage, les deux Anglais étaient consternés. Nocé ramena ceux-ci à la charge et après une conférence de trois quarts d’heure tout fut convenu, décidé... pour le lendemain ou le surlendemain. Mais il était onze heures du soir[33].

 

Sommation à d’Huxelles qui se soumet

D’Huxelles ne dormit pas ; le Régent non plus, il combina un plan nouveau. « Personne du Conseil de Régence ne savait un mot du traité, sinon qu’il y en avait un, et que le maréchal d’Huxelles ne voulait pas le signer[34]. » En réalité Villeroy, Torcy, Saint-Simon n’ignoraient que peu de chose, mais ils n’avaient rien appris que par des indiscrétions. « Le leur expliquer c’eut été former une troupe au maréchal ; le leur taire, en leur demandant une approbation, était un parti absurde et dangereux. On commença donc avant tout, dit Saint-Simon, par faire donner l’extrême-onction au maréchal d’Huxelles. Le duc d’Orléans lui envoya d’Antin, chargé de lui dire qu’en deux mots il fallait opter entre signer tout à l’heure, sans plus alléguer un seul mot, ou quitter sa place, toute affaire, et demeurer particulier disgracié.

Personne au monde, par sa nature et par son genre d’esprit, n’était plus propre que d’Antin à cette commission[35]. » A une première invitation portée par le marquis d’Effiat, le maréchal avait répondu qu’il se laisserait couper la main plutôt que de signer[36]. D’Antin « réussit du premier mot ». Il fit observer au maréchal « qu’il n’y avait que trois choses qui pussent l'empêcher de signer : la première ce serait de regarder le traité comme mauvais, ce qui ne pouvait être, puisque le maréchal avait toujours dit à S. A. R. que le traité était bon ; la deuxième, des engagements avec l’Espagne, auquel cas il ne conviendrait pas à Son Altesse Royale de se servir de lui ; la troisième, une jalousie de femmelette contre M. l’abbé Dubois, ce qui rendrait inexcusable le procédé de M. le maréchal[37]. » « Ce fer chaud l'étourdit à un point (parce qu’il ne s’y était jamais attendu) qu’il ne songea point qu’en cédant après tout ce qu’il avait dit et publié il se déshonorait. Il promit tout court de signer et de se taire[38]. Oh ! la grande puissance de l’orviétan, s’écrie Saint-Simon. Cet homme si ferme, ce grand citoyen, ce courageux ministre qui venait de déclarer deux jours auparavant qu’on lui couperait plutôt le bras que de signer, n’eût pas plutôt ouï la menace et senti qu’elle allait être suivie de l’'effet, qu’il baissa la tête sous son grand chapeau qu’il avait toujours dessus, et signa tout court sans mot dire[39]. »

Aussitôt cette soumission consentie, un plein pouvoir fut expédié. A la demande des deux lords anglais, le Régent, prenant l’avis du maréchal, convoqua tout le monde au Palais-Royal pour l’après-midi du 14 juillet. A l’heure fixée, Stanhope et Stair se présentent et apprennent que le maréchal les a devancés et qu’il est déjà sorti, laissant au Régent un mémoire rempli de difficultés. Les points principaux étaient qu’il fallait fixer un terme à l’Empereur pour sa signature, convenir des mesures à prendre contre l’Empereur s’il refusait de faire signer (par Pendtenriedter à Londres) ; signer à Paris le traité public seulement et renvoyer les articles secrets à signer à l’abbé Dubois. Le premier point était pleinement justifié : il ne convenait pas que le Régent fut engagé envers l’Empereur sans réciprocité de la part de celui-ci. On convint que si, dans un délai de trois mois, l’Empereur ne faisait pas signer, le Régent serait dégagé.

 

Le lendemain il refuse

Le lendemain matin, 15 juillet, le maréchal rendit visite aux lords anglais. Il était gai, loquace, si différent de son allure quotidienne que ses interlocuteurs s’attendirent à un nouveau coup de Jarnac. En effet, d’Huxelles leur annonça qu’il ne signerait pas la convention secrète[40]. Dans le traité composé de deux parties, l’une destinée à être rendue publique, l’autre à rester secrète : celle-ci, qui prévoyait les voies et moyens d’exécution, selon les diverses éventualités d’acceptation ou de refus de la part des lois de Sicile et d’Espagne, était, de l’aveu des Anglais, ce que le traité contenait de plus dur pour l'Espagne. Mais aussi elle constituait, à leurs yeux, la seule sécurité réelle pour l’Empereur et pour le roi de la Grande-Bretagne[41]. Or le maréchal, séparant ces deux parties d’une même transaction, acceptait l’une et repoussait l’autre. Il signait la Quadruple-Alliance, et refusait de signer les articles secrets, ceci par point d’honneur : car, disait-il, l’alliance serait communiquée au Conseil de Régence, tandis qu’il ne serait point à propos d’y porter les articles secrets, puisqu’ils devaient rester secrets, de sorte que quand le Conseil viendrait à savoir qu’on les aurait supprimés en lui communiquant le reste, il regarderait cette conduite comme une tromperie, à laquelle aucun ministre ne voudrait prendre part. En s’exprimant ainsi, le maréchal ne s’apercevait pas qu’il indiquait l’issue par laquelle le Régent devait lui échapper. Il voulait qu’on donnât à Dubois les articles secrets à signer en Angleterre, bien assuré que cette partie de la négociation se perdrait entre les mains de l’abbé, et avec elle, la négociation tout entière. Il pensait non sans raison que nul n’oserait mettre sa signature sur les articles secrets. Il dit en propres termes aux lords que le Régent n’était pas assez puissant pour l’obliger à signer[42]. Déçus, encore plus inquiets, Stanhope et Stair se rendirent l’après-midi du même jour chez le Régent.

 

Embarras du Régent

« Il est difficile, écrivent-ils à leur correspondant, de vous bien représenter l’inquiétude on se trouvait S. A. R. partagée en le désir de se rendre à nos instances et les appréhensions que la cabale lui avait inspirées, la grande, difficulté était en ce qu’il ne pouvait trouver personne d’assez hardi pour mettre sa signature sous les articles secrets[43]. Nous avons eu toutes les peines imaginables, plus grandes qu’on ne saurait vous les dépeindre, à soutenir le Régent contre les efforts redoubles des ennemis du traité... Nous l’avons trouvé très ébranlé par les représentations de la plupart de ses conseillers et, pour ainsi dire, de presque tout le royaume contre le traité et principalement contre la convention. Il nous a fait voir : d’un côté, beaucoup de bonne volonté et une envie sincère de conclure ; et, de l’autre côté, l’âme et l’esprit remplis d’inquiétudes et de frayeurs, causées par la peinture qu’on lui avait faite des dangers où il s’exposerait en faisant une chose qui était contre le goût de la nation[44]. Il n’est pas à dire combien de répugnance on a contre ce traité généralement par toute la France, ni combien de bruits malicieux de toutes les espèces l’on répand pour rendre le Régent odieux[45]. » Telle était l’impression que lui avaient causée ces manœuvres, que les lords reconnurent l’impossibilité de lui persuader de donner des ordres ; il était convaincu qu’il ne serait pas obéi, s’il en donnait pour signer les articles secrets.

Il proposa divers expédients pour suppléer à la signature. Eux les rejetèrent tous. Sans signature, le traité serait partout réputé abandonné, eux-mêmes en feraient part à l’empereur sans plus de retard. Ils insistèrent beaucoup sur ce que M. de Koenigsegg différait depuis plusieurs jours l’envoi d’un courrier à sa Cour, dans l’espoir de la signature, et ne voyait pas la possibilité de le retarder davantage. Ils priaient donc le Régent de leur dire ce qu’ils auraient à écrire à Vienne par le même courrier, et de manifester à Koenigsegg ses intentions. A ces mots, l’embarras du prince fut à son comble ; les lords anglais l’en tirèrent.

 

Recours au Conseil de Régence

Le maréchal avait agité devant eux, comme épouvantail, le recours au Conseil de Régence ; c’était cet organisme qu’il fallait viser et atteindre, lui faire approuver la convention et souscrire le traité. Ils proposèrent au duc d’Orléans de porter le traité entier devant le Conseil de Régence, avec courage et franchise. Cette audace le surprit, mais ils lui représentèrent que c’était le parti le plus convenable, le plus sûr et, quoique le plus hardi, le moins dangereux. Bien loin de se faire du tort, lui dirent-ils, en communiquant les articles secrets au Conseil de Régence, ce serait au contraire le moyen le plus efficace de détruire toutes les impostures que ses ennemis seraient en liberté d’inventer et de débiter, tant qu’on saurait qu’il y avait des articles séparés qu’on aurait pris soin de cacher au Conseil de Régence[46]. Peu à peu le prince consentit à envisager les chances de succès de cette entreprise, passa en revue l’un après l’autre les membres du Conseil, pointa les adversaires, les douteux, les amis. Il s’engagea à conduire l’affaire en personne, à tenir son dessein secret et à ne s’en ouvrir qu’au devant de ceux qu'il ne pouvait conquérir, et à ne s'en ouvrir aux douteux que le matin même du jour où il l'exécuterait, c'est-à-dire le dimanche suivant, 17 juillet, jour habituel des séances du Conseil. Afin de l'enhardir, les deux lords confirmèrent la convention qui l'affranchissait de tout engagement envers l'Empereur, si ce prince ne signait pas dans le délai de trois mois. « Il faut faire la justice au Régent, écrivirent-ils le soir même à Saint-Saphorin, que cette affaire est duc entièrement à lui-même. Il l'a conduite contre vent et marée et contre l'inclination de quasi toute la nation. Il faut espérer aussi que la Cour de Vienne ne s'opposera pas par de nouveaux délais à tous les dangers dont elle a été menacée de tous côtés, et le Roy notre maître en même temps, par la conjonction de la France, et de l'Espagne et de tout le Nord contre nous[47]. En se séparant de Stanhope et de Stair, le Régent leur dit que son parti était pris et qu'ils pouvaient en avertir M. de Koenigsegg, ce qu'ils s'empressèrent d'exécuter afin de le compromettre tout à fait.

 

Préparatifs

Le lendemain, samedi matin, 16 juillet, les deux Anglais revirent le prince très résolu et très confiant. Il avait récapitulé les voix et escomptait celle du maréchal de Bezons qui ne comptait pour rien, celle du maréchal de Tallard qui était gagné, celle même du maréchal d'Huxelles ; car il n'avait pas d'autre conduite à tenir après avoir si souvent et si bruyamment approuvé la substance du traité et ses articles secrets que d'y consentir. La présence du Régent l'intimiderait, celle du Conseil de Régence lui enlèverait sa dernière objection, enfin pris au dépourvu, le dimanche malin seulement, il n'aurait pas le temps de se concerter avec autrui, pas même le temps de réfléchir[48].

 

Séance du 17 juillet

Le dimanche matin, le prince envoya chercher les principaux membres du Conseil ; « il ne les manda que sur-le-champ chacun et à des temps différents, et, sans expliquer rien au net à pas un, il tâcha de les capter les uns par autorité, les autres par amitié, quelques-uns par confiance, se tirant mal avec tous d’une confiance si tardive, et plus mal encore de ce qu’il ne leur disait rien qu’en gros de ce qu’il leur demandait si affectueusement d’approuver. Saint-Simon, dont ils s’étaient cachés plus soigneusement que de personne — c’est lui-même qui s’en flatte — parce qu’ils n’avaient jamais pu dans aucun temps le gagner pour l’Angleterre ni contre l’Espagne, et dont la liberté d’opinion les intriguait fort en cette occasion, fut aussi mandé. Le Régent lui parla avec grand embarras et ne fit point façon de le prier, et de le conjurer même de ne raisonner ni de s’opposer au traité dont on devait parler l’après-dînée et que le maréchal rapporterait sommairement[49]. » Deux heures avant la séance décisive, le Régent dit aux Anglais qu’il était sur de son fait et que le Conseil de Régence devait s’assembler à trois heures et demie pour entendre le maréchal d’Huxelles qui parlerait fortement en faveur du traité. Voyant le scepticisme de Stanhope et de Stair, il tira de sa poche un papier qui était la minute de la harangue que réciterait le maréchal. Elle leur sembla éloquente et péremptoire, Pecquet venait de la rédiger le matin même[50] !

« Le conseil assis, M. le duc d’Orléans dit deux mots de la nécessité de convenance d’être bien avec les puissances contractantes et d’un traité dont le maréchal d’Huxelles allait rendre compte. Le maréchal, plus mort que vif et la voix entrecoupée, lut à l’instant le traité sans aucune préface et après l’avoir lu, dit ces seuls mots qu’il le croyait utile et avantageux, et qu’il en était d’avis. Aussitôt après, les voix furent recueillies ; quelques-uns, en petit nombre, ne dirent mot et s’inclinèrent comme en étant d’avis ; la plupart parlèrent beaucoup, s'embrouillèrent, tous approuvèrent, mais plusieurs montrèrent que c’était malgré eux[51]. Le garde des sceaux d’Argenson et le marquis de Torcy, qui aspiraient à rentrer aux affaires, le prince de Conti et le maréchal d’Estrées approuvèrent ; le comte de Toulouse, La Vrillière, Tallard, d’Antin, Noailles, Villars, Saint-Simon et l’évoque de Troyes s’en rapportèrent à la sagesse du Régent ; Le Pelletier et Villeroy demandèrent un ajournement de l’alliance ; le duc de Bourbon refusa de s’expliquer sur une communication aussi précipitée ; le duc du Maine soutint que le traité serait aussi funeste à l’État qu’au Régent ; le marquis d’Effiat, le seul de ses fidèles roués que le duc de Régent eût placé dans le Conseil de Régence, s’absenta sous prétexte de la goutte, mais il courut le cerf le lendemain[52].

« Les Français, nourris dans les délices, les aises de la bonne chère, du sommeil et d’un bon duvet, par crainte de voir troubler leurs biens, leurs beaux jardins, leurs jolies maisons et les compagnies des dames, pour ne pas perdre seulement un souper étaient toujours prêts à courber la tête sous le joug du Régent. Ils voyaient certes, le mal dont souffrait la France par son oppression, le commerce ruiné ; mais, on n’ignore pas que, quand la majorité souffre, bien peu cherchent à se tirer d’affaire. On supporte avec plus de patience un dommage qui frappe sur tous, que celui qui frappe quelques particuliers[53]. » L’acceptation, — on devrait peut-être dire la capitulation — avait été unanime.

 

Signatures

Lorsque, dans la soirée, les lords chargèrent Schaub d’aller prendre heure avec le maréchal pour l’échange des signatures, il fut impossible de le rencontrer. Le lendemain, cependant, assisté de M. de Cheverny, il signa la convention avec Stanhope et Stair. On signa également l’acte aux termes duquel la France n’était engagée que pour trois mois si, dans ce délai, l’Empereur ne-signait pas le traité[54]. Cela fait les lords vinrent présenter leurs félicitations au Régent. « Tout est fini ! » s’était-il écrié « Dieu merci[55] ». Il rayonnait, se sentant devenu à cet instant, le maître de la France, désormais assez fort pour détruire les princes légitimés, soumettre le Parlement, supprimer les Conseils, démentir toutes ses promesses et restaurer en vue de vils trafics ce pouvoir absolu que le feu Roi avait établi pour de grands et glorieux desseins. Cette bataille gagnée lui causait une joie d’autant plus vive qu'il n’avait rien négligé de ce qu’il fallait faire pour la perdre. L’opinion publique, froissée, dériva vers les chansons, tourna en ridicule les fanfaronnades du maréchal[56] :

D’Huxelles dit : « Cette paix,

Cette Quadruple Alliance

Est la peste de la France,

Je n'y souscrirai jamais.

Contre ces projets iniques

Je fus toujours indigne. »

Après ces mots héroïques,

Le maréchal a signé.

Ce qui fut signé le 18 juillet à Paris consistait en une convention particulière n’engageant que le roi de France et le roi de la Grande-Bretagne, un projet de traité proposé par eux à l’Empereur qui y avait apporté divers changements. Après examen, tels de ces changements avaient été acceptés, tels autres ajoutés, en sorte que finalement les deux signataires avaient décidé d’arrêter le projet dans son texte immuable qu’ils soumettraient à l’Empereur comme un ultimatum à adopter ou à repousser.

 

Signatures à Londres le 2 août

Le 21 juillet, Crawford, secrétaire de l’ambassade d’Angleterre à Paris, arriva à Londres porteur de la convention signée le 18 et des exemplaires du traité destiné à être signé par les quatre puissances, à Londres seulement. Le Régent talonnait Dubois. « Rien n’est plus pressé, lui écrivait-il, que de signer avec l’Empereur. Dès que Pendtenriedter aura pouvoir de signer le traité, tel que je vous l’envoie, ne perdez pas un moment, et signez sans attendre d’autres ordres, ni un plus grand éclaircissement touchant les États-Généraux auxquels je dépêche M. de Morville[57]. » Cependant Pendtenriedter atermoyait. Sa Cour lui avait transmis l’acceptation des demandes de la France, mais ayant remorqué dans le texte apporté de Paris par Crawford quelques modifications de pure forme, l’autrichien voulait obtenir de nouvelles instructions de Vienne. Craggs, Sunderland, Bothmar et Dubois le sermonnèrent tant et si bien, la nouvelle du débarquement des Espagnols en Sicile opéra si efficacement sur le ministre impérial qu’il se détermina à apposer son nom au bas du traité[58].

Dubois pour la France, Sunderland pour l’Angleterre, Pendtenriedter pour l’Autriche signèrent, à Cockpit, le 2 août 1718, le traité de la Quadruple Alliance, ainsi qu’on le nomma par anticipation et dans l’attente de l’adhésion des Hollandais, trop flegmatiques pour arriver à temps.

Le traité comprenait trois parties ou trois traités distincts : 1° entre l’Empereur et le roi d’Espagne ; 2° entre l’Empereur et le roi de Sicile ; 3° « alliance et amitié » entre l’Empereur, les rois de France, de Grande-Bretagne et les Provinces-Unies.

 

Traité entre l’Empereur et le roi d’Espagne

Six articles composaient la première partie et décidaient de la restitution de la Sardaigne à l’Empereur telle qu’elle était avant l’agression de l’année précédente avec ses fortifications, ses vaisseaux, son artillerie, ses munitions, etc. L’Empereur renonçait pour lui et ses descendants à toute prétention sur l’Espagne et sur les Indes, par compensation des renonciations en vertu desquelles les couronnes de France et d'Espagne ne pourraient jamais être ni sur une même tête, ni dans une même ligne. En conséquence, Charles VI reconnaissait Philippe V en qualité de roi d'Espagne et des Indes et, en échange, Philippe V renonçait à toute prétention sur les Etats d'Italie et des Pays-Bas, reconnus à l'Empereur par les traités d'Utrecht et de Rastadt, ainsi qu'à la réversibilité de la Sicile.

Les duchés de Parme et de Plaisance et le grand duché de Toscane, considérés comme fiefs impériaux seraient, à la mort de Toscane, considérés comme fiefs impériaux seraient, à la mort princes titulaires attribués à l’infant don Carlos ou, à son défaut, à tout autre fils légitime d’Élisabeth Farnèse par ordre de primogéniture. Don Carlos recevait l'investiture éventuelle dans an délai maximum de deux mois. Le roi d’Espagne remettrait alors à son fils Porto-Longone et la partie de file d’Elbe encolle détenues par lui ; Livourne demeurera port libre a perpétuité. En aucun temps, le roi d’Espagne ne pourrait détenir les États ainsi octroyés à don Carlos ni être le tuteur de celui qui les posséderait. Aucune garnison n’y pourrait être introduite jusqu’à l’ouverture de la succession, soit par l’Empereur, soit par le roi de France, soit par le roi d’Espagne. Six mille Suisses tiendraient garnison à Livourne, Porto-Ferrajo, Parme et Plaisance.

Le roi d’Espagne consentait-il à l’échange conclu de la Sicile et de la Sardaigne entre l’Empereur et Victor-Amédée, Philippe V et Charles VI se garantissaient mutuellement la possession de leurs États ; ils accordaient une amnistie générale et réciproque à tous ceux qui en Espagne, en Flandre ou en Italie, avaient suivi l’un ou l’autre parti depuis la mort de Charles II.

 

Traité entre l’Empereur et Victor-Amédée

Six articles composaient le traité entre l’Empereur et le provisoire roi de Sicile qu’on dépouillait de cette aubaine dont on le jugeait peu digne et à laquelle il ne pouvait faire valoir aucun droit. Au reste la séparation de Naples et de la Sicile, si longtemps unis, nuisait à leurs intérêts communs et au reste de l’Italie. On laissa à Victor-Amédée un délai de deux mois pour s’exécuter et il recevrait en échange la Sardaigne à titre perpétuel, sauf réversion à la couronne d’Espagne à défaut de descendance mâle dans la maison de Savoie. Les cessions faites au duc de Savoie par le traité de Turin, en 1703, d’une partie du Montferrat et de territoires milanais étaient confirmés. Reconnaissance des droits de la maison de Savoie à succéder au trône d’Espagne dans les conditions prévues par le traité d’Utrecht. Les deux souverains se garantissaient réciproquement leurs possessions en Italie, s’engageaient à échanger les ratifications du traité dans les deux mois et à envoyer des plénipotentiaires au congrès.

 

Traité de la Quadruple-Alliance

Huit articles constituaient le traité conclu entre les quatre puissances qu’elles unissaient par un foedus arctissimum pour maintenir la paix générale de l’Europe. La France, l’Angleterre et les Provinces-Unies s’emploieront après du roi d’Espagne pour en obtenir l’abandon de la Sardaigne à l’Empereur, sinon elles prendraient les mesures indispensables à la conservation de la paix en Italie. Les six premiers articles contiennent les stipulations usuelles d’amitié, garanties de possessions territoriales et autres, promesse de maintenir, « même par la force des armes » l’ordre de succession établi en France et en Angleterre par les traités d’Utrecht, règlement des contingents militaires à fournir, accès offert dans cette alliance au roi de Portugal. Un article séparé admettait que les titres pris ou omis par les divers contractants ne tireraient pas à conséquence et n’enlèveraient rien à la force des renonciations réciproques !

 

Les articles secrets

A la suite de ce traité public venaient les articles secrets, au nombre de douze.

I. Le Roi Très Chrétien, le roi de Grande-Bretagne et les États-Généraux étant convenus par le traité convenu entre eux et signé ce dit jour de certaines conditions conformément auxquelles la paix pourrait se faire entre l’Empereur et le roi de Sicile (lequel on juge à propos de nommer le roi de Sardaigne) et ayant communiqué les conditions à ces trois princes, l’Empereur déclare accepter ces conditions ou articles et consent à conclure une paix perpétuelle entre lui, le roi d’Espagne et le roi de Sardaigne.

II. Les deux princes auront un délai de trois mois à compter de la signature, du présent traité pour déclarer s’ils veulent les accepter.

III. S’ils n’acceptent pas dans ce délai, les Puissances joindront leurs forces à celles de l’Empereur pour les y obliger ; elles fourniront les secours stipulés par l’article VII du traité d’alliance signé ce jourd’hui. On consent unanimement que le Roi Très Chrétien fournisse des subsides en argent au lieu de troupes. Si à cause des secours fournis à l’Empereur, les rois d’Espagne et de Sardaigne, ou l’un d’eux font la guerre à l’une des trois Puissances, les deux autres feront la guerre au roi qui l’aura déclarée et ne poseront pas les armes que l’Empereur ne soit en possession de la Sicile et en sûreté pour ses États d’Italie, et que juste satisfaction ne soit faite à celle des Puissances qui aura été attaquée.

IV. Si l’un seulement des deux rois accepte les conditions de paix, il se joindra aux quatre Puissances contractantes pour contraindre celui qui les aura refusées.

V. VI. VII. Ou prévoit les diverses éventualités de la conquête à faire de la Sicile et de la Sardaigne. Elles devront alors être confiées en dépôt entre les mains de l’Angleterre et des États-Généraux pour être remises à qui de droit à la paix.

VIII. En cas qu’on soit obligé de faire la guerre au Roi Catholique et au roi de Sardaigne ou à l’un des deux seulement, l’Empereur devra se contenter des avantages stipulés d’un commun consentement, sauf qu’il pourra revendiquer les parties de l’État de Milan que le roi de Sardaigne possède. Les trois autres contractants décideront avec l’Empereur du prince à qui, à l’exclusion du roi de Sardaigne, sera donnée la partie du duché de Montferrat que ce roi possède ; et à quel autre prince seront données des lettres d’expectative du grand-duché de Toscane et du duché de Parme et de Plaisance, à l’exclusion des fils de la présente reine d’Espagne, bien entendu que jamais, en aucun cas, ni l’Empereur, ni aucun prince de la maison d’Autriche qui possédera des royaumes, provinces et États d’Italie, ne pourra s’approprier les États de Parme ou de Toscane.

IX. Si l’Empereur ne peut pas parvenir à s’emparer de la Sicile ou de la Sardaigne, il sera délié de tous engagements à l’égard des rois d’Espagne et de Sardaigne.

X. Il sera fait des renonciations réciproques par l’Empereur et le roi d’Espagne. Si le roi Catholique persiste à refuser de souscrire à la paix, l’Empereur remettra cependant sa renonciation au roi de Grande-Bretagne lequel ne l’exhibera au Roi Très-Chrétien qu’après que l’Empereur aura été mis en possession de la Sicile. Alors l’exhibition et la publication se feront à la première sommation du Roi Très-Chrétien ; et ces renonciations auront leur effet, soit que le Roi Catholique ait signé la paix avec l’Empereur ou non, vu en ce dernier cas la garantie des Puissances contractantes.

XI. L’Empereur s’engage à ne rien entreprendre contre le Roi Catholique ni contre le roi de Sardaigne, pendant les trois mois accordés à ces deux princes pour accepter les conditions de paix avec l’Empereur ; mais s’ils continuent les hostilités contre lui, les Puissances lui fourniront tous les secours dont on est convenu, et même davantage s’ils ne suffisent pas.

XII. Les onze articles qui précèdent demeureront secrets entre les signataires pendant trois mois à compter de la signature, à moins que les Puissances d’un commun accord ne jugent à propos d’abréger ou de prolonger ce terme.

 

Le Protocole

La chancellerie dressa un instrumentum latin du traité de Londres à l’usage des Anglais, des Hollandais et des Impériaux, un autre en français à l’usage des Français. Les Anglais reconnurent qu’on avait procédé de cette façon à Ryswick, à Utrecht, à la Haye. Une innovation intéressante fut introduite : les Anglais avaient coutume de donner à leur monarque dans le préambule de l’acte latin des traités le titre de roi de France et n’accordaient à nos rois que le titre de « très-chrétien ». Cette fois Louis XV, dans le préambule de ce même texte latin dressé pour et par les Anglais, fut qualifié Ludovicus decimus quintus, Franciae Navarraeque Rex Christianissimus, avec la préséance sur Georgius Magnae Britanniae Rex, dux Brunsuicensis et Luneburgensis, sans mention de son titre dérisoire de roi de France. A plus forte raison, le protocole fut-il le même dans le-préambule du texte français. Au cours des articles de l’un et de l’autre texte, Louis XV, selon la coutume immémoriale n’est pas appelé autrement que le Roi Très-Chrétien. George n’a pas d’autre appellation que celle de roi de la Grande-Bretagne.

 

Utilité du traité

Ce traité imposé par l’arbitrage de deux grandes puissances sans malveillance et sans mission, prétendait empêcher la guerre qu’il rendait inévitable et prochaine ; mais c’était la guerre contre une puissance déchue et nullement redoutable. « Dans l’épuisement où la France était tombée, comment eût-elle soutenu la guerre contre l’Empereur et les puissances maritimes ? Cependant après l’invasion de la Sardaigne et de la Sicile, il fallait ou se perdre avec l’Espagne ou lui résister pour la sauver[59]. » Si, au mois d’août 1718, l’Europe était partagée en deux ligues ! L’une était étroitement unie et tous ses éléments rapprochés et coordonnés : Angleterre, Hollande, France, Autriche ; l’autre était désagrégée avant d’être ébauchée : Espagne, Suède, Russie. Dès l’instant où eps deux ligues entraient en conflit, leur sort ne pouvait être un seul instant douteux, l’Espagne devait succomber malgré son grand effort militaire et en raison même de cet effort.

 

L’opinion publique

L’opinion publique en France demeurait hésitante avec une tendance hostile. Il est curieux d’observer qu’après la réaction qui en 1715, avait condamné tout, sans exception, de la politique du feu Roi, Dubois ne trouvait pas de plaidoyer plus efficace pour son œuvre que de la représenter comme le perfectionnement et l’achèvement de l’œuvre de Louis XIV : « L’unique moyen de calmer l’Europe et de prévenir toutes sortes de guerres et de troubles était de former un projet qui pût achever le grand ouvrage que le feu Roi a voit si fort avancé[60] le président Hénault s’étonnait a la vue de ces souverains qui réglaient et qui partageaient ce qui ne se trouvait pas entre leurs mains, disposaient d’États non vacants et forçaient chacun à accepter leurs décisions arbitraires[61]. Saint-Simon louait sans réserve cette convention qu'il devait dans la suite critiquer sans ménagements[62].

 

Gratifications

Le traité de la Quadruple-Alliance une fois signé, la tâche de Dubois était terminée et ses intérêts le rappelaient à Paris. Pecquet[63], Saint-Simon exprimaient leur impatience de le revoir[64], le Régent lui écrivait : « Mon cher abbé, je vous attends avec impatience[65] », et l’abbé précipita son départ, mais auparavant il se montra magnifique. « Il ne faut rien négliger, écrivait-il au duc d’Orléans, pour gagner l'affection des acteurs grands et petits, non par des propositions directes qui leur fassent penser qu’on les croit capables d’être subornés, mais par des manières nobles qui paraissent partir plutôt de générosité que d’un dessein de surprendre leur fidélité. Votre Altesse Royale a éprouvé le désintéressement de milord Stanhope. Je voudrais pourtant le tenter encore par quelque galanterie, et si V.A.R. le priait d’accepter un portrait du Roi ou d’Elle, garni de diamants pour le prix de 50.000 écus ou de 200.000francs, je doute s’il l'accepterait, mais qu’il le refusât ou non, cela ne pourrait faire que bon effet. » Pour lord Stair, on déboursera 100.000 livres en bijoux, et il suffira de 40.000 livres de vaisselle pour le ministre de l’Empereur, car « il est certain que l’argent a de l’ascendant sur Pendtenriedter, aussi la prudence veut qu’on en profite pour animer sa bonne volonté. » Dubois avait à tirer vengeance du commis Pecquet, tout dévoué à d’Huxelles ; il le fit désigner pour une gratification de 15.000 livres du Régent et un diamant de 500 livres sterling du roi d’Angleterre. Pecquet refusa, Dubois s’indigna : « C’est un beau diamant que le désintéressement et la vertu dont il se pique, mais le petit diamant que le roi d’Angleterre lui fait envoyer est si joli qu’il faut que M. Pecquet ou moi l’ayons et je le conjure donc de ne pas se faire tirer l’oreille pour le recevoir[66]. En Angleterre, où ces présents de corruption s’étalaient pu grand jour[67], le refus de Pecquet sembla une leçon et fut fort mal reçu. « Il y a une telle affectation à refuser, écrivit Craggs, que je serais porté à croire que celui qui, en pareil cas, refuse un petit présent qu’on lui offre publiquement, comme civilité, en attendait un considérable, en cachette, pour acheter ses services[68]. » Ces bounties ou pots-de-vin étaient si peu indifférents que Pecquet refusa obstinément de s’en laisser salir, de « faire le sot » suivant le langage de Craggs ; il y eut un exemple plus considérable, Dubois lui-même ne consentit sous aucun motif à encaisser les 3.000 livres sterling auxquels Georges Ier tarifait ses services. Il jugea qu’à les recevoir il donnerait prise sur lui. D’autres furent moins scrupuleux[69], lui suivait son sentier sans en dévier.

 

Prévisions et retour de Dubois

Riche par ses bénéfices et ses gratifications, possédant tout en abondance, carrosse, garde-robe, cave, ameublement, Dubois n’avait que faire des guinées anglaises et monnayait d’autre façon la reconnaissance étrangère. De Londres, le comte de Sunderland écrivait à lord Stair : « L’abbé Dubois nous quitte la semaine prochaine. J’espère, une fois qu’il sera en France, que vous saurez persuader au Régent de ne pas laisser lui-même et ses affaires entre, les mains de ses ennemis, sinon tout notre grand ouvrage, j’en ai peur, tombera à rien[70]. » C’était le ministère qu’on lui destinait de Londres et, de Londres aussi, lui écrivait Chavigny, « M. Stanhope songe à vous faire cardinal[71] ». L’insinuation reparaissait pour la deuxième fois.

Le samedi 13 août, Dubois quitta l’Angleterre qu’il ne devait plus revoir, arriva au Palais-Royal, le 17, à une heure du matin, entra la clef à la main chez le Régent qui l’embrassa tendrement, et, dans l’après-dînée, l’emmena à Saint-Cloud ; Law les y rejoignit[72].

 

 

 



[1] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 318, fol. 177 ; Dubois (neveu) à l’abbé Dubois, 27 mai 1718.

[2] Ch. Aubertin, L’Esprit public au XVIIIe siècle, p. 113-114 ; Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 317, fol. 287 : Chavigny à Dubois, 3 mai 1718 ; ibid., t. 320, fol. 210 : Chavigny à Dubois, 17 juillet 1718.

[3] L. Wiesener, Le Régent, l'abbé Dubois et les Anglais, t. II, p. 174-178.

[4] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 319, fol. 20 : Dubois au Régent, 26 juin 1718 ; Bothmar, Memoiren über die Quadrupel Allianz, p. 255.

[5] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 319, fol. 110 : Nocé à Dubois, 18 juin 1718.

[6] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 319, fol. 197 : Dubois au Régent, 16 juin 1718.

[7] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 319, fol. 219 : Dubois à Nocé, 22 juin 1718.

[8] Oxenfoord Castle, vol. XIII, A : lord Stanhope à lord Stair, Londres, 11 (= 22) juin 1718 ; The Stair Annals, t. II, p. 67.

[9] O. Weber, Die Quadrupel Allianz vom Jahre 1718, in-8°, Wien, 1887, p. 74.

[10] Ch. Aubertin, l’Esprit public au XVIIIe siècle, in-8°, Paris, 1873, p. 118.

[11] Ch. Aubertin, op. cit., p. 119.

[12] Public Record Office, France, vol. 349 : Stanhope à Craggs, 30 juin 1718 ; Dangeau, Journal, t. XVII, p. 333 ; 29 juin 1718.

[13] P. E. Lémontey, Histoire de la Régence, 1832, t. I, p. 178.

[14] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 320, fol. 125 : Dubois au Régent, 7 juillet 1718.

[15] Public Record Office, France, vol. 352 : lord Stanhope à Craggs, 1er juillet 1718.

[16] Public Record Office, France, vol. 332 : Schaub à Saint-Saphorin, Paris, 15 juillet 1718.

[17] Public Record Office, France, vol. 352 : lord Stanhope à Craggs, 1er juillet 1718.

[18] Public Record Office, France, vol. 352 : Stanhope et Stair à Craggs, 1er juillet.

[19] Public Record Office, France, vol. 352 : Schaub à Saint-Saphorin, 15 juillet.

[20] Arch. de Naples, Farnesiana, fasc. 59 : Alberoni au duc de Parme, mai 1718 ; De Saint-Philippe, Mémoires pour servir à l’histoire d'Espagne, in-12, Amsterdam, 1756, t. III, p. 260.

[21] Alberoni, Lettres intimes, 1893, p. 584 ; 6 juin 1718.

[22] Arch. de Naples, Farnesiana, fasc. 59 : Alberoni au duc de Parme, 22 juin 1718.

[23] Arch. de Naples, Farnesiana, fasc. 59 : Alberoni au duc de Parme, 22 juin 1718.

[24] Public Record Office, France, vol. 352 : Stanhope et Stair à Craggs, Paris, 6 juillet 1718.

[25] Ibid., et Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 320, fol. 108 : Dubois (neveu) à l'abbé Dubois, 9 juillet 1718.

[26] Public Record Office, France, vol. 352 : Stanhope et Stair à Craggs, Paris, 6 juillet 1718.

[27] Lémontey, Histoire de la Régence, 1832, t. I, p. 141.

[28] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 320, fol. 156 : Dubois (neveu) à l'abbé Dubois, 12 juillet 1718.

[29] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 335 ; 6 juillet.

[30] Saint-Simon, Mémoires, édit. Chéruel, t. XVI, p. 160, souper nié par Wiesener, op. cit., t. II, p. 190, note 3 et confirmé par Dangeau, op. cit., t. XVII, p. 335 ; 5 juillet 1718.

[31] Public Record Office, France, vol. 352 : Stanhope et Stair à Craggs, Paris, 6 juillet 1718.

[32] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 320, fol. 151 : Chavigny à Dubois, 12 juillet 1718.

[33] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 320 : Dubois (neveu) à l'abbé, 12 juillet 1718.

[34] Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVII, p. 337.

[35] Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVII, p. 337.

[36] Saint-Simon, Mémoires, édit. Chéruel, t. XIV, p. 186.

[37] Ch. Aubertin, L’Esprit public au XVIIIe siècle, p. 120.

[38] Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVII, p. 338.

[39] Saint-Simon, Mémoires, édit. Chéruel, t. XIV, p. 186.

[40] Le récit de Schaub à Saint-Saphorin finit ici.

[41] Public Record Office, France, vol. 352 : Stair et Stanhope à Craggs, Paris, 16 juillet 1718.

[42] L. Wiesener, Le Régent, l’abbé Dubois et les Anglais, t. II, p. 194-195.

[43] Public Record Office, France, vol. 352 : Stair et Stanhope à Craggs, Paris, 16 juillet 1718.

[44] Public Record Office, France, vol. 352 : Stair et Stanhope à Saint-Saphorin, Paris, 15 juillet 1718.

[45] Public Record Office, France, vol. 352 : Stair et Stanhope à Craggs, Paris, 16 juillet 1718.

[46] Public Record Office, France, vol. 352 : Stair et Stanhope à Craggs, Paris, 16 juillet 1718.

[47] Public Record Office, France, vol. 352 : Stair et Stanhope à Sant-Saphorin, Paris, 15 juillet 1718.

[48] Public Record Office, France, vol. 352 : Stair et Stanhope à Craggs, Paris, 16 juillet 1718.

[49] Saint Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVII, p. 338.

[50] Oxenfoord Castle, Stair Papers, vol. III, B : Stair et Stanhope à Craggs, 18 juillet 1718.

[51] Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVII, p.338.

[52] Lémontey, op. cit., t. I. p. 141-142, d’après les « Mémoires du duc d’Antin » ; Gazette de la Régence, p. 271 ; 22 juillet 1718.

[53] Brit. Mus., add. 8756, Mémoires inédits du prince de Cellamare, 2e partie fol. 261.

[54] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 343 ; 18 juillet 1718.

[55] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 320, fol. 213, Chavigny à Dubois, 13 juillet 1718.

[56] Bibl. nat., ms. 12629 fol. 331. Recueil de Chansons.

[57] Arch. des. Aff. Etrang., Angleterre, t. 320, fol. 250, Le Régent à Dubois, 21 juillet 1718.

[58] Dumont, Corps diplom., t. VIII, part. 2 (texte latin) ; Lamberty, Mémoires pour servir à l’histoire du XVIIIe siècle, t. X, 2e partie.

[59] P.-E. Lémontey, Histoire de la Régence, t. I, p. 143.

[60] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 312, fol. 303 : Mémoire de Dubois.

[61] Hénault, Mémoires, édit. de Vigan, in-8°, Paris, 1885, p. 58.

[62] Chéruel, dans Revue Historique, t. I. p. 145.

[63] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 321, fol. 23 : Chavigny à Dubois, 28 juillet 1718.

[64] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 321, fol. 82 : Chavigny à Dubois, 1er août 1718.

[65] Chavigny à Dubois, dans Ch. Aubertin, L'esprit public au XVIIIe siècle, p. 120.

[66] Dubois au Régent, dans Ch. Aubertin, op. cit., p. 122.

[67] L. Wiesener, op. cit., t. II, p. 216-217.

[68] Oxenfoord Castle, Stair Papers, vol. XIII, B : Craggs à Stair, Hampton Court, 1er (= 12) septembre 1718.

[69] L. Wiesener, op. cit., t. II, p. 219-220.

[70] Oxenfoord Castle, Stair Papers, vol. XIII, A : Sunderland à lord Stair, 26 juillet (= 6 août), 1718.

[71] Chavigny à Dubois, dans Aubertin, op. cit., p. 120 ; Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 310, fol. 9 : Chammorel à Dubois, 1er octobre 1718.

[72] Gazette de la Régence, p. 274, 19 août ; Dangeau, Journal, t. XVII, p. 359 : 17 août 1718.