HISTOIRE DE FRANCE

TOME QUATRIÈME — CHARLES VII. LOUIS XI ET LES PREMIÈRES ANNÉES DE CHARLES VIII (1422-1492).

LIVRE II. — LA SOCIETÉ ET LA MONARCHIE À LA FIN DE LA GUERRE DE CENT ANS.

CHAPITRE VI. — LES ASSEMBLÉES D'ÉTATS ET LES FINANCES ROYALES.

 

 

CHARLES VII, quand il était encore dauphin, avait aboli les impôts publics, pour lutter de popularité avec le duc de Bourgogne (1418). Pendant la première partie de son règne, il fut donc obligé de demander de l'argent aux assemblées d'États. L'institution des États fut à cette époque remarquablement souple. Elle prêta à tant de combinaisons, qu'elle échappe à toute classification méthodique. On ne saurait établir entre les assemblées qui se tinrent alors qu'une distinction souvent factice, pour la clarté de l'exposé. Dans une première catégorie se peuvent placer les États que nous appelons Généraux ; c'étaient eux qui fixaient le chiffre total de l'impôt à percevoir ; mais il n'y a pas eu de véritables États Généraux sous Charles VII, non plus d'ailleurs qu'avant son règne. Une seule fois, en 1428, il réunit les députés de presque tous les pays qui formaient le royaume de Bourges ; les autres assemblées du règne, qui figurent dans les histoires des États Généraux, sont en réalité partielles : ce sont d'abord les États de Languedoïl, représentant les provinces du Centre, depuis la Touraine jusqu'au Lyonnais[1], et parfois sectionnés en deux sessions ; et, en second lieu, les États de Languedoc, qui représentent seulement les trois sénéchaussées de Beaucaire, de Carcassonne et de Toulouse. Ceux-ci, d'ailleurs, servent en même temps au Languedoc d'États Provinciaux, et, à la fin du règne de Charles VII, ils rentreront définitivement dans la catégorie des assemblées provinciales. — À côté des assemblées de Languedoïl et de Languedoc, il faut mettre encore, dans ce premier groupe, des assemblées régionales et des réunions solennelles, rappelant de très près certains États Généraux du XIVe siècle, et qu'on ne peut classer parmi les États Provinciaux. Un second groupe est formé par les États Provinciaux, convoqués pour voter des subsides à l'usage du roi ou de la province. Ici encore, les degrés d'importance et de solennité sont infiniment nombreux, les provinces étant de fort inégale grandeur. À côté et au-dessous des États Provinciaux, il y a enfin les États de sénéchaussées et de prévôtés[2].

 

I. — ÉTATS GÉNÉRAUX ET GRANDES ASSEMBLÉES[3].

CHARLES VII, au temps où Bourges était sa capitale (1422-1436), ne pouvait convoquer que les députés des provinces du Centre, du Languedoc et du Rouergue[4] ; mais ni le Languedoc ni le Rouergue ne se souciaient d'envoyer leurs délégués siéger avec ceux de Languedoïl ; ils voulaient avoir leurs États particuliers. Depuis son avènement jusqu'au moment où il reprit Paris, Charles VII n'appela que quatre fois les députés du Nord et du Midi à siéger ensemble, et une seule de ces convocations aboutit à la réunion effective des délégués de Languedoïl et de Languedoc : ce fut la session de Chinon, tenue du mois de septembre au mois de novembre 1428. Encore les députés de Languedoc exprimèrent-ils, dans leurs doléances, le mécontentement qu'ils avaient éprouvé de quitter leur province, les députés de Rouergue firent plus : ils ne vinrent à Chinon que pour refuser de siéger. Après la prise de Paris, il y eut, à Orléans, en 1439, une grande réunion d'États ; elle termine la liste qu'on dresse ordinairement des États Généraux du règne ; les députés des provinces conquises sur les Anglais au nord de la Loire y parurent, mais non ceux du Languedoc ni du Rouergue.

La session tenue à Chinon à l'automne de 1428 mérite donc seule le nom d'États Généraux, et encore faut-il ne pas tenir compte de l'abstention du Rouergue. Les circonstances étaient graves : la guerre civile déchirait le Poitou et les Anglais commençaient le siège d'Orléans. L'assemblée fut imposante par le nombre des députés, la durée exceptionnelle de la session, qui fut d'un mois et demi, l'importance du subside accordé et des vœux politiques formulés. Elle demanda la répression des pillages, se plaignit de la mauvaise administration des finances et de la justice, réclama une action énergique contre l'envahisseur, la réconciliation entre les Français, le rappel de Richemont alors en disgrâce. Elle n'eut pas de meilleurs résultats que les simples assemblées de Languedoïl. Aucune réforme, aucun effort militaire sérieux ne suivit cette session plénière.

Les États de Languedoïl, depuis l'avènement de Charles VII jusqu'à la session de 1439, qui passe pour la dernière, furent réunis effectivement quinze fois, d'ailleurs sans périodicité régulière[5]. L'insécurité des routes et les malheurs des temps firent quelquefois obstacle aux réunions. Ainsi les États convoqués à Poitiers pour le 16 novembre 1427 ne purent pas se tenir. En 1424 et en 1e6, on remédia aux difficultés des voyages en scindant la session : les pro. vinces de l'Ouest envoyèrent leurs députés à Poitiers et à Mehun-sur-Yèvre, celles du Centre à Riom et à Montluçon. Chaque section consentait séparément l'ensemble du subside, et l'unité des États de Languedoïl se trouvait ainsi conservée.

En général les sessions étaient très courtes. L'assemblée de Selles, en 1423, ne dura qu'un seul jour. Aux États de Poitiers, en 1425, les députés ne tinrent séance que du 18 au 20 octobre, et pourtant ils accordèrent au roi un gros subside de 800.000 francs.

Dans ces conditions, les États ne pouvaient prendre une part bien sérieuse au gouvernement. L'époque où Charles VII fut le plus mal entouré, le plus inactif, le plus méprisé de ses ennemis, fut précisément celle où les députés de Languedoïl se réunirent le plus souvent. Il y eut pourtant auprès du roi des hommes qui leur offrirent, pour ainsi dire, un rôle politique. Au moment où il reçut l'épée de connétable, Richemont obtint la convocation d'une assemblée à Chinon, en mars 1425, non pour voter un subside, mais pour faire ratifier son programme de gouvernement par le roi, en la présence et par le conseil des gens des Trois Estas. Plus tard, après sa disgrâce, il réclamait encore la réunion des États. En 1439, les princes angevins et le connétable décidèrent le roi à convoquer une assemblée solennelle à Orléans, pour que chacun pût dire son bon et vray advis sur la question de la guerre avec les Anglais, et sur la réforme de la discipline militaire. On reconnaissait donc une autorité aux États de Languedoïl ; mais les députés ne surent pas la faire valoir. Il est vraisemblable qu'à chaque session, ils présentèrent des cahiers de doléances ; ils protestèrent, souvent avec véhémence, contre le gaspillage des finances, l'indiscipline et la brutalité des gens de guerre, ils exprimèrent des vœux très sages sur la conduite de la guerre ; mais, en aucun temps, ils n'imposèrent leurs volontés.

Leur œuvre fut mince. Deux ordonnances pour le rétablissement de la discipline militaire, celle du 28 mars 1431 et celle de 1439, et l'ordonnance, également datée du 28 mars 1431, sur les monnaies, sont dues aux réclamations des États de Languedoïl. Ce sont à peu près les seules traces que nous ayons de leur action politique sous Charles VII, et il ne faut pas oublier que la grande ordonnance de 1439 elle-même resta lettre morte.

Les États de Languedoïl auraient pu, surtout au début du règne, exiger le redressement de leurs griefs en échange du vote de l'impôt ; ils auraient pu demander à surveiller l'emploi des subsides. Ils se contentèrent de voter des sommes plus ou moins fortes, pour le recouvrement de la seigneurie du roy, pour faire cesser les pilleries, et leur loyalisme ingénu laissa Charles VII et ses favoris dépenser sans contrôle les deniers votés. Ils ne surent même pas sauver le principe du consentement à l'impôt. Charles VII établit les aides permanentes et la taille permanente, et de bonne heure il cessa de convoquer annuellement les États de Languedoïl.

Jusqu'en 1436, la royauté ne réussit pas à réorganiser les aides, impôts indirects fort impopulaires, parce qu'ils entrainaient des contestations interminables et de coûteux procès. En janvier 1435, dans une assemblée de Languedoïl où quelques provinces seulement étaient représentées, l'archevêque de Vienne proposa, au nom du roi, le rétablissement de cette contribution. L'assemblée y consentit, pour une durée de quatre ans. Les députés de Tours, arrivés après. la clôture de la session, protestèrent ; avec un sens politique peu commun alors, ils déclarèrent que le roi, au lieu de demander une décision générale aussi grave à une réunion aussi restreinte, aurait dû convoquer ensemble les Estaz de toute son obéissance et avoir sur ce leur consentement. D'ailleurs les protestations des contribuables furent si vives que les aides durent être remplacées par un impôt direct, l'équivalent aux aides. Mais, l'année suivante, Charles VII revint à la charge, et les États réunis à Poitiers en 1436 acceptèrent le rétablissement des aides. Dans la pensée des députés, la levée de cet impôt devait cesser avec les causes qui en avaient rendu le vote nécessaire[6]. Le roi avait toujours dit que les sacrifices demandés étaient provisoires et que, dès qu'il le pourrait, il se contenterait de ses droiz et domaines royaux. Mais après ce vote de 1436, il imposa les aides chaque année, sans consulter les États. Et ainsi fut fondée la permanence des aides dans les pays de Languedoïl.

Le roi procéda à peu près de la même manière pour établir la taille permanente. Déjà, en 1425, Richemont avait fait décider en Conseil qu'une taille serait levée sans attendre la réunion des prochains États : les bonnes villes apprirent en même temps qu'on allait percevoir un impôt de 260.000 livres et que les États se réuniraient dans deux mois. Beaucoup de gens refusèrent de payer ; il fallut renoncer à percevoir la taille. Mais, au moment des victoires de la Pucelle, en 1429 et en 1430, Charles VII, fort de son prestige nouveau, put se passer du concours des États de Languedoïl et demander de l'argent directement aux États Provinciaux. En 1137 et en 1138, il n'y eut pas non plus de réunion des trois ordres de Languedoïl. Celle de 1439 fut probablement la dernière. Depuis lors, le montant de la taille fut déterminé tous les ans par le roi en son Conseil, selon les besoins prévus. Mais cette taille n'était encore qu'une imposition provisoire, pour des besoins passagers. On l'appelait l'aide pour la conduite de la guerre[7]. En 1445 furent organisées les compagnies d'ordonnance et, à partir de 1446, une autre taille, la taille des gens de guerre, fut levée pour l'entretien de ces compagnies : c'est ainsi que, en 1449, l'Auvergne, outre une taille de 35.500 francs, eut à s'acquitter d'une autre taille de 59.520 francs pour le paiement des gens de guerre. En 1451, les Anglais n'étant plus à craindre, le roi supprima aide pour la conduite de la guerre, car ses sujets se plaignaient fort de la lourdeur des impôts ; mais il maintint la taille des gens de guerre. On s'habitua à la payer tous les ans, sans se demander si elle ne servait qu'à l'entretien de l'armée ; plus tard, elle perdit son nom, devint la taille du roi, et fut employée à tous usages. Ainsi se trouva fondée la taille permanente dans les pays de Languedoïl.

On a prétendu que les États de Languedoïl avaient établi eux-mêmes la taille permanente, et que leur mort avait été un suicide. C'est inexact. Les députés réunis à Orléans en 1439 votèrent simplement un subside de 100.000 francs pour une année. Ce fut moine longtemps après la clôture de cette session que Charles VII décida de se passer du concours des États. Il eut en effet l'intention de réunir à Bourges, le 15 février 1440, une assemblée plénière, et lança des convocations dans tout le royaume. Les députés devaient délibérer sur le Schisme, la délivrance du duc d'Orléans, la paix avec l'Angleterre, la réforme militaire. Ils se rendirent à Bourges et y restèrent cinq ou six mois[8] ; mais ils s'en allèrent sans avoir rien fait. Le roi était occupé à réprimer la Praguerie. Quand les princes rebelles sollicitèrent la paix, au mois de mai, le dauphin, qui était leur chef, demanda qu'on ouvrit la session des États Généraux et émit la prétention de s'y rendre avec ses partisans, afin de s'y justifier. C'était une raison de plus pour que Charles VII, menacé de voir son autorité discutée et narguée par son fils, renvoyât les députés dans leurs foyers.

Cette assemblée avortée de 1440 fut-elle la dernière du règne en Languedoïl ? L'histoire des États Généraux est si obscure qu'on ne saurait l'affirmer. On a retrouvé un document financier où il est fait allusion à l' aide octroyé en la ville de Tours au mois de juing 1448, aide qui a été perçue jusque dans le bas païs de Limosin[9]. L'absence complète de tout témoignage de ce genre pour les dernières années du règne permet au moins de supposer que de telles convocations ont été tout à fait exceptionnelles. On peut dire que, depuis 1440, en Languedoïl, le rôle financier des États Généraux est terminé.

On ne saurait en rejeter la responsabilité principale sur les députés des États. Les impôts permanents ont été fondés subrepticement en Languedoïl par les conseillers de Charles VII, qui n'ont jamais manqué une occasion de détruire toute initiative, toute puissance autre que celle du roi. Charles VII les a laissés faire, parce qu'il les laissait toujours faire, et aussi parce qu'il n'avait jamais lui-même supporté qu'à contrecœur les réunions d'États. Les reproches de Jean Jouvenel des Ursins en font foi ; dans l'Épistre au roy, composée en 1440, il rappelle avec amertume l'indifférence dont Charles VII a fait preuve pendant la session de 1439 : au contraire de son aïeul Charles V, qui vouloit tout ouïr et savoir, le roi n'a montré sa face qu'aux séances d'ouverture et de clôture ; lorsque les députés venaient lui présenter des requêtes, il se boutoit en un petit retrait, pour leur échapper, et on leur fermait la porte au nez.

Le Languedoc, longtemps soumis par le duc de Berry à un régime de tyrannie, avait repris possession en 1418 du droit, dont il jouissait au mye siècle, de consentir l'impôt. Au début du règne de Charles VII, cependant, les gens du roi essayèrent de réduire les États de Languedoc au rôle de simples États Provinciaux, et de les forcer à accepter les votes émis par une assemblée plus générale. En 1423, les États de Languedoïl, réunis à Bourges, votèrent, selon le désir du roi, un subside d'un million de livres, à répartir sur tous les pays de son obéissance, sans exception. Cette manœuvre, destinée à remettre aux seuls États de Languedoïl le soin de fixer les impôts que devait payer l'ensemble des sujets, fut déjouée par la résistance des deux provinces qui voulaient garder leur autonomie, le Languedoc et le Rouergue : elles refusèrent tontes deux la quote-part qu'on exigeait d'elles. Les États de Languedoc n'accordèrent au roi que 200.000 livres, au lieu des 300.000 demandées. Ils surent également défendre leur privilège contre le comte de Foix, qui, devenu gouverneur du Pays, prétendait lever des contributions arbitraires. Les députés envoyés par le Pays à l'assemblée de Chinon, en 14e, obtinrent de Charles VII des lettres interdisant d'établir en Languedoc aucune aide ou taille sans le consentement royal et sans appeler à ce les gens des Trois Estats. C'étaient là des déclarations fort précises, et telles que n'en reçurent jamais les États de Languedoïl.

Charles VII laissa effectivement aux États de Languedoc un rôle d'une réelle importance. L'isolement du Pays, obligé de se défendre contre les routiers, parfois contre les Anglais, accoutuma d'ailleurs les habitants à ne compter que sur eux-mêmes. Les États se réunirent tous les ans, parfois à deux ou trois reprises dans la même année[10], et souvent, pendant les premiers temps du règne de Charles VII, sur l'initiative des grandes villes. C'étaient elles d'ailleurs qui dominaient les États. La majorité des établissements ecclésiastiques s'abstenait de se faire représenter, et les nobles ne se rendaient aux assemblées qu'en petit nombre. Une trentaine de villes envoyaient des députés ; les plus considérables, Toulouse en tête, votaient les premières et entraînaient les autres suffrages.

Les députés des États de Languedoc n'accordaient pas toujours la totalité des sommes demandées par le roi, et leurs réponses aux commissaires contenaient de longues doléances, étroitement annexées à l'octroi du subside. Parfois le redressement d'un grief était acheté par une contribution spéciale. Ainsi, en mai 1435, les États de Béziers accordèrent au roi 160.000 moutons d'or, et un second subside de 25.000 moutons en échange de la révocation des réformateurs sur le fait des monnaies. Les États jouissaient aussi du privilège assez important d'asseoir et de répartir l'impôt : de concert avec les commissaires du roi, ils déterminaient la forme sous laquelle seraient levés les subsides, et ils les répartissaient entre les trois sénéchaussées. À la fin du règne, la répartition était faite par les États entre les diocèses ; dans le diocèse, il y avait une petite assemblée représentative, appelée l'assiette, qui fixait la quote-part de chaque paroisse.

Les États de Languedoc n'avaient pas plus que ceux de Languedoïl la puissance législative, ni le droit de contrôler l'emploi des sommes que le roi obtenait d'eux. Ils demandaient en vain qu'elles servissent exclusivement aux besoins de la province. Quand ils voulaient soulager les misères locales, écarter par exemple les routiers, le seul moyen sûr était de voter des impôts spéciaux. Mais leur prérogative, si restreinte qu'elle fût, leur permettait de rendre de sérieux services aux contribuables, dont ils allégeaient les charges.

Lorsque la fortune devint meilleure, les conseillers du roi regardèrent d'un mauvais œil ces assemblées à demi indépendantes. Charles VII, en 1442, manifesta même l'intention de les supprimer. Il les conserva cependant et les États de Languedoc continuèrent à voter chaque année des subsides, à en discuter la forme, et souvent à exiger des rabais ou à poser des conditions. Mais, de plus en plus, ils changeaient de caractère. Au me siècle, ils avaient été comme une section des États Généraux, réunie à part pour plus de commodité. Après la suppression des États de Languedoïl, ils devinrent une assemblée simplement provinciale, occupée uniquement des intérêts régionaux, plus puissante que les États de Normandie, mais analogue. Le Languedoc se transforma en simple pays d'États.

Les assemblées des Trois États de Languedoïl et de Languedoc ne sont pas, nous l'avons dit, les seuls comices du règne qu'on puisse comparer aux États Généraux du XIVe siècle : des assemblées très variées ont été tenues, qui ne se confondent pas avec les États Provinciaux. Lorsque les pays occupés par les Anglais au nord de la Loire ont été recouvrés, des réunions des trois ordres y ont été convoquées à plusieurs reprises, et, plus souvent, des réunions du Tiers État seul, car c'était des bonnes villes qu'on obtenait le plus d'argent, en ce temps où les campagnes étaient ruinées. Ainsi, le 14 novembre 1431, les commissaires du roi appelèrent à Troyes les députés des villes champenoises situées sur les confins de la Bourgogne, et leur réclamèrent une solde pour les garnisons royales de cette région. Ils essuyèrent d'ailleurs un refus et s'en allèrent pas contans[11]. Richemont, à peine en possession de Paris, y convoqua, pour le 8 mai 1436, les députés de Compiègne, de Reims, et d'autres villes de la région du Nord et de l'Est, pour adviser a ce qui serait affaire pour le recouvrement de Creil, Meaux et Montdidier. Le connétable exposa les résultats de la session tenue au mois de février, à Poitiers, par les Trois États de Languedoïl, et demanda aux villes de donner 30.000 écus et de consentir pour leur part au rétablissement des aides. Il ne s'était adressé cette fois qu'à la Bourgeoisie. L'année suivante, il convoqua les Trois États des pays situés au nord de la Loire, pour subvenir aux frais du siège de Montereau : l'assemblée eut lieu à Bray-sur-Seine, et une aide importante fut accordée. Dans l'hiver de 1445-1446, plusieurs années après la suppression des États Généraux, on voit encore se réunir à Meaux une assemblée de députés des villes situées au nord de la Seine et de l'Oise : Charles VII a envoyé des commissaires y demander un aide au pays de Langue d'Oïl, montant à la somme de trois cens mil livres[12].

Enfin, Charles VII tint aussi, pendant les dernières années du règne, des assemblées qui rappellent les anciennes Cours générales : telle, en avril 1444, à Tours, une assemblée des seigneurs de France et autres plusieurs grans seigneurs, barons, gens d'Église, en très grant nombre, les Anglois estans audit lieu pour le fait des treves ; telles encore les deux assemblées réunies en juillet 1449 aux Roches-Tranchelion, et où l'on décida la reprise de la guerre.

 

II. — ÉTATS PROVINCIAUX ET LOCAUX[13].

PRESQUE toutes les provinces du domaine royal ont eu, jusqu'aux dernières années de la guerre de Cent Ans, des assemblées d'États. On en trouve, non seulement en Normandie et en Dauphiné[14] mais tout aussi bien en Champagne, Berry, Touraine, Poitou, Saintonge et Aunis, Limousin, Quercy, Rouergue, Gévaudan, Vivarais, Velay. Dans le même groupe se placent les États des seigneuries étroitement soumises à l'action royale, comme l'Anjou et le Maine, possessions de la maison d'Anjou, la Marche, apanage d'un cadet de la maison de Bourbon, l'Auvergne, qui appartenait au duc de Bourbon, le Lyonnais, qui dépendait de l'archevêque-comte de Lyon.

Il était rare que les États Provinciaux se réunissent spontanément : l'assemblée était convoquée par le roi ou son lieutenant, même dans des pays comme l'Auvergne et la Marche, situés hors du domaine. Dans le centre de la France, les sessions avaient lieu au moins une fois par an. Les États de Saintonge et d'Aunis, en 1428-1429, furent réunis dix fois.

Les deux premiers ordres étaient généralement représentés par les titulaires de certaines charges ecclésiastiques et de certains fiefs, convoqués personnellement. Il y avait cependant des cas d'élection ecclésiastique ; ainsi le chapitre de Limoges choisissait un procureur. De même qu'aux États Généraux, les paysans étaient censés représentés par les seigneurs, et les députés du Tiers étaient des bourgeois, élus par les magistrats et les notables des villes les plus importantes[15]. Avec les députés siégeaient les commissaires du roi, chargés de demander le subside, parfois même de le répartir entre les paroisses et de juger les contestations relatives à l'impôt.

Les États se réunissaient dans une des villes principales du pays,  et tenaient séance deux ou trois jours, le plus souvent dans une église. Les nobles et les clercs siégeaient avec les bourgeois. Ils n'avaient aucune répugnance à le faire, car ils ne venaient là que pour discuter l'impôt à lever sur leurs sujets : le principe de l'exemption des personnes nobles était déjà admis définitivement[16]. Le Clergé, quand il accordait pour son propre compte un subside, le faisait dans une réunion particulière.

La fonction principale des États Provinciaux était d'examiner, concurremment ou non avec les assemblées que nous appelons États Généraux, les demandes d'argent faites par le roi[17]. Les États de chaque province se montraient fort jaloux de leurs privilèges. En 1435, les habitants du Franc-Alleu virent arriver un sergent de Limoges, leur réclamant une part d'un impôt qui avait été voté par les États du Haut-Limousin. Le Franc-Alleu se composait d'une douzaine de paroisses d'Auvergne ; il avait, malgré sa petitesse, des États. Les nobles du pays convoquèrent de leur propre initiative une assemblée, et il fut décidé qu'on ne paierait pas l'impôt. Très souvent il arrivait que les États Provinciaux exigeaient un rabais, et les sommes votées par les assemblées de Languedoïl subissaient de ce fait d'importantes diminutions. Enfin ils se prononçaient sur la forme de l'impôt, et souvent ils repoussèrent les innovations proposées par le roi et acceptées par les députés de Languedoïl. Ils retardèrent le plus possible le rétablissement des aides.

Ainsi que les États de Languedoc, mais à un moindre degré, certains États Provinciaux contribuaient à la répartition des impôts. Tantôt ils nommaient des délégués qui contrôlaient la répartition opérée par les commissaires du roi ou les élus. Tantôt même ils opéraient directement : en Basse-Auvergne, la répartition était faite entre les treize bonnes villes par leurs propres délégués, et entre les habitants des campagnes par les délégués des seigneurs nobles et ecclésiastiques. Les États rendirent surtout des services en faisant, décharger les villages ruinés par la guerre; c'était ce qu'on appelait la réformation des feux.

Le subside royal, une fois voté et réparti, échappait à l'action des États Provinciaux. Mais ils votaient en outre certaines sommes, souvent égales ou supérieures à l'impôt royal, pour subvenir aux besoins locaux les plus urgents. C'étaient les deniers mis sus, oultre le principal. Pendant la première partie du règne de Charles VII, ils étaient levés et dépensés sans autorisation royale.

Les États Provinciaux avaient donc, soit pour le vote, soit même pour l'administration de l'impôt, des pouvoirs plus étendus que les États de Languedoïl ; de même, ils curent un rôle politique plus actif. Non seulement ils présentaient au roi des cahiers de doléances, souvent très soignés, mais ils s'occupaient pratiquement du bien public. Les voies de communication, l'hygiène même, étaient l'objet d'allocations spéciales. Les États défendirent le territoire de leur province contre les Anglais et plus souvent encore contre les Écorcheurs. Les États de Saintonge firent démolir en 1431 des forteresses qui servaient de repaires aux routiers, et organisèrent, dix ans plus tard, une campagne contre le sire de Pons. Les États du Centre firent parfois alliance avec des pays ou des seigneurs voisins ; les parties contractantes s'engageaient à se protéger mutuellement.

Il était inévitable que le roi essayât de détruire, aussitôt qu'il le pourrait, l'autonomie provinciale. Lorsque les assemblées de Languedoïl cessèrent d'être convoquées, le Conseil du roi fixa chaque année le chiffre de l'impôt et la quote-part de chaque province. Sous la pression d'un pouvoir de plus en plus fort, les États Provinciaux faiblirent, accordèrent sans rabais la totalité des sommes demandées, en se contentant de présenter quelques doléances. Leurs prérogatives tombèrent une à une. En 1442, les États de Basse et Haute-Auvergne ayant voté, outre le subside royal qui était de 20.000 francs, une somme de 24.000 francs pour protéger la province contre les pillages des routiers, le roi déclara qu'il avait seul le droit de lever des impôts, et punit cette atteinte à son autorité d'une amende de 20.000 francs. Il chercha ensuite à empêcher les États de Basse-Auvergne de répartir eux-mêmes les impôts. Les États du centre de la France luttèrent une dizaine d'années pour conserver leurs privilèges ; mais, à partir de 1451 environ, ils ne furent plus convoqués que très rarement. Les provinces du Centre payèrent sans mot dire la part d'impôts qui leur était attribuée par le Grand Conseil, et les élus royaux s'y installèrent, pour faire la besogne de la répartition : ce furent, désormais des pays d'élections.

Les États de sénéchaussées et de prévôtés connurent la même grandeur et la même décadence. Pendant la première partie du règne de Charles VII, ils se réunissaient et votaient des subsides pour les besoins locaux, même dans les pays qui avaient des assemblées représentant toute la province, comme le Languedoc et l'Auvergne. Ainsi l'on voit les Trois États de la prévôté de Saint-Flour et ceux de la sénéchaussée de Toulouse délibérer sur la question des routiers. En Guyenne, Charles VII ne convoqua point d'États Provinciaux, ni dans la partie française, ni dans la partie conquise sur les Anglais : il recourut aux États de sénéchaussées. En 1443, les États de la sénéchaussée d'Agenais et de Gascogne refusèrent un subside de 2000 écus ; les consuls de Condom et de Montréal, qui menaient la résistance, ayant été jetés en prison par les commissaires royaux, une agitation générale s'organisa, et les habitants se cotisèrent pour former appel devant le Parlement de Paris. Mais il n'était plus temps pour ces manifestations d'indépendance : en 1443, l'autonomie locale était partout menacée. Le subside fut payé, et l'année suivante les États ne refusèrent point de le voter[18].

Les diverses assemblées d'États, réunies par les gens du roi au XIVe siècle, pour entendre la volonté royale et fournir aide et conseil[19], avaient paru un moment, au milieu des malheurs de l'invasion anglaise, devenir une institution de contrôle et de liberté. Pendant une crise, sous le règne de Jean le Bon, des assemblées restreintes, qu'on a appelées États Généraux, avaient pris une part effective au gouvernement du royaume ; mais le système de contrôle créé alors avait été purement provisoire. On a vu comment l'absence d'entente entre les trois ordres, le manque d'esprit politique, le prestige toujours intact de la personne royale, la grande étendue et la diversité du royaume, avaient empêché que la France eût à ce moment-là sa Charte. — Au XVe siècle, ni en 1413, ni sous le règne de Charles VII, les assemblées d'États n'entreprirent plus rien contre l'autorité monarchique. Le principe du consentement à l'impôt n'était pas inconnu, mais il ne fut pas imposé au roi par la masse de la nation. Il faut le répéter, la France était trop diverse et l'esprit politique manquait. Les Français du moyen âge sentaient très vivement les abus du pouvoir, mais ils se contentaient généralement de déblatérer contre les gens du roi et d'exiger des révocations d'officiers. Pour se garantir contre le retour de ces abus, ils songeaient moins à se créer des garanties constitutionnelles qui auraient protégé toute la nation, qu'à raffermir de vieux droits particuliers, protégeant telle classe, telle communauté, telle région. Nobles, Clergé, bonnes villes, aspiraient surtout à s'assurer des privilèges. Il est incontestable pourtant que la guerre de Cent Ans avait développé en France un germe de libertés politiques : la constitution anglaise est sortie de crises analogues. Mais la guerre de Cent Ans contribua aussi à faire avorter ce germe, parce qu'elle donna au roi de France le prestige d'avoir chassé l'étranger et vaincu l'anarchie ; elle fortifia ainsi le loyalisme monarchique, sentiment bien plus simple et plus accessible à la foule que ne le sont nos conceptions politiques modernes.

Défaut d'idées générales, progrès de la religion de la royauté, telles furent les deux causes principales de l'échec des États Généraux au XVe siècle. Il faut aussi tenir grand compte de raisons diverses qui les rendirent impopulaires. Au milieu de tant de misères, de tant de périls et de besoins pressants, quels sentiments en effet pouvaient éprouver les sujets de Charles VII, en recevant la nouvelle d'une convocation d'États Généraux ? Sauf une seule fois (en 1425), on ne leur demanda jamais aide et conseil que pour exiger d'eux de nouveaux impôts. En outre, les frais de députation étaient à la charge des électeurs, et pouvaient être fort lourds. Aussi fallait-il des lettres comminatoires pour obliger les bonnes villes à se faire représenter. Quant aux députés, ils devaient quitter leur foyer et leurs affaires pour s'acquitter d'une longue et pénible mission, qui ne leur procurait que tribulations et déboires : au retour, ils étaient à peu près sûrs d'entendre un concert de malédictions contre les impôts qu'ils avaient dû consentir, et ils avaient toutes les peines du monde à se faire rembourser leurs dépenses ; heureux encore ceux qui revenaient sains et saufs, car un voyage, alors, entraînait danger de mort. On comprend donc que le peuple ait pris très aisément son parti de la disparition des États Généraux. Les États Provinciaux et locaux eurent la vie plus dure : outre qu'ils n'exigeaient pas de voyages longs et coûteux, ils s'occupaient de soulager les misères du pays et on en apercevait facilement les effets bienfaisants ; mais, sous la savante et lourde pression des gens du roi, ils perdirent leur indépendance. Le roi n'avait plus besoin d'assemblées d'États. Par elles, il avait habitué son peuple à payer la taille et les aides ; avec elles, ses conseillers avaient élaboré quelques projets de réformes militaires et financières ; sans elles, ils résolurent pratiquement le problème de rétablir l'ordre en France, et de donner au roi une armée solide et de bonnes finances[20].

 

III. — RÉORGANISATION DES FINANCES ROYALES[21].

APRÈS le traité d'Arras et le recouvrement de Paris, commença la restauration des finances royales. La Chambre des Comptes et les généraux conseillers sur le fait de la justice des aides reprirent leur place à Paris. Des commissions spéciales firent rendre gorge aux officiers malversateurs : l'évêque de Laon, Guillaume de Champeaux, fut révoqué, et ses biens furent saisis. De 1438 à 1480, tandis que les impôts s'établissaient en permanence, de grandes ordonnances réorganisèrent l'administration financière.

Le domaine royal, peu à peu, était arraché aux Anglais. Il avait fallu, il est vrai, en céder une partie importante au duc de Bourgogne pour obtenir la paix d'Arras, et, jusque vers 1443, le roi aliéna beaucoup de terres en faveur de ses favoris et de ses serviteurs[22]. En revanche, de 1442 à 1460, le duché de Nemours, le Dauphiné, augmenté des comtés de Diois et de Valentinois, le comté d'Armagnac et le duché d'Alençon furent annexés aux terres de la couronne[23]. La misère générale, les concussions et l'incurie des officiers, avaient fait des propriétés foncières de la couronne une non-valeur : une série de règlements en réforma sévèrement l'administration. Mais il y avait longtemps que les rentes du domaine ne suffisaient plus aux rois de France. Le monnayage, soumis à un contrôle rigoureux, ne fut pas non plus très productif, parce qu'il fut désormais pratiqué honnêtement : la frappe cessa d'être un expédient fiscal et la mauvaise monnaie fut décriée. Il fallait donc d'autres ressources. Ce furent les finances extraordinaires qui les donnèrent.

La taille royale, qu'on appelait jadis le Touage, les aides et la gabelle du sel avaient été inventés au siècle précédent, mais employés longtemps sans régularité et comme des expédients temporaires. Depuis le règne de Charles VII, jusqu'à la fin de l'ancien régime, ces impôts ne cessèrent plus d'être perçus. On a vu qu'à partir de 1440, l'impôt direct de la taille fut levé sans intervention des États Généraux, au moins en Languedoïl. Souvent, dans le courant de l'année, le roi ordonnait une augmentation : c'était la crue de taille. Il existait deux sortes de tailles : la taille réelle et la taille personnelle. La première était payée par la terre roturière, quelle que fût la qualité du propriétaire, qu'il fût clerc, noble ou roturier, car les terres, au moyen âge, étaient, comme les personnes, nobles ou roturières, et un noble pouvait posséder une terre roturière. Cette taille réelle avait cours dans une partie de la Guyenne et en Languedoc. La taille personnelle, qui avait cours dans le reste du royaume, était aussi un impôt foncier, mais n'atteignait que les roturiers, quelle que fût d'ailleurs la qualité de leurs terres : elle ne frappait point les nobles ni les clercs ; et cette exemption s'étendait aux officiers du roi, non pas encore par une règle générale, mais par des faveurs spéciales de plus en plus nombreuses. La répartition des tailles, d'ailleurs, donnait lieu à toutes sortes d'inégalités : de deux paroisses voisines, l'une était moins chargée que l'autre.

Les aides, supprimées par Charles avant son avènement au trône, furent rétablies en 1436. Les aides étaient une taxe d'un sou par livre, sur le prix de vente de toutes marchandises achetées ou échangées. Cet impôt étant d'une perception difficile, parfois ruineuse pour ceux qui le prenaient à ferme, certaines provinces obtinrent qu'il fût modifié. Ainsi en Languedoc, les aides furent remplacées en 1443 par un équivalent, impôt indirect qui frappait seulement la viande et le poisson, et dont le chiffre était fixé d'avance ; le total n'étant jamais atteint, la somme était complétée par la perception d'une taille.

La gabelle du sel n'avait pas non plus une organisation uniforme. Dans le Poitou, la Saintonge et le gouvernement de la Rochelle, où le sel était une des rares richesses des habitants, les droits étaient faibles : la gabelle consistait dans le quart ou le quint de sel, c'est-à-dire le quart ou le cinquième du prix de vente, et. ne produisait guère que 8.500 livres par an ; la perception était adjugée à des fermiers[24]. En Languedoc, l'impôt rapportait 70.000 livres : près des marais salants se dressaient les greniers royaux ; c'étaient des entrepôts de douane, où tout le sel devait passer, pour être frappé de la taxe. Dans le reste de la France, les greniers royaux étaient des magasins de vente, où les particuliers devaient aller chercher leur provision de sel.

La dernière année du règne, les revenus de la couronne montaient à 1.800.000 livres[25] ; les produits du domaine ne figuraient dans ce total que pour 50.000 livres. Les impôts extraordinaires étaient à peine plus lourds qu'à la fin du règne de Charles V. Le roi avait renoncé aux crues de taille, aux emprunts forcés sur les particuliers, aux impôts extraordinaires levés sur les villes, et aux autres expédients en usage jusque vers 1450. La population, encore très misérable, se plaignait des impôts ; mais elle ne pouvait guère être ménagée davantage, et l'on a pu dire que les dix dernières années du règne de Charles VII furent, au XVe siècle, l'âge d'or du contribuable.

Le meilleur moyen de rendre la taille et les aides supportables et d'en assurer la perception, c'était de supprimer les autres charges qui pesaient sur le peuple et de réserver au roi seul le droit d'imposer. Lorsque fut rédigée, après la session des États d'Orléans, l'ordonnance de 1439, on y inscrivit la peine de la confiscation des biens pour les seigneurs qui retiendraient une partie des deniers dus au roi par leurs sujets, ou mettraient aucune creue par dessus la taille du roy ; on ajouta même qu'il était défendu à tout seigneur de lever une taille ou un impôt quelconque sans autorisation. Ni l'une ni l'autre de ces interdictions ne furent respectées. En 1442, Charles VII se plaignait que les seigneurs retinssent pour eux une partie des tailles royales. Au XVIe siècle, la taille seigneuriale existait encore en bien des endroits. Il fut moins difficile de briser la résistance des assemblées provinciales et municipales. Charles VII interdit aux États de lever des deniers sans sa permission, attaqua l'autonomie des États de Languedoc eux-mêmes, contrôla et réduisit leurs votes de taxes locales. On verra enfin que, sous couleur de défendre les villes contre les officiers municipaux, il anéantit leur indépendance financière.

Non seulement les impôts étaient en théorie réservés au roi seul, mais ils devaient avoir plein cours en tous les lieux de ce royaume[26] (sauf dans les domaines du duc de Bourgogne, préservés par les conventions d'Arras). Cet autre principe n'était pas plus facile à pratiquer que le premier. Les grands vassaux très puissants ne laissaient pas les officiers du fisc pénétrer chez eux. Pour forcer l'entrée du comté d'Armagnac, il fallut une guerre : en 1443, une armée royale envahit les domaines du comte Jean IV et les conquit. Les habitants refusèrent encore de payer la taille. Horriblement foulés par les garnisaires, ils ne cédèrent qu'au bout de quelques années. Le puissant voisin du comte d'Armagnac, Gaston 1V de Foix, également menacé par les sommations royales, tint bon, et Charles VII n'insista pas[27].

Les empiétements du fisc réussirent, sans bruit, dans des fiefs de moindre importance, comme au temps de Charles V. À l'extrémité du royaume, dans ce Midi si longtemps autonome, la maison d'Albret laissa violer ses immunités. Le plus souvent on amadouait les seigneurs en leur servant des pensions et en leur abandonnant une partie des impôts. D'ailleurs on usait de ménagements envers leurs sujets : on leur épargnait les crues de taille[28].

II s'en fallait donc qu'il y eût, dans le royaume, égalité devant l'impôt. Le régime n'était pas le même dans les grands fiefs que dans le domaine. Dans le domaine même, on a vu que le poids des impôts m'était pas le même pour tous les pays ni pour tous les sujets. La royauté avait établi le principe qu'aucune partie du royaume ne pouvait être exempte de la contribution publique ; mais elle ne pouvait avoir et n'eut pas en effet l'idée d'un régime fiscal uniforme : elle laissa subsister les usages particuliers qui s'étaient formés dans les diverses régions et les privilèges déjà reconnus des nobles et des clercs. À ces privilèges, commençaient à s'ajouter ceux des officiers. Ainsi apparaissaient déjà des imperfections et des abus qui devaient s'aggraver et constituer une des grandes injustices de l'Ancien Régime.

Il est à noter que la Monarchie maintenait pourtant son droit de taire payer l'impôt aux gens d'Église, dans les cas d'urgence exceptionnelle. L'Université de Paris paya en 1437 l'aide levée pour le siège de Montereau. En 1441, on lui réclama encore de l'argent pour le siège de Pontoise. Elle résista, suspendit ses cours et finit par céder. Les clercs du Languedoc durent contribuer à l'aide levée, dans l'hiver de 1443-1444, pour la défense du royaume : De raison et de toute équité, était-il dit dans les lettres du 26 février 1444 puisque lesdits deniers sont levez pour employer au fait de la chose publique, est chose raisonnable que tous en général et en particulier y contribuent. Dans l'ordonnance du 19 juin 1445, le roi déclare que les gens d'Église, sauf les écoliers des Universités, doivent payer les impôts levés pour la défense du royaume, et être au besoin contraints par prise, arrest et exploitation de leur temporel. Lorsque la taille des gens de guerre fut établie, l'occasion se présenta d'appliquer en grand ce principe. Il fut question de faire participer les gens d'Église à la nouvelle charge ; à Senlis, il y eut à ce sujet une bataille en règle entre les prêtres de la ville et les gens du roi, soutenus par les bourgeois. Finalement les ecclésiastiques furent exemptés de la nouvelle taille, mais le roi leur demanda de l'argent pour aider à soulager ses sujets laïques.

Les conseillers de Charles VII fondèrent une administration financière stable et bien ordonnée, qui subsista sans modifications essentielles jusqu'au règne de François Ier. Messieurs des Finances, c'est-à-dire les généraux, les trésoriers, et d'autres hauts officiers de compétence spéciale formèrent auprès du roi un Conseil, qui élaborait le budget et accaparait la gestion des deniers publics. Nulle part le début de l'œuvre monarchique de centralisation ne s'aperçoit plus nettement.

Le royaume fut divisé en quatre circonscriptions (Languedoïl, Languedoc, Pays-outre-Seine-et-Yonne, Normandie), qui s'appelaient charges pour la gestion du domaine et généralités pour la gestion des finances extraordinaires[29]. Dans chacune des quatre charges, le domaine était administré par un trésorier de France, et les recettes de chaque prévôté étaient encaissées par un receveur ordinaire. À Paris résidait un changeur du Trésor, receveur général des revenus domaniaux. La généralité était administrée par un général des Finances, assisté d'un receveur général. Si l'on excepte le Languedoc, où les États avaient un rôle financier considérable, et quelques petits pays, chacune des généralités était divisée en élections, dont les limites se confondaient le plus souvent avec celles des diocèses. Deux élus, un greffier, un procureur royal, un ou deux receveurs, assuraient en chaque élection le recouvrement des aides, adjugées en fermes, et la perception des tailles. L'impôt du sel avait une administration spéciale, variable selon le régime de la gabelle.

Les questions contentieuses concernant les impôts étaient portées devant les élus et en appel à Paris, devant la Chambre des généraux conseillers sur le fait de la justice des aides[30]. Les contestations relatives au domaine étaient examinées par les tribunaux locaux ordinaires, et jugées en appel par la Chambre des Comptes. Cette cour souveraine pouvait frapper de peines pécuniaires et afflictives les officiers de finances. Sa primitive et principale mission était de vérifier les comptes.

Cette organisation, réglée dans le détail par des ordonnances minutieuses, mit tous les deniers publics à la discrétion du roi. L'individualité financière des provinces disparut, au moins en théorie. Les impôts que telle d'entre elles payait pouvaient être appliqués à des usages qui lui étaient complètement étrangers, et l'argent dont elle avait besoin pouvait aussi lui arriver de l'autre bout du royaume. En pratique, pourtant, la plupart des fonds encaissés étaient employés sur place, afin d'éviter autant que possible les transports de numéraire. La centralisation financière ne devait s'achever que sous le règne de François Ier.

L'œuvre accomplie par les conseillers de Charles VII dans la dernière partie du règne n'a pas été une œuvre révolutionnaire. Les protestations de Jouvenel des Ursins contre les abus de l'omnipotence royale ne doivent pas nous égarer. Ces abus étaient fort anciens. L'autorité monarchique ne s'est développée que selon de vieilles traditions ; très souvent elle n'a fait que se reconstituer, telle qu'elle était au temps de Charles V. C'est l'exemple de ce sage qui parait avoir constamment guidé les conseillers de Charles VII. Ils ont voulu comme lui une armée disciplinée, une bonne justice. Ils ont pu, il est vrai, aller plus loin que Charles V : ils ont réussi à organiser des finances relativement régulières, en épargnant au peuple de trop lourdes charges, et ils ont humilié, comme nous le verrons, de puissants barons ; c'est que la guerre de Cent Ans a affaibli la plupart des puissances rivales de la Royauté, et qu'elle a grandi le roi, qui a chassé l'étranger et replacé la France au premier rang dans la Chrétienté. C'est la Monarchie moderne qui commence. Le roi, très bien secondé par un nombreux personnel d'officiers, dispose maintenant d'une armée permanente et d'impôts permanents ; il est en mesure le réduire à la définitive obéissance les communautés urbaines et la Noblesse.

 

 

  



[1] Touraine, Maine, Anjou, Orléanais, Poitou, Saintonge, Angoumois, Marche, Limousin Berry, Auvergne, Bourbonnais, Forez, Beaujolais, Lyonnais. Toutes ces provinces ne furent pas constamment représentées. Ainsi, à l'assemblée d'avril 1428, l'Anjou, la Touraine, le Berry et le Poitou envoyèrent seuls des députés. Les députés de Champagne et d'Île-de-France apparurent aux assemblées tenues après le recouvrement de ces provinces.

[2] Les assemblées tenues dans les grands fiefs indépendants, comme la Bourgogne et la Bretagne, forment une catégorie à part, qui n'entre pas dans le cadre de cette étude sur les Institutions royales.

[3] OUVRAGES À CONSULTER. Études de M. Antoine Thomas sur Les États Généraux sous Charles VII, dans le Cabinet historique, 1878 : la Revue historique, t. XL, 1889 ; les Annales du Midi, 1889 et 1892. Georges Picot, Histoire des États généraux, 2e édit., 1888, t. I. Loiseleur, L'administration des finances au commencement du XVe siècle, § 2, Mém. de la Soc. archéolog. de l'Orléanais, t. XI. Dom Vaissète et dom Devic, Histoire générale de Languedoc, édit. Privat, t. IX à XII. Dognon, Quomodo tres status Linguae Occitanae, incante XVe saeculo, inter se convenire assueverint, 1896 ; Les institutions du pays de Languedoc, 1896.

[4] Les Anglais occupaient les provinces du Nord et du Sud-Ouest, les comtés de Foix et d'Armagnac et la Bretagne échappaient à l'action royale, et le Dauphiné ne faisait pas, à proprement parler, partie du royaume de France.

[5] Voici le tableau des États de Languedoïl tenus sous le règne de Charles VII, d'après les travaux de M. de Beaucourt et surtout ceux de M. Antoine Thomas :

1. Bourges, janvier 1423. Vote d'un million de livres tournois, dont 100.000 sur le clergé.

2. Selles, 18 août 1423. Rétablissement momentané des aides. Vote d'une taille de 200.000 l. t.

3. Selles, mars 1424. Vote d'un million de francs.

4. Poitiers, octobre 1424. Vote d'un million. Riom, novembre. Id.

5. Chinon, mars 1425. Pas de subside.

6. Poitiers, octobre 1425. Vote de 800.000 francs.

7. Mehun-sur-Yèvre, novembre 1426. Vote de 120.000 francs. - Établissement d'une capitation. - Montluçon, décembre 1426. Id.

8. Chinon, avril 1428. Assemblée partielle. Vote de 100.000 bancs. (Sur le session plénière tenue en novembre, voir la fin de la note).

9. Poitiers, mars 1431. Vote de 200.000 livres.

10. Amboise, novembre 1431. Établissement d'un impôt indirect sur les entrées et sorties.

11. Tours, septembre 1433. Vote de 40.000 livres. Établissement d'un fouage.

12. Tours, août 1434. Vote de 40.000 livres.

13. Poitiers, janvier 1435. Assemblée partielle. Vote d'une taille de 120.000 livres. Rétablissement des aides pour quatre ans.

14. Poitiers, février 1436. Vote d'une taille de 200.000 livres.

15. Orléans, septembre 1439. Vote de 100.000 francs.

A ces quinze réunions, il faut ajouter l'assemblée plénière de Languedoïl et de Languedoc, qui se réunit à Chinon en 1428, vers le 15 septembre, et se termina en novembre, après avoir voté un subside de 500.000 francs. Nous ne faisons figurer dans notre liste ni les assemblées convoquées au nord de la Loire, ni la session avortée de 1440, ni la réunion tenue à Tours en 1448. Il en sera parlé plus loin.

[6] Les députés de Lyon déclarèrent même, à leur retour, qu'ils n'avaient accordé le rétablissement des aides que pour un an. Comme l'a dit M. Antoine Thomas, les États furent certainement trompés par quelque équivoque.

[7] Il ne faut pas confondre cette aide, impôt direct, avec les aides, impôt indirect.

[8] Documents tirés des Archives de Troyes, par Th. Boutiot, dans la Collection de documents inédits relatifs à la ville de Troyes, t. I, 1878, n° 1.

[9] De Beaucourt, Charles VII, t. IV, p. 48, note 4. — Il s'agit peut-être d'une assemblée de députés des bonnes villes, analogue à celles dont nous parlons plus loin.

[10] On trouvera le catalogue des sessions dans la Thèse latine de M. Dognon.

[11] Mémoires de la Soc. académique de l'Aube, 1896, p. 124 et suiv.

[12] Rapport des députés de Senlis, publié par Flammermont, Institutions municipales de Senlis, 1881 p. 270.

[13] OUVRAGES À CONSULTER. La meilleure monographie est celle de M. Antoine Thomas : Les États provinciaux de la France centrale sous Charles VII, 1879-1880. — Pour les assemblées de Champagne : Roserot, Mém. de la Soc. acad. de l'Aube, 1896. — Ch. de Beaurepaire, Les États de Normandie sous le règne de Charles VII, Travaux de l'Acad. de Rouen, 1874-1875. — Denys d'Aussy, Rev. de Saintonge, 1894. — Pour le Rouergue : Antoine Thomas, Annales du Midi, 1890. Rouquette, Le Rouergue sous les Anglais, 1887. — Pour l'Agenais : Abbé Breuils, Rev. des Quest. histor., 18095, t. I.

[14] Provinces appelées à la fin de l'ancien régime pays d'États. Nous ne nommons point ici la Guyenne, parce que ses assemblées d'États, supprimées à la suite de la seconde conquête, ne reparurent que sous le règne de Louis XI.

[15] Tels étaient du moins les usages les plus généraux. La diversité des formes de ces institutions locales était infinie. On serait d'ailleurs encore plus embarrassé pour décrire méthodiquement les usages, variables et mal connus, suivis dans les réunions d'États Généraux.

[16] La taille n'était réelle qu'en quelques pays du Midi.

[17] Cet examen suivait généralement, ce semble, le vote des États Généraux, mais pouvait aussi le précéder. Parfois les États Généraux élevèrent à un chiffre supérieur la somme déjà votée par les États d'une province : ce tut le cas pour la Saintonge en 1423. Il pouvait arriver aussi que le roi demandai de l'argent aux États Provinciaux, sans convoquer les États Généraux.

[18] Dans la sénéchaussée des Lannes (Landes), Charles VII créa ou au moins ressuscita sur le tard l'institution des États ; mais ce fut un procédé pour accoutumer les habitants à payer l'impôt royal. Voir l'étude de Cadier dans la Revue de Béarn, t. III, 1885.

[19] Ce fut du moins le cas le plus général. À l'origine de l'État de Normandie, il y eut un contrat entre le roi et les sujets.

[20] Les assemblées d'États nées dans les grands fiefs comme dans le domaine royal, vers la même époque et pour les mêmes raisons fiscales, n'aboutirent pas davantage à la création de libertés politiques durables, susceptibles de développement continu. Les barons permirent, il est vrai, aux États de subsister, do présenter des griefs, de rogner les subsides qu'on leur demandait, alors même quo dans le domaine royal le régime représentatif était à peu près anéanti : ils laissèrent l'institution vivre, parce qu'elle leur procurait des sommes considérables, qu'il leur aurait été difficile d'obtenir autrement. Les États de Bourgogne, au temps de Philippe le Bon, eurent un rôle vraiment de premier ordre dans le gouvernement du duché, notamment pendant la période de l'Écorcherie. Mais, au dehors comme au dedans du domaine royal, les assemblées d'États n'avaient aucune participation de droit au pouvoir législatif ; et, en matière financière, le seigneur imposait de temps en tempe sa volonté, comme pour interrompre la prescription. Lorsque, peu d'années après la mort de Charles VII, la Bourgogne, la Provence, la Bretagne, vinrent s'agréger au domaine royal, elles conservèrent leurs libertés particulières, et devinrent des pays d'États : mais elles furent en réalité, comme la Normandie, la Guyenne et le Languedoc, livrées à l'arbitraire fiscal de la Monarchie : elles y avaient été préparées par l'arbitraire de leurs princes. — Consulter pour les assemblées du duché de Bourgogne : Marcel Canat, Documents inédits pour servir à l'histoire de Bourgogne, 1863 ; Bougenot, Les États de Bourgogne, Positions des Thèses de l'École des Chartes, 1984 ; Beaune et D'Arbaumont, La Noblesse aux États de Bourgogne, 1864 ; Fréminville, Les Écorcheurs en Bourgogne, 1886. — Pour les États de la comté de Bourgogne : Clerc, Les États Généraux et les libertés publiques en Franche-Comté, t. I, 1891. — Artois : F. Filon, Revue des Sociétés savantes, 1860, 1er semestre. — Bretagne : Dupuy, Réunion de la Bretagne à la France, t. I. 1880. — Fage, Les États de la vicomté de Turenne, t. I. 1894. — Armagnac : Parfouru et De Carsalade Du Pont, Comptes consulaires de Riscle, t. I, 1886. — Domaines du comte de Fois : Pasquier, Bull. histor. et philologique ; Courtrault, Gaston IV, 1895. Cadier, Les États de Béarn, 1888.

[21] SOURCES. G. Jacquelon, Documents relatifs à l'administration financière en France, 1443-1523, 1891 (notamment : Le Vestige des Finances, petit traité didactique du commencement du XVIe siècle, décrivant l'administration financière, telle que la réorganisèrent les conseillers de Charles VII). Documents publiés par l'abbé Douais, Annales du Midi, 1896. Henri Boude, Éloge de Charles VII, chap. IV. Thomas Basin, liv. V, chap. XXVI.

OUVRAGES À CONSULTER. Jacqueton, Documents, Introduction — Sur les finances en Languedoc, études de Spont, Annales du Midi, 1890 et 1891. Dognon, Institutions du pays de Languedoc, 1876. — L. Guiraud, Jacques Cœur, 1900, chap. II. - Flammermont, Institutions municipales de Senlis.

[22] C'est ainsi qu'il avait donné, dès 1421, le comté d'Étampes à Richard de Bretagne, frère du duc Jean V, et en 1425 la seigneurie de Parthenay à Richemont, et qu'il donna en 1443 le comté de Longueville à Dunois, le comté de Gien et d'autres terres à Charles d'Anjou. À partir de 1450, les aliénations redevinrent assez fréquentes, par la volonté personnelle de Charles VII, notamment en faveur d'André de Villequier, qui avait épousé une maîtresse du roi. Pour le détail, voir de Beaucourt, Charles VII, t. II, p. 561-564 ; t. III, p. 418-419 ; t. V, p. 828 ; t. VI, p. 348.

[23] De Maricourt, Histoire du duché de Nemours, Positions des Thèses de l'École des Chartes, 1900.

[24] Les conseillers de Charles VII songèrent un moment à établir des greniers à se dans cette région ; voir les curieux Mémoires des délégués de Poitiers, publiés par Ledain, Arch. histor. du Poitou, t. II.

[25] I. Finances ordinaires : 50.000 livres. II. Finances extraordinaires : 1.750.000 livres. — Les revenus de Charles V s'élevaient au même total, a raison de 300.000 livres pour le domaine et de 1.500.000 livres pour les finances extraordinaires (d'après Spont, Annales de Midi, 1890, p. 366 et suiv.)

[26] Réponse du Grand Conseil aux doléances des États des Lannes, publiée per Cadier, La sénéchaussée des Lannes sous Charles VII, Revue de Béarn, t. III, 1866.

[27] Sur l'affaire d'Armagnac, voir plus loin, chap. VIII, § 2. La résistance des habitants nous est connue par les Comptes de Riscle, publiés par Parfouru et De Carsalade Du Pont, t. I, p. 25 et suiv. — Sur Gaston IV de Foix, outre le livre de M. Courteault, voir la Requête publiée dans les Annales du Midi, 1900, p. 497 et suiv.

[28] C'est ce qu'indique très nettement la réponse du roi aux doléances des nobles réunis à Nevers en 1442 (Monstrelet, édition Douët d'Arcq, t. VI, p. 99).

[29] La généralité d'Outre-Seine-et-Yonne fut constituée en 1436, celle de Normandie en 1450. La Guyenne fut rattachée, pour l'administration financière, au Languedoc, plus tard à la Languedoïl. À mesure que les successeurs de Charles VII annexèrent de nouvelles provinces à leur domaine, Picardie, Bourgogne, Provence, Bretagne, une généralité nouvelle fut créée.

[30] Ou, en abrégé : Chambre des Aides.