HISTOIRE DE FRANCE

TOME QUATRIÈME — CHARLES VII. LOUIS XI ET LES PREMIÈRES ANNÉES DE CHARLES VIII (1422-1492).

LIVRE PREMIER. — CHARLES VII. FIN DE LA GUERRE DE CENT ANS.

CHAPITRE V. — RÉFORMES MILITAIRES. FIN DE LA GUERRE DE CENT ANS.

 

 

I. — COMPAGNIES D'ORDONNANCE. FRANCS-ARCHERS. RÉTABLISSEMENT DE L'ORDRE EN FRANCE[1].

LA nouvelle de la trêve conclue en 1444 fut accueillie dans les deux royaumes par une extraordinaire explosion d'allégresse. En France, la population des villes se répandait joyeusement dans les champs. Si douloureux que fût le spectacle de la campagne dépeuplée, on s'enivrait de la vue des prés verts et de l'eau vive : c'était un spectacle dont une génération entière de citadins avait été privée. Au milieu des lamentables ruines dont la France était couverte, l'espoir renaissait. En Angleterre, le parlement, tout à la joie d'une suspension d'armes qui ne froissait pas l'amour-propre national, félicita de son œuvre ce même Suffolk qu'on devait plus tard accuser de trahison. Français et Anglais s'offrirent des fêtes, et le commerce se rétablit entre eux.

Par bonheur, Charles VII profita de cette accalmie pour constituer une armée royale et rétablir l'ordre dans les pays de son obéissance. Ces années de trêve sont les années décisives de son règne.

L'œuvre principale fut l'organisation de l'armée. On a dit que Charles VII avait créé en France l'armée permanente. À la vérité, là comme ailleurs, il a seulement restauré et fortifié des institutions antérieures, que l'anarchie avait comme anéanties. Toutes les règles posées pendant les règnes de Philippe VI, de Jean le Bon et de Charles V avaient été oubliées. Les capitaines se nommaient tout seuls, et donnaient à leurs hommes l'exemple du brigandage. Les soldats ne recevaient pas de solde. Les lettres de rémission accordées par Charles VII à un routier qui, depuis son jeune âge, a servi le roi sans jamais avoir aucune soulde, gaiges, ne recompensacion et qui a esté comme contraint à piller, justifient l'exclamation de Jouvenel des Ursins : Pour Dieu, sire, pardonnez-moy, car en vérité je puis bien dire que vous y avez grant faulte.

Les premières tentatives faites pour restaurer la discipline manquèrent d'énergie et de suite. Une grande ordonnance, obtenue par les États généraux réunis à Orléans, fut publiée le 9 novembre 1439. Elle réédita l'ordonnance de 1374. Les places où devaient être cantonnés les gens de guerre furent déterminées ; on réunit l'argent nécessaire pour assurer leur solde pendant un mois, puis on en resta là. On fait bien des ordonnances, disait encore Jouvenel des Ursins, mais il souffist (on se contente) de les escripre et publier, qui est une grant moquerie, derrision et déshonneur pour le roy. Il faut reconnaître que la Praguerie, survenue en 1440, et la guerre soutenue contre les Anglais rendaient la réforme difficile.

Charles VII punit quelques brigands. En 1441, il arriva en Champagne avec une armée, et fit arrêter Alexandre, bâtard de Bourbon, frère du duc, et quelques autres chefs de routiers. Le bâtard fut noyé dans l'Aube, huit de ses compagnons furent pendus, et dix ou douze capitaines d'Écorcheurs décapités. Le roi alla ensuite à Vaucouleurs et contraignit le terrible Robert de Sarrebruck à crier merci. Mais la plupart du temps, Charles VII se laissait circonvenir par ceux qu'il aurait dû châtier[2]. Le chroniqueur officiel Jean Chartier écrivait : Qui povoit avoir plus de gens sur les champs et plus povoit pillier et rober les povres gens estoit le plus craint et le plus doubté et qui plus tost eust du roy de France quelque chose que nul autre.

En somme, rien de sérieux ne fut fait avant la trêve de 1444. La trêve conclue, il fallut bien aviser. En temps de paix, les routiers restaient aussi terribles. Le roi et le dauphin les emmenèrent en Allemagne, et en débarrassèrent quelque temps la France, aux dépens des Lorrains, des Alsaciens et des Suisses[3]. La campagne finie, la réorganisation militaire fut mise en discussion dans le conseil du roi, à Nancy, au commencement de l'année 1445. Les princes de la maison d'Anjou, les comtes de Dunois[4], de Clermont, de Foix, de Tancarville, le connétable, Pierre de Brézé, et, sans aucun doute, les petites gens du Conseil préparèrent les réformes, en se référant aux anciennes ordonnances et peut-être aussi à l'exemple de l'armée anglaise. Les principaux capitaines, consultés secrètement et assurés d'être pourvus, se montrèrent favorables aux projets du Conseil et promirent de s'opposer aux mutineries qu'on redoutait.

Il fut décidé[5] que tous les capitaines, quels qu'ils fussent, se présenteraient avec leurs gens devant le connétable, qui les passerait en revue et ne garderait qu'une élite. Les soldats licenciés seraient reconduits, en bon ordre, dans le pays où ils habitaient avant de s'enrôler. Les crimes passés seraient effacés par une amnistie générale. Les capitaines retenus au service du roi, nommés par lui et révocables à volonté, constitueraient de nouvelles compagnies, dites compagnies d'ordonnance[6], sans doute parce qu'elles étaient ordonnées par le roi, au lieu d'être formées au gré de tel ou tel capitaine.

On a dit que Charles VII institua quinze compagnies de cent lances, à raison de six hommes par lance, tous montés : un homme d'armes, qui tenait la lance et commandait son groupe, un coutillier et un page, deux archers et un varlet de guerre ; mais, en réalité, ces chiffres varièrent. Malgré les revues passées par les commissaires du roi, le nombre réglementaire de six hommes par lance et de cent lances par compagnie ne fut pas constamment atteint. En revanche, le roi eut presque toujours plus de quinze compagnies de grande ordonnance. Jusqu'à la fin du règne de Charles VII, il yen eut une vingtaine.

Les soldats devaient résider dans certaines villes déterminées, et être entretenus aux frais de la province. Ils habiteraient chez des logeurs, et recevraient régulièrement leur solde. Cette solde, représentée d'abord par des contributions en nature, vin, viande, etc., se changea rapidement en une indemnité pécuniaire, qui s'éleva mensuellement à trente livres tournois par lance. Les actes d'indiscipline devaient être sévèrement punis, et les capitaines avaient tout pouvoir pour casser les mauvais soldats.

La réforme de 1445 fut appliquée rapidement et avec zèle. La dispersion des Écorcheurs, qu'ils fussent au service du roi ou au service des seigneurs, se fit sans secousse et sans bruit, par opérations successives. Les gens de guerre licenciés furent reconduits, en petits détachements, dans leur pays ; beaucoup prirent un métier et, couverts par l'amnistie, ne demandèrent plus qu'à vivre tranquillement. Ceux qui entrèrent aux Compagnies d'ordonnance furent des soldats aguerris, nobles pour la plupart, possédant de belles armes et de beaux chevaux. Les capitaines étaient de grands personnages, comme Dunois, Pierre de Brézé, le comte de Nevers, le maréchal de Lohéac, le connétable lui-même.

Les abus ne disparurent pas du jour au lendemain. Des hommes qu'on nommait, dans des actes officiels, l'Escorcheur ou Brise-barre, ne devinrent pas tous immédiatement des soldats disciplinés et respectueux du bien d'autrui. Mais les pillages, les rixes avec l'habitant, les malversations des capitaines, furent dès lors assez rares, parce qu'ils furent presque toujours réprimés, et que la solde fut payée régulièrement. Le nouvel impôt destiné au paiement de cette solde, la taille des gens de guerre, parut, il est vrai, très lourd et suscita des contestations et des réclamations innombrables. Pour cette raison, la réforme de 1445 fut accueillie sans enthousiasme. Dans la Farce nouvelle de Marchandise, Mestier, Pou-d'Acquest, le Temps-qui-court et Grosse-Despense, qui fut jouée vers le milieu du XVe siècle, on voyait Pou-d'Acquest (nous dirions : Sans-le-Sou) railler Mestier et Marchandise et leur assurer que les réformes militaires avaient pour but d'achever de piller les villages. Ensuite arrivait dame Grosse-Despense (le budget royal), qui dépouillait Mestier et Marchandise et les envoyait mendier, la besace au dos[7]. Les chroniqueurs, cependant, s'accordent à reconnaître que la constitution des Compagnies d'ordonnance eut pour effet la cessation des désordres. Les archives judiciaires de la fin du règne nous montrent, il est vrai, les routes encore infestées de brigands, anciens Écorcheurs qui n'avaient pas voulu rentrer dans la vie régulière. Mais les vols, les assassinats isolés, qu'était-ce à côté des dévastations et des massacres commis autrefois par les routiers ? Dans les pays délivrés des Anglais, on pouvait maintenant respirer, travailler, laisser ouvertes les portes des villes, aller aux champs.

La cavalerie d'élite constituée par la réforme de 1445 rendra les plus grands services, quand les hostilités recommenceront. Elle ne pourra cependant suffire. Lorsque la trêve sera rompue en 1449, il faudra lever des troupes auxiliaires. Ces compagnies de petite ordonnance, dites aussi petites payes, à cause de la solde moins élevée, seront maintenues jusqu'à la fin du règne, en nombre variable. Enfin Charles VII ne renoncera point au droit royal d'appeler aux armes tous les nobles et détenteurs de fiefs. Ce service noble sera payé. Il y aura une échelle de soldes, variant suivant l'armement du fieffé. Jusqu'à la fin du règne auront lieu de temps en temps des convocations régionales du ban et de l'arrière-ban[8].

La réforme de 1445 n'a pas le caractère de nouveauté qu'on lui a souvent prêté. Les Compagnies d'ordonnance, même si on ne considère que les Compagnies de grande ordonnance établies en 1445, n'étaient pas une armée nationale. Ce n'était qu'une cavalerie d'effectif restreint, et ouverte aux étrangers : il y eut des compagnies formées d'Écossais et d'Espagnols, commandées par des Cunningham et des Garcia. D'autre part, cette armée, si en fait elle devint permanente, n'avait été créée que pour les besoins de la lutte avec les Anglais et à titre provisoire. Enfin les gens des Compagnies d'ordonnance étaient pour la plupart des nobles servant à cheval, et ces compagnies, par conséquent, ne différaient guère des anciennes armées féodales, par l'aspect ou par la composition. Quant à la solde et aux détails d'organisation, ils avaient été inventés au XIVe siècle ou plus anciennement encore. Ce qui fit, à vrai dire, l'importance et la nouveauté de la réforme, c'est qu'elle fut réellement appliquée.

C'eût été une innovation véritable que de créer une infanterie solide ; mais personne en France n'y songeait encore. Le meilleur théoricien militaire de l'époque, Jean de Bueil, estime que l'infanterie ne doit jamais prendre l'offensive ; elle ne peut pas rester unie dans sa marche, et, en conséquence, une fois sur le champ de bataille, elle ne doit point bouger : Les gens à cheval doivent assaillir et les gens de pié doivent attendre. Le fantassin n'était donc considéré que comme un appoint, sur le champ de bataille aussi bien que dans le jeu d'échecs, jeu si cher aux hommes de ce temps et qui représente à certains égards leurs conceptions militaires. La milice des Francs-Archers, créée trois ans après les Compagnies d'ordonnance, ne fut et ne pouvait être en ce temps qu'une institution accessoire.

Avant l'établissement des Francs-Archers, l'infanterie du roi de France se composait, en théorie, de tous ses sujets roturiers ; en pratique, des compagnies d'archers et d'arbalétriers étrangers et des contingents fournis par les villes. La bourgeoisie française, pendant la guerre de Cent Ans, avait dû reprendre ses habitudes militaires d'autrefois. Les habitants des villes, et, dans certaines, les ecclésiastiques eux-mêmes, devaient le service du guet, et ils avaient tous des armes. Charles VII témoigna surtout sa faveur aux confréries d'arbalétriers et d'archers qui s'étaient formées dans certaines villes, et qui lui rendirent de grands services. Il accorda aux arbalétriers de Châlons, de Tournai et de la Rochelle le droit de porter la livrée royale.

Mais tous les contingents des villes n'avaient pas même valeur. On envoyait souvent au roi des gens de sac et de corde, réunis par l'appât de la solde que fournissait la municipalité. À la première occasion, ils lâchaient pied. Ce fut une des raisons qui déterminèrent l'institution des Francs-Archers. Le roi garda les vieilles milices communales, qui pouvaient être utiles en cas de siège, et les confréries, qui formaient d'excellents tireurs à l'arc et à l'arbalète ; mais, de plus, ayant droit au service des roturiers comme au service des nobles, il créa une infanterie choisie, de même qu'il avait créé une cavalerie d'élite. Il s'inspira des mesures prises jadis, sans succès durable, par Philippe VI, Jean le Bon, Charles V, et surtout de l'exemple de l'armée bretonne : le duc Jean V avait établi, dès 1425, une infanterie de gens du commun, fournis par chaque paroisse et dispensés du guet et de la taille[9].

D'après l'ordonnance de 1448, corrigée et complétée par celle de 1451, chaque groupe de cinquante feux dut fournir au roi un archer ou un arbalétrier. Au temps de Charles VII il y eut au total huit mille Francs-Archers. Les hommes, choisis par les prévôts et les élus, devaient être de bons compagnons, dans la force de l'âge, robustes et adroits. On les laissait habiter chez eux, mais ils étaient surveillés et devaient posséder une armure légère bien entretenue ; ils s'exerçaient au tir tous les jours fériés, et servaient le roi à la première réquisition.

Ils recevaient quatre francs par mois en service actif, et en tout temps ils étaient exemptés de la taille (d'où le nom de Francs-Archers). Ceux qui étaient trop pauvres pour avoir une armure étaient équipés aux frais de leur paroisse. Aussi le recrutement était-il facile. Les villes qui avaient des confréries de tireurs purent fournir un excellent contingent. En moyenne cependant, la nouvelle milice fut assez médiocre. L'exemption d'impôts engendra tout de suite des abus, et les commissaires royaux, fort accessibles aux dons corrompables, recrutèrent souvent de bien étranges guerriers : témoin ce franc-archer de Senlis, homme âgé, riche, aimant ses aises et son repos, qui voyait seulement dans sa charge une occasion de ne pas payer la taille et déclarait, se le royaume de France devoit estre perdu pour y mettre un clou, qu'il ne lui mectroit pas.

Si nous ajoutons que Charles VII avait autour de lui une grand garde d'Écossais, et des corps spéciaux d'archers, d'hommes d'armes et de cranequiniers, nous aurons achevé d'énumérer les troupes employées pendant les dernières années du règne.

Avec la cavalerie, la force principale de cette armée fut l'artillerie. Dès les premières années du règne de Charles VII, les tours des villes furent protégées par de petites bombardes de cuivre et de fer montées sur affût, et les engins à gecter pierres ne furent plus que des curiosités archéologiques. Les canons à main, ancêtres des fusils, firent leur apparition sur les remparts. Pour l'offensive, l'artillerie fit ses preuves dès le siège de Montereau. À la fin du règne, elle aura sa place sur tous les champs de bataille. Pierre Bessonneau, grand maître de l'artillerie de 1420 à 1444, parait avoir accompli une œuvre considérable. Mais sa gloire a été effacée par celle de Gaspard Bureau, qui lui succéda, et de Jean Bureau qui fut commis au fait de l'artillerie dès 1437. Fondeurs, ingénieurs, capitaines, les frères Bureau donnèrent à Charles VII, dit Jacques du Clercq, le plus grand nombre de grosses bombardes, gros canons, veuglaires, serpentines, crapeaulx d'eaulx, colleuvrines et ribaudigues que n'estoit lors mesmoire d'homme avoir veu a roy chrestien. Les frères Bureau comprirent très clairement l'importance du canon et perfectionnèrent tout le matériel, avec l'aide d'inventeurs étrangers, comme le Génois Louis Giribault, qui avait trouvé un nouveau système de chariot pour mener l'artillerie[10], et ce Juif allemand qu'on fit venir en 1456 pour apprendre de lui certaines choses subtiles concernant l'artillerie[11]. Pendant les campagnes de Normandie et de Guyenne, l'artillerie de Charles VII lui assurera une supériorité incontestable. Les Anglais craindront désormais les batailles rangées, et se confineront le plus souvent dans leurs places fortes ; mais l'architecture militaire ne s'étant pas modifiée aussi rapidement que l'artillerie, les canons français auront vite fait de démolir leurs remparts.

Pour compléter l'œuvre de défense du royaume, il aurait fallu reconstituer une marine. Depuis la destruction du clos des Galées de Rouen et la perte de la Normandie, le roi de France n'avait plus ni flotte ni chantiers. L'auteur du Débat des hérauts d'armes exprimait vers 1456 les regrets qu'en éprouvaient les partisans de la guerre maritime : Je prie à Dieu, s'écrie le héraut de France en s'adressant au héraut d'Angleterre, qu'il doint au roy de France tuer et courage de vous faire guerre à la mer, car ce sont les verges de quoy il vous peut chastier et refroider vostre hault couraige.

La nouvelle organisation, malgré ses lacunes, mit un terme à la terrible anarchie militaire qui ruinait et dépeuplait le royaume, et elle permit de reconquérir la Normandie et la Guyenne en de courtes et triomphales campagnes. Enfin elle eut des conséquences politiques très considérables, sur lesquelles les contemporains ne se sont pas abusés autant qu'on pourrait le croire. Le roi avait maintenant une armée régulière, une cavalerie soldée, une infanterie recrutée directement dans la plupart des provinces du royaume[12], sans intervention des seigneurs. La guerre terminée, il gardera ses Compagnies d'ordonnance, et ses Francs-Archers resteront toujours prêts à marcher. En fait, l'armée permanente était fondée, au profit de la monarchie.

 

II. — ANARCHIE EN ANGLETERRE. PRÉLUDES DE LA GUERRE DES DEUX ROSES[13].

PENDANT que la monarchie française se réorganisait, la désorganisation de la société et de la monarchie anglaises, déjà visible à l'époque du soulèvement des travailleurs, en 1381, s'achevait, et la guerre civile se préparait parmi les adversaires de Charles VII.

La formation d'une aristocratie très riche, très brutale, échappant à toute autorité, est le fait capital qui explique la guerre des Deux Roses. Au Ve siècle, les lords transforment en prairies les terres anglaises, épuisées par la monotonie des cultures, et s'enrichissent par l'élevage des moutons. Certains y adjoignent le commerce en gros. Le butin fait en France, l'argent tiré des malheureux paysans normands devenus leurs tenanciers, achèvent de redorer leurs blasons. Ils emploient leurs richesses à se créer une cour, un conseil, une armée. L'usage de livrée et maintenance, déjà réputé dangereux au XIVe siècle, est devenu général ; chaque lord entretient des centaines, parfois des milliers d'hommes, vêtus d'une livrée à ses armoiries, et armés pour maintenir ses querelles. Ces spadassins se recrutent facilement parmi les soldats revenus de France. Ainsi les habitudes barbares contractées par les Anglais pendant la conquête de la France s'exercent maintenant aux dépens de l'Angleterre. Les guerres privées recommencent. Les offices publics sont occupés par les créatures des lords. S'il y a procès, le sheriff choisit un jury dont le verdict plaira à la partie la plus puissante. Quelque juré veut-il faire la mauvaise tête ? Il rencontre, au retour, des gens qui lui apprennent le savoir-vivre à coups de dague. Les lettres de la famille Paston, qui vécut sous les règnes de Henry VI et d'Édouard IV, décrivent une société où la force est devenue la seule garantie de sécurité.

Pour rétablir l'ordre en Angleterre, il aurait fallu un homme de génie ou un parlement qui fît son devoir. Ni l'un ni l'autre ne se rencontra. Le système parlementaire avait fait de grands progrès sous les Lancastres. Les subsides accordés par la Chambre des communes étaient affectés à des dépenses déterminées d'accord avec elle, et elle se faisait rendre compte de leur emploi. Elle exigeait, avant le vote de l'impôt, le redressement de ses griefs, et ses pétitions devenaient, sans modification, des statuts du royaume. Les délibérations étaient libres. Les conseillers du roi étaient nommés avec l'assentiment du Parlement, qui fixait leur salaire et pouvait les mettre en accusation. Si nous comparons le Parlement anglais et les États Généraux de France, le contraste est éclatant ; malgré tout, comme le pouvoir du roi d'Angleterre n'est pas limité par une constitution nette, ni par une série suffisamment longue de précédents, le prince peut, du jour au lendemain, retirer les concessions qu'il a faites et gouverner à sa guise : la Chambre des communes se défie sans cesse de lui, est toujours prête à reconnaître pour son champion un lord puissant qui tiendra tête au roi, et ainsi elle se fait complice de l'anarchie féodale.

D'ailleurs, par leur recrutement, les députés des communes sont maintenant les serviteurs de la noblesse. Le système électoral a fait en 1130 un progrès à rebours. Le droit de vote est réservé dans les comtés aux riches francs-tenanciers et aux chevaliers. On écarte les électeurs sans aveu. Les Communes ne représentent donc pas la nation, mais l'aristocratie. C'est encore une raison pour qu'elles ne prennent aucune mesure énergique contre les fauteurs de désordre.

Le roi Henry VI, devenu majeur le 6 décembre 1442, était un lettré et un dévot, consciencieux, humble et charitable, un homme de paix, incapable de gouverner ce peuple indocile, un mystique, dépaysé dans ce monde de passions exaspérées. Sa jeune femme, Marguerite d'Anjou, très belle, très ambitieuse, prit tout de suite autorité sur lui, et par elle monta au pouvoir le négociateur de son mariage et de la trêve de 1444, le comte de Suffolk, partisan de la paix.

Le malentendu entre Henry VI et ses sujets fut alors complet. La reine, cette Française sans dot, fut dès le premier jour impopulaire. La haine qu'elle inspirait redoubla lorsque, pour lui complaire, Henry VI promit de livrer la ville du Mans et tout ce qu'il possédait dans le Maine à son beau-père (22 décembre 1445). Suffolk ne tarda pas à être accusé de trahison par la rumeur publique. Le duc de Gloucester, favori du peuple, se voyait déjà roi d'Angleterre. En 1447, Suffolk se décida à le faire arrêter comme conspirateur. Au bout de cinq jours, le duc mourut dans sa prison, probablement d'une attaque de paralysie. Six semaines après, le vieux cardinal Beaufort s'éteignait aussi : c'était le dernier homme de cette génération qui eût à la fois assez de sagesse pour désirer une politique d'ordre et de paix, et assez d'autorité pour imposer quelque respect à l'opposition. La guerre civile était maintenant fatale à brève échéance.

 

III. — CONQUÊTE DE LA NORMANDIE[14].

HENRY VI et Suffolk désiraient une paix définitive. Le jeune roi écrivait le 91 août 1444 à Charles VII qu'il avait hâte de voir finir ces pestilensieuses guerres qui tant ont duré. Un an après, il recevait cordialement à Londres les ambassadeurs français, qui venaient lui faire des offres de paix. Mais les négociations n'aboutirent pas. Tout de suite des difficultés s'élevèrent, qui montraient la mauvaise volonté des Anglais et l'impuissance de leur roi. Les capitaines des places anglaises en France ne voulaient pas de la paix. Le capitaine du Mans refusa de livrer cette ville, que Henry VI avait promis de rendre à son beau-père René d'Anjou. Il fallut la menace d'un assaut pour forcer la garnison anglaise à sortir (16 mars 1448). En quête d'un gîte, elle alla s'installer sur les frontières de la Normandie et de la Bretagne, à Saint-James-de-Beuvron et à Mortain. Cette infraction à la trêve provoqua les protestations de Charles VII et du duc de Bretagne.

Or le nouveau duc de Bretagne, François Ier (1442-1450), était depuis deux ans déjà complètement brouillé avec les Anglais, que son père, le cauteleux Jean V, avait toujours su ménager. Séduit par les avances et les cadeaux de Charles VII, François était allé en personne lui faire hommage. Son frère, Gilles de Bretagne, était au contraire un ami personnel de Henry VI et un allié des Anglais. François Ier, d'accord avec Charles VII, l'avait fait arrêter et jeter en prison (1446). La nouvelle de cette violence avait causé un vif émoi à la cour de Henry VI : le roi d'Angleterre et Suffolk eux-mêmes avaient pensé à se venger. C'est pourquoi ils laissèrent la garnison du Mans s'établir à Saint-James ; le duc de Somerset, qui gouvernait alors à Rouen, refusa grossièrement de recevoir les plaintes du roi de France et du duc François, et les Anglais préparèrent un coup de main pour s'emparer de Fougères, qui était par son industrie une des villes les plus prospères de la Bretagne. Le 24 mars 1449, un capitaine espagnol qui commandait la garnison anglaise de Verneuil, François de Surienne, s'empara par surprise de Fougères, la mit à sac, et y fit un énorme butin. Le duc de Somerset, qui avait fourni à François de Surienne ses munitions, le désavoua publiquement, mais refusa de donner satisfaction au duc de Bretagne.

C'était fournir des prétextes et des raisons aux conseillers de Charles VII, qui désiraient la guerre. Le roi lui-même y était décidé. Par son ordre, Jean Jouvenel des Ursins avait compulsé les titres du Trésor des Chartes et avait composé pendant la trêve un Traicté compendieux de la querelle de France contre les Anglois, pour éclairer la conscience du roi. Par une argumentation serrée, qu'appuyaient des pièces justificatives, l'évêque était arrivé à conclure qu'Édouard III n'avait jamais eu aucun droit sur la couronne de France, et que les rois de France avaient des droits sur la couronne d'Angleterre.

Charles VII laissa d'abord à ses capitaines toute liberté de représailles, sans rompre officiellement la trêve. Le 16 mai 1449,

Jean de Brézé et Robert Floquet enlevèrent Pont-de-l'Arche ; d'autres capitaines prirent Gerberoy en Beauvaisis, Cognac et Saint-Mégrin en Guyenne. On chanta la ballade de Fougières :

Pas n'avez les têtes plus dures

Que les Bretons, la mercy Dieu !

Vieilles debtes viennent à lieu.

Le moment était propice pour conquérir la Normandie. Les députés aux États ne voulaient plus accorder qu'une faible partie des subsides demandés, et ils déclaraient que le pays était trop misérable pour payer encore des impôts. Somerset lui-même avertissait que la province était à la merci de la première attaque ; les places étaient démunies, le trésor de Rouen était vide. L'armée anglaise était en pleine désorganisation et saccageait la campagne. Les habitants exaspérés appelaient de tous leurs vœux les armées de Charles VII :

Très noble roy Charles françois,

Entens la supplicacion

Des Normans contre les Anglois,

La désolée et male nacion ![15]

Beaucoup d'entre eux s'enrôlaient dans les bandes de partisans. comme celle du sire de Camois, qui continuaient leurs exploits aux dépens des Français reniés et des rares propriétaires anglais résidant encore en Normandie. Les Français reniés eux-mêmes n'avaient aucune raison de souhaiter le maintien de la domination anglaise. Ce n'était pas elle maintenant qui pouvait procurer l'ordre et la sécurité, et Charles VII offrait une amnistie générale.

La rupture officielle de la trêve fut décidée par le roi, les princes du sang et les membres du Grand Conseil, dans une assemblée solennelle tenue au château des Roches-Tranchelion, près de Chinon, le 17 juillet 1449. Tous reconnurent que, pour obéir au serment du sacre, Charles VII devait défendre son peuple et reprendre les armes contre un ennemi parjure. Le roi commanda au Normand Robert Blondel un traité qui fut traduit plus tard du latin en français sous le titre Des droiz de la couronne de France, dans l'intention d'apprendre aux François à venir, que jamais ils ne se doibvent fier en quelzconques traictez , seremens ne promesses d'Anglois.

La conquête de la Normandie fut faite en un an (août 1449-août 1450). Les soldats de Charles VII, exactement payés et rigoureusement disciplinés, furent accueillis presque partout en libérateurs. Les Anglais commirent des atrocités inutiles et se défendirent mal. N'ayant point d'artillerie, ils n'osèrent point chercher la bataille, se retirèrent dans les villes, et, comme l'a dit Jean de Bueil, se laissèrent mengier les ungs après les aultres. Le vieux Talbot lui-même ne réussit pas à défendre une cause perdue.

Richemont et le duc de Bretagne se chargèrent de la conquête de la Basse-Normandie. Le Cotentin fut recouvré en deux mois. Pendant ce temps Dunois dirigeait avec le comte de Saint-Pol et le duc d'Alençon la conquête de la Haute-Normandie. Les Rouennais reprirent eux-mêmes leur ville sur la garnison anglaise. Assiégés dans le palais et le château par les habitants, canonnés par l'artillerie de Charles VII, les Anglais se rendirent le 29 octobre 1449. Somerset se retira à Caen. Le roi de France fit une entrée triomphale, le 10 novembre, dans la capitale de la Normandie.

Ces rapides victoires des Français amenèrent au delà de la Manche des désordres qui entravèrent l'action du gouvernement anglais. Le 9 janvier 1450, l'évêque de Chichester, ami du comte de Suffolk, fut tué à Portsmouth par une bande de marins. Quelques semaines après, la Chambre des communes accusa solennellement Suffolk de connivence avec Charles VII. Le roi Henry, pour sauver son favori, l'exila. Les ennemis de Suffolk le poursuivirent sur mer et le mirent à mort.

Au milieu de ces troubles, les Anglais firent cependant un dernier effort. Une armée, commandée par Thomas Kyriel, débarqua à Cherbourg le 15 mars 1450, traversa le Cotentin, et se dirigea vers Bayeux. Le comte de Clermont l'arrêta à Formigny, le 15 avril. Les Anglais s'étaient retranchés, selon leur habitude, derrière une palissade de pieux. Les coulevrines de Louis Giribault ouvrirent sur eux un feu terrible. L'arrivée de Richemont avec une armée de renfort décida du succès. Les Anglais furent exterminés ; 3.774 d'entre eux périrent, 1.200 furent faits prisonniers. Les pertes des Français étaient insignifiantes.

Peu après, éclata en Angleterre une sanglante insurrection. Les habitants du Kent, du Surrey et du Sussex marchèrent sur Londres le 1er juin, ayant à leur tête un aventurier irlandais, Jack Cade. Ils demandaient l'abrogation des statuts des travailleurs, l'abrogation du nouveau système électoral, une réforme administrative et financière, le changement des conseillers royaux. Londres ouvrit ses portes aux rebelles et le roi s'enfuit à Kenilworth. Le trésorier et le sheriff du Kent furent décapités et leurs têtes promenées sur des piques. Tandis que les conseillers de Henry VI s'occupaient de comprimer cette révolte, Somerset capitulait à Caen et quittait pour toujours la Normandie. La prie de Cherbourg, bombardée de la grève par les frères Bureau, fut la dernière grande opération de la campagne.

La politique de Charles VII à l'égard des Normands fut habile et douce. Les reniés ne furent pas inquiétés. Malgré l'opposition du Parlement et de la Chambre des comptes de Paris, le roi maintint les privilèges de la province. En 1458, il confirma la vieille Charte aux Normands et reconnut que les subsides devaient être consentis par les trois États du duché ; depuis lors les États de Normandie furent régulièrement convoqués. L'ordre renaquit peu à peu. La malheureuse province était d'ailleurs ruinée, dépeuplée ; elle mettra de très longues années à recouvrer son ancienne prospérité.

 

IV. — CONQUÊTE DE LA GUYENNE[16].

LA conquête de la Guyenne anglaise fut bien plus difficile. Il s'agissait ici de reprendre aux Anglais un pays qui leur était profondément attaché par ses traditions et ses intérêts.

La Guyenne appartenait au roi d'Angleterre depuis trois siècles. La guerre de Cent Ans avait forcé Édouard III et surtout Richard II et les Lancastres à se montrer libéraux envers leurs sujets gascons. Au XVe siècle, ceux-ci jouissaient de toutes les garanties connues alors contre l'arbitraire. Les demandes de subsides, les affaires de monnaie, étaient discutées par les États de Guyenne, ou par les États particuliers du Bordelais, du Bazadais et des Landes. Le fisc était d'ailleurs peu exigeant. Enfin Édouard III et ses successeurs avaient accordé aux viticulteurs et aux marchands de vin de Guyenne des privilèges très importants, qui leur assuraient en Angleterre des débouchés plus avantageux qu'en France même.

La Guyenne se trouvait ainsi étroitement unie à l'Angleterre ou plutôt au duc de Guyenne, roi d'Angleterre, car elle n'était nullement anglicisée. Sauf quelques possesseurs d'offices, -très peu nombreux, et quelques garnisons en temps de guerre, il n'y avait pas d'Anglais dans la province. Ni les mœurs, ni les idées, ni la langue, n'y avaient été modifiées. Il semble même qu'on y eût peu de sympathie pour la nation anglaise. Les démêlés étaient fréquents entre les gens de Bordeaux et ceux de Londres, alors très peu hospitaliers aux négociants étrangers. Les Gascons étaient restés tout gascons. Mais ils étaient attachés aux rois anglais, qui respectaient leur indépendance et assuraient leur richesse. Sur leur patriotisme tout local s'était greffé le loyalisme envers le roi anglais.

La grande et riche ville de Bordeaux était le principal rempart de la domination anglaise. C'était une vraie puissance seigneuriale. Elle possédait le comté d'Ornon et portait la couronne comtale sur ses armes. Plusieurs villes voisines, telles que Bourg, Blaye, Libourne, étaient ses filleules, et reconnaissaient son hégémonie militaire. Son aristocratie de propriétaires et de marchands de vin, son clergé, nombreux, opulent et actif, étaient tout pénétrés de ce loyalisme que nous expliquions tout à l'heure. L'église bordelaise avait à sa tête un prélat très vénéré, l'archevêque Pey Berland, qui allait être le vrai chef de la résistance pendant les campagnes de 1450 et de 1451. En 1441, ce clergé avait fondé l'Université de Bordeaux, pour empêcher la jeunesse gasconne d'aller faire ses études dans les Universités ennemies de Paris et de Toulouse. En passant sous la domination française, on savait bien que Bordeaux perdrait ses vieux débouchés commerciaux et paierait plus d'impôts. Toute la population se trouva unie pour résister aux attaques de Charles VII, comme elle avait résisté jadis aux tentatives de Charles V et de Louis d'Orléans.

La guerre de Guyenne commença dès la rupture de la trêve générale, en 1449. Mais, pour prendre Bordeaux, il fallait une solide armée et une flotte. Au printemps de 1451, Dunois arriva enfin avec six mille hommes ; une escadre espagnole et rochelaise, sous les ordres de Jean le Boursier, pénétra dans la Gironde. Du 15 mai au 5 juin 1451, toutes les places qui commandaient l'entrée du Bordelais furent prises. La vigne avait fleuri ; résister, c'était la ruine. Dunois faisait toutes sortes de promesses aux assiégés, et ceux-ci ne pouvaient compter sur aucun secours. En Angleterre, en effet, les bandes impatientes de guerre civile avaient trouvé leur chef ; les partisans de Richard, duc d'York, demandaient qu'il fût reconnu héritier présomptif de la couronne, le roi n'ayant pas d'enfant ; Henry VI et sa femme, craignant son ambition, l'écartaient, et York se préparait à la guerre.

Le 12 juin 1451, un traité fut conclu entre les représentants de Charles VII et les gens des Trois Estais de la ville et cité de Bourdeaux et pays de Bourdelois ès nom d'eulx et des autres pays de la duchié de Guyenne. Il fut convenu que les Gascons garderaient toutes leurs franchises, qu'ils ne serviraient dans les armées du roi que de leur consentement et qu'ils ne paieraient aucun des impôts exigés des autres Français taille, gabelle, entretien des gens de guerre. Aux habitants qui ne voudraient pas se tourner Français, toute liberté serait laissée d'émigrer dans les six mois. Une cour souveraine serait installée à Bordeaux, pour que les nouveaux sujets du roi fussent exemptés de la juridiction du parlement de Paris. Dunois entra le 30 juin dans la ville. La prise de Bayonne (20 août 1451) termina la conquête de la Guyenne.

Le comte de Clermont, gouverneur de la province, le grand sénéchal Olivier de Coëtivy, et les autres officiers royaux appliquèrent le traité du 12 juin. Les garnisons établies dans les principales villes le furent aux frais du roi. La cour souveraine de Bordeaux fut ouverte, et c'était une des plus grandes concessions qu'on pût faire aux Gascons ; mais les charges de conseillers, et tous les autres offices royaux étaient remplis par des Français. Les Gascons virent avec défiance une colonie d'administrateurs, étrangers au pays, se grouper autour du Breton Coëtivy.

Ils furent les premiers à violer la convention qu'ils avaient passée avec le roi de France. Froissés dans leur orgueil par le rapide triomphe de Dunois, persuadés que le roi d'Angleterre allait les secourir et qu'ils pouvaient d'avance lui faire payer leur concours, un grand nombre de seigneurs et de riches bourgeois rentrèrent en relations avec Henry VI. À peine un mois s'était-il écoulé depuis l'entrée des Français à Bordeaux, que des habitants de cette ville se faisaient donner par le roi d'Angleterre des seigneuries situées dans la Guyenne et jusque dans le Périgord. Le captal de Buch, qui avait passé un traité particulier avec Dunois, obtint de Henry VI un acte qui lui concédait la ville et le château de Bazas. Les habitants de la Réole s'assurèrent de leur côté, pour l'avenir, l'exemption d'une taxe sur les vins. Enfin le personnel des anciens fonctionnaires s'agitait ; Guillaume Bec, naguère juge général des appels de la cour de Gascogne, obtenait de Henry VI la promesse qu'il recouvrerait cette charge ; tel autre était nommé monétaire, tel autre clerc de prévôté. Tous escomptaient la prochaine expulsion des Français, et quelques-uns commençaient en secret à la préparer.

Les officiers et les conseillers de Charles VII ne pouvaient ignorer ces menées. Ils ne se crurent pas tenus de respecter plus longtemps les conventions jurées, et commencèrent, dans l'été de 1452, à lever de l'argent dans le Bordelais pour l'entretien des garnisons. Le Conseil du roi rejeta les réclamations des habitants, et le comte de Clermont acheva de les exaspérer en exigeant d'eux le service militaire. Une conjuration se forma pour rappeler les Anglais. Les habitants du Bordelais furent d'ailleurs seuls à y prendre part. Dans les sénéchaussées du sud, la méfiance mutuelle avait été moins grande, le traité avait été mieux respecté, et les habitants de la Gascogne proprement dite et des Landes restèrent fidèles à Charles VII.

Les barons du Bordelais et le doyen de Saint-Seurin de Bordeaux envoyèrent des députés à Henry VI. Justement les partis venaient de faire trêve en Angleterre. Une armée qu'on avait levée pour défendre au besoin Calais était toute prête à partir. Talbot en prit le commandement C'était un vieillard de quatre-vingts ans, à moitié impotent, mais encore énergique. L'auteur des Cent Nouvelles nouvelles, qui rapporte d'amusantes anecdotes sur sa fougue, dit de lui : Il avoit la teste chaude et fumeuse et facilement il enrageoit tout vif. Au mois d'octobre 1452, le départ de la flotte anglaise fut signalé à Charles VII. Il crut la Normandie menacée et y réunit ses troupes. Pendant ce temps les Anglais débarquaient sans difficulté à Soulac, les habitants se soulevaient, Coëtivy était fait prisonnier, et Talbot entrait à Bordeaux (23 octobre 1452).

Il fallut préparer une nouvelle campagne pour soumettre la Guyenne. Au printemps, trois armées françaises l'envahirent. Une d'entre elles, commandée par Jean de Bueil et Jacques de Chabannes, alla assiéger Castillon. Talbot, espérant écraser ce corps isolé, partit de Bordeaux avec huit mille hommes. Les Français l'attendirent dans un camp retranché, où était, réunie une formidable artillerie. Avec la même imprudence qui, jadis, jetait contre les palissades anglaises les chevaliers de Philippe VI et de Jean le Bon, Talbot ordonna l'attaque. Les trois cents canons de Giribault accablèrent les Anglais de projectiles. Une attaque de flanc décida de la victoire. Talbot finit au milieu de cette défaite sa glorieuse vie (17 juillet 1453).

Une quatrième armée, commandée par Charles VII, arriva à la fin du mois, et toutes les forces françaises réunies assiégèrent Bordeaux. La guerre était menée cette fois très rudement. La campagne était saccagée, et les Gascons trouvés les armes à la main étaient décapités. Bordeaux, bloqué, menacé de la famine et du bombardement, capitula. Le 19 octobre 1453, les bannières de France furent dressées sur les tours de la ville.

Une rançon de 100.000 écus, plus tard réduite à 30.000, fut imposée à la cité rebelle. Vingt personnes de l'aristocratie bordelaise furent bannies, entre autres le doyen de Saint-Seurin. L'archevêque Pey Berland, qui n'avait point pris part à la révolte, n'en fut pas moins traité en suspect, et obligé bientôt de céder son siège à un prêtre français. Les jurais de Bordeaux furent désormais des agents du roi, nommés par lui ; Jean Bureau devint maire de la ville.

L'autonomie judiciaire, politique et financière de la Guyenne disparut. La cour suprême de Bordeaux fut supprimée : il fallut désormais recourir en appel au Parlement de Paris et suivre sa procédure. Le grand sénéchal, qui était sous la domination anglaise un véritable vice-roi, perdit une forte part de sa puissance : les divers sénéchaux du pays, par exemple celui des Landes, qui lui étaient auparavant soumis, ne dépendirent désormais que du roi. Les États de Guyenne ne furent plus réunis tant que Charles VII vécut. Tailles, aides, entretien des gens de guerre, il fallut tout subir. De lourdes taxes frappèrent le commerce. Quant aux négociants anglais, on prit contre eux tant de précautions qu'ils finirent par oublier le chemin de la Guyenne.

Cette rigueur détermina un grand mouvement d'émigration. Nombre de Gascons de tout rang s'enfuirent avec leurs richesses, malgré l'interdiction royale. La plupart se réfugièrent en Angleterre et s'y établirent marchands. À la fin du règne de Charles VII, le port de Bordeaux était désert. Aux environs, on n'avait pas relevé les moulins détruits par l'armée française et la vigne était inculte. Saint-Émilion était dépeuplé. La misère était générale.

Les Gascons ne se contentèrent pas d'émigrer. Ils continuèrent à conspirer. En 1454, Pierre de Montferrant revint d'Angleterre et tenta de soulever le pays. Il fut pris, décapité, coupé en morceaux. Vers la fin de l'année 1456, un nouveau complot fut découvert, auquel étaient mêlés nombre de gens d'église[17]. En janvier 1457, les conseillers de Charles VII déclaraient aux ambassadeurs du roi d'Écosse que les gens du pays de Guyenne étaient tous enclins au parti d'Angleterre. N'est année, disaient-ils, que le dit pats ne coste au roy à garder 300.000 francs plus que en lui vault la revenue. La rancune des Gascons dura longtemps : au XVIIe siècle encore, ils rappelaient avec amertume le beau temps de la domination anglaise.

 

V. — RÉHABILITATION DE JEANNE D'ARC. FIN DE LA GUERRE DE CENT ANS[18].

VICTORIEUX, le roi de France se souvint de Jeanne d'Arc. Il est vrai que ce fut en pensant à lui-même. Il ne voulait pas rester sous le coup de la sentence prononcée jadis à Rouen, qui, indirectement, faisait de lui le complice d'une sorcière. Il fallait que l'Église se déjugeât et proclamât la sainteté de la Pucelle. Dès 1450, le roi, ayant Rouen en sa possession et les archives du procès entre ses mains, chargea un docteur en théologie, Guillaume Bouillé, de faire une enquête. Guillaume Bouillé recueillit quelques témoignages et composa un mémoire pour l'exaltation du roi de France et de la maison de France. Il écrivait au début de son traité :

Pour l'honneur du roi très chrétien, il ne faut point passer sous silence une sentence inique, scandaleuse et déshonorante pour la couronne royale, fulminée par cet évêque de Beauvais qui était l'ennemi du roi, et, comme on le voit immédiatement, avait soif de confondre le roi notre sire. Quelle tache souillerait le trône royal, si nos adversaires persuadaient à la postérité que le roi de France a recueilli dans son armée une hérétique, invocatrice du démon !

Tant que Nicolas V vécut, les enquêtes et les démarches auprès du Saint-Siège n'eurent aucun résultat : ce pape avait à se plaindre du roi et d'ailleurs toute sa politique tendait à réconcilier les chrétiens pour organiser la guerre contre les Turcs : il pressait Charles VII et Henry VI de faire la paix, et ne se souciait pas d'aviver leur discorde. Calixte III, qui le remplaça en 1455, consentit enfin à la révision du procès, espérant par ce moyen gagner Charles VII à la cause de la croisade. Il désigna, pour instruire l'affaire, quatre commissaires entièrement dévoués au roi de France : Jean Jouvenel des Ursins, archevêque de Reims, Guillaume Chartier, évêque de Paris, Richard Olivier, évêque de Coutances, et l'inquisiteur Jean Bréhal, qui, depuis plusieurs années, travaillait à la réhabilitation. Afin d'enlever en apparence à la révision son caractère politique, on la fit demander par la famille de Jeanne d'Arc. Le procès, qui dura plusieurs mois, fut très solennel. Cent quinze témoins furent convoqués. On les interrogea habilement, de façon à ne pas trop compromettre les juges de Rouen, sauf Pierre Cauchon et Guillaume d'Estivet, qui étaient morts. Les dépositions furent un long panégyrique, prudent et assez fade, des vertus de la Pucelle. Enfin le 7 juillet 1456, dans le palais archiépiscopal de Rouen, fut rendue la sentence, qui déclarait le procès de 1431 irrégulier dans le fond et dans la forme.

L'orgueil anglais ne reçut jamais de coups plus terribles qu'en cette période de l'histoire. La perte de la Normandie, cette belle province si ardemment convoitée et depuis si peu de temps reconquise, la perte de l'Aquitaine, anglaise depuis trois cents ans, la proclamation de l'orthodoxie de la Pucelle, qui s'était déclarée l'émissaire de Dieu contre les Anglais, c'étaient là des humiliations inoubliables, et qui rendaient la paix impossible. Les Anglais ne voulaient pas ratifier leur déchéance par un traité. Charles VII, de son côté, comme on lui demandait en 1451 si la guerre cesserait un jour, répondait : Cela dépend des Anglais, qui occupent injustement ce qui m'appartient. Au plaisir de Dieu, j'entends le leur reprendre. En 1456, il signa un traité d'alliance avec Christiern Ier, roi de Danemark, qui s'engageait à lui fournir à la première réquisition une flotte et une armée pour combattre les Anglais. Il entreprit à plusieurs reprises de les déloger de Calais, leur dernière possession sur le continent, et, quelques mois avant sa mort, il réunissait en Gascogne des gens d'armes et des navires pour achever le recouvrement de son royaume. Ses démêlés avec le duc de Bourgogne, qui lui causèrent, comme on le verra, de cuisants soucis, préservèrent les Anglais de cette dernière mortification. La bataille de Castillon marqua vraiment la fin de la grande guerre. Pendant les dernières années du règne de Charles VII, les hostilités se bornèrent à quelques petites expéditions maritimes : ainsi les Anglais dévastèrent l'île de Ré en 1457, et la même année les Français vinrent mettre à sac lé port de Sandwich.

La guerre des Deux Roses paralysait la puissance anglaise. Henry VI, au moment où il perdait pour la seconde fois la Guyenne, était devenu fou, fou avec des intervalles de lucidité, comme son aïeul Charles VI ; Marguerite d'Anjou lui ayant donné un fils, le 13 octobre 1433, il accueillit cette nouvelle avec indifférence. La folie du roi, et cette naissance d'un héritier mâle, qui écartait le duc d'York du trône, hâtèrent l'explosion de la guerre civile. Richard d'York, aidé par Warwick, le faiseur de rois, s'empara de la régence et finalement déclara ses prétentions au trône. Marguerite d'Anjou soutint courageusement les intérêts de son fils. Les deux partis cherchèrent des alliances sur le continent. Henry VI avait épousé une Française et il avait montré le désir sincère de faire la paix avec Charles VII : dès 1455, des pourparlers s'engagèrent entre les partisans des Lancastres et un favori du roi Charles, le chevaleresque Pierre de Brézé, ancien familier de la maison d'Anjou, qui prêtait à la reine Marguerite l'appui de sa bravoure et. de son crédit à la cour de France. Mais les brusques alternatives de la guerre des Deux Roses rendaient toute négociation difficile. À la fin du règne de Charles VII, la situation s'éclaircit. Des alliances étaient sur le point de se conclure, d'une part, entre Marguerite d'Anjou et le roi de France, de l'autre, entre le duc d'York et le duc de Bourgogne. Les Anglais à leur tour appelaient l'étranger chez eux. En un demi-siècle, une double évolution avait emporté l'Angleterre de l'ordre à l'anarchie, et ramené la France de l'anarchie à l'ordre. C'était maintenant en Angleterre qu'un fou tenait le sceptre, et que les membres de la famille royale se disputaient le pouvoir. La patrie du Prince Noir et de Henry V n'était plus à craindre, et la guerre de Cent Ans était bien finie.

De nos jours, on a prétendu que l'expulsion des Anglais a été un malheur pour la France et qu'à leur école elle aurait joui plus tôt de la liberté politique et religieuse. Ceux qui parlent ainsi ne se rappellent clairement ni ce que les Anglais ont fait en France, ni les conditions imposées à notre développement national par les siècles antérieurs, ni enfin ce que les Anglais étaient eux-mêmes au xv siècle. Il est permis de regretter que nous n'ayons pas depuis le moyen tige les goûts et les traditions qui, sinon constamment, du moins pendant de longues périodes, ont fait la force et la dignité de nos voisins, assuré chez eux la prospérité de la nation et l'indépendance de l'individu ; mais il s'agit de savoir si au XVe siècle ils voulaient et pouvaient changer la France, au mieux de ses intérêts futurs ; c'est toute la question. Or, au temps de Henry VI et de Charles VII, l'Angleterre allait, non vers la liberté, mais vers l'anarchie féodale et l'autocratie qui en est la suite : à supposer qu'elle eût conquis toute la France, et qu'elle eût pu et voulu, ce qui est plus que douteux, la modeler à son image, elle ne lui aurait fait que le triste cadeau de nouvelles guerres civiles.

Laissons ces vaines hypothèses rétrospectives. Au XVe siècle, la plupart des Français ne voulaient pas de la domination anglaise : ils l'estimaient injuste et intolérable. Les Bourguignons eux-mêmes ne la supportaient qu'à contrecœur. Aux heures les plus sombres, il y eut de braves gens qui se sacrifièrent pour impugner le traité de Troyes ; et plus tard, quand la fortune changea, des feux de joie s'allumèrent dans les plus lointains villages, à la nouvelle des désastres anglais. Le triomphe de la vieille dynastie capétienne fut fêté par tous les pays de France et fut l'œuvre de tous : l'attachement au roi légitime et les malheurs communs avaient fait de la France une nation.

 

 

 



[1] SOURCES. Ordonnances publiées dans : Ordonnances, t. XIII : Bibl. de l'École des Chartes, 2e série, t. III. p. 110 ; Rev. historique, t. XL. p. 72. — Chroniques de Berry. Math. d'Escouchy, édit. De Beaucourt. t. I. 1863 (ch. VI), Gruel (ch. LXXXII), Basin (l. IV, ch. III à VI ; l. V, ch. XXVI) ; Baude, Éloge de Charles VII, ch. III, dans : Chron. de Chartier, édit. Vallet.

OUVRAGES À CONSULTER. Vallet de Viriville, Mémoire sur les institutions de Charles VII, Bibl. de l'École des Chartes. 1972. Cosneau, Richemont, ch. V. Spont, La milice des Francs-Archers, Rev. des Quest. historiques, 1897, t. I. Bonnault d'Houët, Les Francs-Archers de Compiègne, 1897. Ant. Thomas, Les États provinciaux de la France centrale, t. I, 1879. Van Wervecke, Public. de la sect. historique de l'Institut du Luxembourg, t. XLIV, p. 145 et suiv. (sur l'artillerie au milieu du XVe s.). De la Roncière, Hist. de la marine française, t. II.

[2] Si le bâtard de Bourbon et Robert de Sarrebruck payaient pour les autres, c'était parce que le premier s'était compromis dans la Praguerie, et que le second avait soutenu en Lorraine Antoine de Vaudemont, rival de René d'Anjou.

[3] Voir plus loin, liv. II, chap. IX, § I.

[4] Le bâtard d'Orléans.

[5] Ces mesures, semble-t-il, furent prises secrètement et ne firent l'objet d'aucune ordonnance publique. Nous ne les connaissons que par des textes postérieurs, tels que l'ordonnance du 26 mai 1445.

[6] On les appelle aussi, au moins à partir de 1447, compagnies de grande ordonnance.

[7] Cette farce (éditée par Viollet-le-Duc, Ancien théâtre français, t. III, p. 349) parait avoir été composée peu après la création des Francs-Archers (1448) et vise surtout cette nouvelle institution et la taille permanente. La Farce des gens nouveaux un peu postérieure (ibidem, p. 282), critique directement les soldats des Compagnies d'ordonnance.

[8] Au XVe siècle, l'expression de ban et arrière-ban ne désigne plus la levée en masse, comme au XIVe, mais la levée des détenteurs de fiefs.

[9] Cf. l'étude de M. Bellier-Dumaine, Annales de Bretagne, t. XVI, p. 117.

[10] Texte cité par Triger, Revue du Maine, t. XIX, p. 197. L'inventeur gennevois Louis Gaibaut dont parle M. Triger est certainement le Génois Louis Giribault, qui a joué un grand rôle dans les campagnes de Normandie et de Guyenne.

[11] Texte cité par Ribadieu, Histoire de la conquête de la Guyenne, p. 285, note 1.

[12] Il faut toujours excepter, bien entendu, les domaines des grands vassaux les plus puissants, tels que les ducs de Bourgogne et de Bretagne.

[13] OUVRAGES À CONSULTER. Outre Stubbs et Ramsay : James Gairdner, The Paston Letters, nouvelle édition, 1900-1901 (excellente introduction historique).

[14] SOURCES. Stevenson, Narratives of the expulsion of the English from Normandy, 1863. Œuvres de Robert Blondel, édit. Héron, 1891-1893. Chroniques citées au § 1 ; Chron. de Chartier, t. II et III ; Martial d'Auvergne, Vigilles, t. II. — Stevenson, Letters and papers ; documents publiés dans la Chronique de Math. d'Escouchy, t. III, la Chron. du Mont-Saint-Michel, t. II, la Revue rétrospective normande, 1837.

OUVRAGES À CONSULTER. Cosneau, Richemont ; Alb. Sarrazin, Jeanne d'Arc et la Normandie, 1896. Joubert, Négociations relatives à l'évacuation du Maine, Rev. du Maine, t. VIII ; Vallet de Viriville, Gilles de Bretagne, Rev. des Quest. hist., t. IV, 1888 ; Delisle, Hist. de Saint-Sauveur-le-Vicomte, 1887 ; G. Dupont, Hist. du Cotentin, t. II, 1873 ; Du Moley, Exmes pendant l'occupation anglaise, Bull. de la Soc. hist. de l'Orne, 1819 ; Ch. de Beaurepaire, Les États de Normandie sous Charles VII, Travaux de l'Acad. de Rouen, 1875.

[15] Complainte normande composée au moment de la trêve de 1444.

[16] SOURCES. Chroniques précédemment citées (notamment. l'Histoire de Gaston IV, de Leseur, très importante). Archives municipales de Bordeaux, 1887-1890. Documents publiés dans : Archives historiques de la Gironde, passim ; Comptes-rendus de l'Acad. des Inscript., 1899 ; Bibl. de l'École des Chartes, 2e série, t. III ; Stevenson, Letters and papers.

OUVRAGES À CONSULTER. Jullian, Histoire de Bordeaux, 1895. Brissaud, Les Anglais en Guyenne, 1875. Tauzin, Les sénéchaux anglais en Guyenne, Revue de Gascogne, t. XXXII. Cadier, La sénéchaussée des Lannes, Revue de Béarn. 1885. Allain, L'Église de Bordeaux, Rev. des Quest. hist., 1895, t. II. Corbin, Pey Berland, 1888. Malvezin, Hist. du commerce de Bordeaux, t. I. 1892. Ribadieu, Hist. de la conquête de la Guyenne, 1866. Courteault, Gaston IV, 1895. D'Auriac, Reddition de Bordeaux sous Charles VII, 1864. Brives-Cazes, Origines du Parlement de Bordeaux, Actes de l'Acad. de Bordeaux, 1885.

[17] Bulle du 15 février 1457, publiée par Denifle, Désolation des églises, n° 357.

[18] SOURCES. Quicherat, Procès de Jeanne d'Arc, t. II, III, V. Lanéry d'Arc, Mémoires et consultations en faveur de Jeanne d'Arc, 1889. Stevenson, Letters. Outre les chroniques précédemment citées : Première continuation de la Chronique de Berry, édit. Godefroy.

OUVRAGES À CONSULTER. Histoires de Jeanne d'Arc, citées au chap. III. Belon et Balme, Jean Bréhal et la réhabilitation de Jeanne d'Arc, 1898. De la Roncière, La marine française, t. II. Oman, Warwick the Kingmaker, 180.