LE RÈGNE DE PHILIPPE III LE HARDI

LIVRE TROISIÈME

 

CHAPITRE III.

 

 

Un écrivain qui adressa vers 1315 au jeune roi Louis X des conseils en forme de remontrances attribue à l'amour de saint Louis pour l'Église la prospérité de son règne, et à la malveillance de Philippe le Bel pour ce grand corps, les malheurs des dernières années :

Pensse à ton père !

Se l'église eust empes tenu

Tant de maus ne fussent venu

En son temps, com il avint.

Par sainte Église cela vint

Qui pour lui de tuer ne prioit[1].

Sous Philippe III, sainte Église se plaignit, comme sous Philippe IV, des persécutions de la royauté. Le roi était jeune, dit la chronique de Limoges[2], et il n'aimait pas l'Église autant que son père avait fait. On a des protestations collectives des évêques de la province de Narbonne en 1272 et en 1279[3], de la province de Bordeaux en 1281[4], à propos des usurpations commises par les officiers royaux au préjudice des droits de l'Église. Les mêmes griefs sont résumés et accentués dans les canons des conciles du temps[5] et dans la correspondance des papes[6]. Mais il ne convient pas d'attacher une importance extrême à. ces réclamations ni à ces plaintes ; à toutes les époques du moyen âge, le spirituel a gémi hautement de l'hostilité du temporel[7] ; Louis IX lui-même n'échappa pas aux criailleries de l'épiscopat, auquel, selon Joinville, il imposa si vertement silence. La politique de Philippe m fut, en réalité, comme celle de son prédécesseur, plutôt favorable aux intérêts ecclésiastiques[8]. Un certain Jean de Ribemont, écrivant au maire et aux jurés de Saint-Quentin au sujet de leurs affaires au Parlement, les avertit que li clergiés en la court le roi est au desseure et que les laïques n'y gouvernent plus comme autrefois[9]. Des froissements inévitables entre les représentants de l'Église et de la couronne se produisirent dans toutes les provinces, mais il n'y eut point de crise aiguë dans les rapports des deux puissances.

Dans l'état féodal, l'Église tenait un rang très élevé grâce aux privilèges exceptionnels de ses membres et grâce à ses richesses ; il convient, par conséquent, d'étudier successivement l'exercice de l'autorité royale sur les personnes ecclésiastiques et sur les choses ecclésiastiques.

Les élections canoniques des évêques et des abbés entraînaient, au XIIIe siècle, une correspondance active entre le prince, d'une part, les chapitres et les abbayes, d'antre part. On ne pouvait procéder en effet au choix d'un nouveau titulaire sans l'autorisation du roi. Beaucoup de pièces relatives à ces élections se conservent encore dans nos archives : lettres des chapitres pour demander congé d'élire[10], lettres pour l'accorder[11], suppliques pour la délivrance des régales après l'élection[12]. Naturellement les candidats du roi, s'il lui plaisait d'en avoir, étaient choisis à coup sûr ; on le vit bien lors de l'élection de P. de Benais à l'évêché de Bayeux[13] ; par contre, si l'élection désignait un personnage peu agréable à la cour, l'élu pouvait attendre fort longtemps la ratification de son titre[14]. Quant aux régales — car les gens du roi administraient au XIIIe siècle la plupart des sièges pendant leur vacance —, elles ont été sous Philippe le Hardi, comme en tout temps, l'occasion de nombreux procès devant le Parlement[15]. Avant d'en obtenir la délivrance, les nouveaux titulaires devaient prêter au roi un serment solennel de féauté ; c'est irrégulièrement que P. de Menais fut dispensé de cette formalité[16]. Un procès-verbal du 25 mars 1281, rédigé à propos du serment de G. d'Auxerre, abbé de Sainte-Geneviève, décrit complètement les formalités employées dans ces cérémonies.

G. d'Auxerre avait été nommé per provisionem Summi Pontificis ; mais la couronne nommait directement à un grand nombre de bénéfices. Le roi avait le droit d'investir ses clercs de certaines prébendes et de certains canonicats[17] ; il en était jaloux, comme le prouve une controverse assez vive qui s !éleva entre Philippe Ill et Nicolas III à propos de la collation d'une prébende dans l'église de Laon[18]. Le légat Simon de Brie avait désigné un certain Renaut de Anita pour une prébende de Laon, devenue vacante en cour romaine ; le roi désigna de son côté Renaut de Sancto Primo ; le pape répondit par une bulle agressive par laquelle il autorisa Simon de Brie à excommunier le candidat du roi, s'il essayait de s'installer. Il est difficile de prévoir la tournure qu'auraient prise les événements si les cieux candidats au canonicat de Laon n'avaient tous deux renoncé volontairement à leurs prétentions entre les mains du légat[19].

Telle était la part d'influence du roi sur le recrutement des dignitaires du clergé séculier[20]. Il n'avait pas moins de moyens d'action, à cet égard, sur le clergé régulier, surtout dans les abbayes qui s'étaient recommandées à lui et placées sous sa garde spéciale. Or, Philippe le Hardi mit ou maintint sous sa protection particulière plusieurs grands monastères : entre autres ceux de Moissac[21], de Chelles[22], de Longchamps[23], de Bernay[24], du Gard[25], de Saint-Maixent[26], de Savigny, du Bec, de Pontigny, de Pamiers[27] ; de Saint-Vaast, sur les terres du comte d'Artois[28] ; de la Madeleine, après le mariage qui assura la réunion de la Champagne à la couronne[29]. — La multiplication des abbayes de garde royale correspond, dans l'histoire des progrès du pouvoir monarchique, à la multiplication des bourgeoisies royales qui seront définies plus loin[30].

Les relations politiques de la royauté avec l'Eglise ne se sont pas bornées, de 1270 à 1285, à la direction par le prince des élections canoniques. La condition du bas clergé était, en effet, un danger pour l'ordre social ; elle exigeait alors une surveillance rigoureuse de la part de l'autorité séculière. On sait que, à la fin du XIIIe siècle, le pouvoir laïque fut obligé de rétablir, par des règlements et par la force, la dignité de la vie cléricale. Les villes et les campagnes étaient peuplées de gens mariés qui se livraient au commerce et, même à des commerces déshonnêtes, qui se disaient clercs, bien que du clerc ils n'eussent guère que la tonsure[31]. Leurs mœurs étaient brutales et violentes ; les documents judiciaires représentent sans cesse des clercs débauchés, homicides, convaincus de toutes les turpitudes. Les conciles, qui ont prohibé leurs excès, en attestent l'énormité. Ce n'est pas seulement le luxe des vêtements, les fourrures de vair, de gris ou d'écureuil, les ceintures, les bourses de soie, les couteaux, qu'on est obligé d'interdire aux séculiers et aux réguliers[32] ; le livre synodal de l'église de Nîmes défend l'ivresse, les dés, les repas de corps qui finissent par des injures et des batailles[33], les corrections manuelles que certains curés infligeaient à leurs paroissiens[34] ; il défend que les clercs, pour faire plaisir à quelques confrères ou même à des laïques, envahissent les propriétés d'autrui, vendangent. les vignes, frappant et blessant ceux qui résistent[35]. Le chroniqueur de Limoges donne des détails extraordinaires sur les moines de son pays ; ceux de Sarlat tuèrent leur abbé d'un coup de flèche on pleine église[36] ; ceux de Tulle volèrent 50.000 sous au frère de l'évêque de Limoges, qui avait déposé une partie de son trésor dans leur abbaye, et, quand ils vinrent au partage du butin, ils se battirent entre eux[37].

Cette populace de clercs qui troublait souvent la sécurité publique était soustraite au droit commun par des privilèges exorbitants : le for ecclésiastique qui les enlevait à la compétence des tribunaux laïques, l'exemption des questes et des tailles qui, en s'étendant aux clercs mariés et marchands, frustrait gravement le souverain temporel. C'est à combattre les abus qui résultaient de ces privilèges qu'étaient occupés, du haut en bas de la hiérarchie, les officiers do la couronne ; Beaumanoir, qui s'y était heurté, en sa qualité de bailli, en parle avec une amertume discrète[38] ; les prévôts et les sergents usaient envers les clercs de moins de ménagements encore que leurs chefs[39]. La Cour du roi se trouva donc obligée de prendre des mesures générales de police pour régulariser l'action de ses agents contre les immunités excessives de la cléricature.

En 1278, une ordonnance envoyée à tous les sénéchaux leur enjoignit de veiller à ce que les clercs ne portassent pas d'armes sur les terres de juridiction royale ; les infracteurs seraient punis par la confiscation de leurs armes et par une amende payable sur leurs biens — per capcionem temporalium[40]. Les clercs mariés et marchands, que les prélats s'obstinaient à protéger malgré l'ordre réitéré des papes de les abandonner à l'autorité séculière[41], furent réduits à la condition ordinaire des laïques. Le 29 novembre 1274, Philippe III, dans une instruction adressée à ses commissaires en Languedoc, interprétant les canons — hec videntur sentire canones —, déclara que les clercs non mariés seraient invités à ne pas se mêler de commerce ; quant aux autres, il n'y aurait même pas lieu de les avertir, parce qu'ils avaient perdu le bénéfice de clergie[42]. Une circulaire de 1284 soumit les clercs marchands, mariés ou non, aux tailles communes, imposées par les villes soit pour les dons offerts au roi, soit pour quelque autre cause[43].

On entend bien d'ailleurs que Philippe III, fidèle à sa politique conservatrice, n'essaya en aucune façon de porter atteinte aux privilèges théoriques de l'Église. Il ne contesta ni le for ni l'exemption des charges financières au nom de principes nouveaux ou de souvenirs historiques. Les véritables clercs ne furent atteints par aucune mesure générale. Ainsi, interrogé si les clercs de Toulouse devaient être soumis aux tailles, il se contenta de répondre qu'en France les clercs non mariés ne contribuaient pas aux tailles comme les laïques, à moins que ces tailles ne fussent charges réelles des fonds[44] ; et quand la question de la contribution des clercs se posa en fait à Toulouse même[45], à Limoges[46], à Saint-Riquier[47], à Arras[48], la Cour statua en sens divers suivant les différences des coutumes locales[49]. Il fallait de très pressantes raisons pour faire sortir la royauté de sa réserve législative ; et, sous Philippe le Hardi, elle n'en sortit, en effet, si l'on fait, abstraction de l'interdiction ci-dessus mentionnée du commerce et du port d'armes, que pour défendre aux prélats, barons et autres gentilshommes d'instituer des clercs en qualité de baillis ou de viguiers dans leurs domaines[50]. Le privilège du for serait devenu trop scandaleux, s'il avait aidé les officiers seigneuriaux à se soustraire au contrôle des tribunaux séculiers en cas de malversation. La défense, promulguée en 1278, de placer des clercs dans les offices de bailliage, a été reproduite en 1287[51] ; mais c'est bien à tort que des historiens célèbres ont vu dans le record de 1287 une disposition originale et caractéristique du règne de Philippe le Bel[52].

Le gouvernement royal apporta donc une singulière sagesse dans ses relations avec l'Église ; encore voulait-il qu'on appliquait ses décisions, sine precipitatione, cum maturitate debita. Il était en revanche le protecteur naturel des clercs opprimés par les grands seigneurs, le bras séculier dévoué aux serviteurs du Christ[53]. Rien ne serait par conséquent plus étonnant que les bruyantes protestations des conciles du temps au sujet de la violation des franchises cléricales, si l'on ne savait pas que les officiers royaux outrepassaient souvent les intentions de leur maître. C'est contre eux que le concile de Bourges, en 1276, multiplia les anathèmes, anathèmes que le synode de Pont-Audemer ordonna de répéter au peuple tous les dimanches après la messe[54]. Toutefois les gens d'église se mettaient quelquefois dans leur tort, même vis-à-vis des officiers royaux ; le synode de Tours se montra contre eux si hostile, et en termes si peu clairs, que Martin IV écrivit au légat d'examiner et, au besoin, de corriger ses canons[55].

Il n'est pas sûr d'ailleurs que les églises aient accueilli avec reconnaissance la grande mesure prise en 1275 à propos de l'amortissement des biens ecclésiastiques, quoique, jusqu'à un certain point, leur intérêt l'ait dictée[56]. Il est vrai que l'ordonnance sur l'amortissement était une nouveauté bien plus grave que les règlements de 1278 sur le port d'armes et sur l'inaptitude des clercs aux offices de judicature.

Était-ce une nouveauté ? On rie saurait l'affirmer à la légère. En effet, il est certain que, sous Louis IX, en 1256-59 et en 1268-69, des droits d'amortissement furent levés généralement en Normandie, au nom du roi ; cette levée eut peut-être lieu en vertu d'une ordonnance aujourd'hui perdue, car la perception fut très régulière, comme l'atteste une série de chartes du Cartulaire normand[57]. D'autre part, Brussel a conclu du préambule d'un mandement de Charles IV sur les amortissements (18 juillet 1326) que le type primitif des ordonnances sur cette matière remontait à saint Louis[58]. Enfin le catalogue de la Bibliothèque nationale attribue à saint Louis une traduction française du type latin ordinaire de ces ordonnances qui a été transcrite, au XIIIe siècle, sur le second feuillet d'un manuscrit juridique. Ces arguments, toutefois, ne sont pas décisifs, car l'attribution du catalogue de la Bibliothèque nationale est gratuite ; le mandement de Charles IV s'explique par ce fait que l'ordonnance qui l'accompagne reproduit exactement les dispositions les plus anciennes sur l'amortissement, sans tenir compte des changements que les rééditions de 1291 et de 1320 y avaient introduits ; or, une confusion a pu être commise d'autant plus aisément en 1326 sur la date du règlement primitif qu'à cette époque la mémoire de Philippe III s'effaçait déjà dans l'ombre que projetait sur elle la gloire de Louis IX ; en dernier lieu, les perceptions de 1256 et de 1268 prouvent seulement que, à ces deux époques, les églises furent inquiétées au sujet de leurs récentes acquisitions et forcées de financer pour les conserver ; il n'est dit nulle part que ces perceptions aient été faites selon les règles précises d'une ordonnance analogue à celle de 1275. Des perceptions pareilles, on en vit encore au commencement du règne de Philippe III, et c'est justement pour en corriger l'insuffisance que fut promulgué l'établissement fondamental dont la rédaction originale portait, dans les Mémoriaux de la Chambre des Comptes, la rubrique Vetus ordinatio domini Philippi regis[59].

Ce Philippe, dit la chronique de Limoges, qui fut fils d'un si grand homme, commença au début de son règne à grever les églises à propos de leurs acquêts[60]. Les baillis reçurent l'ordre de faire dans les fiefs du roi une recherche générale des biens tombés en mainmorte et de les saisir, car plusieurs monastères, au parlement de la Toussaint 1272, protestèrent contre cette mesure[61]. La Cour, consultée sur la date à partir de laquelle tous les acquêts devaient être saisis, répondit qu'il s'agissait seulement des acquisitions faites depuis vingt ans[62].

L'ordonnance de 1275 eut une tout autre importance. Il s'agit, en 1275, de régler pour la première fois trois questions qui n'avaient pas été résolues jusque-là : le taux de l'amortissement, le délai à partir duquel le droit à l'amortissement serait annulé par la prescription ; enfin la détermination des droits respectifs du roi et des barons à l'amortissement. On a déjà dit que la restriction du droit, que les possesseurs de fiefs ou d'alleux avaient d'amortir librement dans leurs terres[63], sans l'aveu du roi, constitue la réforme essentielle de l'ordonnance de 1275 ; elle frappa les seigneurs ecclésiastiques comme les seigneurs laïques, car une instruction déterminant les personnes qui, par exception, conservaient la licence d'amortir, cite seulement parmi les clercs l'archevêque de Reims, les évêques de Beauvais, de Noyon, de Châlons, de Laon et de Langres, c'est-à-dire les six pairs ecclésiastiques. Cette décision fut confirmée au parlement de l'Épiphanie 1277[64] ; encore la permission accordée aux pairs fut-elle réduite alors à l'amortissement de leurs arrière-fiefs. La déclaration contemporaine qui se trouvait transcrite dans le registre Saint-Just[65] ajoute (art. 3) que les archevêques, évêques et tons ceux qui tiennent des bénéfices tombant en régale ne peuvent rien amortir ni aliéner, car ils ne l'ont fait jusqu'ici qu'au détriment du roi et du royaume. — Quant au délai de prescription, l'ordonnance spécifia que l'amortissement ne pourrait être demandé que pour des acquisitions faites depuis trente ans : — Enfin, pour les cas où un droit d'amortissement serait exigible, on fixa une échelle de tarifs gradués : deux ans du revenu, si les biens à amortir, situés dans les fiefs on les arrière-fiefs du roi, avaient été donnés en aumône ; trois ans, s'ils avaient été acquis à titre onéreux (art. 5, 6). Si ces biens étaient des alleux, la coutume était de ne rien payer[66] ; cette coutume fut abolie : en cas d'aumône, les églises devraient abandonner les fruits d'une année, pour garder leurs alleux ; en cas d'achat ou d'échange, les fruits de deux années (art. 5).

L'ordonnance de 1275 régularisait ainsi l'exercice d'un droit dont- les seigneurs temporels usaient d'une façon arbitraire ; c'était par conséquent un bienfait. Bienfait d'autant plus grand que des circulaires et des mandements furent envoyés aux baillis pour commenter et compléter l'ordonnance. En vertu de ces mandements, ni les dons de valeur minime, tels pie lampes, cierges, etc., ni les échanges de biens de mainmorte conclus entre deux églises ne devaient être soumis à l'amortissement[67] ; dans les espèces difficiles, les officiers royaux étaient invités à consulter la Cour[68] ; mais si les églises refusaient de s'exécuter, les officiers royaux étaient autorisés à confisquer leurs acquêts[69].

Saint Louis n'avait jamais poussé si loin la réglementation des amortissements ; mais il avait publié en 1269, au sujet des dîmes inféodées, une ordonnance qui a passé dans la législation de Philippe III sur les biens ecclésiastiques. Saint Louis avait voulu faciliter le retour à l'Église des dîmes qu'elle avait été forcée jadis d'inféoder ou d'aliéner, en permettant aux ecclésiastiques de les racheter librement[70], assensu regis minime requisito. Cet établissement fut religieusement observé par Philippe III, qui y fait sans cesse allusion dans ses chartes de confirmation et dans ses mandements[71]. La volonté de Louis IX s'est ainsi trouvée transmise aux conseillers de Philippe le Bel, qui la consacrèrent de nouveau en 1294[72].

Au commencement de l'année 1276, l'ordonnance sur l'amortissement, accompagnée de documents explicatifs, fut expédiée aux officiers royaux ; ils devaient la faire exécuter et certifier leurs recettes au roi, par écrit[73], au prochain parlement de la Pentecôte. Ils n'y manquèrent pas, et il n'est guère de fonds d'archives ecclésiastiques qui ne renferme au moins une charte d'amortissement concédée par Philippe III, moyennant finance, juxta tenorem ordinationis nostre[74]. Il y eut peu de résistances[75]. De son côté, le roi n'accorda que très rarement des immunités dérogatoires aux dispositions de son ordonnance[76].

En résumé, les mesures prises sous le règne de Philippe le Hardi à propos des personnes et des biens d'Église étaient propres à assurer la modestie et la sécurité de la société ecclésiastique sous la tutelle du prince ; elles ont eu par la suite une longue fortune. Louis IX, dans ses Enseignemens, avait dit[77] : Honeure et aime totes les persones de sainte Église, et garde que on ne lor face violence ne que on leur sostraie lor aumosnes ; ces préceptes furent suivis à la lettre. Saint Louis, à la vérité, avait rappelé en outre le mot de Philippe-Auguste : Je crois bien que les clercs me font du tort, mais quand je regarde les bontés que Dieu m'a faites, j'aime mieux laisser aller de mon droit que de susciter du scandale à sainte Église. Mais Louis IX lui-même s'était montré très peu disposé à laisser aller de son droit, sauf en certains cas particuliers et de médiocre conséquence ; son fils l'imita également sur ce point. Ces deux rois, dont la législation est tout imprégnée à la fois d'esprit ecclésiastique et d'esprit féodal, n'ont accordé à l'Église, comme à la féodalité, que des faveurs individuelles, jamais de concessions générales. Nous l'avons déjà vu, nous le verrons encore en traitant des rapports du pouvoir royal avec les juridictions seigneuriales et les officialités[78].

Mais il y a un contraste frappant, pendant la période qui va de 1270 à 1285, entre l'histoire extérieure de l'Église — c'est-à-dire l'histoire de ses relations avec les puissances du dehors — qui est calme, et son histoire interne, qui est orageuse et obscure. Il y eut alors des luttes violentes entre les Thomistes, les scolastiques, futurs disciples de Duns Scot, et les sectateurs de l'Évangile éternel ; entre les mendiants et les séculiers. L'autorité royale ne pouvait manquer d'intervenir en quoique façon dans ces conflits.

Philippe III ne se mêla pas des affaires de la grande république universitaire — dont le légat Simon de Brie réforma sous son règne les statuts administratifs[79], et qui, bien que déchirée entre les partis philosophiques, était alors au comble de la gloire[80] —, si ce n'est pour confirmer ses privilèges[81], pour surveiller les désordres sanglants de ses écoliers[82], et pour inviter les maîtres qui croyaient leurs droits méconnus à reprendre leurs cours[83]. Il ne lui appartenait pas de refréner la hardiesse de ceux qui tentaient alors des révolutions dans les régions spéculatives.

Cependant il n'y avait jamais eu une telle fièvre d'hérésie et de révolte. Dès 1271, Étienne Tempier, évêque de Paris, gardien officiel et impitoyable de l'orthodoxie, condamna des erreurs théologiques, et les maîtres de l'Université défendirent d'agiter dans les cours des matières de foi, sous peine d'expulsion [84]. Quelques années après, l'évêque de Paris dut prononcer de nouveau l'anathème contre une série de propositions qui étaient soutenues dans l'Université ; il y en avait de fort étranges[85] qui rejetaient, non pas tel ou tel dogme, mais la foi tout entière ; il était dit que le monde est éternel, qu'il n'y a jamais eu de premier homme, qu'il n'y a pas de providence, que l'âme est mortelle, que les choses humaines sont régies par le cours des astres, que le christianisme contient des fables comme les autres religions, qu'on peut se sauver par la seule morale. La liste des hérésies condamnées par l'assemblée de théologiens qui, le 22 janvier 1277, se réunit aux Bernardins, contient en outre des axiomes tirés des ouvrages de saint Thomas[86] et beaucoup d'articles de la doctrine franciscaine, empruntés par les disciples d'Alexandre de Halès aux gloses mal famées d'Averroès et d'Avicenne[87]. L'arrêt qui les frappa n'est pas motivé ; il accabla pêle-mêle les écoles les plus contraires. C'est que, suivant l'expression d'un historien moderne, ce n'est pas telle philosophie, mais toute philosophie qu'auraient voulu proscrire les conseillers orthodoxes de l'évêque de Paris.

Étienne Tempier, qui n'était ni un savant ni un écrivain[88], mais un homme de gouvernement, déploya vraiment en 1277 la raideur d'un inquisiteur ; mais il ne pouvait atteindre l'hétérodoxie que chez les docteurs de l'Université. Or, l'hétérodoxie s'était répandue dans toutes les classes de la société sous ses formes contradictoires, incrédulité et mysticisme. Les gens qui n'entendaient rien aux spéculations d'un saint Thomas ou d'un Roger Bacon en savaient assez pour saluer, avec Jean d'Olive, l'aurore des temps nouveaux où seraient coupées les branches pourries du tronc de l'Église ; pour se laisser aller à la foi extatique et simplifiée des Franciscains. D'autres, tombés dans une impiété grossière, en venaient à commettre les derniers sacrilèges ; on voyait beaucoup de chrétiens se convertir au judaïsme[89] ; les hérésies albigeoises, malgré la persécution, avaient encore des racines tenaces dans le Midi[90]. C'était affaire à l'Inquisition dominicaine de réprimer ces mouvements populaires, indices d'aspirations vagues vers une réforme prématurée. Mais l'Inquisition avait besoin, pour accomplir son œuvre disciplinaire, de l'appui des princes du siècle ; Philippe III lui accorda le sien sans réserves. Les papes, Nicolas III lui-même, le louèrent d'avoir à cœur l'affaire de la foi[91]. Il munit à plusieurs reprises les Inquisiteurs de sa sauvegarde spéciale[92] ; ses sénéchaux, entre autres ceux de Toulouse et de Carcassonne, les secondèrent de leur mieux[93].

Ni Louis IX ni Philippe III, hommes simples, doués d'une foi aveugle, qui vivaient en dehors des controverses dogmatiques, n'hésitèrent à se prononcer contre les hérésies populaires ou savantes ; mais leur embarras fut plus grand quand la lutte se déclara dans le sein même du clergé, entre les dépositaires officiels de la vérité. Ils avaient tous les deux une confiance particulière dans les moines de Saint-Dominique et de Saint-François, au moins pour la direction de leur conscience[94] ; mais ils comptaient parmi leurs conseillers intimes une foule de membres du clergé séculier ; or, le clergé séculier était animé contre les mendiants d'une haine très vive ; les sympathies des rois se trouvaient donc partagées. Plus tard, le gouvernement royal, en relations hostiles avec les papes, associa ses intérêts avec ceux de l'Église gallicane ; mais Philippe III fut l'allié du pape Martin IV, qui favorisa les ordres mendiants par sa bulle Ad fructus uberes ; et cependant les plus vaillants adversaires de ces ordres, comme Guillaume de Flavacourt[95], archevêque de Rouen, et Guillaume de Mâcon, évêque d'Amiens, étaient parmi ses serviteurs.

En 1281, G. de Mâcon et Simon, évêque de Chartres, avaient été envoyés par le roi à la cour de Rome pour presser, auprès de Martin IV, la canonisation de Louis IX ; à Rome, ils apprirent que des délégués des ordres mendiants intriguaient afin d'arracher au pape de nouveaux privilèges, au préjudice de l'autorité des évêques. Franciscains et Dominicains, rivaux en théologie au point de s'excommunier mutuellement, s'étaient unis cette fois pour obtenir en commun des faveurs spirituelles. Ils demandaient le droit de confesser sans permission préalable de l'autorité diocésaine ; droit important, car les confesseurs ont toujours quelque influence sur les dispositions testamentaires de leurs pénitents, comme Renardiaus, custode des Mineurs, l'insinue à ses frères dans le Roman du Renart :

Car il nos metent en débat

A oïr les confiessions

Et de faire absolutions

Et d'enjoindre penance as gens

Et cl'estre aussi as testamens,

Et s'il de cou viennent à cief

De faim morrons et de mescief[96].

Quand j'eus vent de cette nouvelle, racontait plus tard G. de Mâcon[97], j'allai voir le pape et je le priai de révoquer de tels privilèges ; mais, le lendemain, il m'éloigna en me chargeant d'une mission difficile. Le 10 janvier 1282, Martin IV publia, en effet, la bulle Ad fructus uberes, qui reconnaissait aux mendiants, purement et simplement, le droit de confesser et d'absoudre[98] ; mais passer sous silence la nécessité de l'autorisation préalable des évêques, n'était-ce pas la supprimer, de même que Clément IV par la bulle Quidam temere sentientes avait supprimé l'autorisation des curés ?

Néanmoins, puisque la bulle n'était pas formelle, le champ se trouvait ouvert à la controverse. G. de Mâcon, revenu en France, écrivit aux cardinaux pour protester contre le privilège du 10 janvier, et ils lui répondirent, par lettres scellées, que le pape leur avait promis ou bien de révoquer complètement le privilège ou bien de l'expliquer. Ces lettres, l'évêque d'Amiens eut soin de les faire voir au roi. — En attendant l'interprétation promise, les partisans et les adversaires de la bulle entrèrent on campagne.

D'abord, les moines provoquèrent un colloque sous la présidence de l'évêque de Paris, Ranulf de Humblières, pour gagner l'Université à leur cause. Quinze docteurs en théologie y assistèrent ; ils décidèrent que les fidèles n'étaient pas obligés de se confesser une seconde fois (les péchés déjà déclarés devant le prêtre paroissial, auquel tout chrétien était obligé de se confesser une fois l'an en vertu des canons du concile de Latran. Or, les évêques prétendaient que, dans leur confession au prêtre paroissial, les pénitents devaient reproduire tous les aveux qu'ils pouvaient avoir faits à d'autres confesseurs. Guillaume de Mâcon fit avertir les maîtres que, s'ils signaient cette décision, ils se déclaraient contre le clergé séculier, et les maîtres ne signèrent point[99]. En même temps, pour pouvoir se réclamer de l'opinion publique, les ordres mendiants expédièrent de jeunes frères dans les villes et dans les villages. Ils prêchaient ; puis, le peuple et les notables étant assemblés, en présence d'un notaire, avec une solennité théâtrale, ils demandaient si leur ordre n'axait pas travaillé jusque-là pour le bien des consciences ; quelques dévotes, dans la foule, répondaient : Oui. — Voulez-vous que nous fassions comme nous avons fait jusqu'à présent ? Et le notaire dressait un acte authentique, certifiant la popularité des bons frères[100].

De leur côté, G. de Mâcon et son ami, l'archevêque de Rouen, avaient adressé, le 1er juillet 1282, une lettre circulaire aux métropolitains de Reims, de Sens et de Tours[101] — l'archevêque de Bourges était déjà gagné à leur cause. Ils priaient ces personnages de convoquer sans délai des synodes provinciaux, composés non seulement d'évêques, mais de chanoines, d'abbés et de doyens, et de leur soumettre, en expliquant la gravité du litige, la question de la bulle, afin d'élever contre l'ambition des ordres mendiants la protestation unanime du clergé séculier.

C'est à Paris qu'eurent lieu enfin, en décembre, des débats contradictoires[102]. A partir du commencement du mois, la ville universitaire fut mise en émoi par des prédications ; Henri de Gand, Godefroi de Fontaines, Nicolas du Pressoir et Savari, chanoine du Mont-Saint-Éloi, parlèrent publiquement sur la bulle. Les prélats délibérèrent de faire convoquer par des crieurs, dans toutes les écoles, les maîtres de chaque faculté. Le 7 juin, dans la grande salle de l'évêché (le Paris, se réunirent quatre archevêques, vingt évêques, les maîtres et les écoliers de l'Université, des frères de Saint-François et de Saint-Dominique. L'archevêque de Bourges, qui présidait, ouvrit la séance par un discours où il accusa nettement les ordres mendiants de bouleverser l'Église et de mettre la faux dans la moisson d'autrui. — Nous avons, dit-il, fait prier personnellement les moines par le roi et par d'autres grands de ne pas se mêler de notre office ; ils n'ont pas voulu ; nous venons maintenant à vous... Ce que nous serons, vous le serez, car il n'y a guère d'évêque aujourd'hui qui ne sorte pas de vos rangs. L'archevêque fit lire ensuite une décrétale d'Innocent IV sur les privilèges des mendiants, et G. de Mâcon prit la parole.

Adonc vesques d'Amiens estoit

Un jouenes homs, ki grâce avoit

De preudance et d'estre bons clercs...

Il raisonna en juriste : il interpréta la bulle en disant qu'elle autorisait les moines à confesser, ruais qu'elle ne pouvait abroger, par son silence seul, les anciens canons qui les forçaient à requérir, pour user de leur droit, une licence spéciale des évêques. Il identifia la cause de l'Église séculière avec celle de l'Université, et, dans une péroraison énergique, il protesta que ces grands corps iraient, s'il le fallait, pour se défendre, jusqu'au sang.

L'Université, cependant, ne se prononça, pas, et les maîtres écoutèrent les harangues des moines comme ils avaient entendu celles des séculiers. Aussi, pour enlever son approbation, les évêques firent-ils de nouveau publier dans les écoles que, le dimanche suivant, il y aurait une conférence sur la bulle, à l'heure du sermon, dans l'église des Bernardins.

G. de Macon fut très satisfait de cette seconde journée, et sa joie, dans la lettre où il la raconte, éclate en railleries sur la confusion de ses ennemis. Son discours, qui suivit l'allocution d'un maître en théologie, avait été en effet très brillant. Il démontra, dit G. de Fontaines, en citant les théologiens, les canons et la loi, que les frères sont des hypocrites ; qu'ils ont le fiel dans le cœur et des douceurs sur les lèvres ; qu'ils usurpent les fonctions d'autrui ; qu'ils n'ont, en un mot, nec veritatem vite, nec veritatem doctrine, nec justicie veritatem. Il fit relire encore une fois les constitutions originales des papes, rappela les incidents de son voyage à Rome, et termina en exprimant l'espoir qu'une bulle nouvelle, complétant celle de 1281, viendrait bientôt trancher le différend.

Il paraît que l'Université reconnut cette fois le bon droit des évêques, quoique G. de Fontaines n'ait pu se procurer le texte de sa délibération. Quant à Martin IV, il mourut sans avoir apaisé la querelle qu'il avait réveillée par une mesure ambiguë et imprudente. Sous le règne de Philippe le Bel et le pontificat d'Honorius IV, la controverse suivit son cours.

Dans l'affaire de la bulle Ad fructus uberes Philippe III joua donc le rôle d'arbitre et d'intermédiaire entre les adversaires en présence ; mais, bien que plutôt favorable aux séculiers, il agit avec une extrême réserve. Comme défenseur de l'Église, il se trouvait naturellement mêlé à tous les événements pli l'agitaient ; toutefois, il n'intervint jamais chez elle que pour maintenir sa discipline et son union, de même que, dans l'ordre des choses temporelles, il ne fit que régulariser ses rapports avec la société civile.

 

 

 



[1] Geoffroi de Paris, B. N, franç., 140, f° 47.

[2] H. F., XXI, 758, 180.

[3] Hist. gén. Lang., X, pr. c. 111. — LABBE, XI, 1062. Deux procureurs sont envoyés au Parlement pour protester.

[4] Revue des sociétés savantes, 4e série, IV, 451 (Arch. de la Vienne).

[5] LABBE, XI, col. 1018. Concile de Bourges [1276].

[6] Bulles de Grégoire X (11 nov. 1274), RAYN., 1214, § 14 ; de Nicolas III à l'évêque de Poitiers (Arch. du Poitou, X, 02), à l'évêque de Chartres (Cartul. De N.-D. de Chartres, II, 203) ; il leur permet de se servir contre les gens du roi du glaive de l'excommunication.

[7] Voyez pour le XIe et le XIIe siècle, LUCHAIRE, Hist. monarchique de la France sous les premiers Capétiens, I, 225.

[8] Mand., n° 58.

[9] B. E. C., 2e série, III, 155. E. LEMAIRE, Arch. anc. de Saint-Quentin, p. 121. — La lettre n'est pas datée ; M. L. en place la rédaction vers 1290, mais M. Janin l'a datée avec raison du règne de Philippe le Hardi.

[10] Arch. Nat., J, 344. — Dupuy en a publié quelques-unes dans ses Preuves des libertés de l'Église gallicane.

[11] Exemple pour l'élection de Laon. B. N., Coll. Moreau, CCVII, f° 55.

[12] Exemple pour l'évêché de Tournay. Arch. Nat., J, 206, n° 7 [Lettre de l'archev. de Reims à Philippe III, avril 1284]. — Cf. J, 346.

[13] G. de Nangis, XX, 495. Le chapitre de Bayeux ne l'osa contredire, por la doubtance le roy.

[14] Voyez l'affaire du doyen de Saint-Quentin, COLLIETTE, Mém. du Vermandois, II, 661.

[15] Régales de Bourges (Olim, I, 894), de Tournay (II, 59), etc.

[16] DE GAULLE, Bullet. Soc. Hist. Fr., 1844, p. 91.

[17] Voyez des ordres à divers chapitres d'investir tel clerc porteur des présentes d'un canonicat. B. N., lat., 9778, f° 7 v° [1er mars 1275] ; DELISLE, Fragm. du reg. de Nic. de Chartres, p. 52 ; Coll. Moreau, CCV, f° 79 [29 sept. 1281], etc.

[18] Voyez sur cette affaire Arch. Nat., J, 348, n° 8, et J, 1026, n° 3, 4 et 4 bis. Un seul historien y a fait allusion, MARLOT, Hist. de l'Eglise de Reims, III, 642.

[19] Lettre de démission de R. de Amia (J, 1026, n° 4 bis).

[20] Ph. III avait cependant pour principe de ne pas intervenir dans les élections canoniques, quand elles étaient contestées : il le déclara un jour à Edmond d'Angleterre. Voyez RYMER, I, p. 86, c. 2 [Edmond à Edward Ier, 1284] : Sachez, sire, que je parlai au roi de France, et le priai en droit de la besogne de l'eslit de Bordeaux, et il répondit que il ne requiert jamais pour nul quand il sont deus esliz, mais bien coveigne l'Apostole.

[21] Ord., VIII, 442.

[22] Arch. Seine-et-Marne, H, 409.

[23] Arch. Nat., K, 35, n° 13.

[24] Ord., IV, 373.

[25] Arch. de la Somme, Invent. ms. f° 273.

[26] Coll. Fonteneau, vol. XLVII.

[27] Voyez Mand., n° 24, 63, 125, 136, 141, 142.

[28] MARTÈNE, Ampliss. Collect., I, 1354. — Cf. B. N., Coll. Moreau, CCVI, P 215. — Le comte d'Artois, en 1293, demanda au Parlement l'annulation de cet acte fait in prejudicium juris sui. Olim, II, 364.

[29] CHÉREST, Études historiques sur Auxerre, II, 109, note. — Beaucoup d'abbayes plaidaient au Parlement contre les suzerains féodaux pour faire reconnaître qu'elles étaient placées sous la garde du roi. V. notamment l'abbaye de Sainte-Colombe de Sens contre le comte de Champagne. L. DELISLE, Essai de restitution, n° 380.

[30] Voyez BEAUM., II, 241.

[31] Le viguier de Montolieu et de Sainte-Eulalie, ayant reçu l'ordre, en 1283, de faire le dénombrement des clercs marchands de ces deux bourgs, en trouva 216. MANUL, Cartul. de Carcassonne, I, 130.

[32] Conc. Salmur. LABBE, XI, col. 1013 (1276).

[33] LABBE, XI, col. 1215 [1284].

[34] LABBE, XI, col. 1233.

[35] LABBE, XI, col. 1232.

[36] H. F., XXI, 719, e.

[37] H. F., XXI, 186,799. Cf. sur les clercs des environs de Moissac, Mand., n° 53.

[38] BEAUM., II, 245, 246.

[39] Act. Parl., n° 2100, A. Enquête du parlement de l'Epiphanie 1278.

[40] Voyez le texte abrégé de cette ordonnance, Hist. gén. Lang., X, pr. c. 160. — Cf. Stilus supremæ Curiæ Parlamenti„ éd. du Moulin, p. 169. — On en trouve une rédaction un peu différente dans MÉNARD, Hist. de Nismes, I, pr. p. 105.

[41] FOURNIER, les Officialités au moyen âge, p. 70, note. — Cf. Arch. Nat., J, 744, n° 3058. Le roi se plaignit à Martin IV que les évêques, malgré ses ordres, n'eussent pas averti leurs clercs de s'abstenir de commerces illicites ; le pape lui répondit, sous l'anneau du Pécheur, qu'il leur écrirait encore ; en cas de désobéissance, il ordonnerait au légat d'agir (octobre 1284).

[42] Ord., I, 302, art. 4.

[43] MÉNARD, Hist. de Nismes, I, pr. p. 105.

[44] Ord., loc. cit., art. 8.

[45] L. DELISLE, Essai de restitution, n° 412 (1280).

[46] L. DELISLE, Essai de restitution, n° 522.

[47] Act. Part., n° 2137.

[48] Essai de restitution, n° 558.

[49] Cependant la Cour du roi avait une jurisprudence bien assise sur un point : Dicunt esse judicatum in curia regis quod clerici debent partem debitorum ratione bonorum obvenientium e matre et patre, tanquam hesedibus... (1283), Essai de restitution, n° 511 ; cf. n° 922 et Hist. gén. Lang., X, pr. c.. 85, n° 10 ; c. 165, n° 23.

[50] MÉNARD, Hist. de Nismes, I, pr. p. 104. (Saint-Martin d'hiver 1278.) — Cf. Hist. gén. Lang., X, pr. c. 160.

[51] Ord., I, 316.

[52] MICHELET, Hist. de Fr., III, 252. — BOUTARIC, la Fr. sous Ph. le Bel, p. 46, interprète autrement l'ordonnance, mais il a commis la même erreur que Michelet sur la question de priorité. — Cf. TAXON, Hist. des Jurid. monast. de Paris, p. 89. — Voyez aussi LABBE, XI, c. 1216. (Constitut. synod. de Nîmes.)

[53] RYMER, p. 150, c. 2. Le chapitre de Dax au roi (1275). Excellentissimo suo domino et Ecclesie bracbio seculari.

[54] LABBE, XI, c. 1044. — Cf. une lettre de l'official au clergé du diocèse de Rouen. B. N., lat.. 14193, f° 19. Ed. BESSIN, Concil. rothom. prov., II, 85.

[55] En 1282. LABBE, c. 1183. — Cf. la bulle de Martin IV, Arch. Nat., J, 699, n° 66.

[56] Ord., I, 303.

[57] L. DELISLE, Cartul. normand, ad. ann.

[58] Ord., I, 797. Cf. BRUSSET, Usage des fiefs, p. 674.

[59] B. N., lat., 12814, f° 10.

[60] H. F., XXI, 778, c.

[61] L. DELISLE, Fragm. du reg. de Nic. de Chartres, p. 27. — Act. Parl., n° 1820, 1821 [bailliage de Bourges].

[62] Olim, I, 831, n° VIII ; Essai de restitution, n° 118, B.

[63] Voyez livre III, chap. II.

[64] Olim, II, 408, n° XXXII. — Cf. la même déclaration dans le registre de Nicolas de Chartres. Essai de restitution, n° 298, et Fragm. du reg. de Nic. de Ch., p. 53.

[65] BRUSSEL, Usage des fiefs, p. 608.

[66] Déclaration citée, art. 7.

[67] Déclaration citée, art. 5, 12.

[68] Déclaration citée, art. 9.

[69] Mand., n° 54.

[70] Ord., I, 102.

[71] Arch. Nat., K, 180, n° 14, 17, 18, 20. Chartes confirmatives des achats de dîmes faits, de 1277 à 1284, par l'église de Beauvais. — Cf. Mand., n° 65, 128, 132.

[72] Ord., I, 325.

[73] Mand., n° 54.

[74] L'exaction fut générale. Pour les églises de Normandie, voyez Cartul. normand, n" 898-905, septembre 1271. On a des chartes pour les bailliages de Vermandois (Cartul. d'Ourscamps, p. 322 ; Saint-Barthélemi de Noyon, Arch. Nat., 185, n° 31 ; Foigny, Ib., n° 105) ; de Sens (les Barbeaux, Arch. Nat., K, 190, n° 80) ; la sénéchaussée de Poitou (DUVAL, Cartul. de l'abbaye des Chateliers, p. 183 ; Coll. Fonteneau, IV, 391, Charroux ; XI, 429, Saint-Hilaire de Poitiers), etc.

[75] Sur la résistance des Templiers, voyez Mand., n° 138. — Cf. Hist. gén. Lang., X, pr. c. 241, n° 2.

[76] Mand., n° 126, 141.

[77] Enseignemens de saint Louis, éd. de Wailly, p. 53.

[78] Chapitre V.

[79] PASQUJER, Recherches de la France, l. IX, chap. XXV.

[80] Jordanus d'Osnabrück, vers 1285, confond le sacerdoce avec Rome, l'Empire avec l'Allemagne, et l'Université avec Paris. Voyez DU BOULAY, Hist. univers. Paris., III, 406.

[81] Arch. Nat., M, 66a, n° 6.

[82] L. DELISLE, Essai de restitution, n° 291. — H. F., XXI, 131, ad ann. 1279.

[83] DU BOULAY, op. cit., III, 455. L'Université interrompit l'enseignement à cause d'une injure faite à un maitre en médecine [3 juillet 1281.]

[84] DU BOULAY, op. cit., III, 397. Statut de la Faculté des arts. (1er avril I271.)

[85] Voyez l'ordonnance d'Et. Tempier, datée du 7 mars 1277, DU BOULAY, III, 434. — Cf. B. N., lat., 14508, f° 257.

[86] FLEURY, Hist. Eccles., XVIII, 251.

[87] C'est ce qu'a remarqué M. HAURÉAU, Hist. de la philosophie scolastique, II, 96. — E. RENAN, Averroès, p. 259, et CHARLES, Roger Bacon, p. 36.

[88] Hist. Littér., XIX, 351.

[89] G. SAIGE, les Juifs du Languedoc, p. 232. Bulle de Grégoire X, 1er mars 1273, aux Inquisiteurs du Midi.

[90] Voyez les registres de l'Inquisition de Carcassonne, B. N., Coll. Doat, XXVI, XXXII. Marlène a publié tin traité intitulé : Doctrina de modo procedendi contra hereticos, qui parait avoir été rédigé en Normandie vers 1280 (Hist. gén. Lang., IX, p. 38).

[91] Arch. Nat., L, 268, n° 27. — Cf. Potthast, n° 21806.

[92] Mand., n° 7, 117, 118.

[93] Hist. gén. Lang., IX, p. 39. M. Schmidt (Hist. des Cathares, I, 336) a remarqué, comme dont Vaissète, que les poursuites contre les hérétiques albigeois devinrent beaucoup plus actives après la réunion du comté de Toulouse à la couronne.

[94] Voyez les lettres des généraux des deux ordres à Philippe le Hardi. Arch. Nat., J, 462, n° 28¹¹ [Lettre de Jérôme d'Ascoli, général des Franciscains ; il associe le roi aux prières de ses frères propter beneficia]. Ibid., n° 28¹² [févr. 1277]. Lettre analogue du général des Frères prêcheurs.

[95] Sur G. de Flavacourt, voyez Hist. Littér.. XXVII, 397.

[96] Cité par M. B. Hauréau, Hist. Littér., XXV, 383.

[97] Disc. de G. de Mâcon, DU BOULAY, Hist. univers. Paris., III, 466.

[98] Potthast, n° 21836.

[99] Hist. Littér., XXV, 386.

[100] B. N., lat., 3120, 33 [Lettre de Guillaume de Mâcon à l'archevêque de Reims].

[101] MARLOT, Hist. de l'Église de Reims, II, 519 ; BESSIN, Concil. Rothom. prov.. pr. I, 155.

[102] On a trois comptes rendus des colloques de Paris, dus à des témoins oculaires : 1° une lettre de Guillaume de Mâcon, B. N., lat., 3120, f° 32 ; 2° le récit de Godefroi de Fontaines publié par DU BOULAY, Hist. univ. Paris., III, 465 sqq. ; 3° le récit du Roman die Renart.