LA PUCELLE DE FRANCE

HISTOIRE DE LA VIE ET DE LA MORT DE JEANNE D'ARC

 

CHAPITRE XXV. — LA DERNIÈRE MATINÉE EN PRISON.

 

 

L'ABJURATION ayant eu lieu, quelle qu'en ait été la forme, Cauchon lut la sentence à la coupable. Une fois de plus on répéta à Jeanne qu'elle avait péché en forgeant des révélations mensongères, en se posant comme devineresse, en blasphémant Dieu et ses saints... et tout le reste du réquisitoire. Mais maintenant qu'elle avait abjuré elle était relevée de l'excommunication. Pour sa pénitence, l'Église la condamna à la prison perpétuelle, avec le pain de douleur et l'eau d'angoisse. Avec moins d'humilité qu'on n'en attendait d'une pénitente, la Pucelle s'entretint avec Loiselleur, l'espion, qui lui dit : Vous avez fait une bonne journée ; s'il plaît à Dieu, vous avez sauvé votre âme. Sans répondre à ses paroles, elle cria : Or ça, gens d'Église, menez-moi à vos prisons, que je ne sois pas dans les mains de ces Anglais !

Même à cette heure critique, elle ne pouvait contenir le calme, profond et inébranlable dédain qu'elle éprouvait pour les savants docteurs. Mais elle ne les connaissait pas encore. Menez-la où vous l'avez prise, dit Cauchon.

L'ermitage ecclésiastique dans lequel elle devait purifier ses péchés par la pénitence, était la vieille cellule malpropre, où dans les fers et dans la compagnie des soudards de John Gray et de William Talbot, elle allait se consacrer à une vie de repentir. D'après la règle de l'inquisition, les femmes étaient séparées des hommes et gardées par des femmes. Avec une cruauté qui égalait son hypocrisie et sa perfidie. Cauchon passa outre et remit Jeanne dans cet enfer, au tourment moral inexprimable. Il n'eut jamais l'intention d'agir autrement. Dès le début, l'Angleterre avait stipulé qu'elle reprendrait sa victime s'il y avait acquittement. C'est ainsi que, du commencement à la fin, le procès demeura une hypocrisie organisée de la part des juges français. Cauchon jeta par-dessus bord les règles de l'Église, et fit cadeau de Jeanne à ses ennemis politiques. Quicherat essaie d'atténuer cette suprême iniquité ; son désir d'impartialité l'a conduit à une étrange partialité.

Si quelque chose pouvait tout spécialement pousser Jeanne à l'abjuration telle qu'elle la fit, après la perspective de la torture par le feu et de la mort immédiate, c'était cette société des housse-pailliers anglais à laquelle on la contraignit jour et nuit. Je considère que ce fut là la partie la plus cruelle de son long martyre ; et maintenant elle devait séjourner parmi eux sans la protection de son habillement ordinaire. Le bruit courut que Warwick n'était pas encore satisfait et qu'il malmenait les religieux français. Un d'eux lui dit : Soyez tranquille, monseigneur, nous la rattraperons bien. Les hommes d'armes se moquaient de Jeanne sans qu'on leur en fit des reproches.

Dans l'après-midi, Courcelles, Loiselleur, Midi, La Pierre et d'autres s'en vinrent au cachot et parlèrent à Jeanne de la grande pitié et de l'indulgence des hommes d'Église. On lui dit qu'elle devait revêtir une robe de femme et on lui en apporta une. Elle s'en revêtit et permit que la coupe toute militaire de ses cheveux fût modifiée à la façon des femmes.

La duchesse de Bedford, après avoir constaté avec Anna Bavon la virginité de Jeanne, avait donné l'ordre à Gray, à Talbot et aux autres de ne pas lui faire de violences. La noble dame lui envoya à ce moment un tailleur, Jean Simon, avec une robe. Pendant l'essayage ce misérable lui prit le sein et reçut un soufflet.

Nous ne savons pas, nous ne saurons jamais, heureusement, tout ce qui s'est passé clans ce cachot entre le 24 mai, jour de l'abjuration, et le 27, dimanche de la Trinité. Ce qui est connu, c'est que la nuit elle avait les jambes prises dans les fers, avec deux anneaux attachés à une chaîne fixée elle-même par un cadenas à une grande poutre de bois. Elle demeura ainsi du 24 au 27 mai. Ce jour-là, le bruit parvint aux scribes et aux docteurs que Jeanne était relapse et avait repris l'habit d'homme. Les clercs s'en allèrent à plusieurs au château ; mais comme ils se tenaient dans la cour, une centaine de soudards anglais les accueillirent avec des insultes et des mots injurieux. Ils apprirent qu'ils étaient des traîtres armagnacs et de faux conseillers, et ils furent heureux de pouvoir s'échapper de la cour sains et saufs. Manchon qui se trouvait là en fut si effrayé que, sommé de venir le lundi suivant au château, il ne voulut pas s'y rendre jusqu'à ce que l'un des hommes d'armes de Warwick lui eût servi de protecteur. Comme l'un des clercs, Marguerie, avait demandé pourquoi la Pucelle s'était revêtue du costume d'homme, un soldat anglais le menaça de sa pique, à sa grande terreur.

Il fallut pourtant le lundi admettre Cauchon et ses acolytes. Ils la trouvèrent revêtue de son habillement ancien et lui demandèrent pourquoi elle était relapse. D'après le record officiel, elle répondit qu'elle le préférait et qu'elle ne comprenait pas qu'elle eut juré de ne plus le porter. Il était plus convenable pour moi de reprendre un habit d'homme, étant entre les hommes... et elle ajouta qu'on n'avait point tenu la promesse qu'on lui avait faite qu'elle recevrait la communion et serait mise hors des fers. J'aime mieux à mourir que d'être aux fers ; mais si on me veut laisser aller à la messe et ôter hors des fers, et mettre en prison gracieuse, je serai bonne et ferai ce que l'Église voudra.

Je serai bonne ! Elle revenait à l'innocence d'un enfant se soumettant à sa mère et parlait comme un enfant. Telle est la version officielle.

La Pierre atteste qu'elle affirma publiquement que les Anglais lui avaient fait beaucoup de tort et de violence quand elle était vêtue d'habits de femme, et que son visage plein de larmes, défiguré et outragé, émut de compassion le dominicain. Ladvenu ajouta un récit trop horrible pour être rapporté, au sujet d'un lord anglais, et jura que la Pucelle en fit nettement la déclaration.

Manchon ne va pas si loin ; il dit simplement que ses gardes voulaient lui faire violence, et que ce fut la raison pour laquelle elle changea de costume.

On ne lui aurait pas donné ses habits de femme, malgré ses prières ; c'est pourquoi elle serait restée au lit jusqu'à midi, et alors, contrainte de se lever, elle fit comme elle put. Massieu jura que Jeanne lui dit la chose le 29 mai, en réponse à ses questions, après dîner, lorsque Warwick et Estivet l'avaient laissé seul avec elle. Cette version est la plus probable. En tout cas, les Anglais avaient intentionnellement laissé le vêtement défendu à sa portée.

Le compte rendu officiel rapporte qu'elle dit, à ses geôliers apparemment, que ses Voix étaient revenues et lui avaient donné des conseils. Nous ne savons à quel moment cela se produisit. Nous ne pouvons connaitre les détails de son état de relapse, et volontiers on détourne les yeux de la cruauté qui fut déployée dans ce sombre endroit de la terre. Il existe cependant, ainsi que nous le verrons, un témoignage digne de foi contre l'histoire révoltante rapportée par Ladvenu.

Pour les juges, c'était l'essentiel que, par des moyens à la rigueur infâmes, ils l'eussent rattrapée, et qu'elle fût relapse. Le 29 mai, Cauchon réunit ses bandits, les révérends pères en Christ — les cruels et les lâches — Courcelles et Loiselleur, Ladvenu et Isambart de La Pierre, tous de même acabit, dans la chapelle du palais de l'archevêque de Rouen.

Tous furent d'avis, y compris La Pierre, que Jeanne devait être remise au bras séculier, bien entendu après qu'on lui aurait lu la confession de ses péchés. Cette condition, nous l'avons vu, ne fut jamais remplie. Les meilleurs d'entre eux étaient des poltrons ; mais un pauvre moine avec la mort en perspective doit obéir à la volonté de ses supérieurs. Nous qui ne sommes pas des moines, et qui n'avons pas été tentés comme eux, il nous est facile de les censurer à notre guise.

La Pucelle fut citée à comparaître le 30 mai au Vieux-Marché. L'Église devait la remettre à la justice séculière en demandant que sa vie et ses membres fussent épargnés ! Si elle montrait des marques de sincère pénitence, on lui permettrait de recevoir le sacrement de confession qu'on lui avait refusé si longtemps.

Avec la déclaration de l'arrêt, cesse le compte rendu officiel signé par Boisguillaume, Manchon et Taquel. Mais il y a encore un document sur ses dernières confessions, document rédigé le 7 juin et après sa mort, lequel ne contient pas les attestations des records précédents, quoique donné par Cauchon comme officiel et comme faisant partie du compte rendu du procès. Manchon n'était point présent au soi-disant entretien de certains prêtres avec Jeanne dans la prison, au matin du 3o mai, le jour du martyre. Il s'enhardit donc, et bien que Cauchon ait tenté de le forcer de signer le document du 7 juin, il refusa. Aucun greffier ne valida ce compte rendu équivoque.

Cauchon désirait prouver que Jeanne abjura une seconde fois. Une apparence pour établir cette preuve est que de fait elle reçut le sacrement, et la déduction est qu'elle dut donner satisfaction à ces hommes. Le document est informe, mais il fait partie de l'histoire ou, si l'on veut, de la légende de Cauchon. Il fut accepté comme témoignage par Léliis, un des juges qui réhabilitèrent la Pucelle. Il tint comme prouvé que Jeanne, après avoir reçu le sacrement, persista et continua jusqu'à sa mort de soutenir qu'elle avait eu réellement des Visions et avait entendu des Voix. Il est impossible qu'en cela elle ait menti, mais pour ce qui concerne la question de savoir si les esprits étaient bons ou mauvais, dit Léliis, elle laissa cela au jugement des hommes d'Église.

En tenant compte alors de la nature du rapport du 7 juin, qui ne fut signé ni par Manchon, ni par aucun greffier, et en nous rappelant que les témoins étaient de pauvres créatures sous le joug de Cauchon, suivons leurs récits. L'odieux Loiselleur et Maurice, le professeur de théologie, vinrent seuls, de bonne heure, le matin, dans le cachot. Ils demandèrent à la Pucelle de leur dire la vérité sur l'Ange et la couronne. Loiselleur entendit Jeanne dire que c'était elle l'Ange, et qu'elle annonça la couronne à son roi. Tout cela ressort clairement de son propre récit allégorique tel qu'il fut fait aux juges. L'Ange, dit-elle, entra par la porte et salua le roi. Les Anges ne saluent pas ainsi les princes de ce monde (voir appendice C, sur le secret du roi). Il n'y avait point d'autre Ange dans la salle, la couronne était la promesse du couronnement. Quant aux Visions d'une multitude d'Anges, Jeanne déclare qu'ils lui apparaissaient alors : Soient bons, soient mauvais esprits, ils me sont apparus. Maurice ajouta qu'elle entendait ses Voix plus fréquemment à l'heure de complies et aussi le matin au moment où les cloches sonnaient — il n'est pas dit qu'elle eût ses Visions de saints précisément à ces heures-là, et, d'après ce que nous savons, elle entendit les Voix même durant la scène de Saint-Ouen —. Les légions d'Anges lui apparaissaient sous forme de choses fort petites. Maurice lui dit que ces esprits étaient manifestement mauvais, qu'ils lui avaient promis sa libération et qu'elle avait été trompée. Jeanne répondit que c'était vrai, qu'elle avait été trompée. Loiselleur ajouta que tandis que Jeanne était sous l'impression qu'elle avait été trompée, elle posa aux clercs cette question : Les esprits étaient-ils bons ou mauvais ? mais elle n'avait plus confiance en eux. Cela est vague et n'est point attesté par Maurice. Peut-être si elle parla ainsi, sans nier que les esprits aient été bons, elle voulait simplement indiquer qu'elle n'avait plus d'espoir en la délivrance.

 Ladvenu et Toutmouillé, un autre dominicain, entrèrent dans son cachot pour lui communiquer la nouvelle de sa mort prochaine par le feu. Le 7 juin 1431, Toutmouillé corrobora le témoignage déjà donné, mais en 1450, il n'en dit rien. Il s'étendit sur le sentiment d'horreur qu'éprouva Jeanne en apprenant qu'elle allait être brûlée. Elle commença à s'écrier douloureusement et piteusement, se destraire et arracher les cheveux : Hélas ! me traitera-t-on aussi horriblement et cruellement qu'il faille que mon corps net et entier, qui ne fut jamais corrumpu, soit aujourd'hui consumé et réduit en cendres ? Ah ! ah ! j'aimerais mieux être décapitée sept fois que d'être ainsi brulée. Hélas ! si j'eusse été en la prison ecclésiastique à laquelle je m'étais soumise, et que j'eusse été gardée par les gens d'Église, non par mes ennemis et adversaires, il ne me fût pas si misérablement arrivé malheur. Oh ! j'en appelle devant Dieu, le grand juge, des grands torts et ingravances qu'on me fait.

Puis elle se plaignit de la cruauté et des violences de ses geôliers et de ceux qu'on laissait approcher d'elle. Cauchon étant survenu à ce moment, elle lui dit avec une courageuse énergie : Évêque, je meurs par vous... et c'est pourquoi j'en appelle de vous devant Dieu.

Si ce terrible témoignage est exact, Jeanne put au moins jusqu'à la fin proclamer sa virginité sans tache. Toutmouillé atteste (en 1431) que quand il dit qu'elle devait voir que ses Voix l'avaient trompée en lui promettant la délivrance, elle répondit : Vraiment, je vois bien qu'elles m'ont trompée. Il ajoute que ce fut avant l'entrée de Cauchon que, sur cette question, si ses esprits n'étaient point mauvais, elle répondit : Je ne sais point, je m'en remets là-dessus à ma mère l'Église, ou bien : à vous, les gens d'Église. Mais Camus[1], qui entra avec Cauchon, exagère intentionnellement, surenchérissant sur Toutmouillé, qui, nous le constatons, fit de son mieux pour se rappeler ses paroles exactes. Camus dit que Jeanne maintint qu'elle avait eu des visions et qu'elle avait entendu des Voix ; mais comme elle n'avait pas été délivrée, elle croyait que ce n'était point Voix ni choses bonnes. Comme l'écrit Lowell, la préoccupation de Camus de plaire à Cauchon, le conduisit évidemment à l'exagération sinon au mensonge absolu. Camus fait aussi dire à Jeanne, quand Ladvenu lui administra la communion, que le Christ seul pourrait la délivrer ; et quand ce religieux lui posa encore cette question si elle croyait en ses Voix : Je crois en Dieu seul, et non en mes Voix qui m'ont trompée. Ladvenu lui-même, le 7 juin, dit à peu près la même chose, mais sans rapporter ses paroles au moment où elle reçut le sacrement. Il lui fait exprimer cette opinion que les esprits étaient mauvais et qu'elle s'en remettait à la croyance des gens qui l'entouraient. Ce sont eux qui le disent. Évidemment, si elle ne s'était mise d'accord avec eux dans des termes de ce genre, ils ne lui auraient pas accordé le sacrement. Mais si l'on doit croire le dernier témoignage de Ladvenu, au bûcher, elle revint à la foi en ses saints et la proclama à haute voix.

Le 7 juin, Thomas Courcelles donna un témoignage très bref et circonspect. Il dit que Cauchon demanda à Jeanne si ses Voix ne lui avaient pas promis la délivrance. Elle répondit : Oui, en ajoutant, à ce qu'il me semble : Je vois bien que j'ai été trompée. Alors, continue Courcelles, l'évêque fit remarquer à Jeanne qu'elle devait s'apercevoir que ses Voix étaient mauvaises et revenaient point de Dieu. Mais là Courcelles s'arrête, il ne parle pas de l'acquiescement de la Pucelle à ces paroles. Cette précaution de Courcelles est à noter ; il ne relevait d'aucune façon de Cauchon et son témoignage est de beaucoup le moins favorable à ce prélat. Loiselleur dit qu'elle abandonna aux clercs la question de la bonté ou de la méchanceté de ses Voix et de ses Visions ; elle affirma leur réalité, mais n'avait plus confiance en elles. Il ajoute encore qu'elle devait faire cette confession de façon publique au bûcher et demander pardon au peuple de l'avoir trompé. Jeanne aurait répliqué qu'elle ferait ainsi et demandé à son confesseur de le lui rappeler. Aucun témoin ne rapporte cet aveu ni la prière faite sur le bûcher pour demander pardon d'avoir trompé qui que ce fût.

Quicherat écrit, probablement avec raison, que le document du 7 juin n'est point d'un bout à l'autre simple fausseté. Courcelles qui rédigea le Procès y est cité, et il n'y aurait point laissé figurer sa déposition s'il ne l'avait pas faite. En face de la mort, la pauvre fille soutint plus fermement que jamais le fait de ses apparitions ; mais humiliée devant ses juges par l'espoir d'obtenir d'eux la communion, obsédée de leurs raisonnements, ne sachant elle-même comment accorder un espoir de délivrance où l'avaient entretenue ses Voix avec la nécessité de mourir qui se dressait inévitablement devant elle, elle admit un moment que son sublime instinct avait pu la tromper. Naturellement Jeanne ne dit et ne pensa rien au sujet de son sublime instinct.

A mon avis, elle avait méconnu le sens des paroles de ses Voix. Prends tout en gré, c'est ainsi que tu t'en viendras au royaume de paradis. Sa personnalité n'était pas toujours à la hauteur de ses mystérieux avertissements. Pendant un instant cette personnalité, qui ne comprenait point et se trouvait cruellement désappointée de ne pas être délivrée, fut prise d'hésitation... Jusqu'à quel degré ? le témoignage de Courcelles nous laisse dans l'incertitude à ce sujet. Il ne pouvait soutenir que Jeanne avait avoué que les Voix étaient mauvaises, et la noblesse de la nature de la Pucelle resplendit encore quand dans ce moment où sa foi est éprouvée, elle met toute sa confiance dans le divin Maitre dont elle était la loyale servante.

Toutefois il est impossible, comme le fait remarquer Quicherat, de comprendre pourquoi — le document du 7 juin étant censé contenir le dernier interrogatoire officiel, celui du 30 mai — ce compte rendu d'une importance capitale pour l'accusation, n'avait pas été rédigé de suite et inséré dans le Procès le jour même de l'événement. Pourquoi l'huissier Manchon fut-il sommé de donner sa signature pour l'attestation de faits dont il n'avait pas été témoin ?

Ce document n'est pas digne d'être présenté à un jury et toute la conduite de l'affaire est suspecte. C'est pour Quicherat un problème insoluble. Néanmoins cette pièce, le point le plus faible pour ceux qui poursuivaient le procès, ne fut point l'objet de commentaires à la réhabilitation de 1450-1456. On ne posa aucune question sur la scène de la matinée du 30 mai, quoique Léliis ait eu en mains ce compte rendu. Peut-être son irrégularité fut-elle une raison suffisante pour n'en point tenir compte, car Manchon avait expliqué pourquoi il avait refusé de signer un interrogatoire conduit par certaines personnes à titre privé. Le document n'est certes pas de nature à compromettre la canonisation de la Pucelle, si pour d'autres raisons l'on fait aux saints l'honneur d'inscrire sur leur livre d'or son nom pur et glorieux.

 

 

 



[1] Ou Le Camus.