HISTOIRE POLITIQUE DES PAPES

 

CHAPITRE XVII. — LA RÉFORME ET LE CATHOLICISME ESPAGNOL. - LÉON X. - PAUL III. - SAINT PIE V. - SIXTE-QUINT.

 

 

Pendant cette longue et exclusive concentration de la papauté sur des intérêts tout politiques, la direction du monde des intelligences lui avait échappé sans retour. La grande scission annoncée de loin par les Albigeois, par les Lollards, par les Hussites s'accomplissait enfin, et l'Empire spirituel voyait se reproduire le même déchirement qui avait autrefois divisé l'unité romaine.

Cette révolution prit les papes au dépourvu, les trouva absorbés par leurs querelles, leurs intrigues et leurs plaisirs, inattentifs aux avertissements multipliés, aux symptômes effrayants qui précédèrent l'orage.

Depuis longtemps déjà ils avaient cessé, je ne dis pas de présider, mais même de participer au mouvement de la vie intellectuelle et morale des peuples européens, et ceux-ci avaient de même appris à se passer d'eux. Le mécanisme hiérarchique et administratif qui avait survécu à leur intervention, autrefois si active, dans toutes les affaires qui intéressaient la chrétienté, loin d'inspirer des regrets ou de suppléer à leur abstention actuelle, n'était propre qu'à faire exécrer le souvenir de leur domination.

Les vieilles illusions tombèrent. On refusa de voir le représentant de la civilisation chrétienne dans ce petit tyran italien pour qui la suprématie n'était plus qu'un moyen de battre monnaie au profit de ses bâtards, de ses maitresses ou de ses neveux. Dans ce retour universel vers l'antiquité qui signala la Renaissance, des curieux, des artistes en archéologie morale firent une découverte dont l'évidence frappa aussitôt les plus ignorants : dans la Rome catholique ils reconnurent, trait pour trait, la Rome païenne. Rien n'y manquait, ni le brutal absolutisme, ni les monstrueuses fantaisies des Césars en délire, ni le génie avili, ni les augures sceptiques qui maintenaient l'autel en insultant le Dieu, pour conserver au monde ses idoles.

Rome était revenue à son point de départ, le paganisme, à travers le cercle immense des institutions chrétiennes dont elle avait comme épuisé le développement. Dogmes, cérémonies, hiérarchie, tout avait été matérialisé, faussé, amoindri, retourné au nom de la lettre contre l'esprit, au nom de la force contre la liberté. L'Eglise se trouva ainsi inférieure à la civilisation, qu'elle avait jusque-là conduite, et qui manifesta hautement la volonté de marcher sans elle. Les idées religieuses, que Rame avait trahies pour l'athéisme de la Renaissance, réclamèrent la même émancipation. Mais si la foi y était morte, elle devint la capitale de l'art, grâce à l'inspiration qui fit revivre en elle toutes les merveilles du génie grec.

Par un retour analogue du sentiment religieux, les nations du Nord retrouvèrent dans les monuments du christianisme primitif, qu'elles étudièrent avec une égale ardeur, l'expression de leurs propres tendances morales. Elles mêlèrent à cette interprétation un esprit de liberté, d'indépendance individuelle et d'activité qui fil de la réforme une ère de transformation politique aussi bien que de rénovation religieuse.

Chose significative : ce n'est pas au moment où l'unité romaine avait été le plus oppressive que la révolte se produisit, ce fut celui où elle parut déshonorée. Ils lui avaient pardonné d'être atroce et sanguinaire ; ils ne lui pardonnèrent pas d'être devenue méprisable.

Lorsque Luther porta ses premiers coups à la centralisation catholique, Léon X, l'héritier de Jules II, était fort embarrassé du règlement de cette succession embrouillée. Il y avait trouvé beaucoup plus de beaux projets que de ressources pour les mettre à exécution. Loin d'être bannis de la Péninsule, les étrangers y étaient plus nombreux et plus puissants que jamais ; et leur présence, non plus partielle, mais simultanée, devenait maintenant nécessaire à la sécurité du Saint-Siège, parce que les uns se retirant, tout l'équilibre était rompu en faveur des autres, et l'Italie se trouvait à leur merci, retombait sous une seule domination. Sans les Français elle était espagnole ; sans les Espagnols elle était française. Voilà ce que Jules II lui-même eût été forcé de reconnaître si la mort n'était venue à propos le soustraire aux conséquences des faux calculs dont il léguait l'expiation à son successeur.

Celui-ci, souple et facile génie, spirituel et voluptueux comme un Athénien du siècle de Périclès, sceptique en religion comme son ami Bembo, l'adorateur de Cicéron et de Platon, indifférent au train du monde pourvu qu'il eût la paix chez lui, dilettante passionné, accompli, digne du chœur incomparable de grands artistes que la fortune lui offrit à conduire, n'eut, en politique, d'autre principe que de plier pour ne pas rompre, d'obéir docilement à l'impulsion la plus forte.

D'abord attaché aux alliances que lui avait léguées Jules il, Léon X apprend un matin le hardi coup de main de François Ier à Marignan : Monsieur l'ambassadeur, dit-il aussitôt à l'envoyé vénitien, il faut nous jeter dans les bras du roi, et il le fait comme il l'avait dit. Mais, en vrai Médicis qu'il était, il trouva moyen de lui arracher, dans l'expansion de cet embrassement, la plus grande partie des immunités de l'Église gallicane, non par esprit d'oppression, car il était d'humeur tolérante et pacifique, mais par pur amour de l'argent, dont il avait toujours besoin pour ses architectes, ses sculpteurs et ses peintres. Le concordat signé à Bologne n'eut, en effet, pas d'autre objet. Léon X tenait si peu à la domination, qu'il laissa au roi toutes ces prérogatives spirituelles, qui avaient suscité tant de célèbres contestations entre les gouvernements et la cour de Rome, et ne s'attribua que celles qui pouvaient être lucratives, comme les annates.

Mais, si reconnaissant qu'il pût être envers François Ier, comment rester son allié en présence de la prépondérance écrasante que prit tout à, coup l'Espagne par sa réunion à l'empire d'Allemagne en la personne de Charles-Quint ? Ce serait méconnaître Léon X que de le supposer capable de résister à de telles considérations. Il se tourna donc du côté de l'Espagne. Cependant., si naturelle que dût lui paraître cette nouvelle évolution, il ne s'y résigna pas sans répugnance. Il était trop évident que devant un tel accroissement de puissance tout contrepoids dis paraissait, et que l'Italie, comme l'Église elle-même, allait n'avoir plus qu'un seul maître. L'extension menaçante que prenait le protestantisme en Allemagne le décida tout à fait. Par le traité de Worms il livra l'Italie à Charles-Quint, et celui-ci prit l'engagement d'exterminer la réforme.

Jusqu'à cette époque, nous l'avons vu, c'est pour fonder, agrandir ou fortifier leur pouvoir temporel sous toutes ses formes successives que les papes avaient condamné l'Italie à une perpétuelle invasion. En cette circonstance, ils la sacrifièrent pour sauver leur autorité spirituelle, menacée par le protestantisme. Quels que fussent leurs embarras ou leurs dangers, c'était toujours elle qui leur servait de rançon.

Au reste, malgré les appréhensions qui le poussèrent vers Charles-Quint, Léon X était encore bien loin de se faire une juste idée du péril que courait l'Église. Non-seulement l'Allemagne, mais l'Angleterre, les Pays-Bas, tous les États du Nord se détachaient d'elle, et la France elle-même, obéissant aux instincts de son génie tempéré, se tenait dans un juste milieu qui n'avait rien de rassurant. Son roi François P. envisageait la question au point de vue politique, ce qui n'était pas moins inquiétant, et il hésitait encore entre la réforme et l'orthodoxie.

Rome n'avait à opposer à ce débordement terrible, qui menaçait de la submerger pour jamais, que les intrigues et la vénalité de quelques prêtres athées. A cette heure de détresse, le secours lui arriva du pays qui venait de lui offrir l'épée de Charles-Quint.

La foi catholique s'était conservée plus pure et plus ardente en Espagne que dans tout autre pays de l'Europe. grâce à sept siècles d'une lutte incessante contre la conquête musulmane. L'esprit religieux s'y était empreint du fanatisme, de l'inflexibilité, de la sombre exaltation de ces guerres d'extermination. C'est dans ce pays que la logique de la défense et de la conservation transporta le véritable centre du catholicisme au seizième siècle, et c'est de là que partit le triple effort politique, militaire et religieux contre lequel échoua plus d'une fois la réforme. En même temps que Charles-Quint jetait ses armées sur ta ligue des princes protestants, Ignace de Loyola réalisait la conquête espagnole dans l'ordre religieux, en organisant ses légions de guerriers missionnaires.

Un tel changement ne s'accomplit ni en un jour ni sans résistance. Cette réforme, plus catholique que le pape, ne pouvait réussir qu'à la condition de se présenter en amie et d'employer des ménagements infinis. Charles, après avoir pris possession de son royaume de Naples et s'y être établi solidement, ne songea d'abord qu'aux intérêts de sa domination politique. A mesure qu'il la vit raffermie. il resserra l'espèce de blocus invisible qu'il avait iris autour des États de l'Église. Il considérait Rome, avec raison, comme la clef de l'Italie. Il parla en sauveur, imposa ses services lorsqu'on refusait de les accepter, et mit si bien à profit son influence sous le pontificat de son précepteur Adrien VI, qu'il s'habitua à agir comme s'il eût été le pape lui-même. Cette usurpation mal déguisée donna lieu à une réaction qui trouva quelque appui dans le sentiment national expirant dont il avait blessé les dernières susceptibilités. Elle éclata sous le pape Clément VII, de la maison de Médicis. Malheureusement les Italiens ne se décidèrent à agir que lorsque la ruine complète du parti français à Pavie eut brisé dans leurs mains l'arme la plus sûre qu'ils pussent opposer à leur adversaire (1525).

Venise et Sforza s'unirent à la France désormais impuissante. Clément VII, l'Angleterre elle-même, lui fournirent quelque secours. On essaya de corrompre Pescaire, le général de l'empereur. Pescaire accepta leurs avances, promit tout ce qu'on voulut, et dénonça la ligue à son maitre. Cette tentative tardive, qui méritait à la fois de meilleurs champions et une meilleure issue, n'aboutit qu'au sac de Rome, à l'humiliation de l'Italie, à la consolidation de l'influence espagnole. Le pontife vaincu proclama lui-même sa défaite, accepta sa honte en mettant la couronne impériale sur le front de son vainqueur. Il acheta par cette complaisance le rétablissement de la famille Médicis à Florence. Mais ce renouvellement dérisoire du pacte Je Charlemagne ne lui rendit aucun des droits antiques de la papauté sur l'Empire. Le couronnement n'était plus, comme autrefois, une sorte d'association à la puissance impériale, et le signe d'une double prééminence, mais une cérémonie vide de sens et un acte de servilité.

Clément V II n'était plus que le premier dignitaire ecclésiastique de l'Empire. Charles-Quint organisa sans lui sa conquête. Telle était la confiance que lui inspirait l'abaissement de l'Italie, qu'il la garda presque sans autres garnisons et sans autres subsides que ceux qu'elle lui fournit. Ainsi, tout ce que les papes avaient tenté pour sauver leur pouvoir spirituel avait amené la ruine complète de leur indépendance politique ; ils se trouvaient maintenant à la merci de leur sauveur, et son amitié leur paraissait plus pesante que la haine de leurs ennemis. C'est à ce moment, en effet, que Charles-Quint commença à aspirer ouvertement à la domination spirituelle. Sous prétexte de mettre fin aux discordes qui déchiraient le sein de l'Église, il pressait incessamment le pape de donner son consentement à la convocation d'un concile universel. Mais cet excès de zèle n'était motivé que par la certitude qu'il avait d'y jouer le principal rôle et d'y acquérir une prépondérance illimitée, par son pouvoir, par le discrédit où étaient tombés les papes, par l'esprit anti-romain de ces grandes assemblées, par son innombrable clientèle cléricale.

Ses exigences prenant un caractère de plus en plus impérieux amenèrent bientôt un nouveau revirement dans la politique de Clément VII. Le monde eut alors le singulier spectacle d'un empereur plaidant la cause du catholicisme et de l'orthodoxie contre un pape forcé de faire des vœux en faveur des insurrections hérétiques de l'Allemagne. Les intérêts de l'Église se trouvaient déjà identifiés avec ceux du souverain austro-espagnol, car il est incontestable qu'ils réclamaient hautement le remède proposé par lui. Il est vrai que l'état du malade était si alarmant qu'il était permis de douter s'il serait encore assez fort pour le supporter. Mais ce n'étaient point des scrupules de ce genre qui retenaient Clément ; il n'avait en cela qu'une préoccupation toute personnelle. La papauté était en effet battue par l'Espagne sur le terrain même de l'orthodoxie. Elle ne vit avec raison, dans les sommations de Charles-Quint au sujet du concile, que l'ambition de la supplanter dans la direction de l'Église.

Clément revint donc à François Ier, lui donna sa nièce Catherine de Médicis en mariage pour un de ses fils, présent qui devait coûter cher à la France, et, par cette alliance, devint sciemment, ostensiblement le soutien des protestants d'Allemagne, dont François Ier était alors le principal appui. Il lui fut moins facile de se réconcilier avec son ancien allié le roi d'Angleterre. Il se l'était à jamais aliéné en le sacrifiant aux ressentiments de Charles-Quint. Henri VIII, marié à Catherine d'Aragon, la tante de l'empereur, l'avait répudiée pour épouser Anne de Boleyn, et Clément lui avait longtemps fait espérer la légalisation d'un divorce déjà consommé de fait. Il avait même rédigé l'acte, lorsque Charles-Quint lui imposa, avec sa despotique amitié, l'obligation de prononcer le mariage indissoluble. Henri passa outre, épousa sa maitresse, et telle était la faiblesse des liens qui rattachaient l'Angleterre à l'unité catholique, que cette fantaisie luxurieuse suffit pour les briser. Clément VII mourut peu après ce dernier échec.

Paul III, des Farnèse, hérita de ces complications, les plus dangereuses peut-être que l'Eglise eût jusque-là traversées. On s'explique donc sans peine les perplexités et les tergiversations sans fin de ce pontife temporisateur, qui passa une grande partie de son règne à demander aux astres des conseils et une résolution qu'il ne trouvait ni autour de lui ni en lui-même. Italien comme son prédécesseur, il eût voulu conserver à tout prix à sa patrie la direction des intérêts religieux. Mais après avoir longtemps louvoyé entre des impulsions contraires, il fallut céder devant l'implacable nécessité. L'influence espagnole triompha et lui imposa toutes ses volontés. Il sanctionna la convocation du concile qu'elle demandait depuis près de quinze ans par la bouche de Charles-Quint, et qui fut le concile de Trente ; il donna son approbation à l'ordre des Jésuites, alors presque tout espagnol, et qui se propagea avec une rapidité inouïe ; il réorganisa l'Inquisition, qui était tombée en désuétude dans toute l'Europe, excepté en Espagne, où elle était devenue une institution nationale. Tant qu'il avait suivi ses propres inspirations, Paul III, dont l'esprit était souple et conciliant, s'était montré plus d'une fois disposé à transiger avec les réformés. On l'avait même vu, dans les négociations qui s'ouvrirent à ce sujet, résigné à faire plus de pas de leur côté qu'eux du sien, pour acheter, à force d'esprit de conciliation, une pacification définitive.

La politique qui prévalut avec les Espagnols se montra âpre, inflexible, atroce, procédant contre les fils séparés de l'Église avec l'impitoyable rigueur qu'elle avait déployée contre les Maures en Espagne, contre les Indiens en Amérique. Le catholicisme italien avait conservé jusque dans ses plus mauvais jours quelque chose de l'esprit libéral, indulgent, facile, de cette terre aimée du ciel ; il avait reçu l'empreinte des libres traditions de l'Italie, de sa littérature, de son art si profondément humain. Le système était tempéré par l'homme, corrigé par des vices heureux comme dans Léon X. On sentait dans ses héros ces pensées de derrière la tête qui font qu'on juge son œuvre, qu'on en est le maitre et non l'esclave, qu'on ne reste pas un pur instrument insensible et machinal, qu'on déroge à l'infaillibilité officielle de certains rôles par des inconséquences qui en réparent l'iniquité. Le catholicisme espagnol montra le zèle étroit, la dureté, l'ardeur concentrée, la sécheresse, le sombre génie de cette race sans grâce et sans tendresse pour qui le moyen âge n'avait été qu'un long enfer. Le jésuitisme, qui devait plus tard inventer la doctrine des accommodements, le probabilisme et tous les artifices de la dévotion aisée, était loin à son début de posséder la souplesse et les formes changeantes que de nouveaux éléments et d'autres nécessités lui donnèrent par la suite. C'était avant tout une discipline d'une unité merveilleuse, faite pour le combat et empruntée aux champs de bataille, un instrument de concentration qui faisait des volontés un seul faisceau et mettait toute une armée dans la main de son chef comme jamais on ne le vit ni avant ni après, un ascétisme méthodique emprisonné dans les formules comme dans des armures.

Son fondateur était un esprit sans étendue, visionnaire, fantasque, ignorant, enthousiaste, mais il eut une intuition de génie et s'y attacha avec une invincible opiniâtreté. Il comprit qu'en présence du libre examen, tout était perdu si on voulait argumenter, subtiliser, comme essayaient de le faire les diplomates du sacré collège. Il ne s'agissait pas de raisonner avec un tel logicien, niais de combattre, d'obéir les yeux fermés au mot d'ordre quel qu'il fût, d'accepter et d'imposer cette loi suprême de tous les grands périls. Tel fut d'abord l'esprit de son institution qui montra réunis l'ardeur belliqueuse des Templiers, le mysticisme et la propagande enflammée des Franciscains, le calcul et le zèle orthodoxe des Dominicains, et, avec ces qualités, une discipline que ni les uns ni les autres n'avaient jamais possédée.

Le triomphe de l'influence espagnole au sein de l'Église eut pour effet de rendre toute réconciliation impossible entre la réforme et le principe catholique. Le développement intellectuel issu de la Renaissance, un peu artificiel, mais modéré et impartial, qui eût pu servir de médiateur, jouer le rôle que les politiques adoptèrent en France, se trouva pris et broyé entre les deux partis extrêmes. Il avait plus d'adhérents en Italie que partout ailleurs, grâce à l'initiation déjà ancienne qu'elle avait reçue de la littérature, de la politique et de l'histoire. L'Inquisition s'abattit sur ces pacifiques conspirateurs, dispersa leurs réunions, brûla pêle-mêle les œuvres et les auteurs. Los académies furent fermées, les prisons remplies, les savants et les philosophes envoyés au bûcher, les poètes mis à la question. La censure fut combinée avec l'index pour protéger la foi contre la liberté, les arts furent surveillés, admonestés, corrigés comme suspects de paganisme. Que de théories n'a-t-on pas faites pour expliquer leur décadence prématurée après Michel-Ange et Raphaël ? Qu'on lise l'histoire de ce vandalisme religieux, et les causes de cette décadence n'auront plus rien d'obscur. La persécution atteignit jusqu'aux Franciscains eux-mêmes, qui étaient encore attachés secrètement aux rêveries de Jean de Parme. Ils n'échappèrent que par une rétractation formelle au fanatisme de Caraffa et de Burgos, les deux chefs de l'Inquisition. L'Italie, malgré son abaissement politique, avait conservé sa suprématie dans les choses de l'intelligence, par l'éclat prodigieux de ses artistes et de ses écrivains. L'Inquisition lui ravit cette consolation du malheur.

Le concile de Trente émanait de la même inspiration qui avait ressuscité l'Inquisition et créé l'ordre des Jésuites. Il repoussa donc toutes les transactions et maintint inflexiblement le grand principe de l'unité catholique. Bien qu'il fût placé sous la main de Charles-Quint, il ne pouvait que contribuer à relever l'autorité spirituelle de Rome. L'empereur n'avait jamais songé à déplacer le centre du catholicisme, ni à changer l'institution qui lui servait de clef de voûte, mais seulement à s'emparer de ceux qui la dirigeaient. Aussi Paul III fut-il fort insensible à l'accroissement de ses prérogatives apostoliques, tout préoccupé qu'il était de sa situation politique. Il subissait avec une mortelle répugnance l'effacement de ce rôle subordonné. Il résolut de profiter de la première occasion qui s'offrirait à lui pour s'en affranchir. Au moment où Charles était le plus sérieusement engagé avec les armées de la ligue protestante, le pape lui retira tout à coup ses troupes qui gardaient des positions importantes, et en même temps il transporta par décret les séances du concile de Trente à Bologne, afin d'y faire prévaloir plus aisément l'élément italien.

Cette défection perfide, mais jusqu'à un certain point légitimée par les procédés dont on avait usé envers lui, ne fut malheureusement soutenue que par d'impuissantes intrigues, et ne lui attira que des humiliations. C'était ou jamais le cas d'agir avec énergie et décision : il recommença à temporiser, hésita entre plusieurs déterminations, pour n'en choisir aucune. Privé de son fils, à qui il avait constitué Parme et Plaisance en principauté, selon l'usage mis à la mode par les derniers pontifes, trahi par ses neveux, dont l'établissement lui avait coûté beaucoup de labeurs, le vieux Farnèse s'abandonna lui-même, et mourut dans un accès de découragement (1549).

Le règne de Jules III ne fut qu'une longue villégiature, pendant laquelle il laissa l'empereur et le roi de France se disputer l'Italie, comme si cette question ne le regardait pas. Celui de Marcel ne fut qu'une apparition de quelques jours. Le choix <lu conclave amena au pontificat un homme qui était l'ennemi le plus décidé de l'influence espagnole, et qui passa presque toute sa vie à la servir malgré lui, Paul IV.

C'était ce même Caraffa qui avait été l'âme damnée de la nouvelle inquisition, et dirigé avec lainez et Salmeron la réaction du concile de Trente. Caractère hautain et colérique, son orgueil de prêtre et d'Italien se révolta contre la dépendance humiliante qui lui était imposée. Profitant de l'abdication de Charles-Quint qui séparait de nouveau l'Espagne de l'Empire et remettait tout en question, il fil le serment de chasser les Espagnols de la Péninsule, invoqua contre eux le ciel et la terre, frappa Philippe II de l'anathème, confisqua les biens de ses partisans, offrit Naples au duc de Guise, rappela les Français et soutint la guerre avec les troupes qu'ils lui envoyèrent, les bandes suisses et quelques chefs de lansquenets luthériens, contre les armées du très catholique duc d'Albe. Dans son emportement patriotique il alla jusqu'à demander des secours à Soliman Ier.

Le sort de la guerre fut décidé non en Italie, mais en France, par la bataille de Saint-Quentin. Ce fait prouve suffisamment combien les Italiens étaient restés en dehors d'un débat qui intéressait si directement l'avenir de leur patrie.

Caraffa, renversé par ce coup de foudre, dut se soumettre en frémissant de colère. Il se fit en lui une de ces révolutions soudaines qui sont familières aux caractères extrêmes et violents. Il s'affaissa comme si un ressort eût été brisé en lui, courba la tête, avala sa honte, devint un autre homme. A dater de ce jour, le politique disparut, l'inquisiteur seul resta. il rompit avec son passé, ne fit plus une seule tentative en faveur de la cause qu'il avait embrassée, et disgracia ses neveux, qui avaient été ses coopérateurs. Tout ce qui lui restait d'ardeur et d'activité fut employé à veiller sur le dogme et à brûler des hérétiques. Il perfectionna la congrégation inquisitoriale dont il ne manqua plus une séance, et couronna sa vie en instituant une fête en l'honneur de saint Dominique, le convertisseur des Albigeois.

Il ne fut pas plus heureux comme diplomate que comme guerrier. Il montra spécialement dans ses rapports avec l'Angleterre le même esprit de modération qui avait dicté toute sa conduite. Élisabeth hésita un instant entre la réforme et le catholicisme à l'époque où elle faillit donner sa main à Philippe II. Des négociations s'ouvrirent à ce sujet. Un ambassadeur anglais vint exposer à Caraffa les vœux secrets de sa souveraine. Caraffa lui répondit que cette bâtarde devait, avant toute chose, se démettre de la couronne et lui laisser le soin de disposer comme il l'entendrait d'un royaume qui était un fief du Saint-Siège. Élisabeth n'hésita plus et devint une protestante fervente.

Ainsi, depuis le commenceraient du seizième siècle, les papes s'étaient tour à tour proposé trois buts : celui de relever le pouvoir temporel du Saint-Siège, celui d'affranchir l'Italie, et celui d'étouffer la réforme. Et lorsque Paul IV mourut, en 1559, ils avaient consacré leur propre dépendance, aggravé l'asservissement de l'Italie par la double consolidation de l'Autriche à Milan et de l'Espagne à Naples, et assuré le triomphe de la réforme en divisant les forces de l'Empire toutes les fois qu'il avait été à la veille de l'écraser.

Le pontificat de Pie IV n'eut de remarquable que la conclusion du concile de Trente qui durait depuis dix-huit ans. Il exprimait assez, par ces interminables délibérations, auxquelles se mêlèrent des débats tumultueux et quelquefois des rixes, l'incertitude et la perplexité des chefs de l'Église en présence des dangers qui la menaçaient.

La prépondérance épiscopale, soutenue par les Espagnols en haine de la centralisation romaine, qu'ils eussent volontiers transportée à Madrid si une telle substitution eût été possible, fut à la veille d'y triompher sous la forme d'un hommage rendu aux principes de la primitive Église. Les Allemands et les Français furent, de leur côté, sur le point d'emporter d'assaut le mariage des prêtres. Mais le célibat resta vainqueur, et la suprématie des papes sortit de la lutte plus forte qu'elle ne l'avait jamais été au point de vue spirituel. L'un et l'autre furent sauvés par l'évidence du péril. On sentit la nécessité de donner à la discipline de l'Église toute la force qu'elle était susceptible de recevoir. La hiérarchie fut soumise à des règles plus étroites et plus sévères que jamais ; elle fut entièrement soustraite à la juridiction laïque et concentrée dans la main du chef de l'Église. Loin d'obtenir l'émancipation qu'ils réclamaient, les évêques perdirent le peu d'indépendance qui leur restait ; et les papes, loin de céder aucune parcelle de leur autorité, se firent attribuer par le concile le droit exclusif d'interpréter ses décisions, faculté qui les constitua en juges souverains de la foi, et donna lieu au dogme monstrueux de l'infaillibilité des papes.

Le résultat de cette sorte de coup d'État, de dictature improvisée, fut d'entraîner irrévocablement la papauté dans les voies de la réaction à outrance qu'elle avait jusque-là entravée plutôt que favorisée, parce qu'elle la voyait dirigée par une autre main que la sienne, exploitée contre elle, et qu'elle impliquait momentanément un sacrifice presque complet de la domination temporelle. Le catholicisme, partout vaincu par l'élan des réformés, retrouva des forces nouvelles dans ce suprême effort de contraction, et reprit peu à peu l'offensive. Telle fut la vigueur que lui rendit cette rude discipline que, dans la mêlée qui suivit, le protestantisme ne dut lui-même son salut qu'à un mouvement de concentration analogue dont le calvinisme fut l'instrument et l'expression. Cette doctrine désespérée, qui eut pour dogme le fatalisme, pour moyen la démocratie, pour but la dictature, apporta à la réforme l'organisation militaire, l'épée sans laquelle elle périssait.

Le monde catholique ne cessa pourtant pas encore d'avoir une seconde capitale dans Madrid ; mais Philippe II dut renoncer, non sans regret, à être pape et se résigner à son rôle de bras séculier. Bien que ses dissentiments avec la cour de Rome fussent encore fréquents, on les fit taire de part et d'autre pour obtenir l'unité d'action que réclamait la gravité des circonstances.

Les cardinaux avaient élu un saint, saint Pie V. Il avait été moine dominicain et grand inquisiteur. Il montra ce que c'est que la sainteté armée du pouvoir absolu. Il continua à observer ponctuellement sur le trône toutes les abstinences de la vie de couvent. Il pria, jeûna, se donna la discipline, s'habilla d'étoffes grossières. Jusque-là rien de mieux. Mais il mêla à ces perfections des vertus qui firent regretter les vices des Borgia. Il fit percer la langue aux blasphémateurs. Il réforma le tribunal de l'Inquisition qui lui paraissait trop mou, lui donna des statuts tranchants comme la hache, lui fournit une foule de littérateurs et de philosophes inoffensifs à brûler vifs, entre autres l'immortel et infortuné Jordan Bruno. Il poussa sur les Pays-Bas révoltés les bandes féroces du duc d'Albe et de Philippe Il qui hésitait entre les voies de la rigueur et celles de la conciliation ; il excommunia la reine Élisabeth, et osa nourrir la folle espérance de conduire une armée de débarquement en Angleterre ; enfin, il décida, par les plus pressantes sollicitations et par des subsides pécuniaires, Catherine de Médicis à déclarer la guerre aux réformés français, lui envoya un corps de troupes auxiliaires, après avoir donné pour instruction au comte de Santafiore, qui les commandait, de ne faire aucun quartier aux huguenots et de tuer tous les prisonniers sur place. Mais saint Pie V n'eut pas la consolation de voir la Saint-Barthélemy qu'il avait préparée depuis le début de son pontificat et qu'il appelait de tous ses vœux. Il mourut la veille de ce grand auto-da-fé, semblable à ce prophète qui expira en présence de la terre promise, mais sans être assez heureux pour y pénétrer.

Cette joie fut accordée à son successeur Grégoire XIII. Il reçut la nouvelle du massacre avec des transports d'allégresse, fit tirer le canon, chanter des Te Deum, et peindre un tableau commémoratif de ce glorieux événement. Mais il se laissa bientôt distraire de sa tâche par des soins profanes, comme la réforme du calendrier, et ne fut qu'un pâle continuateur de saint Pie V, que Sixte-Quint remplaça plus dignement (1584).

Le règne de Sixte-Quint marque tout à la fois l'apogée de l'influence espagnole et l'instant où elle commença à décliner. Il y avait dans cette étrange individualité, où manquait la grandeur, mais non la force, des instincts d'orgueil et de patriotisme qui grondaient sourdement contre l'autocratie de Philippe II. Il le détestait, mais il le subit ; ne fallait-il pas à tout prix conserver à l'Église l'épée de cet exterminateur de l'hérésie ? C'est ainsi qu'il admirait personnellement le grand caractère d'Élisabeth et rendait justice à la supériorité de Henri IV, tout en lançant contre l'une l'invincible Armada, et en soudoyant contre l'autre la démocratie de la ligue. C'est ainsi encore qu'il abhorrait la compagnie de Jésus et qu'il recula toujours au moment de la frapper et même lui accorda des privilèges.

Sixte-Quint est cependant le dernier pape qui, par l'énergie de son caractère, l'audace et l'âpreté de son ambition, l'activité de sa politique entreprenante, rappelle les pontifes du moyen âge. Mais son esprit sans mesure et sans pénétration, plus brouillon que sagace, lui fit illusion sur les limites du possible. Les succès de la réaction catholique en Allemagne et en France l'enivrèrent au point qu'il crut à la possibilité d'une restauration de la monarchie théocratique, annonça hautement l'intention de relever cette puissance supérieure à tous les rois de la terre, instituée pour précipiter du trône les princes infidèles et les pousser dans l'abîme avec les ministres de Satan, et il se prit à penser avec complaisance que lui, l'ancien gardeur de pourceaux, il serait le héros d'une telle révolution.

Pour en venir plus facilement à bout, il commença par écraser ses sujets d'impôts nouveaux qui avaient échappé à la fiscalité déjà si perfectionnée des temps antérieurs, et entassa des millions d'écus d'or dans les caves du Vatican. En attendant qu'il réalisât la domination universelle, Baronius en écrivit l'histoire, et Bellarmin la théorie, presque aussi oubliée que la pratique. Sous l'inspiration de Bellarmin, les prêtres démagogues de la ligue, Panigarole, Boucher Feuardent, la propagèrent au sein des masses populaires qui avaient fait la Saint-Barthélemy. C'était toujours ce même système, cher 9. l'ignorance démocratique, d'une souveraineté revendiquée au nom du peuple contre les rois, mais au profit d'un pouvoir mille fois plus tyrannique que ne l'était l'autorité royale.

A cette grande ambition Sixte-Quint joignait d'autres vues encore plus chimériques et plus impraticables. Il pensait à chasser les Turcs de Constantinople avec l'appui de la Perse, à conquérir l'Égypte, à percer l'isthme de Suez, projet alors un peu prématuré et surtout hors de saison, car, pendant qu'il se livrait à ces beaux rêves, les bravi, débris du régime des condottieri tombé en poussière, ravageaient sous ses yeux la campagne romaine, comme s'ils n'avaient gardé aucun souvenir des épouvantables exécutions par lesquelles il les avait d'abord comprimée.

On connaît le résultat de sa politique cruelle et maladroite dans les Pays-Bas, qui furent perdus pour l'Espagne et pour l'Église. Elle eut moins de succès encore en Angleterre. On se demande, en examinant sa conduite dans cette circonstance, si ce bizarre esprit ne cédait pas à une humeur fantasque, impérieuse et violente, plutôt qu'à une volonté raisonnée. Après avoir échangé une excommunication avec l'amazone britannique qui lui rendit coup pour coup son anathème, après avoir donné ses Étals à Philippe II, on le voit presque aussitôt se réjouir publiquement de la ruine de l'invincible Armada, et inviter la reine à prendre sa revanche en opérant une descente en Espagne, sans oser lui-même rompre avec cette puissance qui lui était odieuse.

Son intervention fut plus heureuse en France, puisqu'elle finit par y imposer à Henri IV la célèbre transaction qui un peu plus tard lui donna le royaume. Mais ce ne fut là qu'un demi-succès, fort inférieur aux espérances qu'il avait conçues, puisque le roi sauvegarda, par l'édit de Nantes, les droits qu'il avait compromis par son abjuration. Cette réconciliation de Henri IV avec le Saint-Siège, négociée par les Vénitiens, et agréée, mais non conclue, par Sixte-Quint, fut de la part de ce dernier une vraie trahison contre Philippe II, qui avait pris fort à cœur les offres des démocrates de la ligue, et se flattait de faire de la France une province de l'Espagne.

Cet échec marqua le déclin de l'influence espagnole, qui succomba encore plus rapidement qu'elle ne s'était élevée. Le peuple espagnol s'arrêta court au milieu de son essor, comme si la prodigieuse dépense d'énergie et de vitalité qu'il lui avait fallu faire pour conquérir en si peu de temps la moitié de l'Europe, couvrir l'Océan de ses flottes et peupler de ses colonies l'immense continent américain, avait subitement épuisé sa force d'expansion.

Ses apôtres et ses hommes d'État, Charles-Quint, Ignace de Loyola, Philippe II, Lainez, etc., avaient sauvé l'Église par une opération semblable à celle qui se pratique à bord des navires battus par la tempête. On jeta à la mer tout le luxe inutile ou embarrassant, tel que les rares institutions libérales qui s'étaient conservées dans son sein. Elle reçut d'eux sa forme définitive, sa discipline, son art, sou tempérament, son esprit. L'ascétisme du dix-septième siècle est tout espagnol. L'Espagne lui fournit à ce moment, et d'une seule portée, une telle fourmilière de docteurs, de prédicants et de casuistes, que rien dans l'histoire  du monde ne saurait donner l'idée de cette déplorable fécondité.

Cette influence laissa surtout une empreinte profonde sur l'Italie du seizième et du dix-septième siècle. La combinaison de ces deux génies si différents, de la familiarité italienne avec l'enflure espagnole, ce mariage de la passion et de la mobilité avec la roideur et la sécheresse mit au monde un produit louche, équivoque, bâtard, une génération d'impuissants et d'avortons nés pour l'ignominie du sigisbéisme. Les mœurs affectèrent une austérité hypocrite, les manières prirent un ton à la fois guindé, pédantesque et servile. L'étiquette naquit, et avec elle la grande domesticité, plus basse que la petite. L'art tomba dans un fade naturalisme imité des maîtres espagnols. La littérature, épurée par l'Inquisition, devint, comme la dévotion, une sorte d'exercice spirituel, c'est-à-dire un répertoire de vaines minuties et de formules toutes faites. Elle se fit pardonner ses témérités d'autrefois à force de nullité, de platitude et d'orthodoxie. Il ne se produisit qu'une seule exception à ce néant, ce fut la Jérusalem délivrée, le plus catholique et le plus dévot des poèmes, et aussi le plus artificiel, une contrefaçon de l'Énéide, l'imitation d'une imitation.

Un trait suffit pour caractériser le goût de Sixte-Quint, qui se croyait tenu de protéger les arts. Ne pensant pas, et avec raison, avoir assez fait pour la gloire en faisant hisser les statues des apôtres Pierre et Paul à la place de celles de Trajan et d'Antonin sur les deux colonnes qui les portaient, et en plantant une croix dans les mains de la Minerve antique, il voulut effacer tout le siècle de Léon X par un monument sans pareil. Cela consista à dresser à grands frais l'Obélisque devant l'église de Saint-Pierre. L'opération terminée, on frappa par son ordre des médailles en commémoration de cet immense événement, et on en fit notifier la nouvelle à tous les princes de la chrétienté.

Cette époque est pointant une époque glorieuse auprès de celles qui suivirent, et Sixte-Quint paraît un grand homme à côté de ses successeurs. Il emporta dans sa tombe le dernier prestige de l'antique papauté, et la dernière palpitation de l'indépendance nationale. Après lui, le vide et le silence se font dans cette histoire, pour n'être plus interrompus que de loin en loin par d'impuissantes aspirations.