JEAN-BAPTISTE CARRIER

 

CHAPITRE XXVII. — LES ACQUITTÉS.

 

 

Explosion de mécontentement de la population parisienne à la nouvelle de l'acquittement des accusés de Nantes. — Protestation indignée de Lecointre à la Convention, applaudie par cette Assemblée. — Demande d'arrestation des acquittés. — Objection de la chose jugée. — La chose jugée devant la Convention et devant les tribunaux. — Renvoi du jugement d'acquittement au Comité de Législation. — L'arrestation des acquittés décrétée. — Opinion de Tronson-Ducoudray sur le jugement. — Des causes de l'acquittement. — Goullin, objet de la répulsion générale. — La manifestation de la Convention contre l'acquittement accueillie favorablement par l'opinion. — Adresse des habitants de Nantes. — Rapport du Comité de Législation concluant an renvoi des acquittés devant le tribunal d'Angers. — Décret conforme. — Inertie des magistrats chargés des poursuites. — Amnistie. — Mise en liberté définitive des acquittés.

 

Sauf dans les bas-fonds de la sans-culotterie, l'acquittement des complices de Carrier fut l'objet de la réprobation générale.

Partout où la police écoute, dans la rue, dans les promenades, et dans les cafés, elle constatait, qu'en applaudissant au jugement rendu contre Carrier, on paraissait mécontent de la mise en liberté des autres Nantais. Le soir, au café de Foy. du Caveau et autres, les plaintes étaient générales centre les juges qui les ont acquittés. La nouvelle s'est répandue, à dix heures du soir, au café du Caveau que le Comité de Sureté générale voulait faire arrêter les Nantais (Rapport du 27 frimaire).

Hier soir (rapport du 28), vers huit heures, au café des Canonniers, maison Egalité, Goullin, Nantais acquitté par le Tribunal révolutionnaire, a été reconnu, vu de mauvais œil, et mis à la porte par le public, qui l'a traité d'homme de sang, en disant que, s'il avait été acquitté par le Tribunal révolutionnaire, il ne l'était pas dans l'opinion publique. Les esprits étaient fort échauffés à cette occasion, et tout le monde disait qu'il ne voulait jamais se trouver avec un pareil monstre. La surveillance est parvenue, cependant, à rappeler les esprits au respect dû aux jugements émanés des autorités constituées[1].

A la Convention où les oreilles n'étaient point fermées aux bruits de l'opinion, le mécontentement du public trouva de l'écho. Dès le 28 frimaire, Lecointre de Versailles prit la parole à ce sujet : Le 26, dit-il, le Tribunal révolutionnaire a rendu un jugement qui condamne à mort trois individus — Carrier n'était déjà plus qu'un individu — convaincus d'assassinats et d'actes arbitraires, et qui acquitte vingt-six autres individus, convaincus également d'actes arbitraires, et d'avoir assassiné des enfants et des femmes enceintes. Le Tribunal a cru que sa compétence se bornait à juger le fait révolutionnaire, et que, quoiqu'il fût convaincu du crime de ces hommes, dès qu'il était constant qu'ils n'avaient pas eu d'intentions contre-révolutionnaires, il ne pouvait pas leur infliger de peines. Je demande pour la vindicte publique, car je ne crois pas que personne veuille tolérer et défendre l'assassinat, que le Comité de Législation nous présente un projet de décret, pour que ces hommes soient renvoyés devant le Tribunal criminel de leur département, qui les jugera conformément aux lois (Vifs applaudissements).

Je ne dirai pas, pour prouver la nécessité de ma proposition, que ces hommes parcourent les maisons publiques de Paris, où ils se font gloire des assassinats qu'ils ont commis, où ils insultent à la mémoire de ceux qu'ils ont immolés, aux malheurs de ceux qu'ils ont désolés (Vifs applaudissements). Je demande, en outre, que le Comité de Sûreté générale prenne des mesures pour que ces hommes ne sortent pas de Paris, et restent sous la main de la justice jusqu'au rapport du Comité de Législation.

Un membre, qui n'est pas nommé, fit observer, non sans raison, que la proposition de Lecointre reposait sur une erreur de fait, et que le jugement portait non seulement que les acquittés avaient agi sans intentions contre-révolutionnaires, mais qu'ils avaient agi sans intentions criminelles, et qu'on ne pouvait traduire deux fois les mêmes personnes pour le même fait ; que, par conséquent, il voterait seulement le renvoi au Comité de Législation, pour qu'il fût chargé de vérifier la teneur du jugement. Pareil scrupule était chose nouvelle à la Convention. On n'a peut-être pas oublié le décret rendu sur la demande de Carrier, pour ordonner le renvoi, devant le Tribunal révolutionnaire de Paris, de trois habitants du Cantal, qui avaient été acquittés par le Tribunal criminel de ce département[2]. Il serait facile de relever, dans les comptes rendus des séances de la même Assemblée, d'autres exemples de ce mépris de la chose jugée. Les tribunaux ne la respectaient pas davantage, et ce représentant, qui se faisait son défenseur, manqua l'occasion, qui pourtant était excellente, de rappeler qu'il n'y avait pas trois mois, le Tribunal révolutionnaire de Paris, celui-là même dont le personnel avait été amélioré à la suite du décret du 23 thermidor, avait envoyé à l'échafaud un notaire des Ardennes nommé Lombart, pour un fait dont le Tribunal criminel de la Meuse l'avait déclaré parfaitement innocent[3].

Bréard soutint le renvoi aux deux Comités de Législation et de Sûreté générale. en disant que les acquittés avaient été convaincus de malversations. (On applaudit) La Convention ne doit pas laisser circuler dans la société des hommes couverts d'opprobres, coupables des plus grandes atrocités. (Les applaudissements redoublent.) Il ne faut pas que tes femmes des malheureux, qui ont été précipités dans la Loire, soient insultées par leurs bourreaux. Je n'entends rien à la législation, mais je suis les mouvements de mon cœur, et je sens que, si je n'écoutais que les mouvements de mon indignation, je ferais justice, moi-même, de ces infâmes assassins. (Vifs applaudissements.)

Lecointre insista. S'ils n'ont pas eu, dit-il, d'intentions contre-révolutionnaires, ils n'en ont pas moins commis des atrocités qui font frémir la nature, ils n'en ont pas moins assassiné des enfants et des femmes enceintes.

La discussion continua. Il fut d'abord décidé que les acquittés, non convaincus des crimes qui leur avaient été reprochés, ne seraient pas compris dans les nouvelles poursuites et ensuite que les juges et les jurés seraient renouvelés. Il n'y a plus de jurés, fit observer Mathieu, du moment que les prévenus connaissent d'avance quels sont ceux qui doivent les juger. Il n'est pas difficile alors, pour les prévenus, d'étudier les faiblesses de leurs juges, et de faire le siège de l'opinion de chacun d'eux. Sans doute la décision d'un Tribunal doit are respectée, lorsqu'elle est conforme à la justice ; mais n'oublions pas que le premier des Tribunaux révolutionnaires est la Convention.

Cette dernière phrase montre à quel point les conventionnels, même ceux qui se repentaient de leurs erreurs, étaient rebelles à la doctrine tutélaire de la séparation des pouvoirs.

Les dispositions suivantes furent aussitôt lues et adoptées :

Sur la proposition d'un membre, tendant à renvoyer au Comité de Législation le jugement rendu, le 26 du présent mois, par le Tribunal révolutionnaire de Paris, par lequel les nommés Goulin, Chaux, etc., convaincus d'avoir exercé des actes arbitraires, des dilapidations, etc., ont été acquittés et mis en liberté, comme n'ayant pas commis ces actes arbitraires avec des intentions contre-révolutionnaires, à l'effet de les traduire devant le Tribunal criminel du département où les crimes ont été commis ;

La Convention Nationale décrète le renvoi, à ses Comités de Législation et de Sûreté générale, du jugement porté par le Tribunal révolutionnaire de Paris, le 26 du présent mois, qui déclare convaincus d'exécution d'actes arbitraires, dilapidations, etc., et cependant acquitte et met en liberté les dénommés au dit jugement, Goullin, Chaux.-. Bachelier, Perrochaud, Mainguet, etc., à l'effet, par lesdits Comités de lui faire, sous trois jours, un rapport sur le jugement dont il s'agit ; charge, en outre, le Comité de Sûreté générale de s'assurer des personnes ci-dessus dénommées, qui resteront en état d'arrestation provisoire jusqu'au rapport.

Les trois jours durèrent plusieurs mois.

Un second décret, rendu à la suite de celui-Iii, ordonnait le renouvellement du Tribunal révolutionnaire, qui serait réorganisé sur un mode nouveau[4].

L'Assemblée n'avait pas marchandé son blâme au jugement ; les applaudissements prodigués à Lecointre l'avaient accentué ; enfin, un décret l'avait sanctionné. A cela rien d'étonnant. Seul l'intérêt du moment dictait les votes de la Convention ; qu'elle blâmât ou qu'elle approuvât, elle le faisait avec enthousiasme et unanimité, quitte à oublier le lendemain sa manifestation de la veille.

Le blâme de Tronson-Ducoudray avait plus d'autorité, et il n'était pas moins vif. Un scandale, disait-il, dans la note déjà citée, a terminé cet épouvantable procès, scandale presque aussi odieux que les crimes qui en étaient l'objet, c'est le jugement que le Tribunal a rendu. Ce que j'ai à en dire ici en expliquera en partie les causes. Quelques-unes resteront longtemps secrètes, comme tout ce qui tient à l'intrigue ; mais j'avertis d'avance le public que les juges, comme une partie des jurés, sont étrangers à ce mystère honteux.

Quelles sont les causes véritables auxquelles Tronson-Ducoudray faisait allusion ? lin siècle s'est écoulé, et personne ne les a encore révélées. L'avocat (le Proust exposait ensuite comment Réal avait intéressé le Tribunal à ses clients, en prétendant que leur condamnation serait pour le parti fédéraliste un triomphe humiliant auquel aucun républicain ne pouvait consentir ; mais cette cause secondaire de l'acquittement était connue de tous. De quelle intrigue mystérieuse entendait-il parler ?

Il se peut que Topino-Lebrun, l'un des jurés de l'affaire, et l'un de ceux qui avaient condamné successivement les Girondins et les Dantonistes, ait entraîné à : l'indulgence quelques-uns de ses collègues. Certains journaux du temps l'ont prétendu et aussi Beauchamp, dans la Biographie universelle de Michaud[5]. Telle n'est point, à mon sens, la véritable cause de l'acquittement. Je l'ai déjà dit, je ne crois pas à l'indépendance de pareils jurés. Le mystère honteux ne serait-il pas tout simplement une pression exercée sur le jury par le Comité de Sûreté générale qui aurait pensé que trois ou quatre condamnations suffiraient à satisfaire les honnêtes gens, et, qu'un plus grand nombre inquiéterait les terroristes de la Convention ? A la vérité, les honnêtes gens s'indigneraient ; mais une manifestation de mécontentement contre le jugement par l'Assemblée les calmerait. La politique est un jeu où il n'est pas défendu d'être habile.

Imprévu ou combinaison, ce qui est bien certain, c'est que l'opinion mécontente fut retournée par le décret ordonnant le renvoi des acquittés devant un autre tribunal, où, d'ailleurs, ils ne comparurent jamais. On lit dans les rapports de police : L'allégresse s'est manifestée avec transport en apprenant les mesures prises par la Convention relativement aux Nantais acquittés par le Tribunal. (29 frimaire.) Hier, dans plusieurs cafés, le public buvait à la santé de la Convention. Soulès, homme de lettres qui avait défendu Goullin, a été chassé d'un café pour ce seul motif. (20 frimaire.) L'incident eut même une suite qui montre que ce n'étaient pas les habitués d'un seul café qui honnissaient les amis de Goullin. Le Journal des Lois dut publier les lettres de plusieurs homonymes de Soulès, qui donnaient chacun leur prénom et leur adresse, et déclaraient qu'ils n'étaient point le Soulès qui avait été chassé d'un café pour ses mauvais propos.

L'indignation publique, disait le même journal, ne cesse de se manifester contre le jugement inconcevable qui a absous de tels monstres ; aussi, bénie soit la Convention qui vient de justifier encore la confiance nationale dont elle est investie, en les faisant arrêter[6].

Plusieurs furent capturés ; les autres se constituèrent eux-mêmes prisonniers ; deux jours après le jugement tous étaient sous les verrous, sauf Forget qui se cacha et qui réussit à se faire oublier.

A Nantes, l'allégresse n'avait pas été moindre qu'à Paris à la nouvelle que les acquittés avaient été de nouveau emprisonnés. Une adresse signée par de nombreux habitants fut apportée à Paris par une députation qui fut admise, le 30 nivôse (19 janvier 1795), à en donner lecture à la barre de la Convention. Cette adresse, qui remplit deux colonnes du Moniteur, se terminait ainsi : Il faut que les ministres de la mort, qui ont exercé si longtemps leurs sanglantes fonctions à Nantes, reparaissent devant les Tribunaux[7].

Le rapport du Comité de Législation se fit attendre longtemps, et ne fut discuté que dans les premiers jours de floréal (avril 1795). Il fut décrété, à la suite de ce rapport, que les individus du Comité révolutionnaire de Nantes, acquittés par le Tribunal révolutionnaire de Paris, étaient renvoyés par-devant le Tribunal du district d'Angers, pour y être jugés sur les délits ordinaires[8]. Par cette décision, la Convention s'érigeait en Cour de cassation, et faisait même davantage, car elle heurtait de front, comme on l'a déjà vu, le principe de droit pénal qui interdit de poursuivre, pour le même délit, l'individu qui a été déchargé de l'accusation par un jugement en dernier ressort. Ce décret, d'ailleurs, pourrait bien n'avoir été comme le premier, celui qui avait ordonné l'arrestation, qu'une concession sans conséquence faite il l'opinion. Cette double supposition n'est pas trop téméraire, et ce qui accroît sa probabilité, c'est le long délai qu'on avait laissé s'écouler avant de déposer le rapport, près de trois mois, et celui beaucoup plus long encore durant lequel on négligea de saisir effectivement le Tribunal d'Angers. D'après une lettre de Bachelier, tous les acquittés avaient été transférés dans les prisons de cette ville à la fin de floréal an III (milieu de mai 1795), et aucune procédure n'avait été commencée contre eux, lorsque fut promulgué le décret d'amnistie du 4 brumaire an II (26 octobre 1795). En de pareilles affaires le temps gagné a toujours son effet.

Le lecteur curieux d'étudier cette question de droit rétrospective, et de connaître les discussions auxquelles elle donna lieu à la Convention, en trouvera l'exposé le plus complet dans le Patriote Dhéron, de mon éminent et très regretté ami La Sicotière. Jurisconsulte et historien, La Sicotière a, sur ce point, dit le dernier mot[9].

Pour les membres de la Convention la justice, ou plutôt ce qu'on appelait ainsi, ne fut jamais qu'une arme employée à défendre les institutions qu'ils avaient fondées, et par conséquent à se défendre eux-mêmes. L'idée fondamentale de la justice, consistant à infliger une expiation à de véritables coupables, leur était absolument étrangère. Ils étaient donc dans la logique de leur situation en épargnant les terroristes autant qu'il leur était possible de le faire sans se nuire à eux-mêmes.

A la fin de son étude sur Dhéron, La Sicotière exprime le regret de n'être point arrivé à connaître, malgré l'étendue de ses recherches, la décision judiciaire ou administrative qui avait prononcé la mise en liberté des acquittés, et, selon lui, cette décision avait dû être une ordonnance de non-lieu du jury d'accusation de Maine-et-Loire, rendue à une date inconnue. Dans un appendice, il mentionnait un document, que je lui avais communiqué, et qui semblait établir que ces acquittés avaient été élargis en vertu d'un jugement du Tribunal correctionnel d'Angers, et il faisait observer que, pour une affaire aussi grave, un jugement de police correctionnelle lui semblait anormal. Nous avions en partie raison tous les deux.

Le hasard à mis récemment sous mes yeux a décision vainement cherchée par lui. En feuilletant les papiers de Bachelier, qui ne sont pas le lot le moins intéressant de la collection Dugast-Matifeux, j'ai rencontré deux expéditions, la première, d'une sommation, adressée au directeur du jury d'accusation du Tribunal d'Angers, en date du 29 brumaire an IV (20 novembre 1795), à l'effet de le mettre en demeure de s'occuper de l'examen des causes de détention des requérants ; la seconde, d'une ordonnance du jury d'accusation, en date du 17 frimaire an IV (8 décembre), ainsi conçue :

Les membres composant le tribunal de police correctionnelle de l'arrondissement d'Angers, réunis en la Chambre du conseil, Pierre-Louis Rabouin, président, en cette qualité exerçant les fonctions de jury d'accusation, Etienne-François Chantrier, juge de paix du 1er arrondissement, M.-J. Gouin, juge de paix du 3e arrondissement. Etienne-Michel Mionnet, juge de paix du 2° arrondissement, assistés de François-Guibert Audio, greffier ordinaire, et en présence de Symphorin-Fidel Berraud, commissaire du directoire exécutif près le Tribunal ;

Lecture prise du décret du 2 floréal, portant que les membres de l'ancien Comité révolutionnaire de Nantes, et autres citoyens dénommés dans le jugement du Tribunal révolutionnaire, séant à Paris, du 26 frimaire an III, seraient traduits en état de prévention devant le jury d'accusation près le Tribunal du district d'Angers, pour être examinés sur le délit ordinaire ; ensemble, du décret du 4 brumaire dernier concernant l'abolition de procédures pour faits purement relatifs à la Révolution, et de la peine de mort à dater du jour de la paix générale ; vu enfin la loi du 7 du présent mois, interprétative de celle du 4 frimaire ;

Considérant qu'il résulte, des pièces de la procédure, que tous les délits, qui étaient imputés aux individus sur lesquels- le Tribunal s'est prononcé, sont entièrement relatifs à la Révolution dont l'amnistie est prononcée par la loi du 4 brumaire ;

Considérant, qu'il n'existe, contre aucun des prévenus, aucunes charges relatives à la conspiration de vendémiaire[10] ;

Après avoir entendu le commissaire du Directoire exécutif ;

Arrête que Goullin, Chaux, Bachelier, etc., actuellement détenus en la maison d'arrêt de ladite commune d'Angers, seront mis en liberté à la diligence du commissaire du Directoire exécutif, sans préjudice de l'action civile, pour raison de dilapidations, si aucunes avaient été commises.

Angers, le 17 frimaire an IV (8 décembre 1795).

 

Après dix-huit mois de prison préventive, qui, à la vérité, n'avaient pas été sans angoisses, les membres du Comité révolutionnaire et autres complices des crimes qui avaient excité l'indignation de la France entière revinrent paisiblement dans leurs familles.

Carrier mort, ma tâche était finie. Il m'a semblé néanmoins utile d'ajouter ce dernier chapitre, pour exposer la série des incidents qui assurèrent l'impunité à tous ceux, moins deux, qui avaient été mêlés aux atrocités de Carrier, soit qu'ils les eussent commandées, comme les membres des Comités de la Convention, soit qu'ils les eussent exécutées ou inspirées, comme les acquittés du jugement du 26 frimaire.

Carrier, Pinart et Grandmaison les ont expiées sur l'échafaud. Pour les autres, la fortune a mis en défaut la justice des hommes, et il leur a été donné de ne rendre des comptes qu'à la justice de Dieu.

 

FIN DE L'OUVRAGE

 

 

 



[1] Schmidt, Tableau de la Révolution française à la date. — Aulard, la Réaction thermidorienne, p. 322.

[2] Journal de la Montagne du 13 prairial an II, p. 271.

[3] Wallon, Histoire du Tribunal révolutionnaire de Paris, V, 295, jugement du 19 fructidor au II (7 septembre 1794).

[4] Réimpression du Moniteur, XII, 782.

[5] V° Topino-Lebrun. Topino-Lebrun était un artiste de mérite qui avait été entraîné, par David son maitre, à tous les excès révolutionnaires. Impliqué injustement dans la conspiration à Arena contre le premier consul, il fut condamné et exécuté en 1801.

[6] 1er nivôse an III.

[7] Réimpression du Moniteur, XXIII, 258.

[8] Réimpression du Moniteur, XXIII, 283. Le texte du décret dans le Moniteur, porte que les acquittés seront renvoyés devant le Tribunal d'Angers. Ce texte est erroné, il faut lire renvoyés devant le jury d'accusation du Tribunal de district d'Angers. Rapport de Delecloy, imprimé par ordre de la Convention. — Opinion d’Oudot. Journal des Débats et décrets, floréal an III, n° 941, p. 87, et le Patriote Dhéron, passim.

[9] Revue de Bretagne el de Vendée, 1879-1880.

[10] Les individus impliqués dans le mouvement des Sections contre la Convention, les prêtres déportés, les émigrés, les faux-monnayeurs, étaient spécialement exceptés de l'amnistie (Duvergier, Collection de lois, VIII, 540).