L'EMPIRE CAROLINGIEN

LIVRE PREMIER. — LES ORIGINES

 

CHAPITRE PREMIER. — L'Idée impériale en Occident au commencement du Moyen-âge.

 

 

I

Culte des Occidentaux pour l'Empire romain après 426.

 

Vers la fin du cinquième siècle, l'empire romain paraissait tout-à-fait impuissant à protéger et à garder ses provinces occidentales. La mort d'Ætius le rempart de la république d'Occident avait porté à ces provinces un coup terrible, dont elles ne réussirent pas à se relever[1]. Le seul officier capable de succéder à Ætius, Sabinien, digne par sa science d'être comparé aux vieux généraux romains[2], occupé en Orient, ne pouvait rien pour elles. Victime des invasions, la Gaule fumait comme un bûcher ; dans les villes, les bourgs et les campagnes, l'incendie et la ruine l'éprouvaient trop souvent[3]. Rome, désertée par une partie des nobles et des gens du peuple depuis la visite de Genséric, fléchissait, et les Italiens n'étaient pas seuls à pleurer avec des larmes de désespoir et de douleur la captivité de la ville privée de défenseurs[4]. L'Espagne, littéralement submergée par les Barbares, ne s'appartenait plus. Malgré l'intervention bienfaisante des évêques, les Espagnols avaient dît sortir des derniers châteaux fortifiés où ils avaient cherché refuge, et se soumettre à leurs vainqueurs ; certaines familles avaient été enlevées par les Vandales et transportées en Afrique, et la lecture du chroniqueur national, Idace de Lémica, qui fut mêlé activement à toutes les misères de l'époque, donne l'impression absolue du malheur[5].

Loin de se séparer de l'Empire, les Occidentaux restaient cependant plus attachés que jamais à son idée et à son culte, et, tandis que le flot des envahisseurs montait autour d'eux et (Die les désastres s'annonçaient de toutes parts, ils affirmaient plus énergiquement que jamais la supériorité de leur civilisation, leur qualité de citoyens romains, leur titre de membres de l'Empire. Parfois un cri de colère leur échappait contre cette race vieillie, soutenue moins par raison que par habitude en laquelle ils avaient mis leur confiance, contre ce pouvoir décrépit, ombre d'un empire[6] ; mais la colère n'était que passagère, le sentiment ne durait pas, et il faisait bientôt place à une immense pitié. Toutes les explications possibles étaient fournies pour atténuer les faiblesses du pouvoir impérial, et refuser obstinément de croire à une défaillance du nom romain. On allait dans cette voie jusqu'à attribuer les malheurs actuels au changement des institutions, et la Gaule déplorant le jour où furent abolis les droits du peuple et ceux du Sénat, regrettait, par la bouche d'un de ses derniers poètes, le temps où le consul au dos voûté ouvrait des sillons, et où la République remportait victoire sur victoire[7].

Nous trouvons la preuve de cet attachement invincible au vieil organisme politique et social, qui semblait condamné, dans la relation exacte du fameux événement de 476. Odoacre ne fut pas le vainqueur brutal qu'on s'est plu longtemps à représenter. Modeste, effarouché plutôt par sa victoire, et, comme tant de princes barbares, par les souvenirs grandioses que Rome et ses monuments évoquaient en lui, il ne prit ni la pourpre ni les insignes de la royauté[8], mais s'effaça complètement devant l'autorité du Sénat. Une délégation de sénateurs se rendit à Constantinople et demanda simplement que le patriciat fût conféré au chef des Hérules ; puis les envoyés déclarèrent à l'empereur qu'il n'était plus besoin d'une royauté particulière, et qu'un seul empereur suffisait aux deux empires[9]. Un peu après, le pape Félix écrivit à Zénon : En toi seul survit l'antique nom d'empereur[10].

Les peuples d'Occident ne pensèrent pas autrement que le barbare Odoacre, le pape, l'empereur, le Sénat, et le peuple romain : ils se tournèrent franchement vers le souverain qui régnait en Orient comme vers le maître unique et vers la source d'où tout pouvoir découle. Déjà, avant 476, quand ils s'étaient reconnus incapables de se défendre eux-mêmes, parce que, dit Sidoine Apollinaire dans son précieux langage, tous les empereurs créés par eux sous le ciel avaient vu le char de l'État brisé par la Fortune, ils s'étaient tournés vers Constantinople pour avoir une direction, et ils avaient accompli cette démarche de la manière la plus naturelle du monde, sans penser qu'elle eût rien d'humiliant pour eux[11]. Ils avaient même manifesté à l'occasion leur désir de voir l'unité morale de l'Empire rétablie, et ils avaient reçu avec reconnaissance les deux empereurs qu'on avait bien voulu leur envoyer, Anthémius et Nepos[12]. Il ne leur restait plus qu'un pas à faire pour passer du régime de l'unité morale à celui de l'unité matérielle : posément ils le firent après la disparition d'Augustule. et sans difficulté, comme s'ils arrivaient au terme d'une évolution longuement mûrie, ils consentirent à ce que Rome cessât d'être la capitale politique du monde.

Ce dernier trait est caractéristique. On sait de quelle célébrité universelle Rome jouissait dans ces siècles lointains. L'Occident avait puissamment contribué à créer et à consolider la renommée de la Ville, en continuant après la soumission romaine l'œuvre des historiens et des poètes antiques, des inscriptions et des médailles ; ses écrivains avaient uni leur voix à celles de Virgile, d'Horace et de Tacite ; pour les Espagnols ou les Gaulois comme pour les descendants de Romulus, Rome était devenue la patrie des patries, l'antique mère des dieux, la Ville des belles-lettres et des lectures publiques, à laquelle nulle autre ville ne pouvait être comparée, et les sentiments populaires à son sujet se traduisaient déjà par une expression qui allait traverser les âges : Rome dorée — aurea Roma[13] —. Après l'événement de 456, la prédiction fatale annoncée par les douze vautours apparus, au premier roi sur le mont Palatin fut considérée comme accomplie[14]. Rome déchut du premier rang qu'elle occupait incontestablement encore au quatrième siècle, quand écrivait Ausone. Carthage et Constantinople se disputent le second rang, dit le poète dans l'une de ses épigrammes[15]. Carthage se lève par déférence devant Constantinople, sans tout-à-fait lui céder le pas, parce que le troisième rang lui répugne, bien qu'elle n'ose pas aspirer seule au deuxième qui appartient à toutes deux. Désormais, les hommages vont à la reine de l'Orient. Rome d'un autre univers, siège de l'Empire[16], et pour les habitants des provinces occidentales, comme pour ceux des provinces orientales, Constantinople est la capitale[17].

La sincérité et le caractère durable de cette abdication s'affirmèrent au siècle suivant quand Justinien lit la tentative destinée à replacer sous son autorité l'Afrique et l'Italie. Les Romains des deux pays acceptèrent la manière de voir des Byzantins, qui se présentaient comme des frères venus pour les délivrer d'une tyrannie illégale[18], et l'on doit croire que le concours prêté par les habitants des contrées envahies aux armées de Bélisaire et de Narsès fit beaucoup plus pour assurer le succès de ces arillées que la valeur de ces généraux. Procope raconte avec faits à l'appui que les Impériaux furent salués partout comme des libérateurs et accueillis avec un extraordinaire enthousiasme ; les paysans accoururent au-devant d'eux, criant bien haut leur fidélité à l'empire, ouvrant leurs greniers saris rien cacher, distribuant leur blé aux soldats, escortant les troupes avec leurs chariots ; les habitants des villes ouvrirent spontanément leurs portes ou promirent de les livrer, si on leur envoyait seulement un modique secours. En Afrique, Bélisaire entra dans Carthage sans rencontrer aucune opposition et descendit directement au palais, où il s'assit sur le trône de Gélimer[19]. Mais c'est en Italie surtout que le sentiment de la délivrance fut très vif, chez les membres des anciennes familles qui remplissaient encore le Sénat et la ville[20], et il se manifesta curieusement dans le soin avec lequel on voulut, méconnaissant les enseignements de l'histoire et les lois les plus élémentaires de l'équité, effacer jusqu'au souvenir des années de domination gothique.

Il y avait trop peu de temps que Théodoric avait disparu pour que les Italiens eussent pu oublier les services rendus par cet homme remarquable, citez lequel la sagesse remplaçait, au témoignage d'un des leurs, la culture intellectuelle, et à qui le pays avait dû trente années d'une félicité et d'une sécurité sans bornes, capables de rappeler les règnes de Valentinien et de Trajan[21]. Théodoric n'en devint pas moins un être détesté, un usurpateur, qui avait violé toutes les prescriptions divines et humaines, tyran et non point roi. Envoyé par l'empereur, qui l'avait l'ait consul et patrice, pour chasser Odoacre, le patrice Théodoric[22] s'était emparé du titre royal que lui offraient les Goths, sans attendre le consentement impérial[23]. Et, en vérité, comment admettre que Zénon lui eût confié la guerre contre Odoacre pour qu'il occupât lui-même le royaume ? Pourquoi l'empereur aurait-il remplacé un tyran par un tyran ? Théodoric avait eu pour mission de restituer l'Italie à la liberté et à l'empire ; vainqueur, il s'était montré ingrat et avait refusé de rendre l'Italie à son maitre[24].

D'ailleurs la satisfaction causée par l'entreprise de Justinien ne parut pas seulement dans les pays soumis, mais dans les Gaules et l'Espagne, et si les habitants de ces dernières provinces montrèrent une joie moins, bruyante, ils furent également sincères, et plus désintéressés. L'opinion commune fut qu'une chose juste avait été accomplie : ce n'était pas à une conquête qu'on venait d'assister, mais à une simple et légitime restitution[25]. La manière de compter les années ne fut point autre pour l'Occident que pour l'Orient ; elle resta la même que par le passé, avec cette seule différence que, prenant la place de Rome, Constantinople devint le centre du inonde et l'objet de l'universelle attention. Dans toute l'Italie, l'Afrique, la Gaule, l'Espagne, l'usage des dates consulaires fut maintenu[26], et, quand le consulat eut disparu. les Romains des bords de la Saône et du Rhône imaginèrent la coutume originale de calculer par postconsulats, qui fut conservée, d'après les monuments épigraphiques, jusqu'en 628[27]. Les chroniqueurs groupèrent les faits autour des années de règne des empereurs d'Orient, et, s'ils rapportèrent surtout les événements particuliers aux régions qu'ils habitaient, ils n'oublièrent jamais le reste de l'empire : ils firent tous à Byzance une place d'honneur, et s'attachèrent au récit des graves événements politiques dont la ville était le théâtre, principalement aux circonstances qui accompagnaient l'avènement ou la disparition des empereurs[28]. Le plus romain d'entre les annalistes occidentaux, l'évêque Marius d'Avenches, donne même, à partir de l'année 522, les indictions à la mode byzantine[29], et quelques audacieux seulement osent taire suivre en seconde ligne les noms des empereurs par ceux des rois barbares[30].

Tout ce qui précède montre quelle portée lointaine eut l'événement de 476, et quelle influence il exerça en Occident sur la formation de l'idée impériale. Pour les Occidentaux, l'empire ne fut pas diminué de moitié, comme d'aucuns l'ont cru, mais, au contraire, l'autorité de l'empereur unique fut étendue à tous les territoires auparavant séparés, et cela, d'après la volonté formellement exprimée de la plus haute et vénérable institution de la République, le Sénat de Rome. On avait pu jadis, obéissant à des nécessités défensives, diviser le monde romain en deux parties ; mais, au fond, l'on était resté fidèle à la pensée d'Auguste le fondateur, qui avait établi un seul empire ; la situation créée par la mort de Théodose avait toujours été considérée connue provisoire, et les meilleurs n'y avaient vu que l'élection de deux résidences impériales, au lieu d'une[31]. L'intervention d'Odoacre, complétée par celle de Justinien, remettait l'État dans sa condition normale, et il en résultait deux conséquences également capitales pour l'avenir. D'une part, l'empereur byzantin était reconnu, sans qu'il fût possible d'en douter, comme le chef politique de tout l'ancien monde romain, avec Constantinople pour capitale, et quelle que fût son origine ou sa culture, qu'il fût slave ou grec, barbare ou civilisé, il voyait son autorité unanimement admise et solennellement proclamée[32]. D'autre part, la preuve était laite que l'Empire avait gardé dans les pays d'Occident la male importance et le mène prestige qu'autrefois, et que, si le souvenir de sa domination universelle y persistait toujours, le sentiment de l'unité nécessaire à son existence et à sa grandeur y était plus vivant que jamais.

 

II

Ils le représentent essentiellement chrétien et pur de toute hérésie. Place faite à la papauté et à la ville de Rome.

 

L'on commettrait une grosse erreur cependant si l'on s'imaginait que rien ne fût changé depuis le siècle des Césars et des Antonins. Il y avait entre la conception ancienne et la conception nouvelle de l'État une différence profonde. Sir Empire gardait toujours en principe l'unité qu'il avait eue dès l'origine et qu'il avait perdue quelque temps en fait, mais non en droit, cette unité n'était plus d'ordre politique, garantie par la communauté des lois civiles et le culte de la personne impériale ; elle était d'ordre plus spécial, religieuse, ou plus précisément chrétienne.

La concordance des dates de la naissance du Christ et de l'apparition du principat avait frappé de bonne heure les imaginations[33]. L'Eglise, en se proclamant une et universelle comme l'Empire[34], s'identifia du même coup à celui-ci, se juxtaposa, en quelque sorte, à son territoire sans limites, et les populations croyantes ne doutèrent pas que l'empire romain eût été fondé par Dieu pour préparer l'empire du Christ, et l'unité romaine instituée pour préparer l'unité chrétienne[35]. Cette idée se trouve exprimée, en vers et en prose. presqu'avec les mêmes termes, dans deux œuvres littéraires bien distinctes, les poèmes de Prudence et les serinons du pape saint Léon. Dieu, dit Prudence[36], voulant rapprocher les peuples différents par la langue et les royaumes dissemblables par la civilisation, résolut de les soumettre à un empire unique, où l'amour de la religion tiendrait unis les cœurs des hommes. Et dans le peuple, la même opinion se traduit par ces légendes merveilleuses qui constituent dès lors le fond primitif de l'épopée chrétienne : c'est Auguste qui refuse le titre de Dominus parce que ce titre n'appartient qu'au Christ qui vient de naître[37] ; c'est Virgile qui prophétise la venue du fils de Dieu[38] ; c'est le Christ lui-même, qui, inscrit aussitôt après sa naissance sur la liste des citoyens romains[39], apprend ainsi aux nations soumises à l'administration de Rome que la religion sera désormais pour elles l'union et le salut.

Il est vrai que le nom de chrétien n'était plus à cette époque un nom qui désignât suffisamment celui qui le portait ; car à l'intérieur du christianisme triomphant s'étaient déjà produites les divergences de vues que la question troublante de la Trinité devait faire naître. Mais sur ce point encore, aucun doute ne saurait être permis. Les peuples d'Occident ne concevaient pas seulement l'Empire comme essentiellement chrétien : ils voulaient qu'il vécût : sans compromission avec les hérésies qui surgissaient de tous côtés, et parmi lesquelles ils voyaient surtout l'hérésie arienne. La doctrine du prêtre d'Alexandrie s'était vite répandue parmi eux, à la suite des invasions barbares[40]. Or, s'ils avaient pu souffrir en silence l'établissement des envahisseurs sur leurs terres. la souhaiter mène, par besoin économique, parce qu'il leur manquait les bras nécessaires pour cultiver leurs champs en friche, ils furent pleins d'horreur pour les nouveaux venus, dès qu'ils s'aperçurent qu'avec eux, c'était l'hérésie, suivie de tout son cortège d'abominations, qui s'était introduite dans leurs contrées, pures auparavant de toute tache, et restées fidèles, malgré tout, à l'enseignement des anciens Pères. Leur religion leur parut plus menacée que leurs biens, et même, ils jugèrent doux d'avoir perdu la liberté si, du moins, ils pouvaient conserver leur foi[41].

L'occasion mémorable. à la faveur de laquelle les Occidentaux réunis affirmèrent ainsi pour la première fois les croyances orthodoxes, qui allaient devenir la marque originale de leur esprit et diriger toutes leurs actions politiques, fut le conflit de l'Église d'Afrique avec les Vandales ariens, terminé par l'intervention dé l'empereur Justinien.

Il y avait dans la belle province récemment illustrée par saint Augustin un clergé modèle, qui, sous la direction infatigable de l'évêque d'Hippone, avait pris un merveilleux élan spirituel et moral, et s'était attaché à l'orthodoxie jusqu'à pouvoir lui sacrifier son sang[42]. Aucune épreuve ne lui fut épargnée par les Vandales, désireux d'assurer partout, le triomphe de leur religion les plus illustres prélats furent chassés de leurs sièges et de leurs villes, et en même temps réduits en servitude ; il fut interdit d'ordonner de nouveaux prêtres, si bien que le nombre de ceux qui pouvaient donner les sacrements devint tout à fait insuffisant[43]. On peut contester dans une certaine mesure l'impartialité de ces renseignements empruntés à l'Histoire de Victor de Vita, en s'autorisant de la position spéciale et des rancunes de l'auteur[44] ; mais on ne réprouvera pas le témoignage officiel de l'édit par lequel le roi Hunéric remit finalement aux Ariens les églises et les domaines du clergé catholique[45]. Toujours est-il qu'au cours de la persécution. les Africains affolés conçurent le projet d'en appeler aux habitants des contrées situées sur les rives opposées de la Méditerranée. Eugène, évêque de Carthage, invité par le roi vandale à une conférence contradictoire avec les évêques ariens, déclara que l'affaire n'intéressait pas seulement les provinces africaines, mais le monde entier, et que, par conséquent. il fallait mander les évêques d'outremer en communion d'idées et de religion avec ceux d'Afrique[46]. Puis Victor de Vita lança un vibrant appel aux nations où la question était posée sur le terrain politique et religieux en même temps. Oui, disait-il, les Barbares sont dominés par la haine des Romains dans leur désir d'obscurcir le nom romain, ils vont jusqu'à souhaiter la disparition du dernier représentant de la race, et jamais un seul Romain n'a trouvé grâce devant eux. Que l'on vienne donc à nous, de tout âge, de tout sexe, de toute condition, que la masse de tous ceux qui portent le nom de catholiques accoure, car notre cause est aussi celle de la foi ![47]

Cet appel fut entendu, et il aboutit à une manifestation d'autant plus instructive à notre point de vue qu'elle révèle, la présence en Occident, à cette époque, d'une véritable opinion publique avec laquelle les empereurs devront désormais compter. Depuis longtemps la Gaule était désolée du sort de l'Afrique qu'elle imaginait tout en larmes, son noir visage déchiré, et, dans l'inclinaison de son front, brisant les épis tristement féconds qui couronnaient sa tête[48]. En Italie, et dans l'entourage pontifical, où l'on était particulièrement bien renseigné, et où les évêques maltraités étaient regardés comme des frères, il semblait que les Vandales eussent déclaré la guerre à Dieu lui-même[49]. Cette fois, on crut sincèrement que le démon avait choisi les provinces africaines pour y déployer contre le peuple chrétien toutes les ressources de son mauvais génie, et, selon un chroniqueur des Gaules. Il n'est personne au monde qui ne connut les souffrances infligées au clergé africain, qui ne gémit en les entendant conter[50]. L'impression demeura ineffaçable, et c'est encore pourquoi Justinien rencontra chez les peuples d'Occident une complicité unanime, le jour où il entreprit de reconquérir les contrées ravies à sa domination.

Les empereurs avaient commencé par jouer en Afrique un rôle modérateur, intervenant fréquemment entre les anciens habitants et les nouveaux maitres du pays, pour les réconcilier, réussissant enfin à mettre sur le trône mi prince ami, Hildéric, qui avait dans ses veilles du sang ; impérial, et par lequel les prêtres catholiques furent rappelés d'exil, les églises rendues au culte[51] : la guerre dirigée contre les Vandales hostiles à la royauté d'Hildéric, décidée sur le conseil des évêques et contre l'avis des politiques, avait donc un caractère nettement religieux[52]. Cela aurait, suffi, au besoin, pour mériter à Justinien l'appui général, et, mieux encore que par le respect traditionnel envers l'empire, l'altitude des Occidentaux dans la circonstance s'explique par le lait qu'ils reconnaissaient dans l'empereur le défenseur et le sauveur de l'orthodoxie menacée. Mais, même après la conquête de l'Italie qui compléta celle de l'Afrique, les habitants de l'Occident ne désarmèrent pas, et leurs sentiments apparurent clairement, toujours les mêmes, dans la manière curieuse dont ils apprécièrent l'ensemble des événements qui venaient de s'accomplir.

Personne ne pensa un seul instant que la victoire dût élue attribuée à la science militaire des armées ; il fut entendu qu'elle était le prix de la bonne cause, pour laquelle les troupes impériales s'étaient battues ; Dieu lui-même avait soutenu ceux qui travaillaient pour lui. et le triomphe n'avait été complet que parce qu'il avait été obtenu avec le concours actif de la divinité[53]. Dans le peuple l'injustice fut plus réelle, car elle atteignit encore le malheureux Théodoric qui devint la victime expiatoire des crimes reprochés à ses coreligionnaires, et dont la mémoire, à jamais compromise, alla se dénaturant de plus en plus.

Malgré la tolérance dont il avait fait preuve pendant de longues années, et pour laquelle il avait été jugé digne d'être inscrit parmi les orthodoxes[54], le roi des Goths ariens fut maudit, parce qu'il avait osé, vers la fin de sa vie, rompre l'équilibre entre les deux religions et appliquer aux catholiques de ses États les édits que les empereurs chrétiens avaient rédigés contre les ariens de l'empire[55]. Dans le bienfaiteur de l'Italie, on ne vit plus que l'hérétique désireux de faire triompher ses fausses croyances[56], et, tandis que son adversaire Boèce, chrétien de nom seulement, indifférent à toute religion positive, devint une sorte de martyr. Théodoric devint un monstre frémissant, en quête d'occasions pour faire le mal, frappé d'une juste mort, au moment où il voulait envahir les églises catholiques, et que le diable emporta, les mains liées. pour le jeter dans une caverne du mont Vulcain[57].

Comment maintenant, et à quels signes certains, la bonne interprétation des dogmes pouvait-elle être reconnue, au milieu des interprétations très différentes que donnaient les docteurs ? La question eût été délicate à résoudre, si la foi robuste des églises d'Occident ne leur avait suggéré de bonne heure l'idée que, pour ne point s'égarer, il était nécessaire de prendre un guide sûr, et de le suivre. Ce guide était le pape, et, dans la conception d'un empire exclusivement chrétien et pur de toute hérésie, il y avait encore celte nouveauté, qu'une place éclatante, inconnue auparavant, était faite à l'évêque de Rome. La suprématie spirituelle des papes, affirmée par saint Léon dans ses Sermons, et par son successeur, saint Hilaire, avait été proclamée par plusieurs autres pontifes romains, dans leurs lettres aux évêques de Gaule, et le pape Symmaque, écrivant à l'évêque d'Arles, avait revendiqué pour la papauté le droit de maintenir l'unité de la foi, ce qui impliquait logiquement celui de la fixer[58]. En lisant cette correspondance, on est frappé du bon accueil que reçoivent les prétentions pontificales, de l'obéissance empressée avec laquelle les papes sont remerciés de leurs communications relatives aux hérésies, des louanges qu'ils reçoivent pour avoir imposé leur autorité et contraint légalement les auteurs de doctrines néfastes[59]. Le rôle du Saint-Siège grandit en particulier pendant la crise africaine, où il centralisa et répandit sur l'Italie et les Gaules les lettres des martyrs, et, selon la parole imagée du clergé d'Afrique, le siège apostolique apparut comme une source, d'où les petits ruisseaux sortaient pour irriguer abondamment le inonde chrétien tout entier[60].

Par une conséquence forcée, Rome, résidence de la papauté, reconquit alors d'une certaine manière le prestige qu'elle avait récemment perdu. Après s'être tourné vers elle pendant des siècles comme vers la ville qui symbolisait l'unité politique de l'Empire, l'Occident la vénéra comme le centre de l'unité religieuse : la gloire chancelante de la cité de Romulus trouva ainsi, au moment opportun, l'élément nécessaire pour se reconstituer ; son culte momentanément amoindri reprit, et il importa moins qu'elle eût dépouillé sa vieille célébrité profane et son titre de capitale politique, le jour où elle reçut le rang de capitale religieuse.

Certes, la renommée de Rome parmi les chrétiens n'était point chose nouvelle. Lactance et saint Jérôme avaient proclamé jadis, en termes éloquents, l'éternité de la Ville. Pour eux, il était impossible que rien restât debout si Rome périssait : sa fin ne pouvait que coïncider avec celle du inonde, et ils priaient Dieu de différer la venue des tyrans qui devaient la détruire[61]. L'opinion des premiers Pères de l'Église n'était cependant pas unanimement partagée par leurs contemporains, et, à côté d'eux, il y avait d'autres chrétiens, non moins sincères, qui haïssaient Rome comme la métropole du paganisme et le royaume de la corruption. comme une nouvelle Babylone en un mot. Ainsi l'auteur de l'Apocalypse montre pour Rome une haine implacable selon lui, la cité n'a aucune mission sainte à accomplir, mais elle est plutôt contraire à la volonté de Dieu, et l'Empire n'est qu'une exécrable et diabolique institution, cause principale de l'iniquité dont le monde est rempli[62]. Depuis le commencement du sixième siècle, tous les chrétiens furent manifestement favorables à Rome, parce que toute trace sérieuse de paganisme y avait disparu. Dieu lui-même avait achevé d'anéantir la ville païenne et de la purifier, en la soumettant à plusieurs reprises au traitement des soldats barbares d'Alaric, de Genséric et de Totila[63]. On sait par Procope que ce dernier voulut livrer aux flammes les plus beaux édifices et changer les bords du Tibre en une pâture, sans d'ailleurs donner suite à ses intentions[64]. Cet événement, après lequel Rome fut déserte pendant plusieurs mois, et dont l'impression resta longtemps ineffaçable, fut la dernière épreuve imposée aux habitants ; la punition était désormais suffisante, et si la vieille comparaison avec Babylone fut encore eut-ployée, ce fut pour constater que Rome, après avoir eu des destinées semblables à celles de la cité chaldéenne, après avoir failli avoir la même fin, ne périt pas, ayant été renouvelée par le christianisme et épargnée à cause de lui[65].

Grâce à la popularité de l'évêque de Rome, la réhabilitation de la ville fut complète, et de nouvelles légendes illustrèrent son berceau. Saint Léon avait dit dans l'un de ses sermons que le bienheureux Pierre, prince des apôtres, avait été établi à dessein clans la capitale de l'empire romain, afin que la lumière de vérité, qui venait d'être révélée pour le salut des nations, se répandit plus efficacement de la tête sur le corps du monde[66]. L'Occident se rangea volontiers à cet avis ; il rapprocha les mots urbs et orbis [67], et considéra de nouveau Rome comme la tête du monde — capa mundi —, avec cette seule différence qu'elle tenait par la religion ce qu'elle ne possédait plus par les armes[68]. Dans un sens encore vague, mais qui devait se préciser plus tard et prendre une signification politique, le peuple romain devint de son côté le peuple élu dans la cité sacerdotale et royale[69]. Et, en vérité, à quoi aboutirent tous ces changements ? A grandir encore la puissance de Rome sur les imaginations. Sans doute, elle ne fut plus la ville des empereurs, puisque ceux-ci l'avaient abandonnée pour aller vivre à Byzance, à l'autre bout de l'Empire, mais elle fut la ville des Saints Apôtres qui avaient été les yeux du Christ, de Pierre, le porte-clefs du ciel, de Paul, le maitre et le docteur des nations. Les Apôtres furent considérés comme ses véritables fondateurs, qui l'avaient sauvée des coups des barbares et munie de remparts plus solides que ceux de Romulus, les remparts de la foi[70].

Chaque jour, Pierre et Paul semblèrent manifester leur présence par d'étonnants miracles, qui avaient lieu, soit auprès de leurs tombeaux dont on ne s'approchait qu'en tremblant, même pour prier, soit auprès de leurs reliques déposées dans les basiliques, d'où elles ne pouvaient être enlevées sous peine de mort[71]. On racontait, par exemple, que saint Pierre se montrait fréquemment aux gardiens de son église pour les remercier du zèle qu'ils mettaient à le servir, et sur ce théine furent brodés de charmants récits qui sont parvenus jusqu'à nous. Ainsi, l'un de ces gardiens, appelé Théodore, qui ne craignait pas de se lever la nuit pour refaire les luminaires, aurait vu tout à coup le saint se lever devant lui, vêtu d'une robe blanche, afin de le récompenser par sa seule présence[72]. Un autre gardien, du nom d'Acontius, aurait été l'objet d'une attention encore plus touchante. Il y avait dans l'église une jeune fille paralytique, obligée de ramper sur le corps et les mains, qui depuis longtemps suppliait saint Pierre de la guérir ; un jour, celui-ci lui apparut et lui dit : Va trouver Acontius, et demande-lui de te rendre la santé. Elle se rendit auprès du gardien, auquel elle raconta sa vision, et il lui répondit : Si tu es vraiment envoyée par le saint, lève-toi. Alors elle se leva, ayant recouvré l'usage complet et la solidité de ses membres, sans qu'il subsistât aucun signe de son état antérieur[73].

Nous pourrions rapporter beaucoup de légendes analogues, qui avaient cours en Italie, dans les classes populaires, à la ville et à la campagne. Ce qu'il y a d'intéressant à constater surtout, c'est que ces légendes, romaines ou italiennes d'origine, passèrent rapidement les Alpes, grâce aux pèlerins. Dans chaque pays, les Saints Apôtres furent placés au-dessus des saints locaux, même, en Gaule, au-dessus de saint Martin[74] ; leur concours fut sollicité pour arriver à la connaissance de la vraie foi et à sa récompense, Paul montrant le chemin du ciel et Pierre ouvrant la porte ; on composa des poèmes en l'honneur de leurs reliques[75], et les plus hardis ne craignirent pas d'aller les visiter sur place, car la seule vue du temple où elles étaient renfermées chassait la fatigue des voyageurs parvenus harassés aux portes de la ville[76]. C'est avec le consentement unanime de l'Occident chrétien que Rome, jadis découronnée par Byzance, reçut le nouveau diadème qu'elle ne devait plus quitter[77]. Tout en restant pour les amateurs de vieille littérature profane la mère de toute science et de toute cité[78], elle fut avant tout la ville sainte[79], dont le sort devait préoccuper tous les chrétiens[80], et elle inspira à l'un d'entre eux cet éclatant hommage, qui résume admirablement le sentiment général : Ô Rome, bien que tu sois grande et illustre, tu n'es grande et célèbre parmi nous que par la chaire de saint Pierre ! Depuis ta fondation, ton nom s'était répandu jusqu'aux extrémités du globe, sans que les vagues de, la mer, qui se soulevaient de tous côtés, réussissent même à l'arrêter ; niais ta renommée a commencé pour nous le jour seulement on le Fils de Dieu a jugé bon de se manifester et s'est mis à chevaucher à travers la mer des nations, porté par les apôtres Pierre et Paul. C'est alors que vous êtes devenus également grands et célèbres, ô papes, et que Rome est devenue plus célèbre et plus noble. Et aujourd'hui, s'il est permis de s'exprimer ainsi, vous, papes, vous êtes presque du ciel, grâce aux deux apôtres du Christ, et toi, Rome, tu es la tête du monde terrestre et des églises, sauf la prérogative qui appartient au lieu de la résurrection du Seigneur[81].

 

III

Rapports de l'empereur avec les rois barbares et le Saint-Siège. Légendes populaires relatives à Constantin, Théodose, Valentinien et Marcien.

 

Quand on sait quelle idée l'Occident se faisait de l'Empire, il est facile d'apprécier l'idée qu'il se faisait de l'empereur, et la place qu'il lui attribuait.

D'abord l'empereur jouissait d'un prestige unique, que lui garantissait le passé illustre de la race romaine et la possession de deux villes, l'une souveraine et l'autre capitale du monde. Quand les provinces occidentales de l'empire devinrent des royaumes gouvernés par des princes francs, goths ou burgondes, cette opinion, qui était celle des Romains nés dans le pays, fut générale[82]. Peut-être les rois barbares de la seconde génération se montrèrent-ils moins naïfs que leurs prédécesseurs, et n'eurent-ils pas l'admiration facile des Athanaric et des Edécon pour les décors truqués des palais de Constantinople et les cérémonies pompeuses de la cour ; ils s'inclinèrent cependant devant le chef de cette république romaine qui avait étendu avec César sa puissance sur des contrées et des îles où le nom des Romains était auparavant inconnu[83], et qui restait pour eux l'état idéal, fondé par les armes, mais conservé par le droit, fait de gravité et de justice, qu'il fallait sans cesse imiter[84]. Dans leurs lettres aux empereurs, qui ont été conservées et qui constituent le témoignage officiel de leurs croyances politiques, les descendants de Clovis et de Gondebaud firent ainsi parade d'un amour respectueux pour les descendants d'Auguste[85] ; ils les considérèrent comme d'un sang particulier, et affectèrent de leur rendre les honneurs qui leur étaient dus parce qu'ils étaient placés au sommet de la société. Les formules du dévouement le plus absolu furent celles qu'emploie le fils écrivant à son père[86] ; les réponses émanées de la chancellerie impériale furent qualifiées de sacrées, et attendues avec l'espoir d'y trouver chaque fois un nouveau gage d'union, de paix et de concorde[87].

Dans la correspondance échangée entre les empereurs et les rois, le désir de vivre en bonne intelligence avec Constantinople est constamment exprimé par ces derniers, et il forme, en quelque sorte, le fond invariable de leurs déclarations. Partout ils affirment leur volonté, presque dans les mêmes termes ; et les conditions dans lesquelles l'entente paraît assurée, tout à fait vagues pour nous, sont intéressantes à connaître, parce que le moyen-âge leur attribua une valeur précise, et chercha même à les utiliser systématiquement plus tard, comme un moyen de gouvernement, à l'époque carolingienne.

Il y avait différentes façons d'arriver à un accord : ou bien une convention spéciale, rédigée en vue de certaines éventualités, pouvait être conclue entre les intéressés ; ou bien les rois pouvaient se soumettre entièrement à la volonté impériale. De convention matérielle, on ne trouve aucune trace, et de soumission absolue, il n'est jamais question ; c'est à la suite d'événements particuliers au royaume burgonde, et dont la portée ne doit pas être étendue, que le fils de Gondebaud, Sigismond, alla jusqu'à proclamer ses sujets les sujets de l'empereur[88]. L'union fut une union purement morale, garantie par les liens d'amitié et de charité qui unissaient à l'empereur ses fils respectueux, et entretenue par de fréquentes relations épistolaires. Quand un conflit surgissait, des ambassadeurs partaient aussitôt pour dissiper ce qui n'était qu'un malentendu, et c'était une nouvelle occasion pour le prince de montrer son esprit conciliant, pour le roi de témoigner son affection, pour l'un et l'autre de régler leurs actes d'après l'utilité commune[89]. Les envoyés se présentaient, chargés des cadeaux de leurs maîtres ; les messagers impériaux apportaient un diplôme de patrice ou de consul, des monnaies d'or ou d'argent, ou des médailles frappées à l'effigie impériale[90] : les rois recevaient en public ces marques de sympathie, par lesquelles les empereurs mieux avisés cherchaient à les retenir dans leur sujétion en flattant leur vanité, et à les rabaisser, le cas échéant, au rôle de simples officiers de leur cour[91]. Aussi bien l'alliance prit dans quelques circonstances un caractère plus déterminé, et, avec un peu d'argent, certains rois furent amenés, sans trop de difficulté, à regarder comme un devoir de prêter à l'empereur une assistance armée contre ses ennemis[92].

Comme les rois, les papes saluaient avec respect le chef de la république romaine, et ils estimaient que son existence était nécessaire[93]. Sans rancune contre Byzance, qui avait dépouillé Rome, ils donnaient à la cité des rives du Bosphore le titre de capitale, et adressaient à celui qui l'habitait les hommages de tendresse et d'obéissance de la vieille Rome[94]. Pour eux, le pouvoir impérial avait une origine divine : divins étaient les ordres des empereurs, sacrées étaient leurs lettres[95]. Ils recevaient avec reconnaissance les icônes qui leur étaient envoyées[96], et admettaient que tous les évêques, d'Orient et d'Occident, petits et humbles par leur science, forts par la solidité de leur foi, fussent les serviteurs du prince. Dans l'administration de l'Italie en particulier, les papes prêtaient à l'empereur un concours actif, mettant tout à son service, conseils, soldats, finances, afin d'éloigner jusqu'au soupçon d'infidélité[97] ; mais ils ne doutaient pas non plus que les rois ne fussent inférieurs aux empereurs ; car ceux-ci sont les chefs d'une république d'hommes libres, tandis que les rois ne dominent que des esclaves[98], et ils considéraient comme un devoir d'affermir par tous les moyens la suprématie impériale[99]. Les légats pontificaux apportaient aux rois des lettres où il était dit que les empereurs étaient leurs pères et qu'il fallait leur rester fidèle[100]. Le clergé gallo-franc et italien s'associait à cette propagande, non seulement parce que ses membres avaient conservé la culture latine, mais parce que le pallium ne pouvait être conféré sans l'assentiment du prince, même dans les provinces de l'Empire qui en avaient été détachées par le malheur des temps. Ce droit faisait de l'empereur un chef universellement reconnu, et le plaçait bien au-dessus des souverains locaux[101].

L'Église et la papauté avaient d'ailleurs de son rôle une idée très nette. De même que la république romaine était la pieuse et sainte république, et l'empire romain l'empire très pieux et très chrétien[102], de même le gouvernement de l'État devait être un gouvernement chrétien. Les papes n'appelaient jamais l'empereur autrement que le prince chrétien par excellence, ou encore l'empereur très chrétien[103] ; ils voyaient dans la connaissance de la vérité le principal ornement de son trône[104], et disaient : Le Christ qui l'aime règne avec lui, et lui fait préparer par saint Pierre une place dans le ciel à côté des anges. Entre les travaux belliqueux et les innombrables soucis que lui donne le gouvernement de la société chrétienne, le monde entier se réjouit de voir la conservation de la foi briller au premier rang de ses préoccupations[105].

Travailler à la conservation de la foi, tel était donc, le premier devoir des empereurs, et naturellement il s'agissait de la foi catholique et apostolique propagée par Pierre et Paul et maintenue sans tache dans la ville de Rome par les successeurs des apôtres. L'attachement à la forme catholique du christianisme n'était pas moins nécessaire que la croyance en Jésus-Christ pour faire l'empereur digne du nom ; et celui-ci ne devait pas seulement être dévoué à la religion, la faire régner dans sa famille, son entourage, son palais, mais dans tout l'Empire et même dans le monde entier[106]. Là, dans cette fin glorieuse que certains papes entrevoyaient déjà, était l'espérance suprême de l'Église ; là se trouve l'explication complète de ses convictions impérialistes. Il importait que, dans les limites de l'Empire, rien ne fût négligé pour assurer l'unité de foi la vigilance devait être continuelle, et la violence employée au besoin, pour obtenir le silence, sinon au fond des âmes, du moins sur les bouches[107] ; mais surtout il fallait que la guerre permanente, la guerre sainte, étendit la suzeraineté impériale, c'est-à-dire le catholicisme, sur tous les pays qui l'ignoraient ou l'avaient oublié. Aucun scrupule n'était capable de retenir le bras de l'empereur ou de ses lieutenants dans l'accomplissement de leur tâche, car il ne s'agissait plus, comme clans les anciennes guerres, de verser le sang, mais de parvenir d'une manière désintéressée à l'agrandissement de la chrétienté[108]. Ces aspirations se résumaient dans une phrase qui allait traverser les siècles et atteindre l'époque carolingienne sans qu'un seul mot y fût changé : Que Dieu soumette les peuples barbares à votre domination, et qu'il les prosterne à vos pieds ![109]

Les formules de vénération, dont les papes se servaient pour écrire aux empereurs, se justifiaient de la sorte, parce qu'elles s'adressaient à des maîtres en piété autant qu'aux maîtres du monde[110], et il en était de même de celles qu'employaient les rois, les évêques, et en général tous les personnages illustres de l'Occident qui échangeaient des lettres avec les bureaux de Constantinople. Ainsi le lien de charité, qui unissait les rois aux empereurs, avait un caractère essentiellement religieux[111] ; la parenté fictive qui existait entre eux correspondait à la communauté des croyances, et, pour les rois, les empereurs étaient vraiment des pères, mais des pères très chrétiens[112]. Les secours accordés par les Francs aux troupes impériales, pendant les guerres pour l'affranchissement de l'Italie, eurent souvent pour prétexte la délivrance de coreligionnaires malheureux, et les Byzantins ne manquèrent jamais de rappeler que la foi créait un lien étroit entre leur nation et celle dont ils sollicitaient l'appui[113].

On conçoit sans peine l'impression produite sur cette société d'Occident, si impérialiste de sentiment, de tradition, de raison, par l'action concordante et simultanée des chefs politiques et religieux dont elle acceptait la direction. C'était, en somme, tout un programme qui lui était soumis, renfermant les principes généraux d'après lesquels l'empire devait être gouverné, précisant la politique intérieure et extérieure qui devait être suivie. Elle y adhéra complètement. Certes il est difficile de saisir la pensée du peuple au moyen-âge, et ici surtout cette pensée paraît assez vague au premier abord. Cependant il n'est pas douteux que, dans les classes populaires, l'opinion fût la même que dans les classes élevées. Cela se reconnaît à la manière presque superstitieuse dont il est parlé de la république romaine, de l'empereur et de sa famille, des coutumes et des colères impériales, du sénat, des consuls, des préfets et des familles sénatoriales[114] ; mais la preuve de l'accord est établie principalement par ce fait que l'Église et le peuple prennent dans le passé les méfies empereurs pour les proposer à l'imitation des empereurs présents et à venir.

Aux époques troublées, l'imagination se reporte volontiers vers les siècles antérieurs, et elle aime à parer des qualités les plus brillantes les bienfaiteurs disparus dont le souvenir lui est resté particulièrement cher. Ainsi fit l'Église chrétienne tourmentée par les hérésies ; elle alla chercher ses héros parmi les empereurs qui avaient assuré la victoire de l'orthodoxie. A ce titre, Constantin prit le premier rang, et parce qu'il avait réuni 318 évêques au concile de Nicée pour la défense de la Trinité contre l'arianisme, il fut considéré comme fauteur de la religion chrétienne, plus remarquable encore par sa piété que par sa puissance[115]. L'hérésie d'Eutychès, après celle d'Arius, inspira aux catholiques les craintes les plus vives, car, en mettant en discussion la nature du Christ, elle troubla, dès le milieu du cinquième siècle, la chrétienté tout entière, et ses effets se firent sentir pendant longtemps. Un empereur, Marcien, contemporain du pape Léon le Grand, défendit avec énergie dans cette circonstance la cause de l'orthodoxie ; il la fit triompher au concile de Chalcédoine de 451, où déposant la majesté royale il exposa simplement sa croyance devant les légats pontificaux[116], et mit le bras séculier au service du clergé pour restaurer l'unité momentanément brisée. Aussitôt après sa mort, Marcien vint prendre place à côté de Constantin, et les actes de Chalcédoine furent autant et plus que le symbole de Nicée la pierre de touche de la foi[117]. Si l'on joint aux empereurs qui viennent d'être nommés les grands orthodoxes qui s'appellent Valentinien et Théodose, on a les quatre princes dont la mémoire était principalement en honneur dans l'Église[118].

C'est exactement aux mêmes personnages que s'attacha la faveur populaire, ainsi qu'il résulte des curieuses légendes qui se développèrent sans interruption depuis les origines du moyen-âge jusque sous l'empire germanique, et qui étaient alors en pleine formation.

Constantin fut le premier des empereurs chrétiens[119]. Avant lui, la République avait à sa tête des païens qui ignoraient le vrai Dieu et honoraient des idoles de pierre et de bois[120] ; l'empereur abolit ce culte pervers, se tourna vers le Christ avec tout son peuple, et reçut le baptême des mains du pape Sylvestre dans la basilique du Latran[121] : la disposition de ses longs cheveux, retombant de son front, fut l'origine du diadème que ses successeurs portèrent après lui[122]. Pure légende, venue de la lointaine Syrie[123], mais accueillie avec une telle faveur, et propagée avec tant de zèle par les biographes pontificaux en Italie, par Grégoire de Tours en Gaule, par Aldehelm et Bède dans la Grande-Bretagne, que le huitième siècle l'admit sans discussion[124] ! On raconta d'autre part que Valentinien, le glorieux orthodoxe, entré chrétien au service militaire sans rien abandonner de sa foi, avait été obligé pour cette raison de quitter le tribunat, mais avait reçu du Christ l'empire en échange énergique et sévère défenseur de la religion catholique pendant toute sa vie, il s'était montré le digne contemporain des merveilleux évêques Ambroise et Martin[125]. Marcien non plus ne fut pas oublié, et il fut presque aussi glorieux de lui être comparé que d'être rapproché de Constantin[126]. Enfin Trajan, qui n'était pas chrétien, mais digne de l'être par ses vertus, jouit d'une illustration tonte populaire. Sa légende ne commence pas avec l'anecdote fameuse rapportée par Paul Diacre dans la Vie de Grégoire le Grand, et qui rappelle son esprit de justice ; mais, bien auparavant, les prosateurs et les poètes célèbrent le vaillant, l'intègre, l'infatigable Trajan ; ils reconnaissent chez lui, à un degré éminent, la piété qui fait le bon chrétien, ils le félicitent de n'avoir rien entrepris contre la religion catholique, et en définitive, l'empereur rêvé par eux est celui qui serait à la fois plus heureux qu'Auguste, plus vaillant qu'Alexandre, plus saint que Théodose, meilleur que Trajan[127].

Ces souvenirs persistants d'un passé de plus en plus éloigné, et de plus en plus défiguré à mesure qu'il s'éloignait, sont caractéristiques. A travers les légendes impériales, dont Constantin occupe le sommet, pleines d'erreurs et marquées d'une grande naïveté, on aperçoit l'illusion populaire, ses causes et ses conséquences. Le règne des empereurs chrétiens apparaît comme le règne idéal, dont le retour est infiniment désirable parce qu'il amènera avec lui la saine gloire et le bonheur. Il est intéressant de constater que, dans le langage courant, Constantin, Valentinien, Théodose et Marcien finissent par être associés d'une manière indissoluble, et l'espoir suprême est de voir revenir des princes semblables à ceux qui vécurent de leur temps, surtout un nouveau Constantin[128]. Ainsi, l'idée impériale en Occident reste toujours vigoureuse et nette, peut-être même plus nette qu'elle ne l'a jamais été. Attachés par-dessus tout aux doctrines pontificales, les habitants de l'Italie et des contrées voisines voient dans le maintien de ces doctrines à intérieur et leur extension à l'extérieur la fin de toute politique, et, comme l'empereur est pour eux le chef de la société chrétienne, ils attendent de lui l'établissement de cet ordre de choses qui assurera l'unité et la félicité du monde.

 

 

 



[1] MARCELLINI, Chron., a. 434. — Cf. SID. APOLL., Panegyriens Avito Aug. dictus, vers 359.

[2] MARCELLINI, Chron., a. 479. — Après l'assassinat d'Ætius, l'Occident avait eu grande confiance dans Majorien, et sa perte fut vivement déplorée ; il semblait que tous les bons princes et tous les bons généraux fussent condamnés à disparaitre (HYDATII, Chron., 210).

[3] ORIENTIUS, Commonitorium, II, 181-184. (Migne, P. L., t. LXI, col. 985).

[4] Voir PROSPERI TIRONIS, Epitoma Chronicon, 1373.

[5] HYDATII, Chron., 48-49. — Idace, évêque de Lémica, fut chargé par ses compatriotes d'aller en Gaule trouver Ætius et solliciter le secours du général romain : Ætius envoya le comte Censorius, et grâce à l'intervention de cet officier appuyée par les évêques, les Suèves accordèrent aux habitants de la Galice un meilleur traitement (HYDATII, Chron., 96-100) ; mais les Vandales débarquant sur les côtes continuèrent l'œuvre des Suèves et emmenèrent sur leurs vaisseaux plusieurs familles espagnoles (HYDATII, Chron., 131). — Sur l'état général du pays au moment où Idace fut élevé à l'épiscopat, voir le début (§ 7) de sa chronique.

[6] SID. APOLL., Paneg. Avito Aug. dictus, vers 538-543. — On trouve encore le même sentiment exprimé dans une lettre de Sidoine Apollinaire à Ecdicius (SID. APOLL., Epist., II, 1).

[7] SID. APOLL., Paneg. Avito Aug. dictus, vers 101-104.

[8] CASSIODORII, senatoris Chronica, a. 476.

[9] MALCHOS, I, 3, dans les Excerpta de legationibus, p. 235. Voir la réponse de l'empereur aux sénateurs, dans laquelle il annonce qu'il va envoyer le patriciat à Odoacre.

[10] MIGNE, P. L., t. LVIII, col. 900. La lettre est de 483 (JAFFÉ, Reg., n° 591).

[11] SID. APOLLINAIRE, Panegyricus Anthémio dictus, vers 221. — MALCHOS, I, 3.

[12] HYDATII, Chron., 166.

[13] AUSONE, Ordo urbium nobilium, vers 1 et 166.

Prisca deorum, Roma, parens, dit SID. APOLL., Paneg. Avito Aug. dictus, vers 595-596, paroles curieuses dans la bouche d'un chrétien et d'un évêque. — En 449, un certain Silvius Polémius, habitant de la Gaule et auteur d'une Notitia Galliarum identique à la description de l'Italie du Chronographus, consacre une courte notice aux monuments de Rome (éditée dans les Chronica minora, page 547). Faut-il rappeler aussi les vers fameux de Rutilius Numatianus :

Fecisti patriam diversis gentibus unam,

Urbem fecisti, quæ prius orbis erat.

RUTILIUS NUMATIANUS, Itinerarium, V, 63.

[14] Aussitôt après la mort d'Ætius, Sidoine Apollinaire se demande si la prédiction de l'aruspice toscan ne va pas se réaliser (Paneg. Avito Aug. dictus, vers 55-56, 357-359). — Sur cette prédiction, qui voulait que la puissance romaine disparût au bout de douze siècles, v. Amédée THIERRY, Récits de l'histoire romaine, chap. VII.

[15] AUSONE, Ordo urbium nobilium, vers 2-5.

[16] V. le magnifique éloge de Constantinople, que fait Sidoine Apollinaire dans le Panégyrique d'Anthémius. Il est d'autant plus concluant qu'il est antérieur à 476.

[17] Urbs regia en latin, ή ξασιλίς en grec, tandis que l'ancienne Rome n'est plus que ή πρεσρυτέρα 'Ρώμή. — L'expression d'urbs regia, courante désormais pour désigner Constantinople, se trouve dans la Chronique de JEAN BICLARO, ann. 568, 573, etc., pour l'Espagne, dans celle de VICTOR TONNENNENSIS, ann. 540, 544, 551, etc., pour l'Afrique, dans les Lettres mérovingiennes pour la Gaule (v. Childeberii epistola ad Imperatorum dans les Variarum Epistolæ, lettre LXX). On la trouve dans JORDANES, Getica, LVII. GRÉGOIRE LE GRAND l'emploie également (Epist., XIII, 22, ad Rusticanam patriciam). — Du côté des Byzantins, voir MÉNANDRE, I, 25, 29, 31 (Excerpta de legationibus, p. 328, 331, 336, 338). Dans la Chronique du comte MARCELLIN, Constantinople est appelée (p. 79) Urbs augusta, ou simplement (p. 90), Urbs.

[18] Lire les discours adressés par Bélisaire tant à ses soldats qu'aux Romains d'Afrique ou d'Italie (PROCOPE, De bello vandalico, 1, 16, 19, 20. — De Bello gothico, I, 8).

[19] La défaite rapide des Vandales eut plusieurs causes. L'imprudence, que Genséric commit en abattant les murs de toutes les villes sauf Carthage, par crainte des habitants, y fut pour beaucoup ; de même l'amollissement des barbares ; mais l'hostilité des Romains exerça une influence prépondérante. (MALCHOS, I, 6). Il existait depuis longtemps en Afrique un parti qui préparait le retour à l'Empire. Avant même que Bélisaire eût quitté Constantinople, la Tripolitaine et la Sardaigne se soulevèrent, et quand les Impériaux eurent débarqué, ils trouvèrent des complices dans toutes les classes de la société évêques, nobles, paysans, habitants des villes, tous étaient pour eux (PROCOPE, De bello vandalico, I, 5, 10, 11, 14, 16, 17). DIEHL, L'Afrique byzantine, p. 18, sq., considère la marche entre Caput Vada et Carthage, comme la plus aisée des promenades militaires. En Italie, il en fut de même. Bélisaire s'empara presque sans combat de toute la Sicile, et quand il eut franchi le détroit de Messine, la plupart des villes offrirent leur soumission ; Naples seule fit une résistance sérieuse, dont elle fut d'ailleurs terriblement punie (L. P., Silverius, 3). A Rome, la garnison gothique sortit par l'une des portes tandis que l'armée byzantine entrait par l'autre : Milan fut occupé sans combat. Les membres des anciennes familles romaines, qui remplissaient encore le Sénat (les vieux Romains), dirigèrent dès lors contre les Goths, qui cherchaient à reprendre le dessus, une opposition qui fut fatale a ces derniers. Cf. DAHN, Die Könige der Germanen, II, p. 170 sq., et L. M. HARTMANN, Das italienische Königreich, p. 248.

[20] PROSPERII, Continuator havniensis, 3. De même, à propos des évènements qui s'accomplirent autour de Vérone entre les années 561 et 563 et marquèrent l'expulsion définitive des Francs qui avaient passé les Alpes, voir le LIBER PONTIFICALIS, Johannes, III, 2.

[21] ANONYMUS VALESIANUS, 59. Il convient de remarquer que l'anonyme de Valois est chrétien, ennemi déclaré de l'arianisme, postérieur à Théodoric, mais d'une époque où la mémoire de celui-ci dure encore : il semble avoir écrit après la destruction du royaume gothique (MOMMSEN, Introduction à la Chronique de l'anonyme de Valois. Chronica minora, p. 261). Les parties de la Chronique de Cassiodore consacrées à l'administration de Théodoric (ann. 500 et 519 notamment), corroborent tout à fait le témoignage de l'Anonyme de Valois, 60, 67, 70, 71.

[22] ANONYMUS VALESIANUS, 49, 51, 53, 54. — PROCOPE, De bello gothico, II, 6.

[23] ANONYMUS VALESIANUS, 57.

[24] C'est le raisonnement que tint Bélisaire dans un discours aux Goths rapporté par Procope, De bello gothico, II, 6. Cf. MARCELLINUS, Chron., ann. 487. Et cependant il résulte du témoignage formel de l'Anonyme de Valois (49), que Zénon avait promis la royauté à Théodoric, s'il le débarrassait d'Odoacre.

[25] MARII AVENTICIS, Chron. — L. P., Vigilius, 1. — Cette opinion était tout à fait conforme à celle des Byzantins. Ceux-ci estimèrent que l'Afrique et l'Italie étaient rendues à leur patrie, MARCELLINUS, Chron., ann. 534. — Voyez ce que dit Agathias, p. 13, édit. de Bonn, en parlant de Rome et de l'Italie.

[26] On trouve les dates consulaires employées par tous les chroniqueurs on annalistes occidentaux du sixième siècle, en Italie par l'Anonyme de Valois et le continuateur de Prosper, en Afrique par Victor de Tunes, en Gaule par Marius d'Avenches. Les Espagnols, Idace, Jean de Biclaro, Isidore de Séville, classent les événements d'après les années de règne des empereurs. Dans le Liber pontificalis, en pleine période gothique, la notation consulaire reste encore en usage (Introduction de l'abbé DUCHESNE au t. L. P. XLV).

[27] LE BLANT, Inscriptions chrétiennes de la Gaule, Préface, p. LXI sq. — Nouveau Recueil d'Inscriptions chrétiennes, Préface, p. VI-VII. — Dans la première Lyonnaise, on data par le post-consulat de Justin, et dans la Viennoise par celui de Basile qui reçut les faisceaux l'année suivante.

[28] Cette manière de procéder est constante chez Marius d'Avenches. Grégoire de Tours, qui écrit une histoire et non des annales, ne suit pas un classement aussi rigoureux, mais il indique les changements d'empereurs Justinien, Justin, Tibère, Maurice, viennent successivement prendre place dans son récit (GREGORII TURONENSIS, Historia Francorum, éd. Arndt, IV, 40. V, 19. V, 30. VI, 30).

[29] ÉBERT, Histoire de la littérature du Moyen-Age en Occident, t. I, p. 618. — Pour Marius, l'année 579, par exemple, est : Anno VIII Cons. Justini Aug. Ind. XII.

[30] Ainsi fait l'Espagnol JEAN DE BICLARO.

[31] OROSE, Hist. univ., VII, 36. — Chronica gallica, p. 629.

[32] Comme le dit excellemment GASQUET, le vieil empire, fondé par Auguste, ne disparut pas avec Augustule, et l'initiative des chefs barbares qui dominaient en Italie fit seulement cesser la séparation du monde romain en deux obédiences. Le régime de l'unanimité fut détruit, mais au profit de l'unité de l'empire qui n'eut plus désormais qu'une capitale, Constantinople, L'Empire byzantin et la monarchie franque, Préface, p. VI. — Voir dans L. M. HARTMANN, Das italinische Königreich, p. 53, un bon commentaire de l'évènement de 476.

[33] Le texte capital à ce sujet est celui d'OROSE, Hist. univ., VI, 22. Sa valeur est grande, parce qu'Orose a joui au Moyen-Age d'une faveur exceptionnelle il a été l'une des sources de l'historiographie universelle. A l'époque carolingienne, Fréchulfe, évêque de Lisieux et contemporain de Louis le Pieux, reproduit intégralement le passage en question dans son livre VII, § 16 (MIGNE, P. L., t. CVI, col. 1108).

[34] OROSE, Hist. univ., VII, 33. — SAINT LÉON, Sermon 111.

[35] OROSE, Hist. univ., VI, 1. Cf. Lettre d'Agathon à l'empereur (MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1172).

[36] PRUDENCE, In Symmachum, II, vers 102-111. Cf. St LÉON, Sermon, LXXXII.

[37] OROSE, Hist. univ., VI, 22. La phrase d'Orose est d'autant plus intéressante qu'elle ne fait que reproduire, en la modifiant dans un sens favorable à la légende chrétienne, une phrase de SUÉTONE, Auguste, 53. — Voir dans GRAF, Roma nello legende, t. I, p. 311 note 12, les textes d'Orose et de Suétone, disposés sur deux colonnes parallèles.

[38] Sur Virgile prophétisant la venue du Christ, d'après une opinion universellement acceptée au Moyen-Age, voir LACTANCE, Inst. div., VII, 4 et SAINT AUGUSTIN, Cité de Dieu, X, 28. Cf. GRAF, o. c., t. II, p. 196, sq.

[39] OROSE, Hist. univ., VI, 22.

[40] Chron. gallica, ann. 431.

[41] SID. APOLLINAIRE, Epist., VII, 6, ad Basiliam. Dans le reste de la lettre, Sidoine Apollinaire exprime la crainte que le roi des Goths rie tourne ses armes, moins contre les murailles romaines que contre la loi du Christ, et que la persécution rimeur non seulement le triomphe des hérétiques du temps présent, mais le retour des hérésies du temps passé. — Sur la fidélité que l'Église d'Occident avait gardée aux Pères orthodoxes, Cyprien, Augustin, Hilaire, Ambroise, et qui fut sa sauvegarde dans la lutte contre l'arianisme, voir les Lettres à Buricius, évêque de Limoges, éditées par Krusch, dans les Epistolœ merowingici œvi, notamment les lettres XIV, XX, XVII, VIII.

[42] DAHN, Die Könige der Germanen, fasc. I. FERRÈRE, La Situation religieuse de l'Afrique depuis la fin du IVe siècle jusqu'à l'invasion des Vandales (429), Paris, 1897. — Les évêchés de la province d'Afrique étaient plus nombreux que ceux d'aucune autre province : il y en avait près de 500 (FERRÈRE, p. 24. — DAHN, p. 243).

[43] V. PROCOPE, De Bello Vandalico, débuts du livre I, et surtout VICTOR VITENSIS, Historia persecutionis wandalicær temporibus Geiserici et Hunirici regum Wandalorum (éd. Hahn). L'auteur, évêque de Vita (Byzacène), est contemporain des événements, et il a personnellement souffert des persécutions.

[44] V. sur ce sujet FERRÈRE, De Victoris Vitensis libro qui inscribitur Historia persecutionis Africanæ provinciæ historica et philologien Commentatio, Paris, 1898. — Page 55 sq., l'auteur rapproche du témoignage de Victor de Vita celui des autres écrivains qui ont parlé de la cruauté des Vandales, et ses conclusions très modérées sont plutôt eu faveur de l'impartialité de l'historien de la persécution.

[45] V. le texte de cet édit dans VICTOR VITENSIS, Hist. persec. Wandal. III, 3-14.

[46] VICTOR VITENSIS, Hist. persec. Wandal., II, 44.

[47] VICTOR VITENSIS, Hist. persec. Wandal., III, 62, 64.

[48] Ainsi se la représente SIDOINE APOLLINAIRE, Panegyricus Majoriano dictus, vers 53-60. — Cf. Chronica Gallica, a. 444.

[49] PROSPERII TIRONIS, Epitoma chronicon, 1327, 1339. — Originaire de l'Aquitaine, comme l'indiquent les notes de deux manuscrits, l'auteur de cette chronique est peut-être secrétaire du pape Saint Léon au milieu du Ve siècle : en tout cas, on admet qu'il écrivit à Rome et dans l'entourage pontifical (Préface de MOMMSEN en tête de l'édition de Prosper dans les Chronica minora. — HOLDER-EGGER, Neues Archiv., 1876, p. 82. — L'abbé VALENTIN, Saint Prosper d'Aquitaine, 1 vol. Toulouse, 1900, p. 136).

[50] Lettre du pape Félix aux évêques, dans MIGNE, P. L., t. LVIII, col. 924). — Cf. VICTOR VITENSI, Hist. persec. wandal., II, 17.

[51] Les rapports entre les empereurs et les rois vandales, d'abord très difficiles, s'améliorèrent du vivant même de Genséric, et celui-ci conclut avec Zénon un pacte pacifique, qui fut conservé sous Anastase et Justin (PROCOPE, De Bello Vandalico, I, 7). Les persécutions commencées contre l'église d'Afrique furent interrompues, Carthage recul un évêque, et de nombreux prêtres furent rappelés d'exil (VICTOR VITENSIS, Hist. persec. wandal., I, 16-17). Hunéric, le roi persécuteur, fils et successeur de Genséric, montra lui-même au début quelque modération, niais les empereurs ayant refusé d'accorder aux ariens de leurs états la tolérance qu'ils demandaient pour les catholiques dit royaume vandale, Hunéric appliqua purement et simplement à ses sujets catholiques les lois des empereurs romains contre les hérétiques. (VICTOR VITENSIS, Hist. persec. wandal., II, 1, 3-5. III, 7. PROCOPE, De bello vandalico, I, 8). L'avènement d'Hildéric rétablit les bons rapports avec Byzance, mais ce roi fut assassiné par Gélimer. (VICTOR TONNENNENSIS, Chron. ann. 523, 531. PROCOPE, De bello vandalico, I, 9).

[52] PROCOPE, De bello vandalico, I, 10-12. — Lorsque Justinien réunit son conseil pour décider s'il enverrait une flotte et une armée en Afrique, les fonctionnaires, les financiers et même les soldats se montrèrent hostiles au projet. Leur opinion, exposée par le préfet du prétoire Jean de Cappadoce, était qu'il n'y avait aucun profit à attendre de la victoire et qu'une défaite au contraire causerait le plus grand tort à l'Etat. L'Empereur, impressionné par ce discours, allait remettre l'affaire à une autre fois, quand un évêque se présenta, et, parlant au nom de Dieu, déclara qu'il fallait délivrer les chrétiens d'Afrique de la tyrannie qui pesait sur eux. Alors Justinien décida que l'expédition aurait lieu, et quand la flotte partit, l'évêque Epiphane, âpres l'avoir bénie, plaça sur le premier vaisseau un soldat récemment converti et baptisé. — DIEHL, L'Afrique byzantine, p. 15, compare avec raison l'entreprise à une croisade. D'ailleurs Justinien avait reçu auparavant la visite d'un des évêques africains martyrisés par Hunéric, l'évêque Lœtus, et à partir de ce moment, il avait décidé en principe une guerre, dont le maitre des soldats, Bélisaire, aurait la direction (VICTOR TONNENNENSIS, Chron. ann. 534). Marcellin, dans sa Chronique, raconte qu'il vit lui-même au palais impérial des malheureux qui arrivaient d'Afrique, les mains et la langue coupées, et il a à ce propos un mot curieux, qui prouve que les Byzantins considéraient toujours les catholiques africains comme des coreligionnaires et des compatriotes : Tolant namque per Africam crudelis Vandalorum regis in nostros catholicos persecutio importata est. MARCELLINUS, Chron. a. 484.

[53] L. P. Vigilius, 8. Naturellement, cette opinion fut propagée avec ferveur par les Byzantins, et on la trouve également dans Marcellin et dans Procope (MARCELLINUS, Chron. a. 534, 536. PROCOPE, De bello gothico, II, 29). Le sort de l'Italie avait également ému le reste de l'Occident : des Romains persécutés par les Goths s'étaient réfugiés en Gaule, auprès de l'évêque d'Arles à qui le pape Pelage les avait recommandés (Epistolæ arelatenses, 53).

[54] ENNODII, Epist., 9, 30. — Les écrivains chrétiens sont unanimes à vanter la tolérance de Théodoric à l'égard des catholiques pendant les premières années de son règne, et les services qu'il rendit à l'église romaine, en particulier dans l'affaire du pape Symmaque (ANONYMUS VALESIANIS, 60, 65. — L. P., Symmachus, 3. Hormisdas, 5, 8. — JAFFÉ, Reg., n° 722, ou MIGNE, P. L., t. LIX, col. 153. — Panégyrique de Théodoric par ENNODIUS, évêque de Pavie et légat pontifical). Cf. PFEILSCHIFTER, Der Ostgotenkönig Theodorich der Grosse und die Katholisshe Kirche, 1 vol. in-8°, Munich, 1896.

[55] Comme Hildéric en Afrique, Théodoric en Italie refusa de montrer plus longtemps une tolérance, dont ses coreligionnaires ariens ne jouissaient pas dans les contrées soumises à l'autorité impériale. L'échec de l'ambassade du pape Jean à Constantinople donna le signal de la persécution. Pour la corrélation des faits V. l'Anonyme de Valois, 92, 95, et L. M. HARTMANN, Das italienische Königreich., p. 225 sq.

[56] Le changement de ton des historiens catholiques, italiens ou romains, à l'égard de Théodoric, est curieux a observer, à partir du moment où il persécute les catholiques. Ainsi, le LIBER PONTIFICALIS n'appelle plus Théodoric que le rex hereticus (Johannes, II, 2, 4, 6), et sa mort devient un châtiment providentiel. De même, l'Anonyme de Valois l'appelle tyran et non plus roi, et voit dans sa mort une punition divine (ANONYMUS VALESIANUS, 94-95).

[57] GREGORII MAGNI, Dialog., IV, 30. — Sur la popularité imméritée de Boèce au moyen-âge, qui trouve sa contrepartie dans l'impopularité de Théodoric considéré comme un odieux tyran, voir un excellent chapitre de GRAF, Rosa nella legende, ch.  XVIII, l. II, p. 322-367.

[58] SAINT LÉON, Sermons, 2, 3, 5, et Lettre aux évêques de la province de Vienne (MIGNE, P. L., t. LIV, p. 144, 145,55, 628). — L. P. Hilarus, I. — Lettres du pape Symmaque aux évêques d'Arles (Epistolæ arelatenses, 24 et 25). — Voir aussi le Carmen de ingratis de Prosper d'Aquitaine, rédigé dans l'entourage des papes (MIGNE, P. L., t. LI, p. 96 et sq.).

[59] Epistolæ arelatenses, 2, 12, 30. — La papauté est en correspondance, non seulement avec les évêques d'Arles, mais avec ceux du reste de la Gaule et des Sept Provinces, d'Afrique et d'Espagne, et sa suprématie est reconnue sans conteste disent les évêques de Gaule (Epist. arelat., 12).

[60] Lettre des Églises d'Afrique au pape Théodore. MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 84). — L'Église d'Afrique fut celle qui reconnut avec la plus grande franchise la primauté du pape et contribua surtout à l'établir dans le inonde catholique. Au temps des persécutions, l'évêque de Carthage, Eugène, voulant qu'Hunéric appela à un débat contradictoire les évêques catholiques des pays étrangers, demanda en particulier la convocation de l'évêque de Rome (VICTOR VITENSIS, Hist. persec. wandal., II, 43). Le pape et les prélats africains étaient en correspondance continuelle, et la papauté pressait les empereurs d'intervenir en leur faveur (JAFFÉ, Reg., n° 839, 892 ; DAHN, Die Könige der Germanen, I, 243 ; DUCHESNE, Introduction au Liber pontificalis, t. I, p. XLI). Dans la Chronique africaine de VICTOR DE TUNES, les changements de papes sont rapportés avec soin.

[61] LACTANCE, Divin. Inst., VII, 95. MIGNE, P. L., t. VI, col. 813. — SAINT JÉRÔME, Epist., 123, ad Ageruchiam.

[62] GRAF, o. c., t. II, p. 408, 473-474.

[63] SOZOMENE, IX, 9. — OROSE, VII, 39. — Narratio de imperatoribus domus Valentinianœ et theodosianœ dans les Chronica gallica.

[64] PROCOPE, De bello gothico, III, 18, 20-22. — MARCELLINI, Chon., a. 547. — Le désastre fut d'autant plus terrible qu'il venait après plusieurs autres. Déjà, à plusieurs reprises, la ville avait eu à souffrir de la famine, et les habitants avaient émigré en partie, soit du côté de la Campanie, soit en Sicile (PROCOPE, De bello gothico, I, 20, 25). Ces exilés volontaires revinrent plus tard, quand Narsès, vainqueur de Téias, se présenta devant Rome pour la délivrer à jamais de la domination gothique ; mais ils eurent le tort de devancer l'entrée des Impériaux et se firent massacrer (PROCOPE, De bello gothico, IV, 34). On comprend dans ces conditions l'impression profonde laissée en Italie par Totila, et dont on retrouve l'écho dans Grégoire le Grand (Dialog., II, 13). Trop fiers pour admettre que Rome pût succomber sous les coups d'un adversaire, les Italiens pensèrent que la ville serait ruinée par la foudre et les tremblements de terre.

[65] Voir ce que dit OROSE, après le siège de Rome par Alaric : OROSE, Hist. univ., II, 3.

[66] SAINT LÉON, Sermon 82, dans MIGNE, P. L., LIV, col. 424.

[67] ENNODIUS, Libellus pro synodo, p. 66. — PROSPERI TIRONIS, Epitoma Chronicon. — SAINT JÉRÔME, Epist., 12, ad Principiam.

[68] ENNODIUS, Libellus pro synodo, p. 65. — PROSPER D'AQUITAINE, Carmen de ingratis, vers 39-41 dans MIGNE, P. L., col, 96-97. — Cf. SAINT LÉON, Sermon 82.

[69] SAINT LÉON, Sermon 82, dans MIGNE, P. L., LIV, col. 423.

[70] Ce fut le pape Saint Léon qui fonda véritablement à Rome le culte des Saints Apôtres. Voir ses sermons et notamment ceux qui portent les n° 82, 84, 96 (MIGNE, P. L., LIV), C'est dans le sermon 84 qu'il est fait allusion à la retraite miraculeuse d'Attila, racontée d'autre part avec des détails précis par PROSPER TIRO (Epitoma chron., 1367) et PAUL DIACRE (Historia romana, XIV, 12). Le pape s'étant présenté à la tête d'une ambassade du Sénat et du peuple, Attila aurait vu à côté du souverain pontife un personnage d'une forme plus auguste, en costume sacerdotal, à cheveux blancs, qui, l'épée hors du fourreau, incarna de mort le roi des Huns s'il n'accordait pas aux Romains tout cc qu'ils demandaient : ce personnage était saint Pierre. — Sur le voyage de Saint Léon auprès d'Attila, v. aussi le LIBER PONTIFICALIS (Leo, 6-7). — Il importe de remarquer, à l'occasion de la prise de Rome par Alaric, que les temples des Saints-Apôtres servirent alors de refuge aux habitants (OROSE, Hist. univ., VII, 39).

[71] Voir les Dialogues de GRÉGOIRE LE GRAND (passim) et aussi sa Correspondance. — L'impératrice Constantina ayant demandé qu'on lui envoyât un fragment du chef de Saint-Paul pour une chapelle dédiée au docteur des nations qu'elle faisait construire dans son palais, Grégoire lui répondit : Major me mœstilia tenet quod illa prœcipitis quæ facere nec passum nec audeo. Nam corpora senatorum Petri et Pauli apostolorum tantis in Ecclesiis suis coruscant miraculis atque terroribus, ut neque ad orandum sine magno illuc timore possit accedi. (GREGORII MAGNI, Epist., IV, 30). Dans la même lettre, le pape elle deux faits à l'appui de son assertion. Il raconte que son prédécesseur ayant voulu déplacer de l'argent placé sur le corps de saint Pierre fut frappé d'épouvante, et qu'un officier du palais pontifical mourut subitement, parce qu'en creusant le sol autour du tombeau de saint Paul, il rencontra par hasard et toucha des ossements séparés du corps de l'apôtre.

[72] GREGORII MAGNI., Dialog., III, 24.

[73] GREGORII MAGNI., Dialog., III, 25.

[74] Voir en particulier les Poèmes de Fortunat, évêque de Poitiers, mais d'origine italienne ; il célébra à plusieurs reprises saint Pierre et saint Paul et contribua à répandre leur culte dans toute la Gaule, comme saint Léon l'avait propagé en Italie. (FORTUNATI CARMINA, III, 7. IV, 8. V, 2. V, 3. VII, 12. X, 7. XI, 6). — Cf. dans les Poèmes attribués à BÈDE, l'hymne IX, de Apostolis Petro et Paulo (MIGNE, P. L., t. XCIV, col. 628).

[75] FORTUNATI CARMINA, III, 7, vers 4-10.

[76] SID. APOLL., Epist., I, 5.

[77] FORTUNATI CARMINA, V, 2, vers 5.

[78] ENNODII, Epist. ad Faustinum et Parthenium. — Theodorici Panegyricus, XI. FORTUNATI CARM., III, 18, vers 7. — Cf. GREGOROVIUS, Gesch. Der Stadt Rom im Mittetalter, t. II, p. 80 sq.

[79] ENNODII, Epist., ad Luminosum. — Opusculum VI, ad Ambrosium.

[80] ENNODII, Epist., I, 3, ad Faustum.

[81] Lettre écrite par saint Columban au pape Boniface IV entre les années 612 et 615 (Epistolæ Columbani, 3, dans les Epistolœ œvi merowingici, p. 174-175).

[82] V. le début de JORDANES (Romana) : Romani, ut ait Jambliens, armis et legibus exercentes orbem terrœ summ fecerunt : armis si quidem construxerunt legibus autem conservaverunt.

[83] JORDANES, Getica, XI.

[84] On trouve surtout l'expression de ce respect et de cette admiration pour l'État romain dans les lettres de Théodoric. Celle qu'il écrivit à l'empereur Anastase est particulièrement significative (CASSIODORI, Variæ, I, 1. — Ibid., I, 20. I, 44. II, 3, etc.). Avant de mourir, Théodoric appela auprès de lui son petit-fils et successeur, Athalaric, l'enfant d'Amalasonthe, et lui recommanda, ainsi qu'aux chefs des Goths ut... senatum populumque Romanum amarent, principemque Orientalem ploratum semper propitiumque haberent post Deum. JORDANES, Getica, LIX.

[85] Prœdicator et amator vestri imperii, dit Brunehaut de son fils Childebert II, dans une lettre à l'impératrice Anastasie, femme de Maurice (Epist. austrasicæ, 44, ann. 585). L'Empire est toujours la Romana respublica et Constantinople l'urbs regia austrasicæ, 28, 29, 32, 33, 43, 45, 47. — JORDANES, Getica, 57.

[86] Lettres de Childebert II, ann. 583, dans les Epistolæ austrasicæ, 43, 45, 46. Le même Childebert exprime le vœu que l'empereur le compte parmi ses fils : Epist. austrasicæ, 48, avant l'année 581. — A rapprocher les termes dans lesquels Théodoric demande Zénon l'autorisation de passer en Italie : JORDANES, Getica, LVII.

[87] Lettre de Childebert II. Epist. austrasicæ, 48. — Cf. Lettre de Théodebald à Justinien (Epist. austrasicæ, 18). Le roi fait des vœux pour la prospérité de l'empire : felicitatem imperii vestri divinitate fundatam crescere et permanere inconcussam.

[88] Menacé par les Francs, Sigismond voulait se concilier à tout prix les Romains de ses États, que la mauvaise politique de Gondebaud avait détournés de la dynastie burgonde. C'est alors qu'il confia à l'évêque de Vienne Avitus, renommé pour son éloquence (GREG. TUR., Hist. eccl., II, 34), le soin d'écrire à l'empereur de Constantinople les lettres qui nous sont parvenues, et où il déclare que ses sujets sont les sujets de l'Empire : AVITI, Epist., 83. Ibid., 78, 93, 94.

[89] C'est encore de la correspondance de Théodoric avec les empereurs, et en particulier de la lettre à l'empereur Anastase, qu'il faut se servir pour comprendre les rapports entre les rois barbares et les Césars byzantins (CASSIODORI, Variæ, I, 1. — Ibid., I, 23. I, 45. VIII, 1, etc.). Le lien entre Constantinople et les royaumes barbares d'Occident est un fœdus, conclu pro communi ou encore causa future concordie et communis utilitatis. (Epist. austr., 25, 26, 28, 29, 30, 31, 32, 45, lettres de Théodebald, Childebert II, Brunehaut). Ainsi l'unité subsiste en principe, et elle durera tant que la concorde sera maintenue. C'est ce qui résulte de la déclaration de l'empereur Maurice à Childebert (Epist. austr., 42).

[90] FUSTEL DE COULANGES, La monarchie franque, p. 121 ; Nouvelles Recherches sur quelques problèmes d'histoire, p. 217 sq. — GASQUET, L'Empire byzantin et la monarchie franque, p. 13.4 sq. — GRAF, o. e., t. I, p. 13.

[91] Tous les textes sur la question ont été cités et discutés par MM. Fustel de Coulanges et Gasquet. Il suffira de rappeler le consulat attribué à Clovis et accepté par lui avec reconnaissance (GREG. TUR., Hist. eccl., II, 38), et les monnaies d'or à l'effigie impériale que Chilpéric montra à Grégoire de Tours (GREG. TUR., Hist. eccl., VI, 2).

[92] Théodebert Ier promit ainsi un secours de trois mille hommes à Justinien au temps de la guerre gothique (Epist. austr., 19). Lorsque Vitigès sollicita de son côté le secours du roi des Francs, il eut soin de spécifier qu'il se contenterait d'auxiliaires bourguignons, et qu'il n'allait pas jusqu'à demander que le roi fit injure aux Romains (PROCOPE, De bello gothico, II, 13.) Plus tard, Justin, ne pouvant secourir l'Italie contre les Lombards, décida de payer les Francs pour aller combattre à la place des armées impériales (MÉNANDRE, I, 25).

[93] GREGORII MAGNI, Epist., VII, 27. L'expression Romana respublica se rencontre à chaque instant dans les lettres des papes, comme dans celles des rois barbares, pour désigner l'Empire (GREGORII MAGNI, Epist., V, 30 : XIII, 31, etc. — AGATHONIS, Epist., dans MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1252).

[94] L'expression urbs regia ou civitas regia, pour désigner Constantinople, est courante dans le LIBER PONTIFICALIS (Severinus, 4. — Theodorus, 3, 5. — Martinus, 4. — Vitalianus, 2. — Agatho, 4. — Johannes, V, 2. — Sergius, 6, 7. — Johannes, VII, 4. — Gregorius, II, 1). — Lettre du pape Martin à l'empereur Constantin, dans MIGNE, P. L., t. LXXXVII, p. 139. — AGATHONIS, Epist., clans MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1224. — Agathon appelle Constantinople : Deo conservanda et regia Constantinopolis nova Roma (MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1218). On pourrait multiplier les citations à l'infini.

[95] L. P. Vitalianus, I. — Agatho, s, 3. — Benedictus, II, 3. — Cono, 3. — Constantinus, 11. — Correspondance du pape Agathon avec Constantinople, dans MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1164).

[96] Grégoire le Grand recevant les icônes de Phocas et de Léontia les fait placer dans l'oratoire de Saint-Césaire, martyr, à l'intérieur du palais (Appendix ad S. Gregorii epistolas. MIGNE, P. L., t. LXXVII, col. 1350).

[97] C'est toute l'histoire du pontificat de Grégoire le Grand qui intervient ici comme une preuve décisive. V. PINGAUD, La politique du pape Grégoire le Grand, p. 137, et GREGORII MAGN., Epist., I, 49. II, 3. XIV, 9.

[98] GREG. MAGN., Epist., XIII, 31.

[99] Dès que Grégoire le Grand a fait la paix avec le roi lombard Agilulphe, il demande à la reine Théodelinde de décider son mari à l'aire alliance avec l'empire (GREG. MAGN., Epist., IX, 43), — Cf. fine lettre du pape Vigile à Auxanius, évêque d'Arles, pour l'exhorter à favoriser les bons rapports entre le roi et l'empereur. (Epist. arelat., 40).

[100] Pater vester, elementissimus imperator, écrit Pélage à Childebert (Epist. arelatenses, 18). Le langage de la papauté était le même que celui des empereurs byzantins, de leurs patrices ou de leurs évêques (Epistolæ austrasicœ, 41. — Epistolæ wisigothicæ, 3).

[101] Que l'assentiment de l'empereur fût indispensable pour conférer le pallium en Occident, on en a la preuve formelle pour la Gaule (Epist. arelatenses, 39, 41. — GREG. MAGN., Epist., IX, II). Il s'agit dans un cas de l'évêque d'Arles et dans l'autre de l'évêque d'Autun. — D'autre part, dis qu'un peuple nouveau entrait dans la religion chrétienne, les papes transmettaient aussitôt la nouvelle à Constantinople (GREG. MAGN., Epist., XI, 29, au sujet de la conversion des Bretons).

[102] Correspondance d'AGATHON avec Constantinople. — GREG. MAGN., Epist., II, 31. V. 41, etc.

[103] Lettres des papes Simplicius et Félix dans MIGNE, P. L., t. LVIII, col. 42-44, 51, 895, 897, 899, 917, 934. Dans les lettres de Grégoire le Grand, on trouve fréquemment aussi piissimi domini (GREG. MAGN., Epist., I, 49. III, 52, 65, etc.).

[104] Lettre du pape Martin à l'empereur Constantin, dans MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 139.

[105] Lettre du pape Félix à Zénon (MIGNE, P. L., t. LVIII, col. 917). —  Coregnator cester omnipotens Deus, dit Agathon à l'empereur (MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1212, 1217, 1228).

[106] Le texte le plus complet et le plus précis à ce sujet est une lettre de Grégoire le Grand à l'empereur Maurice. Le pape ajoute que l'empereur doit protéger l'empire à l'extérieur contre ses ennemis, à l'intérieur contre les hérésies (GREG. MAGN., Epist., VI, 65. Cf. Ibid., VI, 16). Grégoire le Grand ne précise pas ici ce qu'il entend par la foi (ailleurs : rectitudo fidei), mais il n'est pas douteux qu'il s'agisse de la foi catholique. In aurore catholicæ fidei facial (Deus) defensores suas, quos fecit ex benigno opere imperatores nostros, (Epist., XIII, 39), et il se déclare prêt à sacrifier pour l'amour de la république, argent, or, propriétés, tout, sauf sa foi (Epist., V, 19). D'ailleurs, la papauté avait tracé depuis longtemps aux empereurs la voie qu'ils devaient suivre ; saint Léon et Félix leur avaient déclaré qu'ils devaient travailler non seulement pour le bien de l'Église, mais aussi pour celui de la république, eu que les deux Rome (utraque Roma) devaient avoir les mêmes croyances (SAINT LÉON, Lettres, XXIV à Théodose II, CXV et CXLII à Marcien, CXVII à l'évêque Julien. — Lettres de FÉLIX dans MIGNE, P. L., t. LVIII, col. 944, 951, 970. — AGATHONIS, Epist., I, 3, dans MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1164-1217).

[107] GREG. MAGN., Epist., IX, 49. Que le bras séculier soit mis au service de l'Église contre les hérésies, tel est à n'en point douter le vœu du Saint-Siège et de tout le clergé catholique depuis les règnes de Gratien et de Théodose. Les hérétiques devront être combattus modis omnibus, afin qu'en dernière analyse la paix et l'unité de l'Église se trouvent assurées. Quoi de plus naturel ! Les empereurs ne feront que rendre à Dieu le service que celui-ci leur rend chaque jour en leur donnant la victoire sur es ennemis de l'Empire ; et qui osera jamais lever la main sur eux quand on saura qu'ils sont les collaborateurs des prêtres ? (SIMPLICII, Epist., 42, ad Zenonem. MIGNE, P. L., t. LVIII). — GREG. MAGN., Epist., I, 74. IV, 34. V, 20-21. VII, 6, 33).

[108] Grégoire le Grand à Gennadius (GREG. MAGN., Epist., I, 75).

[109] Lettre du pape MARTIN à l'empereur Constantin, dans MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 146, et lettre d'Agathon, MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1213. Les mêmes vœux, exprimés à peu près dans les mêmes termes, se retrouvent dans les lettres de GRÉGOIRE LE GRAND, V, 30. VII, 4. VI, 7.

[110] Ego autem indignas pietatis vestrœ fumulus, dit GRÉGOIRE LE GRAND (Epist., IV, 65. Ibid., V, 21).

[111] Lettre de Childebert au curateur Megas. Epist. austrasicæ, 36. — Ibid., 40, 44.

[112] Parens christianissime atque amantissime, dit Maurice à la fin d'une lettre à Childebert II (Epist. austr., 42). — Piissimus imperator, piissimi augusti, ainsi sont désignes les empereurs dans les lettres des rois des Francs (Epist. austr., 27, 30, 34).

[113] Lorsque Justinien veut attirer les Francs dans son parti et obtenir leur appui contre les Goths d'Italie, il a soin de leur rappeler que les Goths sont ariens (PROCOPE, De bello gothico, I, 5). — C'est également aux sentiments catholiques de Childebert II que l'empereur Maurice et le pape Pélage font appel pour le décider à marcher contre les Lombards. (Epist. austr., 40, 41. — Epist. œvi merow. collectæ, 9). Plus tard, l'historien byzantin Agathias, établissant un parallèle entre les Romains et les Francs, très honorable pour ces derniers, ne manque pas de remarquer qu'ils sont chrétiens (AGATHIAS, I, 2).

[114] Grégoire de Tours, qui reflète parfois assez exactement les sentiments populaires, est très intéressant à étudier à ce point de vue. Il ne manque jamais de signaler les familles sénatoriales, quand il en rencontre. L'État romain reste pour lui la respublica ; et l'empereur l'imperator sans épithète (Hist. eccl., I, 42. II, 3. III, 32. IV, 9, 40. V, 19, etc.) Dans le récit des principaux événements de l'histoire de Byzance, il ne manque pas de faire intervenir les consuls, les préfets, toutes les coutumes et toutes les pompes impériales (Voir notamment V, 30, le récit du couronnement de l'empereur Tibère). Il en est de même de Fortunat, dont les pièces sont pleines d'allusions au sénat de Rome et a l'Empire, et où l'on rencontre les noms de Scipion, de Caton, de Pompée, etc. (FORTUNATI, Carm., I, 15. IV, 10. VII, 7. Vita. S. Martini, I, 71). Il va de soi que, pour Grégoire de Tours, la première qualité de l'empereur est d'être chrétien (Hist. eccl., IV, 40, V, 19). — L'expression respublica est courante aussi dans la Chronique espagnole de JEAN DE BICLARO (ann. 563, 573, 574, etc.).

[115] Lettre de Damien, évêque de Pavie, à l'empereur Constantin. MIGNE, P. L., LXXXVII, col. 1262.

[116] Deposita regia majestate (L. P., Leo, 3). Cf. HÉFÉLÉ, Histoire des Conciles (trad. Delarc), t. I, p. 33-31, t. III, p. 151.

[117] L'importance prépondérante accordée par l'Église aux décrets du concile de Chalcédoine, résulte avec évidence de la lecture du Liber pontificalis et des lettres des papes du VIe et du VIIe siècle. A chaque instant, les souverains pontifes rappellent le rôle joué par Marcien et le citent comme modèle aux empereurs. (MIGNE, P. L., t. LVIII, lettres des successeurs de saint Léon : Hilaire, Simplicius et Félix ; — t. LXXXVII, lettres d'Agathon, sous lequel se tint à Constantinople le grand synode de 680 qui condamna le monothélisme ; JAFFÉ, Reg., n° 491, 40, 517, 520, 521, 524, 573, 591, 819, 2042, etc.).

[118] Lettre du pape Honorius Ier au sous-diacre Georges (MIGNE, P. L., t. LXXX, col. 478). — Vita Bonifatii, 30. — Voir surtout les deux lettres, relatives au monothélisme, d'Agathon et de Damien, évêque de Pavie (MIGNE, P. L., t. LXXXVII, col. 1225 et 1261-68), où sont résumés les services que Constantin, Théodose, Marcien, et aussi Justinien, ont rendus à l'orthodoxie. — Constantin et Théodose se trouvent déjà réunis dans l'admiration de saint Augustin (De civ. Dei., V, 25-26, dans MIGNE, P. L., XLI, p. 171).

[119] Constantinus imperator est creatus, primus imperatorum Christianum excepto Philippo (OROSE, VII, 29). Telle est la formule courante désormais, que l'on rencontre en Occident avec quelques variantes. Ainsi, dans l'Origo Constantini imperatoris, de l'Anonyme de Valois : Constantinus imperator primus Christianus excepto Philippo (Chronica minora, p. 10).

[120] GREG. MAGN., Epist., V, 40. Grégoire le Grand a contribué puissamment à répandre la gloire de Constantin dans toute la chrétienté, par ses lettres on il le citait comme modèle aux empereurs, aux rois francs, aux princes anglo-saxons ; le souvenir d'Hélène y était mêlé à celui de son fils (GREG. MAGN., Epist., V, 40, XI, 29, 66).

[121] Vita Silvestri, II (L. P., t. I, p, 170). C'est dans la Vita Silvestri que la légende du baptême de Constantin par le pape Silvestre apparaît pour la première fois, vers 530 (Abbé DUCHESNE, Introd. au Liber pontificalis, t. I, p. cix, sq. — GRAF, o. c., t. I, p. 86).

[122] POLEMII SILVII, Breviarium temporum. Chron. minora, p. 547.

[123] C'est ce que l'abbé DUCHESNE a établi dans son Introduction au Liber pontificalis, t. I, p. CXVII-CXX. Cf. DÖLLINGER, Die Papst-fabeln des Mittelalters, p. 61 sq.

[124] GREG. TUR., Hist. eccl., I, 36. — ALDEHELM, De laudibus virginitatis, XXV. — BÈDE, Chron. (MIGNE, P. L., t. XI, col. 536). — La légende revint en Orient, où on la rencontre dans THÉOPHANE, Chronog., p. 17 (éd. de Boor), mais elle se maintint en Occident, et l'un des grands écrivains de l'époque carolingienne, Agobard, cite la Vita Silvestri comme un document connu (AGOBARD, Liber de imaginibus sanctorum, XXII, dans MIGNE, P. L., CIV, col. 217. — GRAF, o. c., t. II, p. 85-98. — DUCHESNE, Introd. au Liber pontificalis, t. I, p. CXV).

[125] Chronica gallica, p. 629. Cf. OROSE, VII, 33.

[126] JOANNIS BICLAR, Chron, ann. 590 (Chronica minora, p. 219).

[127] Sur la popularité de Trajan en Occident, les textes principaux sont : SID. APOLL., Panegyr. Avilo dictus, vers 116 sq. ; FORTUNATI CARM., Préf. du l. X ; ANONYMUS VALESIANUS, 60. — Cf. GASTON PARIS, La Légende de Trajan (Bibl. École des Hautes-Études, fasc. XXXV, ann. 1878) et GRAF, o. c., t. II, p. 1-45.

[128] POLEMIUS SILVIUS, Nomina omnium principum romanorum. Chron. minora, p. 522. — VICTOR VITENSIS, Hist. persec. wandal., IV, 1. — BONIFATII, Epist., 33).