LA MARINE DES ANCIENS - LA REVANCHE DES PERSES

 

CHAPITRE IV. — LE COMBAT DE CYNOSSÉMA.

 

 

Athènes possédait de nouveau le gouvernement qui lui était cher ; seulement le siège de ce gouvernement était bien plutôt dans le camp de Samos que sur la colline du Pnyx. On ne peut nier qu’il n’y eût quelque avantage à ce qu’il en fût ainsi. Tout ce qui avait quelque vigueur de corps ou d’esprit était, à cette époque, aux armées. Il ne restait dans la ville que de braves officiers hors d’âge, des tallophores, dont la principale fonction était de porter des branches d’olivier dans les grandes panathénées, et l’occupation favorite de critiquer les opérations de leurs successeurs. A côté de cette vieillesse chagrine, venaient se ranger les pêcheurs d’anguilles, ceux qui font métier d’agiter la vase en tous sens, pour que la pèche soit bonne, les juges, — on comptait cinq mille citoyens employés à rendre des arrêts dans Athènes, — les juges, toujours prêts à venir toucher leurs trois oboles et n’ayant que trop d’occasions de les mériter, car les Athéniens étaient aussi friands de procès que l’ont été jadis les Normands. Quand je t’assigne ou quand tu m’assignes, disaient autrefois les compatriotes de Rollon, ça me joue du violon dans le cœur. Ces divers éléments réunis constituaient le peuple ; les rameurs, les pilotes, les triérarques, les hoplites constituaient l’armée. Les soldats ne montraient pas toujours beaucoup plus de bon sens que les habitués du Pnyx ; ils comprenaient du moins la nécessité d’obéir quand apparaissait à l’horizon le Spartiate barbu, de lever les rames quand le céleuste criait : Hop ! de replonger l’aviron dans l’eau quand il commandait : Hippapé ! Il y avait, en un mot, certaines habitudes invétérées de discipline dans cette foule démocratique. Que le sort y vînt joindre le surcroît d’autorité que donne aux chefs heureux l’ascendant de la victoire, et Athènes peut-être était sauvée.

Amnistié sur le Pnyx, acclamé à Samos, Alcibiade ne songeait pas encore à conduire à l’ennemi la flotte qui s’était jetée dans ses bras. Sa grande préoccupation n’était pas de rencontrer les Lacédémoniens ; il tenait surtout à retrouver Tissapherne. Avec treize vaisseaux, il se mit sur-le-champ à la recherche du satrape ; il courût au delà de Caunes, il dépassa même Phasélis, dans le golfe de Pamphylie. Je veux, dit-il aux Athéniens, ramener la flotte phénicienne d’Aspendos. Cherchez, si vous avez par hasard sous la main la carte du dépôt de la marine, Manavgat, sur la côte orientale du golfe moderne de Satalie : c’est là que vous rencontrerez l’emplacement d’Aspendos et l’antique embouchure de l’Eurymédon. La flotte phénicienne se composait de cent quarante-sept vaisseaux ; les matelots athéniens n’étaient pas destinés à la voir. Autant aurait valu pour eux courir après le Voltigeur hollandais. Pendant cette poursuite vaine à laquelle s’acharnait le fils de Clinias, sans qu’on en puisse exactement découvrir les motifs, Thrasybule et Thrasylle ne perdaient pas leur temps ; ils gagnaient sur les Lacédémoniens la bataille de Cynosséma.

Si l’on veut bien comprendre l’importance de cette grande journée, qui fut pour la république athénienne, alors aux abois ; ce que fut pour la nôtre la victoire de Zurich, il est nécessaire de remonter un peu le cours des événements et de se reporter de l’année 411 à l’année 412 avant Jésus-Christ, des troubles de Samos au combat de Symé. Les Lacédémoniens, on s’en souvient peut-être, avaient, devant. Symé, capturé’ six vaisseaux athéniens. Bien qu’ils n’eussent pas réussi, après ce combat, à s’entendre avec Tissapherne, ils n’en restaient pas moins les maîtres incontestés de là mer sur la côte de Lycie ; les Athéniens demeuraient concentrés entre Chio et, Samos. Astyochos profita de sa prépondérance pour détacher Rhodes de la cause d’Athènes. Il se porta vers cette : Île à la tête de toute sa flotte, obtint dés Rhodiens un subside de 132.000 francs, tira ses vaisseaux à terre et se tint en repos durant quatre-vingts jours. Tissapherne n’avait pas obtenu des Athéniens ce que s’obstinaient à lui refuser les délégués de Sparte ; il jugea prudent de renouer ses relations avec Astyochos. A court d’argent, les Péloponnésiens accueillirent sans difficulté ses ouvertures, conclurent avec lui un nouveau traité et se portèrent, dès les premiers jours du printemps, de Rhodes à Milet. Ce mouvement les rapprochait de la flotte athénienne et devait amener, pour peu que les deux adversaires s’y prêtassent, une action décisive.

Les Lacédémoniens étaient un peuple lent, sans vivacité dans ses entreprises. Ils mettaient généralement peu d’ardeur à poursuivre leurs avantages, mais ils avaient alors pour alliés les Syracusains ; et nul peuple n’offrit plus de ressemblance avec les citoyens d’Athènes que le peuplé qui Nabi tait Syracuse. Ces auxiliaires entraînèrent Astyochos à chercher l’occasion de livrer un combat naval. Astyochos réunissait alors sous ses ordres cent douze vaisseaux ; la flotte athénienne rassemblée à Samos n’en comptait plus que quatre-vingt-deux, car un des généraux, Strombichidès, venait d’eue détaché dans l’Hellespont avec vingt-quatre trières montées en partie par des hoplites. Le Spartiate Dercyllidas, à la tête d’une armée de terre peu nombreuse, s’était chargé d’accomplir la tâche pour l’achèvement de laquelle Pharnabaze attendait depuis six mois l’arrivée de l’escadre d’Antisthène ; il avait insurgé Abydos et Lampsaque. Strombichidès partait avec la mission de ramener sous le joug ces deux villes qui commandaient l’entrée de la Propontide et, par conséquent, celle du Pont-Euxin. Le général athénien réussit sans peine à Lampsaque ; Abydos lui ferma ses portes. Il se disposait à en faire le siège quand l’ordre lui parvint de rentrer immédiatement à Samos. Le retour de Strombichidès rétablit l’équilibre des forces, et les Athéniens purent aller à leur tour défier les Péloponnésiennes sur la rade de Milet. Deux flottes considérables, dont l’entretien épuisait les ressources des deux belligérants, se neutralisèrent ainsi sans profit pendant près d’une année.

Mécontents de Tissapherne, qui mettait peu d’exactitude d’ans ses payements, les. Lacédémoniens songèrent de nouveau à s’adresser à Pharnabaze. Ils lui expédièrent de Milet quarante vaisseaux dont ils confièrent la conduite à Cléarque, fils de Ramphias. Pour mieux dérober leur marche aux Athéniens, ces vaisseaux voulurent prendre la route du large. La tempête, — tout vent contraire était tenu pour tempête à cette époque, — les dispersa. Dix vaisseaux commandés par Hélixos de Mégare réussirent seuls à gagner l’Hellespont ; les autres avec Marque se crurent trop heureux de pouvoir revenir à Milet, après avoir relâché à Délos. Les vaisseaux d’Hélixos, trouvant l’Hellespont libre, entrèrent dans la Propontide et allèrent insurger Byzance. C’était le moment où’ l’on s’occupait de politique à Samos ; la surveillance de l’Hellespont devait naturellement en souffrir. Il est vrai qu’on n’était guère plus discipliné à Milet. Les matelots de Syracuse et de Thurium avaient apporté dans la flotte à laquelle ils étaient associés les allures qui préparaient si bien, par-le désordre, la Sicile à l’avènement de la tyrannie. Ces turbulents alliés, moins patients que les Corinthiens et les Spartiates, prétendaient ne souffrir aucun retardement dans le payement de leur solde. Astyochos n’était pas habitué à Subir de pareilles exigences ; les doléances, séditieuses apportées devant lui n’obtinrent de sa part qu’une réponse hautaine. Un dés triérarques, Doriée, — c’était un Rhodien, — voulut insister ; Astyochos leva sur le capitaine de Rhodes son bâton. Toute la masse des soldats se sentit atteinte par cette offense. Une clameur effroyable s’élève ; si Astyochos n’eût couru embrasser l’autel dressé au milieu da camp, c’en était fait de sa vie. Heureux temps que celui où dés soldats rebelles respectaient au moins la majesté des dieux ! Le général ne fut pas même blessé ; son commandement n’en était pas moins devenu impossible. En ce moment, par une coïncidence des plus favorables, un autre navarque, Mindaros, arrivait du Péloponnèse. Astyochos lui remit avec joie ses pouvoirs et s’embarqua pour aller apprendre à Sparte de quelle façon les alliés qui la secondaient entendaient l’obéissance militaire.

Les généraux de’ Sparte ne convenaient en réalité qu’à une armée de Spartiates ; le peu de soin qu’ils prenaient de leur personne rendait plus choquante encore la brusquerie de leurs manières ; mais il fallait se venger d’Athènes, et les Syracusains eux-mêmes prirent le parti de faire pour quelque temps crédit à Mindaros. Le successeur d’Astyochos n’en comprit que mieux la nécessité de se porter le plus promptement possible au-devant des subsides que lui promettait Pharnabaze. Il donna brusquement l’ordre du départ. Une tempête le jeta sur file de Nicarie. La flotte s’y arrêta cinq jours et passa de Nicarie à Chio ; de Chio, rangeant de près tout le continent, elle finit par atteindre le promontoire Sigée. Que faisaient donc pendant cette traversée si longue Thrasybule et Thrasylle ? Le gouvernement des quatre cents ne leur causait plus d’inquiétude ; ils étaient libres de donner tous leurs soins à la guerre, et leur premier devoir consistait à garder l’entrée de l’Hellespont. S’ils étaient restés à Samos, on eût pu croire qu’ils y attendaient Alcibiade et la flotte phénicienne ; mais non ! Thrasybule et Thrasylle s’étaient portés avec soixante-sept vaisseaux de Samos à Méthymne, au nord de Lesbos, et Mindaros, venant de Milet, ayant par conséquent plus de cent quatre-vingts milles à parcourir pour suivre tous les détours de la côte, leur avait glissé entre les mains. Il n’existait point en ce temps de lunettes d’approche ; on y suppléait en employant les vues les plus perçantes. Chaque armée navale possédait ses vigies attitrées qu’elle plaçait sur les sommets des îles pour découvrir ce qui se passait au large. Des feux allumés sur ces éminences transmettaient de cap en cap, le jour par leur fumée, la nuit par leur flamme, les avis que les généraux étaient intéressés à recevoir. Thrasybule et Thrasylle n’avaient pas laissé les sommets de Lesbos dégarnis, et pourtant Mindaros venait de tromper leur surveillance. La Paralos et la Salaminienne les auraient mieux servis ; malheureusement le gouvernement des quatre cents s’était cru obligé de désorganiser l’équipage de la Paralos, et, quant à la Salaminienne, on lui trouva sans doute une autre destination. Deux yachts, c’était trop peu pour la marine athénienne.

Quand j’avais l’honneur de commander l’escadre de la Méditerranée, je demandais, dans un de mes rapports d’inspection générale, qu’il y eût toujours un éclaireur par groupe de deux vaisseaux. Le métier d’éclaireur, disais-je, est si difficile, la mission que de semblables navires remplissent est si importante qu’on ne saurait donner trop d’attention à cette partie du service. Ce sont les éclaireurs. qui déterminent les résolutions de  l’amiral ; une reconnaissance mal exécutée, une appréciation inexacte peuvent compromettre toute une escadre, faire manquer une occasion qui ne se retrouvera plus ou amener un conflit inégal. Il importe donc de former avec autant de sollicitude de jeunes capitaines d’avisos que de vieux capitaines de haut bord. Les futurs commandants des bâtiments qu’au jour du combat nous mettrons en ligne auront de cette façon l’occasion de se faire connaître et de prendre pour ainsi dire leurs degrés.

Mal servis par leurs vigies, dépourvus d’éclaireurs, les généraux de la flotte athénienne laissèrent passer la flotte du Péloponnèse sans tenter aucune démonstration pour l’arrêter au passade. Mindaros allait tomber comme la foudre dans l’Hellespont. Deux escadres,’ à peu près d’égale force, s’observaient déjà dans ce détroit : une escadre athénienne de dix-huit bâtiments mouillée devant Sestos, une escadre de seize vaisseaux péloponnésiens préposée à la garde d’Abydos. Mindaros pouvait avoir quelque sujet d’espérer qu’il surprendrait les vaisseaux athéniens. Les vigies de la Chersonèse s’acquittèrent mieux de leur office que les vedettes de Lesbos. A peine les vaisseaux du Péloponnèse, profitant des premières ombres de la nuit, eurent-ils quitté le mouillage de Sigée que toute là côte se couronna de feux. Les Athéniens étaient avertis ; en un instant leurs navires furent sous voiles. L’appareillage eut lieu avec une telle célérité, dans un si remarquable silence, que les vaisseaux d’Abydos n’en soupçonnèrent rien. Moins d’un mille et demi cependant séparait alors les deux escadres. Voilà les tours de force de la discipline ! Collingwood ne se déroba pas avec plus de bonheur, pendant qu’il bloquait en 1805 la baie de Cadix, à l’escadre inattendue de Villeneuve. Les Athéniens toutefois, malgré ce premier succès, n’étaient pas encore complètement sortis du péril. Ils rasaient la côte de la Chersonèse quand le lever du jour révéla leur présence à la flotte de Mindaros. Quatre vaisseaux qui fermaient la marche tombèrent au pouvoir des Péloponnésiens : les quatorze autres purent se réfugier à Imbros et à Lemnos. Mindaros jugea inutile de prolonger la chasse ; il alla jeter l’ancre sur la rade d’Abydos. Les Péloponnésiens avaient dès ce moment quatre-vingt-dix-huit vaisseaux réunis dans l’Hellespont.

Quand Thrasybule et Thrasylle apprirent à Méthymne cette, nouvelle, ils en furent un instant atterrés. Qu’allait penser Athènes ? De quel châtiment punirait-elle cette impardonnable négligence ? Il n’y avait qu’un coup d’éclat qui pût sauver leur responsabilité compromise. Thrasybule et Thrasylle se résolurent à le tenter, sans même attendre le retour d’Alcibiade. II leur restait dans Sestos une tête de pont dont les Athéniens étaient habitués à faire usage. Ce ne fut cependant pas Sestos, trop rapproché de l’ennemi, ce fut une baie voisine que les généraux choisirent pour lieu de rendez-vous. Là se rassemblèrent peu à peu les divers détachements de la flotte athénienne. Comment Mindaros leur permit-il de s’y concentrer ? Par suite de cette inertie à laquelle on n’est que trop sujet après un premier triomphe. Bientôt les Athéniens eurent en face d’Abydos une force de soixante-seize vaisseaux, force compacte, unie, accoutumée à manœuvrer de concert et parfaitement en mesure d’offrir le combat aux quatre-vingt-dix-huit vaisseaux péloponnésiens.

On sait quelle est la violence du courant de l’Hellespont. Lord Byron, à l’exemple de Léandre, a pu traverser ce canal à la nage ; jamais escadre moderne n’a songé à Je choisir pour champ de bataille. Les trières athéniennes y devaient, au contraire, faire excellente figure ; les difficultés du terrain profitent toujours à la force la mieux exercée. Les deux flottes se rangèrent d’abord en ligne de file, l’une sur le rivage d’Europe, l’autre sur le rivage d’Asie. Les Athéniens, nous, l’avons déjà dit, avaient mouillé au-dessous de Sestos ; leur but, en se déployant, était de gagner l’appui de cette place. Il leur fallait, pour cela, doubler le promontoire de Cynosséma, dépasser, en d’autres termes, l’étranglement que commandent aujourd’hui les deux châteaux des Dardanelles. Thrasylle marchait en tête, Thrasybule le suivait. L’avant-garde athénienne venait de tourner le cap que l’armée tout entière devait doubler ; elle s’enfonçait peu à peu, longeant de près la rive, -dans la baie qui se creuse entre Cynosséma et Sestos, — nous dirions aujourd’hui entre Kilid-Bahr et Bovali-Kalessi, — quand la flotte du Péloponnèse se mit, à son tour, en mouvement. Échelonnée d’Abydos à Dardanos, — de la pointe Nagara au château d’Asie, — cette flotte avait le dessus dû courant. Il lui suffisait de se laisser emporter de biais à travers le détroit pour arriver avec la rapidité de la flèche sur l’ennemi. Quand Mindaros voit les deux portions de la flotte athénienne séparées par le promontoire qui les cache l’une à l’autre, il donne à ses vaisseaux le signal, d’attaquer. Les Syracusains contiendront Thrasylle, sans pousser cependant leur attaque à fond ; le reste de la flotte se jettera sur Thrasybule. Ce fut le centre surtout qui eut à subir l’effort de cet assaut ; l’arrière-garde athénienne, trop éloignée encore, fut négligée à dessein. En quelques minutes, les vaisseaux du centre sont poussés à la côte, contraints à s’échouer ; les équipages se précipitent en désordre sur la plage. C’est une effroyable déroute qui commence. Fier de ce premier avantage, Mindaros croit avoir facilement raison de l’arrière-garde ; mais l’arrière-garde a brusquement changé son ordre de file en ordre de front et pivote, en ce moment même, sur le vaisseau de gauche. Mindaros s’aperçoit à temps du danger qu’il court ; les Athéniens manœuvrent pour l’envelopper. Il rallie précipitamment ses vaisseaux, se reporte à toutes rames sur la côte d’Asie et ne cesse de remonter la côte que lorsqu’il se sent protégé par les remparts d’Abydos. Thrasylle n’a plus à combattre que les vaisseaux syracusains. Il marche droit sur eux par une conversion rapide et les met en fuite. Les Athéniens avaient, dans la première période du combat, perdu quinze vaisseaux ; dans la seconde ils en prirent vingt et un. Telle fut la glorieuse journée de Cynosséma. Le succès matériel était insignifiant, le succès moral fut immense. Athènes recouvrait l’ascendant perdu depuis deux ans ; la mer redevenait tout à coup son domaine.

Cyzique, dans la Propontide, s’était insurgée ; le combat de Cynosséma suffit pour la faire rentrer dans le devoir. La reprise de Cyzique termina la campagne de l’année 411. Le nouveau gouvernement s’empressa de porter à son compte un succès dont il lui était cependant difficile de s’attribuer le mérite, car le temps même lui aurait manqué pour le préparer. Les peuples n’y regardent pas généralement de si près ; la victoire remportée par les deux triérarques qui avaient le plus contribué à la chute des quatre cents affermit pour longtemps la prépondérance du parti populaire.