1815

LIVRE II. — LE GOUVERNEMENT PROVISOIRE ET LE RETOUR DU ROI

 

CHAPITRE II. — LE ROI EN FRANCE.

 

 

I

A Gand, pendant les premiers jours de la campagne des Pays-Bas, on avait passé de vilains moments. Dès le soir du 15 juin, la nouvelle que Napoléon était entré en Belgique commença d'inquiéter la petite cour émigrée. Le 17, l'inquiétude tourna en alarme. On disait les Prussiens battus et les Anglais en retraite[1]. Le duc de Berri lit prendre position en avant d'Alost au millier d'hommes dénommés Armée Royale, et lui-même accourut à Gand avec les gardes du corps et s'occupa de faire mettre la ville en état de défense[2]. Les courtisans, jugeant sans doute que ce fantôme d'armée et ce décor de fortifications seraient une protection inefficace contre les troupes de Bonaparte, engagèrent le roi à quitter Gand. Louis XVIII était plus calme, car il pensait que son bon ami Wellington le ferait avertir à temps s'il y avait danger. Il répondit aux conseils et aux prières des trembleurs : — Je n'ai rien reçu d'officiel. Je ne bougerai pas d'ici que je n'y sois forcé par les circonstances les plus impérieuses. Que ceux qui ont peur partent. Beaucoup de gens se le tinrent pour dit. Ceux qui avaient des chevaux à eux gagnèrent Nimègue. L'exode aurait été plus général si Clarke qui voulait conserver pour un départ éventuel du roi, des ministres et des différents services tous les chevaux de la poste n'avait donné l'ordre exprès de n'en laisser sortir aucun[3].

Le lendemain, on fut un peu rassuré, du moins pendant la journée, par les bulletins très optimistes répandus à Bruxelles et aux environs. A en croire ces rapports officiels, l'armée française n'avait eu qu'un succès sans importance sur les Prussiens, et, aux Quatre-Bras, les Anglais, avaient été victorieux. Si le duc de Wellington se repliait, c'était en vue d'opérer sa jonction avec le feld-maréchal Blücher[4]. Chateaubriand conte qu'il alla se promener dans la campagne, et qu'il entendit au loin, avec angoisse, le cœur déchiré par des vœux contraires, le canon de la grande bataille où le monde était jeté au sort[5]. Vers six heures du soir, la panique causée dans Bruxelles par les convois de blessés et les bandes de fuyards[6] se propagea à Gand. Les Prussiens, disait-on, ne s'étant pas trouvés en ligne, l'armée anglaise avait été exterminée, et l'empereur allait entrer à Bruxelles. A ces nouvelles, confirmées par le comte d'Artois qui avait fui Bruxelles à franc étrier tandis que le prince de Condé filait jusqu'à Anvers, on chargea dans des fourgons les diamants de la couronne, le trésor et les objets précieux emportés des Tuileries ; les voitures du roi, postillons en selle, vinrent stationner dans la cour d'honneur de l'hôtel d'Hunes. Louis XVIII hésitait encore à quitter Gand, mais il ne dissimulait plus son émotion. Il était très agité, et l'anxiété lui rendait l'usage de ses jambes. Il marchait avec agitation, s'approchait sans cesse de la fenêtre, croyant, au moindre bruit, à l'arrivée d'un courrier. Il déclara qu'il ne se coucherait pas. Toute la cour resta sur pied jusque très tard dans la nuit. Entre une heure et deux heures du matin, le roi put enfin se mettre au lit et dormir tranquille. On avait reçu une dépêche de Wellington, annonçant la destruction de l'armée française[7].

Royalistes et Gantois exultaient. Toutes les cloches et tous les carillons sonnèrent en signe de joie, la ville fut illuminée. On se serrait les mains, on s'embrassait, en criant : Vive le roi ! et en se félicitant de revoir bientôt la France. C'est une allégresse générale, écrivait le vicomte de Reiset. La joie de l'heure présente fait oublier les tristesses de la veille, et l'on ne pense plus qu'à la fin de tant de maux, sans songer combien chèrement nous avons acheté ce triomphe définitif ![8] On n'y songeait guère, en effet. Pour le plus grand nombre des émigrés, même des constitutionnels comme Beugnot, l'armée française n'avait de français que le nom[9]. Mounier écrivait de Gand que la cavalerie anglaise avait culbuté la cavalerie ennemie[10]. Louis XVIII, le lendemain de Waterloo, dit à table au maréchal Victor : — Jamais je n'ai bu au succès des alliés avant la Restauration : leur cause était juste mais j'ignorais leurs desseins sur la France. Aujourd'hui qu'ils sont les alliés de ma couronne, qu'ils combattent non des Français mais des bonapartistes, qu'ils se dévouent si noblement pour la délivrance de mon peuple, nous pouvons saluer leur victoire sans cesser d'être Français[11]. Le comte de Jaucourt, ministre par intérim des affaires étrangères, terminait en ces termes la circulaire aux ambassadeurs et ministres du roi de France où il annonçait la bataille de Waterloo : La gloire de cette heureuse journée est commune aux généraux des armées anglaise et prussienne dont les dispositions, la valeur et la coopération franche leur méritent un tribut égal d'admiration et de reconnaissance[12].

Qu'allait-t-on faire pour tirer de cette heureuse journée, selon le mot de Jaucourt, les meilleurs résultats ? Louis XVIII avait hâte de rentrer en France où il pensait avec raison que sa présence, même ù quelques lieues seulement en deçà des frontières, serait déjà une prise de possession, imposerait aux compétitions orléanistes et autres, et commanderait aux hésitations des puissances s'il s'en produisait[13]. Mais dans l'état des choses, vu le refus des souverains d'employer dans leurs armées les commissaires royaux et d'y laisser combattre les émigrés enrégimentés à Alost, et en raison des doutes, d'ailleurs mal fondés, sur les véritables dispositions des cabinets européens à l'égard de Louis XVIII[14], force était d'attendre sans bouger le bon plaisir des Alliés. Grâce à Wellington, on n'attendit pas longtemps. Sa lettre de Nivelle, invitant le roi à se rapprocher de la frontière française, parvint à Gand le 24 juin[15]. Sous la forme courtoise d'un conseil, ce n'était rien moins qu'une autorisation. Louis XVIII s'empressa d'en profiter. Le jour même, il donna les ordres de départ, et, dès le lendemain matin, il partit pour Mons, route de France[16].

Pendant le séjour à Gand, l'antagonisme entre le parti des princes et le parti des constitutionnels s'était perpétué. Ils étaient divisés sur tout, mais ils avaient une aversion commune pour M. de Blacas, ministre de la Maison du roi. Selon les monarchistes absolus, le gouvernement de Louis XVIII avait été trop modéré ; il avait été trop personnel au gré des libéraux. Royalistes de tradition et royalistes de raison ou de circonstance en accusaient également M. de Blacas et se flattaient à l'envi, les uns et les autres, que le favori éloigné ils deviendraient les maîtres de l'esprit du roi. Mans n'avait pas seulement contre lui les ultras, les modérés, les libéraux ; il avait encore le czar, Nesselrode, Pozzo, Metternich, Castlereagh, Wellington, Goltz, car on ne cessait de le leur représenter comme le principal auteur de toutes les fautes commises pendant les dix mois du règne[17]. Fort de l'opinion publique, — ce qui ne lui arrivait pas souvent — le comte d'Artois fit à Mons une suprême démarche auprès du roi pour lui exposer les raisons nécessitant le renvoi de Blacas avant de rentrer en France. Louis XVIII luttait depuis trois mois pour son favori ; il était las, il céda. Il fit appeler Blacas qui comprit et qui, en bon courtisan, offrit sa démission pour épargner à son souverain la contrariété de la lui demander. Le roi l'accepta avec attendrissement[18].

Sur l'entrefaite Talleyrand arriva à Mons. Il avait quitté Vienne à la clôture du congrès, et, croyant qu'avant les batailles décisives il aurait du temps de reste pour aller s'ennuyer à Gand, il avait voyagé à petites journées. A Bruxelles qu'encombraient les blessés de toutes les nations et où passaient de nombreux convois de prisonniers criant : Vive l'empereur ![19] il apprit avec dépit que Louis XVIII avait quitté Gand sans attendre sa personne et ses conseils. D'autant moins empressé à apporter aux pieds du roi l'hommage de son dévouement, il resta trente-six heures à Bruxelles et ne se détermina à rejoindre la cour que le 23 dans la matinée[20]. Par la route de Hal, qui était d'ailleurs la plus directe, on évitait de traverser le champ de bataille où de grands bûchers dont des paysans, une fourche à la main et un mouchoir noué sous le nez, ranimaient sans cesse l'incandescence, achevaient de consumer des milliers de cadavres[21]. Talleyrand était à Mons dès six heures du soir, mais pour bien marquer son irritation, il s'abstint de se rendre chez le roi. C'est en vain que Jaucourt, Chateaubriand, Ricé, Beugnot, accourus dans la petite maison où il avait pris gîte, l'engageaient à aller voir Louis XVIII. Il leur répondait avec le ton d'un homme sûr d'avoir son heure : — Je ne suis jamais pressé. Il sera temps demain[22].

Le roi n'était pas pressé non plus de revoir M. de Talleyrand à qui il devait beaucoup mais qui n'oubliait pas assez les grands services qu'il avait rendus. Ses airs d'omnipotence, ses propos que c'était lui qui avait fait la première restauration et que c'était encore lui qui ferait la seconde avaient blessé le roi au vif[23]. Grâce à Wellington, Louis XVIII comptait rentrer aux Tuileries sans l'aide de Talleyrand. Précisément, Clarke venait de recevoir du général anglais une nouvelle dépêche invitant le roi à passer la frontière, sa présence en France étant importante[24]. Quand Chateaubriand dit au roi que Talleyrand un peu souffrant aurait l'honneur de se présenter le lendemain, Louis XVIII répondit avec une indifférence qui n'était nullement simulée : — Comme il voudra. Je pars à six heures du matin[25].

Talleyrand n'en crut rien et se mit au lit. Mais le lendemain, de très bon matin, on vint l'avertir que les troupes du duc de Berri se mettaient en marche[26] et que les voitures royales étaient attelées. Il se vêtit à la hâte et accourut. Le roi montait en berline ; il fit pourtant l'effort de rentrer, en se traînant, dans son appartement[27], Talleyrand parla avec une certaine vivacité. — Votre Majesté, dit-il, gâte sa cause en se présentant aux Français dans les rangs des étrangers... Je conseillerai au roi de gagner par un point des frontières où les Alliés n'ont point encore pénétré quelque ville du midi et d'y établir son gouvernement. Lyon conviendrait à tous égards. Vous y ferez appel à vos fidèles sujets, vous y convoquerez les Chambres ; on aura le temps d'y faire toutes les lois organiques avant que l'esprit de parti vienne apporter des entraves. De Lyon, vous pourrez protéger la France ; de Paris, vous ne le pourrez pas. Votre Majesté ne doit rentrer dans la capitale que quand elle pourra y régner sans partage et que Paris sera également délivré des factieux et de toute force étrangère[28].

Le conseil était au moins bizarre. Toutes les frontières — Talleyrand qui était au courant des plans d'invasion ne pouvait l'ignorer — allaient être attaquées. Or, que le roi rentrât en France par le nord derrière les Anglais ou par le sud-est derrière les Autrichiens, il n'y rentrerait pas moins à la suite des étrangers victorieux. Lyon où s'agitaient les fédérés et où le drapeau blanc n'allait être arboré (au milieu de quelles colères !) que huit jours après le retour de Louis XVIII aux Tuileries, était très mal choisi pour y établir le gouvernement royal. Très vraisemblablement, le roi n'aurait pu y pénétrer, et s'il l'avait fait il aurait couru grand risque d'y être écharpé avec ses mousquetaires et ses gantes du corps. Enfin, si Louis XVIII, pendant de trop longs mois, allait se trouver, même régnant à Paris, presque dénué de pouvoir, encore moins en aurait-il eu dans la position d'un roi de Bourges.

Guidé par un instinct très supérieur aux raisonnements de Talleyrand, Louis XVIII était ardemment déterminé à rentrer à Paris le plus tôt possible, d'une façon ou d'une autre. Il fit sentir à son ministre que le conseil n'était pas de son goût. Talleyrand essaya de l'intimidation : — Si Votre Majesté, persistait dans ses projets, il me serait impossible de continuer à diriger ses affaires et je demanderais la permission d'aller aux eaux de Carlsbad. — Ces eaux sont excellentes, dit tranquillement le roi ; elles vous feront du bien. Vous nous donnerez de vos nouvelles. Et il regagna sa voiture accompagné jusqu'au bas du perron par le prince de Talleyrand ébahi, muet, étouffant de colère[29].

 

II

Presque tous les ministres, même Chateaubriand, restèrent à Mons avec Talleyrand. Quelques-uns partageaient son irritation, d'autres s'en amusaient un peu ; mais tous regardaient sa retraite en une pareille occurrence comme déplorable et dangereuse. Le parti des princes triomphait. Le roi partait avec Dambray et Clarke qui dans le cabinet personnifiaient l'esprit de réaction. Il ne manquerait pas de candidats parmi les familiers du comte d'Artois pour former un nouveau ministère peu enclin aux principes constitutionnels. On allait représenter au roi que la nation ayant rompu le pacte qui l'unissait à lui, il devait profiter de cette circonstance pour prendre l'autorité tout entière et l'exercer selon son bon plaisir[30].

Après avoir passé la frontière près de Bavay, le roi arriva dans la soirée à Cateau-Cambrésis. Depuis l'avant-veille, 22 juin, Wellington y avait établi son quartier-général[31]. Il attendait Louis XVIII, mais il attendait aussi Talleyrand[32]. A ses yeux, l'un complétait l'autre. Instruit de la scène qui avait eu lieu à Mons, il parla le soir même au roi et obtint sans peine, car en bonne politique Louis XVIII ne pouvait rien lui refuser, le rappel immédiat de Talleyrand. Pour sauver l'amour-propre royal, le chancelier Dambray adressa à tous les ministres une brève circulaire portant simplement qu'il y aurait un jour très prochain conseil du roi à Cambrai. Si sec que fût l'avis, il aurait déterminé Talleyrand qui enrageait de s'être conduit, lui, prince de Talleyrand, comme un sous-lieutenant mauvaise tête[33]. Au reste, pour l'affermir contre toute hésitation, Wellington avait pris soin de lui écrire aussitôt après son entretien avec Louis XVIII : J'ai regretté que Votre Altesse n'ait pas accompagné Sa Majesté. C'est moi qui ai engagé le roi à entrer en France à présent... Je me flatte que si vous eussiez connu exactement l'état des affaires quand vous avez conseillé au roi de ne pas entrer en France, vous lui eussiez donné un avis tout différent et l'eussiez accompagné... Je pense que vous n'hésiterez plus à rejoindre le roi sans aucun retard. C'est un parti que je vous supplie de prendre, vous et les autres membres du conseil du roi. Talleyrand répondit sur-le-champ qu'il partirait le lendemain pour rejoindre le roi à Cambrai[34].

Les Anglais venaient de prendre cette ville presque sans coup férir, grâce à la connivence des royalistes. Le 23 juin, Wellington sachant la place abandonnée par une partie des gardes nationales actives[35] avait fait sommer le gouverneur de capituler sous la seule condition que les officiers et soldats passeraient au service de Sa Majesté le Roi de France ; si cette proposition était refusée, la ville serait traitée avec toutes les rigueurs de la guerre[36]. Malgré ses pauvres moyens de défense — une artillerie insuffisante, quelques centaines de gardes nationaux mobilisés, une compagnie de canonniers et la garde nationale sédentaire sur laquelle, on ne pouvait pas compter —, le gouverneur, fidèle à son devoir, éconduisit le parlementaire. Le lendemain, la division Colville et la brigade Grant prirent position devant la place, au grand plaisir de la belle société royaliste, hommes et femmes, accourue sur les courtines pour voir le siège. La place tira quelques coups de canon ; les Anglais ne ripostaient pas, voulant sans doute rendre au roi sa ville en bon état et espérant intimider le gouverneur par le seul déploiement de leurs forces. Vers cinq heures du soir, ils se décidèrent pourtant à lancer quelques obus. Curieux et curieuses déguerpirent avec plus de peur que de mal. Tout à coup, un tourbillon de flammes s'éleva du côté de la citadelle, menaçant de dévorer toute la ville. Ce n'était qu'une meule de foin qui brûlait dans un fossé, mais cet incendie dont on ignorait la cause provoqua l'épouvante, la colère et l'émeute. Les royalistes, poissardes et femmes du bas peuple en tête, se portèrent devant l'hôtel du gouverneur, vociférant : Vive le roi ! cassant les vitres et demandant la reddition. On entendit des coups de feu. Les mobilisés tiraillaient coutre les Anglais dont les colonnes d'assaut approchaient avec des échelles. La foule se rua sur les remparts, les femmes bousculèrent les soldats, les empêchèrent de faire feu, aidèrent à l'escalade des Anglais. En même temps, une autre bande de royalistes baissa les ponts-levis. Les Anglais entrèrent en triomphe ; on les embrassa, on les fit boire aux cris de Vive le roi ! Le matin du 25 juin, la citadelle où s'était réfugié le gouverneur avec cent cinquante hommes capitula et fut remise au nom de Louis XVIII à la garde nationale urbaine[37].

L'accueil fraternel fait aux Anglais par les Cambrésiens présageait la réception enthousiaste et pompeuse qui attendait Louis XVIII. Il entra le 26 juin, au carillon des cloches et au son du canon, avec sa cour, sa Maison militaire et son armée. Un arc de triomphe s'élevait à la porte Notre-Dame, les maisons étaient pavoisées, les rues jonchées de fleurs. Le conseil municipal, le tribunal, l'état-major de la garde urbaine haranguèrent le roi ; cent jeunes filles vêtues de blanc chantèrent un chœur en son honneur ; des députations de dix-huit villages voisins, portant des branches vertes et groupées sous des croix de procession et des bannières frangées d'or défilèrent devant lui. C'était à qui abandonnerait sa demeure pour l'offrir au monarque, au comte d'Artois, au duc de Berri, au chancelier Dambray, à la duchesse de Lévis, à la duchesse de Duras, à la vicomtesse de Chateaubriand. Les aubergistes ne voulaient pas accepter d'argent. Une brave femme dit : — Je suis royaliste au point que quelquefois je me regarde de travers pour n'avoir pas su me faire guillotiner pour nos rois ![38]

La journée du lendemain fut moins agréable au roi et aux princes. Talleyrand était arrivé de Mons, daignant oublier comme un mauvais rêve la scène qui s'y était passée, mais bien résolu à imposer ses vues sauf en ce qui pourrait traverser les plans de Wellington[39]. A Cateau-Cambrésis, Dambray avait rédigé et fait signer à Louis XVIII une proclamation très brève où le roi déclarait rentrer dans ses Etats pour rétablir la constitution qu'il avait donnée, réparer les maux de la révolte et de la guerre, récompenser les bons et mettre en exécution les lois existantes contre les coupables[40]. Cette proclamation n'était pas du goût de Talleyrand[41], d'abord parce qu'il ne la jugeait pas assez explicite sur les garanties constitutionnelles ; ensuite et surtout parce qu'elle était contresignée par le duc de Feltre au lieu de l'être par lui. Il chargea Beugnot de préparer une déclaration qui dans sa pensée annulerait et remplacerait la précédente. Le roi devrait y reconnaître qu'il avait commis des fautes, s'engager à constituer un ministère solidaire, enfin rassurer les acquéreurs de biens nationaux[42].

Ce nouveau manifeste, rédigé dans la nuit, fut soumis le matin à Talleyrand et à ses collègues qui le trouvant d'une forme trop modérée le modifièrent de la façon la plus blessante pour Louis XVIII. Talleyrand le présenta à onze heures au conseil du roi. La lecture achevée et le roi gardant un silence résigné, le comte d'Artois protesta contre des expressions qui avilissaient la royauté. Talleyrand répondit : — Je trouve ces expressions nécessaires, partant bien placées. Le roi a commis des fautes, ses affections l'ont égaré.... — Est-ce moi, interrompit le comte d'Artois, que l'on veut indirectement désigner ?Oui. Monsieur a fait beaucoup de mal. — Le prince de Talleyrand s'oublie !Je le crains, mais la vérité m'y force. A ces mots, le duc de Berri s'écria avec colère : — Il ne faut rien moins que la présence du roi pour que je permette à qui que ce soit de traiter ainsi mon père devant moi. Je voudrais bien savoir....  Avec le tempérament sanguin et colère du duc de Berri on pouvait toujours craindre que les choses n'allassent loin. Le roi se hâta d'intervenir : — Assez ! mon neveu. C'est à moi seul de faire justice de ce qui se dit en ma présence et dans mon conseil. Messieurs, je ne peux approuver ni les ternies de la proclamation ni la discussion dont elle a été le sujet. Le rédacteur retouchera son œuvre en ne perdant pas de vue les hautes convenances qu'il faut garder en me faisant parler[43].

Le roi semblait concéder l'esprit du manifeste ; il n'en blâmait que la forme. Beugnot amenda sa rédaction, et Talleyrand, après deux entretiens assez laborieux avec Louis XVIII, obtint la signature royale. La proclamation fut publiée le 28 juin, à la grande colère des princes et de leurs entours niais au très vif contentement des modérés. Elle eut aussi l'approbation de Wellington, de Pozzo, de Nesselrode, des cabinets et des souverains étrangers qui, à tort ou à raison, regardaient tous la pratique du régime constitutionnel en France comme une garantie contre la renaissance de l'esprit révolutionnaire[44].

De même que la proclamation de Cateau-Cambrésis, la proclamation de Cambrai était menaçante pour les bonapartistes. Politique trop avisé pour être vindicatif, Talleyrand aurait sans doute incliné à une amnistie générale qui en rassurant les membres du gouvernement provisoire et des Chambres et les chefs de l'armée eût facilité une seconde restauration. Mais les royalistes réclamaient des châtiments avec l'ardeur de créanciers affamés. En dédommagement de la direction des affaires que Talleyrand venait de leur arracher, il lui fallait bien leur donner cette petite satisfaction. D'un autre côté, la proclamation de Cateau-Cambrésis qui portait : Nous mettrons en exécution les lois contre les coupables, menaçait dix mille, vingt mille, cinquante mille Français. Tous les citoyens qui avaient servi le gouvernement usurpateur, tous les officiers qui avaient combattu dans les armées en rébellion pouvaient être recherchés. En de pareilles conditions, comment négocier avec Paris où tous ceux qui détenaient le pouvoir se sentaient dangereusement compromis[45]. Déjà des émissaires de Fouché et de Davout, le conseiller Gaillard et Archambaut de Périgord, étaient arrivés à Cambrai y apportant, avec de vagues propositions, des demandes formelles de sûreté[46]. Talleyrand fit modifier ainsi le texte de la première déclaration : J'aperçois beaucoup de sujets égarés et quelques coupables. Je promets, moi qui n'ai jamais promis en vain, de pardonner aux Français égarés tout ce qui s'est passé depuis le jour où j'ai quitté Lille au milieu de tant de larmes jusqu'au jour où je suis entré dans Cambrai au milieu de tant d'enthousiasme. Mais le sang de mes enfants a coulé par une trahison dont les annales du monde n'offrent pas d'exemple. Je dois donc excepter du pardon les instigateurs et les auteurs de cette trame horrible. Ils seront désignés à la vengeance des lois par les deux Chambres que je me propose de rassembler incessamment[47].

Cette distinction entre les coupables, instigateurs ou prétendus tels de la révolution du 20 mars, et les égarés qui l'avaient acceptée, laissait aux royalistes une abondante moisson de vengeances tout en tranquillisant la foule des gens restés ou entrés en fonctions postérieurement au départ du roi pour l'étranger. De plus, en faisant dire à Louis XVIII que les coupables seraient désignés par les Chambres, Talleyrand espérait le décharger d'une sanglante responsabilité qui retomberait tout entière sur le parlement, être collectif et passager. — Il ne faut pas, disait-il, que le roi frappe lui-même. Il faut qu'il laisse frapper les Chambres[48].

 

III

Dans le Nord, le Pas-de-Calais, la Somme, on était en majorité royaliste. L'invasion anglaise, la présence du roi à Cambrai firent déclarer les populations. Dès le 23 juin, les meneurs s'agitent à Lille, à Armentières, à Hesdin, à Dunkerque, à Calais, à Arras, à Douai, à Cassel, à Boulogne, à Bapaume. Ils annoncent la destruction de l'armée, l'arrivée des Anglais, le retour du roi, la paix ; ils excitent le peuple à la révolte, la troupe à la désertion. A Lille, en un seul jour, il y a 1.645 déserteurs dans cinq bataillons de mobilisés du Nord et de la Somme d'un effectif total de 2.476 hommes. Les désertions ne sont guère moins nombreuses à Dunkerque où les habitants menacent d'exterminer la garnison[49]. Le colonel comte du Bourg, parti de Cambrai avec quinze gardes du corps, est accueilli à Bapaume par les Vive le roi ! de la garde nationale et de cinq ou six mille paysans. Il suffit d'un petit détachement de l'armée royale pour insurger Amis et contraindre le gouverneur, les canonniers, les mobilisés à se retirer dans la citadelle. Après quelques heures de bombardement, le commandant du Quesnoy s'engage à capituler sous la condition pie les assiégeants lui donneront la preuve certaine de l'entrée du roi dans Cambrai. A Péronne, le maire révoqué, un avocat du nom de Hiver, reprend ses fonctions aux premiers obus tombés dans la ville et rédige cet arrêté : Art. Ier. Il est enjoint au commandant des troupes de faire cesser le feu et de demander une capitulation. Art. II. Il est défendu à la garde nationale de se prêter à aucune hostilité contre les Alliés de S. M. le Roi de France. Le gouverneur n'obtempérant pas assez vite, Hiver déploie le drapeau blanc, ameute la foule, la conduit par les remparts, la jette au dos des canonniers et impose finalement la capitulation[50]. Sans doute, à Lille, à Landrecies où le major Plaige répond au général Prussien : Je suis trop jaloux de mériter votre estime pour accéder à vos propositions, à Douai où le général Lahure écrit au maire : Je vous renvoie votre lettre sans la décacheter, sachant trop bien ce qu'elle peut contenir[51], à Valenciennes, à Calais, à Aire, à Dunkerque, à Maubeuge, dans d'autres places encore, les gouverneurs contiennent la population et résistent aux sommations comme aux assauts de l'ennemi. Mais tout alentour les drapeaux blancs flottent aux clochers des villages. Des bandes de paysans armés dont les principales obéissent au transfuge Bourmont, nommé par le roi gouverneur de la 16e division militaire, et au réfractaire Louis Fruchard, dit Louis XVII, un chouan artésien redoutable aux gendarmes, battent l'estrade, arrêtent les diligences et pillent les caisses publiques pour la bonne cause[52]. Vers Paris, l'esprit change. A Senlis, les habitants saluent une colonne anglaise de quelques cris de Vive le roi ! Mais le capitaine Mercer, du Royal horse Artillery, s'étant amusé à crier : Vive l'empereur ! ils répètent tous ce cri avec enthousiasme, ravis, dit Mercier, de pouvoir exprimer leurs vrais sentiments. — Partout jusqu'à Paris, ajoute l'officier anglais, j'ai noté ce même esprit. Les paysans ne se lassaient pas de nous exprimer leur amour pour Napoléon et leur haine pour les Bourbons[53].

La Normandie souhaite la paix et le roi, mais pour que le royalisme triomphe comme dans le nord, il manque l'aide des armées étrangères. La population est bien disposée et prête à se soulever, écrit le duc de Castries ; elle est malheureusement contenue par les compagnies de bandits[54]. (Ces bandits sont des soldats français formés en colonnes mobiles.) L'agitation qui règne à Rouen où les habitants se provoquent dans les rues par des Vive le roi ! et des Vive l'empereur ! à Dieppe et à Lisieux où l'on apprend l'abdication avec des transports de joie, à Falaise où l'on brise les bustes de Napoléon, à Caen où couve l'insurrection, au Havre où elle éclate, contraint bientôt le général Lemarois à rappeler dans les villes ces colonnes mobiles. Les campagnes sont livrées à elles-mêmes. Les paysans tirent des coups de feu en signe d'allégresse et allument des feux de joie, les maires font remplacer les drapeaux tricolores par les drapeaux blancs, les prêtres chantent le Domine, salvum fac regem[55].

En Bretagne, dans les villes, le bonapartisme domine. A Rennes, le 24 juin, on refuse de croire à l'abdication. On dit que c'est une fausse dépêche ; les fédérés lacèrent, en criant : Vive l'empereur ! les affiches où elle est annoncée. On prend à l'Hôtel de Ville le buste de Napoléon et on le place sur une sorte d'autel de feuillage que chaque jour soldats, gardes nationaux, fédérés, tanneurs de la Vilaine, ornent de lieurs fraîches ; la nuit, l'autel est illuminé. A Brest, les dépêches de Paris sont accueillies avec la même incrédulité, avec les mêmes colères. On accuse le général Brenier, la foule en tumulte l'entoure, le somme de crier : Vive l'empereur ! Il répond : Vive la France ! Vive le gouvernement ! Des sabres et des bâtons se lèvent autour de lui, il se décide au vivat exigé. A Saint-Malo, à Quimper, à Saint-Brieuc, des colonnes de populaire parcourent les rues en criant : Vive l'empereur ! Dans quelques communes, les royalistes excitent sans grand succès les paysans à se soulever, mais dans les villes ils ne bougent point. Ils sont peu redoutables, conclut un rapport général à la Commission de gouvernement ; ce sont eux qui ont à redouter les colères des fédérés[56].

Pendant la courte campagne des Pays-Bas, les Vendéens et les chouans du Morbihan avaient repris les armes. Le 17 juin, trois corps de l'armée vendéenne, au total 8.000 hommes, se trouvaient rassemblés à environ deux lieues les uns des autres autour de la Roche-Servière (entre Machecoul et Napoléon-Vendée.) Le but de ce mouvement était de fermer à Travot l'accès du Marais où les Anglais allaient débarquer des armes et des munitions[57]. Mais en même temps, que la division Travot, Lamarque s'avançait avec la division Brayer, 300 dragons et les compagnies de gendarmes. Comme toujours, les chefs vendéens agirent sans ensemble et au mépris des ordres généraux. Dans la matinée du 20 juin, les corps de Saint-Hubert et de Suzannet, marchant en deux échelons très éloignés, furent tour à tour attaqués et dispersés[58]. D'Autichamp qui s'était porté à la Roche-Servière, comptant y être soutenu sur son flanc par ces deux généraux, s'y trouva seul devant toutes les forces de Lamarque. Sa position, couverte par une petite rivière encaissée, était presque inabordable de front. Lamarque la lit tourner grâce à des gués qui existaient en amont et en aval. Les soldats, exaltés, dit Lamarque, par la dépêche annonçant la victoire de Ligny chargèrent à la baïonnette avec un entrain furieux. Après une courte résistance, qui fut vaillante sur quelques points, les Vendéens s'enfuirent laissant dans les rues et dans les champs un millier de cadavres et de blessés[59]. Le même jour, 20 juin, le général Bigarré, avec trois bataillons d'infanterie et une compagnie de fédérés de Bennes, battit à plate couture dans la lande d'Auray les 5.000 chouans de Sol de Grisolles[60], et le général Delaage chassa de Thouars où ils étaient entrés le matin les Vendéens de Dupérat[61].

Lamarque détestait cette guerre fratricide. Nous nous sommes battus hier, écrivait-il le 19 juin, nous nous sommes battus ce matin, nous nous battrons demain ; mais c'est toujours contre des Français, et mon cœur saigne[62]. Il avait la victoire, mais il voulait la paix. Le soir du combat de la Roche-Servière, il écrivit aux généraux vendéens pour leur offrir un traité aux conditions que le gouvernement avait déjà proposées dans le courant de mai : licenciement des paysans, amnistie pleine et entière pour les chefs, mise en liberté immédiate de tout individu qui pourrait être détenu comme fauteur ou complice de l'insurrection[63]. Lamarque terminait sa lettre en garantissant sur sa foi militaire la nouvelle que l'empereur avait remporté le 16 juin une victoire complète sur les armées réunies de Blücher et de Wellington.

Cette grande victoire à la frontière, les défaites qu'ils avaient subies, la débandade de leurs paysans, c'étaient pour les généraux vendéens bien des raisons de traiter. Mais ils gardaient l'espoir que des revers suivraient les premiers succès de Napoléon et voulaient rester libres d'agir selon les événements. Ils cherchèrent à traîner les négociations. Las de leurs vagues promesses et de leurs réponses dilatoires, Lamarque les menaça d'une poursuite sans merci. Le 24 juin, les principaux chefs réunis en conseil de guerre décidèrent par vingt-deux voix contre douze qu'il fallait accéder aux propositions de Lamarque. Le traité de pacification fut signé le 26 juin à Cholet[64]. Quelques dissidents restèrent sous les armes, d'Ambrugeac dans le Maine, Coislin dans la Loire-Inférieure, Dulandrau dans le Bocage, Sol de Grisolles et Cadoudal dans le Morbihan[65].

 

IV

Les provinces de l'est demeuraient patriotes et fidèles à l'empereur. En Alsace, en Lorraine, en Franche-Comté, en Champagne, sur les confins de la Bourgogne, les paysans s'armaient, les gardes nationaux sédentaires rivalisaient de zèle, montant la garde avec des piques et des fourches à défaut de fusils. Même dans les centres bourboniens, comme Nancy et Besançon, les royalistes se tenaient tranquilles ; ils se bornaient à faire dire des neuvaines pour le prompt retour du roi et à défriper leurs cocardes blanches sans oser encore les remettre. Mais le découragement que n'avait pu causer ni la défaite de Waterloo, ni le passage des fuyards, ni l'approche de l'ennemi, l'abdication le provoqua. Au premier moment, dans les contrées qui se trouvaient sous la menace immédiate de l'invasion, on fut consterné, anéanti. Les gardes nationaux désertèrent en masse, les paysans s'enfuirent au fond des bois[66].

Dans le centre de la France, on montrait plus de calme mais, en général, autant d'affliction. Les royalistes faisaient trêve. Quelques-uns seulement s'avisèrent de manifestations prématurées. Mal leur en prit. A Montluçon, des impatients sortis de chez eux avec des tiges de lys furent contraints d'y rentrer très vite et en piteux état. A Limoges, un rassemblement séditieux fut aussitôt dispersé par les fédérés ; la gendarmerie trouva place nette. Le 25 juin, des royalistes de Dijon, croyant déjà avoir cause gagnée, s'attroupèrent aux cris de : Vive le Roi ! La populace se rua contre eux et en tua quatre. A Moulins, des soldats jetèrent hors de l'église les fidèles et le curé lui-même qui chantait le Domine, salvum fac regem. Presque partout, les partisans des Bourbons durent être protégés par les autorités. Dans l'Yonne, le Cher, l'Allier, la Haute-Loire, l'Ain, la Nièvre, ouvriers et paysans criaient vengeance et réclamaient des armes pour courir sus aux royalistes[67].

Bordeaux cachait sa joie, car la fermeté de Clausel et l'attitude menaçante de la garnison imposaient. Devant chaque poste, des cartouches furent ostensiblement distribuées à la garde montante. Le 26 juin, quelques timides Vive le Roi ! ayant été criés dans la foule place de la Comédie, les chasseurs à cheval chargèrent au galop, sabre en main. Le colonel Carré assembla le 66e sur le quai des Chartrons, harangua ses hommes, leur fit jurer haine aux Bourbons et leur donna l'ordre, en manière de conclusion, de tuer tout individu qui porterait une cocarde blanche. Les hurlements des soldats, dit un témoin, avaient quelque chose de féroce[68].

A Lyon, pour contenir la bourgeoisie royaliste, il n'était pas besoin, comme à Bordeaux, d'un chef énergique et d'une soldatesque exaltée. La garde nationale, les fédérés, le peuple y suffisaient. La nouvelle des événements, disait Davout à la Commission exécutive, a produit à Lyon une explosion de patriotisme. Le 24 juin, des bandes de populaire parcoururent les rues, arrachant les affiches où était annoncée la défaite de Mont-Saint-Jean, vociférant : Vive l'empereur ! insultant et maltraitant tous ceux qui ne semblaient point partager leur ferveur napoléonienne. Les boutiques fermèrent. Dans la nuit, le tumulte continua ; des fédérés armés de torches marchaient avec des soldats le sabre nu. On craignit le pillage et l'incendie. Le lendemain, on modela en cire un buste de Napoléon II qui fut solennellement promené par toute la ville au milieu des cris enthousiastes. Le soleil ardait. Les royalistes voyaient avec un plaisir malin l'image de cire se liquéfier peu à peu. A six heures, écrivit l'un d'eux, Napoléon II était fondu[69].

Déjà au retour de l'ile d'Elbe la guerre civile avait ensanglanté le Midi. Pendant toute la durée des Cent Jours, royalistes et bonapartistes, catholiques et protestants, miquelets et fédérés, gardèrent leurs espérances, leurs rancunes, leurs haines. S'ils ne combattaient plus, leur esprit restait en armes, animé des fureurs de la Saint-Barthélemy et des massacres de septembre. La nouvelle de l'abdication déchaîna ce peuple surexcité et impatient d'en venir aux mains. Des Cévennes à la mer, des Pyrénées aux deux rives du Rhône, en quelques jours tout le pays s'embrasa. Partout des troubles, des séditions, des émeutes, des cris de mort, l'appétence du sang.

Les villages s'insurgent, l'écume des villes se soulève. Montauban, Agen, Cette, Orgon, Tarascon, Agde, Béziers, Aigues-Mortes, Aubenas, sont en pleine révolte ; on emprisonne les fonctionnaires, les commandants de place, on désarme les petites garnisons[70]. A Perpignan, le 27 juin, le peuple parcourt les rues en criant : Vive l'empereur ! Mort aux royalistes ! La nuit, ces processions continuent plus effrayantes, à la lueur des torches. J'ai dû calmer l'exaltation patriotique, écrit le préfet ; les excès en auraient pu être dangereux[71]. A Avignon, des fédérés entourent et menacent le commandant de place, le général Cassan, qu'ils accusent de tiédeur. Pour les calmer, il faut arrêter l'ex-maire, soupçonné d'avoir le premier répandu la nouvelle de Waterloo. La nuit, un royaliste est tué en pleine rue par une bande de ces furieux[72]. Le 26 juin, les royalistes de Toulouse se portent en foule, cocarde blanche au chapeau, devant l'hôtel dia général Decaen, place Saint-Etienne. Tandis qu'un détachement d'infanterie se déploie, Decaen parait à son balcon, harangue les séditieux, les somme de se disperser. La plupart obéissent, mais un coup de pistolet est tiré sur un officier. Exaspérés, les soldats chargent à la baïonnette la foule déjà en retraite. Cinq ou six personnes tombent tuées ou blessées. A la suite de la troupe se ruent les fédérés, portant un drapeau noir ; ils pillent une maison, saccagent le café Henri IV[73]. Mêmes scènes à Montpellier. Les royalistes pavoisent, s'arment, courent la ville aux cris de : Vive le roi ! Un de leurs groupes rencontre des fédérés qui sortent de la citadelle sous le commandement d'officiers à la demi-solde. On se heurte, ou frappe, on tire. Un lieutenant du 13e de ligne est atteint grièvement ; plusieurs royalistes sont tués ou blessés, les autres s'éparpillent dans l'épouvante[74]. A Arles, à Nîmes, à Albi, à Auch, à Carcassonne, à Draguignan, où l'on promène un drapeau noir avec cette devise : l'Empereur ou la mort ! les passions fermentent, mais les bourbonistes sont encore contenus par l'attitude menaçante des fédérés qui réclament l'emploi de mesures révolutionnaires[75].

Les miquelets reprennent les armes, se concentrent à Beaucaire, tiennent la campagne jusqu'aux portes de Nîmes. Le 27 juin, ils repoussent un bataillon de garde nationale nîmoise ; le 29, ils attaquent un détachement du W chasseurs à cheval ; trente-deux hommes sont tués dans le combat. D'autres bandes de révoltés se forment dans la Lozère, l'Ardèche, le Vaucluse. Le marquis de Montcalm, qui s'intitule commissaire extraordinaire du roi, lève à Cette et aux environs douze ou quinze cents matelots, ouvriers du port et paysans, tandis que les protestants de la Gardonnenque et de l'Avaunage s'arment de fusils et de fourches pour aller renforcer les patriotes de Nîmes et de Montpellier[76].

 

V

Marseille était restée toute royaliste. La troupe y vivait en état de guerre avec les habitants. Selon le mot de Brune, sous chaque pavé poussait une fleur de lys[77]. Pour les Marseillais, la victoire de Ligny fut un deuil public[78], le désastre de Waterloo une délivrance. Cette catastrophe s'ébruita dans l'après-midi du 25 juin et fut presque aussitôt confirmée par une proclamation du général Verdier[79] qui, en l'absence de Brune parti pour l'armée du Var, commandait la 8e division militaire. Le 25 juin étant un dimanche, un beau dimanche ensoleillé, toute la population se trouvait dans les rues. Aux premières nouvelles, une joie furieuse saisit la foule. Bourgeois, gardes nationaux, débardeurs, portefaix, ouvriers, matelots fraternisent dans la même allégresse. On crie : Vive le roi ! Mort aux castaniers ! En une minute toutes les cocardes tricolores tombent des chapeaux comme automatiquement. On arrache les drapeaux impériaux qui décorent cafés et boutiques et on les remplace par des drapeaux blancs. Un buste de l'empereur pris dans le café picard est brisé, réduit en poussière. On s'ameute devant les différents postes, on somme les soldats de crier : Vive le roi ! d'ôter leurs cocardes, de livrer leurs armes. Provoqués et menacés, quelques soldats fout feu. Des hommes roulent sur le pavé. Une patrouille de chasseurs à cheval charge à fond la foule, la culbute, la sabre. Les rassemblements se reforment au loin ; le peuple crie : Vengeance ! A mort ! On lance des pierres, des tessons de poteries et de bouteilles ; on s'arme de bâtons, de fusils, de pistolets, de sabres, de couteaux. On sonne le tocsin à tous les clochers pour appeler les miquelets refugiés dans les environs[80].

Avec sa petite garnison — quinze cents hommes[81], tous très animés contre les Marseillais —, le général Verdier pourrait tenter de réduire la sédition. Le devoir militaire le commande. Mais Verdier raisonne sur son devoir. Faut-il répandre le sang, faut-il se compromettre pour retarder de quelques jours la restauration royaliste qui est inévitable[82] ? Le préfet Frochot, le comte Puyraveau, lieutenant de police, ne sont pas moins hésitants. Borelli, colonel de la garde nationale et royaliste ardent, conseille de faire relever par la milice tous les postes de la ligne, la seule vue des soldats exaspérant le peuple. Verdier qui une heure auparavant a écrit dans sa proclamation : Il sera fait des dispositions militaires pour le maintien de la tranquillité publique, donne l'ordre de remettre les postes à la garde nationale, laquelle pactise ouvertement avec les émeutiers. Les soldais, escortés par des piquets de miliciens qui les protègent contre la populace, regagnent les casernes et le fort Saint-Jean. Marseille reste à la rébellion[83].

Les royalistes célèbrent leur victoire par des farandoles, des illuminations et des assassinais. On égorge dans les rues des soldats isolés, des officiers en retraite, des fédérés, des bourgeois et des artisans suspects de bonapartisme. Un agent de police est reconnu dans une auberge ; on le tue à coups de sabre, l'on traîne son cadavre au ruisseau. Un officier se réfugie dans une cave ; cinq ou six individus l'y poursuivent et le découvrent caché entre deux tonneaux. Un tambour de la garde nationale lui plonge son sabre dans le ventre, et, le coup donné, retourne l'arme dans la blessure. C'est ce qu'il appelle le tour de clé[84].

Le général Verdier, de plus en plus troublé, décida s'évacuer Marseille[85]. A minuit, le mouvement commença. Mais la nouvelle de ce départ s'était ébruitée. Des royalistes s'embusquèrent aux fenêtres et aux soupiraux de caves de la rue de Rome. La colonne dut défiler sous une grêle de balles. Hors la ville, autres embuscades. Les paysans tiraient par-dessus les petits murs qui entourent les jardins des bastides. Les soldats ripostaient tout en marchant, mais dans l'obscurité et sur des ennemis abrités leur feu était sans effet. Dans cette retraite, Verdier perdit cent hommes et quatorze chevaux[86].

A deux postes de Marseille, la colonne croisa Murat qui ignorant encore tous les événements avait quitté sa villa des environs de Toulon pour aller habiter près de Lyon. Quelques soldats le reconnurent. On cria : Vive Murat ! Vive le roi de Naples ! et, les rangs rompus, officiers et soldats l'entourèrent pour le prier de se mettre à leur tète afin d'aller châtier les Marseillais. Les soldats étaient avides de vengeance, et ils n'avaient plus nulle confiance en Verdier à cause de sa conduite équivoque qui avait abouti à faire tuer cent de leurs camarades dans la retraite de nuit. Murat déclina ce commandement qu'il n'avait aucun droit d'exercer ; il calma la troupe qui se remit en marche vers Toulon[87].

Dans la nuit du 25 au 26 juillet, le colonel de la garde nationale Borelli et trois autres royalistes déterminés, Bruniquel, Candolle et Casimir Rostan, se constituèrent en comité royal provisoire. Ils redoutaient une rentrée de vive force à Marseille de Brune avec toute l'armée du Var ; leur principale, leur unique préoccupation était de préparer la résistance. En attendant des soldats de la croisière anglaise qu'ils s'apprêtaient à recevoir comme des sauveurs, ils s'occupèrent d'organiser en compagnies franches les matelots et les ouvriers du port. A ces tins, ils rédigèrent une proclamation portant que tout bon Français était appelé à défendre Louis XVIII, et que le Midi deviendrait, au besoin, une nouvelle Vendée[88]. Bien qu'ils ne pussent ignorer les meurtres qui venaient d'être commis, ces magistrats improvisés ne firent dans leur manifeste de guerre civile nul appel à la pitié. Ils ne se sentaient pas, sans doute, assez d'autorité pour exciter et modérer à la fois les passions populaires.

Le matin du 26, les égorgeurs se remirent à l'ouvrage, mais cette fois les assassinats individuels tournèrent en massacre général et méthodique. Il y avait à Marseille une petite colonie d'Egyptiens qui avaient émigré en 1801 à la suite de la capitulation du Caire[89]. On les appelait les mameluks ; les plus pauvres vivaient d'une modique pension sur la cassette impériale. C'est d'abord sur les mameluks que s'acharna la populace. Tous ceux qui n'avaient pas songé à fuir pendant la nuit ou qui ne réussirent point à se bien cacher moururent assommés, sabrés ou fusillés. Une négresse, servante chez des Egyptiens, est assaillie sur le Quai Impérial : — Crie : Vive le roi !Non, Napoléon me fait vivre. Vive l'empe.... ! Un coup de baïonnette dans le ventre la renverse. Elle se relève, ses deux mains contre le ventre pour y retenir ses entrailles, et crie : Vive l'empereur ! On la pousse dans l'eau immonde du vieux port ; elle s'enfonce, reparaît à la surface et crie encore : Vive l'empereur ![90]

Des Egyptiens, les Marseillais passent aux Marseillais, ils égorgent des officiers en retraite, des agents de police, des bourgeois, des artisans. Parmi les massacreurs, il y a d'anciens membres du club des Jacobins de 93. Après avoir tué au nom du peuple, ils tuent au nom du roi. Le plaisir est le nième. Un ex-concierge de la prison a pu s'enfuir ; on tue à sa place sa femme et ses deux enfants. Terrier, syndic des boulangers, et son fils, âgé de dix-huit ans, sont liés dos à dos et frappés alternativement jusqu'à la mort à coups de billons et de crosses de fusils. L'avocat Angles, un vieillard de soixante-dix ans, ami de Brune, meurt de la mort lente, percé et tailladé avec des couteaux : — Pas de pitié, dit un élève de l'Ecole de droit : c'est un jacobin ! On ramène de Cassis, où l'on a suivi leurs traces, trois agents de police ; pour les tuer, on les met nus, ce qui laisse à penser les raffinements de leur supplice. Le menuisier haret est arraché de son atelier et traîné dans la rue du Tapis-Vert pour y être fusillé ; mais la foule juge plus divertissant de l'assommer à coups de bâton sur la tête. Entre temps, on pille et on saccage les maisons des bonapartistes, des femmes dansent en rond autour des cadavres[91].

L'après-midi s'avançait, la marée de sang montait toujours. Le comité royal se décida à donner des ordres. Des tombereaux furent commandés pour l'enlèvement des cadavres. La garde nationale sortit de son inaction complice ; des patrouilles dissipèrent les rassemblements. Mais pour protéger les citoyens suspects de bonapartisme ou de jacobinisme, on ne trouva d'autre expédient que de les arrêter et de les conduire au château d'If[92] où ils restèrent emprisonnés jusqu'à la fin d'octobre[93]. Le massacre avait duré sept ou huit heures[94]. Il y avait plus de deux cents victimes[95]. Les Marseillais appelèrent ce jour-là : le Jour de la Farce[96].

 

 

 



[1] Rochechouart, Souvenirs, 393. Reiset, Souv., III, 204-211.

[2] Reiset, III, 210. Le Patriotisme des volontaires royaux, 159-163. Cf. Sismondi, Notes sur les Cent Jours, 22-33.

L'armée royale s'élevait au mois d'avril à 802 officiers et soldats, (gardes du corps, compagnies rouges, Suisses, volontaires royaux, déserteurs de la ligne). Situation au 2 avril (Arch. Aff. étrang., 646). D'après les évaluations un peu confuses de Reiset (III, 170, 187-188), elle aurait été, au mois de juin, de 1.200 à 1.700 hommes. Un rapport du commandant de Condé, du 25 juin, (Arch. Guerre), qui signale la marche de cette troupe sur Maubeuge, la dit forte de 800 à 900 hommes.

[3] Rochechouart, 393. Reiset, III, 210-212. Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, VII, 9. Lettre de Mounier, Gand, 17 juin. (Citée par d'Hérisson, Les Girouettes politiques, II, 420-421.)

[4] Rochechouart, 393. Bulletins du baron Capellen, Bruxelles, 17 juin, 7 heures et 10 heures du matin et 7 heures du soir (cités dans le Journal Universel, dit Moniteur de Gand, 21 juin).

[5] Chateaubriand, VII, 11-15. — La page est très belle, mais il est douteux que Chateaubriand l'eût pensée ainsi le 18 juin 1815.

[6] Lettre de l'adjudant-commandant. Gordon à sa femme, Cambrai, 4 juillet (Arch. Guerre) Th. Juste, Bruxelles en 1815, 41-43. — Beaucoup d'habitants quittèrent Bruxelles. Le baron Capellen envoya à Anvers les archives et les caisses du Trésor.

[7] Reiset, III, 212-214. Rochechouart, 393. Chateaubriand, VII, 19. Lettres de Mounier, Gand, 19 et 20 juin (citées par d'Hérisson, Girouettes politiques, II, 423-425). Cf. Gordon à sa femme, Cambrai, 4 juillet (Arch. Guerre).

Selon Chateaubriand, c'est une lettre de Pozzo qui apprit à Gand le résultat de la bataille de Waterloo, mais Reiset dans ses notes journalières dit : une lettre du duc de Wellington. Il est présumable qu'il y eut plusieurs dépêches.

[8] Reiset, III, 215-210. Lettre de Mounier, Gand, 25 juin, précitée. Guillemin, Patriotisme des volontaires royaux, 137. Proclamation du gouverneur de Gand, Gand, 19 juin. (Arch. Guerre).

[9] Rapport au Roi sur la situation de la France, Gand, 20 mai (minute de Beugnot, communiquée par M. le comte Beugnot).

[10] Lettre de Mounier, Gand, 20 juin (précitée).

[11] Journal universel de Gand, 21 juin. — A rapprocher de ces paroles, la lettre de Napoléon au général Girard pendant le trajet du golfe Jouan à Paris (citée dans le premier volume de 1815) : Calmez vos soldats, dites-leur que je ne voudrais pas rentrer dans ma capitale à leur tête si leurs armes étaient teintes de sang français. J'accorde que le toast de Louis XVIII et l'ordre de Napoléon sont également des phrases. Mais il y a des phrases à dire et des phrases à ne pas dire.

[12] Circulaire de Jaucourt, Gand, 22 juin. (Arch. Affaires étrangères, 617.)

[13] Guizot, Mémoires, I, 89-90. Pasquier, Mém., III, 287-286. Cf. Beugnot, Mém., II, 255-256.

[14] Pozzo à Nesselrode, 23 mai, 4 juin (Corresp. de Pozzo, I, 118, 179). Cf. Rapport de Talleyrand à Louis XVIII, juin. (Corresp. avec Louis XVIII, 479-483). Pasquier, III, 286.

Les craintes que Talleyrand suggérait et calmait tour à tour, pour se faire valoir comme l'homme indispensable, étaient mal fondées. Les lettres de Pozzo, de Metternich, de Castlereagh, de Wellington, de Bathurst, de Nesselrode, de Richelieu, prouvent, comme je l'ai déjà dit, que l'Angleterre, l'Autriche et la Russie étaient déterminées à restaurer Louis XVIII. Quant à la Prusse, la Russie dicterait sa conduite.

[15] Wellington à Clarke, Nivelle, 20 juin. (Dispatches, XII, 492.)

[16] Rochechouart, Souvenirs, 394. Reiset, Souv., III, 218-219.

[17] Pozzo, Correspondance, I, 172. Wellington, Dispatches, XII, 581. Goltz à Hardenberg, Gand, 8 mai (cité par Ramberg et Mallet, Louis XVIII, à Gand, II, 202). Guizot, Mém., I, 87-88. Marmont, Mém., III, 126. Lamarque, Souvenirs, II, 43. Cf. Mémoire attribué à Blacas (Arch. Aff. étrangères, 615).

Sur le rôle de Blacas pendant la première Restauration, et sur les partis à Gand, voir le premier volume de 1815.

[18] Sir Charles Stuart à Castlereagh, Grammont, 22 juin, et Mons, 23 juin (Wellington, Supplem. Dispatches, X, 564). Guizot, Mém., I, 90-91. Rochechouart, Souvenirs, 394. Cf. Hyde de Neuville, Mém., II, 69. Lamarque, II, 43 et la lettre de Wellington à Blacas, 28 juin (Dispatches, XII, 521) : Vous ne pouviez vaincre les préjugés qui existent contre vous qu'en quittant le roi et je ne veux pas vous dire une malhonnêteté en vous assurant que vous ne pouviez lui rendre un plus grand service qu'en vous sacrifiant.

[19] Journal de la Belgique, 21, 22, 24 juin. Larrey, Relat. de campagnes, 13-15. Guillemin, le Patriotisme des volontaires royaux, 170-171. Lettre écrite de Bruxelles, 20 juin 1815 (comm. par M. Aut.-Em. Coulon).

[20] Talleyrand, Mémoires, III, 194.

[21] Lettre écrite de Bruxelles, 28 juin, précitée : Les bûchers étaient allumés depuis huit jours. Le feu n'était plus alimenté que par la graisse humaine. Les cuisses, les bras, les jambes y étaient entassées. Il y avait une cinquantaine d'ouvriers autour ayant un mouchoir sous le nez et qui, avec de longues fourches, remuaient le feu et les ossements. La dévastation des fermes, l'odeur des cadavres, la fumée épaisse des bûchers qui se répandaient sur les arbres abattus formaient une scène d'horreur qui ne s'effacera jamais de ma mémoire.

[22] Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, VII, 40-41. Note de la duchesse de Lévis (citée par Sismondi, Notes sur les Cent Jours, 26-27.)

[23] Chateaubriand, VII, 42-44.

[24] Wellington à Clarke, le Cateau, 22 juin (Dispatches, XII, 495).

[25] Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, VII, 44.

[26] La petite armée d'Alost avait rejoint le roi à Mons. De Mons à Cambrai, Louis XVIII marcha militairement, avec sa Maison militaire et les volontaires royaux. (Reiset, Souvenirs, III, 218-219. Guillemin, Le Patriotisme des volontaires royaux, 179-185.)

[27] Chateaubriand, Mém., VII, 44-45. Note de la duchesse de Lévis (citée par Sismondi, Notes sur les Cent Jours, 27). Cf. Reiset, Souv., III, 219 : 25 juin : Le roi est parti de Mons ce matin à sept heures.

[28] Talleyrand, Mémoires, III, 194-195.

[29] Talleyrand, Mém., III, 195. Beugnot, Mém., II, 205-206. Chateaubriand, VII 44-46. Note de la duchesse de Lévis. (Sismondi, Notes sur les Cent Jours, 27.) Guizot, Mém., I, 90. — Talleyrand, cela va sans dire, passe sous silence les paroles échangées à propos des eaux de Carlsbad ; il dit simplement qu'il offrit sa démission.

[30] Talleyrand à Wellington, Mons, 25 juin (Wellington, Supp. Dispatches, X, 586). Papiers de Beugnot (comm. par le comte Beugnot). Pozzo à Nesselrode, Cateau-Cambrésis, 24 juin. (Corresp. avec Nesselrode, I, 173.) Guizot, Mém., I, 90-91. Chateaubriand, Mém., VII, 46-47, Beugnot, Mém., II, 266-289.

[31] Reiset, Souvenirs, III, 219-220.

[32] Wellington à Vincent, Cateau-Cambrésis, 23 juin (Dispatches, XII, 492).

[33] Chateaubriand, VII, 47-48, Guizot, I, 91-92, Beugnot, II, 268-272. — Beugnot raconte que Talleyrand hésita longtemps à rejoindre le roi. Chateaubriand et Guizot disent au contraire qu'il se décida sur-le-champ, ce qui est la vérité, Talleyrand avait si grand désir de reprendre le ministère qu'il fut convenu entre lui et Pozzo, arrivé a Mons peu après la scène avec le roi, que l'ambassadeur russe se rendrait sans tarder à Cateau-Cambrésis pour demander à Wellington de foire une démarche auprès du roi. Quand Pozzo arriva à Mons, Wellington avait fait spontanément la démarche, (Pozzo à Nesselrode, Cateau-Cambrésis, 26 juin, Corresp. avec Nesselrode, I, 172-174).

[34] Wellington à Talleyrand, Cateau-Cambrésis, 24 juin (Dispatches, XII, 502). Talleyrand à Wellington, Mons, 25 juin. (Supplementary Dispatches, X, 586.)

[35] Wellington à Colville, le Cateau, 26 juin (Dispatches, XII, 497). — La majeure partie des gardes nationaux mobilisés avait vraisemblablement déserté aux nouvelles du désastre de Waterloo et de la déroute totale de l'armée française, apportées par des fuyards. Cf. Souvenirs d'un ex-officier, 304, 308, 309.

[36] Wellington à Colville, le Cateau, 23 juin. Sommation au gouverneur de Cambrai, le Cateau, 23 juin. (Dispatches, X, 497-498.)

[37] Rapports à Davout, 27 juin  (Arch. Guerre), Wellington à Stuart et à Bathurst, Joncourt, 25 juin (Dispatches, XII, 507). Souvenirs d'un ex-officier, 310-312. Lettre de Cambrai (Journal des Débats, 7 juillet). Damitz, II, 72-73. — Dans cette comédie de l'assaut de Cambrai, les Anglais perdirent cependant un officier et une trentaine de soldats.

[38] Laloy à Davout, juillet (Arch. Guerre). Journal des Débats, 7 juillet, Souvenirs d'un ex-officier, 312-313. Reiset, III, 221-223. Chateaubriand, Mém., VII, 52. Souvenirs de Mme de Chateaubriand, cités par E. Biré dans son édition des Mémoires d'Outre-tombe, IV, 48. Guillemin, Le patriotisme des volontaires royaux, 189-190.

[39] Talleyrand dit, dans ses Mémoires (III, 232-234), que l'établissement du gouvernement royal à Lyon lui tenait toujours au cœur. Mais contraint d'y renoncer par déférence pour Wellington, il n'en souffla plus mot au roi.

[40] Proclamation royale, Cateau-Cambrésis, 25 juin. — C'est Guizot (Mém., I, 92) qui dit que cette proclamation était l'œuvre de Dambray.

[41] Talleyrand, Mémoires, III, 230. Guizot, Mém., I, 92.

[42] Mon gouvernement devait faire des fautes. Peut-être en a-t-il fait ? Il est des temps où les intentions les plus pures ne suffisent pas pour diriger, où elles égarent... Je prétends ajouter à la Charte toutes les garanties, qui peuvent en assurer le bienfait. L'unité du ministère est la plus forte que je puisse offrir. J'entends qu'elle existe... On a parlé, dans ces derniers temps, du rétablissement de la dime et des droits féodaux. Cette fable, inventée par l'ennemi commun, n'a pas besoin d'être réfutée. Si les acquéreurs de biens nationaux ont conçu des inquiétudes, la Charte aurait dû suffire pour les rassurer. N'ai-je pas moi-même proposé aux Chambres, et fait exécuter des ventes de ces biens ? Cette preuve de ma sincérité est sans réplique. Le Roi aux Français, Cambrai, 28 juin.

Comme on va le voir, il semble que le passage relatif aux fautes commises en 1814 était, dans la rédaction primitive, inspirée et corrigée par Talleyrand, rédigé en termes beaucoup plus blessants pour le roi. On lui faisait dire un véritable mea culpa.

[43] Beugnot, Mémoires, II, 274-275. Papiers de Beugnot (communiqués par M. le comte Beugnot).

[44] Sir Charles Stuart à Wellington, Cambrai 28 juin, 29 juin et 30 juin (Wellington, Supplementary Dispatches, X, 614, 625, 633). Pozzo à Nesselrode, Cambrai, 28 juin (Corresp., I, 176-178). Lettre de Wellington à Talleyrand (cit. dans les Mém. de Talleyrand, III, 234-235). Beugnot, Mém., II, 271). Guizot, I, 92-93. — Sur le désir des souverains et de leurs ministres, qu'il y eût en France un gouvernement constitutionnel, voir principalement le rapport de Talleyrand au roi, juin (Corresp. avec Louis XVIII), les lettres de Nesselrode à Pozzo, Vienne, 3 mai et 13 mai (Corresp. de Pozzo, I, 123-124, 143-144), et les Mémoires de Villèle, I, 288, 317-318.

[45] D'après les ordonnances royales rendues à Lille, le 23 juin (Journal universel de Gand, du 14 avril), il était même défendu à tout Français de payer au gouvernement de Buonaparte aucun impôt direct ou indirect et d'obéir à toute loi de conscription on de recrutement. Les agents du fisc seraient tenus de verser une seconde fois Trésor royal les sommes perçues nonobstant ces ordonnances. Les officiers généraux et supérieurs qui adhéreraient au parti de Buonaparte seraient destitués et privés de toute pension.

[46] Stuart à Wellington, Cambrai, 29 juin (Dispatches, Suppl., X, 623). Lettre de Gaillard à Vitrolles, 24 juin 1817 (citée dans les Mémoires manuscrits de Gaillard, communiquée par Mme Martineau).

[47] Le Roi aux Français, Cambrai, 28 juin.

[48] Mémoires manuscrits de Barras (comm. par M. G. Duruy). Cf. Lamarque, Souv., I, 190, et 394. — Le général Lamarque est injuste en disant que Talleyrand s'opposa à l'amnistie. Tout le monde autour du roi et dans les cabinets étrangers demandait des proscriptions. Talleyrand n'eut donc point à s'opposer à cette amnistie dont personne ne voulait. D'ailleurs, le texte de la proclamation de Cambrai, rédigée sous son inspiration, atténua en une certaine mesure celui de la déclaration de Cateau-Cambrésis.

[49] Analyse de la corresp. des préfets, 22 au 30 juin. Rapport de Davout à la Commission de gouvernement, fin juin. (Arch. nat., F. 7, 3774 et AF. IV, 1937). Leval à Davout, Dunkerque, 23 juin. Général Frère à Davout, Lille, 24 juin. (Arch. Guerre). Général Desnoyers à Davout, Aire, 30 juin. Rapport du général Fauconnet, Dunkerque, 28 juin. (Papiers de Carnot, communiqués par le capitaine Sadi Carnot.)

[50] Du Bourg à Clarke, Bapaume, 27 juin. Rapport sur la capitulation du Quesnoy, 27 juin. Arrêté du maire de Péronne, 26 juin. Procès-verbal du siège et de la capitulation de Péronne, 27 juin (Arch. Guerre). Lettre d'Arras, 29 juin (Moniteur, 14 juillet).

[51] Lettres de Plaige, Landrecies, 27 juin de Lahure, Douai, 27 juin. (Arch. Guerre.)

[52] Leval à Davout, Dunkerque, 23 juin. Général Frère à Davout, Lille, 23, 25 et 27 juin. Général Charrière à Davout, Calais, 30 juin. (Arch. Guerre). Fauconnet à Carnot, Dunkerque, 26 et 26 juin (Papiers de Carnot).

Voici le texte de la nomination de Bourmont : Désirant seconder l'empressement des habitants du Nord à secouer le joug de l'usurpateur, nommons commandant extraordinaire de la 16e division militaire le lieutenant général comte de Bourmont, (signé) Louis. Gand, le 21 juin. (Arch. Guerre).

Sur les antécédents de Fruchard, voir Guillemin, Le Patriotisme des volontaires royaux, 146-152. — En récompense de ses hauts faits, ce Fruchard fut décoré de la légion d'honneur et introduit dans l'armée comme officier porte-drapeau.

[53] Mercer, Journal of the Waterloo Campaign, II, 54-55. Cf. Analyse de la Corresp. des préfets, 25-27 juin. (Arch. Nat., F. 7, 3774.)

[54] Duc de Castries à Clarke, Brighton, 4 juillet (Arch. Guerre). — Castries écrivait d'après des renseignements envoyés de la côte normande et dont le plus grand nombre provenaient d'un certain Fouache, ancien sous-préfet du Havre. Ce Fouache, nommé par Castries commissaire du roi en Normandie, fut un des principaux instigateurs des émeutes du Havre. Dès le 26 juin, la ville était en pleine sédition, on y tirait des coups de fusil, les soldats renfermée dans la citadelle n'en sortaient qu'en forts détachements. (Lieutenant de police du Havre au général Schwitzler, 26 juin, et rapport de Schwitzler, 25 juin. (Arch. Guerre). Rapport du Havre, 29 juin, (Arch. nat., F. 7, 3774).

[55] Lemarois à Davout, Rouen, 27 juin. Lauberdière à Davout, Rouen, 29 juin. Vedel, à Lemarois, Caen, 29 juin. Ordre du commandant de place, Rouen, 29 juin, (Arch. Guerre). Analyse des rapports du 24 au 30 juin, et rapport général de Davout à la Commission de gouvernement, fin juin. (Arch. nat., F. 7, 3774 et AF. IV, 1937).

La même effervescence est signalée dans la Seine-Inférieure, l'Eure, le Calvados, l'Orne, et dans la Manche jusqu'aux portes de Cherbourg, dont les habitants étaient au contraire très bonapartistes.

[56] Général Taraire à Davout, Rennes, 24 juin. Général Brenier à Davout, Brest, 24 juin, général Lorcet à Davout, Saint-Malo, 23 juin (Arch. de Guerre). Analyse de la corresp. des préfets du 25 au 30 juin. Rapport général à la Commission de gouvernement, 2 juillet (Arch. nat., F. 3774 et AF. IV, 918).

[57] D'Autichamp, Mém. sur la camp. de 1815 dans la Vendée, 101-122, et pièces citées, ibid. Carmel, Mém. sur la guerre de Vendée en 1815, 222-232. — Après la mort de Louis de la Rochejaquelein, l'organisation de l'armée vendéenne avait été modifiée. Sapinand était général en chef et Auguste de la Rochejaquelein major-général. D'Autichamp, Suzannet, Saint-Hubert et Dupérat commandaient les quatre corps d'armée.

[58] On a dit que le général de Suzannet, le cœur ulcéré par les odieuses accusations dont il avait été l'objet à l'occasion de la mort de Louis de la Rochejaquelein, se fit tuer volontairement au début du combat. (Général Tercier, Mém., 401, Cf. Canuel, Mém., 238-239).

[59] Lamarque à Charpentier, Vieille-Vigne, 20 juin. 4 heures du soir. (Arch. Guerre, Armée de l'Ouest.) Rapport de Lamarque à Davout, Clisson, 21 juin (Moniteur, 25 juin). D'Autichamp, Mém., 121-133. Cf. Canuel (Mém., 232-243) qui contredit et incrimine d'Autichamp, à tort, à ce qu'il semble. — Lamarque évalue la perte des Vendéens à 1.200 ou 1.500 hommes, Casuel estime ce chiffre exagéré, mais parle de 600 prisonniers. Les impériaux eurent 10 morts et 60 blessés.

[60] Bigarré à Davout, 16, 18 et 20 juin (Arch. Guerre, Armée de l'Ouest). Cf. Rio, La petite Chouannerie, 193-214. — L'affaire fut très meurtrière. D'après le rapport de Bigarré, il eut 20 tués et 18 blessés, parmi lesquels ce général lui-même et ses deux aides de camps ; les chouans, perdirent 1.500 hommes ; on leur prit leurs deux canons, pièces anglaises attelées de chevaux de diligence.

[61] Rapport de Delaage, 20 juin (Arch. Guerre) Cf. Canuel, 246-263. — Ce 4e corps de l'armée royale s'était rassemblé aux Aubiers le 16 juin et avait marché vers les confins du Poitou afin de montrer du monde en dehors de la Vendée.

[62] Lamarque à Hamelinaye, Legé, 19 juin. (Arch. Guerre.)

[63] Lettre de Lamarque, Vieille-Vigne, 20 juin (citée par d'Autichamp, 139-141). Sur les négociations entamées au mois de mai, voir le premier volume de 1815 et la relation de Marlartie (Arch. Guerre).

Le 22 juin Davout écrivit à Lamarque pour l'informer de l'abdication et lui prescrire de conclure un armistice avec les Vendéens. Mais déjà Lamarque avait en le mérite d'engager de lui-même les négociations en pleine victoire de l'empereur, et, malgré Waterloo, il allait par son énergie obtenir plus qu'un armistice : un traité de pacification.

[64] Lamarque à Davout, Clisson, 24 juin. Traité de pacification, Cholet, 26 juin (Arch. Guerre). Lamarque, Souv., III, 57-62. Canuel, Mém., 267-300. Lamarque à Davout, Cholet, 28 juin (Moniteur, juillet). D'Autichamp, 141-152 et lettres citées, ibid.

[65] Lorcet à Davout, 3 juillet. Lamarque à Davout, 4 juillet. (Arch. Guerre.) Canuel, Mém., 302-312. Rio, La petite Chouannerie, 215-222. Mém. relat. à l'Armée royale du Maine et de la Sarthe, 50-59.

[66] Rigaud à Davout, Chalons, 22 juin. Chaudron à Davout, 24 juin. Leclerc des Essarts à Davout, Sainte-Menehould, 22 et 26 juin. Déclarations des conducteurs de diligences, 2 juillet. (Arch. Guerre). Analyse de la correspondance des préfets du 25 au 30 juin. Rapports généraux à la Commission de gouvernement, 30 juin et 2 juillet. (Arch. nat., F. 7, 3774, AF. IV, 908 et AF. IV, 1937).

[67] Général Motte à Davout, Grenoble, 25 juin. Général Veaux à Davout, Dijon. 28 juin, Rapport du capitaine de Villeneuve, 30 juin. Déclarations de conducteurs de diligences, 2 juillet (Arch. Guerre). Analyses de la correspondance des préfets, 23 juin au 4 juillet. Rapports de Réal, 30 juin. Rapport général à la Commission de gouvernement, 2 juillet. (Arch. nat., F. 7, 774, F. 3044a, AF. IV, 1934 et AF. IV, 918).

[68] Clausel à Davout, 24 juin, (Arch. Guerre). Analyse de la correspondance des préfets, 24 et 26 juin. Rapport général, 2 juillet. (Arch. nat., AF. IV, 918 et F. 7, 3774). Edmond Géraud, Journal intime, 234, 241-242. — D'après la déclaration d'un conducteur de diligence (Arch. Guerre, 2 juillet), dans une échauffourée quatre personnes furent tuées ; un soldat, deux hommes et une femme. Cela parait douteux, car le royaliste Géraud dans sa lettre si détaillée du 27 juin n'aurait pas manqué, il semble, de mentionner ces meurtres.

[69] Rapports à la Commission de gouvernement. 29 juin et 2 juillet (Arch. nat., AF. IV, 1939 et AF. IV, 918, Audin, Tableau des événements de Lyon, 142. Guerre, Campagnes de Lyon en 1814 et 1815, 275-558, et proclamations du gouverneur et du préfet de Lyon, 25, 26, 57 juin (citées ibid.). — Le 19 juin, des manifestations patriotiques moins menaçantes mais non moins enthousiastes avaient déjà eu lieu à l'occasion des premières victoires de Suchet dans les Alpes (Paroletti à Davout, Lyon, 19 juin. Arch. Guerre).

Le 27 juin, on arrêta cinquante-neuf royalistes plus on moins compromis dans un complot auquel étaient affiliées deux ou trois mille personnes et qui avait pour but de proclamer Louis XVIII, de massacrer les officiers de l'armée et los chefs fédérés. (Rapport de police, Lyon, 4 juillet. (Arch. Nat. F. 7,5774.) Paroletti à Davout, Lyon 29 juin. (Arch. Guerre). Ce complot était connexe à la prise d'armes du comte d'Espinchal qui ayant le dessein de s'emparer de Lyon où il avait des intelligences, tint campagne dans le Forez durant tout le mois de juin avec cinq ou six cents royalistes appelés Chasseurs de Henri IV, et eut plusieurs engagements contre les colonnes mobiles. (D'Espinchal, Souvenirs, II, 345-371, et Audin, Événements de Lyon, 99-190).

[70] Correspondance des préfets, 20 juin au 4 juillet. Rapport général à la commission de gouvernement, 2 et 4 juillet. (Arch. nat., F. 7, 3774, F. 7, 3041a, AF. IV, 1937. AF. IV, 918). Lettres à Davout : de Decaen, Bordeaux, 24 et 26 juin ; de Lenoir, Albi, 28 juin ; de Clausel, Bordeaux, 29 juin ; du général commandant l'Ardèche, Privas, 30 juin ; de Gilly, Montpellier, 30 juin. Ordre du jour du général commandant le Tarn, Albi, 30 juin. Correspondance des préfets avec Decaen, 25 au 30 juin. Déclarations de conducteurs de diligences, 2 juillet (Arch. Guerre). De Bernis, Précis de ce qui s'est passé dans le Gard et la Lozère, 20-31. Marseille, Nîmes et ses environs en 1815, I, 34-36.

[71] Préfet des Pyrénées-Orientales à Decaen, 28 juin. (Arch. Guerre). Rapport de Réal, 30 juin. (Arch. Nat., AF. IV, 1934).

[72] Les Crimes d'Avignon, 12-14.

[73] Decaen à Davout, 28 et 28 juin. Rapport sur les événements de Toulouse du 4 avril au 18 juillet, signé du maire, du premier président et du procureur général. Déclaration de conducteurs de diligences, 2 juillet. (Arch. Guerre.) Rapport à la Commission de gouvernement, 2 juillet. (Arch. Nat., AF. IV, 918) Cf. Villèle, Mém., I, 297, et général Pelleport, Mém., II, 127-128.

[74] Ordre de Gilly prescrivant la formation d'une commission militaire pour juger les instigateurs du mouvement dans lequel plusieurs individus ont perdu la vie Montpellier, 27 juin. Gilly à Davout, 28 juin. (Arch. Guerre.) Rapport de Gilly, Montpellier, 28 juin. (Arch. Nat., AF. IV, 1936.) Précis des Evénements qui ont eu lieu à Montpellier les 27 juin, 1er et 2 juillet, 3-7. — Cet écrit anonyme, dû à nu royaliste ardent, est naturellement en désaccord avec le rapport de Gilly sur l'origine de l'échauffourée. Selon ce témoignage, les fédérés tirèrent sans aucune provocation et tuèrent ou blessèrent quarante personnes tout à fait inoffensives, dont deux femmes. L'adjudant-commandant Lefebvre (Campagnes et Mémoires, 166), dit au contraire que les premiers coups de feu furent tirés des maisons sur la troupe, qu'un officier fut tué et deux blessés, et que dans la foule, les soldats ayant riposté, il y eut trois hommes tués et trois hommes blessés.

[75] Préfet du Tarn à Decaen, 27 juin. Préfet du Gers à Decaen, 28 juin. Lenoir à Davout, 28 juin. Extrait de la correspondance ministérielle, fin juin, (Arch. Guerre). Corresp. des préfets, fin juin. (Arch. Nat., F. 7.3774). De Bernis, 42, 40-51.

[76] Decaen à Davout, 25 juin. Rapport du général de Barre à la date du 14 août. (Arch. Guerre), Rapport de Gilly, 2 juillet. Corresp. des préfets, fin juin. (Arch. Nat. AF. IV, 1937 et F. 7, 3771). Bernis, 51, Marseille et Nîmes en 1815, I, 31-37. Précis des Evénements de Montpellier, 9-15.

[77] Brune à Davout, 5 mai (Arch. Guerre, Armée du Var).

[78] Verdier à Davout, 23 juin (Arch. Guerre.)

[79] Aux habitants de la 8e division militaire, Marseille, 25 juin, placard in-folio (Collection H. Houssaye.)

[80] Rapport du commandant de gendarmerie, Marseille, 25 juin. Extrait d'une lettre de Marseille, 27 juin. Rapport de Verdier, Toulon, 27 juin. Rapport du général Cailloux-Puget, commandant le département des Bouches-du-Rhône, Toulon, 29 juin (Arch. Guerre).

[81] 1.000 hommes du 13e de ligne, 150 hommes du 14e chasseurs, 200 retraités et officiers à la demi-solde embataillonnés, canonniers, gendarmes. (Rapport du général Cailloux-Puget, 29 juin et rapport de Brune, Antibes, 16 juin, Arch. Guerre.)

[82] Brune blâma Verdier de s'être trop hâté d'annoncer l'abdication et d'avoir si vite évacué Marseille. C'est votre faute, lui écrivit-il, si on a pris la cocarde blanche à Marseille. Brune à Verdier, 27, 28, 29 juin, 2 juillet ; à Rizannet, 28 juin. (Registre de corresp. de Brune, Arch. Guerre.)

D'après plusieurs témoignages (Marseille et Nîmes justifiées, 12. Marseille au 25 juin, 12. Marseille et Nîmes en 1815, I, 17), c'est sur l'ordre de Verdier lui-même, menacé par un rassemblement, que le buste de l'empereur fut enlevé du café Ricard et livré à la populace. Verdier cria : Vive le roi !

[83] Rapport du commandant de gendarmerie, 25 juin. Rapport du général Cailloux-Puget, Toulon, 29 juin (Arch. Guerre.) Lettre de Toulon, 27 juin (Arch. nat., V. 7, 3774). Rapport sur les Evènements de Marseille, 5.

[84] Extrait d'une lettre de Marseille, 27 juin. Rapport du général Cailloux-Puget, Toulon, 29 plu (Arch. Guerre.), Marseille au 25 juin, 10. Marseille, Nîmes, en 1815, I, 18, 32, II, 32. — On se rappelle les crimes, dit l'auteur du Rapport sur les Événements de Marseille (p. 5), et quelques Jacobins périssent. — Tous les torts étaient aux bonapartistes, dit l'auteur de Marseille et Nîmes justifiées (p. 35) ; ils ne faisaient qu'user d'une légitime défense. — Les bons citoyens de Marseille, dit le comte de Barnuel-Beauvert (Lettres, III, 278), se portèrent à des extrémités indispensables contre des Jacobins.

[85] Dans son rapport (Toulon, 27 juin, Arch. Guerre), Verdier donne comme motif à l'évacuation de Marseille qu'il savait que Toulon était menacé. C'est absolument inexact. Toulon n'était pas encore menacé. Verdier céda à l'émeute.

[86] Rapports de Verdier, Toulon, 27 juin. Rapport du général Cailloux-Puget. Toulon, 29 juin (Arch. Guerre). Cf. Marseille, Nîmes en 1815, I, 31. Marseille et Nîmes justifiées, 37. Rapport sur les Evénements de Marseille, 6. — L'auteur de cette dernière brochure s'exprime ainsi : Les braves habitants des campagnes accompagnement les troupes à coups de fusils et de pierres bien avant sur la grande route.

[87] Rapport d'Armand, valet de chambre de Murat (cité par Franceschetti, Supplément aux Mémoires sur la mort de Joachim Napoléon, 41-46.) — Sur l'esprit des soldats et des officiers, Cf. le rapport du général Cailloux-Puget, 29 juin et les lettres de Brune à Verdier, 27, 28, 29 juin (Registre de corresp. de Brune, Arch. Guerre.)

Murat en apprenant par Verdier la défaite de Waterloo et l'abdication renonça à aller à Lyon et rentra temporairement à Plaisance.

[88] Proclamation du comité royal provisoire. Marseille, 29 juin. Lettres de Marseille, 27 juin et 4 juillet (Arch. Guerre.) Relation des Evénements de Marseille, 10.

[89] L'article XII de la capitulation portait que tout habitant de l'Égypte serait libre de suivre l'armée française.

[90] Rapport de police à Carnot, Marseille, 26 juin. (Papiers de Carnot, comm. par le capitaine Sadi-Carnot). Marseille, Nîmes en 1815, I, 31. Marseille et Nîmes justifiées, 45. Extrait d'une lettre de Marseille, 27 juin (Arch. Guerre) : Il ne reste pas un mameluk.

[91] Rapport de police à Carnot, Marseille, 20 juin. (Papiers de Carnot), Marseille, Nîmes en 1815, I, 20, 30-31 ; II, 23-24, 31-32. Marseille et Nîmes justifiées, 44-45. Rapport sur les événements de Marseille, 6.

L'auteur de Marseille et Nîmes justifiées conclut philosophiquement : Une sage prudence commandait aux bonapartistes de ne pas attendre le dernier moment pour fuir.

[92] Marseille, Nîmes en 1815, I, 31, II, 34. Relation des Evènements de Marseille, 12. Lettre d'un habitant de Marseille à Despautiers, à Brignoles, Marseille, 29 juin. (Papiers du maréchal Brune, Arch. Guerre.)... On n'assassine plus les jacobins dans les rues. Ou se contente de les arrêter et de les conduire en prison afin de les juger et de les punir s'ils le méritent... On a demandé des secours aux Anglais qui débarquent aujourd'hui de l'artillerie et deux compagnies de canonniers, demain ou après-demain ils débarqueront deux ou trois mille hommes.

[93] Rapport adressé de Marseille à Clarke le 7 septembre (Arch. Guerre) : Le préfet n'ose pas faire comparaître, les prisonniers du château d'If, de peur qu'ils ne soient massacrés. — Quand aux Egyptiens survivants, il fut question au mois de décembre de les déporter à Cayenne. (Lettre du ministre de la marine à Clarke, Paris, 16 décembre, Arch. Guerre.)

[94] Les massacres finirent à deux heures après-midi. Marseille et Nîmes justifiées, 45. Cf. Relation des Evènements de Marseille, 12. Marseille, Nîmes en 1815, II, 53. — D'après une autre brochure, Rapport sur les Evénements de Marseille, 6, ce fut seulement le 27 juin que la garde nationale put à grand’peine rétablir la tranquillité.

Le Comité attendit jusqu'au 27 pour faire une proclamation invitant le peuple à la modération. Cette proclamation vaut d'être citée : Les violences des militaires qui ont osé faire feu sur le peuple ont pu faire excuser des vengeances exercées deus le premier moment d'un triomphe obtenu au prix de votre sang. Il est temps que tout rentre dans l'ordre il est temps que les personnes et les propriétés soient respectées... (Arch. Guerre.)

[95] Rapport du général Cailloux-Puget, Toulon, 29 juin (Arch. Guerre) : On fait monter le nombre des victimes, à près de 500 et les maisons pillées à plus de 50. — Rapport d'un douanier de Marseille, Valence, 2 juillet (Arch. Guerre) : 250 personnes égorgées dans les journées du 25 et 26 juin ; 80 maisons pillées. — Extrait d'une lettre de Marseille, 4 juillet (Arch. Guerre) : 242 personnes égorgées. Extrait d'une lettre de Marseille, 29 juin (Arch. Guerre) : On a tué tous les partisans de l'empereur. — Rapport sur les Evénements de Marseille (16) : Le peuple fit main basse sur tout ce qu'il rencontra d'anciens suppôts de la Révolution.

[96] Marseille, Nîmes en 1815, I, 32.