1815

LIVRE I. — LA PREMIÈRE RESTAURATION

 

CHAPITRE III. — LE CONGRÈS DE VIENNE.

 

 

I

Par le traité de paix du 30 mai 1814, la France avait renoncé à ses droits de souveraineté ou de protection sur trente-deux millions d'individus[1]. Restait aux puissances alliées à se partager comme un bétail humain cette multitude de peuples. Ce fut l'œuvre du congrès de Vienne.

La France fut admise au congrès, mais d'abord pour la forme seulement. L'article Ier secret du traité de Paris : Les dispositions à faire des territoires cédés seront réglées sur les bases arrêtées par les puissances alliées entre elles, était pour les représentants du roi de France une obligation et un engagement de ratifier d'avance toutes les décisions des autres plénipotentiaires. On a dit que Talleyrand en signant avec trop d'empressement la convention du 23 avril, qui démunissait la France de cinquante places fortes qu'elle avait comme gages, s'était désarmé pour les conférences de Paris, et qu'en signant sans faire assez de résistance le traité du 30 mai, il s'était désarmé pour le congrès de Vienne. Mais, au mois d'avril, la France vaincue et envahie, les Alliés maîtres de Paris, le pays divisé, une partie de l'armée révoltée, le roi en Angleterre, Talleyrand pouvait-il se refuser à signer un armistice ? Et au mois de mai, quand le tiers du territoire était encore occupé et que la garde impériale russe manœuvrait aux Champs-Elysées, pouvait-il ne pas acquiescer aux conditions des puissances alliées, conditions implicitement contenues dans l'armistice du 23 avril ? Pouvait-il, contre la volonté des puissances, ajourner à six mois la signature de la paix[2] ?

Cette paix, les Alliés regrettèrent même de l'avoir faite trop clémente[3], et non contents que la délimitation des frontières françaises fût définitivement réglée par le traité du 30 mai, et que par le même traité Talleyrand eût renoncé à intervenir dans la discussion future sur le partage des territoires cédés, ils signèrent à Londres, le 29 juin, une nouvelle convention aux termes de laquelle ils s'engageaient à rester en armes afin de protéger les arrangements susmentionnés jusqu'au moment où l'état de l'Europe se trouverait complètement raffermi[4]. Telles étaient encore les suspicions et les craintes qu'inspirait la grande vaincue !

Mais les puissances, ainsi armées contre la France, l'étaient aussi les unes contre les autres. Talleyrand comprit que ce nouveau pacte ne tiendrait pas devant la division des intérêts, et que grâce à la discorde qui devait régner au congrès, la France sortirait du rôle humiliant auquel on la voulait réduire. Au service de Napoléon, Talleyrand avait représenté la force ; passé au service de Louis XVIII, il s'avisa de représenter le droit ou plutôt la légitimité, mot nouveau, que, dit-on, lui-même venait de créer[5]. Une ligne de conduite ayant pour base ce mot talismanique ne pouvait qu'être approuvée par le roi ; il y donna un plein assentiment. Après avoir tait rédiger des instructions en ce sens par son fidèle La Besnadière[6], Talleyrand quitta Paris, beaucoup plus d'accord avec Louis XVIII sur la politique étrangère que sur la politique intérieure.

A Vienne, où il arriva le 23 septembre, Talleyrand fut reçu avec honneur, mais avec défiance. La veille, les plénipotentiaires de l'Autriche, de la Grande-Bretagne, de la Russie et de la Prusse avaient décidé qu'ils n'entreraient en conférences avec le représentant de la France qu'à mesure qu'ils se seraient mis d'accord entre eux sur la distribution des pays rendus disponibles par la dernière guerre[7]. Cette résolution semblait une concession puisque, en se tenant à la lettre du traité de Paris, les Alliés pouvaient obliger la France à ratifier d'avance tout ce qu'ils arrêteraient, et qu'au lieu de cela ils lui reconnaissaient le droit de discuter leurs décisions. Mais, en réalité, cette concession était illusoire. La France n'avait la possibilité d'exercer quelque action qu'en intervenant dans la discussion entre les puissances co-partageantes. Une fois celles-ci d'accord entre elles, il était évident que les objections du plénipotentiaire français resteraient sans effet. Talleyrand, à qui le protocole de la conférence du 22 septembre fut communiqué le 30, dans une réunion chez Metternich, protesta donc hautement contre les intentions des puissances. Il releva le mot Alliés, employé plusieurs fois dans cette pièce, et conclut que les représentants des huit puissances signataires du traité de Paris — et non pas seulement ceux des quatre puissances qui se qualifiaient d'alliées — devaient s'occuper sans délai des questions préliminaires à décider par le congrès, pour que l'on pût promptement le réunir et les lui soumettre. La discussion fut vive, on se sépara fort animé. Rentré chez lui, Talleyrand, pour donner plus de force à ses paroles, en fit l'objet d'une Note qu'il communiqua aux plénipotentiaires des huit puissances[8].

De là, grande irritation et grand scandale chez les Alliés. Castlereagh accusa Talleyrand d'avoir manqué aux usages diplomatiques en répondant par une Note officielle à une communication officieuse et confidentielle[9]. Humboldt qualifia la Note de brandon jeté parmi les membres du congrès ; Nesselrode dit que la politique de la France était de désunir les signataires du traité de Chaumont, et Hardenberg que les Français prétendaient toujours la rive gauche du Rhin et la Belgique, et qu'ils voulaient la guerre. — Je serais d'avis, conclut Metternich, de régler nos affaires à nous tout seuls[10].

La suspicion à l'égard de Talleyrand devint extrême. Il avait beau protester de son désintéressement, déclarer que la France avait renoncé à tout agrandissement illégitime comme lui-même avait renoncé à sa dotation et à son titre de prince de Bénévent — à Vienne, Talleyrand ne prit plus, sur ses cartes de visites et dans les actes du congrès, que le titre de prince de Talleyrand, et la chose fut remarquée —, on ne l'en soupçonnait pas moins de professer ces principes pour mieux cacher ses desseins. Il continua d'être invité à toutes les fêtes mais, en tant que plénipotentiaire, il fut tenu à l'écart, presque en quarantaine. Les souverains et les ministres des petits Etats qui regardant Talleyrand comme un défenseur, le voyaient en particulier, reçurent des blâmes. — Voyez-vous le prince de Talleyrand ? demanda un jour le roi de Bavière au ministre de Portugal. — Quelquefois, Sire. — Et moi aussi, reprit le roi. Je voudrais bien le voir plus souvent mais je n'ose pas[11].

Pour l'attribution d'une grande partie des territoires, les Alliés étaient d'accord. Dès les conférences de Paris, ils avaient arrêté en principe le retour du Piémont au roi de Sardaigne, de la haute Italie et des provinces Illyriennes à l'Autriche, du Hanovre à l'Angleterre, et de la Hollande, augmentée de la Belgique, à la maison d'Orange. Les provinces Rhénanes devaient échoir à la Prusse et à la Bavière. Mais de peur de mettre la discorde entre eux, les vainqueurs avaient jusqu'alors évité même de faire allusion à certaines autres questions. Le moment était venu de les aborder. Les plus graves étaient celle du grand-duché de Varsovie et celle de la Saxe. Le czar exigeait le duché de Varsovie. Il pensait à y réunir les provinces polonaises de son empire et à en former, sous le nom de royaume de Pologne, un Etat feudataire, doté d'institutions libérales et administré par les seuls nationaux. Alexandre eût été alors empereur de Russie et roi de Pologne. La Prusse convoitait la Saxe qu'on parlait d'enlever à Frédéric-Auguste pour le punir d'avoir été le dernier allié de Napoléon.

L'Autriche et l'Angleterre étaient opposées aux prétentions des deux cours du Nord. Non seulement l'Autriche répugnait à céder au czar les districts galiciens compris dans le duché de Varsovie, mais elle redoutait la puissance de la Russie et la fortune de la Prusse. Elle ne pouvait donc consentir que la Russie s'avançât en Europe ni que la Prusse, qui menaçait déjà ses frontières à l'est, vînt menacer sa frontière du nord par l'occupation de la Saxe. L'Angleterre, dont la politique tendait à affaiblir la France[12] et à empêcher la Russie de se fortifier, était décidée à donne la Saxe à la Prusse, afin précisément d'élever contre la Russie la barrière d'un Etat compact, puissant et belliqueux ; mais elle ne voulait en aucune façon que le czar conservât la totalité du duché de Varsovie. Des négociations secrètes entamées avec la Prusse pour la détacher de la Russie, sous la promesse d'avoir la Saxe, échouèrent. Loin de réussir à rompre l'union des deux souverains, Castlereagh ne fit que la rendre plus solide en provoquant une explication cordiale entre Alexandre et Frédéric-Guillaume. Les Quatre, comme on appelait, à Vienne, l'Autriche, l'Angleterre, la Prusse et la Russie, se trouvèrent ainsi former deux partis, très animés l'un contre l'autre et résolus à ne se faire aucune concession, dût-il résulter de leur dissentiment une nouvelle guerre européenne[13].

Il importait peu à la France que le duché de Varsovie restât à la Russie et que la Prusse eût la Saxe. Les intérêts français étaient sur le Rhin et sur la Meuse et non sur la Vistule et sur l'Elbe. Talleyrand en jugea autrement. Dès avant son départ de Paris, il avait justement pressenti que l'antagonisme des puissances allait donner à la France une situation importante dans le congrès ; mais il s'était buté à l'idée que la France ne pourrait ni ne devrait en retirer aucun avantage matériel. Il voulait seulement lui rendre son rang parmi les grandes puissances. A ces fins, Talleyrand pensa qu'il lui fallait faire abnégation complète et n'intervenir que pour défendre le faible contre le fort, le droit historique contre le droit de conquête et la légitimité contre l'usurpation. Il s'était tracé ce rôle, il le jugeait glorieux, il voulut le jouer jusqu'au bout. La conséquence fut qu'il se rangea avec ardeur du parti de l'Angleterre et de l'Autriche. Il était donné ainsi à Talleyrand de concilier ce qu'il croyait être les intérêts de la France avec les principes nouveaux qu'il affectait de professer. Partisan d'une alliance entre l'Angleterre, l'Autriche et la France, qui, à ses yeux, eût assuré aux trois plus vieilles monarchies la suprématie en Europe et amené à bref délai le détrônement de Murat, il devait soutenir la politique des cabinets de Londres et de Vienne. Apôtre du droit, il ne pouvait admettre que la Prusse spoliât le roi de Saxe, qui était d'ailleurs cousin germain de Louis XVIII, ni que la Russie gardât la Pologne entière au mépris des anciens traités.

En croisant si ouvertement les vues de la Russie, l'ambassadeur du roi très chrétien manquait peut-être d'à-propos, il manquait en tout cas de gratitude. Plus tard, quand il eut perdu la faveur des Bourbons, Talleyrand aimait à dire dans son salon vert de la rue Saint-Florentin : C'est ici que la Restauration s'est faite. Il aurait pu ajouter : ... grâce à l'empereur Alexandre. Devant Paris, le czar était devenu le généralissime des armées coalisées ; à Paris, il avait été l'arbitre des destinées de la France. Le 31 mars et encore le 5 avril, il pouvait, à son choix, traiter avec Napoléon Ier, reconnaître Napoléon II avec la régence de Marie-Louise, ou encore, comme il y avait pensé pendant la campagne, faire plébisciter par les Français leur futur gouvernement. S'il n'eût prêté les mains à la Restauration, jamais les Bourbons ne fussent rentrés aux Tuileries. Non seulement Louis XVIII devait sa couronne à Alexandre, mais Paris lui devait sa sauvegarde le jour de l'entrée des Alliés ; la France vaincue lui devait une légère extension de frontières ; le trésor épuisé, la réduction à vingt-cinq millions des trois cent seize millions d'indemnités et de contributions de guerre, demandés par les Coalisés et principalement par la Prusse[14]. Or, comment le roi et son premier ministre Talleyrand avaient-ils reconnu et reconnaissaient-ils encore ces bons offices ? Le roi, en déclarant publiquement au prince-régent d'Angleterre que c'était à lui, après Dieu, qu'il devait sa couronne ; en conférant à ce prince le cordon bleu et en oubliant de l'offrir au czar ; en affectant aux Tuileries de prendre le pas sur Alexandre, alors que Napoléon était allé sur le radeau de Tilsitt au-devant du souverain russe ; en déclinant la proposition d'un mariage entre le duc de Berry et la grande-duchesse Anne ; le ministre, en combattant tous les desseins de la Russie, en méprisant ses ouvertures, en s'alliant à ses ennemis. Alexandre, qui eut à Vienne plusieurs entretiens avec Talleyrand, lui rappela qu'il avait cependant rendu quelques services à la France. Talleyrand ne s'émut ni des reproches ni des menaces du czar, et il affecta même de ne pas entendre ses insinuations. C'est ainsi qu'il laissa tomber sans daigner y répondre ces paroles d'Alexandre : — Les complaisances que la France aura pour moi sur la Saxe et la Pologne seront la mesure de celles que j'aurai moi-même pour elle sur tout ce qui peut l'intéresser[15].

Jamais Castlereagh ni Metternich ne devaient tenir un pareil langage à l'ambassadeur de France. Auprès des cabinets de Londres et de Vienne, dont il soutenait si ardemment la politique et pour qui il déclinait les ouvertures de la Russie, Talleyrand ne trouvait que froideur et défiance, éloignement et dédain. Castlereagh ne croyait point à son désintéressement. Il lui dit un jour : — Ah ! s'il ne vous était resté aucune vue sur la rive gauche du Rhin ! Pour Metternich, il lui répugnait de s'allier à une nation qui avait fait la Révolution, perturbé et ensanglanté l'Europe. Il repoussait comme monstrueuse l'idée que même les intérêts allemands pussent l'engager à rappeler en Allemagne une armée qui y avait laissé de si terribles souvenirs. Il doutait en outre de l'avantage d'une alliance avec la France au point de vue militaire. D'après les lettres écrites de Paris par Wellington et le baron de Vincent, non seulement le gouvernement n'avait ni force ni prestige, mais l'armée était désorganisée, sans matériel et réduite au plus faible effectif. Un diplomate autrichien disait au duc de Dalberg : — Vous nous paraissez des chiens qui aboient fort, mais qui ne mordront point. Le roi de Bavière ayant parlé à Metternich d'une alliance éventuelle avec la France, celui-ci répondit : La France n'a pas d'armée. Talleyrand, qui n'ignorait pas ces propos, fit sentir dans ses lettres à Louis XVIII la nécessité de prendre une attitude militaire. Ce fut alors que le roi ordonna la levée de 60.000 hommes qui provoqua tant de mécontentement chez les rappelés et de si vives inquiétudes de guerre dans la population[16].

 

II

Cependant le congrès s'était ouvert le 3 novembre ou plutôt, à dater de ce jour, il avait été censé ouvert. Tout se faisait en dehors du congrès qui ne fut assemblé que pour signer l'acte final. C'était dans les comités et les commissions, dans les visites de souverain à souverain, dans les audiences privées, dans les entretiens intimes des ministres que les questions se débattaient. Les choses n'en allaient pas plus vite, car outre qu'une entente était difficile, le congrès se doublait d'un décaméron. On n'avait point encore vu — même à Erfurt — et vraisemblablement on ne reverra jamais, pareille réunion de souverains et de grands personnages. Il y avait à Vienne la très nombreuse famille impériale d'Autriche, l'empereur et l'impératrice de Russie, le roi de Prusse, le roi et la reine de Bavière, les rois de Danemark et de Wurtemberg, les princes héréditaires de l'Allemagne, tous les diplomates de l'Europe, puis le prince Eugène (Beauharnais), le prince Radziwill, le prince Schwarzenberg, le prince de Ligne, le prince de Lambesc, les plus illustres représentants de la noblesse autrichienne et hongroise, et une foule de curieux et de visiteurs, titrés, gradés, chamarrés, portant couronne ou tortis, grosses épaulettes et grands cordons. Il fallait amuser cette cohue d'altesses, et la cour d'Autriche ne faillissait pas à cette obligation. Metternich, que les plénipotentiaires avaient désigné comme président du congrès et que l'empereur François avait prié de lui servir de maître de cérémonies, n'était pas moins occupé par le programme des fêtes que par l'ordre des délibérations.

Chaque jour, c'était une revue, une chasse, un carrousel, une course en traîneau, un grand dîner, une représentation de gala, un raout, des tableaux vivants, un bal ou une redoute masquée. Nous sommes sur les dents, écrivait au comte de Mun une grande dame de Vienne, des fatigues de notre congrès et des peines que nous nous donnons pour amuser nos hôtes royaux. Ils sont aimables, mais ils nous font passer la vie la plus excédante de corps et d'esprit. — Les empereurs dansent, écrivait-on encore, les rois dansent, Metternich danse, Castlereagh danse, tout le inonde danse. Seul le prince de Talleyrand ne danse pas, mais il joue au whist. Dans Vienne en fêtes, devenue une nouvelle Capoue, on menait de front les plaisirs et les affaires, la diplomatie politique et la diplomatie galante. Les commérages n'intéressaient pas moins que les protocoles. Avec qui le czar avait-il dansé ? Quelle était sa divinité du jour, quelle serait celle du lendemain ? Quel nom lord Castlereagh avait-il encore inscrit sur sa liste des mille e tre ? Quelle grande dame, travestie en grisette, avait si longuement causé avec le roi de Wurtemberg ? Quelle autre, vêtue d'un domino noir, avait si bien intrigué le roi de Prusse ? On s'occupait ; autant de ces graves questions que du sort de la Saxe[17].

Cette communauté de plaisirs, qui semblait devoir disposer chacun à la conciliation, n'amenait pourtant pas l'entente. Selon le mot du prince de Ligne, le congrès dansait et ne marchait pas. Le lendemain d'un bal à l'Augarten où l'on s'était fait vis-à-vis dans un quadrille, d'une réception au palais impérial où l'on s'était trouvé partner au whist, d'une fête chez Metternich où l'on avait soupé côte à côte à l'une de ces tables rondes que traversait au centre un très gros oranger, formant surtout et velarium, on reprenait les discussions avec autant de roideur et d'âpreté que la veille. Aucun des intéressés ne croyant à la possibilité d'une guerre, car l'Europe n'avait pas fait l'effort immense de détrôner Napoléon pour recommencer à combattre, on se montrait intraitable. Tout le monde parlait de recourir aux armes, mais personne ne le voulait. Dans les deux partis, on cherchait sans y réussir à s'effrayer mutuellement. Des deux côtés, on faisait blanc de son épée dans la quasi certitude que l'on n'aurait pas à s'en servir[18].

L'union intime de la Russie et de la Prusse, leur attitude de plus en plus arrogante, les mouvements de leurs armées, ne laissaient pas cependant d'inquiéter Metternich et Castlereagh. Vers la fin de novembre, ils commencèrent à songer sérieusement[19] à l'alliance française qu'ils avaient jusque-là repoussée avec tant de défiance, de révolte et de mépris. Le plan d'une campagne à laquelle devaient coopérer cent mille Français fut même préparé par Schwarzenberg sans que l'on en instruisît Talleyrand. On était certain de son concours. Ses avances aux cabinets de Vienne et de Londres avaient été telles qu'elles équivalaient à un blanc-seing. Peu de temps après, la Prusse ayant déclaré qu'elle regardait comme une insulte la Note de Metternich, du 1 0 décembre, les ministres d'Autriche et d'Angleterre se décidèrent à entrer franchement en pourparlers avec Talleyrand. L'entente fut facile puisque — Talleyrand s'en vante dans ses lettres à Louis XVIII — la France ne demandait rien que la permission de verser son sang pour le roi... de Saxe. Mais dès ce moment, la France reprit son rang parmi les puissances, et le prince de Talleyrand se retrouva respecté et écouté comme au temps où il représentait Napoléon, vainqueur de l'Europe[20].

C'était le double but que s'était proposé le plénipotentiaire de Louis XVIII. Il triomphait, et, abusé, aveuglé, par ce triomphe tout relatif, il ne vit pas les vrais intérêts de la France quand, le 30 décembre, la Prusse offrit de dédommager le roi de Saxe de la perte de son royaume en lui abandonnant le tiers des territoires qu'en vertu du traité de Paris elle occupait sur la rive gauche du Rhin. Ce nouvel Etat devait être formé du Luxembourg et d'une partie des provinces Rhénanes, avec Trèves et Bonn[21].

Les instructions que Talleyrand s'était fait dicter lui prescrivaient de ne laisser acquérir par la Prusse ni Luxembourg ni Mayence. Or la proposition du cabine prussien — proposition qui avait d'ailleurs été suggérée par le czar dans une dernière pensée bienveillante pour la France[22] — le mettait à même d'obtenir bien davantage : l'éloignement de la Prusse de notre frontière de l'Est et la constitution à cette frontière d'un Etat de sept cent mille anciens sujets français, la plupart catholiques, sous le sceptre d'un roi également catholique, allié de la France et cousin germain de Louis XVIII. Mais cet arrangement étant contraire au droit historique et aux principes de la légitimité, Talleyrand repoussa d'un cœur léger la proposition de la Prusse[23], comme il avait repoussé deux mois auparavant les ouvertures de la Russie[24].

Cet arrangement était surtout contraire aux intérêts de l'Autriche, qui redoutait le contact de la Prusse au nord de la Bohême, et aux vues hostiles de l'Angleterre qui voulait tourner la pointe de l'épée prussienne contre la frontière de France[25]. De crainte sans doute que Talleyrand ne réfléchît mieux et ne donnât son assentiment à la proposition de Hardenberg[26], Castlereagh et Metternich s'empressèrent, le 3 janvier, de lui faire signer un traité d'alliance. Il y était expressément stipulé que les trois puissances ne pensant point à un agrandissement et entendant seulement compléter les dispositions du traité de Paris, ce traité, si la guerre éclatait, aurait force pour régler, à la paix, la nature, l'étendue et les frontières de leurs possessions respectives[27]. Ainsi, l'Autriche et l'Angleterre qui, en vertu du traité de Paris, auraient recouvré toutes leurs possessions, agrandi leur empire et refait à leur convenance la carte de l'Europe, daigneraient ne rien demander de plus. Et la France qui, par ce même traité, aurait perdu tout ce qu'elle pouvait perdre devrait aussi se déclarer satisfaite. La France était seulement admise à l'honneur de combattre peur la sécurité de l'Autriche et le triomphe de la politique anglaise. En vérité, le prince de Talleyrand avait-il tant à se glorifier d'avoir signé cette convention ?

Le traité du 3 janvier fut tenu secret, mais l'attitude plus ferme de Metternich et de Castlereagh, l'admission de Talleyrand dans le comité des quatre puissances, devenu le comité des Cinq[28], et de son coadjuteur, le duc de Dalberg, dans la commission de statistique, enfin certaines indiscrétions donnèrent des soupçons à la Russie et à la Prusse et les disposèrent à céder[29]. Comme l'avait prévu Talleyrand, il suffisait de montrer la guerre pour n'avoir point à la faire. Alexandre offrit de ne garder qu'une partie du duché de Varsovie, Frédéric-Guillaume consentit à ne prendre que la moitié de la Saxe. Après de longs pourparlers, les Cinq s'accordèrent sur ces bases. Au milieu de février 1815, la question de la Pologne et de la Saxe était résolue, et l'on annonçait comme très prochaine la clôture du congrès[30].

 

III

Enfin, l'empereur d'Autriche allait donc voir partir ses chers hôtes ! Très flatté d'abord que le congrès se tînt à Vienne, il pensait depuis longtemps déjà que la présence dans sa capitale de tant de têtes couronnées était importune et fort coûteuse. Pour divertir les souverains on avait épuisé tous les genres de fêtes, si bien qu'au moment de mourir le vieux prince de Ligne disait gaiement : — Je prépare aux membres du congrès un nouvel amusement : les funérailles d'un feld-maréchal, chevalier de la Toison d'Or. Cela sera fort imposant. La cour d'Autriche se trouvait à bout d'invention et plus encore à court d'argent. Les dépenses s'élevaient en moyenne à. deux cent vingt mille florins par jour. — Voici les occupations des souverains, disait-on à Vienne : l'empereur de Russie aime, le roi de Danemark boit, le roi de Wurtemberg mange, le roi de Prusse pense, le roi de Bavière parle, et l'empereur d'Autriche paye[31].

Avant la séparation du congrès, il restait encore à résoudre plusieurs questions, dont trois intéressaient tout particulièrement le prince de Talleyrand : la souveraineté de Parme, le détrônement de Murat, la déportation de Napoléon.

L'article V du traité de Fontainebleau portait que les duchés de Parme, Plaisance et Guastalla seraient donnés en toute propriété et souveraineté à l'impératrice Marie-Louise pour passer à son fils et à sa descendance en ligne directe. Il semblait qu'il n'y eût point à revenir sur les stipulations d'un traité signé par les représentants de l'Autriche, de la Prusse et de la Russie, ratifié, quant à ce point spécial, par le représentant de l'Angleterre, et garanti deux fois par les représentants de la France, le 14 avril, au nom du gouvernement provisoire, et le 30 mai, au nom du roi Louis XVIII. Tel n'était pas l'avis de Talleyrand, qui apparemment n'attachait pas plus d'importance à la signature d'autrui qu'à la sienne propre. D'accord avec l'ambassadeur d'Espagne, il s'efforça de faire restituer cette principauté à l'infante Marie-Louise d'Espagne, veuve du prince Louis de Parme. Ces négociations furent même au moment de réussir. On parlait de donner comme dédommagement à l'ex-impératrice, soit, le duché de Lucques, soit la légation de Ravenne, soit les îles Ioniennes, soit encore des fiefs en Bohême d'un revenu considérable. Metternich, empereur d'Autriche lui-même, qui dans une de ses coutumières aberrations prétendait que sa délicatesse et sa qualité de père lui imposaient le devoir de n'exercer aucune influence sur la décision du congrès à l'égard de sa fille, ne s'opposaient pas à l'un ou à l'autre de ces arrangements[32].

Marie-Louise désirait beaucoup régner à Parme, mais le sénat européen n'avait cure de la consulter. Abandonnée par ceux qui auraient dû être ses protecteurs naturels, cette jeune femme sans volonté et sans énergie se serait soumise à l'arrêt du congrès si elle n'eût trouvé dans sa retraite de Schönbrunn l'appui zélé et intéressé du général Neipperg. Ce personnage, devenu depuis tantôt six mois le chambellan et le grand-écuyer de l'ex-impératrice, avait déjà gagné sa confiance, sinon davantage. Il prit sa cause à cœur comme si elle eût été la sienne propre et fit auprès de l'empereur d'Autriche, de Metternich, de Castlereagh de nombreuses démarches qui restèrent sans résultat. Neipperg conseilla alors à Marie-Louise d'invoquer la protection du czar. Moins soucieux que Talleyrand des principes de la légitimité mais plus que lui respectueux des traités, l'empereur de Russie accueillit cette supplique avec faveur, rendit plusieurs visites à Marie-Louise et l'assura qu'elle aurait Parme. Son intervention fut toute puissante. Le cabinet de Vienne, se sentant soutenu par la Russie, changea d'attitude et fit entendre qu'il n'admettrait plus même aucune discussion sur cette question qui devait être considérée comme résolue[33]. Mais il fut décidé en même temps que le fils de Marie-Louise n'hériterait pas de sa mère la souveraineté des duchés, et qu'il serait élevé en Autriche. Comme prix du trône de Parme, on exigeait de Marie-Louise qu'elle abandonnât son enfant. Cet odieux marché, la femme de Napoléon eut la faiblesse de l'accepter[34].

Contraint de céder sur la question de Parme, Talleyrand se montrait intraitable sur celle de Naples. Il était acharné à la perte de Murat, dont Louis XVIII regardait le maintien sur le trône comme un scandale et un danger. C'est le delenda Carthago, écrivait le roi, qui ne cessait de stimuler le zèle de Talleyrand contre cet usurpateur[35]. Dans le congrès, Murat avait peu de sympathies. Comme le disait M. de Signeul, on ne prenait pas au sérieux cet ex-garçon de café qui avait mis la royauté dans des bottes de maroquin rouge[36]. Malheureusement pour Ferdinand IV, qui s'appelait toujours roi des Deux-Siciles mais qui ne régnait plus que sur une seule, l'Autriche avait signé avec Murat, le H janvier 181.4, un traité d'alliance par lequel elle lui garantissait la souveraineté pleine et entière de ses Etats d'Italie. Murat avait tenu ses engagements en combattant l'armée française. En manquant maintenant aux siens, le cabinet de Vienne eût mis le roi de Naples dans la situation vraiment pitoyable d'avoir trahi pour l'honneur.

Metternich opposait donc le traité du 14 janvier aux véhémentes représentations de Talleyrand. En vain, pour lever ses scrupules, celui-ci énonçait cette maxime, digne d'Escobar, que l'acte par lequel on garantit à quelqu'un ce qui n'est pas à lui est un acte nul, le ministre autrichien ne semblait pas se laisser ébranler[37]. Irrité de cette résistance, Talleyrand en arriva à écrire que Metternich défendait si vivement Murat par un regain d'amour pour sa femme Caroline Bonaparte, dont il avait été l'amant[38]. Metternich pensait bien à autre chose ! S'il soutenait Murat, c'était uniquement pour sauvegarder les intérêts de l'Autriche. Dans l'éventualité d'une guerre contre la Prusse et la Russie, l'Autriche avait dû à peu près dégarnir l'Italie afin de concentrer toutes ses forces en Bohême et en Galicie. Or l'Italie était mécontente, agitée, peuplée de conspirateurs qui, croyait-on, n'attendaient pour agir qu'un signal de Murat. Lui-même avait son armée prête à entrer en campagne. Il connaissait, disait-il, les projets sinistres de certaines puissances, et il était déterminé à les prévenir en soulevant l'Italie et en se faisant proclamer chef de la confédération. Quel que fût le résultat de sa prise d'armes, du moins il mourrait roi et l'épée à la main. L'Autriche se trouvant ainsi exposée à deux attaques simultanées, au nord et au sud de son empire, Metternich cherchait à temporiser. Mais il espérait bien, lorsqu'il serait délivré de toute crainte du côté de la Russie, trouver quelque prétexte pour rompre l'importun traité avec Naples[39].

Ce prétexte, Murat le fournit lui-même par l'envoi d'une Note mettant Talleyrand en demeure de s'expliquer sur les intentions de la France à son égard, et signifiant à Metternich qu'en cas de guerre avec cette puissance, les troupes napolitaines seraient forcées d'entrer dans les duchés. Cette Note arriva mal à propos. En décembre 1814, au milieu des débats sur la Saxe, elle eût intimidé l'Autriche ; à la fin de février 1815, ces débats étant clos, Metternich riposta par la déclaration que l'empereur, son maître, regarderait comme un cales belli toute violation du territoire italien. En même temps, des, ordres furent donnés pour l'envoi de cent cinquante mille hommes en Italie, et lord Castlereagh, de passage à Paris, et le baron de Vincent entrèrent directement en pourparlers avec Louis XVIII au sujet d'une action commune contre Murat. Le 5 mars, le roi transmit à Talleyrand la note de Vincent et un contre-projet, en lui mandant d'avoir à insister sur la fixation d'une époque prochaine pour l'exécution du plan concerté. Si donc Murat régnait encore à Naples, ses jours de royauté étaient désormais comptés[40].

Napoléon était également menacé. On montre une intention assez arrêtée d'éloigner Bonaparte de l'île d'Elbe, écrivait Talleyrand à Louis XVIII. Les uns proposaient de le transférer à Sainte-Lucie ou à Sainte-Hélène, les autres dans l'une des Açores. On parlait partout de ce projet[41]. L'excellente idée des Açores, selon le mot de Louis XVIII, avait l'assentiment de Castlereagh[42], et sans nul doute celui de l'empereur d'Autriche qui avait été le premier à déplorer que son gendre ne fût pas envoyé bien loin de l'Europe[43]. Seul dans le congrès, le czar était peut-être disposé à prendre la défense de Napoléon, croyant à juste titre la Russie et les autres puissances engagées envers le vaincu par le traité de Fontainebleau. Encore Alexandre aurait cédé assez vite aux considérations d'intérêt général qui allaient être invoquées. Il semble, en tout cas, que l'enlèvement de Napoléon était subordonné à l'exécution du plan contre le roi de Naples. En même temps que l'on eût expulsé Murat on eût fait le coup sur l'île d'Elbe. La prétendue connivence de Napoléon avec son beau-frère dans les conspirations italiennes eût servi de prétexte pour déchirer la seule page encore intacte du traité de Fontainebleau[44].

Au congrès de Vienne, Talleyrand représenta la France avec une dignité qui touchait à la grandeur. Il parle comme un ministre de Louis XIV, disait-on de lui, non sans une pointe d'ironie. La politique de ce ministre de Louis XIV, qui n'était que le ministre de Louis XVIII, fut-elle aussi habile que son attitude fut haute ? Sans doute, comme Talleyrand prit soin de s'en vanter lui-même, il fit rendre à la France, vaincue, démembrée et admise par grâce u congrès, sa place dans le grand conseil de l'Europe ; il concourut à la rupture de la quadruple alliance ; il aida à réédifier le trône de Frédéric-Auguste et il sut ébranler celui de Murat. Mais quand on se rappelle qu'il s'aliéna la Russie pour se rapprocher de nos pires ennemies d'alors, l'Angleterre et l'Autriche ;qu'il sacrifia à la restauration du roi de Saxe et au partage du duché de Varsovie la neutralisation de la rive gauche du Rhin et peut-être une extension de frontières vers la Belgique, qu'il conclut enfin le traité léonin du 3 janvier 1815, aux termes duquel l'armée française était tenue de combattre dans l'unique intérêt de l'empire d'Autriche, on est bien près de penser que si Talleyrand fit jouer un rôle à la France, ce fut un rôle de dupe.

 

 

 



[1] Exactement 31.751.639 ainsi répartis : Départements belges, hollandais, suisses, allemands et italiens : 13.690.180. Duché de Lucques et Piombino : 179.000. Royaume d'Italie : 6.703.200. Provinces Illyriennes et Sept-Îles : 1.943.418. Francfort, Berg, Erfurt, Neuchâtel, Pomeranie suédoise, etc. : 1.290.805. Westphalie : 1.928.799. Duché de Varsovie : 3.929.626. Saxe : 2.085.911. (Procès-verbaux des séances de la commission de statistique des 24, 25 et 28 déc. 1814 et 10 janv. 1.815.)

[2] Talleyrand n'en a pas moins tort d'écrire dans ses Mémoires (II, 174) : J'ai le droit de rappeler avec orgueil les conditions obtenues par moi. Il a tort aussi (Mém., II, 201) de prétendre qu'il n'apposa pas sa signature aux articles secrets du traité de Paris, car il est bien facile de vérifier que ces articles ont été signés par lui.

[3] Talleyrand à Louis XVIII, 25 nov. (Correspondance avec Louis XVIII.)

[4] Convention de Londres du 29 juin 1814. Cf. Talleyrand à Louis XVIII, Londres, juillet 1814 : ... Il résulte de cette convention que la France n'aura à jouer aucun rôle au congrès, ou encore que les Alliés sont encore prêts à nous attaquer. (Arch. Aff. étrangères, 672.)

[5] Talleyrand a eu assez d'esprit pour sentir qu'en changeant de maître il devait changer de moyens. On ne l'entend prêcher que légitimité, modération, justice ! N. à Mme de Staël-Holstein, Vienne, 27 nov. (Arch. Aff. étr., 675).

[6] Talleyrand, Mém., II, 204-207. Cf. Instructions du roi Louis XVIII à son ambassade au congrès de Vienne, 10 sept. 18t4. (Arch. Aff. étr., 677.) — Toute la conduite de Talleyrand au congrès de Vienne est résumée d'avance dans cette pièce.

[7] Protocole de la conférence du 22 septembre.

[8] Talleyrand à Louis XVIII, Vienne, 4 oct. (Correspondance avec Louis XVIII, 10-18). Cf. Note de Talleyrand aux plénipotentiaires (Angebert, I, 264) Gentz, Correspondance, I, 108. Talleyrand, Mém., II, 279-281.

[9] Talleyrand's incongruities, Castlereagh à Wellington, 9 oct. (Letters and Dispatchs, II).

[10] Talleyrand à Louis XVIII, 9 oct. (Correspondance avec Louis XVIII.) Gentz, Correspondance, I, 157. Mémoire (rédigé par La Besnadière) sur la conduite de l'ambassade de France à Vienne. (Arch. Aff. étr., 672.)

[11] Mémoire de Gentz sur le congrès de Vienne (Metternich, Mém., 482-483). Mémoire de La Besnadière (Arch. Aff. étr., 672). Gentz, Correspondance, I, 99.

[12] L'Angleterre était en train d'obtenir ce résultat par la fondation du royaume des Pays-Bas et l'attribution à la Prusse des provinces Rhénanes. Castlereagh dévoile sans ambages sa politique anti-française dans sa lettre à Wellington, du 1er octobre. (Letters and Dispatchs, II.)

[13] Gentz, Correspondance, I, 79, 80, 86, 87, 93. Mémoires précités de Gentz et de La Besnadière. Talleyrand à Louis XVIII, 4, 9, 17, 25, 31 oct., 6 et 12 nov. (Correspondance avec Louis XVIII.) Cf. Castlereagh à Wellington, 25 oct. (Letters and Dispatchs, II).

[14] Lettre de Beugnot au roi (13 mai), renvoyée à Talleyrand et transmise par lui, à Nesselrode, le 16 mai, pour être communiquée au czar. Note du général Dulauloy, 28 mai. Lettre de Frédéric-Guillaume à Lottum, 16 juin. (Arch. étr., 646.)

[15] Talleyrand à Louis XVIII, 4, 25 oct., 17 nov. (Correspondance avec Louis XVIII.)

[16] Talleyrand à Louis XVIII, 17, 19, 31 oct., 25 nov. Louis XVIII à Talleyrand, 21, 27 oct. (Correspondance avec Louis XVIII.) Lettre des plénipotentiaires français au département, 16 oct. (ibid., 58), Wellington à Castlereagh, Paris, 25 oct. (Dispatchs, Supplément, IX.) Mémoire de Gentz. (Metternich, Mém., II, 480-483.) Gentz, Correspondance, I, 159, 157. Mémoire de La Besnadière sur la mission à Vienne. (Arch. Aff. étr., 672.)

[17] Lettres de Vienne : De Salmon à la comtesse de La Motte, 24 nov. N. à Mme de Staël-Holstein, 27 nov. Maréchale de Bellegarde au baron de Vincent, 31 déc. N. à Mme Julie Feray, 4 janv. N. au marquis d'Avaray, 18 janv. Mme N. au comte de Mun, 28 janv. (Arch. Aff. étr., 675.)

[18] Talleyrand à Louis XVIII, 12, 17 oct., 4 janv. (Correspondance avec Louis XVIII). Gentz, Correspondance, I, 87. Mémoire de Gentz sur le congrès de Vienne. Liverpool à Castlereagh, Londres, 2 nov. (Dispatchs of Wellington, Supplément, IX.) N. à d'Avaray, Vienne, 18 janv. (Arch. Aff. étr., 675.)

[19] Dès la fin d'octobre, Castlereagh avait admis l'hypothèse de l'alliance française, mais comme pis-aller. (Castlereagh à Wellington, 25 oct., Dispatchs of Wellington, Supplément, IX.) Il rêvait une alliance entre l'Angleterre, Autriche, la Prusse, les petits Etats d'Allemagne et les Pays-Bas, dont les forces réunies devaient imposer à la France et à la Russie. Mais la fidélité du roi de Prusse à son amitié déférente pour le czar fit échouer ces plans.

[20] Castlereagh à Wellington, 21 nov. (Letters and Dispatchs, II.) Castlereagh à Liverpool, 17, 18 et 25 déc. (Dispatchs of Wellington, Supplément, IX.) Talleyrand à Louis XVIII, 25 nov., 7, 15, 28 déc., 4 janv. (Correspondance avec Louis XVIII.) Gentz, Correspondance, I, 123-124, 153, 157. Mémoire de Gentz sur le congrès de Vienne. (Metternich, Mémoires, II, 474, sq.) Mémoire de La Besnadière sur la mission à Vienne. (Arch. Aff. étr., 672.)

[21] Note de Hardenberg à Metternich, 23 déc. Projet de convention proposé par les plénipotentiaires de Russie, 30 déc. Protocole de la conférence du 30 déc. (d'Angeberg, 1863-1873). Cf. Talleyrand à Louis XVIII, 6 janv. (Correspondance avec Louis XVIII). Castlereagh à Liverpool, 2, 3 et 5 janv. (Dispatchs of Wellington, Supplément, IX).

[22] Talleyrand à Louis XVIII, 6 janv. (Correspondance avec Louis XVIII.)

[23] Talleyrand à Louis XVIII, 6 janv. Cf. Louis XVIII à Talleyrand, 15 janv. (Correspondance précitée.)

[24] Talleyrand à Louis XVIII, 4 et 25 oct., 17 nov. (Correspondance précitée.)

[25] Je suis toujours porté à reprendre la politique que M. Pitt avait fortement à cœur et qui consiste à mettre la Prusse en contact avec la France sur la rive gauche du Rhin. Castlereagh à Wellington, Vienne, 1er oct. (Letters and Dispatchs, II.)

[26] Comparez les lettres de Castlereagh à Liverpool du 25 décembre, avec celles des 2, 3 et 5 janv. (Dispatchs of Wellington, Supplément, IX.)

[27] Traité secret d'alliance, 3 janv. Préambule, Article X.

[28] Talleyrand ne fut admis dans ce comité, qui formait en réalité tout le congrès, que le 7 janvier.

[29] Mémoire de Gentz sur le congrès de Vienne, 12 février. (Metternich, Mém., 485, 492.) Cf. Talleyrand à Louis XVIII, 1er février, 8 février. (Correspondance avec Louis XVIII.) Müffling à Low, Aix-la-Chapelle, 29 janv. (Dispatchs of Wellington, Supplément, IX.)

[30] Mémoire de Gentz précité. Talleyrand à Louis XVIII, 15 fév. (Correspondance précitée.) Wellington à Castlereagh, Vienne, 25 février. (Dispatchs, XII.)

[31] Talleyrand à Louis XVIII, 6 nov. Bausset, Mémoires, IV, 124. Colonel de Berger à N., Teschon, 8 janv. N au comte de La Fare, Vienne, 22 oct. (Arch. Aff. étr., 675.)

[32] Talleyrand à Louis XVIII, 13 oct., 19 janv., 15 févr. (Correspondance avec Louis XVIII.) Mémoire de Gentz. (Metternich, Mém., II, 482, 498.) Rapport de Méneval à Napoléon, Paris, 18 mai 1815. (Arch. Aff. étr., 1802.) — Ce volumineux rapport a été reproduit avec de nombreuses suppressions et quelques adjonctions dans les Souvenirs de Méneval, II, 140 à 330.

[33] Rapport de Méneval à Napoléon. Paris, 18 mai. (Arch. Aff. étr., 1802). Méneval, Souvenirs, II, 213-216-218. Talleyrand à Louis XVIII, 15 et 26 févr, Louis XVIII à Talleyrand, 3 mars. (Correspondance de Talleyrand et de Louis XVIII.) Cf. Correspondance de Marie-Louise, 178.

[34] Méneval, Souvenirs, II, 233, 235, 236, 238. Cf. Louis XVIII à Talleyrand, 3 mars, et Instructions du même au même, 5 mars. (Correspondance précitée).

[35] Louis XVIII à Talleyrand, 10 déc. et 11 févr. Cf. 13 oct., 22 nov., 7 janv., etc. (Correspondance avec Louis XVIII.) Castlereagh à Wellington, 25 oct. (Letters and Dispatchs, II.)

[36] Rapport du 2 févr. 1815. (Arch. nat., F. 7, 3739.)

[37] Mémoire de Gentz. (Metternich, Mémoires, II, 499, 501.) Talleyrand à Louis XVIII, 4 oct., 6 nov., 30 nov., 15 déc., 1er févr. (Correspondance avec Louis XVIII.) Cf. Instructions du roi à son ambassade au congrès. (Arch. Aff. étr., 677.)

[38] Talleyrand à Louis XVIII, 25 nov. (Correspondance précitée). Cf. Lettre de Vienne au département, novembre 1814 (Arch. Aff. étr., 684), et Mme de Rémusat, Mémoires, III, 48.

[39] Mémoire de Gentz, précité. Lettre de Vienne au département, novembre. (Arch. Aff. étr., 684.) Les ambassadeurs au département, 6 nov. (Talleyrand, Mém., II, 423).

[40] Talleyrand à Louis XVIII, 24 févr. (Correspondance précitée.) Talleyrand à Louis XVIII. 24 et 26 févr. Louis XVIII à Talleyrand, 3 et 5 mars. (Correspondance avec Louis XVIII.) Cf. La lettre de Ruffo, ministre de Ferdinand IV, à Talleyrand, Vienne, 28 avril 1815 (Arch. Aff. étr., 684), et la lettre de Wellington à Castlereagh, Vienne, 25 févr. (Dispatchs, XII). Je regarde l'affaire de Murat comme réglée. •

[41] Talleyrand à Louis XVIII, 13 oct. et 7 déc. Cf. Louis XVIII à Talleyrand 21 oct. (Correspondance de Talleyrand avec Louis XVIII.) Lettre de Dupont, 8 oct. (Correspondance précitée, 72.) N. au comte Dumoustiers, Londres, 8 déc. John Adye à sa femme, Porto-Ferrajo, 22 janv. Rapp. de Mariotti, Livourne, 4 oct. (Arch. Aff. étrang., 673 et 1800.) Correspondance anglaise, 26 oct. Lettre d'Allen, 27 oct. (Arch. nat., F. 7, 3.739). Note de lord Liverpool. (Dispatchs of Wellington, Supplément, IX, 555.) Blacas à Castlereagh, 4 mars. (Castlereagh, Letters and Dispatchs, Ordre du jour de Dessoles. Moniteur, 8 mars.) La Fayette, Mémoires, V, 345. Joseph de Maistre à Vallaise, Saint-Pétersbourg, 21 fév. (Correspondance, V.) Pasquier, Mem., 120, 121.

[42] Talleyrand à Louis XVIII, 13 oct. Louis XVIII à Talleyrand, 21 oct. (Correspondance de Talleyrand et de Louis XVIII.)

[43] François Ier à Metternich, Troyes, 12 avril 1814 : Plût à Dieu qu'on envoyât Napoléon bien loin... A l'île d'Elbe, Napoléon reste trop près de la France et de l'Europe. (Metternich, Mémoires, II, 473.)

[44] Talleyrand à Louis XVIII, Vienne, 7 déc. (Correspondance avec Louis XVIII). ... La conclusion est : il faut se hâter de se débarrasser de l'homme de l'île d'Elbe et de Murat. Mon opinion fructifie. — Joseph de Maistre à Vallaise, Saint-Pétersbourg, 21 fev. (Correspondance, V) : J'espère que l'auguste assemblée aura pourvu (avant de se séparer) à la transportation absolument nécessaire de Napoléon. Il faut l'anéantir moralement.

L'ordre du jour de Dessoles aux Gardes nationales de France (Moniteur, 8 mars 1815) porte : Des mesures avaient été adoptées au congrès de Vienne pour éloigner davantage Bonaparte. Vraisemblablement, Dessoles s'exprimait si affirmativement pour prouver que Napoléon était au ban de l'Europe. Mais nous n'avons trouvé ni dans les actes du congrès, ni dans les correspondances de Gentz, Talleyrand, Castlereagh, Metternich, Wellington, etc., aucun indice que des mesures aient été arrêtées au congrès contre Napoléon. Il n'en est pas moins démontré d'ailleurs, par les documents cités dans les notes précédentes, que si ces mesures n'étaient point prises, on était au moment de les prendre.

Sur la prétendue participation de Napoléon aux conspirations de l'Italie ou plutôt sur les craintes qu'on en avait. Cf. Wellington à Cooke, 20 sept. ; à Liverpool, 25 déc. et 5 janv. ; Castlereagh à Liverpool, 18 déc. (Wellington, Dispatchs, XII, et Supplément, XI). Chevalier Tinseau à Castlereagh, 27 nov. (Letters and Disp. of Castlereagh, II). Talleyrand à Louis XVIII, 17 nov., 7 déc., 15 févr. Louis XVIII à Talleyrand, 22 nov. (Correspondance avec Louis XVIII). Rapp. du consul de Livourne, 15 nov., 12 déc., 24 janv. (Arch. Aff. étr., 1800).