1814

LIVRE SEPTIÈME

II. — LES ALLIÉS DEVANT PARIS.

 

 

A peine le départ de l'impératrice était-il résolu que le roi Joseph retomba dans ses perplexités. Le Conseil n'avait voté cette mesure qu'en la condamnant, et jamais les dangers de l'abandon de Paris n'étaient apparus aussi clairement au frère de Napoléon. Le plus douloureux combat se livrait dans son esprit, dans sa conscience. Rester à Paris, c'était trahir la volonté de l'empereur ; quitter Paris, c'était trahir ses intérêts suprêmes. Ne sentant pas sa responsabilité suffisamment couverte par les ordres de Napoléon, et encore moins par le vote illusoire du Conseil, Joseph tenta une dernière démarche auprès de l'impératrice. À l'issue de la séance, lui et Cambacérès suivirent Marie-Louise dans ses appartements particuliers. Ils firent valoir les arguments qu'eux-mêmes, un instant auparavant, avaient annulés en produisant la lettre de l'empereur, ils montrèrent de nouveau les terribles conséquences que pouvait entraîner l'abandon de Paris, ils dirent enfin que seule l'impératrice avait autorité pour décider le parti à prendre[1]. Marie-Louise s'alarmait de quitter les Tuileries[2]. Mais c'était vraiment trop demander à cette enfant couronnée qu'un pareil acte de volonté. Elle répondit au roi que lui et l'archichancelier étaient ses conseillers obligés, et qu'elle ne prendrait pas sur elle de donner un ordre contraire aux instructions de l'empereur et au vote du Conseil privé, sans avoir leur avis conforme et signé. Cette proposition n'était pas du goût de Joseph. L'entretien en resta là, et il fut convenu que le départ aurait lieu à l'heure fixée. Le roi, cependant, dit qu'il irait, au point du jour, hors de Paris, afin d'inspecter les positions el de chercher des nouvelles des maréchaux Mortier et Marmont. Il demanda que l'impératrice ne se mît en route que quand il serait de retour aux Tuileries. Après quelques heures de sommeil, Joseph se rendit en effet aux avant-postes, mais soit qu'il se fût laissé retarder dans sa tournée, soit qu'il n'eût rien de nouveau à dire à l'impératrice, il ne revint pas au palais et n'y envoya aucun message[3].

On employa le reste de la nuit aux préparatifs de départ. Dès sept heures du matin, l'impératrice en costume de voyage — une espèce d'amazone de couleur brune — se tenait dans son appartement avec le roi de Rome, Mme de Montesquiou, la duchesse de Montebello  et Mmes de Luçay, de Castiglione et Montalivet. Dans les salons contigus attendaient les personnes désignées pour accompagner la souveraine : le comte de Beauharnais, chevalier d'honneur, les chambellans de Gontaut et d'Haussonville, Beausset, préfet du palais, le prince Aldobrandini, premier écuyer, Méneval, secrétaire des commandements, Corvisart et Auvity Chacun gardait un silence oppressé. Le moindre bruit, l'ouverture d'une porte troublait tout le monde. On s'attendait à chaque minute à voir paraître le roi Joseph. Vers huit heures, les officiers de la garde nationale de service au palais demandèrent à être admis en présence de l'impératrice. Ils supplièrent la souveraine de ne pas abandonner Paris, promettant de la défendre jusqu'à la mort. Marie-Louise-touchée jusqu'aux larmes de leur dévouement allégua la volonté de l'empereur. Pourtant elle retardait d'heure en heure son départ et cherchait à gagner du temps. Elle espérait, sans oser se l'avouer, qu'un événement fortuit la forcerait à rester à Paris. Un peu avant neuf heures un officier donna ordre de rentrer aux écuries aux nombreuses voitures qui stationnaient devant le pavillon de Flore. Quelques minutes après, Cambacérès étant arrivé, un domestique courut porter contre-ordre. Pressée par les uns de hâter son départ, par les autres de le différer, l'impératrice attendait toujours le retour du roi Joseph. Elle rentra un moment dans sa chambre à coucher, jeta avec humeur son chapeau sur le lit et se laissa tomber dans une bergère. Là, appuyant la tête sur ses deux mains, elle se prit à pleurer. On l'entendait répéter au milieu de ses sanglots :Mon Dieu ! qu'ils se décident donc, qu'ils mettent un terme à cette agonie. Joseph ne paraissait pas, et déjà Clarke avait envoyé un aide de camp pour inviter l'impératrice à se mettre en route. A dix heures et demie, un second aide de camp se présenta, disant qu'il n'y avait plus un instant à perdre, que si l'on tardait encore on s'exposerait à tomber dans des partis de Cosaques.

L'impératrice s'abandonnant à sa destinée quitta les Tuileries. Il fallut en arracher le petit roi de Rome. — N'allez pas à Rambouillet, disait-il en pleurant à sa mère. C'est un vilain château. Restons ici. L'enfant se débattait dans les bras de M. de Canisy ; il se cramponnait aux portes, à la rampe de l'escalier, criant de toute la force de sa petite voix : — Je ne veux pas quitter ma maison ! je ne veux pas m'en aller ! Puisque papa n'est pas là, c'est moi qui suis le maître[4].

Les voitures défilèrent lentement, comme si l'on espérait encore un contre-ordre. En tête s'avançaient dix lourdes berlines vertes aux armes impériales, puis venait la voiture du sacre, couverte de toiles, puis la colonne interminable des fourgons. Douze cents cavaliers et fantassins de la vieille garde formaient l'escorte. Quoiqu'il fût déjà tard dans la Matinée, une centaine de curieux seulement stationnaient devant le guichet du Pont-Royal. Ils gardèrent le plus profond silence, comme au passage d'un convoi funèbre. Pas un mot, pas un cri, pas un geste pour saluer, maudire ou-retenir les fugitifs. Chez ceux qui partaient et chez ceux qui restaient, c'était le même abattement. Le cortège suivit les quais en longeant le mur du jardin. Aux Champs-Élysées, l'impératrice se pencha hors de la voiture pour regarder ce grand Paris, où elle était entrée avec crainte, où elle avait trouvé quatre années de bonheur, qu'elle quittait le cœur déchiré et les yeux pleins de larmes, et qu'elle devait si vite oublier[5] !

Quand Joseph rentra dans Paris, le départ de l'impératrice était un fait accompli. Le roi se trouvait délivré des angoisses de l'indécision, et sa conscience ne l'accusait point. S'il n'avait pas fait au delà de ce qu'il devait en substituant, avec le magnanime courage des responsabilités, sa volonté à celle de Napoléon, il avait du moins rempli son devoir en obéissant à des ordres formels et réitérés. Sur un point, cependant, Joseph ne s'était pas conformé aux instructions de l'empereur. Dans l'idée de Napoléon, le départ de l'impératrice était inséparable de la translation immédiate du gouvernement au delà de la Loire. Les ordres, à ce sujet, n'étaient pas moins précis que ceux : qui concernaient l'impératrice : Si l'ennemi s'avançait en force sur Paris, écrivait Napoléon le 16 mars, faites partir dans la direction de la Loire la régente, mon fils, les grands dignitaires, les ministres, les officiers du sénat, les grands officiers de la couronne... Le 8 février, il avait déjà écrit : Faites partir l'impératrice et le roi de Rome pour Rambouillet. Ordonnez au sénat, au conseil d'État de se réunir sur la Loire. Laissez à Paris ou le préfet, ou une commission spéciale, ou un maire[6]. Or, le 28 mars, quand à l'issue du conseil les ministres et les grands dignitaires demandèrent s'ils devaient quitter Paris, il fut résolu que seuls Cambacérès et La Rouillerie, avec le Trésor, accompagneraient l'impératrice ; les autres personnages auraient à attendre que l'ordre de départ leur fût transmis par le grand juge. Miot de Mélito raconte que très surpris de cette décision, il en manifesta dans la nuit même son étonnement au roi Joseph, qui ne sut lui donner que de vagues explications[7].

L'ordre de l'empereur était là, clair et formel, et comme dicté dans une vision de l'avenir. Tous, Joseph même, devaient quitter Paris[8]. Que le roi prît sur lui d'y rester, puisqu'il portait l'uniforme des grenadiers de la garde et qu'on allait se battre, cela se conçoit. Qu'il ne désignât point un commissaire impérial, cela se comprend encore, car il lui était bien difficile de Paire un choix, alors que l'empereur lui-même n'avait pu s'y résoudre, refusant nettement le duc de Rovigo et renonçant au roi Louis, qu'il avait semblé disposé à accepter d'abord[9]. Mais que Joseph ajournât le départ du gouvernement, voilà qui s'explique avec peine. Ne devait-il pas penser que dans le désarroi et la confusion d'un assaut, les ordres du grand juge parviendraient difficilement, et qu'en tout cas, il serait fort aisé de s'y dérober ? Le roi croyait peut-être que le danger n'était pas si pressant, qu'il y avait chance de repousser l'ennemi. Mais on avait bien dérangé l'impératrice, le roi de Rome, Cambacérès ; on pouvait bien déranger les ministres et M. de Talleyrand, quitte à les faire revenir à Paris trois jours plus tard, comme il semble que la chose avait été arrêtée avec Marie-Louise[10]. Faut-il conclure de cet étrange ajournement que Joseph voulait rester à Paris dans le dessein de traiter avec les Alliés au nom de la France, afin de rendre définitif, sous Marie-Louise régente, son titre provisoire de lieutenant général de l'empire ? Pour cela, la présence des ministres, surtout telle du sénat, était nécessaire.

On sait qu'au commencement de mars, des personnes de l'entourage de Joseph et même des sénateurs lui avaient fait des ouvertures dans ce sens. Le jour du départ de l'impératrice, ils les renouvelèrent. Mais ceux-là mêmes qui ont dévoilé ces intrigues portent témoignage que le frère de l'empereur n'y voulut point tremper[11] ; et pendant les vingt-quatre heures que Joseph resta seul à Paris, chef du gouvernement et de l'armée, non seulement il ne tenta rien pour entrer en pourparlers avec les Alliés, mais tous les parlementaires furent refusés aux grand'gardes[12]. Dans le conseil du 28 mars, le roi pécha seulement par imprévoyance. Il n'en commit pas moins une grande faute. En remettant au lendemain ce qu'il était si simple d'ordonner pour le jour même, Joseph se fit le complice involontaire des événements qui suivirent.

La nouvelle du départ de l'impératrice qui se ré pandit dans Paris, déjà si alarmé, y jeta la consternation. Quel espoir conserver puisque le gouvernement lui-même désespérait ? Pourquoi prendre les armes puisqu'il était le premier à donner l'exemple de la désertion ? Ainsi pensaient tous ceux qui, en obéissant aux illusions du patriotisme, avaient jusqu'au dernier jour cru impossible cette chose monstrueuse : les Cosaques à Paris. Dans la masse de la population beaucoup souffraient d'avoir à subir cette honte ; mais chez le plus grand nombre, la terreur l'emportait sur l'humiliation. La fille de celui qui était regardé comme le plus puissant monarque de la Coalition abandonnant Paris, il semblait que disparût avec elles la sauvegarde de la capitale. La fuite de Marie-Louise livrait Paris au pillage, à l'incendie, à toutes les violences, à tous les désastres ; Paris était voué au sort de Moscou[13] !

Le canon que l'on entendait gronder vers Bondy, les habitants de Romainville, de Pantin, d'Aubervilliers, qui passaient éperdus les barrières, l'appel aux armes distribué dans les rues et commençant par ces mots : Nous laisserons-nous piller, nous laisserons-nous brûler ? n'étaient point faits pour calmer les frayeurs. Nombre de gens quittèrent Paris. Les routes de Rouen, de Chartres, de Dreux, étaient encombrées de voitures de toute espèce : berlines, cabriolets, chars à bancs, remplis de femmes et d'enfants, fourgons remplis de meubles. À la Bourse, sur les boulevards, dans les faubourgs, la foule s'amassait, exprimant son indignation du départ de la régente. Ce fut la première fois, rapporte un témoin, que j'entendis le peuple accuser l'empereur. Vers quatre heures on afficha cette proclamation du roi Joseph : Citoyens de Paris, une colonne ennemie s'avance sur la route d'Allemagne ; l'empereur la suit de près à la tète d'une armée victorieuse. Le conseil de régence a pourvu à la sûreté de l'impératrice et du roi de Rome. Je reste avec vous. Armons-nous pour défendre cette ville... L'empereur marche à notre secours. Secondez-le par une courte et vive résistance, et conservons l'honneur français. La proclamation n'était pas mal conçue, car c'était rassurer la population de dire qu'on n'aurait affaire qu'à une colonne et que l'empereur arrivait à marches forcées. Malheureusement le départ de l'impératrice démentait ces affirmations. De plus, Joseph n'était point populaire. On accueillit mal sa proclamation, et ceux qui avaient encore le cœur de plaisanter colportèrent aussitôt ce méchant quatrain[14] :

Le roi Joseph pâle et blême

Pour nous sauver reste avec nous.

Croyez, s'il ne nous sauve tous,

Qu'il se sauvera bien lui-même.

Les sentiments de la foule sont multiples. Dans ces groupes irrités ou abattus, quelques patriotes, — d'autres disent des émissaires de la police, et il y avait certainement des uns et des autres — cherchaient à relever les courages et parvenaient à se faire écouter. Ils montraient des régiments et des batteries qui défilaient dans la direction des barrières du Nord. Ainsi, disaient-ils, on a l'intention de combattre, et le départ de l'impératrice n'implique pas le dessein de livrer Paris. Quand les Russes ont abandonné Moscou, ils n'avaient préalablement pris aucune mesure de défense. Si donc on s'occupe de défendre Paris, c'était qu'on ne veut pas l'abandonner, et si l'on se- prépare à la résistance, c'est que la résistance paraît possible. Les forces de l'ennemi sont peu nombreuses, des renforts sont en marche pour secourir Paris, l'empereur lui-même, qui ne voudra pas laisser prendre sa capitale, va arriver avec la garde. La conclusion de toutes ces paroles, conclusion qui trouvait nombre d'approbateurs parmi les ouvriers, c'était que la population courût aux armes et secondât énergiquement l'armée et la garde nationale. Mais les alarmistes ripostaient : Napoléon est en déroute, Joseph est un lâche, Clarke un traître. La défense ne servira qu'à exaspérer les Alliés, qui sont plutôt des libérateurs que des ennemis. On a tout à gagner à la chute du tyran. Ce sera une délivrance. Il n'y aura plus ni guerre, ni conscription, ni impôts. Et l'on rappelait les proclamations royalistes affichées et jetées sous les portes durant les dernières nuits. Toutes les opinions se manifestaient. Chez les uns, il y avait de l'énergie et encore de l'espoir, chez d'autres régnait l'épouvante ; mais le sentiment qui dominait était la stupeur. Au reste, bien que l'on sût l'ennemi presque sous Paris, on ne croyait pas à une bataille pour le lendemain. Les théâtres ouvrirent. À Feydeau, il n'y avait que vingt personnes dans la salle, mais aux Français, où l'on jouait Gabrielle de Vergy, on fit encore une recette de 380 francs[15].

Informés cependant de l'approche des Alliés, et par les lettres de Compans et par les dépêches qu'envoie d'heure en heure l'officier du génie en observation sur la tour de Montmartre[16], le roi Joseph et le ministre de la guerre arrêtent les dernières mesures. Joseph qui a reconnu le terrain dans la matinée donne la disposition pour le lendemain[17]. Clarke veille à tous les détails. Il écrit soixante lettres. Il exhorte Compans à disputer le terrain pied à pied, le salut de l'État dépendant peut-être de pouvoir contenir l'en, nemi deux ou trois jours. Il presse le retour des maréchaux Marmont et Mortier, puis il leur transmet les instructions du roi Joseph. Il rappelle la colonne d'infanterie en marche vers Beauvais. Il ordonne à Hullin de former sur-le-champ six bataillons de guerre dans les dépôts de la ligne, d'armer un bataillon d'officiers sans emploi, d'interroger les prisonniers amenés de Ville-Parisis, d'envoyer une garnison à Saint-Denis, de l'infanterie au fort de Vincennes, les élèves d'Alfort au pont de Charenton. Il mande à Ornano d'endivisionner tous les hommes des dépôts de la garde et de les poster en avant des faubourgs, à Fririon de faire occuper par les élèves de Saint-Cyr les ponts de Sèvres, de Saint-Cloud et de Neuilly, à Préval de diriger sur Paris ce qu'il a de disponible : ... il importe peu que les cavaliers soient équipés pourvu qu'ils soient montés et armés. Il nomme aux commandements vacants. Il invite Chabrol à hâter la levée des mobilisés de la Seine. Il avise Daru que des troupes vont se concentrer sous Paris, auxquelles il faut assurer des vivres, et il l'informe qu'il manque des capotes aux élèves de l'écale polytechnique, qui bivouaquent depuis la veille. Il ordonne au général d'Aboville d'établir quatre-vingt-quatre pièces de position sur les hauteurs de Montmartre et de Belleville et à la tête des faubourgs, et d'organiser huit batteries de réserve[18].

Le duc de Feltre, par malheur, portait trop tard son activité sur la défense de Paris. On aurait pu y tenir deux ou trois jours, même avec le petit nombre de soldats dont on disposait ; mais, pour cela, ce n'était pas le 29 mars, presque sous le canon de l'ennemi, qu'il eût fallu préparer la résistance. C'était au mois de février qu'on aurait dû tout commencer, c'était dans la dernière semaine de mars, alors que le manque de nouvelles de l'empereur provoquait tant d'inquiétudes, qu'on aurait dû tout finir. Le 29 mars seulement on s'occupait sérieusement de défendre Paris ! Pouvait-on en douze heures, non seulement établir des ouvrages, mais pouvait-on même, vu le manque de chevaux, transporter quatre-vingt-quatre bouches à feu sur les hauteurs de Belleville et Montmartre ? Pouvait-on, vu le manque de cadres et de canonniers, organiser huit batteries légères ? Pouvait-on lever et incorporer deux mille mobilisés, monter trois mille cavaliers, armer douze mille fantassins et gardes nationaux, faire rejoindre tous les disponibles des dépôts du Havre, de Rouen, de Tours, d'Orléans ?

Tandis que Clarke donnait ces ordres tardifs, dont un grand nombre, soit manque de temps, soit confusion, soit négligence, ne furent pas exécutés[19], les colonnes ennemies s'approchaient de Paris. Certains retards s'étaient cependant produits dans la concentration des différents corps alliés. Après le double combat de Fère-Champenoise, le vieux Blücher ayant retrouvé l'ardeur, bien que n'ayant pas recouvré la santé, avait pressé la marche de ses troupes. L'armée de bohème, au contraire, avait cheminé avec une extrême lenteur le 26 mars et surtout le 17, Schwarzenberg voulant que l'on défilât sur la route de Paris comme à une revue du Prater[20]. Le 28 mars seulement, les Austro-Russes atteignirent les bords de la Marne, et le grand quartier général s'établit à Quincy, où le prince de Schwarzenberg donna les ordres pour la journée du lendemain. Les Coalisés avaient résolu d'attaquer Paris par le Nord. On conçoit leurs raisons. De ce côté, ils étaient protégés par la Marne contre un mouvement de Napoléon dans leur dos, et, en cas d'échec, ils avaient une ligne de retraite assurée sur les Pays-Bas. Aux veux des généraux alliés, il n'y avait point une heure à perdre si l'on voulait s'emparer de Paris avant le retour de l'empereur. Aussi, négligeant toute reconnaissance préalable, ils arrêtèrent que les troupes marcheraient au plus vite, en trois fortes colonnes, de façon à tout balayer sur leur passage. La colonne de droite composée du gros de l'armée de Silésie (corps York, Kleist, Langeron et infanterie de Woronzoff), qui ayant déjà traversé la Marne avait repoussé les divisions Compans et Ledru Desessarts au delà de Claye, prendrait par Mory et Le Mesnil et viendrait s'établir, à la hauteur de Saint-Denis, à cheval sur la route de Lille. La colonne du centre, formée des corps Rajewsky et des gardes et réserves de Barclay de Tolly, passerait la Marne à Meaux et se dirigerait sur Bondy par Claye La colonne de gauche, enfin, comprenant les corps de Gyulai et du prince de Wurtemberg, passerait également la Marne à Meaux et longerait la rivière jusqu'à Neuilly. Afin de parer à une attaque éventuelle de Napoléon, les corps de Sacken et du comte de Wrède resteraient à Meaux et à Trilport, jetant des avant-postes vers la Ferté-sous-Jouarre, Rebais et Coulommiers[21].

Suivant ces ordres, le 29 mars à la pointe du jour les Russes de Rajewsky et de Barclay, ayant avec eux le czar et le roi de Prusse, passèrent la Marne et rejoignirent à Claye les Prussiens de Kleist et d'York. Ceux-ci, dont les avant-postes occupaient Ville-Parisis, tiraillant avec les grand'gardes de Compans qui tenait, toujours à Vert-Galant, cédèrent la route de Bondy aux nouveaux arrivants et marchèrent par leur droite sur Mory. — Déjà Langeron et Woronzoff étaient engagés sur le chemin du Tremblay. — Pendant que l'on procédait à ces mouvements, un parlementaire qui n'était autre que le colonel Blücher en personne, se présenta aux avant-postes français. Reçu par le général Vincent, Blücher fit connaître l'objet de sa mission. Il était, dit-il, chargé par le czar de porter à Paris des propositions de paix et de traiter de l'occupation de la capitale. Le général en ayant référé à Compans, celui-ci ordonna de renvoyer le parlementaire. Blücher alors remit deux pièces à Vincent : une lettre cachetée pour le ministre de la guerre, et une proclamation de Schwarzenberg au peuple de Paris[22].

Cette proclamation n'était rien moins qu'un appel à la révolte contre le gouvernement de l'empereur. Malgré leur nombre, malgré leurs succès, malgré leurs conquêtes, malgré leur approche de Paris, dépourvu de défenseurs, et malgré l'éloignement de Napoléon, les Alliés ne se sentaient pas encore assez forts pour triompher ! Il leur fallait l'aide des Français eux-mêmes, la trahison, la rébellion, la guerre civile : C'est à la ville de Paris, disait Schwarzenberg, qu'il appartient, dans les circonstances actuelles, d'accélérer la paix du monde. Son vœu est attendu avec l'intérêt que doit inspirer un si immense résultat ; qu'elle se prononce et dès ce moment l'armée qui est devant ses murs devient le soutien de ses décisions... Parisiens, vous connaissez la conduite de Bordeaux. Vous trouverez dans cet exemple le terme de la guerre[23]... Compans indigné rendit avec mépris la proclamation au colonel Blücher. Pour la lettre adressée à Clarke, il ne crut pas devoir la refuser et il la transmit incontinent[24]. On ne sait d'ailleurs quels en étaient les termes ni qui l'avait signée ; et si l'on a pris prétexte de ce commencement de correspondance pour accuser Clarke d'intelligence avec l'ennemi, le soupçon parait peu fondé. Vraisemblablement cette lettre n'était qu'une simple sommation de rendre Paris. Il est sans doute difficile de s'expliquer pourquoi la lettre fut écrite au ministre de la guerre au lieu d'être adressée au lieutenant général de l'empereur. Mais quand bien même cette mystérieuse missive eût contenu une invitation à trahir, le fait seul de l'avoir reçue ne constitue pas une trahison. Or il n'y a aucun témoignage que Clarke y ait répondu.

Durant les pourparlers entre le colonel Blücher et les généraux français, un second parlementaire se présenta, demandant un armistice de quatre heures. Compans, qui ne cherchait qu'à gagner du temps[25], y consentit très volontiers mais sous la condition ordinaire que pendant la suspension d'armes les troupes conserveraient de part et d'autre leurs positions sans faire aucun mouvement[26].

Tout était perfidie dans les démarches des Alliés. S'ils proposaient d'envoyer à Paris un parlementaire, ce n'était pas, comme ils le prétendaient, pour y porter des paroles de paix auxquelles ils savaient trop bien que faute de pouvoirs la régence ne saurait répondre ; c'était pour intimider les défenseurs par le dénombrement des troupes prêtes à donner l'assaut. S'ils demandaient un armistice, ce n'était pas pour faciliter les négociations ; c'était pour gagner du terrain sans avoir à le conquérir. À peine le feu avait-il cessé aux avant-postes, en vertu de la suspension d'armes, que les vedettes de Vincent lui signalèrent sur sa droite la marche d'un corps d'infanterie venant de Lagny, et sur sa gauche la présence d'un gros de cavalerie se dirigeant vers Gonesse. À ces nouvelles, les Français craignant d'être enveloppés se mirent en retraite. Les troupes alliées qu'ils avaient devant eux s'ébranlèrent pour les attaquer dès qu'elles s'aperçurent du mouvement. L'infanterie de Compans se replia sur Paris, par la forêt de Bondy et la route de Metz, combattant sans relâche et disputant le terrain pied à pied. La cavalerie de Vincent se porta au grand trot en avant de la Villette où elle arrêta et refoula les trois mille chevaux du général Emmanuel qui préparaient un hurrah sur ce faubourg[27].

Vers cinq heures du soir, le czar et Frédéric-Guillaume atteignirent avec le gros des troupes russes los hauteurs de Clichy en l'Aulnoy. Le vent soufflait du Nord, le temps était clair, il n'y avait pas un nuage au ciel. Paris apparut au loin dans un embrasement de soleil couchant À ce spectacle une grande acclamation : Paris ! Paris ! jaillit de toutes les poitrines. Les rangs furent rompus, les soldats s'avancèrent en foule pour apercevoir cette ville si fameuse, but glorieux et terme présumé de la campagne, cette capitale de la France qui depuis quatre siècles n'avait pas été approchée par les armées ennemies. Toutes nos misères, rapporte un officier de l'état-major du czar, fatigues, blessures, privations, nuits glacées aux bivouacs, marches du Dnieper à la Seine, parents et compagnons d'armes tombés sous la mitraille, humiliations de tant de défaites, tout était oublié. Nous étions dans un enthousiasme qui ne devait jamais s'évanouir et dont le souvenir est impérissable... Si officiers et soldats avaient ces transports d'orgueil et de joie, que devaient ressentir les deux souverains : Frédéric-Guillaume qui avait subi six ans le joug de fer de l'insatiable conquérant, et notre grand Alexandre qui porte encore saignante au cœur la blessure reçue dans les allées de Kamennoy-Ostrow, en apprenant la prise de Moscou ![28]

Dans la soirée, Langeron s'établit au Bourget, Kleist et York prirent position à Aulnay, avec des grand'gardes à Drancy ; l'infanterie de Woronzoff occupa Villepinte, que Blücher choisit pour son quartier général. Le corps de Rajewsky s'avança jusqu'à Noisy-le-Sec, et les gardes et réserves s'échelonnèrent entre Ville-Parisis et Bondy. Seules les troupes du prince de Wurtemberg et de Gyulai, ayant dû attendre, pour déboucher par le pont de Meaux, le passage des autres corps d'armée, restèrent en arrière. Au lieu de venir occuper Neuilly-sur-Marne, elles bivouaquèrent à Aunet et à Nanteuil[29]. Les deux souverains et le prince de Schwarzenberg logèrent au château de Bondy, d'où furent expédiés pendant la première partie de la nuit les ordres pour le lendemain. Dès cinq heures du matin, toutes les troupes devaient commencer leur mouvement. La colonne de droite aurait à attaquer la butte Montmartre, la colonne du centre à s'emparer du plateau de Romainville et des sommités de Belleville, et la colonne de gauche, qu'on supposait arrivée à hauteur, s'avancerait entre Charenton et Vincennes, prenant les ponts, cernant le château et venant menacer la barrière du Trône[30].

Au grand quartier général, on ne se dissimulait pas que la journée serait meurtrière, mais on espérait qu'elle serait courte. Autant par humanité que par crainte de la guerre des rues, Alexandre voulait éviter à tout prix, s'il était possible, une entrée de vive force dans Paris. Il comptait pour cela sur un assaut impétueux donné à Montmartre et à Belleville. L'occupation de ces positions dominantes, où l'on tiendrait la ville sous le canon, amènerait sans doute les défenseurs à capituler[31].

La Coalition avait Bordeaux, Lyon, Reims, la moitié de la France. Napoléon trompé par une audacieuse manœuvre errait en Champagne avec des débris d'armées. Le czar était à Bondy. Des fenêtres du château, il voyait s'éteindre les dernières lumières de Paris et s'allumer, innombrables, les feux des bivouacs russes. Il était à la veille de terminer cette terrible guerre, à la veille d'effacer la honte de l'occupation de Moscou. Mais ce jour tant désiré et si longtemps attendu, maintenant qu'il était tout proche, l'empereur de Russie ne l'envisageait pas sans un trouble profond et une poignante inquiétude. Qui, mieux qu'Alexandre Ier, savait qu'une grande capitale peut devenir le tombeau d'une grande armée ? Si bien retranchées, si bien armées, si tenacement défendues qu'il supposât les hauteurs de Montmartre et de Belleville, il ne doutait pas que ces positions ne fussent emportées dans la journée. Dût-on y laisser vingt mille cadavres, on resterait maître du terrain. Mais le peuple de Paris allait-il se défendre ? Là était l'inconnu et là était le péril. Quel imprévu redoutable dans une guerre de rues ! L'avantage du nombre est en partie supprimé par l'impossibilité des déploiements, un seul canon commande un débouché, l'assaillant ignore les points où la défense a concentré ses forces, les colonnes éparses marchent comme à l'aventure, hors de la main et de la vue des commandants en chef, les courages qui s'exaltent devant les premières barricades, s'énervent, se lassent, faiblissent devant les secondes et les troisièmes, quand les pavés et les meubles pleuvent des fenêtres et que les balles jaillissent des soupiraux. Le czar savait qu'il ne fallait espérer, en tout cas, emporter les approches de Paris et Paris lui-même dans une seule journée. Pour se rendre maître de la ville, si l'on était contraint d'y entrer de vive force, deux jours au moins, trois jours peut-être seraient nécessaires. Or, trois jours, deux jours même, perdus devant les barrières pouvaient entraîner un désastre. Sans vivres et sans munitions, que ferait cette immense armée, coupée de sa ligne manœuvre ? De la Seine à l'Aisne, tout le pays était ruiné, ravagé, affamé. En admettant qu'on trouvât à se ravitailler du côté de l'Oise[32], où trouver cartouches et gargousses pour remplir les gibernes et les caissons vidés par soixante heures de combat ? Si, enfin, Paris tenait deux jours seulement, sa résistance permettrait aux troupes disséminées dans les dépôts voisins de se joindre à la garnison, et, chose tout autrement redoutable, cette résistance donnerait le temps à Napoléon de venir en personne défendre sa capitale. Où était-il :e géant des batailles ? Depuis l'avant-veille, on était sans nouvelles de lui à l'état-major des Coalisés, ou du moins les nouvelles que l'on recevait étaient si contradictoires qu'on n'y pouvait rien discerner. Mais on ne doutait pas qu'il ne marchât à grandes journées vers Paris[33].

En proie à tant d'inquiétudes, le czar veilla fort tard. Tandis que tout dormait au château de Bondy et dans les bivouacs, il s'entretenait avec Nesselrode et le prince Wolkonsky, et prenait toutes les mesures pour parer aux dangers qu'il appréhendait. Nesselrode reçut l'ordre de profiter du moindre arrêt dans le combat pour entrer en pourparlers sur la capitulation. — Il faut, dit Alexandre, que Paris se rende demain[34]. D'après les instructions du czar, et presque sous sa dictée, Wolkonsky écrivit dix lettres. Sa dépêche adressée à Blücher portait : Il est de la plus haute importance d'assurer nos lignes de communications avec les Pays-Bas ; ce qui ne peut se faire qu'en occupant Compiègne et la Fère. Vous voyez donc la nécessité de s'emparer au plus tôt de Compiègne. Les mêmes recommandations étaient faites au prince de Saxe-Weimar : Nous sommes devant Paris et nous espérons nous en emparer demain. Mais il est malgré tout de lapins haute importance, pour assurer nos communications, de tenir libre la route de Compiègne. Le général Bülow en est chargé, mais il est trop faible en hommes. Sa Majesté désire que vous lui envoyiez immédiatement des renforts. Wolkonsky mandait à Sacken de ne laisser qu'un seul pont sur la Marne et de bien garder la rive gauche en envoyant des détachements au loin. À Czernischew, à Howaisky, à Seslavine, à Kaizarow, à tous les chefs de corps volants entre la Marne et la Seine, il adressa des instructions analogues. Ils devaient redoubler d'activité et de vigilance, faire des exemples sévères pour arrêter le soulèvement des paysans, multiplier les patrouilles et les reconnaissances afin de ne point se laisser surprendre par une marche de Napoléon sur Paris. Voilà, écrivait le chef d'état-major du czar, voilà ce qu'il faut empêcher avant tout[35].

Ainsi, dans cette nuit du 29 mars, Alexandre pensait mains aux triomphes qu'aux périls du lendemain. Ce n'était point sur Paris qu'il tenait les yeux fixés, c'était sur la route de Troyes où s'avançait Napoléon et sur la route de la Fère qui pouvait devenir l'unique ligne de retraite des armées alliées.

 

 

 



[1] Souvenirs de Méneval, II, 49-50. — On a publié dans la Correspondance de Joseph (X, 14-17) un autre récit de cet entretien, auquel assistait Méneval, d'après une Note manuscrite dudit Méneval. Quoi qu'en dise Rapetti, ces deux récits ne différent que par la rédaction ; le fonds, les détails sont les mêmes. On lit dans les Souvenirs : Joseph dit à l'impératrice que seule elle pouvait prescrire le parti à prendre, et dans la Note : Joseph proposa à l'impératrice de souscrire à l'ordre qu'elle donnerait en qualité de régente. C'est une distinction un peu subtile que cherche là à établir Rapetti. Pour justifier le roi Joseph, qui d'ailleurs n'a pas besoin de l'être sur ce point, puisqu'il avait des ordres précis et réitères de l'empereur, Rapetti s'efforce d'insinuer que la responsabilité du départ de Paris incombe à Marie-Louise. L'allégation est puérile. Il tombe sous le sens que si quelqu'un pouvait prendra une résolution énergique, c'était Joseph et non point cette très jeune femme.

[2] Méneval, II, 52. Cf. Miot de Mélito, III, 348. Lettre de Marie-Louise à Joseph, Rambouillet, 29 mars (Correspondance de Joseph, X, 211) ... Je suis bien triste... Je désire bien que vous puissiez m'écrire de revenir à Paris ; ce serait une des nouvelles qui me causeraient le plus de joie.

[3] Méneval, II, 49, 51. Cf. Clarke à Marmont, 29 mars. Arch. de la guerre.

[4] Souvenirs de Méneval, II, 51-53 ; Cf. 56-57. Cf. la Note de Méneval entre dans la Correspondance du roi Joseph, X, 16-17. Mémoires de la générale Durand, 165. Journal d'un prisonnier anglais (Revue britannique, 1816, IV, 290-291).

[5] Souvenirs de Méneval, II, 53-53. Journal d'un prisonnier anglais, 291. — La Correspondance intime Marie-Louise, publiée cette année à Vienne, ne laisse aucun doute sur les sentiments d'extrême affection que la jeune souveraine portait à l'empereur. D'après ces lettres, la fille de François en épousant Napoléon, avait cru se sacrifier aux intérêts de la politique ; elle se considérait comme une victime. Mais elle n'avait pas tardé à être parfaitement heureuse.

[6] Correspondance de Napoléon, 21 497, 21 210. Cf. 21 189 et Correspondance du roi Joseph, X, 44, 46 et passim.

[7] Mémoires de Miot de Mélito, III, 349-350.

[8] Correspondance de Napoléon, 21 497. Ne quittez pas mon fils.

[9] Correspondance de Napoléon, 21 186, 21 190, 21 210.

[10] Correspondance du roi Joseph, X, 214 (lettre de Marie-Louise).

[11] Rovigo, VII, 4-5.

[12] Récit de Peyre, cité par Pons de l'Hérault. Appendice, 490.

[13] Journal d'un prisonnier anglais, 292-293. Pons, 151. Rodriguez, 56-41. Révélations de Morin, 24. Cf. Marmont à Napoléon, Paris, 31 mars, 4 heures du matin. Arch., IV, 1670.

[14] Giraud, 81. Journal d'un prisonnier anglais, 1293. Rovigo, VII. 5, 6. — Il y eut dans les premiers jours d'avril des caricatures sur Joseph. On le montrait détalant au grand galop en criant : Courage ! Je vais chercher des renforts. Biblioth. nat., Cabinet des Estampes, E. B. 138.

[15] Rapports de police, 28 mars et 29 mars. Arch. nat., F. 7, 3737. Béranger, Ma Biographie. Journal d'un prisonnier anglais, 298, 301, Rodriguez, 45, note 1. Arch. de la Comédie-Française. La moyenne des recettes en 1812 était de 3.000 fr., et 1814 (pendant l'invasion) de 1.200 fr.

[16] Compans et Fauquet à Clarke, 29 mars. Arch. de la guerre.

[17] Joseph à Clarke, et Clarke à Marmont, à Mercier, à Compans, 29 mars. Arch. de la guerre.

[18] Correspondance de Clarke. 29 mars, Arch. de la guerre.

[19] Entre autres, l'ordre d'assurer des vivres aux troupes de Marmont et de Mortier. Fabvier (Journal des opérations du 6e corps d'armée) rapporte qu'en arrivant à Charenton, les troupes ne trouvèrent pas une seule ration. Dans une note de Brucy, citée par Pons (p. 468), il est dit que la direction générale des vivres n'était pas instruite de l'arrivée de ces deux corps d'armée. Dans ce cas, la faute incomba à Daru, car il avait été avisé par Clarke.

[20] Relation de Diebitsch. Arch. de la guerre, à la date du 24 mars. — Le grand quartier général s'établit le 25 mars à Fère-Champenoise, le 26 à Treffaux, le 27 à Coulommiers. Ordres de Schwarzenberg, cités par Schels, II, 64, 85, 118.

[21] Ordres de Schwarzenberg et de Blücher pour la journée du 29 mars, Quincy et Meaux, 28 mars, cités par Plotho, III, 396-397. Cf. Relation de Diebitsch. Arch. de la guerre, et Journal de Langeron. Arch. top. de Saint-Pétersbourg, 29 103.

[22] Compans à Clarke, Vert-Galant, 29 mars, 8 heures de matin. Journal de Vincent. Arch. de la guerre.

[23] Arch. nat., F. 7, 4292. — Cette trop fameuse proclamation est datée du château de Bondy, 29 mars. Elle fut conséquemment postdatée par Schwarzenberg puisque la lettre de Compans témoigne qu'une copie lui en tut remise à Vert-Galant le 29 à 8 heures du matin.

[24] Compans à Clarke, 29 mars. Arch. de la guerre. Cf. Schels, II, 136.

[25] Gagner du temps, c'est ce dont nous avons le plus besoin pour donner celui à l'empereur d'arriver an secours de la capitale. Clarke à Compans, 29 mars, Arch. de la guerre.

[26] Compacts à Clarke, 29 mars. Journal de Vincent. Arch. de la guerre.

[27] Journal de Vincent. Arch. de la guerre. Cf. Journal de Langeron. Arch. top. de Saint-Pétersbourg, n° 29 103.

[28] Danilewsky, II, 139-140. — Sous quelque drapeau qu'ils marchent, les soldats ont la même âme et les mêmes sentiments. C'est dans des termes presque identiques que Ségur (II, 33, 35) rapporte l'impression de la Grande Armée en découvrant Moscou : Dangers, souffrance, tout fut oublié...

[29] Journal des opérations de Barclay de Tolly, et Journal de Langeron, Arch. top. de Saint-Pétersbourg, n° 29 188 et 29 103. Schels, II, 141 ; Plotho, III, 399.

[30] Ordres de Schwarzenberg, cités par Schels, II, 175 ; lettres de Wolkensky à Rajewsky et à Blücher, cités par Bogdanowitsch, II, 337-332 ; Journal de Langeron, Arch. de Saint-Pétersbourg. Schülz, XIII, vol. I, 177.

[31] Lettre de Wolkonsky à Blücher, Bondy, 29 mars, 11 heures du soir. Journal ces pièces envoyées, Arch. top. de Saint-Pétersbourg, n° 29 190. Cf. Danilewsky, II, 422.

[32] Danilewsky (II, 422) rapporte que jusqu'au 6 avril, bien que l'armée alliée eût toutes les ressources de Paris, elle eut beaucoup de difficultés à s'approvisionner.

[33] Sur les craintes du czar et sur la situation critique où se fussent trouvées les armées alliées, si Paris eût tenu quelques jours, voir les lettres de Wolkonsky, Bondy, 29 mars (citées plus loin). Relation de Diebitsch, Arch. de la guerre (à la date du 21 mars). Danilewsky, II, 142-143. Plotho, III, 402. Mémoires de Langeron. Arch. des Affaires étrangères, Russie, 25 ; et le discours du maréchal Soult. Moniteur du 23 janvier 1841.

[34] Danilewsky, Feldzug in Frankreick, II, 142.

[35] Lettres de Wolkonsky à Blücher et à Saxe-Veimar, Bondy, 29 mars, 11 heures du soir et 30 mars, 1 heure du matin (Journal des pièces envoyées. Arch. top. de Saint-Pétersbourg), et lettres du même à Howaisky etc., citées par Danilewsky, II, 143-144.