ROME, LA GRÈCE ET LES MONARCHIES HELLÉNISTIQUES AU IIIe SIÈCLE AVANT J.-C. (273-205)

 

CHAPITRE CINQUIÈME. — LES COMMENCEMENTS DE LA PREMIÈRE GUERRE DE MACÉDOINE (216-212). PHILIPPE V SEUL CONTRE ROME. - PHILIPPE V ALLIÉ D'HANNIBAL. L'ALLIANCE DE ROME ET DE L'AITOLIE.

 

 

IV

Ce qu'il faut observer a présent, est que, provoqués, attaqués par Philippe, menacés par lui d'invasion et forcés enfin de le combattre, les Romains ne songent pas, d'abord ni de longtemps, à gagner à leur cause, pour les lui opposer, les nations de l'Hellade qui sont hostiles au roi[1], L'idée ne leur vient pas d'élargir le conflit en y attirant ces nations : de 215 à 212, ils n'ont, comme autrefois, qu'indifférence pour elles et l'ensemble des Grecs. Pas plus qu'auparavant, leur regard ne dépasse l'Illyrie ; ils persistent dans leur système ancien, estiment suffisante l'alliance de Skerdilaïdas[2] qui, maintenant, fort de leur protection, règne avec son fils Pleuratos sur la plupart des peuples précédemment soumis à Démétrios —, et continuent de se tenir à l'écart de la Grèce.

Pourtant, s'ils s étaient tournés vers les Aitoliens, s'ils avaient entrepris de les travailler et leur avaient poussé l'aiguillon, il est bien probable qu'ils eussent réussi à les émouvoir. Car les Confédérés, comme nous l'apprend Polybe, avaient bientôt pris en dégoût les accords de Naupakte[3]. Cette paix, conclue à la fois avec tous leurs adversaires, et qui par là les astreignait à respecter l'Hellade entière, qui leur interdisait en tout pays grec ces expéditions de pillage dont ils avaient la fructueuse habitude, cette paix qui leur liait les mains et leur coupait les vivres, leur était vite devenue pesante : par le repos humiliant et ruineux qu'elle leur imposait[4], elle rappelait lès pires temps du règne d'Antigone[5]. Puis, vraiment, elle leur avait coûté trop cher : acceptés sous le coup de la défaite, par crainte de plus grands maux, les sacrifices dont ils l'avaient payée leur paraissaient maintenant insupportables. Eux qui rêvaient obstinément d'annexer à leur Ligue toute l'Akarnanie, comment se fussent-ils résignés à la perte des villes qu'ils y possédaient, à celle surtout de la grande place d'Oiniadai, conquise pour la première fois il y avait plus d'un siècle[6] ? Comment eussent-ils renoncé à Thèbes-de-Phthiotide, seule station thessalienne sur le golfe de Pagasai, voisine redoutée de Larisa et de Démétrias elle-même[7] ? à Phigalie, leur dernière place dans le Péloponnèse, forte écharde plantée au flanc de l'Achaïe, poste d'écoute précieux au carrefour de trois pays, Messénie, Élide, Arcadie, citadelle dominante, d'où l'on pouvait s'abattre à l'aise sur les belles campagnes messéniennes[8] ? C'eut été, peut-on croire, chose facile aux Romains d'attiser leurs regrets, et, par une promesse d'alliance, de rallumer leur ardeur batailleuse.

Le fait est que, dès 215, au moment de s'engager a fond contre Rome, Philippe les sentait derrière lui inquiets et frémissants. Et craignant, très raisonnablement, que son départ pour l'Italie ne fût chez eux le signal d'une nouvelle prise d'armes ; les jugeant toutefois trop timides pour se frotter à la Macédoine, qui serait bien gardée ; prévoyant plutôt que leurs rancunes contre les Achéens, leur tenace désir d'assujettir la Messénie, les appels de leurs alliés, Éléens et Spartiates, l'espoir de recouvrer Phigalie, la perspective d'abondantes razzias[9] les entraîneraient encore à se jeter sur le Péloponnèse, il avait cru prudent d'y prendre contre eux ses sûretés[10]. C'est pourquoi il était venu en Messénie[11]. Là, manœuvrant à sa façon, utilisant les discordes civiles qui déchiraient le pays, mettant les partis aux mains en feignant d'être leur arbitre, il avait provoqué sournoisement une révolution populaire, essayé d'établir son autorité, d'accord avec les démagogues, sur la ruine de la haute classe, et formé le dessein de s'établir à l'Ithome[12]. Et, certes, le dessein était sage : car, maître de l'Ithome et par là de tout le sud-ouest de la péninsule, il eût renforcé la barrière de la Triphylie[13], isolé l'une de l'autre la Laconie et l'Élide, coupé les communications des Aitoliens avec les Spartiates, et tenu Lacédémone en échec : Mais l'audace, pour une fois, qui avait manqué : gêné par l'opposition hargneuse des deux Aratos[14], aux yeux de qui la Messénie, de tout temps convoitée, était déjà terre achéenne et, partant, interdite aux Macédoniens, il avait renoncé à pousser à bout l'aventure ; en sorte que son entreprise avortée n'avait eu d'autre résultat que d'exciter contre lui les défiances irritées des Achéens, les colères des oligarques messéniens, victimes sanglantes de ses intrigues[15], et celles, autrement dangereuses, des Aitoliens et des Spartiates qui, dès le premier moment, avaient vu où tendaient ses efforts et senti la menace suspendue sur eux.

C'étaient là encore, pour les Romains, des circonstances propices, et qu'ils eussent pu aisément exploiter. Mais ils n'y prêtent point attention, et ne pensent pas non plus a tirer avantage du coup fâcheux qu'a porté, en Grèce, au prestige du roi la défaite subie sous Apollonia. En 214 comme en 215, en 213 encore, ils s'obstinent à ignorer les Grecs[16]. C'est seulement en 212 qu'ils prennent la résolution de se pourvoir chez eux d'auxiliaires ; et, s'ils s'y décident enfin, c'est que des faits nouveaux sont survenus, si graves qu'ils ne leur permettent plus de tarder.

En effet, en 213 et 212, Hannibal et Philippe, poursuivant leur commun dessein, ont, l'un à l'ouest, l'autre à l'est de l'Adriatique, habilement et vigoureusement besogné. L'éloignement de M. Lævinus, maintenant fixé à l'Illyrie, a eu, dans la Basse-Italie, son utile contrecoup. Mettant à profit l'absence de l'escadre romaine, Hannibal s'est emparé de Tarente et, de la sorte, a pourvu le Macédonien du port de débarquement qui lui est indispensable[17]. Et, de son côté, en Illyrie, Philippe a mené ardemment la campagne contre les clients et les alliés de Rome. Au Sud, il a envahi les territoires dépendants de la République que s'étendent en arrière du littoral, soumis les Atintanes et les Parthiniens, délivré Dimalé, reprise six ans plus tôt par L. Æmilius à Démétrios[18] ; si bien que, réduits à la possession des échelles maritimes et d'un mince liseré de côte, les Romains ne tiennent plus l'Illyrie que par l'extrême bord[19]. Au Nord, il a fait mieux : non seulement il a refoulé, écarté des Romains Skerdilaïdas, et détaché de lui une partie de ses peuples, mais il a réussi, sans le secours de Carthage, à s'ouvrir l'accès de la mer ; il s'est saisi de Lissos et de son imprenable acropole, et, par cette grande conquête qui a consterné les Illyriens et multiplié parmi eux les défections, il a fortement pris pied à la cite[20] désormais. les amiraux puniques sauront ou l'aller joindre.

C'est ainsi que le roi de Macédoine et le général de Carthage ont préparé, autant qu'il dépendait de chacun, leur rencontre en terre italienne. Mais, cependant, la grande flotte des Romains, la flotte de Lilybée, reste attachée aux rivages de Sicile, où la retiennent, où la peuvent retenir longtemps encore le siège de Syracuse[21], la guerre qui remplit toute l'île, la nécessité de surveiller. Carthage et de faire bonne garde en face de l'Afrique. Et, par suite, ce vaste triangle de mer que limitent la Sicile, les deux péninsules de la Basse-Italie, l'Épire et l'Illyrie, demeure hors des prises de la marine romaine : de la pointe du Zéphyr au détroit d'Hydrous, la route est ouverte et libre. Vienne donc une flotte punique, qui opère contre Lævinus de la même énergique façon qu'a fait, l'année d'avant, l'amiral romain contre les Macédoniens ; qui noie ou disperse ses quinquérèmes, les écrase à la côte ou les en arrache ; qui remonte ensuite à Lissos, s'y unisse à Philippe, puis, manœuvrant de concert avec lui et complétant son œuvre, réduise Apollonia et Épidamnos : en ce cas, l'armée macédonienne, embarquée sur les vaisseaux de Carthage ou convoyée par eux, pourra cingler en droiture vers Tarente. Or, pour le malheur des Romains, cette flotte existe. Les Puniques viennent de faire un grand effort naval ; ils ont mis à la mer une puissante escadre, la plus puissante qui soit sorti d'Afrique depuis leur première guerre contre Rome. C'est celle que commande Bomilcar, qu'on a vue dès 213, forte de 55 vaisseaux, gagner Syracuse et s'embosser dans le Grand-port, et qui, sans cesse accrue, portée à 90, puis à 155 bâtiments, y reparaît, dans l'été de 212, pour la troisième fois[22]. Sa mission est de sauver la ville ; qu'elle y réussisse ou qu'elle échoue, une chose est claire : si elle n'est pas défaite, par la flotte de Marcellus, plus faible d'au moins cinquante unités et qu'elle a toutes les chances de battre[23], rien ne l'empêchera de gagner l'Illyrie[24], où sûrement Philippe l'attend et l'appelle[25].

De là la nécessité de clouer Philippe à la Grèce, au plus vite, et si fortement que, même les Puniques survenant, il ne s'en puisse détacher ; de là, par suite, la nécessité de lui créer une guerre chez lui, à ses côtés, qui l'occupe tout entier ; et, puisque Skerdilaïdas, d'abord désigné pour cette tâche, parait maintenant hors de jeu[26], de là la nécessité de se mettre en quête d'une alliance nouvelle, de faire appel aux Grecs ennemis de la Macédoine, aux Aitoliens, et de les amener à répudier cette paix qu'on leur a, cinq ans plus tôt, si sottement permis de conclure. — C'est ce qu'a compris Lævinus ; et c'est pourquoi, dans les premiers mois de 212, instruit des armements puniques, inquiet des entreprises maritimes de Carthage, il commence à se ménager des intelligences en Aitolie[27].

 

 

 



[1] G. Colin (Rome et la Grèce, 41) est d'un avis contraire. Il n'hésite point à affirmer que, dès 217, Rome dépêche... des députés en Grèce pour... susciter des ennemis (à Philippe). C'est ce qui résulte, selon lui, d'une phrase de Polybe ; V. 105. 8. Mais cette phrase renferme simplement une allusion anticipée à l'alliance conclue en 212 par les Romains avec les Aitoliens. — On a supposé (par exemple, Diels, Sibyll. Blätter, 92) que Fabius Pictor, lorsqu'il vint consulter l'Oracle (Liv. 23. 11. 1 sqq.) après la bataille de Cannes, était chargé par le Sénat d'une mission politique. C'est là une hypothèse que rien n'autorise. Diels ajoute (ibid.) : Angstvoll mussten damais die Römer auf ihre Preunde jenseits des Meeres hinblicken. Il oublie qu'à cette époque, en 216, les Romains n'avaient encore aucun ami en Grèce.

[2] Skerdilaïdas et Pleuratos mentionnés ensemble comme alliés des Romains et rois des Illyriens : Liv. (P.) 26. 24.9 (ann. 212) ; — cf. 27.20.13 (ann. 209) : les Ardiéens sont, au moins en partie, les sujets des deux princes ; — Polybe, X. 41. 4 (ann. 208) : Skerdilaïdas et Pleuratos exercent ensemble le commandement militaire. C'est la dernière fois qu'il soit fait mention de Skerdilaïdas.

[3] Cf. Polybe, V. 107. 6.

[4] Nombre d'Aitoliens vont, a cette époque (avant 214), chercher fortune en Asie et engagent au service d'Achaios ; voir mon mémoire : Les Aitoliens auxiliaires d'Achaios dans la Rev. Ét. anc., 1916, 233 suiv.

[5] Cf. Polybe, IV. 3. 1-2.

[6] Cf. Liv. (P.) 26. 24. 6 ; 24. 8, Justin, 28. 1. 1. — Les villes akarnaniennes perdues par les Aitoliens sont, outre Ambrakos (qu'ils avaient enlevée aux Épirotes), Oiniadai, Phoitiai et sans doute aussi Métropolis ; la seule qui leur reste est Stratos. — Pour la date de la première conquête d'Oiniadai (avant 329), voir Beloch, II, 1, 53, 1 ; Swoboda, Staatsaltert., 298. Les Akarnaniens l'ont recouvrée par la suite, comme le montre leur traité avec l'Aitolie (Έφ. άχρ., 1905, 56 suiv. ; cf. Swoboda, 300), puis reperdue après l'alliance des Aitoliens avec Alexandre d'Épire. — Le grand désir qu'ont les Aitoliens de ressaisir les villes que leur a prises Philippe est indiqué ans la phrase de T. Live (P.), 26. 24. 5.

[7] Cf. Liv. (P.) 39. 25. 9 (importance maritime de Thèbes) ; Polybe, V. 99. 3 b (situation de Thèbes par rapport à Larisa, la Thessalie, la Magnésie et Démétrias).

[8] Cf. Polybe, IV, 2. 6 sqq.

[9] Cf. Polybe, IV. 3. 3 ; 5. 5 (ann. 220).

[10] La plupart des historiens modernes croient trouver dans l'intervention de Philippe en Messénie la preuve qu'il se désintéresse de la guerre avec Rome (voir, par exemple, C. Neumann-G, Faltin, Das Zeitalter der pun. Kriege, 447). C'est là une vue entièrement fausse. Il suffirait, pour en être convaincu, d'observer que l'homme, qui est à la fois l'instigateur et l'instrument de la politique du roi dans le Péloponnèse, est le même qui l'excite sans cesse à combattre les Romains : c'est Démétrios de Pharos. Les entreprises de Philippe en Messénie ont un lien direct avec celles qu'il prépare contre Rome ; il veut avoir le dos libre avant de partir pour l'Italie. La vérité a été entrevue par Kahrstedt, 459.

[11] Pour l'époque de la première intervention de Philippe en Messénie, cf., en général, Nissen, Rhein. Mus. 1871, 256-257. L'événement avait place dans le l. VII de Polybe, sans qu'on puisse dire s'il appartenait à la première (216/215) ou à la seconde (215/214) partie de ce livre. Les deux seuls points sûrs, c'est que cette intervention est : 1° postérieure au traité de Philippe avec Hannibal : 2° antérieure à sa campagne d'Illyrie de 214. Elle peut avoir eu lieu, soit dans l'été ou l'automne de 215 (cf. K. Scaliger, Messenien und der ach. Bund, Progr. Zittau, 1897, 13, note 12 ; Niese, II, 471, 2 ; G. Clementi, Studi di stor. ant., I, 63), soit dans l'hiver de 215/214, soit dans les premiers mois de 214 (Niese, ibid.).

[12] Séjour de Philippe en Messénie ; son immixtion dans les luttes des partis : Plutarque (P.) Arat. 49. 2 ; Liv. (P.) 32. 21. 23 ; allusions dans Polybe, VII. 11. 10 ; 12. 9 ; 13. 6-7 ; 14. 2 ; 14. 5. — Sur l'entente très probable de Philippe et des démocrates, qui lui livrent l'entrée de l'Ithome, Scaliger, 13 et note 12 ; de même, De Sanctis, III, 2, 410-411. — Philippe à l'Ithome : Plutarque (P.) Arat. 50. 2-4 ; Polybe, VII. 12.

[13] Se rappeler que la Triphylie est en la possession de Philippe depuis la guerre-des-Alliés. En la gardant, le roi voulait certainement empêcher les Aitoliens de faire, à travers l'Élide et la Messénie, leur jonction avec les Spartiates.

[14] Plutarque (P.) Arat., 50. 1-2 ; Polybe, VII. 12.

[15] Plutarque (P.) Arat., 49. 2 ; Liv. (P.) 32. 21. 23 ; cf. Polybe, VII. 12. 9 ; 13. 6-7 ; 14. 2.

[16] Néanmoins, Hertzberg écrit hardiment (I, 34 ; trad. fr.) que les Romains ne perdirent pas un moment pour exciter les Étoliens contre Philippe.

[17] Prise de Tarente par Hannibal dans l'hiver de 213/212 : Polybe, VIII. 24. 4 sqq. ; Liv. (P.) 25. 7. Il sqq. Cf. Liv. 24. 13. 5 : ipsum (Hannibalem) ingens cupido incesserat Tarenti potiundi, urbem esse videbat cum opulentam nobilemque tum maritimam et in Macedoniam opportune versam, regemque Philippum hunc portum, si, cum transiret in Italiam, Brundisium Romani haberent, petiturunt. — A la vérité, les Romains restent maîtres de l'acropole, et, par suite, l'accès du port intérieur et de la «Petite-mer » est fermé aux vaisseaux (cf. Kahrstedt, 474) ; mais on devait croire que l'acropole serait, bientôt forcée de capituler ; son invincible résistance ne pouvait être prévue de personne.

[18] Sur ces faits, Zippel, Röm. Herrsch. in Illyrien, 69-70 ; Niese, II, 473-474. — Conquête du pays des Parthiniens : cf. Liv. (P.) 29. 12. 3 ; 12. 13 ; — de la partie de Dassarétide encore indépendante de la Macédoine ( ?) : cf. Polybe, VIII. 14 b. 1 ; — de la ville d'Hyskana [?], dans le voisinage de Lykhnidos : cf. 14 b. 2 (Zippel, 69 ; 75-76) ; — de l'Atintania : cf. Liv. (P.) 27. 30. 1.3 ; 29. 12. 13 ; de Dimalé : cf. (P.) 29. 12. 3 ; 12. 13 (l'événement date probablement de l'année 213).

[19] Remarquer, en effet, combien Philippe, en 212/211, parvient aisément dans le voisinage d'Apollonia et d'Orikos : Liv. (P.) 26. 25. 2 ; de même, en 205, il pousse très facilement jusqu'aux murs d'Apollonia : 29. 12. 6.

[20] Sur ces faits, Zippel, 70 ; Niese, II, 473-475 ; De Sanctis, III, 2, 413-414. — Philippe tend sa domination sur les Ardiéens, sujets de Skerdilaïdas et de Pleuratos : cf. Liv. (P.) 27. 30. 13. Zippel (70) est d'avis qu'il a pu s'avancer, au nord du fleuve Naron, jusqu'au canal de Brattia, pénétrant ainsi dans la contrée qui était le centre principal de la nation ardiéenne (cf. Zippel, 36 ; 45). Cela est peu probable. Dans Liv. (P.) 27. 30. 13, le mot Ardiæi peut être entendu comme dans Polybe, II. 11. 10 ; 12. 2 ; il peut s'agir, dans les deux cas, de ceux des Ardiéens dont les établissements étaient situés au nord et à petite distance du Drilon, non loin de Lissos. — Prise de Lissos et d'Akrolissos par Philippe : Polybe, VIII. 13-14 ; — Lissos et Akrolissos réputées imprenables : 13. 3 ; 13. 9 ; 14. 1 ; 14. 9-11 ; — effet produit sur les Illyriens par la prise de Lissos : 14. 10-11 ; cf. Justin, 29. 4. 8. Les Illyriorum reges mentionnés dans Justin sont probablement les chefs illyriens qui se sont donnés à Philippe en 213 ; cf. aussi Dion-Zonaras, IX. 15. 4.

[21] Sur la situation difficile de l'armée de Marcellus dans l'été de 212, même après la prise des Épipolai, Kahrstedt, 479.

[22] Sur l'importance de l'effort naval accompli par le gouvernement de Carthage en 13 et 212, cf. Kahrstedt, 481-482, dont le calcul est d'ailleurs incomplet : en 213-212, es Puniques ont envoyé en Sicile environ 185 vaisseaux ; De Sanctis, III, 2, 305. — Première arrivée de Bomilcar à Syracuse avec 55 vaisseaux dans le courant de l'année 213 ; retour à Carthage : Liv. (P. ?) 24. 36. 3 ; 36. 7. — L'amiral fait ensuite de Carthage à Syracuse un voyage que T. Live n'a pas mentionné (cf. Weissenborn, note à Liv. 25, 25. 11). Au commencement de l'année 212, il s'y trouve en effet de nouveau avec 90 bâtiments : cf. (P.) 25. 25.11-12 (les doutes de Gsell, Hist. de l'Afr. du Nord, II, 442, 2, paraissent peu fondés). — Second voyage à Carthage après la prise des Épipolai, suivi d'une troisième traversée de Carthage à Syracuse : Bomilcar, parti de Syracuse avec 35 vaisseaux (25. 11-12), y revient bientôt avec 100 (soit 65 bâtiments nouveaux) : 25. 13. Sa flotte compte alors au total 155 vaisseaux. — On sait que, plus tard, probablement à l'automne de 212 (au printemps de 211, selon Matzat, Röm. Zeitrechn., 143, et De Sanctis, II, 2, 332, 334), il ira se renforcer pour la troisième fois à Carthage ; il en reviendra avec 130 vaisseaux (auxquels il faut ajouter ceux, en nombre inconnu, laissés à Syracuse) et 700 transports : Liv. (P.) 25. 27. 3-4.

[23] Sur l'infériorité de la flotte romaine à l'automne de 212 : Liv. (P.) 25. 27. 8-9. Cette infériorité existe déjà dans l'été, lors de la troisième venue de Bomilcar à Syracuse, puisqu'il a 155 vaisseaux (en comptant les 55 laissés à Syracuse) contre 100 (pour l'effectif de la flotte romaine, cf. Kahrstedt, 470, 1 et 4 ; 482). — C'est, comme on sait, par une inexplicable défaillance qu'à l'automne de 212, l'amiral punique, en station au cap Pachynos, refusa le combat offert par Marcellus, et fit retraite vers Tarente : 27. 8-12.

[24] L'événement eut effectivement lieu en 209, à une date trop tardive pour que Philippe en pût tirer avantage. La flotte punique étant partie de Tarente, où elle s'était rendue pour la seconde fois, s'en vint croiser dans les parages de Kerkyra (Liv. 27. 15. 7 ; cf. 30. 16). On la retrouve, en 208, dans le golfe de Corinthe et sur la côte d'Akarnanie (P.) 28. 7. 17-18 ; 8. 8.

[25] Sur les relations de Philippe avec Syracuse : Liv. (P.) 25. 23. 8. — Appels de Philippe aux Puniques en 209 : 27. 30. 16 ; en 208 : 28. 7. 17.

[26] Skerdilaïdas ne parait jouer aucun rôle au commencement de la guerre aitolo-romaine. De Liv. (P.) 27. 33. 3, on pourrait conclure qu'en 209 il est simplement l'auxiliaire des Aitoliens. Ce n'est qu'en 208 qu'on le voit commander de nouveau, avec son fils Pleuratos, une armée indépendante : Polybe, X. 41. 4.

[27] Que l'initiative du rapprochement soit venue des Romains, c'est ce qui ne parait as douteux (cf. Täubler, Imp. Romanum, I, 432 et note 1 ; De Sanctis, III, 2, 414). Les textes qu'on a cru pouvoir alléguer pour le contester (Polybe, IX. 37. 4 ; 37. 8 et 10 ; ajouter XX. 11. 7 ; cf. Niese, II, 476 et note 1) sont très peu significatifs. Au contraire, le langage tenu par Lævinus (Liv. (P. en partie) 26. 24. 2-6) est bien celui d'un solliciteur, et l'on ne peut soupçonner T. Live de lui avoir prêté ce rôle. D'autre part, l'indication qui se trouve dans T. Live (P., 25. 23. 9) — iam tum Aetolorumamicitiam adfectantibus Romanis — semble décisive. Je ne sais s'il faut tenir compte de Justin, 29. 4. 5.