LA SAINTE FAMILLE

 

QUATRIÈME PARTIE. — APPARITION DU VAURIEN DE L'ÉTRANGER

II. — LE VAURIEN DE L'ÉTRANGER SELON IOCHANAN BEN ZACCAÏ.

 

 

DEUXIÈME PARTIE

I. — LA REVANCHE DE IEHOUDDA BAR-ABBA.

a. — Iehoudda contre Ieschou, ou le corps contre l'ombre

La punition du Vaurien de l'étranger s'apprête. Depuis longtemps Iehoudda attend dans la coulisse le moment de reprendre à Ieschou le corps que celui-ci lui a volé. Le fils de l'homme appelé Zacharie dans certains Toledoth, — et Zacharie n'est autre que le papas Iehoudda sous un pseudonyme —, suffoque de honte et d'indignation dans son cœur de, Kanaïte intraitable. Il ne peut pardonner à Ieschou ha nozri sa trahison envers la Circoncision. Cet hypocrite, qui fait l'innocent devant Pilatus, rejette tous ses crimes sur Barabbas, et ameute aujourd'hui les nozrim contre sa race et sa famille, le dégoûte profondément. Pour en débarrasser le pays, il est prêt à s'allier avec les hérodiens.

Alors Iehoudda, fils de Zacharie, prince des chefs auprès du roi, répondit : Je vais aller voir, moi-même, si ce qu'on dit des blasphèmes de cet homme contre le Dieu d'Israël est vrai.

Iehoudda s'en alla donc, mais une fois dans Aïn a changea ses vêtements contre ceux des Aïnites.

L'Aïn dont il est question ici, c'est l'Aïn Gamel, connue dans les vieilles églises coptes pour être le berceau du Baptiseur. C'est la fontaine avec l'eau de laquelle Iehoudda avait purifié sa mère. Le Mahazeh nous parlera bientôt de la tour qui s'élevait près de l'Aïn et qui était la maison natale de Iehoudda.

Ainsi, afin de mieux surveiller Ieschou, il se met avec les Aïnites. Voilà désormais un Iehoudda dans la ville même de Myriam, et ce n'est nullement Iehoudda, fils de Simon de Kérioth, c'est Iehoudda, fils de Zacharie, ce Zacharie, qui fut tué dans le Temple et qui est un des surnoms du papas Iehoudda.

Comme Iehoudda est également l'ennemi de Ieschou dans le Mahazeh édité par Wagenseil, Huldrich ne veut pas qu'il soit fils de Zacharie : il prétend que par Zacharie il faut entendre Iscariot, qui sonne à peu près de la même façon ; mais le père du Iehoudda à qui Cérinthe a le premier distribué le rôle de traître dans son Mahazeh, ne s'appelait nullement Is-Kérioth, ni même Kériothis, il s'appelait Simon, et il est ainsi nommé dans Cérinthe. Si donc notre Mahazeh avait voulu désigner Iehoudda de Kérioth, il l'aurait dit fils de Simon et non de Zacharie.

Quant au moyen employé pour rentrer dans sa ville natale, Iehoudda se l'emprunte à lui-même, en souvenir de la circonstance fameuse où, avec ceux que le Mahazeh appelle ici les Aïnites et plus loin les Péréjim, il s'est camouflé en pharisien pour tromper la police du Temple. C'est ce camouflage, célèbre dans l'histoire de l'Évangélisation (nous y assistons plus loin), qui a donné à Cérinthe l'idée, suivie par tous ses successeurs, de faire endosser par Ieschou devant Pilatus les habits de pourpre de Iehoudda.

b. — Un en deux, deux en un, ils fuient de peur d'être arrêtés

Il (Iehoudda, fils de Zacharie) dit donc à Ieschou : Je veux suivre tes ordonnances. Et aussitôt Ieschou lui rasa les cheveux en forme de couronne, et le baptisa dans les eaux de Boleth. Après quoi ils se retirèrent au désert, craignant que, s'ils étaient trouvés dans Aïn, le roi ne se saisît d'eux.

En effet, Iehoudda, revêtu des habits d'un Aïnite, et ayant la tête rase, comme les docteurs l'ont faite naguère à Ieschou lui-même, pourrait très bien être pris pour lui et arrêté.

II. — TARGUM DE LA FAILLITE DE L'UN EN DEUX, DEUX EN UN.

a. — A la recherche du Zib

Ici le Mahazeh transcrit un vieux targum sur l'un en deux, deux en un, et qui provient d'un Toledoth exclu du Canon.

S'étant égarés dans le désert, ils rencontrèrent un berger couché sur la terre. Ieschou lui demanda s'il y avait une hôtellerie non loin de là, et si quelque chemin y conduisait : Tout droit devant vous, répondit le berger, mais pour arriver il faut allonger le pas. Ils continuèrent donc et, trouvant une jeune bergère, Ieschou lui demanda où il fallait aller. La jeune fille les accompagna jusqu'à El ha Nozol (le Verseur d'eau), qui était le signe à suivre[1]. Alors Pétros[2] dit à Ieschou : Bénis cette jeune fille qui nous a conduits jusqu'ici. Ieschou la bénit donc, la vouant en mariage au berger qui avait refusé de leur indiquer le chemin. Alors Pétros : Pourquoi bénis-tu ce berger en le fiançant à une jeune fille aussi bonne que celle-là ? Ieschou répondit : Comme celui-ci est un paresseux, celle-là qui est extrêmement active pourra sauver son mari, qui autrement irait à sa perte par son incurie[3], car je suis un dieu miséricordieux qui fait rentrer les deux sexes l'un dans l'autre pour sauver les hommes. Et c'est de moi qu'a prophétisé David (Psaume CII, 24) : Il (Dieu) a affaibli ma puissance sur le chemin, et il a abrégé mes jours.

Il est évident que Dieu a affaibli la puissance de Iehoudda sur le chemin du Sôrtaba, et davantage encore sur celui de Lydda à Jérusalem. Quant à ses jours, il les a abrégés de mille ans tout simplement. Et c'est pourquoi le berger n'a pas été un en deux, deux en un, avec la bergère. Ils sont morts divisés.

 

III. — TARGUM DE LA REPRISE DE L'ΙΧΘΥΣ.

a. — A l'hôtellerie du Verseau. Le poisson avalé par Iehoudda au nez et à la barbe de Ieschou

Voici un autre targum, le plus curieux de tous, puisqu'on y voit Iehoudda reprendre l'Ιχθυς au Vaurien, qui se fait passer chez les Nozrim pour être le détenteur de ce signe.

Ils vinrent ensuite dans l'hôtellerie, où Ieschou demanda à l'hôte : As-tu à manger pour ceux-ci ? L'hôte répondit : Je n'ai rien qu'un petit ziph[4] rôti. Ieschou prit donc le poisson et le leur présenta, disant : Ce poisson est trop petit pour servir à trois personnes, allons dormir, et celui qui aura songé le meilleur songe mangera seul le poisson. Ils allèrent donc se coucher, mais au milieu de la nuit Iehoudda se leva et mangea le poisson.

En effet, comme auteur de l'Even-guilayon, il n'avait peine à faire un meilleur songe que le Vaurien de l'étranger.

Le matin, au lever, Pétros dit : En songe, je me suis vu assis sur le trône du fils du Dieu Tout-Puissant. Ieschou dit : Je suis ce fils du Dieu Tout-puissant, et j'ai rêvé que tu étais assis près de moi. Puisque j'ai fait un meilleur songe que toi, c'est à moi de manger le poisson.

Mais Iehoudda disait : Moi-même, j'ai mangé le poisson en rêve. Et ayant cherché le poisson, Ieschou ne le trouva point. En effet, Iehoudda était en train de le manger.

Il peut le manger, parce que c'est un petit poisson d'eau douce, comme ceux que Ieschou manie dans la Multiplication des Pains, ou ceux qu'il mange à la table d'Ammaüs, ou les cent-cinquante-trois qu'il fait rôtir pour le repas des sept fils du papas sur les bords du lac de Génésareth[5]. Quant au Zib, le papas des poissons, tous les lecteurs des Toledoth synoptisés savent que le fils de l'homme (de l'homme qui s'appelait Iehoudda surnommé Panthora), loin de manger cette millénaire Baleine, a été mangé par elle. Et elle ne l'a jamais rendu, comme elle a fait de Jonas.

Pas un instant le Ieschou ha nozri ne conteste à Iehoudda le pouvoir de manger seul le poisson. Pétros encore moins. Qu'au dehors ils roulent le goy, ils sont dans leur emploi ! Mais au dedans ils sont roulés par celui qui, pour la Circoncision, est le véritable maître du signe. Ieschou ne s'en étonne ni ne s'en plaint, il sait qui est en lui, il respecte le grand précepte philosophique : Connais-toi toi-même !

 

IV. — IESCHOU REMIS À SA PLACE PAR UNE SAMARITAINE AVERTIE.

Étant partis de là, une femme vint à eux, portant une cruche d'eau sur l'épaule.

Elle porte le Vase du Verseau, celui que portent la Samaritaine dans le Mahazeh de Cérinthe[6], et l'ombre du papas dans l'allégorie des Toledoth sur la préparation à la Grande pâque.

Ieschou, s'adressant à elle, dit : Donne-nous à boire, et je te bénirai de telle manière que l'eau jamais ne fera défaut à ta ville. La femme lui répondit : Imbécile, si tu peux faire des miracles, que ne commences-tu par te donner à toi-même de l'eau en abondance ? Ieschou répondit : Il est dit de moi (Psaume CII, 10) : Et à mon breuvage j'ai mêlé mes larmes.

Iehoudda ne bronche pas, il laisse Ieschou à sa mortification.

 

V. — TARGUM DE LA REPRISE DES ANES ET DU PAIN DE MILLE ANS.

a. — Jeûne involontaire de Iesehou

Étant partis de là, presque à bout de forces, dans la détresse et dans le jeûne, Ieschou dit : Il a été dit de moi (Psaume XXXV, 13) : J'ai affligé mon âme par le jeûne.

Iehoudda, qui a encore du poisson dans la bouche, s'amuse énormément.

b. — Dans la beth-léhem de Iehoudda de Kérioth

Sortis de la Samarie, les voici qui arrivent près de Kérioth.

La beth où demeure Iehoudda, fils de Simon, était une beth léhem tout autant que celle des fils du papas. Le seul fait qu'elle dispose du pain-zib et des deux ânes, montre que Iehoudda de Kérioth était, lui aussi, de David, par ceux qui avaient régné. Peut-être même en était-il par son père, ce qui manquait à son homonyme de Gamala.

Vinrent à eux des hommes de Kérioth, à qui Ieschou demanda le léhem (pain).

Il s'agit du léhem-Zib, le pain de mille ans, dont l'Ιχθυς est le signe, Ιχθυς que Iehoudda, fils du papas, vient de reprendre au Vaurien.

c. — Ruse du Vaurien de l'étranger pour avoir les ânes

Mais l'un d'eux[7], répondant, dit à Ieschou : Si tu danses devant moi, je te donnerai, avec le léhem, mon âne et son ânon.

Iehoudda, fils de Simon Kériothis (c'est lui qui parle ici), reconnaît que dans le Vaurien de l'étranger il y a Iehoudda-bar-Iehoudda, fils du David qui dansa devant l'Arche. Il n'est pas mal disposé. S'il voit Ieschou danser, c'est qu'il précède l'Arche, et il ne demande qu'à y monter.

Ieschou dansa donc, et reçut de l'homme l'âne avec l'ânon, et il dit : Il a été dit de moi (Jérémie, XXXI, 13) : Alors la Vierge dansera de joie. Et en effet ma mère était vierge quand je suis venu au monde. Maintenant donc je suis en joie, en danse et en trépignement.

Ieschou se moque des hommes de Kérioth ! Ce n'est pas parce que Salomé était vierge, quand elle s'est mariée, qu'il trépigne de joie et d'espérance en approchant de la Ville Sainte, c'est parce que, se disant le fiancé de la Vierge du monde, représentée ici-bas par Jérusalem, il se croyait sur le point d'en faire pour mille ans sa femme légitime, selon la prédiction de Jérémie, à l'endroit cité. Et ce qu'il racontait aux gens de Kérioth, quand il était encore Iehoudda bar-Iehoudda, bar de l'Abba, c'est ce que la Vierge d'Israël dit dans Jérémie :

Dès les temps reculés, l'Eternel s'est montré à moi : Oui, disait-il, je t'aime d'un amour impérissable, aussi t'ai-je attirée à moi avec bienveillance. De nouveau je t'édifierai et tu seras bien édifiée, Vierge d'Israël ! De nouveau tu iras, parée de tes tambourins, te mêler aux danses joyeuses. De nouveau tu planteras des vignes sur les coteaux de Samarie, et ce qu'auront planté les vignerons, ils en recueilleront le fruit. Oui, il viendra un jour où les sentinelles s'écrieront sur la montagne d'Ephraïm[8] : Debout ! Montons à Sion vers l'Eternel, notre Dieu !

En vérité, ainsi parle l'Éternel : Éclatez en chants joyeux au sujet de Jacob, en cris d'allégresse au sujet de la première des nations ; publiez à voix haute ses louanges, et dites : Assure, ô Seigneur, le salut de ton peuple, des derniers restes d'Israël ! Oui, je veux les ramener de la région du Nord, les rassembler des extrémités de la terre ; l'aveugle même et le boiteux, la femme enceinte et l'accouchée se joindront à eux : en grande foule ils reviendront ici !

Ecoutez les paroles de l'Eternel, ô nations ! Annoncez-la sur les plages lointaines, dites : Celui qui disperse Israël saura le rallier, et il veille sur lui comme le pasteur sur son troupeau. Car l'Éternel délivre Jacob et il le sauve de la main de plus fort que lui. Ps viendront et entonneront des chants sur les hauteurs de Sion, ils accourront jouir des biens de l'Éternel, du blé, du vin, de l'huile, des produits du menu et du gros bétail ; leur âme sera semblable à un jardin bien arrosé et ils seront désormais exempts de soucis. Alors, la jeune fille prendra plaisir à la danse, adolescents et vieillards se réjouiront ensemble : Je changerai leur deuil en allégresse et en consolation, et je ferai succéder la joie à leur tristesse. Je rassasierai les prêtres[9] de victimes grasses, et mon peuple sera comblé de mes biens, dit l'Eternel[10].

Or les gens de Kérioth savent à quoi s'en tenir sur ce Ieschou qui, après avoir perdu la Vierge dont il est question ici (Jérusalem), sans pouvoir ni la violer ni l'épouser, vient ici leur raconter que, chez les nozrim dont il est le Dieu, c'est la vieille Salomé, avec ses dix enfants, qui joue aujourd'hui le rôle de la Vierge du monde !

Et je possède aussi l'âne ! Car de moi il a été dit (Zacharie, IX, 9) : Pauvre et monté sur un âne !

Ceci a été changé, et mis d'accord avec ceux des Toledoth synoptisés où Jésus n'a qu'un âne à sa disposition, c'est-à-dire la moitié du signe.

d. — Dans une scène qui a été supprimée, Iehoudda lui reprend les ânes

Mais ici, comme dans Matthieu, où il a le signe tout entier, il est tenu d'enfourcher les deux ânes. S'il ne le fait pas, c'est que Iehoudda les lui reprend, comme il lui a repris l'Ιχθυς.

e. Il lui reprend le léhem

Nous voyons aussi qu'il lui reprend le léhem, lui enlevant par là le bénéfice de l'opération que l'Église appelle indûment la Multiplication des Pains, et qui est, comme nous l'avons expliqué une simple Prorogation du temps. Le Vaurien de l'étranger n'est pas plus Maître du temps que ne l'a été Iehoudda.

Lorsque, dans le Mahazeh de Cérinthe, Ieschou répète à satiété : Je suis le pain de la vie, et autres absurdités du même genre, lorsque, dans de prétendues Eucharisties, prenant le pain et le rompant, etc., il le donne aux nozrim, il se moque outrageusement de tout le monde. Ce pain, ce léhem, appartient à Iehoudda, comme l'Ιχθυς, comme les Ânes, comme tout le reste, et le corps même de Ieschou !

f. — Il emporte le léhem à Lydda

Iehoudda, s'étant emparé du léhem, dit en l'emportant : Je vais aller dans la ville (Lydda, nommée plus loin), vous acheter du pain.

Du pain quotidien, du pain qu'on achète chez le boulanger, du pain à un denier par jour, voilà ce qui convient à Ieschou, ainsi qu'à son associé Pétros, ce renégat qui fait son papas à Rome ! Avec quel plaisir Iehoudda les laisserait mourir de faim tous les deux ! Mais il est dans l'un ; et l'autre, sous le nom de Siméon, fut son frère. En voyant Iehoudda emporter le pain, Ieschou a bien envie de crier au voleur, et de lui courir après ! Mais en entendant nommer Lydda, il ne peut retenir un mouvement d'effroi, il ne veut pas être arrêté par Saül, mené dans la synagogue, puis à Jérusalem les mains liées derrière le dos. Il se trouve, heureusement pour lui, que Iehoudda ne veut pas mourir avant six mois. Iehoudda ira donc seul à Lydda et en sortira libre :

Mais vous, vous n'irez pas, de peur que, si par hasard vous étiez reconnus par les habitants, ils ne vous lapident !

g. — Pendant que Iesehou et Pétros l'attendent dans la plaine, Iehoudda va leur acheter du pain à Lydda, le leur apporte, et monte à Jérusalem pour les faire arrêter

Iehoudda s'en alla donc, à Lydda, acheter du pain, et l'apporta à Ieschou et à Pétros, disant : Je vais à Jérusalem pour savoir ce qui se passe entre les docteurs à votre sujet, afin qu'ensuite nous puissions faire ce qui nous semblera le mieux. Ieschou et Pétros lui dirent donc : Va, nous t'attendons ici.

Il faudrait, pour respecter l'histoire, que le Sanhédrin envoyât Saül arrêter Ieschou. Mais en ce cas le rôle de Iehoudda cesserait immédiatement, et le Mahazeh aussi. Or, pour une raison que nous ne pouvons déterminer avec certitude, et dont l'auteur du Mahazeh n'est peut-être pas responsable, il se trouve que nous n'en sommes pas encore à la veille de la pâque, mais seulement à l'approche de la fête des Tabernacles.

 

VI. — LE DERNIER YOM-KIPPOUR DE IESCHOU.

a. — La maison de Jaïr, hôte de Iehoudda et de ses frères aux Tabernacles de 788

Iehoudda alla donc à Jérusalem, pendant que Ieschou et Pétros l'attendaient, ayant confiance en lui.

Etant arrivé à Jérusalem, Iehoudda apprit au roi et aux docteurs toutes les impiétés que disait et faisait Ieschou, ce qu'il opérait par la vertu du Nom infini, comment les gens d'Ain croyaient en lui, et comment Ieschou lui-même avait épousé la fille de Karkamus, juge d'Ain.

Ieschou marié ! Huldrich bondit à bon droit. Car ici, Ieschou se trouve avoir épousé sa belle-sœur, fille de Iarrhaï (Jaïr, descendant des Juges d'Israël), et femme de Jacob junior, qui n'est pas encore lapidé. De son côté, une des sœurs de Ieschou avait épousé Éléazar bar-Jaïr, car l'homme désigné ici sous le nom terriblement corrompu de Karkamus n'est autre que le frère du Jaïr de Jérusalem.

Le roi et les docteurs demandèrent à Iehoudda par quel moyen il convenait de prendre Ieschou et ses compagnons.

b. — Iehoudda s'entend avec Jaïr, beau-père de Jacob junior, pour mouiller, dès les Tabernacles, le vin que Ieschou devait boire à la Pâque

Iehoudda répondit : Dites à son hôte Iager (Jaïr) ben Purah[11], appelé aussi Purah, de mêler à son vin de l'eau d'oubli, quand nous viendrons à Jérusalem pour la fête des Tabernacles. Alors vous pourrez le prendre facilement avec ses compagnons, car Iager Purah est le frère de Karkamus le Gerhadite (Gérasite). Moi, je persuaderai à Ieschou que Karkamus, ce juge d'Ain, est le frère de Purah. Ieschou ajoutera donc foi à mes paroles, et ils viendront ici à la fête des Tabernacles. Et lorsqu'ils boiront du vin en question, il ne se rappellera plus le Nom infini, il sera incapable de se sauver, et alors vous pourrez le prendre !

Le roi et les docteurs répondirent : Ce conseil nous paraît bon, va en paix ; en attendant, nous indiquerons le jeûne.

Le jeûne des Expiations, le Yom-Kippour.

c. — Revenu sous Lydda, Iehoudda annonce à Ieschou que les Jérusalémites l'attendent avec impatience

Iehoudda s'en alla donc le troisième jour du mois de Tischri, et toute l'assemblée de Jérusalem jeûna le Grand jeûne, suppliant Dieu qu'il daignât livrer Ieschou et ses compagnons aux mains de Iehoudda. Et ils prirent pour eux et pour leurs enfants le jeûne qui chaque année s'observe solennellement à la troisième fête, celle de Tischri[12]. Mais les Jérusalémites persuadèrent aux hommes que cette purification spéciale était une dévotion relative au jeûne de Gédaliah.

Ceci de manière que Ieschou, Pétros et autres ne se méfiassent point et vinssent à Jérusalem, trompés sur les véritables sentiments des habitants à leur endroit. Car le jeûne dit de Gédaliah, loin d'être un rite hostile à la Sainte famille, lui était, au contraire, une promesse d'hospi- talité. En effet, on lit dans Zacharie, un des prophètes auxquels Iehoudda empruntait le plus :

Ainsi parle l'Eternel-Cébaot : Le jeûne du quatrième mois et le jeûne du cinquième, le jeûne du septième et le jeûne du dixième mois, seront changés pour la maison de Juda en joie et en allégresse, et en fêtes solennelles. Mais chérissez la vérité et la paix ![13]

Si donc Ieschou, qui maintenant pactise avec les nozrim au point d'être l'ennemi des Juifs, se présente à la fête, il sera arrêté dans la maison où le fut Iehoudda en 788. S'il était vraiment prophète, il saurait cela.

 

VII. — L'AFFAIRE DES TABERNACLES.

a. — L'affaire des Tabernacles racontée à Ieschou par celui à qui elle est arrivée en 788

Étant donc de retour auprès de Ieschou, Iehoudda lui raconta ceci : J'ai écouté avec soin ce que disent les gens de Jérusalem, il n'y en a pas un seul qui nous veuille du mal. Bien plus, le roi ayant voulu tuer Iohannos, les Péréjim[14] sont venus, qui l'ont délivré.

Par conséquent, le passage où les satellites du roi lui coupent la tête n'était pas dans le texte primitif du Mahazeh. Iehoudda est d'autant plus sûr de ce qu'il avance, que Iohannos, c'est lui.

b. — Le Iohannos délivré par les Péréjim (Juifs asinaires)

Iohannos lui-même et ses hommes m'ont parlé ainsi : Dis à Ieschou, notre Adonoï[15], qu'il vienne ici avec ses disciples, et nous le défendrons comme nous avons défendu Iohannos. Il y a mieux : ton hôte Iager (Jaïr) Purah est le frère de Karkamus, le juge d'Aïn, et de plus il est l'oncle paternel de ta femme !

Sa femme non, mais celle de Jacob junior. A part cette confusion entre deux fils du papas, Iehoudda place très exactement Ieschou devant sa situation de famille : Tu ne parles pas de tout cela dans les Toledoth canoniques, moi je t'en parle pour l'édification des nozrim que tu trompes !

Ieschou écouta les paroles de Iehoudda et y ajouta foi, rendant grâce à Dieu Sabaoth de ce qu'il avait exaucé ses supplications, ses appels[16], et ses jeûnes.

En effet, c'est à cette fête que Iehoudda, en sa qualité de Iohannos, avait annoncé qu'il dirait le mot de l'accomplissement de la Promesse le 15 nisan suivant, et que le temps finirait.

e. — Traces d'un jeûne célébré par les Jérusalémites pour faire échouer l'entreprise de Iehoudda contre le Temple et la Ville

Alors les habitants de Jérusalem et des environs jeûnèrent pendant dix jours consécutifs, compris entre la fête de la Nouvelle année et la fête des Expiations. Et de plus il s'en trouva qui jeûnèrent même pendant le jour du sabbat. Et comme les hommes de rien demandaient ce qu'ils voulaient obtenir par l'imposition de tant de jeûnes, alors que la coutume, dans ce temps où la maison du sanctuaire s'ouvre à tous, est de ne jeûner que le seul jour des Expiations, les docteurs répondirent que cela se faisait parce qu'ils étaient menacés de guerre par les rois des nations, qui les en avaient prévenus, et qu'ainsi, par décret du roi, ils avaient ordonné le jeûne jusqu'en Galilée.

Il semble que ce jeûne exceptionnel appartienne à l'histoire ; mais, s'il en est ainsi, il se place certainement à la veille de la Grande pâque. Les habitants de Jérusalem voulurent montrer à Pilatus que, loin de pactiser avec le scélérat qui troublait les Juifs, même à l'étranger, ils imploraient contre lui le secours de Dieu, qui d'ailleurs ne leur fit pas défaut.

d. — Ieschou ha nozri forcé par la vérité historique de se camoufler, comme Iehoudda et les Péréjim, pour s'introduire dans Jérusalem

Ieschou et ses sectateurs (les Péréjim) dépouillèrent leurs vêtements d'habitants d'Aïn, pour n'être point reconnus à Jérusalem.

Huldrich traduit, au contraire, par ils revêtirent.

C'était le bon moyen d'être immédiatement reconnus et arrêtés ! On peut donc être certain que le texte primitif disait ce que nous allons voir dans le Mahazeh édité par Wagenseil, à savoir que Iehoudda et sa bande s'étaient camouflés en pharisiens pour déjouer la police du Temple.

Vous vous rappelez ce qui se passa. Comme les Péréjim étaient très faciles à reconnaître avec leur tête rase et leur tunique, ils s'étaient déguisés en honnêtes pharisiens, gens à manteau, et s'étaient introduits dans le Temple. Au signal donné par le Baptiseur, ils avaient sorti de dessous leur manteau leurs bâtons et leurs siques, peut-être aussi des fouets, et accablé de coups les Jérusalémites qui ne sentaient pas suffisamment l'approche du Yom-Zib. Toute l'affaire était dans Flavius Josèphe, et elle y est encore, avec cette différence que les Péréjim sont remplacés par des Romains.

e. — Ieschou, pour se faire accepter de Jaïr, fils du Pressoir, s'attribue les exploits de Ménahem comme Messie vendangeur des Nozrim

Or, au jeûne même du Jour des Expiations, Ieschou étant venu à Jérusalem, alla dans la maison de Purah. Et Ieschou dit : Il a été dit de moi : (Isaïe, LXIII, 1-5) : J'ai foulé le pressoir en venant d'Idumée. Et en effet, je suis venu d'Idumée dans la maison de Purah[17].

Ieschou se vante. Il est bien vrai qu'a s'était annoncé comme devant être le vendangeur des goym, et cela dès les Tabernacles, puisque sa prophétie est telle dans l'Even-guilayon :

Et un autre ange sortit de l'autel, qui avait pouvoir sur le feu, et il cria d'une voix forte à Celui qui avait la faux tranchante : Jette ta faux tranchante, et vendange les grappes de la vigne de la terre, parce que les raisins sont mûrs. Et l'Envoyé jeta sa faux tranchante sur la terre et vendangea la vigne de la terre, et il jeta (les goym)[18] dans la grande cuve de la colère de Dieu. Et la cuve fut foulée hors de la ville, et le sang, montant de la cuve jusqu'aux freins des chevaux, se répandit sur un espace de mille six cents stades.

Mais, lui dit en somme l'auteur du Mahazeh : Ce n'est pas toi qui as réalisé ta prophétie, comme tu le dis ici, ce n'est pas toi qui as foulé la cuve, c'est Ménahem, en revenant d'Idumée, vêtu de la pourpre royale et couvert du sang de la garnison romaine de Massada, et par surcroît foulant dans le pressoir évangélique trois mille personnes de tout âge, de tout sexe, de toute condition et de toute nation. S'il en est un qui puisse se dire le Messie vendangeur, c'est celui-là. La prophétie est de toi, c'est vrai. Tu ne te la rappelles pas, parce que, depuis que tu es avec les nozrim, tu te fais passer pour avoir voulu être leur bon Pasteur. Et dans les Toledoth canoniques tu oses traiter les pharisiens d'hypocrites ! Puisque tu t'appliques les exploits de Ménahem, puisque c'est Isaïe, comme tu le reconnais, et non toi, qui a prophétisé avec le plus de précision la cuvée de 819, cites-le au moins tout entier :

Quel est celui qui vient d'Edom, qui arrive de Boçra, les vêtements teints de rouge ? Qu'il est magnifique dans son costume et s'avance fièrement dans l'éclat de sa force ! — C'est moi, qui parle le langage de la justice et suis puissant pour sauver. — Pourquoi tes habits sont-ils comme ceux du vendangeur qui foule le pressoir ? — C'est que j'ai foulé une cuvée à moi tout seul, et d'entre les nations personne n'a été avec moi ! Et je les ai pressurés dans ma colère, écrasés dans mon courroux ; leur sève a jailli sur nies vêtements et mes habits en sont tout mouillés. Car c'était un jour de revanche dans ma pensée, l'année de mes représailles était venue ! Et j'ai regardé : personne pour m'assister ! J'observai avec surprise : personne pour me prêter main forte ! Alors mon bras fut mon secours, mon indignation fut mon auxiliaire. Et je broyai des peuples dans ma colère, je les étourdis dans ma fureur, et fis couler leur sève à terre ![19]

Cette prophétie d'Isaïe sur Ménahem, et placée dans la bouche de Ieschou au moment où il revient chez Jaïr, nous apporte la certitude que Ménahem lui-même avait épousé une des filles de ce personnage.

f. — Eloge funèbre de Jaïr le lapidé et de l'Eléazar bar Jaïr[20] qui a fermé le cycle évangélique après le dernier des sept fils du papas

Et à toi, Purah, convient ce qui est dit (Genèse, XXXI, 47) Iegar Sahadutha (Monceau-Témoignage). Car tu seras un monceau pour témoigner de nous et pour nous mettre en sûreté.

Le surnom araméen de Iegar[21] Sahadutha que lui donne Ieschou suffit à montrer que ce Jaïr fut lapidé pour avoir facilité l'évasion de Iehoudda et de ses frères. Il s'agit, en effet, d'un monceau de pierres qui devient témoignage d'alliance entre Laban et Jacob : Concluons une alliance, toi et moi, Jacob, (à cause des filles de Laban qu'eut Jacob). Mais le mot s'étend à Eléazar II bar-Jaïr, qui s'est enseveli sous les ruines de Massada.

Moi, je suis venu à Jérusalem pour abolir les Temps[22], les fêtes et les repos (sabbats) statutaires, et quiconque croira en moi aura sa part du Yom à venir. Et je ferai une loi nouvelle à Jérusalem ; car il a été prédit de moi (Isaïe II) : De Sion la Loi sortira, et de Jérusalem la Parole de Dieu.

g. — Grossière interpolation ecclésiastique

Sur cette citation, où Ieschou, si on consulte Isaïe, est nommé par son nom de circoncision[23], intervient un commentaire qui ne saurait appartenir au texte primitif.

J'expierai les péchés, les iniquités et toutes les défections par ma mort. Mais après ma mort, je revivrai, car de moi il est écrit (Samuel, II, 6) : Je fais mourir et je fais vivre.

L'aigrefin ecclésiastique fait énoncer cette proposition par Ieschou dès le jour des Expiations (c'est le mot qui lui fournit l'idée), conséquemment six mois avant l'annonce de sa crucifixion dans les Toledoth canoniques. Quant à la citation de Samuel, elle vaut pour l'infidélité celles que les Toledoth du canon font des Prophètes. Il n'y est nullement question prophétiquement d'un scélérat crucifié pour crimes publics, mais de l'Éternel, à qui pareille aventure n'est pas encore arrivée, du moins à notre connaissance : L'Éternel fait mourir et fait vivre : il précipite au tombeau et en retire.

 

VIII. — EMPRISONNEMENT DÉFINITIF DE IESCHOU SIX MOIS AVANT SA MORT.

a. — Iehoudda allié avec ses anciens ennemis pour faire arrêter Ieschou

Mais Iehoudda secrètement alla trouver le roi et le prévint que Ieschou était avec ses compagnons dans la maison de Purah. Le roi envoya donc de jeunes prêtres dans la maison de Purah, lesquels ayant trouvé Ieschou, lui dirent : Nous ne sommes pas des vauriens, mais nous croyons en toi et en tes Paroles[24], fais-nous seulement la grâce de donner quelques signes devant nous. Ieschou leur fit donc des miracles par la vertu du Nom infini.

Mais ce sont les derniers. Qu'ils n'espèrent pas en avoir d'autres !

b. — Le dernier repas de Ieschou avec sa bande. L'arrestation

Ensuite Ieschou et ses disciples firent un repas le jour même de la fête des Expiations. Et ils ne jeûnèrent pas, buvant même le vin auquel avait été mêlé l'eau d'oubli. Ensuite ils s'allèrent coucher. Mais au milieu de la nuit, les satellites du roi cernèrent, selon son ordre, la maison de Purah. Celui-ci ayant ouvert sa porte, les satellites du roi pénétrèrent dans la chambre où était Ieschou avec ses disciples, et le chargèrent de chaînes. Ieschou portait tout son esprit sur le Nom infini, mais il ne pouvait le trouver, ayant perdu la mémoire de toutes ses combinaisons. Alors Ieschou dit : Il a été dit (Osée, IV, 11) de moi : La débauche, le vin et le moût leur enlèvent toute intelligence.

Il se peut qu'il y ait quelque trait de vérité dans cette arrestation nocturne, et dans le repas qui la précède, quoique le jeûne des Expiations fût le plus obligatoire de tous. Au surplus, le repas de la pâque que les Toledoth synoptisés ont inventé étant impossible matériellement, puisque Iehoudda était à ce moment en croix, Ieschou donne son dernier repas le jour des Expiations. C'est le dernier repas de cette bande de scélérats, et ils ont une façon tellement scandaleuse de rompre le jeûne que c'est une raison suffisante pour arrêter définitivement leur Maître.

On a tronqué a citation d'Osée que fait Ieschou pour dépeindre les mœurs de la troupe qui le suivit pendant son incorporation à Iehoudda, on en a même enlevé le mot débauche, qui caractérise, assez faiblement d'ailleurs, cette mauvaise vie, la pire de l'histoire des pires mœurs.

C'est l'Éternel qui parle à Juda (et en l'espèce à Ieschou) :

Ton peuple est de ceux qui récriminent contre le prêtre. Aussi trébucheras-tu en plein jour, et avec toi le prophète trébuchera la nuit ; et j'en finirai avec ta mère. Mon peuple périt faute d'intelligence. Puisque tu as dédaigné, toi, l'intelligence, mon dédain ne te permettra pas de rester mon pontife. Tu as oublié la doctrine de ton Dieu ; moi, de mon côté, j'oublierai tes enfants. Avec leur puissance croissaient leurs péchés contre moi ; je changerai leur gloire en opprobre. Ils se nourrissent du péché de mon peuple, et leurs appétits cherchent satisfaction dans ses fautes. Il en sera du peuple, comme du pontife ! Je leur ferai expier leur conduite, et leur revaudrai leurs œuvres. Ils mangeront sans se rassasier, ils s'adonneront à la débauche sans se multiplier, car ils ont renoncé à tenir compte de l'Eternel. La débauche, le vin et le moût leur enlèvent toute intelligence. Mon peuple demande des oracles à son morceau de bois[25], et sa verge[26] doit le renseigner : c'est que l'esprit de débauche les a égarés, et il se prostitue en trahissant son Dieu ![27]

e. — Ieschou au Hanôth, surnommé, à cause de lui, la Maison du Blasphémant

Mais les satellites du roi menèrent Ieschou avec ses compagnons dans la prison dite Maison du Blasphémant, parce qu'il a accablé Dieu de ses infamies et de ses blasphèmes.

Les nozrim apprennent ici qu'en souvenir des diverses incarcérations de celui qui osait se dire Bar-Abba, le Hanôth avait été surnommé Maison du blasphémant par les Juifs de Jérusalem, lorsqu'ils furent enfin débarrassés de cet impie.

Le matin venu, on annonça au roi que Ieschou et ses compagnons avaient été pris et enfermés dans la prison. Le roi ordonna donc qu'ils y fussent gardés jusqu'à la fête des Tabernacles. Et tout le peuple de Dieu venait se prosterner devant le Seigneur pendant la fête, selon ce qui a été ordonné par Moïse.

d. — Lapidation de divers parents et sectateurs de Ieschou, parmi lesquels Jacob junior, à la Dédicace

On sait que, dans la réalité, le Iohannos et ses frères furent délivrés par les Péréjim, comme Iehoudda lui-même le fait constater à Ieschou Il est manifeste toutefois que, moins heureux, Jaïr et peut-être d'autres membres de la famille furent lapidés à cause de cet exploit. En effet le Mahazeh constate des lapidations, mais il semble bien qu'à celles où périt l'hôte du Iohannos et de ses frères il mêle celle de Jacob junior et d'autres qui eurent lieu trois mois après, à la fête de la Dédicace.

Alors le roi ordonna que les disciples de Ieschou fussent lapidés hors de Jérusalem. Ce qu'ayant vu, tous les Israélites firent périr sous les pierres les sectateurs de Ieschou. Et tout Israël retentit de cantiques et de louanges, parce que Dieu avait livré aux mains du peuple ces hommes de Bélial[28].

Ils sont ainsi appelés à cause de l'idolâtrie spéciale que professait leur Maitre, le Bélial juif[29].

e. — Suppression par l'Église de toute la période pendant laquelle Ieschou fut le roi des voleurs

Il y a grand avantage pour l'Église à ce que Ieschou soit emprisonné à Jérusalem depuis les Tabernacles jusqu'à sa mort. Par ce moyen il ne saurait être coupable des crimes commis au-delà du Jourdain, et pour lesquels, dans les Toledoth canoniques, il est, sous le nom de Barabbas, qualifié de rebelle, voleur et assassin. Ces crimes ont été surtout commis entre la fête de la Dédicace et la pâque. Maintenant que l'Église a supprimé les Josèphe et les Tacite, et avancé la crucifixion de sept ans, il est devenu impossible de relever le moindre crime à l'actif de l'individu dont elle a fait un Dieu. Il faut donc que l'auteur de ce Mahazeh ait l'air d'avoir admis l'innocence du Juif de rapport quant aux crimes de droit commun, et de ne condamner que ses prétentions à être bar-Abba.

f. — Rétablissement dans son ordre chronologique du passage qui concerne cette période

Cependant, les troubles qui ont précédé la pâque, les meurtres ordonnés par Iehoudda dans les villes qu'il a soumises à son autorité, les deux mille hommes, Gaulois et autres, tombés à la Journée des Porcs, pour la défense des états d'Hérode Antipas, l'extension de l'émeute jusque dans Jérusalem, tout cela est connu du Mahazeh par la tradition confuse, mais tenace, des synagogues. Ces choses sont rejetées après la mort de Ieschou, dans le texte actuel, mais on ne peut douter que, dans le texte original, elles ne fussent à leur place, c'est-à-dire postérieures à la lapidation du Iehoudda qui s'appelait en circoncision Jacob, et antérieures à la crucifixion du Iehoudda qui fut le Roi des Voleurs. Nous n'hésitons donc pas à placer ici le passage suivant, qui résume la période écoulée depuis la Dédicace jusqu'à la crucifixion.

Il arriva qu'ayant appris la lapidation de Ieschou[30], les gens d'Aïn déclarèrent une guerre cruelle à Israël. Quand ils rencontraient un Israélite, ils le mettaient à mort[31]. Deux mille[32] Israélites[33] furent tués ainsi. Et les Israélites ne pouvaient monter à la fête à cause des gens d'Aïn[34]. Le roi faisait donc la guerre aux Aïnites, mais il ne pouvait les dompter, car dans Jérusalem même, le nombre de ces scélérats croissait aussi contre le roi.

Tous les lecteurs du Mensonge chrétien savent que ces événements sont postérieurs à la lapidation de Jacob junior, et ont amené la crucifixion de son frère aîné. Or nous avons vu Iohannos s'échapper de prison aux Tabernacles derniers et nous ne voyons pas mourir. Nous avons vu les disciples de Ieschou lapidés en grand nombre à la Dédicace, et le Iohannos n'en est pas. Par conséquent il est toujours vivant.

Et qui donc opère au Jourdain, si ce n'est lui ?

Ieschou était donc gardé renfermé dans la prison, parce que le roi ne voulait pas le mettre à mort, avant de faire savoir aux habitants d'Aïn qu'ils pouvaient venir, et voir Ieschou, ce Prophète du Mensonge, blasphémant et couvrant Dieu de honte, et qu'ainsi il n'y avait rien de solide dans les Paroles du Ieschoua[35].

A savoir qu'il fût le bar de l'Abba et qu'il dût régner mille ans.

 

IX. — LA CONDAMNATION À MORT DE IESCHOU.

a. — Hérode Antipas défère Ieschou au Sanhédrin qui le condamne à mort

Le roi envoya donc, hors du pays où il était[36], des lettres au petit sanhédrin pour que ses membres examinassent de quel supplice on devait punir Ieschou, et que, venant célébrer la fête de la pâque, ils jugeassent Ieschou selon ce qu'a ordonné Moïse d'après la loi du Seigneur (Lévitique, ch. XXIV, 16), sur la lapidation de celui qui vomit des blasphèmes et des infamies contre Dieu.

b. — Délivrez Ieschou bar-Abba !

Ici nous nous trouvons devant une vérité frappante, restée dans le Mahazeh. L'auteur est obligé de constater que toutes ou presque toutes les populations de Transjordanie ont tenu pour le Iohannos jusqu'au dernier moment, qu'elles l'ont caché, empêché d'être pris, et que, quand il le fut, elles ont tenté de le délivrer[37].

Tous les Géraséniens, et toute la terre voisine de Gérasa, appelée maintenant ....., située autour de Césarée, et aussi les membres du petit sanhédrin, habitant dans les villes de..... répondirent au roi et aux docteurs : Délivrez Ieschou, et ne le mettez pas à mort Mais qu'il vive jusqu'à ce qu'il ait digéré son déshonneur, et dans sa honte il se suicidera ![38]

Délivrez Ieschou ! C'est le Délivrez Barabbas ! des Toledoth canoniques. Et l'on s'explique que l'Église ait petit à petit retiré les exemplaires des Toledoth où ce scélérat était dit : Ièsous Barabbas.

Mais ici point d'option entre deux individus, dont l'un se serait appelé en circoncision Ieschoua, et aurait été un foudre d'innocence, et un autre qui se serait appelé Barabbas, et aurait été un monstre de scélératesse.

Si c'est frère Raymond Martin qui a laissé ce passage dans le Mahazeh, il peut se vanter d'avoir rendu malgré lui un fameux service à la vérité. Car il y est démontré par le témoignage de tous les Juifs contemporains de Pilatus, que jamais le gouverneur de Judée n'eut le choix entre deux prisonniers également illustres, et que la mise en liberté de Barabbas est une joyeuse comédie, ourdie par une plume experte dans l'art de mystifier la semence de bétail. Il n'y a jamais eu qu'un Bar-Abba au prétoire : c'est celui que les nozrim appellent aujourd'hui leur Seigneur Jésus-Christ.

c. — Intervention des Juifs de Worms pour demander la mise en liberté de Ieschou bar-Abba

En un temps et dans une circonstance qu'il serait intéressant de savoir, les Juifs de Worms (Wormatia Germaniæ), ont rayé les noms de villes qui étaient dans le Mahazeh, et les ont remplacés par Wormajesa, afin de s'agréger à ceux de leurs coreligionnaires qui se seraient jadis opposés à la crucifixion de Ieschou, en qui il était dangereux de reconnaître Barabbas. Ce changement ne semble pas remonter à une époque reculée : le docte Wagenseil, théologien, le relève à la fin du dix-septième siècle, et il dit à propos des Juifs de Worms[39] : On rencontre souvent des Juifs qui ne pensent pas tout à fait mal du Christ, souhaitant que leurs pères se fussent abstenus de le mettre à mort, lorsqu'il semblait avoir donné occasion à son supplice par son caractère destructeur[40]. Il court en effet ce proverbe à la décharge des Juifs de la cité de Worms : Juif de Worms, pieux juif. La cause en est, disent-ils, qu'ils ont clairement établi, devant l'Empereur et les Etats assemblés, qu'habitant la ville depuis des temps très reculés et bien antérieurs à la naissance du Christ, leurs pères sont exempts de toute faute dans sa mise à mort, et que ni eux ni leurs enfants ne doivent être exposés à la haine dont sont poursuivis les autres Juifs. Le privilège que cette condition leur vaut sur les Juifs des autres villes, mérite bien qu'ils aient de la considération pour le Christ[41].

Parti de ce principe que le texte primitif du Mahazeh avait réellement désigné les Juifs de Worms, et non ceux de la Gaulanitide, de la Bathanée et de la Trachonitide, dans la tétrarchie de Philippe, Huldrich déclare que par terre de Césarée l'auteur de la substitution a voulu désigner la Germanie, le Saint-Empire. Nous ne pouvons savoir ce qu'il y avait exactement dans la cervelle du malheureux Juif qui, obligé de mentir pour sauver sa vie[42], a glissé le nom de Worms dans le Mahazeh ; mais ce qui est certain, c'est qu'à l'origine il s'agissait bien de Césarée Panéas, autrement dite Césarée de Philippe, aux sources du Jourdain. Sans même recourir au Mensonge chrétien pour en avoir la preuve, il suffit d'ouvrir les Toledoth du canon, particulièrement les Synoptisés, pour voir que Iehoudda bar-Abba était dans ce district, quelques jours avant de s'aller jeter contre la cavalerie de Pilatus au Sôrtaba.

d. — Le four à cuire le léhem-Zib dans la synagogue de Worms

Il est certain d'ailleurs que les Juifs de Germanie, comme ceux des autres pays, avaient reçu l'Even-guilayon éternel du vivant même de son auteur, et que, sitôt le Nom d'Iehova prononcé par le fils de David, ils comptaient bien manger le léhem de mille ans. Et ils attendaient impatiemment l'heure de mettre la pâte au four. Plusieurs siècles après la faillite du Royaume, les Juifs de Worms, montrant dans la synagogue le four à cuire le pain azyme, racontaient malicieusement qu'au fond était inscrit le tétragramme : C'est pourquoi, disaient-ils, nous n'enlevons pas les toiles d'araignée qui sont devant. La figure du Nom divin est tellement vétuste que nous risquerions de l'effacer !

e. — L'avis des Jérusalémites l'emporte sur celui des Transjordaniens (et même du sanhédrin de Worms)

Mais tous considéraient que cet avis n'avait rien de fondé, et ni le roi ni les docteurs ne prêtèrent d'attention à ce que conseillait le sanhédrin de Worms.

Le Délivrez Ieschou ! n'a pas porté.

f. — Ieschou exécuté la veille de la Pâque : Confusion de supplice avec le Iehoudda lapidé (Jacob junior)

La fête de la pâque approchant, ils firent publier par toute la terre des Israélites que, si quelqu'un avait quelque chose à faire valoir en faveur de ce blasphémateur, il se présentât devant le roi et prît la défense de Ieschou. Mais tout le peuple, à l'unanimité, répondit qu'il fallait tuer Ieschou.

Il est bien vrai que Iehoudda fut condamné à l'unanimité, mais ce fut par le sanhédrin et quarante jours avant la pâque. Quant au mode d'exécution, ici c'est la lapidation, comme dans le Talmud. Et cela se conçoit, car, après plusieurs siècles, et même en 789, les rabbins pouvaient se demander lequel des sept Iehoudda avait été lapidé, et si c'était l'aîné, celui qui se disait Meschiah bar-Abba.

Mais voici où le Mahazeh rentre dans la vérité absolue : Iochanan hen Zaccaï, vice-président du Sanhédrin, n'eût pas dit autrement.

La veille de la Pâque ils tirèrent Ieschou de la prison, et s'écrièrent devant lui : Ainsi périssent tous tes ennemis, ô Seigneur ! (Juges, V, 31).

Cependant, si nous avions affaire au vrai Iochanan ben Zaccaï, nous trouverions ensuite l'irruption des partisans de Iehoudda dans ]e Temple à l'heure du sacrifice de l'agneau, et l'intervention de Pilatus avec ses légionnaires.

Ils suspendirent au bois Ieschou hors de Jérusalem, comme l'avaient ordonné le roi et les docteurs. Et tout Israël vit cela, et rendit louanges et hommages au Tout-Puissant, qu'ils avaient vengé.

Ici le Mahazeh s'écarte absolument de l'histoire. Il supprime le transfert de Iehoudda du Hanôth au prétoire, l'exposition publique en habits de pourpre, et la marche au supplice avec l'écriteau sur la poitrine ; enfin il charge les Jérusalémites d'un acte auquel ils sont restés étrangers : la crucifixion, qui appartient aux Romains.

Mais où il est en pleine vérité, c'est quand il constate que le Vaurien de l'étranger était en croix le 14 nisan, et que, par conséquent, il n'a donné son corps et son sang à personne dans une fantastique eucharistie.

 

X. — REPRISE DU CORPS DE IESCHOU PAR SON VRAI PROPRIÉTAIRE.

Qu'est devenu Iehoudda pendant les six mois que Ieschou passe dans la Maison du Blasphémant ? Il est devenu ce qu'est devenu Iohannos délivré par les Péréjim à la fête des Tabernacles. Mais le voici qui reparaît, et il lui est bien difficile de faire autrement : seulement, il est au pied de la croix, au lieu d'être dessus, comme en 789.

Puisque l'Église veut absolument que le crucifié soit un nommé Jésus, crucifié en 782, Iehoudda, qui ne l'a été qu'en 789, est libre de ses mouvements vis-à-vis de lui-même pendant sept ans.

Il en profite pour se faire communiquer le Mahazeh de Cérinthe, qu'on appelle aujourd'hui Évangile selon Saint-Jean, et il y voit qu'au Guol-golta, un certain Ieschoua refuse catégoriquement de se laisser crucifier sous son nom de circoncision. Ce Ieschoua se tourne vers la mère de celui qu'on crucifie, et, le lui montrant, dit : Femme, voilà ton fils. Se tournant ensuite vers le patient, lui dit : Toi, voilà ta mère[43]. Iehoudda trouve ce procédé peu flatteur, puisque, dans cette scène, Ieschoua, image de l'innocence, refuse de se reconnaître dans l'homme qu'on a crucifié.

Iehoudda est venu pour lui rendre la pareille, et avec usure ; il lui compte des intérêts.

a. — Iehoudda lui reprend son corps et le jette dans son Jardin pour en faire ses latrines

Sur le soir[44], Iehoudda descendit (de la croix) le corps de Ieschou, et le déposa dans son Jardin, où était la fosse à ordures.

Huldrich traduit le tout par latrines, et il est bien vrai que c'est l'intention même du crucifié historique. D'ailleurs il y a sous le mot une indication topographique très précieuse : la partie du Ghé-Hinnom où le corps du Vaurien fut déposé, se trouve dans la direction de la porte des Ordures.

Huldrich n'a pas compris, il ne le pouvait, qu'en reprenant le corps de Ieschou, Iehoudda reprenait son propre corps, afin que les nozrim ne pussent plus s'en servir. Il continue à croire que le Mahazeh a en vue Iehoudda Kériothis, substitué, dit-il, à Joseph d'Arimathie. Nullement. Le Mahazeh sait très bien qu'harammathas (gardien du haram ha mathim) ne veut pas dire d'Arimathie, et notre rabbin n'a qu'à se reporter au Toledoth dit de Mathieu ou aux Actes des Apôtres pour voir que, soit pendu, soit éventré, Iehoudda Kériothis était enterré, lorsque son homonyme de Gamala a été déposé près de la Porte des Ordures.

Iehoudda, fils aîné de la Jardinière, est seul qualifié pour faire au Vaurien de l'étranger ce qu'il lui fait ici. Car voici ce qu'il pense en son cœur, comme disent les Toledoth canoniques :

Ah ! tu m'as pris mon corps pour le donner aux nozrim contre moi-même Je te le reprends, car il est à moi, dans la mort comme dans la vie ! J'ai déjà repris mon Zib, mon Tharthak-Thakthar et mon léhem, le poisson, les ânes et le pain millénaire, qui sont à moi, fils du papas, et sans lesquels tu n'es rien, toi, pas même le pain quotidien !

Aujourd'hui je te reprends ce corps qui ne t'appartient pas, et que tu prostitues aux nozrim, sous les espèces eucharistiques ! Et pour te montrer le mépris que j'en ai depuis qu'il m'est étranger, je le jette, non pas précisément à la Porte des Ordures, où j'ai été jeté moi-même, mais dans la fosse à ordures de mon Jardin. Car le jardin est au Jardinier, comme le poisson au pêcheur d'hommes, les Anes du triomphe et le léhem de la vie à la beth de Juda ! Et je n'ai jamais mangé l'agneau de 789 avec douze apôtres, je n'ai jamais inventé d'Eucharistie, je n'ai jamais donné mon corps et mon sang à personne pour les transmettre ensuite à ceux qui me traitent de Barabbas ! Tu renies ton pays, tu renies ta race, tu renies ton père et ta mère, tu renies tes frères et tes sœurs, tu me renies, ou pour mieux dire tu te renies toi-même ? Subis à ton tour la peine que j'avais déterminée contre l'Étranger ! Car si peu que je valusse, puisque j'ai trahi, volé et assassiné, je vaux encore mieux que toi. Mort tu fais plus de mal que je n'en fis vivant ! Va aux latrines que j'avais creusées pour Tibère ! La Jardinière que tu sais, et que tu appelles Femme, ne veut pas de toi, qui ne veux plus d'elle !

C'était afin que fussent accomplies les paroles des docteurs : Tout homme qui se moque des paroles des docteurs, sera jugé dans l'ordure bouillante[45].

b. — Iehoudda combat la version dans laquelle son corps est représenté comme étant passé de la croix au ciel sans enterrement

Quelques-uns de ces scélérats, revenus dans Aïn, propageaient le mensonge, racontant aux habitants que, le troisième jour de la lapidation de Ieschou[46], le feu du ciel était tombé, enveloppant Ieschou, que celui-ci avait repris la vie dans cet élément, et qu'il s'était élevé au ciel.

Ces hommes, qui ont subi les mêmes transformations que leur Maître, ne peuvent plus nier la crucifixion, et ils ne peuvent pas encore parler de résurrection, puisqu'il n'en a été question que cent ans après ; ils racontent que Iehoudda, l'aîné des sept Bar-ner-regesch, a été baptisé de feu sur la croix même, et que, par conséquent, ceux qui disent que son cadavre a été déposé à la Porte des Ordures, sont des Jérusalémites vendus aux Romains.

Mais les gens d'Aïn ajoutaient foi aux propos de ces scélérats, et faisaient vœu sous peine d'anathème de se venger de tout Israélite qu'ils déclareraient coupable d'avoir trempé dans la lapidation de Ieschou.

Ce sont ces Naziréens de la vengeance qui, sous Ménahem, ont opéré contre Saül, comme le constatent les Actes des Apôtres dans les termes mêmes du Mahazeh.

c. — Iehoudda rend à Ieschou ce qui est à Ieschou : sa renommée de criminel, et retourne au tombeau

Le rôle de Iehoudda aurait dû cesser à la Porte des Ordures, mais il ne veut pas disparaître sans dire son fait à ce Ieschou qui, vis-à-vis de l'étranger, rejette tous ses crimes sur le dos d'un certain Barabbas, dans lequel il a honte de se reconnaître. Cet illustre Barabbas, c'est Ieschou lui-même. Iehoudda désire le faire constater à tous ceux qui adorent l'un sous le nom de l'autre.

Voyant les horribles forfaits que méditaient les gens d'Aïn, Iehoudda leur envoya des lettres conçues en ce sens : Il n'est pas de Paix[47] pour les impies, dit le Seigneur, parce que les nations se sont irritées et qu'elles ont conspiré leur perte[48]. Venez à Jérusalem et regardez votre faux prophète : c'est un vrai cadavre tout brisé[49], un chien mort et fétide[50], que j'ai jeté moi-même dans les latrines.

Après avoir composé cette épitaphe de l'Assassin de son peuple, Iehoudda disparaît pour quelques instants, conservant tous ses avantages sur Ieschou, lui ayant repris-même son corps.

En revanche, il lui a restitué le casier judiciaire qu'il avait au greffe du Hanôth, et qu'il a encore sous le nom de Barabbas dans les Toledoth canoniques. De là sans doute le proverbe : Tel cuide engehenner autrui qui souvent s'engehenne lui-même !

Ayant appris cela, ces vauriens montèrent à Jérusalem, et là ils virent Ieschou étendu dans l'endroit le plus repoussant de ce dépôt d'ordures et d'immondices.

d. — Coup d'œil rétrospectif du Mahazeh sur l'assaut du Temple par les Péréjim le matin de la Préparation à la pâque

Revenus dans Aïn, ils y traitèrent d'abominables mensonges tout ce qu'avait écrit Iehoudda. Car ils disaient : Nous sommes venus à Jérusalem, où des hommes se sont révoltés contre le roi, et ils l'ont expulsé[51], parce qu'il n'a pas voulu croire en Ieschou. Et beaucoup de docteurs ont été tués également pour n'avoir pas eu foi en Ieschou. Les Aïnites croyaient donc aux paroles mensongères de ces hommes, et ils faisaient la guerre à Israël.

Ces paroles sont mensongères en ce qu'elles placent après la crucifixion de Iehoudda les troubles qui ont obligé Pilatus à pénétrer dans le Temple et à y châtier les coupables, quelques instants avant d'envoyer leur chef au Guol-golta ; mais pour le reste, elles sont bien au-dessous de la vérité.

Elles contiennent toutefois un détail qui n'est que là : Antipas obligé de fuir devant les partisans de Iehoudda, maîtres du Temple au moment des sacrifices. Quant aux exécutions de docteurs, quoiqu'il y en ait eu beaucoup d'ordonnées par les autres fils du papas, notamment pendant la procurature de Félix, c'est Ménahem qui foula le mieux la cuve de sang.

 

 

 



[1] Pour arriver aux Poissons.

[2] Il y a Pétros dans l'hébreu, et c'est la preuve des remaniements que l'Église a fait subir à ce targum.

[3] Restant divisé, il ne pourra pas rentrer dans le Jardin d'où a été chassé Adam.

[4] Le mot hébreu employé dans ce targum était indubitablement siph ou seph, (d'où Osir-siph, Ieou-seph, Zibdéos), mais de corruption eu corruption il est devenu quelque chose comme soucie, qu'Huldrich a traduit par oison. Huldrich toutefois reconnaît qu'il ne peut être question d'oison (un oison aurait largement suffi à calmer l'appétit de trois personnes), et il taxe de stupidité l'inventeur de ce targum, visiblement inspiré, dit-il, par les petits poissons de la Multiplication des pains. On sait d'ailleurs que Zibdéos (le Zébédée des Toledoth canoniques) est un des pseudonymes du père du Ioannès.

[5] Cf. Le Mensonge chrétien, pet. édit, p. 498.

[6] Cf. Le Mensonge chrétien, pet. édit., pp. 375 et 522.

[7] Le nom a été enlevé, comme il convient.

[8] Le Garizim, où Barabbas avait donné rendez-vous à ses partisans en 789. Cf. Le Mensonge chrétien, pet. édit. p. 156.

[9] On sait que selon l'Even-guilayon, les partisans de Iehoudda étaient faits par lui prêtres de son Père.

[10] Jérémie, XXXII.

[11] Fils du Pressoir, le fameux Pressoir des Toledoth canoniques. Le fils du Pressoir, c'est le vin.

[12] La première est la Pâque, la seconde la Pentecôte, la troisième les Tabernacles et la quatrième la Dédicace du Temple.

[13] Zacharie, VIII, 19.

[14] Ne pas traduire par Pharisiens, comme l'entend Huldrich.

[15] Seigneur Dieu.

[16] Aux douze démons célestes.

[17] Notre rabbin, selon l'habitude des évangélistes, qui d'ailleurs est celle des talmudistes, fait un horrible calembour sur le nom de Purah.

[18] On a supprimé le mot. Le texte porte simplement : il jeta. Quoi ? Des raisins évidemment, mais des raisins-hommes, rejetés par le Dieu de la circoncision.

[19] Isaïe, LXIII, 1-6.

[20] Cf. Le Mensonge chrétien, pet. édit., p. 233.

[21] Autrement il faudrait Galad.

[22] Dans six mois il n'y aura plus de temps, comme dit le papas Iehoudda dans l'Even-guilayon.

[23] Cette prophétie est en effet intitulée : Révélation d'Isaïe sur Juda et sur Jérusalem.

[24] Les Paroles du Marân ou Rabbi.

[25] Dans l'esprit de l'auteur du Mahazeh, qui renvoie à Osée, il s'agit du Tharthak, dont il parle explicitement plus loin.

[26] La verge de Jessé et les baguettes divinatoires de Iehoudda.

[27] Osée, IV, 412.

[28] Bélial veut dire Impie, Malicieux, Vil, Méprisable.

[29] C'est le nom qui lui est donné dans un oracle qui fait partie de la littérature sibylline, et qui semble être d'un Juif égyptien, resté avec la Loi et avec la synagogue : dans cet oracle, Ieschou est traité de Sébasténien, c'est-à-dire Samaritain, exactement comme dans le Mahazeh de Cérinthe, où les Jérusalémites le poursuivent pour le lapider, parce qu'en effet il avait donné rendez-vous sur le Mont-Garizim aux Juifs de Samarie, pour les conduire à l'assaut du Temple et au pillage du trésor :

De chez les Sébasténiens sortira Bélial. Il fera sentir son pouvoir aux montagnes élevées, à la mer, au soleil grand et flamboyant, à la lune brillante, aux morts eux-mêmes. (C'est la substance de l'Even-guilayon.)

Il fera mille prodiges devant les hommes. Ce ne sera pas la droiture, mais l'erreur, qui sera en lui. Il entraînera dans cette erreur beaucoup de mortels, des Hébreux fidèles appartenant à la race choisie (celle de Lévi), et d'autres hommes étrangers à fa Loi, qui n'ont jamais encore entendu parler de Dieu. Lorsque s'accompliront les menaces du Grand Dieu, un puissant embrasement submergera la terre de ses vagues et dévorera Bélial et tous les hommes superbes qui avaient mis leur foi en lui. Le bon empereur Julien n'a pas attendu cela pour le réduire en cendres sur la place de Sébaste.

Voici maintenant qui vise la superstition relative à sa mère, la veuve du papas transformée en Vierge du monde par les adorateurs de son fils :

..... Et alors le monde sera de toutes parts soumis au commandement et au sceptre d'une femme. Ensuite, quand la veuve aura régné sur tout le monde, quand elle aura jeté l'or et l'argent dans l'onde salée, quand elle aura jeté à la mer l'airain et le fer des hommes qui ne durent qu'un jour, alors tous les éléments retomberont dans le chaos, et Dieu, qui habite l'éther, roulera le ciel comme on roule un volume. (Ceci vient de l'Even-guilayon même, VI, 14, et en est l'étymologie). Le pôle entier aux mille formes, tombera sur la Terre de Dieu et dans la mer ; un jet intarissable de feu impétueux détruira la terre, la mer, le pôle céleste et le jour, et fondra la création en une masse unique pour la purifier. Il n'y aura plus de globes lumineux au firmament, plus de nuits, plus d'aurore, plus de jours remplis de soucis, plus de printemps, d'été, d'hiver, d'automne. Et alors surviendra le jugement du Grand Dieu, au milieu du Grand Siècle, lorsque toutes ces choses seront accomplies.

(Oracles Sibyllins, Livre troisième, § I, édition Ch. Alexandre).

[30] Lisez Jacob.

[31] De tous ces meurtres nous ne connaissons plus que celui d'Ananias et de Zaphira, pour lequel Iehoudda fut condamné à mort.

[32] Chiffre tiré des Toledoth synoptisés.

[33] Non, en majeure partie Gaulois. Mais notre rabbin ne s'y trompe pas : ce ne sont pas des pourceaux que le revenant de Iehoudda précipite dans le lac de Génésareth, ce sont bien des hommes.

[34] Qui les forçaient à adorer Iehoudda.

[35] Ou Paroles du Marân, dont Papias d'Hiérapolis a donné les Explications.

[36] Peut-être y a-t-il là quelque trace de ce fait qu'Hérode Antipas était chez les Parthes, quand Iehoudda se fit roi-christ en Bathanée. Flavius Josèphe dit qu'il n'était pas à Tibériade lors de la Journée des Porcs.

[37] A Lydda et jusque sous les murs de Jérusalem. Cf. Le Mensonge chrétien, pet édit. p. 162.

[38] Huldrich donne là-dessus un commentaire plein de cette érudition divagatrice dont regorgent les théologiens.

[39] Wagenseil, Contutatio Cam. R. Lippman, p. 215.

[40] Panolethria, dit Wagenseil. Le mot est juste, mais malheureux.

[41] Huldrich ne craint pas d'accuser l'auteur du Mahazeh d'avoir voulu désigner les Juifs de Worms à l'animadversion de leurs coreligionnaires déicides. C'est manifestement tout le contraire. Le rabbin qui a rayé les anciens noms géographiques du Mahazeh pour y substituer celui de Worms, a voulu assurer à la synagogue de cette ville, dans l'esprit des barabbalâtres, un avantage spécial sur toutes les autres ; et ce changement tire sans doute sa signification, de ce qu'il a été fait pour mettre les Juifs de Worms en dehors et comme au dessus de la persécution, peut-être même des guerres religieuses, c'est-à-dire civiles, entre catholiques et protestants. Que ceux-ci s'exterminent à propos de Barabbas, tant qu'il leur plaira, mais les Juifs de Worms ont voté contre sa mort, qu'ils soient sacrés pour les uns et pour les autres !

[42] Je ne pense pas que ce pauvre homme appartienne à la même génération que ceux dont parle Sébastien Münster dans sa Cosmographie : En la cité de Spire il y a eu autrefois beaucoup de Juifs. Or comme, en l'an 1092, cette nation fut grandement persécutée en Allemagne, et que les gens do Spire voulaient aussi appréhender leurs Juifs, ils s'enfuirent à la cour de l'évêque, lequel ils avaient d'abord corrompu par de l'argent, demandant sa protection. L'évêque donc, courroucé contre les Chrétiens, en fit tuer quelques-uns. Car les évêques avaient en ce temps-là la grande juridiction en leurs villes, laquelle toutefois leur est depuis fort diminuée. Il s'éleva une semblable sédition à Worms contre les Juifs. Et comme ces pauvres gens étaient pressés de tous côtés, ils s'enfuirent à l'évêque de la cité, qui ne leur pouvait pas donner grand secours, s'ils ne se fussent fait baptiser. Mais eux demandant quelque temps pour délibérer avant que de donner réponse, ces hommes désespérés étant entrés en une chambre de la cour de l'évêque, se tuèrent l'un l'autre, pendant que les Chrétiens attendaient dehors la réponse.

[43] Cf. Le Mensonge chrétien, pet. édit, p. 480.

[44] Comme dans l'histoire, après deux jours de croix.

[45] Ceci provient du Talmud (Gittin, 57 a), et nous l'avons expliqué.

[46] Le vendredi. Il était en croix depuis le mercredi. Cf. Le Mensonge chrétien, pet. édit. p. 175.

[47] Le Salem que Iehoudda avait promis à ses dupes.

[48] Allusion aux Grecs, aux Syriens, aux Arabes et aux Egyptiens qui prêtèrent main-forte aux Romains pour écraser le nid de vipères, comme dit Flavius Josèphe.

[49] Par le crucifragium, et qui par conséquent ne peut pas être accepté comme agneau mystique.

[50] Parfaitement. Voyez-le à Ephèse après sa métempsycose régressive.

[51] Cela peut être vrai d'Hérode Antipas. En tout cas, c'est vrai d'Agrippa II en 819. Cf. Le Mensonge chrétien, pet. édit., p. 215.