LE MENSONGE CHRÉTIEN - (JÉSUS-CHRIST N'A PAS EXISTÉ)

 

TOME IX — LES ÉVANGILES DE SATAN (TROISIÈME PARTIE)

VI. — CAMOUFLAGE[1].

 

 

I. — TOHU-VA-BOHU DE REGRETS ET D'ESPOIRS.

 

Écrites bien après l'apparition des Explications de Papias et la ruine de Jérusalem sous Hadrien, les ordonnances suivantes[2] sont conçues dans un esprit non moins mauvais, mais beaucoup moins frénétique que celles qui ont trait à la division universelle et à la martyroculture. Elles visent d'ailleurs un état nouveau Créé par la substitution d'Ælia Capitolina à Jérusalem : le retour en Judée rendu impossible, et la dispersion définitive à travers les nations. Sous Vespasien, il y avait eu chute grave ; après Hadrien il y a infirmité complète. C'est une seconde phase de la croisade juive, presque une seconde croisade, tant les moyens nouveaux diffèrent des anciens.

Toutes les instructions de Jésus dans Luc sont passées plus tard dans ce qu'on appelle aujourd'hui le Sermon sur la Montagne. Le compilateur, quel qu'il soit, de ce Sermon, n'a peut-être pas devant soi, comme Valentin, les Paroles du Rabbi et les Explications de Papias, mais il cannait les unes et les autres, et de plus il a sous les yeux deux sortes d'Écritures au moins l'Évangile millénariste qu'on divisera plus tard en trois sous les noms de Matthieu, de Marc et de Luc, et la Sagesse valentinienne. Par cette Sagesse il est remonté à celle d'Énoch : dans l'une et dans l'autre il copie le plus qu'il peut, et c'est d'ailleurs ce qu'il a de mieux à faire. Pour le reste il s'inspire des homélies introduites dans Cérinthe[3] à un moment qui coïncide avec les efforts des Gnostiques pour civiliser l'apostolat.

Les sermons moraux, dans la plaine chez Luc, sur la Montagne chez Matthieu, sont très durs pour les apôtres, devant qui Jésus fait étalage d'une humilité où d'ailleurs il y a plus d'impuissance que de résignation. Un double courant passe dans chaque phrase de ces discours, l'un roulant des espoirs orgueilleux, l'autre char-- riant des calculs hypocrites. Il semble que le Royaume ne soit plus celui qu'annonçait le Joannès, et dont l'or, l'encens, la myrrhe des Mages, sont les alléchantes prémices. Et pourtant, d'une façon ou de l'autre, l'Apocalypse, conclusion de la Loi et synthèse des Prophètes, recevra son accomplissement : la grande pâque n'est que reculée, les Juifs auront la terre dont ils sont le sel. C'est par eux, car sans le sel juif elle se corromprait, que Dieu conserve la terre, mais c'est aussi pour eux. En attendant, circoncision, sabbat, sacrifices (secrets, puis-glas ne peuvent plus être publics), excommunication des goym, que pas un iota de la Loi ne tombe ! S'il en tombait un seul, il n'y aurait plus d'Apocalypse !

Ainsi, au beau milieu du Sermon sur la montagne, Jésus fait une profession de foi qui n'aurait pas été déplacée dans la bouche du Joannès au plus fort de sa manifestation, et qui provient indiscutablement des Paroles du Rabbi.

MATTHIEU, V, 17. Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu les abolir, mais les accomplir[4].

18. Car, en vérité je vous le dis, jusqu'à ce que le ciel et la terre passent, un seul iota et un seul point de la loi ne Passera pas que tout ne soit accompli.

Mais c'est une épave qui s'est égarée là. Manifestement ces deux versets proviennent du discours où Jésus défend parmi les pharisiens la mission du Joannès, sa conception du Royaume, le rôle même des Zélotes et des Sicaires[5]. Ils s'y adaptent avec une logique irrésistible, car, de leur côté, les synoptiseurs de Luc ont laissé le second verset dans le discours aux pharisiens, sous cette forme légèrement élaguée :

LUC, XVI, 18. Le ciel et la terre passeront plutôt qu'il ne tombe un seul point de la Loi.

MATTHIEU, V, 19. Celui donc qui violera l'un de ces moindres commandements, et enseignera ainsi aux hommes, sera appelé très petit dans le royaume des cieux ; mais celui qui fera et enseignera, celui-là sera appelé grand[6] dans le royaume des cieux[7].

20. Car je vous dis que si votre justice[8] n'est plus abondante que celle des Scribes et des Pharisiens, vous n'entrerez point dans le royaume des cieux.

Ces déclarations, qui appartiennent au plus ancien Évangile, ont plongé Valentin dans un terrible embarras. Comment en corriger l'effet ?

Pas un iota, pas un point ne tombera de la Loi que le Royaume ne vienne, avaient dit Jehoudda et ses fils ! Euh ! disaient les Valentiniens, il faut retrancher de la Loi, cela n'a pas de sens. La Loi ? n'allez pas croire que les Zélotes et les Sicaires s'en occupassent tant que cela ! Sans doute, en cherchant bien, on trouvera quelque part un certain Jehoudda le Gamaléen que son amour pour la Loi a fait surnommer Panthora ou le nouveau Moise, une certaine Salomé que cette même passion a fait surnommer Marie Magdaléenne, un certain Bar-Jehoudda que cette même passion encore a fait surnommer Bar-Panthora[9]. Mais ce n'est pas de cette loi-là qu'il s'agit, c'est de la loi de stabilité terrestre. Sans doute, en cherchant bien, on trouvera quelque part un certain Titus et un certain Hadrien qui, à Jérusalem, ont fait tomber plus d'un point et plus d'un iota de cette sainte ville ; mais d'autre part il est certain que la terre est encore en place : la parole de Jésus est donc juste en cela !

 

II. — PARABOLE DU ROI-CHRIST PRIVÉ DE L'HÉRITAGE PAR DIEU.

 

Vous savez assez que tous les disciples devaient être riches à partir des Ânes de 789, qu'ils devaient fouler le pavé d'or de Jérusalem désormais appelée Nazireth, et se promener dans le Jardin aux douze récoltes arrosé Par le fleuve d'eau vive intarissable. Mais l'Abbas n'a Pas voulu qu'il en fût ainsi. Les pauvres qui avaient suivi Bar-Jehoudda et ses frères avaient été abominablement mystifiés et déçus, surtout par Ménahem, qui pouvant tout pour eux, maître de tout, n'avait rien fait[10]. Maintenant ils sont réduits à mendier le pain quotidien. Il s'agit de consoler ces dupes éternelles, de régulariser cette mendicité, d'organiser ce paupérisme qui, sous aucun prétexte, ne doit être combattu par le travail. Une joie énorme les attend : le malheur des riches dans le Royaume. Si à certains moments ils sentent par trop le poids du malheur, cette perspective leur permettra de le supporter, peut-être même de s'y plaire.

Jésus convient que Bar-Jehoudda n'était point juge du partage des biens dans le Royaume, et qu'en cela c'était un imposteur. Son revenant se déclare incapable de tenir la promesse qui avait excité tant de convoitises. Un compère sort de la foule pour le tenter.

LUC, XII, 13. Alors quelqu'un de la foule lui dit : Maître, dites à mon frère de partager avec moi notre héritage[11].

15. Mais Jésus lui répondit : Homme[12], qui m'a établi juge sur vous, ou pour faire vos partages ?

15. Puis il leur dit : Voyez et gardez-vous de toute avarice[13] : car dans l'abondance la vie[14] de chacun ne dépend point des choses qu'il possède.

N'imitez point certain prétendant qui avait longuement supputé le revenu de son royaume et dont Dieu a pris la vie sans lui donner les biens qu'il se promettait ! Cela s'est passé dans le temps, on a fait vingt paraboles et tout l'Évangile là-dessus, inutile de le désigner par son nom !

LUC, XII, 16. Il leur dit ensuite cette parabole : Il y avait un homme riche dont le champ rapportait beaucoup de fruits ;

17. Or il pensait en lui-même, disant : Que ferai-je, car je n'ai point où serrer mes fruits ?[15]

18. Et il dit : Voici ce que je ferai : je détruirai mes greniers et j'en ferai de plus grands[16], et j'y rassemblerai tous mes produits et tous mes biens ;

19. Et je dirai à ma vie : Ma vie, tu as beaucoup de biens en réserve pour plusieurs années[17] : repose-toi, mange, bois, fais grande chère[18].

20. Mais Dieu lui dit : Insensé, cette nuit même on te redemandera ta vie ; et pour qui sera tout ce que tu as amassé ?

Oui, la nuit où il fut enfermé au Hanôth, on lui redemanda sa vie, et il fut obligé de la donner, ce qui lui coûta mille ans à prendre sur le trésor.

21. Il en est ainsi de celui qui amasse des trésors pour lui-même, et qui n'est point riche en Dieu.

 

III. — ORDONNANCES AUX SOIXANTE-DOUZE POUR LA CROISADE EN ORDRE DISPERSÉ.

 

Dans ces conditions, faites votre moisson chez autrui[19].

LUC, X, 3. Allez : voici que je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups[20].

4. Ne portez ni sac, ni bourse[21], ni chaussure, et ne saluez personne dans le chemin[22].

5. En quelque maison que vous entriez, dites d'abord : Paix à cette maison ![23]

6. Et s'il se trouve un fils de la paix[24], votre paix reposera sur lui, sinon, elle reviendra à vous[25].

7. Demeurez dans la même maison, mangeant et buvant de ce qui sera chez eux : car l'ouvrier mérite son salaire[26]. Ne passez point de maison en maison.

8. Et, en quelque ville que vous entriez, et où vous serez reçus, [mangez ce qui vous sera présenté][27].

9. Guérissez les malades qui s'y trouveront, et dites-leur : Le Royaume de Dieu est proche de vous.

Cette agitation ne peut que vous êtes favorable, car il s'agit avant tout de frapper la population par la peur et de pêcher en eau trouble. Quant aux malades, vous savez ce que nous entendons par là. Espérons qu'après votre départ ils seront plus malades qu'avant votre visite, et qu'ils auront les yeux et les oreilles comme nous les aimons, c'est-à-dire ne voyant point et n'entendant point.

 

IV. — CAMOUFLAGE DES PRINCES DAVIDIQUES EN PAUVRES ET EN MENDIANTS.

 

Les synoptiseurs de Luc se sont aperçus que toutes ces ordonnances s'adressaient exclusivement aux soixante-douze disciples, et que Jésus n'en avait fait aucune de ce genre aux douze apôtres, lesquels restent équipés et armés comme ils le sont dans le même Evangile, c'est-à-dire pourvus d'amples manteaux à la royale qu'il leur est ordonné de vendre au besoin pour s'acheter des épées. Aucune garde-robe n'est comparable à celle du bar pour le luxe des étoffes, la blancheur du lin et l'éclat de la pourpre, pour le nombre et la variété des vêtements. Tibère à Caprée n'en avait Point autant, ni Pilatus à Césarée, ni Hérode Antipas à Tibériade, ni Kaïaphas à Jérusalem. Cet étalage, cette tenue de Cour et de campagne ne pouvait qu'éveiller les soupçons du goy, et l'engager à ouvrir Flavius Josèphe à l'endroit où il instruit la postérité des mœurs et usages des sicaires jehouddiques. Car, même dans les fausses ordonnances où le futur roi-christ n'est encore que le Joannès baptiseur[28], il est encore loisible aux disciples d'avoir au moins deux tuniques, de manière à pouvoir en donner une aux malheureux : Que celui qui a deux tuniques en donne une à celui qui n'en a point ; il est encore permis d'avoir sur soi ou chez soi de quoi manger convenablement : Que celui qui a de quoi manger en donne à celui qui n'a point de quoi.

Ces ordonnances ne sont que dans Luc ; les soixante-douze de même, et les ordonnances qui leur sont adressées. Il importe donc que Jésus fasse aux douze des ordonnances qui soient en opposition absolue avec celles de Joannès au Jourdain ; sinon, son identité charnelle avec le Baptiseur sera démontrée non pas seulement par l'histoire, mais encore par des ordonnances qui supposent le même état de fortune. Et en effet, dans l'intervalle qui s'est écoulé entre la génération apostolique et la confection de toutes ces Ecritures, l'Eglise naissante a décidé que, sous le nom de Jésus, bar-Jehoudda aurait été non une espèce de paon couvert de plus de forfaits que de plumes, mais un pauvre charpentier emporté par son génie fougueux vers on ne sait quel rêve de fraternité universelle, et réduit à vivre de la charité publique par le hasard de la naissance ou par le vœu d'humilité. Il faut donc que ses frères et ses parents soient des pêcheurs pauvres comme lui, car d'autre part on a décidé de camoufler le prince hérodien Saül en ouvrier tisserand sous le nom de Paul[29].

Ce camouflage général exigeant beaucoup d'art, Jésus va répéter aux douze ce qu'il disait naguère aux soixante-douze.

LUC, IX, 3. Et il leur dit : Ne portez rien en route, ni bâton, ni sac, ni pain, ni argent, et n'ayez pas deux tuniques[30].

4. En quelque maison que vous entriez, demeurez-y, et n'en sortez point.

5. Quant à ceux, quels qu'ils soient, qui ne vous recevront Point, secouez, en sortant de leur ville, la poussière même de vos pieds, en témoignage contre eux,

Et en signe de malédiction. Voici comment l'entend le Saint-Siège. Afin que ce soit pour eux un témoignage que vous ne pouvez plus avoir rien de commun avec eux, puisqu'ils refusent d'embrasser la religion divine que vous prêchez !

On a transporté ensuite ces ordonnances dans Marc et dans Matthieu, afin que là aussi les douze apôtres Pussent les avoir entendues.

MARC, VI 8. Et il leur commanda de ne rien prendre pour le chemin qu'un bâton : ni sac, ni pain, ni argent dans leur ceinture :

9. Mais de chausser leurs sandales et de ne point se munir de deux tuniques.

10. Et il leur dit : Quelque part que vous alliez, étant entrés dans une maison, demeurez-y jusqu'à ce que vous sortiez de ce lieu-là.

11. Et quant à ceux qui ne vous recevront point et ne vous écouteront point, lorsque vous sortirez de là, secouez la poussière de vos pieds en témoignage contre eux.

MATTHIEU, X, 9. Ne possédez ni or, ni argent, ni aucune monnaie dans vos ceintures[31],

10. Ni sac pour la route, ni deux tuniques, ni chaussure, ni bâton : [car l'ouvrier mérite sa nourriture][32].

11. En quelque ville ou village que vous entriez, demandez qui y en est digne[33], et demeurez chez lui jusqu'à votre départ.

12. Or, en entrant dans la maison, saluez-la, disant : Paix à cette maison.

13. Et si cette maison en est digne, votre paix viendra sur elle[34] ; et si elle n'en est pas digne, votre paix reviendra à vous[35].

14. Lorsque quelqu'un ne vous recevra point et n'écoutera point vos paroles, sortant de la maison ou de la ville, secouez la poussière de vos pieds.

15. En vérité, je vous dis : il y aura moins à souffrir pour Sodome et pour Gomorrhe au jour du jugement que pour cette ville.

 

V. — INSTRUCTIONS POUR LA RÉDACTION DES INTERROGATOIRES.

 

Le camouflage obtenu par le costume et par l'aspect extérieur ne suffit pas à tromper, il faut le poursuivra par le langage tenu en public. Depuis la génération à laquelle s'adresse Jésus, il s'est écoulé deux siècles à la fin desquels on a fabriqué deux choses qui se font écho dans la fourberie ecclésiastique : les Lettres de Paul et les Actes des Apôtres. Dans ceux-ci on nous a montré Jésus envoyant aux douze, sous la forme de langues de feu, la promesse du Père, c'est-à-dire l'Esprit-Saint. Rempli de cet Esprit, Pierre comparaît avec ou sans ses onze compagnons devant le Sanhédrin qu'il étourdit de témoignages sur la résurrection de son ainé ; Jacob junior, lapidé par Saül en 788, comparait sous le nom de Stéphanos devant le même Sanhédrin qu'il accable de preuves indéniables de cette même résurrection ; Saül, converti en Paul par l'Esprit, comparait successivement devant Sergius Pauling, gouverneur de Chypre, devant Gallion, proconsul d'Achaïe, devant le Sanhédrin, devant Félix et Festus, procurateurs de Judée, devant Agrippa, roi de Judée, et dans les écrits ultérieurs, devant Néron lui-même, administrant à tous la preuve irréfutable de la résurrection de Bar-Abbas et de la consubstantialité d'icelui Juif avec le Père. Nous avons fait bonne justice de ces mensonges turpides, au fur et à mesure de leur immatriculation dans les Actes. Mais l'Église les présentant comme des vérités religieuses, il convient que Jésus les couvre de son autorité par la façon dont il répond ou ne répond pas dans ses comparutions devant le Sanhédrin, devant Antipas et devant Pilatus.

Dans son testament sur le Mont des Oliviers, vous l'avez vu annoncer d'une bouche hospitalière atout mensonge et réfractaire à toute franchise, la grande éruption du Vésuve d'abord, puis quantité d'autres catastrophes postérieures à la chute de Jérusalem. Il se trouve donc que toutes les comparutions et tous les interrogatoires mentionnés dans les Actes ont lieu avant ce désastre. Il se trouve aussi, grâce aux Lettres de Paul, que l'Évangile a été prêché à toutes les nations dans l'intervalle compris entre 789 et l'éruption du Vésuve qui est le principal cataclysme annoncé. C'est ce que Jésus prédit[36] dans Marc et dans Luc :

LUC, XXI, 11. Mais avant tout cela[37] on mettra la main sur vous, et l'on vous persécutera, vous livrant aux synagogues et aux prisons, vous traînant devant les rois et les gouverneurs à cause de mon nom.

MARC, XIII, 9. Prenez garde aussi à vous-mêmes : car on vous traduira devant les tribunaux ; vous serez battus dans les synagogues[38], et vous comparaîtrez à cause de moi devant les gouverneurs et les rois, en témoignage contre eux.

10. Mais il faut d'abord que l'Évangile[39] soit prêché parmi toutes les nations.

Ouvrez Marc et Luc à l'article des instructions apostoliques, vous n'y trouverez point celles-là : ils ne sont pas des douze. En revanche, ouvrez Matthieu : elles y sont, il est apôtre.

MATTHIEU, X, 16. Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups. Soyez donc prudents comme les serpents et simples comme les colombes[40].

17. Mais gardez-vous des hommes : car ils vous feront Comparaître dans leurs assemblées, et vous flagelleront dans leurs synagogues.

18. Et vous serez conduits à cause de moi devant les gouverneurs et les rois, en témoignage pour eux et pour les nations[41].

Puisque cela doit arriver et qu'il y aura là-dessus des Écritures, comment ces messieurs devront-ils se Comporter quand ils comparaîtront devant les juges ? Devront-ils se comporter comme dans l'histoire ? ou imiter Jésus dans sa manière de poser les questions et de les résoudre ? Voici ce qu'il répond lui-même en sa qualité de Verbe juif :

MARC, XIII, 11. Lors donc qu'on vous conduira pour vous livrer, ne pensez point d'avance à ce que vous direz ; mais ce qui vous sera inspiré à l'heure même, dites-le : car ce n'est pas vous qui parlez, mais l'Esprit-Saint.

MATTHIEU, X, 19. Lors donc qu'on vous livrera, ne pensez ni comment ni ce que vous devez dire : il vous sera donné, en effet, à l'heure même ce que vous devez dire.

20. Car ce n'est pas vous qui parlez, mais l'Esprit de votre Père qui parle en vous[42].

LUC, XII, 11. Lorsqu'on vous conduira dans les synagogues, devant les magistrats et les puissances, ne vous inquiétez point de quelle manière, ou de ce que vous répondrez, ou bien de ce que vous direz.

12. Car l'Esprit-Saint vous enseignera à l'heure même ce qu'il vous faudra dire.

Entendez : Si vous répondez comme des gens qui pensent ce qu'ils disent en public, c'est que vous parlerez conformément à l'attente générale, c'est-à-dire selon les convictions que vous aviez en ces temps-là ; et en ce cas vous n'apporterez que des démentis à l'Église. Si, au contraire, vous n'avez prémédité aucune de vos réponses, en un mot si vous répondez n'importe comment, vous aurez été inspirés par l'Église dans l'intérêt de son commerce, mais personne ne s'en doutera puisqu'en l'espèce l'Église agit sous le pseudonyme d'Esprit-Saint. Ne vous inquiétez pas ! Les questions vous seront posées de telle sorte qu'à chaque fois vous convaincrez vos adversaires de la mauvaise foi la plus insigne, et ce sont eux qui sortiront déshonorés de l'audience !

LUC, XXI, 13. Or, cela vous arrivera en (vue du) témoignage[43].

14. Mettez donc bien dans vos cœurs de ne point préméditer comment vous répondrez.

15. Car je vous donnerai moi-même une bouche et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront résister, ni rien opposer.

C'est en une phrase le sommaire de tous les Actes fabriqués pour l'édification du très excellent Théophile, et il n'est pas un seul interrogatoire d'apôtre, soit Pierre soit Stéphanos, soit Paul, qui n'ait été forgé par l'Esprit-Saint, lequel, comme vous savez, n'est arrivé à destination que deux siècles après la crucifixion de Bar-Jehoudda sous le nom actuel de Jésus. Il est donc nécessaire que Jésus prévoie et prédise le phénomène spirituel, grâce auquel tous ces messieurs ont pu prononcer publiquement des discours diamétralement Opposés non seulement à tous les faits de l'histoire, mais à tous leurs sentiments personnels, à toutes leurs doctrines. Dans ces Écritures, aucun de ces personnages qui ne soit rempli de l'Esprit-Saint avant de parler[44].

Il est à remarquer que chez Matthieu les instructions sur l'art de répondre en justice, avec l'assistance du Saint-Esprit, se trouvent dans les ordonnances apostoliques, tandis que chez Marc et chez Luc elles ne se trouvent que dans le testament prophétique de Jésus sur le Mont des Oliviers. Cela se comprend : Mathias bar-Toâmin a été fait apôtre par l'Église, il est des Douze, il est donc censé avoir entendu ces paroles et les avoir écrites sous la dictée de Jésus avant que celui-ci ne les renouvelle sur le Mont des Oliviers. Or, si elles avaient été dans les Paroles du Rabbi, nous les trouverions à l'article des instructions apostoliques chez Marc et chez Luc, présentés par l'Église comme postérieurs à Matthieu. Elles ont donc été introduites dans celui-ci postérieurement à la fabrication de Marc et de Luc.

Pourquoi trouve-t-on ces paroles dans Matthieu, plusieurs mois avant que Jésus les prononce dans Marc et dans Luc ? C'est que, depuis la confection des Evangiles, on a fabriqué d'une part les Actes, d'autre part la liste des Douze, et que dans le premier de ces faux Matthias bar-Toâmin est représenté comme ayant été apôtre de Jésus dès la première heure, et même comme ayant été l'objet d'une élection particulière au bureau des publicains de Kapharnahum. Dans ces conditions il ne serait pas convenable qu'il n'eût pas entendu les instructions relatives à la façon de répondre devant les juges. Et comme ces instructions émanent du même faussaire, il importe que Matthieu les ait entendues telles que le faussaire les a écrites, et sans y changer un mot, de manière à bien montrer qu'il est un témoin fidèle. Et si vous cherchez ces paroles dans le testament prophétique de Jésus selon Matthieu, vous ne les y trouvez pas. Marc et Luc sont censés les lui avoir empruntées pour les faire dire à Jésus sur le Mont des Oliviers.

 

VI. — PRÉCAUTIONS CONTRE LA CONCURRENCE.

 

Pourquoi les dehors méfiants que les christiens doivent avoir parmi les goym, pourquoi cet air soupçonneux, cette impolitesse combinée avec l'insolence ? Pourquoi surtout cette façon de donner la paix, puis de la retirer dans le même instant ? Donner et retenir ne vaut.

Et pourquoi l'aimable ordonnance que voici ?

MATTHIEU, VII, 6. Ne donnez pas les choses saintes aux chiens et ne jetez pas vos perles[45] devant les pourceaux, de peur qu'ils ne les foulent aux pieds, et que, se tournant, ils ne vous déchirent.

L'explication de ces paroles qui remontent au temps où les païens étaient indistinctement des chiens[46], quand ils n'étaient pas des pourceaux[47] ou des loups[48], se trouve dans Valentin avec quelque atténuation des vils sentiments qu'elles expriment.

Le genre de néophytes qu'on redoute le plus, ce ne sont pas les méchants ni les criminels, ce sont ceux qui par ruse, par hypocrisie, par curiosité reçoivent le baptême pour savoir comment sont ceux qui ont reçu les Mystères[49]. Mais à celui qui désire vraiment Dieu ne cachez point les mystères, dit Jésus dans la Sagesse. A quoi reconnaît-on cette sorte d'hommes ? A leur discrétion, et sans nul doute à leur générosité.

Il y a encore une catégorie de néophytes plus redoutable que les curieux qui peuvent se changer en délateurs ; ce sont les imitateurs qui peuvent devenir des concurrents.

Seigneur, dit Joannès à Jésus, supporte-moi, car je t'interroge à cause de la manière dont nous devons prêcher aux hommes du monde (païen). Lorsque nous irons prêcher, que nous entrerons dans une ville ou un village, et que les hommes de cette ville viendront au-devant de nous, sans que nous sachions qui ils sont, s'ils sont dans une grande ruse et une grande hypocrisie, s'ils nous reçoivent, qu'ils nous fassent entrer dans leur maison, voulant éprouver les mystères du Royaume de la lumière ; s'ils sont hypocrites avec nous dans la soumission, que nous pensions qu'ils désirent Dieu, que nous leur donnions les mystères du royaume[50] et qu'ensuite nous sachions qu'ils n'ont pas agi d'une manière digne des mystères, que nous sachions qu'ils ont été hypocrites avec nous et qu'ils sont rusés à notre égard, et qu'ensuite ils aient fait une moquerie des autres mystères en chaque lieu, nous singeant ainsi que nos mystères aussi, eh bien ! qu'arrivera-t-il aux gens de cette sorte ? Le Sauveur répondit, il dit à Joannès : Lorsque vous serez entrés dans une ville ou dans un village, la maison où vous entrerez et où l'on vous recevra, donnez-leur un mystère : s'ils en sont dignes, vous gagnerez assurément leurs âmes et elles hériteront le royaume de la lumière ; mais s'ils n'en sont pas dignes, s'ils sont rusés à votre égard, qu'ils fassent d'autres mystères, vous singeant ainsi que les mystères, eh bien ! criez vers le Père[51], celui qui a pitié de tout le monde. Dites :

Le mystère que nous avons donné à ces âmes impies et coupables, elles ne l'ont pas fait d'une manière digne de ton mystère[52], mais elles nous ont imités par moquerie. Retourne-nous le mystère[53], et rends-les éternellement étrangères au mystère de ton, Royaume ! Et secouez la poussière de vos pieds comme un témoignage contre eux ![54] Dites-leur : Que vos âmes aussi soient comme la poussière de votre maison ![55] En vérité, je vous le dis, en cette heure-là tous les mystères que vous leur avez donnés retourneront sur vous, et on leur enlèvera toute parole[56] et tout mystère dont ils auront reçu la forme. C'est à cause des hommes de cette sorte que je vous ai parlé autrefois en parabole[57], disant : La maison où vous entrerez, où l'on vous recevra, dites-leur : La paix soit avec vous ! et s'ils en sont dignes, que votre paix repose sur eux ; mais s'ils n'en sont point dignes, que votre paix retourne sur vous ! c'est-à-dire : Si ces hommes agissent d'une manière digne des mystères du royaume de la lumière, et qu'ensuite ils se moquent de ces mystères, qu'ils vous singent aussi, vous et mes mystères, faites le Premier mystère du premier Mystère[58], et il (le Père ou Premier mystère) vous retournera tout mystère que vous leur aurez donné et il les rendra étrangers aux mystères de la lumière éternelle. Et les gens de cette sorte ne seront pas repoussés vers le monde à partir de ce moment[59], mais en vérité[60] je vous le dis, leur habitation sera dans le milieu de la gueule du Dragon des ténèbres extérieures[61].

Les baptiseurs et autres charlatans prendront donc garde qu'il ne se glisse parmi eux des chiens de païens ou des pourceaux qui leur emprunteront les mystères et en palperont les bénéfices. Afin que ces animaux sans mandat, — il n'est salut que par les Juifs ! — ne puissent étudier de trop prés leurs pratiques, on distinguera des degrés dans l'initiation, on établira des emplacements pour les catéchumènes, les néophytes, et les anciens parmi lesquels se recrutèrent plus tard les prêtres[62]. Qu'on se garde bien surtout de révéler le Mystère qui ressuscite les morts et guérit les maladies[63] ! C'est le secret de la puissance christienne[64].

Qu'on ne l'enseigne à personne avant d'avoir affermi la foi dans le monde entier[65] ! Grâce aux prodiges que les christiens accompliront, on croira en eux aveuglément et on les recevra comme des sauveurs.

 

VII. — SUR L'ACCUEIL QUI CONVIENT AUX PROPHÈTES DU ROYAUME DES JUIFS.

 

MATTHIEU, X, 40. Qui vous reçoit, me reçoit ; et qui me reçoit, reçoit celui qui m'a envoyé[66].

41. Celui qui reçoit un prophète en qualité de prophète, recevra la récompense d'un prophète ; et celui qui reçoit un Juste en qualité de juste[67] recevra la récompense d'un juste.

42. Et quiconque aura donné à l'un de ces plus petits[68] seulement un verre d'eau froide à boire, parce qu'il est de Mes disciples, en vérité, je vous le dis, il ne perdra point sa récompense.

Cette promesse semble mieux à sa place ici que dans Marc où elle sert de moralité — et quelle ! — à l'assassinat d'Ananias.

MARC, IX, 40. Et quiconque vous donnera un verre d'eau en mon nom parce que vous êtes au christ, en vérité, je vous le dis, il ne perdra point sa récompense.

On voit que la jehouddolâtrie, pour être méprisée de tous à cause de la race et des forfaits de l'homme, n'en était pas moins une bonne formule contre les Romains, à cause de la haine que le prophète leur avait vouée et qu'il avait codifiée dans son Apocalypse. Pour se débarrasser de leurs maîtres les peuples n'ont pas craint de ramasser cette arme dans la boue. C'est la haine qui a fait le christianisme. Si l'homme qui se disait christ n'avait pas été l'ennemi de Rome, comme il l'est dans sa prophétie, c'est-à-dire éternel, jamais il n'aurait été dieu, sinon pour les deux ou trois faussaires qui l'ont lancé.

Le christianisme ne pouvait être qu'une religion de mensonge et de barbarie. Vous le voyez, l'Eglise promet le Royaume à ceux qui renverseront la patrie du droit public et la capitale de la civilisation. On y recevra les prophètes, dit l'auteur de Philopatris, en parlant de la Jérusalem d'or promise aux Juifs par le Baptiseur ![69]

LUC, X, 16. Qui vous écoute, m'écoute ; et qui vous méprise, me méprise ; mais qui me méprise, méprise celui qui m'a envoyé.

Malgré sa mise en faillite par l'Abbas, il continue à soutenir qu'il était l'Envoyé, le Scilo[70]. Il ne peut faire autrement sans abandonner le baptême dont vivent les écornifleurs qui ont composé ces friponneries.

Il n'est pas nécessaire de comprendre, mais d'obéir aveuglément. Les trois quarts des jehouddolâtres ne comprennent rien aux Ecritures, mais qu'ils se laissent mener ! Leurs pasteurs ont des yeux pour ces brebis, ils voient assez clair pour les tondre !

LUC, VI, 39. Il leur faisait aussi cette comparaison : Un aveugle peut-il conduire un aveugle ? ne tomberont-ils pas tous deux dans une fosse ?[71]

40. Le disciple n'est point au-dessus du maître[72] ; mais tout disciple sera parfait, s'il est comme son maître[73].

 

VIII. — MALÉDICTION SUR LES VILLES RÉFRACTAIRES À LA CROISADE.

 

Si elles ne vous réservent pas l'accueil auquel vous donnent droit ces sentiments d'amour et de désintéressement, prévenez-les qu'elles seront frappées des malheurs imputables à ce manque de discernement ! Dieu ne les conserve qu'à cause de vous, dites-le leur bien ! Qu'elles ne s'étonnent donc pas d'être punies de leur ingratitude par la peste, par le tremblement de terre ou par quelque incendie savamment allumé !

La malédiction prononcée contre les villes qui n'ont pas voulu recevoir Bar-Jehoudda et sa bande, fait suite dans Luc aux instructions dont sont porteurs les soixante-douze disciples décanaires. Elle est bien placée à cet endroit, et nous l'y laissons comme un contraste voulu entre le bon accueil que l'Evangile du Royaume peut leur valoir auprès des Juifs dispersés et le mauvais accueil que les apôtres ont trouvé parmi les Juifs sédentaires de 788.

LUC, X, 10. Mais, en quelque ville que vous soyez entrés, s'ils ne vous reçoivent point, sortez dans ses places, et dites :

11. Nous secouons congre vous la poussière même de votre ville, qui s'est attachée à nos pieds[74] ; cependant sachez que le Royaume de Dieu approche.

12. Je vous le dis : pour Sodome, en ce jour-là, il y aura plus de rémission que pour cette ville-là.

Car Dieu ne tient aucun compte de la vertu ni de la justice, mais seulement de la race et de la prédestination. Le vice lui est infiniment plus agréable qu'une telle méconnaissance de votre mission.

Attaquons maintenant le grand air de la malédiction contre les villes qui, faute d'avoir été suffisamment éblouies par la gloire du roi des voleurs en 788, l'ont expulsé de chez elles. Faisons croire aux goym que les titres de bar-Abbas consistaient dans les miracles de Jésus, et que c'est uniquement pour y avoir été insensibles qu'elles sont aujourd'hui ruinées de fond en comble.

13. Malheur à Loi, Corozaïn[75] ! malheur à toi, Bethsaïda[76] ! car si dans Tyr et Sidon s'étaient opérés les coups de force[77] qui ont été opérés au milieu de vous, elles auraient autrefois fait pénitence sous le cilice et assises dans la cendre.

14. Mais, pour Tyr et Sidon, il y aura au jugement plus de rémission que pour vous.

15. Et toi, Capharnaüm, élevée jusqu'au ciel[78], tu seras plongée jusqu'au fond de l'enfer !

Cet anathème n'est pas dans Marc où son ineptie pourtant et sa méchanceté lui donnaient accès. Mais il est dans Matthieu, et les douze en sont les confidents. Il y est même beaucoup mieux placé que dans Luc, car il se trouve dans le chapitre où Jésus, après avoir dit du Joannès qu'il est le plus grand parmi tous les enfants des hommes, annonce la destruction des trois villes qui n'ont su ni garder ni suivre un tel roi. Les traducteurs ecclésiastiques et beaucoup d'autres attribuent la fin misérable de ces villes à leur indifférence pour les miracles. Mais il n'est pas difficile de voir que, Bar-Jehoudda n'ayant fait aucun miracle[79], — le Joannès ne faisait point de miracles, dit le Quatrième Evangile, — c'est pour leur insensibilité à de tout autres phénomènes que Khorazin, Bethsaïda-Gamala et Kapharnahum ont péri comme Gomorrhe et Sodome, et comme devaient périr les villes païennes dans l'Apocalypse à laquelle on se garde bien de renvoyer le lecteur. Kapharnahum surtout a été déplorable en adar 788, absolument déplorable. Elle a marché avec Saül et Philippe Bar-Jacim contre le roi des Juifs et son lieutenant Eléazar[80].

MATTHIEU, XI, 20. Alors il commença à faire des reproches aux villes dans lesquelles s'était opéré le plus grand nombre d'actes de force, et qui n'avaient pas fait pénitence.

21. Malheur à toi, Corozaïn ! malheur à toi, Bethsaïda ! car si les coups de force qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Tyr et Sidon, elles auraient fait pénitence autrefois sous le cilice et dans la cendre.

22. Aussi je vous le dis : pour Tyr et pour Sidon, il y aura plus de rémission au jour du jugement que pour vous.

23. Et toi, Capharnaüm, est-ce jusqu'au ciel que tu t'élèveras ? tu descendras jusqu'aux enfers, parce que si dans Sodome avaient été faits les actes de force qui ont été faits au milieu de toi, elle aurait peut-être subsisté jusqu'à ce jour.

24. Bien plus, je vous dis que pour le pays de Sodome il y aura au jour du jugement plus de rémission que pour toi.

 

IX. — TOUJOURS FUIR, MAIS TOUJOURS PROPHÉTISER.

 

Le bar d'Abbas au Sôrtaba et à Lydda, Shehimon dans la cour du Hanôth, puis dans plusieurs villes d'Asie, Jehoudda Toâmin, sur la route de Damas, tous, jusqu'aux compagnons de Ménahem après sa mort, vous ont donné l'exemple de la fuite, mais ce n'est pas une raison pour cesser la prédication du Royaume des Juifs. Le grand homme que les hérodiens appellent ironiquement Baal-Zib-Baal, et les Évangélistes Zibdéos dans leurs séméiologies, a promis que Dieu tiendrait sa parole aux Juifs, il la tiendra.

MATTHIEU, X, 23. Lors donc qu'on vous persécutera dans une ville, fuyez dans une autre. En vérité, je vous le dis : vous n'aurez pas fini d'évangéliser toutes les villes d'Israël jusqu'à ce que vienne[81] le Fils de l'homme.

24. Le disciple n'est point au-dessus du maître, ni l'esclave au-dessus de son seigneur.

25. Il suffit au disciple qu'il soit comme son maître, et à l'esclave comme son seigneur[82]. S'ils ont appelé le chef de la maison Baal-Zib-Baal[83], combien plus ceux de sa maison !

26. Ne les craignez donc point : car il n'y a rien de caché qui ne sera révélé, et rien de secret qui ne sera su[84].

 

X. — CROASSEZ ET MULTIPLIEZ !

 

LUC, XII, 22. Et il dit à ses disciples : C'est pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez point pour votre vie, de ce que vous mangerez ni pour votre corps, de quoi vous le vêtirez.

23. La vie est plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement.

24. Considérez les corbeaux : ils ne sèment ni ne moissonnent, ils n'ont ni cellier ni grenier, et Dieu les nourrit. Combien ne valez-vous pas plus qu'eux !

Autant en avait-il dit des passereaux[85], car ses idées sont pauvres, et quand il en tient une il ne la lâche pas facilement.

Si par hasard la pensée vous vient de faire autrement que les corbeaux, c'est-à-dire de travailler, de semer pour récolter, n'y donnez pas suite ! Que le mot travail, prévoyance, association, ne soit jamais prononcé, si ce n'est pour la rapine méthodique et opiniâtre ! Soyez corbeaux pour tout de bon. Dans saint Matthieu, dit Bossuet qui fut aigle à Meaux, on lit en général les oiseaux du ciel. Dans saint Luc, on lit les corbeaux, animal des plus voraces, et néanmoins sans greniers ni provisions, qui sans semer et sans labourer trouve de quoi se nourrir. Dieu lui fournit ce qu'il lui faut, à lui, et à ses petits qui l'invoquent, dit le Psalmiste. Dieu écoute leurs cris, quoique rudes et désagréables, et il les nourrit aussi bien que les rossignols et les autres, dont la voix est la plus mélodieuse et la plus douce.

Les corbeaux ne jouissant pas d'une bonne renommée auprès des travailleurs des champs, on les a remplacés par des oiseaux généralement quelconques dans Matthieu.

MATTHIEU, VI, 25. C'est pourquoi je vous dis : Ne vous inquiétez point pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous vous vêtirez. La vie n'est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ?

26. Regardez les oiseaux du ciel ; ils ne sèment ni ne moissonnent, ni n'amassent dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit ; n'êtes-vous pas beaucoup plus qu'eux ?

LUC, XII, 25. Qui de vous, en s'inquiétant ainsi, peut ajouter à sa taille une seule coudée[86] ?

26. Si donc vous ne pouvez même pas les moindres choses, pourquoi vous inquiéter des autres ?

27. Considérez les lis comme ils croissent : ils ne travaillent ni ne filent[87] ; et cependant je vous le dis, Salomon lui-même, dans toute sa gloire, n'était pas vêtu comme l'un d'eux.

28. Or, si l'herbe qui est aujourd'hui dans les champs, et qui demain sera jetée au four, Dieu la revêt ainsi, combien plus le fera-t-il pour vous, hommes de peu de foi ?

MATTHIEU, VI, 27. Qui de vous, en s'inquiétant ainsi, peut ajouter à sa taille une seule coudée ?

28. Et quant au vêtement, pourquoi vous inquiétez-vous ? Voyez les lis des champs, comme ils croissent ; ils ne travaillent ni ne filent.

29. Or je vous dis que Salomon, même dans toute sa gloire, n'a jamais été vêtu comme l'un d'eux.

30. Que si l'herbe des champs, qui est aujourd'hui et qui demain est jetée dans le four, Dieu la vêtit ainsi, combien plus vous, hommes de peu de foi !

Il vous baptisera de feu. Vous serez comme l'homme de lumière de Salomé, comme le bar dans la Transfiguration ; et ce jour-là, ce n'est pas une coudée que vous ajouterez à votre taille, c'est soixante-douze !

LUC, XII, 29. Ne demandez donc point ce que vous aurez à manger ou à boire, et ne vous élevez pas si haut :

30. Car ce sont ces choses que les nations du monde recherchent[88] ; mais votre Père sait que vous en avez besoin.

31. Ainsi cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice ; et toutes ces choses vous seront données par surcroît[89].

32. Ne craignez point, petit troupeau[90], parce qu'il a plu à votre Père de vous donner son Royaume[91].

Votre dispersion n'est qu'un mauvais moment à passer. Cette terre sur laquelle vous vivez actuellement comme des corbeaux, elle sera tout entière à vous dans quelques jours, demain, ce soir peut-être. Le verbe d'Ieou l'a dit à Bar-Jehoudda.

MATTHIEU, VI, 31. Ne vous inquiétez donc point, disant a Que mangerons-nous, ou que boirons-nous, ou de quoi nous vêtirons-nous ?

32. Car ce sont toutes choses que les païens recherchent ; mais votre Père sait que vous en avez besoin.

33. Cherchez donc premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données par surcroît.

34. Ainsi ne soyez point inquiets pour le lendemain. Le jour de demain, en effet, sera inquiet pour lui-même[92] ; à chaque jour suffit son mal.

C'est un véritable cours de parasitisme et d'insociabilité. C'est la mutualité de l'indifférence et l'abandon des faibles par les forts.

Lorsque les synoptiseurs de Matthieu ont transporté ces instructions dans le Sermon sur la montagne où elles sont en belle place, ils ont essayé de leur donner une toute autre signification en les présentant comme une conséquence du principe que voici, également tiré de Luc et déplacé[93].

MATTHIEU, VI, 24. Nul ne peut servir deux maîtres ; car ou il haïra l'un et aimera l'autre, ou il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez servir Dieu et l'argent.

Il en résulte que ce qui est dans Luc un régime forcé devient dans Matthieu un parti-pris philosophique.

 

XI. — DERNIER APPEL À LA LIQUIDATION DES BIENS.

 

A ce cours de fainéantise et de parasitisme constitutionnels succède tout à coup une vive exhortation en vue de la liquidation des biens, non pour se les partager entre soi comme dans une association civile, mais pour en remettre le montant à des personnes qui ne sauraient être les pauvres de tout à l'heure, puisque la pauvreté est une profession libérale dont on ne doit pas chercher à sortir. La partie prenante n'est donc pas désignée, mais on la reconnaît à la longueur de ses griffes. Le Royaume de ce monde ne venant pas, c'est dans le ciel qu'il faut faire son salut. En payant ? Comme de juste. Avis aux riches dont il était question tout à l'heure ! Ils ont là un moyen de passer avant les pauvres, et même de prendre toute leur place.

LUC, XII, 33. Vendez ce que vous avez[94] et donnez l'aumône. Faites-vous des bourses que le temps n'use point, un trésor qui ne vous fasse pas défaut dans les cieux, où le voleur n'approche point, et où les vers ne rongent point.

34. Car où est votre trésor, là aussi sera votre cœur.

Les paroles d'ailleurs obscures : Le lieu où est votre cœur, là aussi sera votre trésor, avaient un tout autre sens dans les Paroles du Rabbi d'où l'Évangéliste les a extraites[95] pour les faire servir à ses desseins financiers. Dans les Paroles du Rabbi, c'était une invitation à épouser la cause jehouddique. Le lieu où devait être le cœur des Juifs, c'est Gamala[96] ; le lieu où devait être leur trésor, c'est Nazireth, la Jérusalem d'or. Ce que Bar-Jehoudda voulait, c'est que le cœur des Juifs fût tout entier à lui, après quoi leur viendrait la richesse. En effet, le Trésor descendant du ciel est l'appât qu'il leur tendait, et vous vous rappelez sans doute que dans Luc, aux portes de Jérusalem, Jésus les reprend de ce qu'ils croyaient voir apparaître le Royaume du monde. Comme Shehimon, Bar-Jehoudda était un Satan qui ne comprenait rien aux choses de Dieu et n'aimait que ce qui est des hommes[97]. Ces paroles : Là où est votre cœur, là aussi sera votre trésor, étaient si bien de lui, qu'entendant Jésus les interpréter différemment dans la Sagesse, il demande des explications, parce que, dit-il, dans le fameux mot de kabbale : Frappez et l'on vous ouvrira, Jésus avait promis de lui donner tout ce qu'il lui demanderait.

D'ailleurs cet appel à la liquidation des biens ne retentira plus. Les synoptiseurs de Matthieu l'ont déguisé et transporté dans le Sermon sur la montagne où ils l'ont mis à la suite des instructions de Jésus sur les jeûnes, et il fait le plus singulier effet à cet endroit.

MATTHIEU, VI, 19. Ne vous amassez point de trésors sur la terre, où la rouille et les vers rongent, et où les voleurs fouillent et dérobent.

20. Mais amassez-vous des trésors dans le ciel, où ni la rouille ni les vers ne rongent, et où les voleurs ne fouillent ni ne dérobent.

21. Où en effet est ton trésor, là est aussi ton cœur.

 

XII. — LES BÉATITUDES PRÉSENTES ET FUTURES.

 

LUC, VI, 20. Alors Jésus, les yeux levés sur ses disciples, dit : Bienheureux, ô pauvres ! parce qu'à vous appartient le Royaume de Dieu.

21. Bienheureux, vous qui maintenant avez faim, parce que vous serez rassasiés. Bienheureux, vous qui pleurez s maintenant, parce que vous rirez.

Ce sera si gai que cela ? Et qu'est-ce qui sera donc si gai ? Il a paru aux synoptiseurs de Matthieu qu'il ne fallait pas laisser le lecteur sur cette impression, car, nous allons vous le montrer, la joie promise ici n'est point bonne, elle n'est point saine, c'est la joie de l'envieux satisfait par le malheur d'autrui.

Le compilateur du Sermon sur la Montagne a donc repris en sous-œuvre les paroles de Jésus dans Luc. Il leur a donné une ampleur déclamatoire, une emphase lyrique où d'ailleurs il n'a pas dépensé grand effort, — il puise dans le Livre d'Enoch, — mais il en a retranché la perspective de ce rire prodigieux dont la source manque absolument de pureté.

MATTHIEU, V, 1. Jésus, voyant la foule[98], monta sur la Montagne, et, lorsqu'il se fut assis, ses disciples s'approchèrent de lui.

2. Et ouvrant sa bouche, il les instruisait, disant :

3. Bienheureux les pauvres d'esprit[99], parce qu'à eux appartient le royaume des cieux[100].

4. Bienheureux ceux qui sont doux, parce qu'ils posséderont la terre[101].

5. Bienheureux ceux qui pleurent, parce qu'ils seront consolés.

6. Bienheureux ceux qui ont faim et soif de la justice, parce qu'ils seront rassasiés.

7. Bienheureux les miséricordieux, parce qu'ils obtiendront eux-mêmes miséricorde.

8. Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu'ils verront Dieu.

9. Bienheureux les pacifiques[102], parce qu'ils seront appelés enfants de Dieu[103].

10. Bienheureux ceux qui souffrent persécution pour la justice, parce qu'à eux appartient le royaume des cieux.

Tout cela, plus ou moins copié dans la Sagesse d'Enoch qui dit :

Bienheureux celui qui meurt dans la justice et le bien, à qui on ne peut opposer aucun livre de crimes et qui n'a point connu l'iniquité ![104]

Bienheureux les justes ! bienheureux ceux qui marchent dans la justice, qui ne connaissent point l'iniquité, et qui ne ressemblent point aux pécheurs dont les jours sont comptés[105].

Moi et mon Fils nous ferons société éternelle avec eux dans les voies de la justice. Paix à vous, enfants de justice, joie et félicité ![106]

Le glaive du Seigneur se rassasiera du sang des méchants ; mais les saints et les élus habiteront avec le Fils de l'homme ; ils mangeront, ils dormiront, ils se lèveront avec lui dans les siècles des siècles[107].

Que l'homme juste se réveille de son sommeil ! Qu'il se lève et marche dans le sentier de la justice, de la bonté et de la grâce ! La miséricorde s'abaissera sur l'homme juste, et il sera revêtu à jamais de puissance et de sainteté[108].

Le vrai bonheur, en attendant celui-là, c'est de porter le nom du Juif de rapport que l'Église est en train de faire Dieu.

LUC, VI, 22. Vous serez heureux lorsque les hommes vous haïront, vous éloigneront, vous injurieront, et rejetteront votre nom comme mauvais, à cause du fils de l'homme.

Ce fils de l'homme, c'est bar-Abbas partout traité de scélérat. Son nom seul est une calamité pour les égarés qui le prennent. Mais si les Juifs l'ont condamné et livré à la mort, c'est par une vieille habitude qu'ils tiennent de leurs pères et à laquelle ils n'ont jamais pu renoncer. Pour le reste, c'était un homme exquis.

Il était exécré, les évangélistes nous l'ont déjà dit et nous le savons sans eux ! Qu'il l'ait été sous le nom de bar-Abbas, de Joannès et de Christos (son nom de circoncision a été oublié presque tout de suite), c'était inévitable. Mais qu'il ait continué à l'être sous le nom de Jésus, voilà où les exégètes auraient dû voir que ce Jésus n'était pas né, qu'il n'avait pas vécu, qu'il n'avait pas été crucifié. C'est diffamer gratuitement tout le paganisme, c'est-à-dire toute l'humanité non juive, que de la croire capable d'avoir voué à l'enfer le personnage actuel de Jésus. Le paganisme ne s'est pas trompé, il ne pouvait pas se tromper, étant donné le dossier, quand il a traité le christ de scélérat. C'est l'Église qui a trompé tout le monde, lorsqu'elle a fait passer cet horrible juif pour le dieu-Créateur du ciel et de la terre.

Dans Matthieu Jésus se rappelle qu'il a été complètement substitué à bar-Abbas dans la fable, il prend à son compte personnel la mauvaise renommée qui s'attache à son corps selon le monde. Rien de plus faux que cette renommée si on l'applique à Jésus, il va falloir la combattre.

MATTHIEU, V, 11. Vous êtes heureux, lorsque les hommes vous maudissent et vous persécutent, et disent faussement toute sorte de mal de vous, à cause de moi.

12. Réjouissez-vous et tressaillez de joie, parce que votre récompense est grande dans les cieux ; car c'est ainsi qu'ils ont persécuté les prophètes qui ont été avant vous.

LUC, VI, 23. Réjouissez-vous en ce jour-là, et tressaillez d'allégresse, parce que votre récompense est grande dans le ciel : car c'est ainsi que leurs pères faisaient aux prophètes.

Leurs pères, ce sont les Juifs qui, en rejetant Bar-Jehoudda, indiquent aux païens la voie à suivre. L'aigrefin les compare à ceux qui ont rejeté et tué les prophètes depuis les premiers temps jusqu'au Zakhûri (Jehoudda). La comparaison est d'autant plus déplacée que les rois de Juda, ancêtres du crucifié, sont au nombre des bourreaux, particulièrement Manassé[109] qui fit scier en deux Isaïe !

 

XIII. — LA JOIE SUPRÊME.

 

Au milieu de tout cela, nous ne voyons pas encore ce qui sera si gai, ce qui fera rire les disciples dans un avenir plus ou moins éloigné. Qu'est-ce donc que ce prodigieux élément de joie ? Ceci.

Beaucoup de Juifs réfractaires à la promesse sont devenus riches au milieu des goym, et sans précisément frayer avec ceux-ci, ils les tolèrent. Leur tour viendra d'être privés de tout dans le monde qui va venir au jubilé prochain ou à l'autre, — de moins en moins au prochain, de plus en plus à l'autre.

LUC, VI, 24. Cependant, malheur à vous, riches, parce que vous avez votre consolation ![110]

25. Malheur à vous qui êtes rassasiés, parce que vous aurez faim ! Malheur à vous qui riez maintenant, parce que vous gémirez et vous pleurerez !

26. Malheur, quand les hommes vous loueront, car c'est ainsi que leurs pères faisaient aux faux prophètes !

Les pères de ces déplorables fils sont les hérodiens, les pharisiens et les saducéens qui jadis ont repoussé Jehoudda et sa famille, loué la Bête et suivi Balaam, avec les Hanau, les Kaïaphas, les Simon le Magicien, les Saül, les Tibère Alexandre, les Flavius Josèphe et tant d'autres, et qui, s'autorisant de ces exemples, ont un commerce plus ou moins amical avec les païens. Par là les fils ne sont pas moins scandaleux que les pères, ils ont renoncé à l'héritage. Les voilà qui siègent au sanhédrin de Tibériade et qui, mettant la vérité au-dessus de la kabbale, opposent l'histoire aux fables ecclésiastiques : vrais fils de ceux qui ont ou prédit ou préparé ou accepté la victoire des Romains. La louange que s'attirent ces Juifs adultères est un signe de leur malédiction.

Les riches dont il est question dans l'Evangile sont morts, et les pauvres aussi. Mais tout l'avantage est resté aux riches, non seulement en ce monde, mais dans l'autre, car ils ont eu la faculté d'acheter le salut avant de mourir et par conséquent de couper les vivres de la vie éternelle aux pauvres qui sont morts sans baptême. Avec de l'argent on est toujours sauvé, il n'y a qu'à vouloir l'être. Si les riches doivent être punis, ils ne peuvent l'être que dans une religion où le salut ne s'achète pas. Cédant à cette considération, les synoptiseurs de Matthieu ont prudemment écarté du Sermon sur la montagne l'anathème aux riches et les éclats de rire que leur misérable sort doit provoquer chez les christiens dans le Royaume. Luc s'était pourtant donné la peine de démarquer Enoch où il avait lu : Malheur à ceux qui possèdent l'or et l'argent, car ils périront ! Malheur à vous, riches, car vous mettez votre confiance dans les richesses !... Pendant que vous souffrirez les châtiments mérités par vos crimes, les justes goûteront des jours nombreux et fortunés[111].

Or, c'est fini non pas de rire, mais même d'en avoir eu l'intention. Dorénavant les christiens ne veulent pas être soupçonnés d'avoir eu des pensées si peu en rapport avec cette charité que la postérité doit appeler chrestienne à cause d'eux. Ils sont bons, ils sont utiles, ils sont chrestiens, en un mot ils sont le sel de la terre, et Jérusalem la lumière du monde. En conséquence, après la similitude du sel que nous avons donnée[112] et qui provient de Luc, les synoptiseurs de Matthieu résument, pour la leur appliquer, celle de la lampe que nous avons donnée également[113] et qui a la même provenance[114].

MATTHIEU, V, 14. Vous êtes la lumière du monde. Une ville ne peut être cachée, quand elle est située sur une montagne[115].

15. Et on n'allume point une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais sur un chandelier, afin qu'elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison.

16. Qu'ainsi donc luise votre lumière devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes œuvres et qu'ils glorifient votre Père qui est dans les cieux.

 

XIV. — COURS D'HARMONIE.

 

On va baisser le ton à la mesure des sept modestes collines sur lesquelles est bâtie la ville où les aigrefins opèrent. Les sept collines ne seront jamais que la monnaie de Sion, et Rome une pâle réduction de la Jérusalem d'or ; il y faudra faire un peu de morale vulgaire jusqu'à l'avènement du Royaume. D'abord ne plus tuer de goym ni de juifs adultères, parce que c'est un crime de droit commun pour lequel on est condamné par les tribunaux païens. Ne pas se maudire publiquement sous le prétexte que jadis il y a eu des davidistes et des hérodiens, ni se traiter de fou sous le prétexte que les Révélations du Joannès ont abouti à la ruine de Jérusalem et à la perte de la patrie. C'est de l'anecdote.

Bientôt ce sera le renversement complet de la morale évangélique contenue dans les paraboles, qui toutes reposent sur la violence, l'injustice, l'abus de confiance, le vol et l'usure. Ce sera le renoncement — en paroles seulement — au droit de maudire, de lier et de délier, de retenir ou de distribuer la malédiction. Pour la première fois on n'autorisera plus les disciples à tuer devant Dieu ceux qui ont empêché de régner Bar-Jehoudda, les intendants à voler leurs maîtres, les placeurs d'argent à exiger du mille pour un. On ne maudira plus de figuiers parce qu'ils n'ont pas de fruit en avril. On est tout à coup, sans transition, d'une patience surhumaine et d'une charité débordante. Hier on avait l'égoïsme, l'avarice et la cruauté d'un vivant, aujourd'hui on a le désintéressement et le large altruisme d'un mort. Le Jésus des Valentiniens a passé par là, la maison de correction n'a pas été inutile. Une seule parole appartient en propre à l'Evangéliste, et c'est une parole de marchand d'esclaves. Pour tout le reste, il copie ou arrange, indifférent à la contradiction.

MATTHIEU, V, 21. Vous avez entendu qu'il a été dit aux anciens : Tu ne tueras point ; car celui qui tuera, sera soumis au jugement.

22. Mais moi je vous dis que quiconque se met en colère contre son frère, sera soumis au jugement. Et celui qui dira à son frère : Raca, sera soumis au conseil. Mais celui qui lui dira Fou, sera soumis au Ghé-Hinnom du feu[116].

La peine sera plus forte contre celui qui a appelé son frère : Fou, et cependant l'injure est moindre que Raca. D'où vient cela ? De ce que dans la Judée talmudéenne on désignait les Paroles du Rabbi par Livres des égarés, et qu'on en avait une opinion pire encore dans les milieux païens.

23. Si donc tu présentes ton offrande à l'autel, et que lé tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre toi,

24. Laisse là ton don devant l'autel, et va d'abord te réconcilier avec ton frère, et alors, revenant, tu offriras ton don.

Jehouddolâtre, on te l'a déjà dit, ne porte aucun de tes différends devant le magistrat païen, vide tout procès à l'étouffée, dans ton église ! Surtout n'assassine plus en chemin celui qui te traîne devant la justice, cela ne se fait plus ! Au prétoire le bar d'Abbas a reçu quelques soufflets sur ses joues royales ? laisse croire qu'il les a offertes volontairement aux coups de ses bourreaux !

MATTHIEU, V, 38. Vous avez entendu qu'il a été dit : Œil pour œil et dent pour dent.

39. Et moi je vous dis de ne point résister aux mauvais traitements ; mais si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-lui encore l'autre.

LUC, VI, 29. A quiconque vous frappe sur une joue, présentez encore l'autre.

Voilà qui est contre la loi de gheoullah[117] dont les goël-ha-dam[118] de Jehoudda s'étaient faits les exécuteurs au point que leur secte avait été appelée celle des Sicaires ou Assassins, le nom de Kanaïtes ne suffisant plus[119]. Pour ne point se commettre rétrospectivement avec de telles gens et pour n'être point confondu avec le scélérat dont il reprend le rôle dans les Écritures, Jésus est obligé d'outrer la note. Il en arrive à faire un véritable cours de servitude pour les uns, un véritable cours de lâcheté pour les autres.

Le vénérable bar-Abbas a été crucifié tout nu, à la réserve de sa chemise ? sa tunique et son manteau de pourpre, les païens les lui ont pris ? Si l'on t'arrête pour t'enlever ta tunique dans le même but, laisse-toi faire !

MATTHIEU, V, 40. Et à celui qui veut t'appeler en justice pour t'enlever ta tunique, abandonne-lui encore ton manteau.

LUC, VI, 29... Et pour celui qui vous prend votre manteau, laissez-le prendre votre tunique.

MATTHIEU, V, 41. Et quiconque te contraindra de faire avec lui mille pas, fais-en deux autres mille.

Ne te débarrasse plus de lui en chemin, va plus vite que lui ! Ce qui peut t'arriver de mieux, c'est de le laisser derrière toi !

 

XV. — HOMMAGE À HORACE.

 

Assis sur douze trônes, les douze apôtres, image des douze patriarches, devaient juger toutes les nations de la terre. Sans doute cela se fera, puisque pas un iota ne tombera de cette prophétie. Mais il y a lieu d'attendre, et, en attendant, de ne pas juger pour n'être point jugé soi-même. D'autant plus que si le jugement d'autrui ressemble à celui que le Sanhédrin a prononcé contre le christ et ses frères au cours de leur brillante carrière, il n'y a aucun intérêt à ce que les considérants soient publiés.

LUC, VI, 36. Soyez donc miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux.

37. Ne jugez point, et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez point, et vous ne serez point condamnés ; remettez, et il vous sera remis.

MATTHIEU, VII, 1. Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés.

2. Car d'après le jugement selon lequel vous aurez jugé, vous serez jugés, et selon la mesure avec laquelle vous aurez mesuré, mesure vous sera faite.

Les aigrefins ont beau dire de temps à autre que le Royaume ne viendra pas, ce n'est qu'une façon de désarmer les Gnostiques, mais ils n'enlèvent jamais l'espoir aux millénaristes : toutes leurs images sont empruntées à la symbolique de Jehoudda et de ses fils. La mesure dont il est question ici est la mesure de blé qui rentre dans la confection du pain-Zib où chaque disciple doit la retrouver. Vous avez vu Salomé en train de pétrir ce blé dans les trois réas qui précèdent les Ânes[120], et vous en entendrez encore parler tout à l'heure.

Horace avait dit : Si vous voulez que votre ami ne voie pas votre bosse, ne voyez pas sa verrue ! La justice exige qu'on ait pour les autres l'indulgence qu'on réclame pour soi-même[121]. S'emparant d'une image semblable, qui est sans doute un proverbe, et prostituant la pensée qui en fait tout le mérite, l'Évangéliste, quelque rhéteur tombé dans la jehouddolâtrie, l'applique à l'abominable cause dont il a pris la défense.

LUC, VI, 41. Pourquoi vois-tu la paille dans l'œil de ton frère, et n'aperçois-tu point la poutre qui est dans ton œil[122] ?

42. Ou comment peux-tu dire à ton frère : Frère, laisse-moi ôter la paille de ton œil, ne voyant pas toi-même la poutre qui est dans le tien ? Hypocrite, ôte premièrement la poutre de ton œil, et alors tu verras à ôter la paille de l'œil de ton frère.

MATTHIEU, VII, 3. Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l'œil de ton frère, et ne vois-tu point la poutre qui est dans ton œil ?

4. Ou comment dis-tu à ton frère : Laisse-moi ôter la paille de ton œil, tandis qu'il y a une poutre dans le tien ?

5. Hypocrite, ôte d'abord la poutre de ton œil, et alors tu songeras à ôter la paille de l'œil de ton frère.

La similitude qui dans Luc suit celle de la paille et de la poutre peut s'interpréter dans tant de sens qu'elle finit par n'en avoir aucun[123], et elle en aurait un qu'elle n'en serait pas moins indifférente.

LUC, VI, 43. Un arbre n'est pas bon s'il produit de mauvais fruits, et un arbre n'est pas mauvais s'il produit du bon fruit.

44. Car chaque arbre se connaît par son fruit. On ne cueille point de figues sur des épines, et l'on ne vendange point du raisin sur des ronces.

45. L'homme bon tire le bien du bon trésor de son cœur ; et l'homme mauvais tire le mal du mauvais trésor. Car la bouche parle de l'abondance du cœur.

 

XVI. — SUR LE MOT : ADULTÈRE.

 

Conseils moraux maintenant, où Jésus donne le change sur l'enseignement du Rabbi, notamment sur le sens du mot adultère si souvent employé par lui pour désigner tout manquement à la Loi xénophobe.

MATTHIEU, V, 27. Vous avez entendu qu'il a été dit aux anciens : s Tu ne commettras point d'adultère[124].

28. Mais moi[125], je vous dis que quiconque aura regardé une femme pour la convoiter, a déjà commis l'adultère dans son cœur.

31. Il a été dit aussi : Quiconque renvoie sa femme, qu'il lui donne un acte de répudiation.

32. Et moi je vous dis que quiconque renvoie sa femme, hors le cas d'adultère, la rend adultère[126], et quiconque épouse une femme renvoyée, commet un adultère.

On a répété ici, en les appliquant à ceux qui convoitent la femme d'autrui, les ordonnances que Jésus fait ailleurs[127] sur les scandales relatifs aux enfants. Elles se comprenaient quand elles visaient ce genre de crime. Les peines qu'elles portent sont tout à fait hors de proportion avec la convoitise charnelle, surtout quand elle n'a pas été suivie d'effet. Mais il faut réfléchir que les christiens Nicolaïtes et Carpocratiens, en faisant de leurs mères et de leurs sœurs l'objet même de leur concupiscence, autorisaient la rigueur de ces sanctions.

29. Que si ton œil droit te scandalise, arrache-le et jette-le loin de toi ; car il vaut mieux pour toi qu'un de tes membres périsse, que si tout ton corps était jeté dans le Ghé-Hinnom.

30. Et si ta main droite te scandalise, coupe-la et la jette loin de toi ; car il vaut mieux pour toi qu'un de tes membres périsse, que si tout ton corps était jeté dans le Ghé-Hinnom.

 

XVII. — RENONCIATION AUX SERMENTS NAZIRÉENS.

 

Ne plus s'engager à rien par serment, de manière à pouvoir toujours nier, affirmer ou se dédire. Le serment a conduit les christiens à tous les excès, il n'a pu leur éviter aucune faiblesse. Eloï tout le premier a manqué au schabed qu'il avait fait de donner la terre aux Juifs[128]. Tous les fils de Salomé ont manqué à leur serment et de la façon la plus lamentable. Trois fois dans la cour du Hanôth on a vu Shehimon nier sous serment qu'il connaît son frère emprisonné, afin de n'être point arrêté comme lui. Dans ces conditions l'Abbas ne veut plus qu'on le prenne à témoin en quoique ce soit, ni qu'on l'interpelle sur la croix pour lui reprocher d'avoir abandonné son bar.

MATTHIEU, V, 33. Vous avez encore entendu qu'il, a été dit aux anciens : Tu ne te parjureras point, mais tu tiendras au Seigneur tes serments.

34. Et moi je vous dis de ne jurer en aucune façon, ni par le ciel, parce que c'est le trône de Dieu ;

35. Ni par la terre, parce que c'est l'escabeau de ses pieds ; ni par Jérusalem, parce que c'est la ville du Grand roi[129] ;

36. Ne jure pas non plus par ta tête[130], parce que tu ne peux rendre un seul de tes cheveux blanc ou noir[131].

37. Que votre langage soit : Oui, oui ; non, non car ce qui est de plus, vient du mal.

 

XVIII. — SURENCHÈRES DE DOUCEUR ET DE BONTÉ.

 

Lancé avec cette force, Jésus ne peut plus que dépasser le but. Il le faut, il s'agit de faire pâlir les Valentiniens.

LUC, VI, 27. Mais je vous dis, à vous qui écoutez : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent.

28. Bénissez ceux qui vous maudissent, et priez pour ceux qui vous calomnient.

MATTHIEU, V, 43. Vous avez entendu qu'il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi.

44. Mais moi je vous dis : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux [qui vous persécutent et][132] vous calomnient ;

45. Afin que vous soyez les enfants de votre Père qui est dans les cieux, qui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, et pleuvoir sur les justes et les injustes[133].

46. Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? les publicains ne le font-ils pas aussi[134] ?

47. Et si vous saluez vos frères seulement, que faites-vous de surcroit[135] ? Les païens ne le font-ils pas aussi ?

LUC, VI, 32. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quel est votre mérite, puisque les pécheurs[136] aiment aussi ceux qui les aiment ?

33. Et si vous faites du bien à ceux qui vous en font, quel est votre mérite, puisque les pécheurs mêmes le font ?

34. Et si vous prêtez à ceux de qui vous espérez recevoir, quel remerciement méritez-vous ? car les pécheurs aussi prêtent aux pécheurs, pour en recevoir un pareil avantage.

35. Mais vous, aimez vos ennemis, faites du bien et prête : sans en rien espérer, et votre récompense sera grande, et vous serez les fils du Très-Haut : car il est bon pour les ingrats mêmes et pour les méchants.

MATTHIEU, V, 48. Soyez donc parfaits, vous, comme votre Père céleste est parfait.

Malgré tous ses efforts vers le sublime, le fil du prêt à usure le retient à la patte. On est entre banquiers, entre changeurs, et croyez que, si on savait modérer le capital, on savait millénariser l'intérêt. Le millénarisme n'est qu'une vaste conception usuraire.

Bien fin toutefois qui reconnaîtra sous ce déguisement le roi des Juifs qui a ordonné de refuser le tribut aux Romains, de massacrer les étrangers, surtout les publicains, et chez qui l'esprit de vengeance était tel qu'il voulait qu'on tuât jusqu'au pied de l'autel les meurtriers de son père ! Que nous sommes loin de l'homme qui se disait bar-Abbas ! Que nous sommes loin aussi de ce qu'on appelle la primitive Eglise et de l'idée qu'on s'en fait ! Que les jehouddolâtres tâchent de se mettre au-dessus de ces publicains et de ces païens dont ils disaient tant de mal, et peut-être deviendront-ils fils du Dieu qu'adorait Pilatus !

 

XIX. — LE PLAN DES COLLECTES.

 

L'appel à la vente des biens pour l'enrichissement des églises n'ayant pas été entendu ou plutôt ne l'ayant été que trop, on va passer au système des collectes ou quêtes dont nous trouverons un tableau magistral dans les Lettres de Paul.

MATTHIEU, V, 42. Donne à qui te demande, et ne te détourne point de celui qui veut emprunter de toi.

LUC, VI, 30. Donnez à quiconque vous demande ; et ne redemandez point votre bien à celui qui vous le ravit.

31. Comme vous voulez que les hommes vous fassent, faites-leur pareillement.

LUC, VI, 38. Donnez, et il vous sera donné : on versera dans votre sein une bonne mesure[137] pressée, bien remuée, et débordante. Car on usera pour vous de la même mesure dont vous aurez usé pour les autres[138].

Qui on ? L'Eglise, car il s'agit ici du salut contre argent, conformément au système préconisé par les Lettres de Paul. Rome est la Bourse où se négocie cette valeur.

MATTHIEU, VII, 1. Prenez garde à ne pas faire votre justice devant les hommes, pour être vus d'eux ; autrement vous n'aurez point de récompense de votre Père qui est dans les cieux.

2. Lors donc que tu fais l'aumône, ne sonne pas de la trompette devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, afin d'être honorés des hommes. En vérité, je vous le dis, ils ont reçu leur récompense.

3. Pour toi, quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite,

4. Afin que ton aumône soit dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.

Voilà une excellente recommandation, mais si l'on réfléchit que les premiers fonds de l'Église proviennent de chantages, de captations et de détournements de suc- cessions, il est à craindre que le principe du secret, si favorable à ce genre d'opérations, ne soit inspiré par un sentiment fort étranger à la modestie. Car voici venir des appels qui ne sauraient s'adresser aux christiens, puisque les christiens ont reçu l'ordre exprès de ne rien avoir pour n'avoir rien à donner. C'est donc à une clientèle en formation que ces appels s'adressent ; il y a une partie prenante que nous ne voyons pas encore bien, qui n'est pas désignée ouvertement, mais à qui profite le secret recommandé plus haut.

 

XX. — CHANGE DE LA PRIÈRE ET DU JEUNE SELON JOANNÈS.

 

Il vous souvient que dans Luc les synoptiseurs avaient déjà senti la nécessité de donner le change aux  goym sur les abominables sentiments qui faisaient le fond de la prière du Joannès[139]. Dans ce dispositif un des disciples dit à Jésus : Seigneur, enseignez-nous à prier comme Joannès lui-même l'a enseigné à ses disciples ; et Jésus répond par une prière anodine qu'il donne comme étant celle du Baptiseur. Le Jésus de Matthieu la lui emprunte avec quelques considérations nouvelles, mais, oubliant que Luc l'a donnée comme étant de Joannès, il a l'air ici de l'improviser.

MATTHIEU, VI, 5. Et lorsque vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites, qui aiment à prier debout dans les synagogues et au coin des grandes rues, afin d'être vus des hommes. En vérité, je vous le dis, ils ont reçu leur récompense.

6. Mais toi, quand tu pries, entre dans ta chambre, et, la porte fermée, prie ton Père en secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.

7. Or, priant, ne parlez pas beaucoup, comme les païens ; ils s'imaginent qu'à force de paroles ils seront exaucés[140].

8. Ne leur ressemblez donc pas : car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant que vous le lui demandiez.

9. C'est ainsi donc que vous prierez : Notre Père, [qui êtes dans les cieux][141], que votre nom soit sanctifié.

10. Que votre règne arrive. [Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel][142].

11. Donnez-nous aujourd'hui notre pain nécessaire à notre subsistance[143].

12. Et remettez-nous nos dettes[144] comme nous les remettons nous-mêmes à ceux qui nous doivent.

13. Et ne nous induisez pas en tentation, [mais délivrez-nous du mal. Ainsi soit-il][145].

14. Car si vous remettez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous remettra à vous aussi vos péchés[146].

15. Mais si vous ne les remettez point aux hommes, votre Père céleste ne vous remettra point non plus vos péchés.

Jésus est insuffisamment juif ici. On conçoit que l'Église l'ait abandonné pour revenir à Bar-Jehoudda, le Créateur du ciel et de la terre et l'égal du Père. Car non seulement il enseigne une piété sans pratiques et presque sans prières, mais encore il énonce cette abominable hérésie que Dieu se permettra de remettre les péchés directement, sans s'inquiéter du baptême jehouddique. En vérité, il divague !

Ce qui suit, démarquage de la parabole des trois pains dans Luc[147], est appliqué par le compilateur du Sermon sur la montagne à la prière démillénarisée.

MATTHIEU, VII, 7. Demandez, et il vous sera donné ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et il vous sera ouvert.

8. Car quiconque demande, reçoit ; et qui cherche, trouve ; et à qui frappe, il sera ouvert.

9. Quel est d'entre vous l'homme qui, si son fils lui demande du pain, lui présentera une pierre ?

10. Ou si c'est un poisson qu'il lui demande, lui présentera-t-il un serpent ?

11. Si donc vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est dans les cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent ?

12. Ainsi, tout ce que vous voulez que les hommes vous fassent, faites-le leur aussi : car c'est la Loi et les Prophètes[148].

13. Entrez par la porte étroite, parce que large est la porte et spacieuse la voie qui conduit à la perdition, et nombreux sont ceux qui entrent par elle.

14. Combien est étroite la porte et resserrée la voie qui conduit à la vie, et qu'il en est peu qui la trouvent ![149]

Voici maintenant qui est contre le jeûne tel que le Joannès l'entendait et que les Naziréens le pratiquaient d'après lui[150] :

MATTHIEU, VI, 16. Lorsque vous jeûnez, ne vous montrez pas tristes, comme les hypocrites : car ils exténuent leur visage, pour que leurs jeûnes paraissent devant les hommes. En vérité, je vous dis qu'ils ont reçu leur récompense.

17. Pour toi, quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage ;

18. Afin que tu n'apparaisses pas aux hommes jeûnant, mais à ton Père, qui est présent à ce qui est secret, et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.

 

XXI. — EXÉCUTION DU CHRIST ET DE SES FRÈRES.

 

Voici maintenant le véritable pilori de Bar-Jehoudda, car ici ce n'est point par Pilatus qu'il est exécuté ; c'est par Jésus lui-même. Le synoptiseur a eu pour but ici de donner satisfaction aux Gnostiques, mais de manière à pouvoir retourner contre eux l'arme à double tranchant qu'il manie.

MATTHIEU, VII, 15. Gardez-vous des faux prophètes qui viennent à vous sous des vêtements de brebis, tandis qu'au dedans ce sont des loups ravissants[151].

16. Vous les connaîtrez à leurs fruits. Cueille-t-on des raisins sur des épines, ou des figues sur des ronces ?

17. Ainsi, tout arbre bon produit des fruits bons ; mais tout mauvais arbre produit des mauvais fruits.

18. Un arbre bon ne peut produire de mauvais fruits, ni un arbre mauvais produire de bons fruits[152].

19. Tout arbre qui ne produit point de bon fruit, sera coupé et jeté au feu[153].

20. Vous les connaîtrez donc à leurs fruits.

21. Ce ne sont pas tous ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur, qui entreront dans le royaume des cieux ; mais celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là entrera dans le royaume des cieux.

22. Beaucoup me diront en ce jour-là : Seigneur, Seigneur, n'est-ce pas en votre nom que nous avons prophétisé ; en votre nom que nous avons chassé des démons, et en votre nom que nous avons fait beaucoup de miracles ?

23. Et alors je leur dirai hautement : Je ne vous ai jamais connus : retirez-vous de moi, vous qui opérez l'iniquité[154].

Ce dernier passage provient de quelque Évangile gnostique où Bar-Jehoudda et sa bande finissent en enfer, comme dans la Sagesse valentinienne. Les Synoptiseurs l'ont laissé là sans trop savoir pourquoi ; il est fort embarrassant, non pas toutefois pour le Saint-Siège qui l'explique ainsi : La prophétie et le don des miracles ne sont pas toujours des preuves certaines de la sainteté et du mérite de ceux à qui Dieu en fait part : témoin Balaam et Judas lui-même. Jehoudda Is-Kérioth a donc fait des miracles ? Pas plus que Bar-Jehoudda. Mais de ce que Jésus donne aux Douze le pouvoir de chasser les démons, le Saint-Siège en conclut qu'Is-Kérioth s'est illustré dans cette branche de l'activité apostolique.

Produit du mensonge et de la duplicité, même quand il dit de bonnes choses, couvrant un idéal de lucre, même quand il feint le désintéressement, Jésus, à raison de cette double tare, ne pouvait exercer dans le monde qu'une influence néfaste. Déjà dans Luc il avait constaté la méfiance qu'il inspirait et qui l'accompagnait dans ses perpétuelles variations.

LUC, VI, 46. Mais pourquoi m'appelez-vous : Seigneur, Seigneur, et ne faites-vous point ce que je dis ?

47. Quiconque vient à moi, écoute mes paroles et les met en pratique, je vous montrerai à qui il est semblable :

48. Il est semblable à un homme qui, bâtissant une maison, a creusé très avant et en a posé le fondement sur la pierre ; l'inondation survenant, le fleuve s'est brisé contre cette maison, et n'a pu l'ébranler parce qu'elle était fondée sur la pierre.

49. Mais celui qui écoute et ne pratique point est semblable à un homme qui a bâti sa maison sur la terre, sans fondement : le fleuve s'est brisé contre elle, et elle s'est écroulée aussitôt : et la ruine de cette maison a été grande.

Cette similitude a été transportée dans le Sermon sur la montagne par les synoptiseurs de Matthieu[155].

MATTHIEU, VII, 24. Quiconque donc entend ces paroles que je dis et les accomplit, sera comparé à un homme sage qui a bâti sa maison sur la pierre :

25. Et la pluie est descendue, et les fleuves se sont débordés, et les vents ont soufflé et sont venus fondre sur cette maison, et elle n'a pas été renversée, parce qu'elle était fondée sur la pierre.

26. Mais quiconque entend ces paroles que je dis et ne les accomplit point, sera semblable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable :

27. Et la pluie est descendue, et les fleuves se sont débordés, et les vents ont soufflé et sont venus fondre sur cette maison ; elle s'est écroulée, et sa ruine a été grande.

28. Or il arriva que, lorsque Jésus eut achevé ces discours, le peuple était dans l'admiration de sa doctrine.

29. Car il les instruisait comme ayant autorité, et non comme leurs scribes[156] et les pharisiens.

L'individu, quel qu'il soit, qui a compilé le Sermon sur la montagne pour renchérir sur la morale des Gnostiques Valentiniens ou autres, fait très bien la distinction entre les pharisiens, gent talmudiste, et les  scribes qui ont transmis les Paroles du Rabbi, gent millénariste.

En ce qui concerne le faux prophète de l'Apocalypse, l'exorciste et le baptiseur, le Jésus qui parle ici se serait immédiatement accordé avec les pharisiens et les saducéens contemporains de Kaïaphas ; il se rappelle avoir conduit bar-Abbas en enfer.

 

Telle est cette fameuse morale de l'Évangile qui, dit l'Église, s'élève au-dessus de toutes les morales connues. Mais elle est au-dessous de la moyenne atteinte par les païens, et le bien même qu'elle renferme est gâté par le mal qu'elle couvre. Ce n'est qu'un masque appliqué sur le visage d'un Vautrin juif par quelque Chantetrouble de l'usure habituelle.

 

FIN DU NEUVIÈME TOME

 

 

 



[1] On appelle ainsi dans le langage policier le travestissement de toute la personne obtenu non seulement par le costume, mais aussi par le maintien, les gestes et les habitudes d'une profession déterminée.

[2] Il est à remarquer que dans Luc ces ordonnances s'adressent aux soixante-douze disciples demi-décanaires que l'évangéliste a tirés des trente-six décans de l'année tropique, telle que Bar-Jehoudda se la figurait, c'est-à-dire composée de trois cent soixante jours. Il y aurait soixante-treize disciples, s'il avait compté trois cent soixante-cinq jours à l'année.

[3] Cf. L'Evangile de Nessus.

[4] L'accomplissement du Plérôme ; il disait être cela.

[5] Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[6] C'était le cas de Bar-Jehoudda, homme grand en œuvres et en paroles, dit son beau-frère Cléopas.

[7] De là toutes les discussions entre les disciples pour savoir qui est le plus grand. On a décidé que ce serait la veuve de Jehoudda et son fils aîné. Néanmoins, afin qu'on ne glorifie pas trop celui-ci, Jésus a dit qu'il était moins grand que le plus petit des anges qui sont dans le ciel. Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[8] Dans le sens d'observation de la Loi, de toute la Loi. Jehoudda et sa femme ont mérité par là le nom de justes. Cf. Les Evangiles de Satan, première partie.

[9] Cf. Le Charpentier.

[10] Cf. Le Gogotha.

[11] Cet héritage, c'est le Royaume des Juifs, où tout aurait été commun comme jadis dans l'Eden, arec cette différence que dans l'Eden Adam était seul.

[12] Comme il dit à sa mère selon le monde : Femme.

[13] Dans le sens de cupidité, de capitalisation sans frein. C'est le sens du mot chez les anciens. Cf. Le Gogotha. Renoncez à ces avarices, dit Jésus dans Valentin.

[14] Il s'agit de la vraie vie, l'éternelle, celle qui est inhérente au Royaume.

[15] Tellement il y en avait ! Lisez-en la nomenclature dans l'Apocalypse. Cf. Le Roi des Juifs.

[16] Voyez-en les dimensions dans l'Apocalypse. Cf. Le Roi des Juifs.

[17] Mille au moins.

[18] Après un long naziréat, célèbre les Noces de l'Agneau ! Cf. l'Apocalypse.

[19] Les Juifs sont peu nombreux pour faire la moisson du monde qui leur est réservé. Que Dieu donne à ses élus le zèle qui remplace le nombre ! Sur l'image du Maître de la moisson, cf. l'Apocalypse dans Le Roi des Juifs, L'Évangile de Nessus et Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[20] Les agneaux sont les Juifs de la bergerie davidique. Les loups sont les fils de la Louve romaine. Cf. L'Evangile de Nessus.

[21] Tout prendre et ne rien avoir qui puisse être pris, c'est l'idéal. Avez-vous manqué de quelque chose quand je vous ai envoyés (après le sacre) sans bourse et sans besace ? dit Jésus dans la Cœnofiction. De rien, répondirent-ils.

[22] Charmants ces agneaux ! On dirait des loups. Cette ordonnance sue la grossièreté, et pis que cela, l'incurable mépris de tout ce qui n'est pas juif. Saluer quelqu'un en chemin et un incirconcis, c'est prostituer la bénédiction dont on dispose. Mais, dit le Saint-Siège, ne saluez personne est une manière de parler des Hébreux pour dire qu'il ne faut pas que rien les arrête en chemin. Sur cette habitude des Juifs de se détourner des païens pour ne pas les voir, cf. Le Charpentier.

[23] Formule de bénédiction : il s'agit du Grand jubilé où les Juifs auront la paix par la suppression des autres hommes.

[24] Un juif millénariste et jehouddolâtre.

[25] Votre bénédiction n'est qu'un moyen de parvenir. Elle vous reviendra, vous pouvez la reprendre, s'il n'y a point de co-élu dans la maison.

[26] La jehouddolâtrie est un travail. Si une maison accueille de tels ouvriers, tenez-vous-y et faites-y église.

[27] Ajouté quand il fut permis d'entrer chez un goy comme Cornelius, le centurion de Césarée, (cf. Le Saint-Esprit) et que l'interdiction des viandes impures fut levée.

[28] Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[29] Cf. Le Saint-Esprit.

[30] Un plus pauvre vous en demanderait peut-être une. Et puis si je vous autorise à en avoir deux, on dira que vous n'êtes pas mes disciples, mais ceux du Joannès.

[31] De manière à n'avoir pas la tentation de donner.

[32] A la condition de ne pas travailler. C'est ce genre d'ouvriers qui est visé. Ils se faisaient beaucoup plus d'argent que par le labeur le plus acharné.

[33] Digne par sa probité et par ses vertus de donner asile aux apôtres, dit le Saint-Siège.

[34] Toujours le même principe : Le salut vient des Juifs !

[35] C'est comme si vous n'aviez rien dit.

[36] Devant les disciples assemblés sur le Mont des Oliviers. Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[37] Les catastrophes ci-devant annoncées.

[38] C'est le sommaire des premiers chapitres des Actes.

[39] Il ne s'agit déjà plus de l'Évangile du royaume, mais simplement de la mystification résurrectionnelle qu'on a intitulée Evangile, et que Salit converti est censé avoir colportée dans tout le monde païen.

[40] Soyez menteurs comme le Serpent, de manière à paraitre blancs comme la Colombe.

[41] En signe de malédiction. Tel n'est pas l'avis du Saint-Siège dont voici la glose : En témoignage pour eux et pour les nations, c'est-à-dire pour servir de témoignage et de preuve irrécusable du soin que Dieu a pris de Leur faire annoncer la doctrine du salut, et de l'opiniâtreté avec laquelle ils l'ont refusée.

[42] Oui, mais le Père des Juifs, c'est Satan, Jésus vous l'a dit ailleurs. Cf. L'Evangile de Nessus.

[43] Du faux témoignage que rendent de la résurrection les douze apôtres qu'on a donnés à Jésus et parmi lesquels se trouve le ressuscité lui-même sous le nom de Joannès. Cf. Les Marchands de Christ.

[44] Alors Pierre rempli de l'Esprit-Saint... Alors Stéphanos rempli de l'Esprit-Saint... Alors Paul rempli de l'Esprit-Saint... etc.

[45] La grande perle, c'est le Royaume. Cf. Les Evangiles de Satan, première partie. Les petites perles, ce sont les parts de ce Royaume.

[46] Voyez l'affaire de la syro-phénicienne dans Les Evangiles de Satan, deuxième partie et dans Le Roi des Juifs.

[47] Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[48] Cf. L'Evangile de Nessus.

[49] C'est-à-dire les individus qui administrent le prétendu sacrement du baptême.

[50] A commencer par le premier, le baptême.

[51] Le premier mystère du Premier mystère, dit le texte. Il s'agit de l'Abbas (le Père) à la ressemblance de colombe, celui dont Joannès disait être le bar.

[52] C'est-à-dire avec les paroles cabalistiques qui lui donnent son efficacité et que nous avons reproduites à propos des baptêmes du Joannès. Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[53] Qu'il revienne à nous, en un mot, qu'il ne compte pas !

[54] Pris aux Synoptisés.

[55] Qu'ils soient consumés comme sera leur maison, faute d'eau baptismale ! Memento quia pulvis es.

[56] Le baptême ne vaut qu'accompagné des gloses prononcées par son inventeur. Même traduites fidèlement, à supposer qu'elles soient traduisibles, ces gosses sont sans efficacité, car les puissances célestes ne peuvent répondre qu'invoquées sous leur nom de kabbale.

[57] Il veut faire croire que les Evangélistes ont parlé en parabole à ce moment de leur travail.

[58] Ici c'est le signe de la croix. En faisant la croix sur leur don, ils l'effacent comme la croix de la pâque (passage) efface l'année.

[59] Ils n'en mourront pas tout de suite : on laisse une place au repentir sincère, c'est-à-dire payant.

[60] S'ils ne se rangent pas.

[61] Celui qui garde l'entrée de la troisième et dernière région, la région glacée où il n'y a plus d'espoir.

[62] C'est le même mot.

[63] Il s'agit du chrisme ou onction.

[64] La Sagesse, p. 140.

[65] Les mystères du troisième Emplacement n'étaient donnés qu'à des gens dont on était sûr. Dès qu'on fut assez fort pour édicter des peines contre ceux qui livraient le secret, on en édicta. Je pense qu'en plus d'un cas on fit justice par le couteau, — la vieille méthode, la meilleure ! Par provision on les menaça des tourments infernaux qui seraient plus grands pour eux que pour les païens, de manière à les retenir par la crainte de châtiments exceptionnels dans l'autre monde.

[66] Imité des versets relatifs aux enfants.

[67] Le juste, c'est le juif de la Loi combiné avec le juif de l'Evangile du Royaume : le christien en un mot.

[68] Du plus petit d'entre les Juifs christiens.

[69] Cf. les œuvres de Lucien parmi lesquelles on a rangé Philopatris.

[70] Cf. L'Evangile de Nessus. Le premier nom des jehouddolâtres d'Afrique, c'est celui de Scilitains. Cf. Le Gogotha.

[71] Copié dans Matthieu, XV, 14, à propos des pharisiens : Ils sont aveugles et conducteurs d'aveugles ; or, si un aveugle conduit un aveugle, ils tombent tous deux dans une fosse.

[72] Copié dans Matthieu, X, 24 : Le disciple n'est point au-dessus du maître..., et détourné de son sens. Il s'agit ici des instructions sur l'art d'échapper à la justice, et on propose en exemple la fuite du Rabbi vers Lydda, fuite qui d'ailleurs n'a point été couronnée de succès.

[73] Pris à Matthieu, X, 24 : ...C'est assez au disciple qu'il soit comme son maître.

[74] Elle a eu de la valeur tant qu'elle a été dans ces conditions-là ; maintenant, elle est l'image de ce qui attend cette ville.

[75] Aujourd'hui Kérazé. Corazin était près de Giscala, ville natale de Saül. A ce qu'il semble Corazin est la seule ville de Galilée que Bar-Jehoudda ait prise.

[76] Nom évangélique de Gamala et nom hébreu de Juliade. Bethsaïda Juliade est la Bathanéa de l'Evangile.

[77] On traduit dunameis par miracles, et le mot peut être employé en ce sens, mais ce n'est nullement de miracles, c'est de coups de force qu'il s'agit. Rappelons-nous la définition de Bar-Jehoudda par son beau-frère Cléopas : C'était, dit-il, un homme puissant en actes et en paroles.

[78] Par la résidence de Salomé, la reine-mère, et par les baptêmes de l'année proto-jubilaire.

[79] Cf. L'Evangile de Nessus.

[80] Cf. Le Roi des Juifs et Les Marchands de Christ.

[81] Revienne.

[82] Le Marân. Ces phrases trop claires ont été déplacées et transportées en un endroit où elles perdent toute leur signification.

[83] Sur ce surnom, cf. Les Evangiles de Satan, première partie.

[84] Ce propos revient très souvent dans les discours de Jésus. Le procédé ne varie guère.

[85] Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[86] N'espérez pas devenir lumineux tout de suite et vous hausser à la taille des anges de soixante-douze mètres.

[87] C'est l'idéal ! La floraison elle-même ne les fatigue pas, elle ne dure guère que quinze jours. Le lis était la fleur de David. Ménahem, sitôt roi, fit frapper de la monnaie à la croix fleurdelisée.

[88] Les Juifs au contraire n'y font aucune attention, pas plus qu'à l'argent, ils sont le peuple de Dieu et ne s'embarrassent pas de pareilles misères.

[89] C'est en effet la promesse de l'Abbas. Quant à la justice du Royaume, nous ta connaissons par l'Apocalypse : c'est l'Occident réduit en cendres.

[90] Le troupeau de la bergerie davidique.

[91] Pas en 789 toutefois !

[92] Il n'est pas sûr que Bar-Jehoudda ne revienne pas à l'improviste.

[93] Luc, XVI, 13, où il sert de conclusion à la parabole de l'économe infidèle.

[94] Ceux à qui il vient de parler n'ont rien et doivent prendre toutes les précautions imaginables pour ne rien avoir. Ce n'est donc pas à eux qu'il s'adresse, c'est aux clients.

[95] Elles sont en effet de celles que rectifie la Sagesse valentinienne, p. 104, en leur donnant l'interprétation spirituelle qu'elles ne pouvaient avoir dans le Royaume.

[96] Gamala d'abord, puis Kapharnahum.

[97] Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[98] Celle-là même que Luc a disposée dans la plaine.

[99] Tout à l'heure ils étaient pauvres par faute d'argent, ici ils ne sont plus pauvres que d'esprit, ce qui ne les libère aucunement de l'autre pénurie.

[100] C'est un ange prévaricateur qui a révélé aux hommes les secrets de la fausse sagesse, elle s'enseigne par l'écriture et par la lecture. Sans cela ils n'auraient pas connu la mort, qui détruit tout, ils ne périssent que par leur trop grande science. (Livre d'Enoch, édition de l'abbé Migne, chap. LXVIII, 9-16.) En conformité de quoi le Saint-Esprit dit à Paul dans Césarée : Ô Paul, ton trop de lettres te perd !

[101] Nous attendons.

[102] Il ne s'agit plus du fils de la pair (ou fils du sabbat, c'est la même chose), dont il est question dans les ordonnances sur la dispersion.

[103] Et ils mériteront ce nom qui jusqu'à présent avait été monopolisé par les Juifs que Joannès avait faits enfants de Dieu par le baptême.

[104] Chap. LXXX, 1-6.

[105] Chap. LXXXI, 4.

[106] Chap. LXI, 15, 17.

[107] Chap. CIV bis, 4-2.

[108] Chap. XCI, 1-3.

[109] Cf. Les Evangiles de Satan, première partie.

[110] En ce monde. Leur argent les console, il ne les consolera pas dans l'autre où naturellement tout sera pour les disciples.

[111] Livre d'Enoch, trad. Migne, XCIII, 6-7, et XCV, 5-8.

[112] Verset 13 du ch. XV, que nous avons donné plus haut.

[113] Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[114] Ils donnent également, ch. VI, 22-23, et par une autre similitude de lampe, le change sur la transfiguration lumineuse par où tout disciple devait passer en 789. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[115] Jérusalem.

[116] La note du Saint-Siège ne peut manquer de vous être agréable : Le jugement est probablement le tribunal qui était établi dans chaque ville et qui se composait de vingt-trois juges ; comme le conseil signifie le tribunal souverain composé de soixante-douze membres, et qui jugeait en dernier ressort les crimes contre la religion et l'Etat. Jésus-Christ veut donc dire ici que la haine, la colère, le désir de la vengeance, sont aussi criminels aux yeux de Dieu que l'homicide, qui est puni de mort, parce que quiconque conserve de la haine contre son semblable est censé désirer sa mort, et que s'il ne se porte contre lui aux dernières extrémités, c'est uniquement la crainte qui le retient ; que dire à son frère des paroles telles que Raca, vil, abject, c'est se rendre coupable devant Dieu des mémés peines dont le conseil punit les plus grands crimes ; qu'enfin, joindre à la haine, aux paroles de mépris, les outrages et les discours infamants, c'est mériter l'enfer, la terre n'ayant point de supplice capable d'expier un tel crime. C'est bien ce qu'a pensé Jésus lorsqu'il a déposé précieusement le roi-christ et sa famille en enfer, dans le voisinage immédiat des ténèbres extérieures.

[117] Vengeance.

[118] Vengeurs du sang.

[119] Cf. Le Saint-Esprit et Le Gogotha.

[120] Cf. Les Evangiles de Satan, première partie.

[121] Horace, Satires, l. I, satire III.

[122] Remarquez qu'il y a impossibilité matérielle.

[123] Cela tient sans doute à ce qu'elle a été déplacée. Les synoptiseurs manquement à la foi conjugale (David et Bethsabée en étaient), et de Matthieu en ont tiré bien meilleur parti.

[124] Ces anciens sont de deux sortes, ceux à qui cela a été dit pour ceux à qui cela e été dit par Jehoudda et par son fils dans le sens d'adultère envers la Loi. Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[125] Moi, Jésus. C'est du nouveau.

[126] Pas le moins du monde, si elle reste fidèle nonobstant son renvoi. Le change donné sur l'idée exploitée dans l'Evangile primitif rend la chose incompréhensible.

[127] Marc, IX, 42, 46 et Matthieu, XVIII, 8, 9.

[128] Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[129] David. Voyez Quintilien lui-même.

[130] Après l'avoir vouée à Dieu par naziréat.

[131] On peut les laisser pousser comme avait fait Dar-Jehoudda et ceux de ses frères qui lui succédèrent. Mais quant à en faire changer la couleur, cela ne se peut que par une teinture qui ne trompe pas l'Abbas.

[132] Ajouté pour l'effet au texte de Luc.

[133] Quel changement depuis l'Apocalypse ! Et ce soleil qui continue à luire pour les païens ? quelle catastrophe !

[134] Décidément ils sont très bien, ces publicains ! L'Eglise apprécie leur concours et applique leur méthode.

[135] Jésus leur avait dit de ne saluer personne en chemin. Quelle peine maintenant pour les amener simplement ils politesse païenne !

[136] Les pécheurs, ce sont les païens.

[137] Métron calon. Allusion à la parabole de l'économe chargé de distribuer le quatrième séa, le satométrion de l'Âne. Cf. Les Évangiles de Satan, première partie. C'est une preuve de plus que cette parabole a été tronquée et qu'elle désignait bien Bar-Jehoudda.

[138] Phrase copiée dans Marc, IV, 24, et détournée de son sens : On usera pour vous de la mémo mesure dont vous avez usé pour les autres, et il vous sera donné encore davantage. Marc ici parle de l'interprétation secrète que les Juifs doivent donner aux paraboles : Prenez bien garde, dit-il, à ce que vous entendez.

[139] Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[140] Eh bien ! et les gloses de la kabbale christienne ?

[141] Ajouté à la pseudo-prière de Joannès selon Luc. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[142] Ajouté à la pseudo-prière de Joannès selon Luc.

[143] De chaque jour, lit-on dans Luc.

[144] Au lieu de péchés dans Luc.

[145] Ajouté.

[146] Pas du tout. Il ne me sera jamais remis si je blasphème contre l'Esprit-Saint, et le temps approche où tu m'assassineras si je dis la vérité sur le scélérat juif que tu déclares consubstantiel et coéternel au Père !

[147] Cf. Les Evangiles de Satan, première partie.

[148] Oh ! Oh ! Et l'Apocalypse, conclusion de l'Ancien Testament, qu'est-ce que nous en faisons ?

[149] Emprunté à la parabole de l'Homme qui lie et délie la porte. Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[150] Sur cette question cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[151] Le Saint-Siège a une bien belle note là-dessus : Les hébreux comprenaient par prophètes non seulement ceux qui prédisaient l'avenir, mais en général aussi quiconque se donnait pour inspiré, ou qui se mêlait d'interpréter l'Écriture et d'enseigner. Et, sous le nom de faux prophètes, les Pères ont compris ici tous les faix docteurs, juifs ou chrétiens.

[152] Similitude qui se trouve également dans Luc, VI, 43-45, mais avec un tout autre sens.

[153] Pris textuellement à la proclamation baptismale du Joannès. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[154] Tiré de Matthieu, XXV, 41, et de Luc, XIII, 21.

[155] Comme Luc ils se sont proposé de donner le change sur l'origine du surnom de Shehimon : la Pierre.

[156] Il est censé parler plus spécialement aux disciples, c'est-à-dire aux fils de Jehoudda qui se sont rapprochés de lui, laissant la foule derrière eux. (Matthieu, V, 1.)