LE MENSONGE CHRÉTIEN - (JÉSUS-CHRIST N'A PAS EXISTÉ)

 

TOME IX — LES ÉVANGILES DE SATAN (TROISIÈME PARTIE)

IV. — LA MAISON DE CORRECTION.

 

 

I. — VALENTIN, CORRECTEUR DES APÔTRES.

 

Si le supplice de Bar-Jehoudda fut une crucifixion réelle et historique, celui de Jésus est une crucifiction[1] à l'usage des goym béats et naïfs. Cette crucifiction ne nuisait en rien à sa carrière. Elle n'en était qu'un heureux accident. Que dit-il, en effet, aux disciples dans Matthieu : Je suis avec vous jusqu'à la consommation de l'Æon, entendez : jusqu'à l'An mille. Mais comme c'est lui qui proroge et multiplie les temps, peut-être était-il encore en Judée pendant la dernière croisade. Le parti-pris des historiens, qui a Prévalu jusqu'à nos jours, de dissimuler les faits essentiels a seul pu nous priver d'apparitions authentiques.

Par Cérinthe nous savons que Jésus est resté pendant au temps fort appréciable, treize ans, au milieu des christiens après le supplice de leur roi, et par Valentin que, mettant à profit l'arrestation équinoxiale dont il a été victime le 15 nisan 1789, il n'est pas resté moins de onze ans sur le Mont des Oliviers, sur le Mont Sion, dans le Temple et sur la montagne de Gamala pour refaire l'éducation de ces messieurs et dames de la famille jehouddique.

De leur côté, les disciples de Ptolémée, disciple de Valentin, ne voyant dans les Évangiles qu'allégories cosmiques interposées entre les Juifs et les païens par l'imagination des évangélistes, tenaient que Jésus était une pure fiction où s'ébattaient les Æons. Et sans entrer dans le détail de leur système dont l'ingéniosité donne le frisson, il en résulte que pour les Ptoléméens Jans passait dix-huit mois avec les disciples après la mort du christ. Il ne remontait donc au ciel, sa demeura ordinaire, qu'à l'équinoxe d'automne de l'année 790, sous Caligula.

Comme il est dans la constitution de Jésus de passer chaque printemps sur la Palestine, il ne lui en coûte rien de revenir sur les événements qui se sont produits, dans l'intervalle, de sauver les martyrs que les lois ont atteints dans l'année, de mettre les choses au point où elles doivent être pour l'avancement du commerce baptismal et de les éclairer du jour nécessaire à l'exploitation des goym. Il ne se borne pas, comme on croit généralement, à revenir sur l'année où Joannès fut livré. Il est resté plus de deux siècles enferme dans plusieurs maisons de correction tenues par les Gnostiques[2], notamment dans celle de Valentin. Onze ans n'ont pas suffi à blanchir les disciples de Jehoudda le Gamaléen, et Jésus est remonté au ciel avec le regret de constater que cette besogne était au-dessus de ses forces ; il y a des limites à la puissance de Dieu ! Il repassera.

Il est repassé ainsi jusqu'à la fin du quatrième siècle, époque à laquelle on peut croire qu'il a donné la dernière couche à l'Évangile. Il ne lui a pas fallu moins de trois siècles pour décrotter le christ et sa famille, et appliquer sur le plomb vil de cette réhabilitation la mince couche d'or que l'Église appelle la morale révélée. Pièce fourrée. Nous allons voir que cette prétendue morale divine n'est, en ce qu'elle a de bon, qu'un grossier plaquage de la morale acquise. Il est possible que la somme évangélique soit en avance sur celle du Talmud, mais elle est très en retard sur celle des Païens au temps de Tibère. De deux types en présence, on a pris celui qui favorisait le plus l'asservissement des hommes.

 

Sans quelques dehors philosophiques l'Église ne pouvait introduire le christ dans le monde. Elle l'habilla en moraliste à peu de frais ; encore n'est-elle pas toujours allée chez le bon faiseur quand elle compose à grand renfort de plagiats le Sermon sur la montagne et qu'elle en parfume les lèvres de Jésus. La somme évangélique n'est point telle qu'on ne la puisse concevoir sans l'intervention d'un dieu. Ce prétendu Sauveur proclame des vérités beaucoup plus vieilles que lui, et beaucoup mieux exprimées avant lui. De temps en temps le Logos bredouille, si on le compare à Pythagore, à Socrate, ou simplement à Sénèque. Mais pour l'Église il ne peut y avoir de vérité divine que dans la bouche d'un juif, et quel juif !

Les instructions et sermons sont entrés dans l'Évangile bien longtemps après Cérinthe chez qui il n'y a même pas de rudiment. Comme sermonneur Jésus est très différent de lui-même, selon qu'il est le Verbe du royaume de ce monde ou le Verbe du royaume gal n'est pas de ce monde. Le morceau de bravoure, souvent cité, c'est le Sermon esquissé par Lue dans le plaine et développé par Matthieu sur la Montagne. L'Église se tire d'embarras en disant que Luc est l'abrégé de Matthieu. Ainsi, Luc se serait permis d'abréger la parole divine. Cette parole, Marc qui vient avant Luc dans l'ordre des synoptisés, Marc ne l'a pas entendue, et Marc est fils de Shehimon dit la Pierre. Par là, on tient la preuve que Shehimon est mort sans avoir connu un traître mot des discours qui sont dans Matthieu et dans Luc. Le pseu.do-Jochanan évangéliste à qui on donne l'écrit enlevé à Cérinthe meurt après Matthieu, après Marc et après Luc, sans avoir entendu la moindre syllabe de ces sermonnaires.

Tout ce qu'il y a de bon dans Jésus, en dehors de ce qui est emprunté aux livres juifs, a été mis en lui par les aigrefins de Rome qui ont pillé les Gnostiques valentiniens. Aveuglés par cette poignée de poudre aux yeux, des savants distingués ont tenté une diversion au millénarisme originel de l'Évangile par le moyeu d'un -Jésus alexandrin grandissant en Egypte auprès des Thérapeutes, alias moines sérapistes ; ce héros comme on n'en a jamais vu avant lui ni après, — encore moins pendant ! — surgit en sa trentième année sur les bords du Jourdain, et inonde de lumière philonienne la conscience saumâtre du Baptiseur. J'ai lu là-dessus des thèses fort étudiées auxquelles il ne manque, pour être acceptables, que de ne pas pécher par la base et contre tous les textes. Il a plu à quelques-uns, qui ont fait leur deuil de la divinité de Bar-Jehoudda, d'imaginer un juif unique en son genre, perdu au milieu de juifs barbares qu'il scandalise par une prédication toute de renoncement et de mansuétude. Le premier défaut de cette invention est de renverser de fond en comble l'Évangile de Matthieu qui ramène bar-Jehoudda en Galilée immédiatement après la mort d'Hérode, c'est-à-dire à l'âge de la plus opaque innocence, et par contre d'ouvrir un crédit énorme à ceux qui l'accusent d'avoir fait un long séjour en Égypte pour y étudier la magie.

Bar-Jehoudda est aux antipodes du sérapisme qu'a vu Philon, et des esséniens[3] qu'a vus Josèphe au delà de la Mer Morte, car ceux-ci commandent de garder la foi à tout le monde, particulièrement aux souverains, Parce qu'ils tiennent leur puissance de Dieu[4]. C'est le principe qui anime la littérature paulinienne, et c'est ln négation même de celui que Jehoudda et ses fils avaient posé ou plutôt réveillé contre les Césars. Aucun accord possible entre esséniens et jehouddistes, aucune confusion : les premiers ne croyaient point à la résurrection des corps qui est toute la religion des seconds.

Les Esséniens avaient renoncé aux sacrifices animaux bien avant l'invention de l'Eucharistie. S'ils envoyaient des offrandes au Temple, ils n'y envoyaient point de bêtes. Les Thérapeutes égyptiens que Philon a si bien décrits, fort religieux et grands adorateurs de Dieu, ne lui sacrifient rien qui ait vie ; ils aiment mieux lui offrir le sacrifice d'une âme pure et sainte qu'ils travaillent pour cet effet à purifier. Jésus tient rigoureusement pour le sacrifice animal, celui d'Abel, contre l'offrande végétale de Caïn. Bar-Jehoudda, en qui il s'incarne, descend d'Aaron par sa mère[5]. Jésus ne peut manger l'agneau, puisqu'il n'a ni dents ni bouche. Mais il exige que les disciples le tuent eux-mêmes, et le mangent en son honneur, il en mange lui-même dans l'allégorie. Les Thérapeutes adorent le Dieu bon qui ne brandit ni épée ni torche. Une de leurs caractéristiques, c'est l'horreur de l'huile, de cette huile qui est la substance même du chrisme et que l'Ange de la famine met de côté dans l'Apocalypse pour l'usage auquel Dieu la destine : l'onction de son fils selon la kabbale. De retour au pays natal, Bar-Jehoudda vit-il les Esséniens ? Nullement, quoiqu'il leur ressemblât par les rites qu'ils tournaient en règle conventuelle : les ablutions, la rigide observation du sabbat, le refus de toucher à certaines choses réputées impures, quoique Dieu les ait manifestement créées pour l'homme, et leurs dévotions théâtrales. Pour les dogmes d'égalité, Jésus est tout à fait inférieur aux Thérapeutes ; pour l'esclavage, par exemple, que ceux-ci repoussent absolument comme contraire à la nature, alors que les évangélistes le prônent comme un rouage indispensable à la vie sociale et l'aggravent par des ordonnances avilissantes.

 

Dans l'Évangile, Joannès annonce un Dieu armé d'un van à vanner les hommes. Que ce van nous serve à vanner Jésus ! Au bout de quelques instants, nous trouverons deux Jésus, l'un sous le van, l'autre dessus. Dessous, un Jésus colère et haineux, dessus un Jésus patient et rusé, jamais bon par nature. Phénomène étrange et très simple. Ce Jésus de vengeance et de destruction, c'est Jehoudda et ses fils ; le Jésus-jésuite, bon par calcul, c'est Valentin et ses disciples. Les confondre, c'est confondre la nuit avec le jour, le feu avec l'eau, le noir avec le blanc, la guerre avec la paix, le Jourdain avec le Nil, le commencement du premier siècle avec la fin du second.

On ne sait positivement qui était Valentin, sinon que, juif hâbleur et bonhomme, il faisait de la religion, de la politique et de l'astrologie pour le compte de ses compatriotes. Ce juif vit clairement que l'Évangile du Royaume avait coupé la Judée en deux parties et les Juifs en mille morceaux ; qu'il était au fond cause de tout ce qui était arrivé sous Néron et sous Trajan, sous Hadrien et sous Septime Sévère ; qu'il n'était pas sage de déclarer la guerre aux nations, quand on était expulsé de chez soi, et à la société, quand on prétendait la régir ; que les apôtres avaient mal lu le ciel et mal vu la terre ; que, sous prétexte de renouveler Canaan, ils l'avaient perdu, rendant le nom de Judée odieux dans tout l'Empire ; que toutes les Apocalypses millénaristes avaient tourné contre leurs auteurs, et qu'enfin, si on voulait se maintenir dans le monde, il fallait y montrer une figure moins hideuse.

Déjà les Juifs du dehors avaient été dans de rudes transes quand ceux du dedans s'étaient levés traitreusement contre Hadrien. Toute tentative d'illuminé pour restaurer Jérusalem retombait sur eux, s'interprétait contre eux dans les villes qui les avaient reçus. On disait : Toujours eux ! chez nous parasites et chez eus révoltés ! Quand en purgera-t-on la terre ?

Ceux qui vivaient en Egypte firent des réflexions amères dans l'intérêt de leur conscience, prudentes dans celui de leur commerce. Ceux-là aussi avaient attendu le Royaume, mais quelques-uns avaient lu Philon[6]. Valentin en était, je pense. Philon est un Père de l'Eglise valentinienne. Il avait décrit[7] le Fils de l'homme, et dans un livre qui a disparu : Peri Agathou (sur le Dieu bon), il avait rassemblé des allégories comme celles de Jésus, dit Celse. Mais sans le nommer, ajoute l'Anticelse. Est-ce bien sûr ? Ne nommait-il pas, au contraire, mais par son nom de circoncision, l'homme qui avait étudié la kabbale en Egypte et que tout Alexandrie a vu bafouer sous le nom de bar-Abbas au Gymnase ? Philon, qui est mort sous Claude, citait (au troisième livre du Peri Agathou) les Paroles du Rabbi d'où proviennent les allégories exploitées depuis dans l'Évangile sous la figure de Jésus. Est-il besoin de dire que son livre a complètement disparu parce qu'il était invoqué par les amis de la vérité contre l'imposture ecclésiastique ? Mais Celse l'a vu, Celse l'a lu. Est-il admissible en effet que Philon, le plus distingué de tous les Juifs de son temps et le mieux au courant de tous les mouvements religieux qui agitaient la Judée, ait ignoré les écrits de Bar-Jehoudda et l'apostolat millénariste ? Eh bien ! sans Celse on ignorerait jusqu'à l'existence du Peri Agathou !

Valentin est juif et d'un judaïsme ardent. Fondateur d'une secte très importante, et qui au cinquième siècle comptait encore des milliers d'adhérents, son témoignage n'en a que plus de valeur. Des Ecritures qu'il a Sons les yeux il conserve et adopte le personnage de Jésus, tout aussi respectable que celui de Iahvé, d'Adonaï ou d'Eloï dans les anciennes Ecritures, et d'une allure tout à fait sérapique. Mais jouer du cadavre de Joannès, l'égaler à Jésus lui-même, et, sous prétexte de piété envers la race de David, faire habiter le ciel par une troupe d'hommes dont les actes, pour être dynastiques, n'en étaient pas moins qualifiés crimes, Valentin s'y refuse ! Jésus ne recevra ces dames et ces messieurs qu'après un long purgatoire, et seulement à la fin des temps.

Valentin le premier nettoya bar-Jehoudda et ses frères. Correcteur des apôtres (c'est ainsi qu'Irénée l'appelle avec mépris), il a fabriqué Jésus pitoyable : Évangile plein de blasphèmes, dit encore Irénée[8] qui ne le connut jamais, sinon après avoir cessé luiinérne de s'appeler Salomon.

La haine affreuse dont les jehouddolâtres ont poursuivi les Valentiniens ne vient pas seulement de ce que ceux-ci connaissaient l'inexistence de Jésus, elle vient surtout de ce que, connaissant à fond la vie des disciples et possédant leurs écrits, ils ont énergiquement refusé de se faire les complices de la fourberie qui commençait à prendre corps. L'Église est une ingrate le Jésus de l'Évangile actuel est en grande partie l'œuvre des Valentiniens. C'est par eux que s'est introduit, dans le monstre évangélique, le peu de morale et de raison qui s'y trouve aujourd'hui. Bientôt écrasés par la tourbe immonde des jehouddolâtres, l'Église les a accablés d'outrages, de sarcasmes et de persécutions.

La mesure de sa haine contre le pauvre Valentin, c'est la somme de franchise qu'il y a en lui. Les Valentiniens s'étant permis de corriger l'apostolat millénariste, et de montrer ce qu'il y a dedans, — un mauvais vent de Judée, — l'Église dans Tertullien traite Valentin d'apostat. Ainsi a-t-on fait de tous les Gnostiques qui ont mis les païens en garde contre la jehouddolâtrie ou dénoncé à la civilisation l'odieux commerce du baptême.

 

Le Jésus valentinien[9] convenant que l'Être dont on lui a fait jouer le personnage terrestre n'a pas été conçu dans le sein d'une femme, l'Église appelle Valentin apostat. Alors comment appellera-t-elle Jésus ? Un traître ? Car non seulement il ne viendra pas dans le siècle commencé, le troisième, mais c'est à tort que Bar-Jehoudda l'a mêlé à ses impudentes Apocalypses. Jésus n'a pas pu révéler qu'il viendrait à date fixe, puisque cette date dépend du Père et que le Père n'est pas décidé[10].

Sans doute, et il ne le nie pas, il a parlé à Jehoudda le Gamaléen et à sa femme sous Auguste, à ses sept fils sous Tibère, sous Caligula, sous Claude et sous Néron. Mais ils ont mal compris. Aujourd'hui il parait avec de nouvelles Paroles dans lesquelles il revient sur ce qu'il avait dit. Si l'on veut absolument rendre hommage à Joannès, — auquel Joannès ses contemporains ont fait ce qu'il leur a plu, — qu'on le donne comme ayant incarné Élie, mais qu'on en finisse avec la sotte fable de sa résurrection ! Et comme les disciples ne comprennent pas, — c'est leur spécialité, Jésus qui est toute lumière leur dit : Si vous voulez comprendre, le Baptiste est Élie, dont je vous ai dit[11] qu'il viendra. En un mot, c'est la figure d'Élie simplement[12]. Évangélistes, n'insinuez donc pas qu'il est le Messie lui-même ! Faites descendre et remonter Jésus dans vos thèmes, déposez-le dans le berceau du Joannès si vous voulez ! Qu'une fois sur terre, il dialogue avec les frères et amis, jusque-là tout est conforme aux licences de la mythologie ! Prêtez-lui la chair de Joannès, si vous y tenez, mais la lui donner complète-fient, le faire remonter au ciel dans le corps de Joannès, diviniser Joannès sous le pseudonyme de Jésus, c'est un sacrilège intolérable ! Le crucifié n'est après tout que Bar-Abbas[13] !

 

II. — IDENTITÉ DE MARIE MAGDALÉENNE ET DE LA MÈRE AUX SEPT FILS.

 

Joannès ne connaissait rien de l'énigme du monde avant qu'on ne le crucifiât, mais depuis sa Transfiguration, et maintenant qu'il ne fait qu'un avec Jésus dans la fable, c'est à celui-ci de répondre à sa place. Ainsi le veut la loi du genre. Et il répond par des Paroles qui diffèrent totalement de celles qu'il a composées quand il était dans le monde, et qu'ont recueillies les Philippe, les Toâmin et les Mathias. Le Verbe n'est pas responsable des erreurs de Joannès.

On désigne communément l'œuvre de Valentin sous le titre de Sagesse. Le vieux mot français Sapience est celui qui conviendrait le mieux.

La Sagesse passe pour être incompréhensible, ou à peu près ; mais sans être jamais claire, elle n'est pas d'une obscurité insurmontable. L'important est d'en bien saisir le plan, — ce que les manœuvres ecclésiastiques ont rendu difficile, — et le parti-pris de symbole qui a donné leurs noms à tous les personnages, au titre lui-même.

Le titre exact, c'est Pistis-Sophia : Foi-Sagesse ou mieux Foi-Science. Pistis-Sophia est la personnification de l'une et de l'autre.

Dans son acception spirituelle Sophia est conjoint à l'Invisible ; mais dans l'expression corporelle qu'elle a prise sur la terre, en la personne vivante de la Judée ou de Jérusalem, elle est la fille de Barbilô[14], lequel est visiblement l'Esprit de vie dont le sang est la matière : à cause de quoi il est surnommé la Sangsue[15]. Il est vraisemblable que Joannès a parfaitement connu Barbilô, car l'Esprit de vie est célébré dans l'Apocalypse pour avoir redressé Jehoudda et son frère après leur mort et les avoir transportés au ciel devant tous leurs ennemis[16]. C'est en cette qualité que Barbilô est à la disposition du Père dans le ciel. Et il n'est pas sans quelque analogie avec Bacchus, car outre le sang qu'il recèle et qui est la chaleur animale, il est préposé au vin[17] qui est dans la Vigne du clos céleste. Il semble être l'Architriclin de ces deux choses jumelles : le sang et le vin. Barbilô, c'est la Grande puissance aux ordres de l'Invisible[18] ; Sophia sa fille, même au Plus bas de son histoire, c'est la Judée reine du monde.

La caractéristique de la Sagesse, au point de vue Spécial où nous nous plaçons dans tout notre ouvrage, c'est qu'il n'y a pas de second Joannès qui aurait été le bien-aimé du crucifié, qui aurait recueilli sa mère, composé l'Apocalypse de Pathmos et écrit le Quatrième Évangile avant de mourir à Éphèse ; mais un Seul Joannès, vierge à cause de son naziréat, baptiseur à cause de la mission qu'il s'attribuait, et christ dans la mesure du temps qui s'est écoulé entre son sacre et sa Crucifixion.

Marie Magdaléenne est au premier plan de la Sagesse. D'ailleurs — en dehors de ses deux filles, Maria Cléopas sous le nom de Salomé qui est le véritable, et Thamar sous son nom retourné, Marthe — ses sept fils sont seuls nommés dans la Sagesse, sauf Ménahem qu'on n'avoue jamais sous son nom de circoncision, même dans les Synoptisés où il figure sous le nom de Josès. Cérinthe est le seul évangéliste qui lui fasse sa juste part (une part considérable et qui devrait être plus grande encore), sous le nom de Nathanaël. Dans Valentin, le roi-christ de 819 n'intervient ni sous le nom de Josès, ni sous celui de Nathanaël, ni sous celui de Bar-Shabath par lequel il est désigné dans les Actes des Apôtres[19] ; il est remplacé dans la première partie de la Sagesse par son neveu Mathias, nommé Barthélemi (corruption de Bar-Toâmin) dans la seconde.

La Sagesse ne nous intéresse pas seulement par les questions d'identité qu'elle éclaircit. Elle nous fait toucher du doigt le principe même des Évangiles, cette histoire de revenants où tout le monde se voit et se parle, comme avant la mort. C'est un des effets du baptême, et Pierre explique très bien que ceux-là ont été sauvés er à qui l'eau du, Seigneur a été confiée ; ils se sont revus après leur mort, ressuscités par une eau de vie éternelle[20] et surtout par la main des évangélistes.

L'intérêt de la Sagesse est également dans les formules de langage qui lui sont communes avec les Évangiles synoptisés : elles proviennent des Paroles du Rabbi, par exemple celle qui revient si souvent, même dans l'Envoi de Pathmos : Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ! Dans la Sagesse Jésus et les disciples font souvent allusion aux Paroles qu'il a dites autrefois[21], et par lesquelles Valentin désigne tantôt les Paroles du Rabbi, tantôt les Évangiles millénaristes. Nous l'avons observé déjà, c'est par questions et par réponses que procédaient les Paroles du rabbi. Les mots : Cherchez afin que vous trouviez, frappez afin que l'on vous ouvre, car quiconque cherche trouvera, et à quiconque frappe on ouvrira[22], étaient dits pour encourager les Juifs à interroger fréquemment, à pénétrer le sens de la kabbale christienne. Bar-Jehoudda avait réponse à tout. Comme dit Lucien, il expliquait leurs Écritures et il en composait lui-même. Maintenant qu'il n'est plus là, comme le dit Marie à jésus, que chercherons-nous et pourquoi frapperons-nous ? Ou qui a le pouvoir de nous dire la révélation des paroles sur lesquelles nous t'interrogerons ? Ou qui Connaît la vertu des mots sur lesquels nous faisons des restions ? Il n'y a (plus) personne dans le monde de l'humanité qui puisse nous en dire la révélation, sinon tel seul qui connais tout et qui es parfait en tout[23] (en toute science). Car je n'interroge pas à la manière des hommes du monde, mais nous interrogeons selon la connaissance que tu nous as donnée des hauteurs[24] et d'après le type excellent d'interrogation que tu nous as enseigné.

Au point de vue scriptural, le plus grand des sept après le Joannès, c'est Philippe le bienheureux[25], nous l'avons dit bien souvent et nous le répétons. Nul ne pourrait intervenir plus souvent, et son esprit bout à chaque citation des Psaumes de David, à chaque révélation de Jésus. S'il se tait, c'est pour ne pas dénoncer les Écritures du Joannès sur le Royaume du monde. D'ailleurs il ne peut intervenir aussi souvent qu'il le voudrait, sa fonction étant comme autrefois d'écrire toutes les Paroles. Toâmin et Mathias ne viennent qu'après lui. Si leurs Écritures ne valent rien dans le Royaume qui n'est pas de ce monde, au moins demeurent-ils, avec Philippe, les trois témoins exigés par la Loi pour qu'une chose soit avérée. En tout ce qui touche au Royaume du monde, eux seuls sont recevables[26]. Point de Marc, point de Luc, pas même de Cérinthe.

 

Nonobstant les voiles allégoriques qu'il tire sur l'histoire, Valentin ne cache pas que le vrai nom de la mère de Bar-Jehoudda, c'est Salomé[27], et que Salomé, c'est Marie.

Dans toute la première partie de la Sagesse, Marie est privée de son surnom de Magdaléenne. On ne le lui a laissé que dans la seconde[28], comme s'il s'agissait d'un personnage différent ; mais toutes ces ruses ne servent qu'à mieux faire ressortir l'identité de Marie avec la Magdaléenne, et l'impertinence de l'Eglise qui accuse la mère de son juif d'avoir été la proie de sept esprits immondes. En effet, que Valentin appelle la mère de Joannès Marie ou Marie la Magdaléenne, Jésus lui fait toujours quelque compliment de ce genre : Courage, ô toi, pneumatique (spirituelle) et pure Marie[29], qui ne saurait convenir à une femme travaillée en son vivant de sept démons dont l'impureté est encore proverbiale aujourd'hui. Et il fait à propos de cette femme et de son fils ainé la déclaration que nous avons souvent reproduite : Tous les hommes qui auront reçu le Mystère de l'Ineffable seront co-régnants avec moi, ils seront assis à ma droite et à ma gauche en mon royaume... Mais Marie la Magdaléenne et Joannès le Vierge seront supérieurs à tous les disciples. S'il fallait une preuve que Marie Magdaléenne est identique à Marie dite la Vierge, et Joannès le même homme que Jésus, on la trouverait dans cette parole qui a disparu de tous les Évangiles[30]. Car, si par hasard il en est autrement, voici la Magdaléenne proclamée par Jésus lui-même supérieure à Marie, et — renversement complet de toutes les dispositions ecclésiastiques — ce n'est pas la Pierre qui tient les clefs du paradis, c'est le  Joannès !

Si Marie Magdaléenne n'était pas la même femme que Marie, mère du Joannès, il y avait une belle occasion de la distinguer de celle-ci, c'est de lui rendre son nom de Magdaléenne dans toute la partie où les disciples, dont elle est, font à Jésus la confession de leurs péchés et de leurs crimes[31]. Or, non seulement elle figure sous le simple nom de Marie dans toute cette scène, mais encore on n'y voit pas une seule fois Marie Magdaléenne, sur le dos de laquelle on pouvait tout rejeter à la faveur des sept démons dont l'Eglise veut qu'elle ait été tourmentée. Jehoudda le Gamaléen n'est jamais nommé, sinon une fois sous le nom de Joseph, mais il est présent dans sa femme qui l'appelle toujours mon homme de lumière.

Il résulte, en effet, de certains propos de Jésus que le nom de kabbale du Fils de homme est Ieou[32], connu sur terre sous le nom d'Adam-Eve. Dieu avait fait rentrer dans la lumière l'âme d'Ieou dont le corps seul, Adam-Eve, avait été victime de son péché. La Vierge, dans laquelle Adam a pris naissance[33], est le juge de son âme ainsi que de toutes les âmes pécheresses[34]. C'est elle qui a la faculté d'éprouver toute âme désireuse de rentrer dans la lumière du soleil. C'était la vraie mère et la vraie épouse d'Adam avant que Dieu ne le divisât et par cette division ne le livrât à Satan qui a agi ensuite sur sa partie féminine connue sous le nom d'Eve. Voilà pourquoi, ayant pris le rôle de la Vierge dans l'Apocalypse et dans les Évangiles, Marie est devenue dans l'Église, non seulement la mère, mais encore l'épouse de son fils. Voilà aussi pourquoi celui-ci est dit Ieou-Shanâ-os (Joannès) dans les Évangiles primitifs. Il était considéré par sa mère comme étant le signe (os) de l'an (shâna) d'Ieou (le Fils de Dieu), mais aussi d'Adam rentrant en grâce devant le Père[35].

Le mécanisme de la Nativité de Bar-Jehoudda sous le nom de Joannès pendant les six premiers mois de la grossesse de sa mère, et sous le nom de Jésus pendant les trois derniers mois, — c'est la Nativité selon Luc, — se trouve plusieurs fois expliqué par Valentin. Ce qui permet d'appeler Marie, mère de Jésus selon le monde, c'est qu'en sortant de cette vierge sous les espèces du Joannès, Jésus l'a purifiée, baptisée intérieurement du feu de l'Esprit-Saint, et rendue assimilable à la Vierge d'en haut, la Vierge qui brille aux Cieux. Ailleurs, dans cette même Sagesse, Jésus dit : Marie, ma mère selon la matière[36], toi en qui j'ai habité[37]. Dans Cérinthe, aux Noces de Kana, parlant a sa mère selon le monde, Jésus l'appelle : Femme, et originellement elle n'est que cela devant lui. La malheureuse est tellement impure, relativement aux hommes les plus impurs, que le revenant d'un de ses fils, Shehimon, et le revenant d'un de ses gendres, Cléopas, ne craignent pas, eux aussi, de l'appeler : Femme, ce qui est une indignité dans leur bouche, ni l'un ni l'autre n'étant demeuré vierge. Dans la Sagesse, le même Shehimon ne l'appelle-t-il pas dédaigneusement cette femme[38] et ne supporte-t-il pas difficilement qu'elle s'ingère de résoudre avant ses fils les questions que Jésus pose à la famille ? Ne le verrons-nous pas recommencer ce jeu, dangereux pour sa piété filiale et pour sa galanterie, à ce point que Marie dira : Mon Seigneur, mon esprit est intelligent en tout temps, (à cause de son homme de lumière), de sorte que je peux m'avancer chaque fois pour dire l'explication des paroles, mais je crains [Pierre] parce qu'il m'a menacée et qu'il hait notre sexe[39]. Mais ce n'est pas à Shehimon qu'elle en avait dans la Sagesse originale, c'est à Joannès. Car qui donc avait menacé Salomé le premier ? Et qui haïssait le sexe féminin, sinon ce Joannès qui avait voulu en éviter la souillure pour se sauver lui-même du péché que sa mère lui avait transmis ?

 

Malgré toutes ces insolences, si offensantes pour notre délicatesse, pourquoi sera-t-elle proclamée bienheureuse depuis l'extrémité de la terre jusqu'à l'autre extrémité ? C'est, lui dit Jésus, parce que le témoignage du Premier mystère[40] a habité en toi. Nous avons donné jadis, d'après Jésus lui-même[41], la scène de la coïncidence astrale de l'Esprit de Jésus avec le corps de Joannès[42], ce corps, qui a habité en ton corps matériel, dit-il à Marie, et a baptisé les hommes afin de les rendre étrangers au péché[43]. Et dans la Sagesse primitive, c'est Joannès même qui demandait à Jésus la permission d'expliquer les signes figuratifs de son propre horoscope de Nativité[44].

 

De même, c'est de Marie que nous tenons la genèse allégorique du Grand Aigle qui emporta Joannès en Egypte après sa naissance[45], et des aigles qui se rassembleront où sera le corps du Fils de l'homme quand viendra la fin des temps[46]. Grands ou petits, selon qu'ils marquent les millénaires ou simplement les jubilés, ces aigles sont annonciateurs du renouvellement des périodes, et c'est à propos de cette faculté que le Seigneur dit à David dans les Psaumes : Ta petitesse sera renouvelée comme celle d'un aigle. Car, dit Marie, l'habitation de l'aigle est dans les hauteurs, et les Invisibles sont aussi dans les hauteurs, c'est-à-dire que Sophia[47] reviendra lumineuse comme les Invisibles, ainsi qu'elle était au commencement. On ne donnait pas le baptême de feu lorsqu'on a de tels aigles dans sa kabbale.

Au milieu des éloges qu'il donne à Marie çà et là, Jésus n'oublie jamais de lui rappeler qu'elle n'est sa mère que pour les goym aux profondes marsupies. Marie, de son côté, ne l'oublie pas : Mon fils selon le monde, lui dit-elle, mon Dieu et mon Sauveur selon le Très-Haut[48]. Elle a beau avoir pris la figure d'une des Vierges périodiques, celle qui accoucha sous le Capricorne de 738, voici comment Jésus la traite : Tu as pris forme dans Barbilô[49] selon la matière ; les ténèbres ont existé à cause de toi[50], et c'est de toi encore qu'est sorti le corps hylique[51] que j'habite (dans la fable faite sur la donnée de l'Apocalypse), et que j'ai purifié — par l'Esprit-Saint que j'y ai mis, et auquel Joannès n'a pas dérogé charnellement, étant demeuré vierge, pur de la souillure féminine.

Comme dans les Évangiles, particulièrement celui de Cérinthe, il arrive souvent que les scribes primitifs distinguent entre Jésus-Verbe et le jésus-baptiseur, au point de les opposer l'un à l'autre dans la même phrase. Nous citerons celle-ci, dans un dialogue entre Marie-Magdaléenne et Jésus : Lorsque Jésus eut fini de dire ces paroles[52], le sauveur (c'est-à-dire le fils réel de Marie) admira grandement les paroles qu'elle (sa mère) avait dites, car elle était devenue tout entière Esprit Pur[53].

 

Dans le mythe valentinien, comme dans la fable évangélique tirée de l'Apocalypse, Jésus est la personnification même du Messie ou Fils de Dieu préexistant au christ davidique et transfigurant celui-ci par le baptême de feu ou Esprit-Saint au moment fixé par la kabbale juive. Distincts au point de vue de la substance, Ils ne devaient faire qu'un après la transfiguration de Bar-Jehoudda sous le quatrième signe ou Ânes. C'est la le grand mystère des Juifs, Jésus est ce mystère dans les Ecritures. Valentin éclaire d'un jour singulier ce vieux mythe solaire dont Bar-Jehoudda disait être le corps par prédestination du Père. D'où le nom de Bar-Abbas qu'il s'était donné, que ses dupes lui ont jeté à la face après sa juste déconfiture et qui est son véritable nom de kabbale. Dans toute sa seconde diaconie[54], Jésus est dit constamment le Premier mystère, et il en a joué le rôle sous les espèces de Bar-Jehoudda pendant tout le temps qu'il a été dans le monde de l'humanité[55], c'est-à-dire pendant toute sa première diaconie jusqu'au Verseau de 788. Nous avons donc eu tort de croire que, si les Ânes fussent venus, Bar-Jehoudda n'aurait été que le lieutenant du Fils de l'homme dans le Royaume, il aurait été lui-même ce Fils de l'homme par transfiguration, et il eût régné seul sur la terre pendant mille ans jusqu'à la venue de l'Abbas, dans le sein duquel il serait définitivement rentré. Là encore, an lieu de nous laisser égarer par le mirage oriental, nous aurions dû aller tout droit à la clarté latine dont Tacite et Suétone sont les organes : c'est par lui, comme ils disent, que les Juifs devaient prendre possession des choses.

C'est peut-être dans la Sagesse que se trouve le mieux expliqué le travail par lequel l'Église a pu incorporer finalement Joannès au Verbe lui-même. Cette explication ne saurait être de Valentin qui faisait trop bien la différence. Dans Cérinthe Jésus convient modestement que son Père est au-dessus de lui et plus grand que lui. Dans la Sagesse, un scribe plus ou moins ecclésiastique fait l'auteur de l'Apocalypse égal à Jésus, — le Saint-Siège dira : consubstantiel et coéternel à Dieu.

Voici le passage[56], et — comble d'inconscience — il est dans la bouche de Jésus lui-même !

Bienheureux est celui qui a amené les mystères (du ciel) à l'extérieur (sur la terre).

C'est un dieu, celui qui a trouvé les paroles des rayera du second emplacement du milieu (le second ciel occupé par le Fils de l'homme dans l'Apocalypse).

C'est un sauveur et un infini, celui qui a trouvé les paroles du troisième emplacement qui est à l'intérieur (le troisième ciel occupé par le Père à la ressemblance de colombe et au-dessus duquel les Valentiniens placent l'Invisible).

Il est excellent, le Plérôme (l'accomplissement de ces mystères), il est agréable à ceux qui sont dans le troisième emplacement (le Père, les vingt-quatre Anciens des jours et leur suite), car le mystère où ils sont et où ils se maintiennent, il (Joannès) l'a reçu.

C'est pourquoi il leur est égal, celui qui a trouvé les paroles de ces mystères.

En vérité je vous le dis, celui qui a trouvé les paroles de ces mystères, cet homme est lui-même le Premier (le Premier mystère, l'Alpha et l'Oméga).

En vérité il lui est égal, à cause de ces paroles et de ces mystères (il lui est verbalement égal, égal comme Verbe).

C'est pourquoi celui qui a trouvé les paroles de ces mystères est égal au Premier (mystère).

 

III. — OÙ JÉSUS RENIE LE ZAKHU[57].

 

La Sagesse se divise en trois parties dans lesquelles nous avons cru reconnaître autrefois deux écrits distincts[58]. C'est une erreur qu'expliquent les coupures dont elle a été l'objet et qui en rendent le plan presque insaisissable, même après une étude attentive.

Chacune de ces parties constitue une diaconie ou ministère de Jésus. Joannès comptait trois temps ou signes avant l'avènement du Royaume. Jésus demande trois périodes d'instruction pour le corriger de son ignorance, et lui faire des Révélations plus conformes aux desseins de l'Abbas dont il s'était dit le bar.

On parle souvent du système de Valentin. Mathématiquement le Jésus de Valentin n'a d'autre système que celui du Joannès, auquel il fait de fréquents emprunts et de nombreuses allusions. Et je suis convaincu qu'avant les sophistications de l'Église il s'en rapprochait plus étroitement encore. Comme Joannès il reconnait trois cieux superposés, mais il diffère de lui sur l'ordre des mystères et la composition des puissances contenues dans ces trois cieux ou emplacements. Au-dessus du Père à la ressemblance de colombe qui occupe le troisième ciel dans l'Apocalypse, et des vingt-quatre Vieillards dont Joannès l'a vu entouré, quand il a été transporté à ce troisième étage de la machine céleste, il met un Invisible entouré de trois triplement Puissants ou Tridynames, qui influent sur les trois ciels, et de vingt-quatre puissances, invisibles elles aussi, d'où sont émanés les vingt-quatre Anciens des jours de vingt-quatre heures de lumière ininterrompue. Il en résulte que le Père et son Fils, sans changer de place dans la machine céleste, sont comme surmontés d'un comble que Joannès n'a pas vii, s'étant arrêté au troisième ciel. Il a ignoré quantité de choses dans la hiérarchie des puissances qui agissent sur les sept planètes et sur les douze signes ; le Verbe ne les lui avait point dites, il lui avait même caché qu'au-dessus des Gémeaux, signe précurseur des Ânes, il y avait le Sauveur des Gémeaux, lequel sans doute les avait empêchés de tomber en 789 avec les autres étoiles. Cet Invisible avec ses diverses émanations, — je vous en épargne la liste, vous deviendriez fous, — Joannès ne les avait pas vus ; et comme les autres disciples de son père terrestre il se figurait bonnement que son Père céleste était le Plérôme, c'est-à-dire commencement et fin de tout. Erreur en deçà et au delà : Joannès n'avait pas vu l'Invisible !

L'incarnation de Jésus en Joannès pendant cinquante eue est ce qu'il appelle sa première diaconie, son premier ministère[59]. Jadis, en 738, il avait eu beaucoup de peine à traverser le royaume de celui que Joannès appelle l'Ancien Serpent ou Satan (sur la terre la Bête Capricorne, Auguste), et Valentin, Adamas (sur la terre Adrien). Ce tyran et ceux qui s'opposent aux douze Æons ont résisté au premier ministère de Jésus

Pour être rois plus longtemps, car ils savaient bien que, s'il traversait leur ciel, c'était pour abréger de mille ans leur empire par le rachat du douzième Æon[60], alias Æon-Zib. C'est pourquoi je vous ai dit[61] autrefois (dans les Paroles du Rabbi, et même dans l'Évangile) : J'ai diminué les temps à cause de mes élus, car il n'y aurait pas eu une âme qui eût pu se sauver si je n'avais pas diminué les temps et les époques. En effet il n'aurait pas révélé le baptême au Joannès, et Satan aurait eu mille ans de plus pour achever la perte des âmes[62].

Sa première diaconie finit avec le Capricorne de 788, cinquante ans et vingt jours après la naissance du Joannès, cinquante-neuf jours avant sa crucifixion.

Fils du Père à la ressemblance de colombe dans l'Apocalypse, il est au courant de tous les mystères du ciel, mais pour les révéler aux disciples, il faut absolument qu'il sorte de la maison dans laquelle il est venu en 738. Il quitte donc la terre avec le signe dans lequel est né Joannès[63]. Ce signe lui a été si fatal qu'il ne peut rester davantage sous son influence. Donc le dernier jour de la lune du mois de thébet, ce qu'on doit entendre du 14 janvier 788, il s'évade de la maison natale[64]. Cette façon d'agir ne peut étonner que les exégètes et les herméneutes. Pour nous, nous trouvons indispensable que Jésus s'échappe du Capricorne dès qu'il le peut ; nous trouvons même fâcheux qu'il soit douze fois par an le prisonnier des signes. Cela lui enlève beaucoup de liberté dans les mouvements. Il s'en va faire un petit tour au ciel ; car s'il reste dans le corps de Joannès jusqu'à sa crucifixion, comment pourra-t-il revenir sur les révélations qu'il a renfermées en celui-ci cinquante ans auparavant ? D'abord il continuera à vivre dans les erreurs de sa première diaconie, puis il sera sacré roi-christ, il assassinera Ananias et sa femme, il débauchera les Bathanéens du service d'Antipas, il aidera les Arabes à précipiter deux mille pourceaux gaulois dans le lac de Génésareth, il sera condamné à mort pour vol, meurtre et trahison, affiché pendant quarante jours, rossé au Sôrtaba, arrêté par Saül à Lydda, livré aux Romains et crucifie par Pilatus, ce qui est bon pour bar-Jehoudda surnommé bar-Abbas.

En tout cas et sous aucun prétexte il ne veut rester Plus longtemps dans un signe dont Joannès se promettait tant de choses, et qui a été si favorable à l'usurpateur Tibère, successeur de la Bête de 738.

Son retour au ciel est marqué par des ébranlements sur la terre et dans les hauteurs[65], et il semble aux disciples que le monde va être dissous[66]. Cette commotion dure toute la dernière nuit du mois de thébet, depuis neuf heures du soir jusqu'au lendemain trois heures, l'accouchement de Salomé ayant eu lieu jadis entre ces deux veilles. Mais joyeux de revoir leur Seigneur qui depuis cinquante ans occupe le corps d'un homme, les anges et les archanges entonnent sans discontinuation l'hymne que le Joannès entend dans l'Apocalypse et que les bergers de Luc perçoivent très distinctement pendant la nuit de la Nativité. Cette hymne jubilaire, tous les disciples l'entendent à leur tour jusqu'à trois heures du matin[67].

A cette heure même, Jésus redescend environné d'une gloire qui ressemble à celle dans laquelle il est parti la veille, sinon qu'elle est de trois sortes, chacune allant crescendo de la terre au ciel. Les disciples sont effrayés par cette lumière et aussi par les secousses sismiques, ils ont peur que Jésus ne les détruise avec le monde, mais Jésus leur parle comme dans l'Évangile : C'est moi, ne craignez point[68]. Ils le prient donc de se retirer de cette gloire, afin qu'ils puissent se tenir un peu mieux que ne se tiendront les sergents du temple au mont des Oliviers. Jésus les ayant exaucés, ils vont à ses pieds, l'adorent et lui demandent pour quelle raison il les a quittés la veille.

S'il répondait en bon astrologue, il dirait que c'est uniquement pour échapper à la mauvaise influence du Capricorne, de même que, s'il redescend sous le Zibdéos (Verseau) dont le père de Joannès joue le personnage et porte le nom dans les Synoptisés, c'est parce que dans l'Apocalypse il l'a converti en un signe favorable, le Verseau étant l'Ieou-Shanâ-os, le signe précurseur de l'Æon-Zib annoncé pour le 15 nisan suivant[69].

D'ailleurs il est une autre raison pour laquelle il a fait cette rapide excursion. Les disciples ne possèdent point le Saint Esprit, c'est-à-dire la connaissance des choses du ciel. Il n'y avait pas d'Esprit-Saint pendant la période apostolique, dit honnêtement Cérinthe. En effet, selon cet évangéliste, Jésus ne le souffle aux disciples qu'après la translation du corps de bar-Jehoudda à Machéron. Encore l'auteur des Actes tient-il ce Saint-Esprit pour inopérant, puisqu'il l'envoie sous la forme de langues de feu cinquante jours après la pâque[70]. Dans la Sagesse Jésus va le chercher le 14 janvier et le ramène le lendemain.

 

IV. — OÙ JÉSUS RENIE LE ZIB[71] ET LE THARTHAK[72].

 

Dans l'Esprit-Saint est comprise la définition de ce nouveau nom de Jésus qu'il rapporte du ciel, car s'il est né Millénariste à la façon de Joannès, il redescend pneumatique, c'est à dire Spirituel, Intellectuel, avec un programme tout nouveau. Il est dit Jésus, c'est-à-dire Sauveur, parce que, dès le 15 janvier 788, il a pris le Monde en miséricorde et qu'il a renoncé à son intention de l'anéantir. Il a trouvé les Puissances qu'invoquait ordinairement Joannès disposées à détruire le Inonde par tiers, comme il est dit dans l'Apocalypse, mais il a enlevé le tiers de leur vertu à celles de gauche, le tiers de leur vertu à celles de droite, il a fait tourner les unes de gauche à droite, les autres de droite à gauche, chacune d'elles pendant six mois, de sorte qu'il a rétabli par avance l'équilibre qui devait se rompre à la pâque suivante. (Der lüstig Iésus !) Par conséquent tous les horoscopes qui le concernent sont faux. Que celui qui a des oreilles pour entendre entende, dit-il aux disciples ! Et comme parmi les disciples il y a Marie, ils entendent parfaitement qu'il faut renoncer à leurs calculs dans l'intérêt du baptême, unique héritage du Joannès.

D'en haut il leur rapporte la confirmation d'une bonne nouvelle dont ils se doutent bien un peu, à savoir qu'ils ont en eux de la divinité. Et puisqu'ils lui demandent comment il a pu exécuter cette ascension, il leur explique qu'il a deux vêtements plus ou moins lumineux, l'un qu'il porte avec lui pour venir sur la terre, l'autre qui reste là-haut et qu'on lui envoie pour traverser le ciel passe-partout dont ils out été si éblouis à la 'montée et à la descente. Ils doivent bien comprendre qu'il ne peut circuler en Judée avec son vêtement de ciel sans quelque danger de combustion pour les habitants. Ils n'insistent donc pas.

En vain les puissances qui influent sur les Eons, et le grand tyran Adamas (c'est le Satan de l'affaire), ont-elles tenté de s'opposer au passage de Jésus qui avait revêtu son quatrième vêtement, d'où s'échappaient des rayons quarante-neuf fois supérieurs les uns des autres[73], il les a divisées contre elles-mêmes, rendues par là semblables aux morts de la terre, et privées du tiers de leur vertu, afin que les millénaristes ne puissent plus les invoquer dans leur magie. Et il ajoute : Que celui qui a des oreilles pour entendre entende !

Cet avertissement plonge Marie dans des réflexions cruelles, et pendant une heure elle regarde en l'air. C'est la condamnation de son premier-né que Jésus vient de prononcer, et de tous ceux qui à sa suite prédisaient la destruction du monde par tiers[74]. Ce sont les anges transgresseurs, c'est-à-dire les anges de Satan, qui leur ont enseigné ces pratiques[75]. Marie est forcée de convenir qu'Isaïe avait annoncé le sort de ces prophètes de malheur, lorsqu'il a dit des devins d'Égypte : Ô Égypte, où sont tes divinateurs et tes horoscopes et ceux qui incantent par la terre et ceux qui incantent par le ventre ?[76] Ceux qui, à leur imitation, invoqueront le douzième Æon, l'Æon-Zib, le Baal-Zib-Baal de l'Évangile[77], ceux-là perdront leur temps, puisque cet Æon est un de ceux qui ont été privés du tiers de leur alliance ; mais ceux qui connaissent le mystère du treizième Æon[78], ceux-là pourront accomplir en toute tranquillité les mystères de la magie contenue dans cet Æon, parce que, par ordre du Père, Jésus ne lui a rien enlevé de sa puissance originelle.

Cette licence est bien tardive ; Joannès et sa famille n'ont pas connu cet Æon-là, qui est une rallonge valentinienne ; et Philippe l'Évangéliste, qui écrit au fur et à mesure tout ce que dit Jésus, demande des explications sur le changement qu'il a fait subir à la vertu des puissances Æoniennes. Jésus répond que c'est dans l'intérêt même des disciples, car s'il eût laissé faire ces puissances, elles les auraient perdus, le nombre des âmes à sauver étant beaucoup plus considérable que n'avait dit le Joannès en son Apocalypse[79]. Toutefois il est bien vrai que l'entrée dans le douzième Æon, le Royaume du monde, devait s'accomplir en trois temps signifiés par l'Agneau, le Taureau et les Gémeaux. Le Joannès disait de la Judée que c'était la Terre de lumière[80], et en effet, sous son règne, c'est l'Agneau qui devait l'éclairer tout entière. Même après avoir enseigné que le siège de Royaume est dans la lumière du ciel invisible, Jésus respecte ce dispositif et dit à Sophia : Quand tu verras la porte du Trésor de la grande lumière[81] — elle s'ouvre sur le treizième Æon, à gauche (sic), — quand on ouvrira cette porte, eh bien ! les trois temps seront accomplis[82].

 

La situation des Juifs a changé en bas dans la mesure où elle a changé en haut. Jésus, lui aussi, regrette la Jérusalem d'or et le beau Jardin où l'accoupleuse de femmes[83], elle-même réaccouplée, n'aurait plus vu d'enfants ! Mais tandis que les jehouddolâtres purs restent fidèles à leur idéal de vengeance et d'extermination, et le dressent dans leur esprit malade contre tout ce qui n'est pas juif et même surjuif, les Valentiniens professent timidement que, dispersés maintenant hors de Judée par le fait des circonstances, il n'est peut-être Pas très bon que Dieu détruise les terres païennes. En tout cas, ce n'est pas le moment, puisqu'ils en occupent une partie.

Jésus n'est plus le Verbe-Épée, fléau des païens et sauveur des seuls Juifs, le bar-Abbas que Bar-Jehoudda disait être. Sans doute il en retient encore quelque chose, niais les Valentiniens lui arrachent le feu de la bouche et l'épée des mains. Il n'y aura pas destruction partielle, mais dissolution totale quand tous les hommes auront pu gagner le salut par leurs œuvres z Jésus leur en indique les moyens et leur en laisse le temps, contrairement au Baptiseur qui ne leur donnait aucun répit.

C'est un tout autre Verbe que celui de l'Apocalypse, il ne détruit pas, il ne juge pas, il ne moissonne pas, il éclaire et fait miséricorde. Il se rapproche de ce qu'il est dans le Quatrième Évangile démillénarisé. Il rapporte du ciel des révélations autres que celles dont il a parlé avant son sacre et sa crucifixion selon le monde. Non pas sur le fond ! Tout ce qu'il a dit de la divinité des douze tribus, il le maintient. Elles sont le salut du monde entier[84]. Ce que Cérinthe a fait dire au Joannès : Je ne suis pas le Christ, est une vérité postérieure à la crucifixion et démontrée par la crucifixion même. Mais si Joannès n'a pas été le Christ comme il l'entendait, si l'Abbas ne lui a pas passé les trois vêtements dans lesquels il devait s'acheminer vers les Ânes[85], il n'en demeure pas moins, quoiqu'ils (les membres du Sanhédrin) lui aient fait tout ce qu'ils ont voulu[86], l'Élie qui devait venir, prévenir, et après lequel personne ne viendra ni ne préviendra. Pour es qui est de la Nativité qu'on trouve aujourd'hui dans Lee, et qui est incontestablement la plus ancienne et la plus conforme à la kabbale jehouddique, Jésus n'a rien à reprendre. Marie est bien le corps terrestre de l'Éloï-Schabed, qui est la mère du Joannès, et, dit-il celle qu'on nomme ma mère selon le corps matériel[87]. Joannès avait raison de croire, après Hermès Trismégiste[88], que la lumière du soleil en sa vraie forme[89] est dans le lieu de la Vierge[90], et son père avait bien fait d'associer ce signe, sous les espèces de Marie, à l'horoscope de son premier-né. Mais, en dehors de cet horoscope, plus de thèmes du monde. Le Verbe était en colère au temps du Joannès, mais maintenant il pitié, il a brouillé là-haut le jeu des magiciens, leurs quatre angles, leurs trois angles, leurs huit formes, leurs figures et le reste.

Cela intrigue beaucoup Philippe, qui écrit au fur et mesure toutes les paroles de Jésus. Ce sont en effet tous les calculs de sa famille que Valentin condamne ici. As-tu fait cela pour le salut du monde, oui ou non ? demande Philippe à Jésus. Jésus répond qu'il a fait cela pour le salut des âmes, afin que, renonçant à l'héritage terrestre qu'ils s'étaient promis, ses frères et lui se rendent dignes de l'héritage d'en haut, réservé par Prédestination à la famille royale de Juda. C'est l'abandon complet de l'ancien programme. Il résulte et des demandes des disciples et des réponses de Jésus que tons les héros de l'Évangile, Marie, Joannès, Pierre, Philippe, André, Jacques, Toâmin, Matthieu (en remplacement de Ménahem) se trouvent en face d'une Révélation qui change toutes les idées que ces personnages historiques avaient professées pendant leur vie sur le Royaume des Juifs. Sophia, dans son hymne de repentance, leur révèle qu'il sera préparé une ville de lumière Où, sauvées de toute matière corruptible, habiteront leurs âmes. Et ce sera l'héritage. Et il ne viendra pas de Christ. Et des cieux il ne descendra pas de Ville Sainte sous le nom de Nazireth. Toutes les Apocalypses, toutes les Paroles du Rabbi, toutes les Explications de Papias d'Hiérapolis, tous les Évangiles millénaristes sont des songes de malade ou des hallucinations d'orgueilleux.

 

V. — L'HISTOIRE DE SOPHIA AVEC LES COMMENTAIRES DE QUELQUES INTÉRESSÉS.

 

La seconde diaconie de Jésus commence avec le 15 janvier 788. Elle dure trois mois que Pistis Sophia emploie à raconter ses malheurs depuis l'origine des temps, jusqu'à ce qu'Adrien lui enlève son nom terrestre, Jérusalem, pour le remplacer par l'abominable nom d'Ælia Capitolina. Nous avons donné l'explication songe maire de ses treize repentances au point de vue de l'histoire générale[91]. Il nous reste à en examiner quelques-unes à un point de vue plus spécial : l'histoire particulière de la famille jehouddique.

Au cours de cette diaconie Jésus fait largement profiter les disciples de l'expérience qu'il a des mondes invisibles, il en enrichit la théologie et encore plus la démonologie, il tient académie sous les Oliviers sans qu'aucun bruit de la ville parvienne jusqu'à lui. En ne mot il ne lit pas les journaux. S'il les lisait, il trouverait l'affaire bar-Abbas dans la chronique judiciaire, elle est du 5 adar[92]. Sophia, de son côté, se tient dans des considérations qu'il faut examiner de très près pour en dégager le sens réel.

A l'origine, avant les temps, Sophia était la conjointe de l'Invisible, mais elle a été éloignée de lui par celui des trois Tridynames qui influe sur le ciel où est Satan et de là sur le chaos. (L'Invisible est bien mal entouré). La demeure terrestre de Sophia, c'est Jérusalem, où de nombreux ennemis l'ont enserrée et prives de sa lumière, pour s'être alliée avec une puissance à face de Lion dans laquelle il n'est pas difficile de voir le signe de la tribu de Juda, voire celui de Jehoudda le Gamaléen dans l'Apocalypse ; et ce mariage avec le visible ne lui a pas réussi. Quand Jésus est redescendu[93], il l'a rencontrée cherchant à revenir avec son conjoint céleste par les hauteurs du treizième Æon. Au lieu de la Nazireth d'or qui devait remplacer la Jérusalem de pierre, elle se contenterait maintenant d'une ville spirituelle où habiteraient les âmes sauvées. Elle reconnaît avoir grandement péché dans le Lion[94] de Juda, et elle dit sa repentance, mais en phrases tortueuses et obscures comme il convient à une Foi qui a égaré sa Sagesse.

Pour achever cette confession, Marie intervient et récite la majeure partie du psaume de David que nous avons cité dans les Lamentations de Jésus, et par où, beaucoup moins résignée que Sophia, elle affirme sa foi dans la reconstruction des villes de Judée da-truites par Hadrien. Institutrice de ses neuf enfants après la mort de son homme de lumière, Marie donne le signal de toutes les interprétations qu'ils font tour à tour des treize repentances de Sophia, mais ce n'est pas sans quelque protestation de Pierre qui la trouve trop bien avec Jésus. Le but de ces repentances où Sophia joue le rôle de la kabbale davidique est d'amener toute la famille de Jehoudda à implorer la miséricorde de Jésus, d'abord pour toutes les erreurs qu'elle a semées, ensuite pour tous les crimes dont elle s'est souillée.

 

La quatrième repentance qui répond au signe des Ânes est particulièrement curieuse par cette affirmation de Sophia : Le temps est venu où tu as décrété que tu me visiterais[95], afin que les sauveurs[96] cherchent la vertu qui est dans mon âme (car le nombre est parfait[97]), et qu'ils en sauvent aussi la matière. Ce n'est peut-être pas très clair pour un Français du Vingtième siècle, mais c'est très clair pour le Juif qui attendait le Royaume sous le quatrième signe en l'an. Jubilaire 789, et qui avait annoncé que tel était le terme ou nombre fixé aux élus par le Verbe de Dieu.

Aussi Jésus ayant dit : Que celui qui comprend comprenne ! Joannès immédiatement s'avance, adore-la Poitrine de Jésus, comme au banquet de rémission duos Cérinthe, et raconte sa propre fin d'après le cent unième psaume de David :

Ô Seigneur, écoute ma prière et que ma voix aille jusqu'à toi ! Ne détourne pas ton Visage de moi ; tends ton oreille vers moi au jour où je serai pressuré[98]. Hâte-toi, écoute-moi au jour-.le m'écrierai vers toi, car mes jours ont disparu comme une fumée[99] et mes os sont cuits comme une pierre[100], puisque j'ai été fauché comme l'herbe, et mon cœur s'est desséché parce que j'ai oublié de manger mon pain[101]. A cause du cri de mon gémissement, mon ossement a adhéré à ma chair. Je suis devenu comme le pélican dans le désert[102], je suis devenu comme le hibou dans une maison : j'ai passé toute la nuit[103] en veille, je suis devenu comme le passereau seul sur un toit. Toute la journée mes ennemis m'ont traité avec dérision[104] et ceux qui m'honoraient juraient contre moi[105], car j'ai mangé de la cendre au lieu de pain, j'ai mélangé de mes larmes ce que j'allais boire en présence de ta colère et de ton courroux, car après m'avoir élevé[106] tu m'as renversé par terre. Mes jours ont baissé comme l'ombre et je me suis desséché comme l'herbe ; mais toi, Seigneur, tu es éternellement et ta mémoire s'étend de génération en génération. Lève-toi donc, sois miséricordieux pour Sion, car ton temps est venu[107]. Le Seigneur a regardé le ciel et la terre pour entendre les soupirs de ceux qui sont dans les liens, pour délier les enfants de ceux que l'on a mis à mort[108], pour dire le nom du Seigneur dans Sion[109] et sa bénédiction dans Jérusalem. Telle est, mon Seigneur, l'explication du mystère de la quatrième Repentance dite par Sophia. Et lorsque Joannès a fini, Jésus lui dit : Courage, Joannès qui commanderas dans le Royaume de la lumière !

Le nombre écrit par Philippe, Toâmin et Mathias d'après celui qu'avait fixé l'homme de lumière a cessé d'être valable. C'est à eux, à Philippe surtout, qu'échoit l'honneur d'écrire les Paroles nouvelles, ils sont autorisés à prendre des notes pendant mille ans. Néanmoins Jésus laisse à Philippe le soin d'expliquer la Cinquième repentance par le quarante-septième psaume[110], où Joannès n'est guère mieux traité par ses contemporains que dans le quatrième, car son âme (celle de Joannès) est pleine de mal, sa vie s'est approchée de l'Enfer, on l'a compté parmi ceux qui descendent dans le puits[111]. Il a été comme un homme qui n'a point de secours, parmi les morts, les blessés, 'es étendus dormant dans les tombeaux[112]. On l'a laissé dans le puits, en bas, dans les ténèbres et l'ombre de la mort. Ceux qui le connaissaient se sont éloignés de lui, ils l'ont regardé comme une abomination[113]. Et Philippe est dit le bien-aimé pour avoir ainsi appliqué le Psaume à son frère aîné.

S'il était encore besoin de démontrer que le Joannès n'a pas été décapité par Antipas, mais crucifié par Pilatus, cette description du Guol-golta pendant et après les exécutions suffirait à le prouver.

Toâmin ne cache point qu'il soit le frère de tous ceux qui ont parlé jusqu'ici, à savoir : Joannès, Pierre, Philippe et André (Jacob junior). Il a supporté qu'ils expliquassent les six premières repentances ; mais il a du zèle aussi et de l'esprit, il réclame son tour pour expliquer la septième par le vingt-quatrième psaume. Aujourd'hui c'est Mathias qui explique la huitième par le huitième psaume, il est venu remplacer Ménahem que désigne surabondamment la ressemblance de sa fin avec celle de son frère aîné : Mon œil, dit-il, s'est troublé dans la colère, ainsi que mon cœur, car mes années se sont écoulées dans la tristesse du cœur et ma vie s'est écoulée dans le gémissement[114]. Je suis devenu un sujet de dérision pour tous mes ennemis et pour tous ceux qui s'approchaient de moi[115] ; et tous ceux qui m'ont vu se sont enfuis loin de moi, ils m'ont oublié dans leur cœur comme un cadavre[116], et j'ai été comme un vase qu'on a perdu, car j'ai entendu la malédiction des foules qui m'entouraient[117]. Ne fais pas que je rougisse, car j'ai crié vers toi !

Après avoir baisé la poitrine de Jésus, Jacques senior explique la neuvième repentance par le trente-quatrième psaume.

Pierre explique la dixième par le cent-dix-neuvième psaume, où il constate qu'il a été longtemps loin de son pays[118], et victime de gens parlant la langue perfide — le grec et le latin de Saül et de Tibère Alexandre qui l'ont fait crucifier — : Malheur à moi, dit-il, parce que mon habitation est éloignée, j'ai habité dans les demeures de Cédar, mon existence[119] a été étrangère dans une foule de lieux.

Salomé junior, en Évangile Maria Cléopas, explique la onzième repentance par le psaume cinquante et unième.

André explique la douzième par le psaume cent huitième. Son interprétation est naturellement une malédiction en règle contre Saül, son bourreau, et les hérodiens. Nous la reproduisons tout entière ; c'est le tableau de son supplice, il est aussi fidèle que peut l'être l'application d'une vieille prophétie à un fait historique récent :

Ô Dieu, ne ferme pas ma bouche à ma bénédiction, car la bouche du pécheur et du perfide (Saül) s'est ouverte contre Moi ; ils ont parlé contre moi avec une langue perfide et ils m'ont entouré dans des paroles de haine. Ils ont combattu Contre moi sans cause ; au lieu de m'aimer, ils m'ont calomnié[120]. Et moi je priais[121]. Ils ont établi contre moi des maux au lieu de biens, et la haine au lieu de mon amour. Etablis un pécheur sur lui (Saül) et que le diable le tienne sa droite ! Si on le juge, qu'il sorte coupable, que sa prière soit comme un péché, que ses jours soient affaiblis et qu'un autre reçoive sa fonction ![122] Que ses enfants soient orphelins, et que sa femme soit veuve ![123] Qu'on incline la tête à ses enfants[124], qu'ils soient transportés[125] et qu'ils mendient, qu'on les jette hors de leur maison ![126] Que le créancier regarde tout ce qui est à lui et que des étrangers ravissent toutes ses souffrances ! Qu'il n'y ait personne pour lui donner la main et qu'il n'y ait pas de miséricordieux pour ses orphelins ! Qu'on efface ses enfants, et qu'on efface son nom dans une même génération[127] ! Qu'on se rappelle le péché de ses pères[128] en présence du Seigneur et qu'on n'efface pas l'iniquité de sa mère ![129] Qu'ils soient en tout temps en présence du Seigneur ! Qu'on perde son souvenir sur la terre, parce qu'il n'a pas pensé à faire miséricorde, qu'il a poursuivi un homme pauvre et indigent, qu'il a poursuivi un affligé pour le mettre à mort ![130] Il a aimé la malédiction, qu'elle tombe sur lui ! Il n'a point voulu la bénédiction, qu'elle reste éloignée de lui ! Il a revêtu le malédiction tomme une tunique et elle est allée dans sa chair comme une eau et comme une huile en ses os. Qu'elle soit pour lui comme un vêtement qu'il revêtira et comme une ceinture qu'il ceindra en tout temps ![131] C'est là l'œuvre de ceux qui calomnient près du Seigneur et qui disent des choses injustes contre mon âme. Mais toi, Seigneur, Seigneur, aie pitié de moi à cause de ton nom[132] ; sauve-moi, carie suis un pauvre et un indigent. Mon cœur s'est troublé en mon intérieur, on m'a enlevé comme une ombre qui décline et on m'a épouvanté comme des sauterelles. Mes Pieds sont devenus faibles dans le jeûne, et ma chair s'est changée à cause de l'huile[133]. Et moi, je suis devenu pour eux un sujet de dérision ; ils m'ont vu et ont branlé leur tête. Secours-moi. Seigneur Dieu, et sauve-moi selon ta miséricorde ! Qu'ils sachent que c'est ta main, Seigneur ![134]

Après cela je demande au Saint-Siège, aux exégètes et aux herméneutes si Saül s'est converti sur le chemin de Damas, s'il s'est mis à prêcher bar-Abbas parmi les nations et s'il a versé son sang à Rome, le même .four que Shehimon dit la Pierre ? Et certain de n'avoir aucune réponse, je passe outre, le front courbé sous la malédiction de l'église. Il est vrai que les exégètes peuvent invoquer contre moi l'interpolation qu'on a mis plus loin dans la bouche de Marie, mais j'en appelle à la propre mère du lapidé ! Dans ce passage scandaleux, Marie se permet de citer le bien-aimé frère Paul par la bouche de qui Jésus a autrefois dit : Donnez le cens à ceux qui perçoivent le cens ; donnez la crainte à ceux qui sont dignes de la crainte ; donnez le tribut à ceux qui perçoivent le tribut ; donnez l'honneur à celui qui est digne de l'honneur ; donnez la glorification à celui qui est digne de la glorification, et ne livrez rien contre vous[135]. Le bien-aimé frère Paul ! L'Épître aux Romains ! Marie est beaucoup plus instruite que tous les disciples, elle l'est même plus que Valentin ! Elle sait des choses que n'a pas sues Ménahem mort quelque quinze ans après elle. En tout cas — et ceci est remarquable de la part de l'interpolateur, — elle n'ose citer ni Jésus qui conseille de payer le tribut dans les Synoptisés, ni Pierre qui le paye pour Jésus et pour lui, et c'est l'auteur des Lettres de Paul qu'elle oppose à son fils selon le monde !

A Marthe l'explication de la treizième et dernière repentance avant que Sophia puisse pénétrer dans le treizième Æon d'où elle espère être ramenée à soli Époux, l'Invisible Propator[136].

 

VI. — L'APPROCHE DU JUGEMENT.

 

On a vu que le Plérôme[137] était entièrement faux comme tous les calculs de ce genre : la mère de bar-Jehoudda était morte plusieurs années après l'échéance que son fils avait assignée à l'avènement du Royaume. Elle s'approche de Jésus pour savoir ce qu'il en faut penser dorénavant : Seigneur, dit-elle, combien d'années (en années du monde) fait une Année de lumière, c'est-à-dire une Année selon le Père des sept jours de la Genèse ? Jésus lui répond par la mesure davidique, comme il avait fait à Joannès : Un jour, c'est-à-dire mille ans dans le monde. Mais il modifie complètement l'échéance que certaines paraboles de l'Évangile ont remise à la fin de l'Æon-Zib qui est en cours au siècle de Valentin. Cet Æon, que Bar-Jehoudda faisait de dix fois cent ans, Jésus le multiplie par 36 myriades et demie d'années de 365 jours, — les 365 jours de l'année tropique selon Basilide et les Gnostiques dont il épouse les calculs, — de sorte que l'Année ou Jour du Royaume de lumière équivaut à trente-six myriades et demie d'années selon le monde. Au lieu de régner mille ans, il en régnera dix mille (c'est l'Æon décuplé) et fera rois dans la lumière tous les disciples de l'école millénariste. Au lieu de régner mille ans dans le monde avec bar-Jehoudda, comme ils le croyaient avant sa crucifixion, ils en régneront dix mille avec Jésus dans la lumière, Puis viendra la dissolution du Plérôme.

André n'y entend goutte, il n'arrive pas à comprendre comment fera son corps pour traverser les trois cieux et atteindre l'Invisible. Il en est resté à ce que lui disait Joannès ; mais Jésus, en qui s'émeut l'esprit du sauveur[138], les rabroue vivement l'un et l'autre comme dans les Évangiles : Jusqu'à quand vous supporterai-je, lui dit-il ? Jusqu'à quand vous souffrirai-je ? Ainsi, à présent encore, vous ne comprenez point, vous êtes ignorants ? Il a beau les chapitrer, ils sont réfractaires à ce Royaume qui n'est, ne sera jamais de ce monde. Néanmoins, à cause de toutes les épreuves qu'ils ont subies depuis le commencement des choses, en passant dans des corps différents[139], André et tous ses frères condisciples[140] seront reçus dans la lumière.

Entendant cela, ils se prosternèrent tous les uns et les autres sur les pieds de Jésus, ils s'écrièrent, ils pleurèrent, ils prièrent le Sauveur, en disant : Seigneur, pardonne le péché de l'ignorance de notre frère[141]. Le Sauveur prit la parole et dit : Je pardonne et je pardonnerai, et c'est pour cela que m'a envoyé le Premier mystère[142], afin que je pardonne les péchés de tout le monde[143]. C'est ce qu'il dit dans Luc à Joannès et à ce même André[144] : Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes : je suis venu non pour perdre les vies, mais pour les sauver. Sa fonction n'est pas, comme ils l'ont cru tous, de sauver les corps de la corruption, mais de ramener à son Père les âmes que l'Esprit du monde, le Satan, a mêlées dans la matière avec toutes sortes de mauvais ferments. A la mort, les âmes sortent du corps, et tandis que celui-ci se corrompt, vile matière, elles retournent à leur lieu d'origine où elles sont brassées dans la lumière jusqu'à ce que Jésus déclare son Royaume ouvert, par l'émanation du Plérôme[145] : il n'y a donc pas de résurrection des corps pour le Jésus de Valentin. La mort rompt le lien entre l'âme et le corps. Le corps est condamné d'avance, Dieu ne le juge pas.

 

La seconde diaconie de Jésus tire à sa fin. Nous voici arrivés à la veille du Jugement de première instance que le Père devait prononcer sur le monde par la bouche du roi-christ après la pâque de 789[146].

Les scribes valentiniens n'avaient pas hésité à transcrire au complet divers chapitres des Paroles du Rabbi, afin d'en mieux combattre l'abominable méchanceté. L'Église (copte ou autre, il n'importe), n'a pas osé les laisser en place, et rien ne la juge mieux, elle et son Juif. C'est déjà beaucoup qu'elle ait, tout en atténuant, en biffant et en ajoutant, respecté quelques-unes des Propositions morales que Jésus substitue au programme du Royaume du monde. Ce sont ces propositions que les exégètes prennent aujourd'hui pour celles du christ lui-même, alors qu'elles en sont l'antithèse en toutes choses. M. Amélineau, quoiqu'il ait vu le trou, n'a pas évité le piège caché au fond : Le titre : Extrait des livres du sauveur (jésus), se trouve, dit-il[147], jeté au verso du feuillet 133 (du manuscrit copte qu'il a traduit), et ce qui suit (ce qui appartient à Valentin), occupe ce verso et le feuillet 134 tout entier, coupant ainsi les explications qui précèdent et celles qui suivent, sans qu'il y ait aucune raison apparente qui légitime cette manière de faire. Évidemment le copiste de notre manuscrit s'est trouvé en présence d'un phénomène qu'il ne s'expliquait pas. — Si ce phénomène est antérieur à la copie, il se peut que le copiste ne se le soit pas expliqué, mais celui qui a créé le phénomène a parfaitement su ce qu'il faisait —. Cependant, on trouve à la fin de Pistis Sophia un autre Extrait des livres du sauveur, mais ce passage ne peut s'y adapter. En effet, ce second Extrait est dans les même conditions que le premier ; ce n'est plus qu'un titre, l'extrait lui-même a complètement disparu, et ce qui le suit ne peut s'adapter en rien à ce qui suit le premier Extrait des livres du jésus.

En bonne conscience, il n'est pas tout à fait impossible de savoir quelle était la matière traitée bile ces deux Extraits. Dans le premier Bar-Jehoudda parlait du jugement qui attendait les Juifs réfractaires à son baptême. Ce jugement, c'était l'Enfer pendant mille ans, au milieu de tourments sur lesquels l'Apocalypse s'explique sommairement[148]. Les Paroles du Rabbi étaient plus explicites ; l'Enfer, les suppôts de Satan, et tout ce qu'on appelle dans l'Évangile les ténèbres extérieures, y étaient décrits avec des détails qui font frémir les disciples réunis autour de Jésus. Car ces tourments, ils les méritent mille fois, et ils y seraient déjà soumis, si Jésus n'avait pas donné, dans l'intervalle, sa démission de Grand juge[149]. Celui qui maintenant a le plus besoin du baptême, c'est le baptiseur lui-même.

Joannès avait subdivisé le monde infernal en autant de zones que le monde céleste, c'est-à-dire trois. Ou en a la preuve par le passage où Jésus parle des peines correspondantes. La première zone est la terre elle-même, qui fait face au ciel occupé par Satan ; la seconde est la mer de soufre et de poix dont il est question dans l'Apocalypse, et qui répond à la mer de cristal placée au-dessus du second ciel dans cette même Révélation. La troisième est celle que les Évangiles synoptisés dénomment les ténèbres extérieures (extérieures à la seconde zone), et qui répond au troisième ciel où le Joannès dit être allé. L'Enfer de Bar-Jehoudda équivaut donc à l'Amenti des Egyptiens ; il était peuplé de tortionnaires égaux en nombre aux génies sauveurs et a la milice céleste. Les ténèbres extérieures Semblent avoir été dans l'imagination de ce juif une chose atroce et Pire que le reste. Elles étaient occupées par des puissances à face animale, tel l'Archon-crocodile[150] qui est dans la glace, laquelle glace est la première création qui se trouve dans les ténèbres extérieures[151]. Bar-Jehoudda considérait donc que la glace était pire que le feu. Car si le feu consume, il peut aussi purifier, tandis que si la glace conserve la matière, elle la conserve dans son impureté originelle. Tout n'est que gelée et grêle dans les ténèbres extérieures, c'est-à-dire infécondité, stérilité, incapacité de germination quelconque. Dans la séparation des éléments après la création, il était encore resté en haut quelque peu de ces grêles, trais on sait qu'elles devaient tomber avant les Ânes de 789, de manière que la Vigne du Seigneur n'en fût ni atteinte ni diminuée dans ses douze récoltes[152].

 

Il semble bien que Valentin ait noté l'expulsion apocalyptique de Satan hors du ciel comme définitivement acquise par la première diaconie de Jésus et qu'il ait tenu la révélation de ce phénomène pour le fait. C'est pour cela, je crois, qu'il a rejeté Satan dans les ténèbres extérieures sous la forme du Dragon, et que Marie pose à Jésus cette question : Mon Seigneur, le Dragon des ténèbres extérieures vient-il en ce monde ou n'y vient-il pas ? En un mot, est-ce lui qui est encore cause des péchés que remettait autrefois Joannès en invoquant les Æons sauveurs ? Et en effet, avant l'invention du baptême, Satan était toujours fourré dans le monde où il importait quantité de démons. Jésus répond : Quand le soleil luit, sa lumière couvre les ténèbres du Dragon ; mais quand le soleil est au-dessous du monde, les ténèbres couvrent sa lumière et leur souffle vient sur le monde sous la forme d'une fumée dans la nuit. C'est proprement le rôle de Satan. Marie demande alors : Qui force l'homme à pécher ? (Elle sous-entend : si ce n'est plus Satan.) Jésus répond que ce sont les Archons du Destin, c'est-à-dire les ministres de la Destinée : Est-ce que les Archons du Destin viennent aussi dans le monde pour forcer l'homme à pécher ? demande Marie. Jésus répond d'une manière incompréhensible, ce qui n'est pas mal répondre, au contraire, et il donnera de plus amples détails lorsqu'il dira l'émanation du Plérôme[153]. En attendant, la mer de soufre est un séjour peu enviable, surtout si l'on en considère la durée[154].

 

Il y avait notamment un certain feu auquel était préposée une tête de chien[155] qui lui donnait une ardeur-dont la canicule est l'image redoutée des mortels. Ce Chien, aussi terrible dans son hydrophobie que les fines devaient être agréables aux élus à cause de leur goût prononcé pour l'eau fraiche, ce Chien, vous le connaissez, vous l'avez vu dans les mystères nicolaïtes[156], et vous pouvez le voir sous la figure d'Anubis dans les innombrables représentations égyptiennes du jugement dernier. Ce Chien, cet Anubis, Jehoudda le Gamaléen l'avait rapporté d'Égypte avec le reste du système, et c'est (vous en souvient-il ? c'est si loin), une des raisons pour lesquelles la superstition des quatre mille christiens de Rome déportés en Sardaigne sous Tibère est dite judéo-égyptienne dans la délibération du Sénat[157]. C'est pour donner le change une fois de plus sur cette origine trop évidente, que l'Église a introduit dans Flavius Josèphe le conte stupide de la femme de Saturninus avec le chevalier Mundus transformé pour la circonstance en Anubis. Cette interpolation sent son huitième siècle à plein nez, nous l'avons dit[158]. On en comprend l'intérêt lorsqu'on sait que le rapprochement entre le Chien de Jehoudda le Gamaléen et l'Anubis des Egyptiens n'avait échappé ni au Sénat ni aux historiens comme Tacite et Suétone. On le comprend encore bien plus lorsqu'on sait que l'interpolateur de Josèphe est un des aigrefins qui ont transformé le fils aîné de ce plagiaire en Dieu, créateur du ciel et de la terre !

Pourquoi Jésus paraît-il si bon dans le Sermon sur la montagne ?

Parce qu'il veut sauver son corps selon le monde, du feu de cette face de chien. Tout le Sermon sur la Montagne vient des Rouleaux des morts égyptiens, de cet immense recueil de morale composé par des vivants qui raisonnent avec un désintéressement d'outre-tombe : la plupart des hommes font leurs réflexions sur la vertu quand ils sont morts. Comptons aussi pour beaucoup le Livre d'Enoch qui est au fond ce que Dieu a dit à l'homme dans le Paradis terrestre ; le tout gâté dans les Évangiles par cette kabbale chiffrée dont le christianisme n'a jamais pu se dépouiller.

 

VII. — LE SALUT PAR LA MORALE.

 

Dans sa seconde diaconie Jésus ne se borne pas S 'rectifier les Paroles du Rabbi en ce qui intéressait la possession de la terre, il place les disciples devant 1S tableau que leur père leur avait fait de l'Enfer, et après une longue énumération des péchés qui leur méritaient ces châtiments, il leur prêche les vertus qui leur avaient manqué.

Le salut ne consiste pas, comme ils l'avaient dit, dans la circoncision, dans le sabbat, dans l'observation rigoureuse des rites, dans l'orientation du sanctuaire et des Portes. Il est dans les principes généraux dont ils s'étaient écartés. L'idéal sérapique n'étant pas de posséder la terre, mais de gagner le ciel, la morale du Royaume change complètement. C'est Sérapis qui dicte à Jésus ces ordonnances :

Jésus dit à ses disciples : Annoncez au monde entier, dites-leur (aux hommes) : Ne cessez pas le jour et la nuit de chercher, jusqu'à ce que vous ayez trouvé, les mystères du Royaume de la lumière.

Dites-leur : Renoncez au monde entier, à tous ses soucis, à tous ses péchés, en un mot à toutes les relations qui sont en lui, afin que vous soyez sauvés de tous les tourments qui sont dans les jugements.

Dites-leur : Renoncez au murmure, afin que vous soyez dignes des mystères de la lumière, que vous soyez sauvés du feu de cette face de chien[159].

Dites-leur : Renoncez à toute crédulité (dans la kabbale et la magie).

Renoncez à tout appel (du jugement de Dieu).

Renoncez à la calomnie.

Renoncez au faux témoignage[160].

Renoncez à la vantardise et à l'orgueil. Renoncez à ces amours du ventre[161].

Renoncez à ces nombreuses paroles[162].

Renoncez à ces caresses mauvaises[163].

Renoncez à ces avarices[164].

Renoncez à ces amours du monde.

Renoncez à ces déprédations.

Renoncez à ces paroles mauvaises.

Renoncez à ces duretés.

Renoncez à ces colères.

Renoncez à la malédiction.

Renoncez à ces avarices[165].

Renoncez à l'injure[166].

Renoncez à ces luttes et à ces contentions.

Renoncez à toutes ces ignorances.

Renoncez à ces vilenies.

Renoncez à ces emportements.

Renoncez à ces adultères.

Renoncez à ces meurtres.

Renoncez à ces impiétés.

Renoncez à ces athéismes.

Renoncez à ces préparations magiques.

Renoncez à ces blasphèmes.

Renoncez à ces enseignements trompeurs.

Jésus est fort sévère pour ceux qui continuent à professer les enseignements trompeurs, en dépit de la justice que Dieu en a faite au Guol-golta.

Dites à ceux qui les enseignent et à quiconque se laisse Séduire par eux : Malheur à vous, car si vous ne vous repentez pas et si vous n'abandonnez pas votre erreur, vous entrerez dans les châtiments du Grand dragon (préposé au fleuve de feu et de fumée) et dans les ténèbres extérieures qui sont dures grandement, et l'on ne vous rachètera jamais du monde, mais vous serez éternellement sans existence.

Dites à ceux qui abandonnent l'enseignement de la vérité du Premier mystère (en un mot, ceux qui abandonnent le Père pour Bar-Jehoudda) : Malheur à vous, car votre châtiment sera mauvais plus que pour tout homme, car vous demeurerez dans la grande glace, la gelée et la grêle, au milieu des ténèbres extérieures, et l'on ne vous rachètera Pas du monde depuis cet instant jusqu'à l'éternité, mais vous serez fondus[167], et dans la dissolution du Plérôme (lors de la fin de la matière) vous serez perdus, vous serez non existants éternellement.

Au lieu de cet enseignement destiné à diviser les hommes et à les perdre, voici ce qu'il faut leur dire :

Soyez de bonne volonté[168], afin que vous entriez dans les hauteurs du Royaume de lumière[169].

Dites aux hommes : Soyez aimant les hommes.

Dites-leur : Soyez bons.

Dites-leur : Soyez pacifiques.

Dites-leur : Soyez miséricordieux.

Dites-leur : Soyez pitoyables.

Dites-leur : Servez les pauvres, ceux qui sont malades, ceux qui sont pressurés.

Dites-leur : Soyez pieux.

Dites-leur : Soyez bons.

Dites-leur : Renoncez à tout.

Telles sont les fins de ceux qui sont dignes d'entrer dans la lumière.

Pour les hommes de bonne volonté, point de kabbale, point de secrets ridicules.

Ne leur cachez rien. Quand même ils seraient pécheurs, qu'ils seraient dans tous les péchés et toutes les iniquités du monde que je vous ai toutes dites[170], s'ils se convertissent, s'ils font repentance et s'ils sont dans la soumission que je viens de vous dire, donnez-leur les mystères du Royaume, ne les leur cachez pas du tout. Car c'est pour le péché que j'ai amené ces mystères dans le monde (la révélation à Valentin) afin que je pardonne tous les péchés qu'ils ne fait depuis le commencement (Adam).

Et confirmant le retour qu'il a déjà fait dans les Synoptisés sur les erreurs de sa première diaconie :

C'est pourquoi je vous ai dit autrefois : Je ne suis pas venu inviter les justes. Maintenant donc j'ai amené les mystères (je déclare les avoir amenés) afin que les péchés soient pardonnés à tous les hommes.

 

VIII. — LA GRÂCE PAR LES MYSTÈRES VALENTINIENS.

 

Ce nouvel esprit, cette définition du salut par des œuvres purement morales, tout cela trouble profondément la mère de Joannès. Mais que lui importe après-tout, pourvu que le salut, même sous la forme valentinienne, continue à venir des Juifs !

Fiscalement le but de Valentin était de conserver le baptême qui avait encore sa raison d'être au point de vue de la recette. Le mystère de la rémission des-Péchés par le baptême, c'est encore le grand mystère Pour Valentin, c'est encore tout le succès de son église. Les gens de bon sens ont élevé des objections fondamentales sur la moralité du Baptiseur. Qu'importe ? Pourvu que sa formule soit efficace. Or, le baptême-bige radicalement les péchés sur les registres du greffe céleste, Jésus le sait, il l'a vu ! Sauver le baptême en moralisant le Baptiseur, c'est la grosse préoccupation de Valentin. C'est dans l'eau du baptême qu'il trempe l'éponge à passer sur toute la génération apostolique et sur les païens eux-mêmes.

Comme nous l'avons dit d'après le prophète Zacharie, la kabbale baptismale provenait bien de David ou. Mieux de Jessé, son père ; Jehoudda et Salomé l'avaient transmise à leur premier-né qui prétendait lier par ces-formules le Père et toutes les puissances des trois ciels. Cela nous vaut une explication entre Jésus et Marie[171]. Jésus ergote un peu, parce qu'il se demande s'il a le droit de stipuler au nom de l'Invisible, mais au fond il est d'accord avec Marie : les puissances célestes remettent les péchés à la demande de Joannès, et David avait prophétisé cela lorsqu'il a dit : Heureux ceux dont les péchés ont été pardonnés et dont on a reconnu les iniquités ! Et : Bienheureux ceux auxquels le Seigneur n'imputera pas leurs péchés !

Joannès ne pardonnait point au relaps, sans quoi il eût été exposé à le baptiser plusieurs fois, mais comme il invoquait les douze Æons, Marie demande à Jésus si dans le Royaume de la lumière, on pardonnera à ce relaps. — Douze fois, répond Jésus, douze fois mais pas davantage, à moins qu'il ne reçoive les mystères de l'Ineffable, de cet Invisible que Joannès n'a pas vu et qui a pitié en tout temps[172]. A la qualité de ces mystères on voit qu'ils sont la propriété de l'Eglise valentinienne. C'est du surjoannisme. L'Eglise romaine le lui a pris ; elle aussi remet tout. Toutefois si l'homme qui a reçu les mystères de l'Ineffable recommence à pécher et sort du corps (c'est-à-dire meurt) sans s'être repenti, ou qu'il renonce à sa foi, c'en est fait de lui. Ténèbres extérieures, glace, incapacité de revivre par la métempsychose, perte de substance même spirituelle, néant lors de l'émanation du Plérôme. Ce n'est pas gai ! et Marie est fort inquiète, car Joannès a été crucifié sans avoir connu les mystères valentiniens. Jésus lui vient en aide.

Si l'homme a commis tous ses péchés par nécessité du destin (comme Joannès prédestiné à la couronne), et qu'il meure contre son attente (comme Joannès), qu'en adviendra-t-il ? Rien que de bon, dès le moment qu'il a reçu soit les mystères de l'Invisible, soit celui du Père Sabaôth. Or non seulement Joannès a reçu du ciel par la colombe les mystères de Sabaôth, mais encore il les a révélés, donnés à autrui. Et comme il ne pouvait pas s'attendre à être crucifié la veille du jour et il devait juger le monde, il est dans des conditions excellentes, parce qu'enfin, comme Marie le dit très bien à Jésus, tu nous as dit autrefois : Si le maître de la maison savait à quelle heure le Voleur (Satan) viendra dans la nuit pour percer la maison[173], il veillerait aussi et ne laisserait pas un homme[174] percer sa maison. Jésus exulte : Courage, dit-il, ô Marie la pneumatique, c'est l'explication de la Parole !

 

Ce sont de merveilleux et pitoyables mystères que ceux de Sabaôth ; ils se trouvent, au moins en l'espèce, égalés à ceux de l'Invisible ! Voilà les inquiétudes maternelles de Marie quelque peu dissipées... Alors ses fils ? Les gens de mauvaises mœurs qui les accompagnaient ?... Ceux qui ont été crucifiés sans avoir pu recevoir une seconde fois la rémission de leurs crimes ?... il y a donc encore de l'espoir ?

Jésus répond par une parabole des plus voilées et par là des plus curieuses : Qu'un roi aujourd'hui, qui est un homme du monde[175], fasse grâce aux hommes comme lui, qu'il pardonne aux meurtriers, à ceux qui couchent avec des mâles, et au reste des péchés graves et dignes de la mort, si donc lui, qui est un homme du monde, a fait ainsi, à plus forte raison l'Ineffable et le Seigneur[176], lesquels sont les rois sur tout le Plérôme[177], ont-ils puissance sur toute chose pour faire ce qui leur plaît, pour pardonner à tous ceux qui auront reçu le mystère[178]. Ou qu'en ce jour encore un roi donne un vêtement royal à un soldat, s'il l'envoie en d'autres lieux et que le soldat fasse des meurtres et des péchés graves dignes de la mort et qu'on ne les lei impute pas parce qu'il est revêtu du vêtement du roi, à combien plus forte raison ceux qui portent les mystères des vêtements de cet Ineffable et ceux du Seigneur[179], lesquels sont rois sur toutes les puissances des hauteurs et des profondeurs ?

 

Rassurée sur ce point, plusieurs cas sont tour à tour évoqués par Marie.

Supposé celui d'un homme parfaitement juste parmi les païens, et qui n'a pas reçu le baptême : Un pareil homme, demande Marie, sera-t-il tourmenté en enfer ou ne le conduira-t-on pas dans le royaume des cieux, oui ou non ? Elle eût tranché le cas contre ce juste en 789. Mais aujourd'hui ? Le Sauveur répond en substance : Un homme qui n'a jamais fait de péché, mais qui n'a pas été baptisé, ceux qui reçoivent les âmes dans la lumière[180] iront le prendre, passeront trois jours avec lui dans toutes les créations du monde visible, après quoi ils l'introduiront dans le chaos (l'Abîme de l'Apocalypse) afin de lui apprendre tous les tourments dont il relève faute de baptême ; mais les feux du chaos ne lui nuiront pas au point de l'anéantir. Ses guides auront pitié de lui, ils le feront passer par tous les châtiments, mais ils l'en feront sortir aussi, et après l'avoir mis sur le chemin du milieu (qui conduit de la terre au ciel), ils le mèneront sur le chemin du soleil afin qu'on l'introduise près de la Vierge de lumière ; la Vierge l'éprouvera pour voir s'il est pur du Péché, toutefois sans l'introduire dans la lumière (du troisième ciel), parce que le signe du Royaume n'est pas avec elle, — en effet[181] il est avec les Poissons, — et elle le scellera d'un sceau supérieur qui lui permettra d'être compté un jour dans le Royaume. Mais en vérité, en vérité je vous le dis, quand même un homme juste n'a pas fait de péché du tout, il est impossible de l'introduire dans le Royaume de la lumière, parce que le signe du Royaume des mystères n'est pas avec lui ; en un mot, il n'est pas possible d'introduire un homme dans la lumière sans les mystères du Royaume de la lumière — les trois immersions qui correspondent à l'Agneau, au Taureau et aux Gémeaux.

Joannès reçoit une grande joie de cette déclaration. En un certain sens il a bien été l'Ieou-Shanâ-os, le signe de l'Æon-Zib et de l'An de grâce : c'est son pouvoir de rémission confirmé.

Mais à l'origine les effets de son baptême étaient attachés à sa personne, et l'homme baptisé par lui ne pouvait les transmettre à qui que ce soit. Comment faire maintenant qu'il n'est plus là ? Que Jésus réponde à Marie sur ce point ! Soit un baptisé dont le frère ou le parent, impie ou non, mort sans baptême, est envoyé dans les tourments. Que faire pour consoler le baptisé et sauver l'autre ? Jésus répond : Prier l'Ineffable d'assumer le patient, de le faire conduire à la Vierge de la lumière. Que chaque mois la Vierge le scelle d'un sceau supérieur et le jette en un corps qui soit juste (celui d'un baptisé) afin qu'il puisse entrer dans les hauteurs[182]. Avec cette prière, imitée de l'invocation du Joannès que nous avons citée[183], le résultat est certain. En doutez-vous, impies ?

Joannès apprend en outre une chose qui va contre son privilège, mais qui est favorable au prosélytisme. Celui qui sauvera une âme par le baptême recevra, outre sa gloire personnelle, une gloire pour cette âme là, de sorte que celui qui sauvera une foule d'âmes recevra une foule de gloires. Cette idée enflamme e9 vieille cupidité millénariste. Il s'élance, disant : Mon Seigneur, je vais commencer à présent à t'interroger sur toute chose, sur la manière dont nous devons prêcher l'humanité[184]. Jusqu'alors (troisième siècle au moins) Jésus ne lui avait révélé que la façon de parler aux Juifs.

Marie propose encore un amendement énorme au baptême qu'elle a connu et appris à son premier-né. Elle oublie naturellement de dire que c'est le sort de celui-ci qui lui inspire ce point de vue : Maintenant, dit-elle à Jésus, n'as-tu pas amené le mystère (baptismal) au monde, afin que les hommes ne meurent pas de la mort du destin ? (la mort fatale, inévitable). Car s'il est échu à quelqu'un de mourir par l'épée, ou dans des tourments, ou dans les tortures ou dans la violence légale, ou dans tout autre mauvaise mort, n'as-tu pas amené le baptême afin que les hommes ne meurent pas ainsi de par les puissances du Destin, mais afin qu'ils meurent d'une mort subite ? (et par conséquent sans souffrance.) Car ils sont plus que nombreux, ceux qui nous (nous, ce sont les sectes jehouddolâtres) poursuivent à cause de toi (incarné dans bar-Jehoudda), ils sont nombreux ceux qui nous poursuivent à cause de ton nom (de christ)[185] . N'as-tu pas amené le baptême[186], afin que, si l'on nous torture, nous disions le mystère[187] et que nous sortions aussitôt du corps sans endurer aucune souffrance ?

En répondant affirmativement, Jésus console un peu la malheureuse femme. Il dit, s'adressant à tous les disciples de Jehoudda : Du sujet sur lequel vous m'interrogez je vous ai parlé autrefois (dans les Paroles du Rabbi). C'est à cette parole que sont dues toutes les résurrections advenues dans la famille du baptiseur, celles de Jehoudda et de son frère[188], celle d'Eléazar dans Cérinthe, celles de Jacob junior et de la fille de Jaïr, et plus tard celle de Bar-Jehoudda lui-même sitôt que Jésus eut connu son adresse, croix restante, au Guol-golta. Malheureusement il résultait de tout cela qu'il avait suffi à Bar-Jehoudda de prononcer sur la croix vocation baptismale dont il était l'auteur pour mourir sans avoir souffert. Or s'il n'avait pas souffert, il n'avale pas même racheté ses propres péchés. Comment voulait-on qu'il eût racheté ceux de ses complices ? L'Église a donc supprimé ici ce que Jésus avait dit de l'efficacité de la formule dans les Paroles du Rabbi. Ecoutez, que je vous le dise encore une fois, dit-il ici. Mais son embarras contraste avec son assurance primitive, et la fâcheuse aventure du Baptisme ne justifie que trop cet air gêné. On a été obligé d'inventer des prières qui trahissent quelque inquiétude : parmi ces prières, celle qui enlève la sensibilité au corps de ceux qui sont en prison ou qu'on supplicie, et la prière qu'on fait pour enlever la méchanceté de ce qu'on boit et de ce qu'on mange, c'est-à-dire qui permet de boire de toutes boissons et de manger de toutes viandes impunément. Jésus confirmera cette tolérance dans les Évangiles rectifiés à l'encontre de la Loi.

 

IX. — INTERPRÉTATIONS JUDAÏCO-JÉSUITIQUES.

 

La grosse préoccupation du Jésus valentinien et de Marie, — le compère et la commère de cette revue, — c'est d'effacer par les interprétations les plus fantastiques[189] les propos malheureux du Jésus millénariste. Beaucoup de ces propos retombaient de tout leur poids sur le Joannès. Celui-ci par exemple[190] : L'esclave qui sait le désir de son maitre, qui ne s'est point préparé, qui n'a point fait le désir de son maitre, recevra de grands coups (dans la géhenne du Royaume) ; celui qui n'a point su et n'a point fait ce désir ne méritera qu'un petit nombre de coups ; tous ceux à qui l'on aura confié plus, on leur demandera plus ; à celui auquel on aura confié des choses nombreuses, on lui demandera des choses nombreuses. C'était là une des paroles de bar-Jehoudda sur la justice du Royaume, et elle avait pour d'empêcher ses partisans de manquer à leur serment d'initiation. Aussi Marie comprend-elle immédiatement, lorsque Jésus revient lui-même sur ces paroles pour leur donner un sens nouveau : Car, dit-elle, mon homme de lumière a des oreilles, et j'ai compris[191]. Parfaitement. Que celui qui a des oreilles pour entendre entende ! Salomé entend avec celles de son mari, — elle ne fait qu'un avec lui, vous le savez : un en deux, deux en un, ils devaient être ainsi dans le Royaume.

Tout avait été chantage et menace sous condition dans la prédication de Jehoudda et de ses fils. Il s'agissait pour les Juifs ou d'être envoyés en enfer pour mille ans ou d'entrer dans la Jérusalem d'or par la porte du Zib, le tout avant le Lion de 789. Point d'autre délai, point de rémission possible après l'échéance. Le nombre des élus est arrêté au 15 nisan, et la porte du Zib se refermera derrière ceux qu'aura laissé entrer le roi-christ. Nous avons donné en son temps la parabole de l'homme qui lie et délie la porte par où les Juifs devaient entrer dans le Royaume : Seigneur, ouvre-nous, diront-ils. — Je répondrai, et je dirai : Je ne sais pas d'où vous êtes[192]. A Marie d'adapter ce dispositif au Royaume qui n'est pas de ce monde : Seigneur, demande-t-elle à Jésus, si les âmes ne profitent pas du moment pour recevoir les mystères, où perdront-elles pas une occasion qui ne se retrouvera point ?[193] Le Sauveur répond et dit à ses disciples : Prêchez au monde entier en disant aux hommes : Luttez entre vous afin que vous receviez les mystères de la lumière en ce temps de presse[194]... Ne remettez pas de jour en jour... car ces hommes-là ne savent pas quand sera complet le nombre des âmes parfaites[195]. Lorsque ce nombre sera complet, alors je fermerai les portes de la lumière et personne ne pourra plus entre par elles, et personne ne sortira plus ensuite... avant que je mette le feu au monde... pour le purifier de la matière, quand existera encore l'humanité. Ce jour-là, il y aura de la foi tant et plus[196], mais les âmes (qui ne se seront pas mises en règle) trouveront que j'aurai fermé les portes. Elles appelleront, disant : Seigneur, ouvre-nous. Je répondrai et je leur dirai : Je ne sais pas d'où vous êtes. Et elles me diront : Nous avons reçu les mystères et nous avons accompli tout ton enseignement, et tu nous as enseignées sur les places. Et je leur répondrai, je leur dirai : Je ne sais pas qui vous êtes, ô vous qui pratiquez le mal et l'iniquité jusqu'à ce jour. C'est pourquoi allez aux ténèbres extérieures. Et sur l'heure elles iront aux ténèbres extérieures, le lieu où se trouvent les pleurs et les grincements de dents. En un mot, ce qui d'après Bar-Jehoudda devait se passer en 789 dans le Royaume, le nombre accompli, ne se passera selon Jésus que lors de l'accomplissement du nombre arrêté depuis. Enthousiasme énorme chez Marie : Non seulement, dit-elle, mon homme de lumière a entendu, mais mon âme[197] a aussi entendu et compris ![198]

Il y avait là un passage capital pour expliquer les paroles de Jésus : Luttez entre vous, etc. Ces paroles ont été coupées net. L'explication, dit M. Amélineau, est restée au bout du calame du scribe qui a copié l'ouvrage. Nullement. Ce qui a disparu, c'est l'interprétation d'une chose qui est restée dans les Évangiles primitifs et qui était sans doute dans les Explications de Papias sur les Paroles du Rabbi : une parole de Jésus qui, loin de méconnaître l'identité de Joannès avec bar-Jehoudda et de Joannès avec l'individu qui se disait christ, rendait la réhabilitation des apôtres absolument impossible. Cette parole, nous vous l'avons cite en son temps, c'est celle-ci : Depuis les jours de Joannès le baptiseur jusqu'à présent, chacun lutte polir entrer dans le Royaume et ce sont les violents qui s'en emparent. D'où l'identité des christiens du Jourdain avec les sicaires de Ménahem. D'accord avec Marie Jésus insinue ici que cette lutte violente doit être entendue au spirituel. C'est un de leurs tours accoutumés.

Il y avait bien d'autres paroles gênantes et qu'on n'a pu laisser dans les Évangiles qu'en les isolant de leur contexte. Celle-ci, par exemple : Faites-vous des amis avec l'argent de l'iniquité, afin que si vous êtes abandonnés, il — l'argent enlevé à l'iniquité et employé à la justice selon Panthora[199]vous introduise dans les tabernacles éternels[200]. C'était là une excitation manifesté au vol, c'était l'explication des pillages qui avaient marqué l'année proto-jubilaire, c'était l'origine même de l'un des motifs, le vol, pour lesquels bar-Abbas avait été condamné par le Sanhédrin. Je vous donne en mille, puisque nous sommes en plein millénarisme, l'explication que Marie fournit de cette ordonnance : Qu'est-ce donc que l'argent de l'iniquité, dit-elle, sinon le Dragon des ténèbres extérieures ? Cela signifie que celui qui sera abandonné dans ces ténèbres, s'il dit le mystère de l'un des noms du Dragon, il sera sauvé et recevra la lumière du Trésor. Voilà la parole, ô mon Seigneur. — Courage, ô pneumatique pure, répond Jésus, c'est le sens de la parole.

 

X. — L'INÉVITABLE CHÂTIMENT.

 

Les idées de Bar-Jehoudda sur les ténèbres extérieures ne paraissent pas avoir été très nettes, ni celles de sa mère. A celle-ci Jésus fournit des explications supplémentaires. Je crois bien que Bar-Jehoudda reconnaissait l'existence du grand Dragon qui est lui-même la forme des ténèbres extérieures[201], je suis même convaincu qu'il commettait douze puissances, tout au moins six à l'exécution des châtiments infernaux. Mais savait-il que le Dragon des ténèbres extérieures contenait, lui aussi, douze chambres[202] habitées par des Archons à face animale. L'Archon-crocodile, l'Archon-chat, l'Archon-chien, l'Archon-serpent, l'Archon-taureau noir, l'Archon-sanglier, l'Archon-ours, l'Archon-vautour, l'Archon-basilic, les Archons à sept têtes de dragon qui occupent la dixième chambre, les Archons à sept têtes de chat qui occupent la onzième, les Archons à sept têtes de chien qui occupent la douzième, les a-t-il connu ? Je ne le pense pas. Mais l'intérêt que prend  à la distribution exacte des ténèbres extérieures nous fait voir qu'elle en redoute le séjour pour les disciples lors de l'émanation du Plérôme. Car l'âme des blasphémateurs et de ceux qui sont dans une doctrine mauvaise, de quiconque est dans une doctrine mauvaise et qui a dormi avec des mâles, et celle de hommes impurs, des impies, de tout homme athée, des meurtriers, des adultères, des magiciens, toutes ces âmes seront introduites dans la gueule du grand Dragon. Or en ce Dragon les châtiments sont encore plus durs que tous les jugements de l'Apocalypse, et le feu qui est dans certaines chambres situées derrière l'Archon-crocodile est septante fois plus vie lent que celui qui est dans le grand Abîme. Devant ces révélations, Marie frappe sa poitrine, pleure, elle et tous les disciples à la fois, et s'écrie : Malheur aux pécheurs !

 

Alors Jésus lui révèle un moyen de faire sortir l'âme pour laquelle ils auront prié, la leur au besoin, de la gueule du Dragon. Mais Marie n'est pas tranquille : Aie pitié de moi, s'écrie-t-elle, afin que personne de nos parents ne soit dans un semblable type de châtiment ! Car, — et ceci est un aveu cruel pour son amour propre, — ce n'est plus son aîné, c'est Jésus qui a la clef qui ouvre le Plérôme et qui ferme le Plérôme[203]. Ému de compassion, Jésus lui promet tout ce qu'et ! demande, c'est-à-dire l'absolution quand même ; il la rassure pleinement en lui disant que ceux-là qui pende leur vie ont connu le mystère des douze noms des Anges (commis à la surveillance du Dragon), n'eussent-ils connu qu'un seul de ces noms, s'ils le disent pendant qu'ils saut dans le Dragon, à l'instant celui-ci les laisse aller. Ieou, patron du premier homme[204], se charge d'arranger le affaire avec les sept Vierges qui accompagnent la Vierge de lumière. Or les disciples connaissent parfaitement les noms des douze sauveurs, Joannès surtout qui les invoquait pendant la cérémonie des baptêmes. Marie est donc tranquille comme Baptiste.

Le baptême n'aurait nullement suffi à préserver les élus du feu du châtiment si l'opérateur n'eût pas possédé le secret des sceaux de lumière, faits pour que le feu ne nuise pas[205]. Le mystère du baptême au fond, c'est le baptême de feu neutralisé d'avance par l'eau. Les hommes qui ont reçu ce mystère (qui ont été baptisés) sont Moi, et Moi je suis ces hommes-là, dit Jésus. C'est parfait, mais, le Royaume ne devant Plus être de ce monde, il est inutile que le baptême confère aux Juifs un corps réfractaire au feu destructeur des païens. Il faut au monde des mystères nouveaux, un baptême spirituel qui ouvre l'accès du Royaume de lumière. Jésus a la plus grande peine à faire comprendre cela aux disciples. Si l'Eucharistie eût existé comme moyen de salut, Jésus n'aurait eu qu'à y renvoyer pour répondre à toutes les questions dont on l'assiège. Et même ces questions ne se produiraient pas.

Pourtant l'Eucharistie est en marche, suspendue sur l'Évangile, elle y tombera prochainement. Jésus est le corps du baptême, il n'est pas venu, le baptême est sans objet. Mais le jour où l'Église aura décidé qu'il est né, qu'il a vécu, il laissera son corps en gage, il mettra dans l'Eucharistie l'âme divine qui manquait au baptiseur. Le Jésus de Valentin n'a nul besoin de donner sa vie pour les Juifs. Il sauve parce qu'il est. Son Père juste, bon et intelligent, ne lui demande rien de pareil, et le cas de Joannès, exploité dans la fable, n'émeut le sensible Valentin qu'au point de vue dynastique ; il garde ses larmes théosophiques pour de meilleures occasions.

 

Marie apprend, non sans déplaisir, que si l'on peut tromper les hommes, il est impossible de mentir à Dieu. Les actions des mortels ont des témoins secrets qui les épient, dressent leur rapport contre les âmes et les punissent de divers châtiments que Jésus révélera tout à l'heure aux disciples, lorsqu'il leur dira l'émanation de Plérôme. Que les évangélistes mentent autant qu'il leur plaira, tout se saura ! La Vierge de la lumière solaire scellera toute âme que lui amèneront les receveurs établis par l'Invisible ; si elle n'est pas satisfaite, elle jettera cette âme dans les corps pécheurs pour la punir, et celle-ci donnera jusqu'à son dernier sicle selon ses mérites[206].

Le sceau de la Vierge sur les âmes a un crédit énorme auprès de Sabaôth le bon, celui que Bar-Jehoudda appelait le Père. C'est un ordre pour Melchissédec qui est le grand receveur des âmes, et qui est à la droite de Sabaôth dans le Trésor de lumière. Ce Melchissédec devait jouer un rôle considérable dans le transfiguration promise à Bar-Jehoudda par la kabbale[207], car lorsque Jésus a terminé ces explications, il dit aux disciples : Comprenez-vous la (nouvelle) manière dont je vous parle ? et Marie s'élance, car son homme de lumière, — l'âme de son mari, — la pousse vers lui, bouillonnant en elle, et voulant sortir d'elle pour entrer en lui. Elle comprend tellement bien qu'elle peut donner quatre sens à l'explication de Jésus, tous les quatre pour tromper les goym : 1° sur le sens réel de la réplique des Évangiles primitifs[208] où, voyant un denier mélangé d'airain et d'argent, il dit : Donnez au roi (Tibère) ce qui lui appartient (l'airain) et à Dieu ce qui est à Dieu (l'argent) ; 2° sur Saül, qu'elle qualifie de notre frère Paul et qu'elle loue d'avoir recommandé le paiement du tribut dans la Lettre aux Romains ; 3° sur une parole très curieuse qui a disparu des Évangiles sous cette forme, et dans laquelle Jésus disait, parlant des Juifs rebelles à sa candidature : Les ennemis de l'homme, ce sont ses domestiques ; 4° sur le véritable sens de cette parole qui est restée clans les Évangiles[209] : Sois d'accord avec ton ennemi de peur d'être jeté en prison, tu n'en sortiras pas que tu n'aies donné la dernière obole.

 

XI. — LA PRÉDESTINATION DE JOANNÈS À LA CROIX.

 

L'expiation approche également pour Joannès, et pour châtier celui-là Dieu n'a pas attendu l'émanation du Plérôme. En dépit de l'horoscope où ses parents lui promettaient mille ans de vie, Dieu Pavait condamné la croix depuis le premier jour. Il n'est pas vrai que ce bar de Jehoudda fût celui de l'Abbas. Et à ce proie Jésus fait de la Nativité aujourd'hui conservée dans Luc, — la plus ancienne, avons-nous dit, et la seule en bonne forme, — l'extraordinaire censure que voici.

Il ne veut pas que les Juifs soient enfants du Père sans quelque contrariété intérieure ; ils sont fils des Archons par le moyen des 365 Liturges[210] qui surveillent la génération et font les sexes à l'aide des deux éléments mâle et femelle dont ils disposent. Ces Liturges entrent dans la femme, ils l'habitent, toujours divisés en deux, les uns contre les autres. Pendant quarante jours ils fixent dans son ventre tout ce qu'elle mange et tout ce qu'elle boit[211]. Après ces quarante jours passés à pétrir de toute la vertu des nourritures le sang embryogène dans la matrice, ils en passent encore trente à former les membres du fœtus, et chacun d'eux forme un membre avec l'appui des Décans intéressés, (soit trois Décans). Soixante-dix autres jours après, sous le quinzième décan, à la fin du cinquième mois, ayant parfait le corps tout entier[212], ils l'appellent (ils le nomment)[213] pour sceller en lui sa destinée : à la main gauche dès le premier jour du plasme ; à la main droite le jour du parachèvement. Au milieu du crâne ils scellent aussi le jour où les Archons[214] leur ont fait remise du corps ; et d'autres particularités de sa formation, ils les scellent en d'autres parties du crâne. Au front ils scellent le nombre d'années que l'âme passera dans le corps[215].

 

Ainsi celui que dès le premier jour ses parents avaient dit être Signe de l'An d'Ieou[216] et le sixième mots, Sauveur[217], celui qu'ils avaient marqué au bras droit de la croix solaire[218], signe de la vie éternelle, celui qui avait annoncé l'apparition finale de ce signe dans le ciel[219], celui-là était prédestiné contre son attente à ne le réaliser que sous la forme patibulaire an Guol-golta. Et c'est pourquoi, à l'insu de lui-même, kabbale dépit de son magnifique horoscope et des noms de kabbale qu'il avait reçus, il avait été scellé aux mains ; il n'a eu qu'à les étendre pour dessiner le Tauros[220] auquel il a été fixé. C'est pourquoi également Jésus dit à Pierre dans Cérinthe : Tu étendras les mains, un autre te ceindra[221] et te conduira où tu ne voudras pas : or il dit cela, indiquant par quelle mort il devait glorifier Dieu[222]. Le reste de ce que dit Jésus n'est plus que formalité. Mais il ajoute un mot précieux : Le mystère de ces mystères, si vous voulez le savoir, c'est Moi[223]. Après cela s'étonnera-t-on encore que Jésus, quoique fils de Marie. Magdaléenne selon le monde, ait accouché d'elle sept puissances dont Joannès est la première ? Quant au type de la mort dont mourra le nouveau-né, s'il doit mourir par une bête sauvage, la Destinée conduit la bête sauvage contre lui afin qu'elle le tue ; ou s'il doit mourir par un serpent[224], ou s'il doit tomber dans une fosse, ou s'il doit se suffoquer lui-même[225], ou s'il doit mourir dans l'eau ou par des choses de cette sorte, ou par tout autre mort mauvaise ou bonne, en un mot c'est la Destinée qui force se mort à s'approcher de lui[226] ; c'est l'œuvre de la Destinée, et elle n'a nulle autre œuvre, si ce n'est celle-là. Et la Destinée accompagne cet homme jusqu'au jour de sa mort[227]. Par conséquent, si Joannès a été mis en croix le 14 nisan 788, c'est qu'il devait en être ainsi, et ce n'est pas du tout, comme l'affirment les gens qui n'ont pas l'Esprit-Saint, pour trahison, assassinat, et vol.

Depuis cette affaire, Jésus n'a plus aucune foi dans les signes astrologiques et dans les thèmes de géniture. Mais combattre la prédestination, c'est miner le christianisme, car enfin s'il n'est pas vrai que le Royaume doive advenir comme a dit Joannès, à quelques modifications près, que sert d'avoir révélé le baptême de rémission aux Juifs ? Et si on ne peut pas raconter aux goym que le bar d'Abbas avait prédit sa crucifixion, comment leur cacher qu'il avait été condamné à mort par le sanhédrin quarante jours auparavant ?

 

XII. — L'ADMISSION DES PAÏENS AU ROYAUME.

 

Quant aux pécheurs (les Romains) qui m'ont fait souffrir cette fois — depuis l'origine du monde le Verbe est apparu bien souvent en Judée sans se heurter à ces barbares —, c'est pour leur donner l'héritage (réservé aux Juifs par Joannès), car sans mystère il n'est pas Possible d'être introduit vers la lumière. Je n'ai pas séparé les pécheurs[228] des justes[229], mais c'est pour tous que j'ai dit : Cherchez afin que vous trouviez, frappez afin que l'on vous ouvre, car quiconque cherche, en vérité trouvera, et à celui qui frappe on ouvrira... La vertu qui était dans le jésus — il vient de citer ce Jésus, c'est Joannès, lequel a dit : Moi, je vous baptise dans l'eau, mais celui qui viendra après moi, m'est supérieur, a prophétisé sur moi[230], sachant que j'amènerais les mystères — dans le monde païen que les Juifs sont en train de mystifier si copieusement —, afin de purifier les pécheurs[231] qui croiraient en moi. Les malheureux, ils sont plus coupables après qu'avant !

Dans ces conditions, et après un tel renversement de ses dispositions premières, Jésus se rend parfaitement compte de l'embarras où se trouveront les hommes lorsqu'ils chercheront à distinguer entre le Verbe valentinien et le Verbe millénariste incarné dans Joannès

Lorsque les hommes iront pour chercher, lui dit Marie, et qu'ils tomberont sur des doctrines erronées, — celles des Paroles du Rabbi, les séméiologies millénaristes et le reste —, comment sauront-ils si elles t'appartiennent ou non ? Et traçant ainsi la règle que les exégètes auraient dû suivre, Jésus répond : Je vous ai dit autrefois : Soyez comme les sages banquiers, c'est-à-dire ce qui est bon, prenez-le ; ce qui est mauvais, jetez-le[232]... Lorsque le vent vient du nord, vous savez qu'il y a de la fraîcheur ; si le vent vient du midi, vous savez qu'il y a de la chaleur (il n'est donc pas bien difficile de faire la différence). Si donc quelques-uns viennent à vous, qu'ils vous prêchent la divinité[233], que leurs paroles concordent entre elles, et avec les paroles que je vous ai dites dans deux ou trois témoignages (écrits antimillénaristes de Basilide et autres), et qu'elles se rencontrent dans le maintien de l'air, des vents, des cycles des astres, des luminaires, de toute la terre et de tout ce qu'elle contient, des eaux et de tout ce qu'elles contiennent[234], ceux-là, recevez-les, ils nous appartiennent[235]. Voilà ce qu'il faut prêcher dorénavant aux hommes, afin qu'ils s'écartent des Apocalypses joanniques et des Évangiles qui en découlent, au nombre desquels est celui de Cérinthe et tous ceux qu'on a mis plus tard sous le nom de Mathias bar-Toâmin, de Jehoudda dit Marcos et de Lucius le Cyrénéen.

Plus de révolution astrale et terrestre au bénéfice des Juifs ? Marie en est toute saisie ! Que deviendra son Corps ? que deviendront ceux de son mari et de ses fils ? Et comment régneront-ils mille ans sur les païens, si les douze patriarches ne viennent plus juger le monde ? Mais rassure-toi, Marie, si tu te convertis au valentinianisme, tu auras là-haut, à la fin des temps, ce que le Seigneur t'avait promis ici-bas par l'organe des deux Joannès[236].

Ce qui la dégoûte le plus profondément, — ah ! si elle pouvait parler ! — c'est qu'en y mettant le prix les chiens de païens vont pouvoir jouir des effets du baptême ! Car Jésus insiste : Maintenant donc, dit-il, quant aux pécheurs qui m'ont fait souffrir[237], je suis venu (revenu) dans le monde, afin de les sauver, parce que les justes (qu'il y a parmi eux), eux qui n'ont jamais fait de mal et qui n'ont pas péché du tout, il est nécessaire qu'ils trouvent les mystères qui sont dans les Livres d'Ieou (Ieou, type céleste de l'homme), ceux que j'ai fait écrire par Enoch dans l'Eden, lorsque je lui parlais (cette fois personne ne l'a fait souffrir) de l'Arbre de la connaissance du bien et du mal et de l'Arbre de vie[238]. Et ces livres, je les aie fait placer dans le rocher d'Ararat[239], à cause du déluge... afin qu'aucun des Archons[240] ne les haïsse et ne les perde ?[241]

Après la mention du Livre d'Ieou, œuvre d'Enoch, Marie prend la parole et dit : Mon Seigneur, quel est l'homme en ce monde qui n'a pas du tout péché, qui est pur d'iniquité ? Le Sauveur répond qu'en fait d'hommes absolument purs, on en trouvera un sur mille, deus sur dix mille, lors de l'émanation du Plérôme. Avant sa venue au monde (commencement de sa première diaconie), personne n'était encore entré dans la lumière. Les mystères en ouvrent les portes simplement, personne n'y entrera avant le temps fixé

C'est un coup terrible pour Marie : Mais, dit-elle, j'ai entendu dire (ne fût-ce que par l'Apocalypse) que les prophètes sont entrés dans la lumière — tels son mari et le frère de celui-ci qui montèrent au ciel devant tous leurs ennemis —. Jésus répond par cet autre coup : En vérité, je te le dis, aucun des prophètes n'est entré dans la lumière (pas même ton fils aîné, comme le prétendent les Évangélistes). Ils ont connu le mystère des Æons[242] ; ils sont dans les Æons depuis Adam avec tous les patriarches, et lorsque Jésus a passé par les Æons pour descendre sur la terre, il a rencontré l'Aine d'Élie qu'il a envoyée dans le corps de Joannès. Or ils ne sont pas montés plus haut, on les tient en observation avec une tendance à la grâce finale : Abraham même, avec Isaac et Jacob, je leur al pardonné tous leurs péchés et leurs iniquités. S'adressant à Marie : Mais, en vérité Abraham n'entrera pas dans la lumière sans que j'aie pris ton âme à toi et celle de tous tes frères. Ses frères, c'est toute sa famille, à commencer par son mari et par son fils ; on sait que devant Dieu une même famille ne comprend que des frères[243]. Il n'en est pas moins vrai que Joannès n'entrera dans la lumière qu'après sa mère. Son corps est toujours à la disposition des chiens dans le roc de Machéron. De plus, et ici Jésus va contre Luc, il n'est pas vrai qu'Eléazar soit au ciel, dans le sein d'Abraham depuis le commencement du mois de nisan 188, puisqu'au troisième siècle Abraham lui-même est encore dans les Æons.

 

La seconde diaconie se terminait par l'histoire, sans doute fort allégorisée, de Joannès depuis le Verseau de 788 jusqu'à la veille de l'Agneau de 789 : soit soixante jours qui comprennent son sacre, sa Journée des Porcs, sa condamnation par le sanhédrin, sa fuite devant la cavalerie de Pilatus au Sôrtaba, son arrestation à Lydda, son emprisonnement au Hanôth et sa crucifixion, le tout remplacé aujourd'hui par la crucifiction de Jésus. Et le Jésus de Valentin y faisait la même distinction que celui de Cérinthe : il rendait Joannès à sa mère au pied de la croix, et ne revenait que pour le chercher parmi les morts du Guol-golta. Tout le chapitre a été coupé ; outre les matières que nous soupçonnons, il contenait un nouvel extrait des Livres du jésus[244], et plus important encore que le premier, car il rapportait toutes les invocations de la kabbale baptismale avec les principales formules de bénédiction et de malédiction dont usait l'individu qui, comme le dit si bien Flavius Josèphe, ne se faisait conscience de rien pour tromper le peuple. Ces formules, Jésus ne les renie point par elles-mêmes : au contraire, il s'en sert avec les modifications que l'Esprit dont il est a apportées au Verbe dont était Joannès. Nous les avons reproduites en partie, n'y revenons pas.

 

XIII. — LE MOT DU PLÉRÔME.

 

La troisième diaconie de Jésus contenait ce que Valentin appelle l'émanation du Plérôme, et elle durait onze ans. Elle commence le lundi 20 nisan, troisième jour de la mort de ce Joannès, que ses partisans pouvaient appeler notre seigneur jésus[245], car il était l'un et l'autre pour eux : seigneur, comme roi-christ, et jésus comme baptiseur. Lorsqu'il procède à l'émanation du Plérôme, le nombre fixé par l'Apocalypse est passé-depuis cinq jours. Joannès s'est trompé dans son compte d'années parce qu'il s'est trompé dans celui des jours[246]. Il a fait l'année de trois cent soixante jours, comme Moïse. Mais de nouveaux calculs, pris aux Égyptiens Par les Romains, permettent à Jésus de la faire de trois. Cent soixante-cinq jours[247]. A la vérité, il semble que Joannès ait connu le nom incorruptible[248] des trois-cent soixante Archons des jours, mais il a ignoré toute sa vie celui des cinq Archons qui les complètent et les dominent. Jésus dit formellement aux disciples qu'il les leur révèle pour la première fois[249].

 

Débarrassé de son corps qui est depuis la veille à Machéron, et sorti indemne de sa crucifixion, Jésus se tient debout avec les disciples sur la montagne de Sion ; et ils lui demandent miséricorde, car pour le suivre ils ont, disent-ils, abandonné père et mère, ainsi que le monde[250]. Et comme il se sert alors de l'invocation de Joannès à l'Abbas, les autres fils de l'homme de lumière, Toâmin, André, Jacques, et Simon le Kanaïte[251], se placent à l'Occident, le visage tourné Vers l'Orient ; Philippe et bar-Toâmin — Mathias, fils de  Toâmin, en remplacement de Ménahem[252] —, au Sud, le visage tourné vers le Nord ; le reste des disciples (Éléazar au moins, et Cléopas junior), se placent, avec toutes les femmes disciples de Jehoudda, derrière Jésus, qui par un effet de sa puissance se trouve tout à coup sur l'autel, entraînant ainsi dans le Temple toute la famille des Jehoudda, des Cléopas et des Jaïr. On sait d'ailleurs que le Joannès devait entrer dans le Temple le 15 nisan pour célébrer les Noces de l'Agneau avec la Judée[253]. Dans cette disposition Jésus tourne le dos à l'Orient, et cela se conçoit, puisqu'il devait en arriver, se dirigeant vers l'Occident pour le soumettre à ses armes. Ainsi divisés, les assistants représentent une croix dont l'autel est le centre. Il n'en peut être autrement, et dans les synoptisés vous avez vu Jésus -envoyer chercher les deux Ânes à l'entrecroisement des deux chemins qui vont l'un du nord au sud, l'autre de l'est à l'ouest[254].

Ferme sur l'autel, Jésus en se tournant vers les quatre -angles du monde, avec les disciples tous vêtus de lin, s'écrie : Iaô Iaô, ce qui veut dire : Iota que le Plérôme est sorti[255], Alpha qu'ils se retourneront dedans, Oméga qu'il est la fin de toutes les fins.

Diable ! voilà qui donne à penser. Mais avec un peu de mémoire les lecteurs du Mensonge chrétien peuvent expliquer tout cela très clairement. Ils se rappelleront d'abord que le ben-Sotada du Talmud se distinguait de ses sujets éventuels par la façon dont il prononçait le nom de Iehova. Par ce moyen il tournait la loi qui défendait et qui défend encore aux Juifs de prononcer ou d'écrire, en les appliquant à leur dieu, les quatre voyelles qui entrent dans ce nom sacré. Mais il était permis (il l'est encore) de rendre abréviativement le nom de Iehova par deux I. Prononcée deux fois au commencement d'Iaô, la lettre I correspondait au tétragramme interdit : I-E-A-O. Dès le moment qu'un homme peut appeler Iehova de son vrai nom, c'est que le Plérôme est sorti. En d'autres termes, le nombre fixé Par l'Abbas est atteint, les temps sont accomplis, le Royaume commence, la Jérusalem d'or descend des cieux. A l'appel de bar-Jehoudda les murs de Jérusalem tombaient pour faire place à l'édifice céleste, et c'est pourquoi Jésus s'est trouvé transporté du Mont Sion sur l'autel sans rencontrer le moindre obstacle. Ananias et Apollos qui tous deux baptisaient du même baptême que Joannès et avec la même kabbale, connaissaient aussi bien que lui le mot du Plérôme, et vous savez par tomber Josèphe que les murs de Jérusalem devaient tomber devant certaines paroles prononcées par Apollos lui-même[256].

Car ici le mot Plérôme désigne non pas le Plérôme spirituel dont Jésus nous a annoncé l'émanation pour tin de ces jours, mais le Plérôme tel que l'avait conçu Joannès, c'est-à-dire l'accomplissement de l'Apocalypse sous les trois signes que l'on compte entre le Zib et les Ânes. Jésus est donc d'accord avec Joannès, lorsqu'il dit que Iaô est le mot du Plérôme. Lorsque ce mot sera réalisé, les quatre angles se retourneront à l'intérieur (se rabattront), mouvement dans lequel ils se rejoindront fatalement pour ne former qu'un point. Cela ne signifie pas que le monde soit carré, mais que quatre angles disposés comme dans la figure ci-dessous occupent les quatre points cardinaux, et que ces quatre points, la croix les marque de son côté par ses deux lignes.

La croix solaire reviendra à son point initial. Toutes choses revenant à leur commencement, les disciples aussi se retourneront au dedans d'eux-mêmes à l'imitation des quatre angles, et reviendront à leur point de départ concentrique. En un mot leurs deus parties originelles, la masculine et la féminine, se rejoindront pour se reconstituer par la loi de la réintégrande[257], et alors il arrivera ce que Jésus dit si bellement à Salomé dans les Paroles du Rabbi : Ce qui sera dehors sera dedans, un en deux, deux en un ; ce sera le retour à l'androgynisme adamique. Vous connaissez à fond tous ces dogmes parfaitement ineptes, quoique mathématiquement justes, mais vous avez le droit d'être étonnés qu'Oméga soit la fin de toutes fins, car il ne suffit pas que cette lettre soit la dernière de l'alphabet grec, pour rendre la figure de la kabbale joannique. Au lieu de l'Oméga, mettez un Thav, dernière lettre de l'alphabet hébreu, et vous avez le mot du Plérôme. Le mot Iaô dans la bouche de Joannès faisait Iaphthav[258] et Valentin dit formellement que c'est le nom du Père de la lumière. D'ailleurs, et c'est un fait décisif, les disciples ne demandent pas l'ombre d'une explication sur les mots de kabbale placés dans le bouche de Jésus ; eux qui ne comprennent jamais rien, comprennent tout.

Pour le principe Jésus sanctionne cette formule, c'est celle de Sérapis et de la croix dite ansée[259], marque d'espoir dans la clémence divine ; mais comme il a remis e une autre fois la destruction du monde non juif, il révoque toutes les dispositions que Joannès avait prises en son nom pour la mobilisation des puissances célestes. Il a rendu impossible le mouvement que Joannès faisait partir de la droite, et il transporte toutes les puissances à l'Occident, à la gauche du disque du soleil et de la lune qui, eux aussi, devaient opérer leur jonction dans le ciel et disparaître en même temps au commencement du Zib. Il oblige Barbilô la Sangsue lui-même à se séparer de la droite où il se tient d'ordinaire. Donc point de Plérôme sous les Ânes de 789, et en effet tout' est resté en place. Pour toute manifestation sensible Jésus envoie à l'Occident le monde entier, avec les montagnes et la mer, de manière que les disciples aient une petite satisfaction et que, par lui transportés dans le second ciel ou voie du milieu, séjour ordinaire d'Ieou[260], ils aient la vue de ce qui est derrière le fond de la mer et à la racine des montagnes. Ce geste envers le monde est conforme à l'Apocalypse où il n'y a plus ni montagnes ni mer à partir du jour où le nombre est atteint[261]. Jésus a l'intention de mener les disciples en enfer, où d'ailleurs il les laisse. Comment pourraient-ils le suivre, s'il maintenait de pareils impedimenta ?

Marie n'est pas peu flattée de connaître de visu les voies du milieu que Joannès lui a décrites autrefois, mais elle n'est pas tranquille, car, dit-elle à Jésus, nous t'avons entendu dire qu'elles commandaient de grands châtiments. Et en effet les sept Anges de l'Apocalypse, qui devaient répandre sur la terre les sept coupes de la colère de Dieu, partent de ces voies. Ces châtiments, destinés à d'autres coupables, tous les disciples les méritent : Quelle est donc, ô notre Seigneur, la manière dont nous en sortirons ou dont nous leur échapperons[262] ? Sois miséricordieux pour nous, ô notre Sauveur, afin que les Receveurs (qui vont chercher les âmes des morts pour les conduire au jugement) ne nous enlèvent pas pour nous condamner à des châtiments mauvais... afin que nous héritions, nous aussi, de la lumière de ton Père, et que nous ne soyons pas pauvres, mendiants[263], loin de toi. A quoi Jésus répond : Vraiment, mes frères et mes bien-aimés, je vous donnerai toutes les connaissances et tous les mystères... les sceaux, les chiffres des douze Æons, la manière d'invoquer pour entrer en leurs lieux...[264], les sceaux, les chiffres du treizième Æon[265]..., le mystère du baptême des Æons du milieu[266], leurs chiffres, leurs sceaux, avec la manière d'invoquer pour entrer en leurs lieux, le baptême des Æons de droite, avec les chiffres, les sceaux et les invocations[267]..., le grand mystère du Trésor de la lumière avec la manière d'invoquer pour y entrer[268]. Vous êtes bien heureux, vous, plus que tous les hommes de la terre, car les enfants de la lumière[269] sont venus en votre temps[270].

Ils se figuraient que les puissances du second ciel étaient tout entières aux ordres du Père et par conséquent de son bar. Mais c'est une erreur. Il résulte des explications de Jésus que, même dans le second ciel, Adamas, le Satan valentinien allié à Adrien, a conservé des intelligences égales à celles que Satan allié d'Auguste entretenait dans le ciel visible. Il y en a une notamment qui a déployé une puissance terrible pour faire pécher les disciples : c'est l'Aliénée, l'Etrangère[271]. Elle commande à une multitude de démons, et ce sont ces démons qui sont entrés dans les hommes pour les faire mettre en colère, maudire, calomnier, (on en passe). Et, ce sont eux qui enlèvent les Cimes frustrées dans leur attente du Royaume, pour les envoyer au châtiment dans la fumée des ténèbres et de leur feu méchant[272]. Marie entend d'autant mieux que l'Etrangère est à forme de femme dont la chevelure tombe à terre sur ses pieds comme eût pu faire celle du Nazir, si elle n'eût été rafraîchie[273]. Et puis, si l'Aliénée souffle seulement la colère, le blasphème et la Calomnie, il y a aussi Arioth l'Ethiopienne, toute noire, avec quatorze démons tout noirs aussi, qui entrent dans les hommes provocateurs afin d'exciter les guerres, et qu'il y ait des meurtres qui endurcissent leur cœur.

L'Ethiopie a été très mauvaise pour les disciples[274]. Une autre vilaine puissance, trop connue des païens, c'est Hécate au triple visage[275], avec les vingt-sept démens qu'elle a sous ses ordres : Ce sont eux qui entrent dans les hommes afin de les faire jurer facilement et de les faire mentir, de leur faire aimer ce qui n'est pas eux[276]. Une quatrième puissance est Typhon[277] avec ses trente-deux démons qui entrent dans les hommes pour les induire en concupiscence, les faire forniquer, titre adultères et constamment dans la cohabitation (copulative). Un cinquième, Iackthanabas[278], commande à une foule de démons qui entrent dans les hommes afin de les rendre corruptibles, traitant Injustement les justes et favorisant les pécheurs, recevant des présents pour leurs jugements, oubliant les femmes et les indigents, indifférents aux soucis de conscience dans lesquels il n'y a point de profit, de sorte qu'ils perdent leur vie. Tels sont les cinq mauvais Esprits qui conspirent encore contre les hommes, au moment où Jésus révèle à Marie le rôle des voies au milieu dans les châtiments infernaux.

Ce sont eux qui ont pesé sur la Balance, le Scorpion, l'Archer, le Capricorne et le Verseau pour enlever les cinq Æons de ces signes à la mission que Joannès leur avait dévolue, et ils ont ainsi frustré les disciples de l'héritage qui leur revenait. La mission des cinq signes qui précèdent les Poissons, vous la connaissez à fond par l'Apocalypse, mais les disciples ont été déçus, ils sont tombés dans l'erreur et dans le péché par l'influence des cinq hiérarchies des démons de Rome, d'Ethiopie, d'Égypte, d'Asie et de Grèce.

Ils sont consternés, mais n'ont-ils pas en eux, dans leur sang, cette grâce spéciale qui a permis au Joanne de remettre les péchés d'autrui sans souci des signa propres ? Souvenez-vous, leur dit Jésus, que je vous ai dit avant qu'on ne me crucifiât : Je vous donnerai les clefs du Royaume des cieux (sur terre). Maintenant encore, je vous le dis : Je vous les donnerai. C'est dans l'Apocalypse qu'il leur faisait la promesse de leur donner les clefs du Royaume, et il y a lieu de croire que cela se passait dans le Verseau qui a disparu complètement de l'adaptation dite de Pathmos. Quant à ce qui devait se passer dans le Zib, c'est ce qui Se passe aujourd'hui dans les multiplications de pains, grâce aux deux poissons de ces similitudes chiffrées.

Jésus accuse les signes égyptiens, notamment le Bélier de Bubaste (celui d'Aphrodite), de s'être alliés avec les démons des cinq mauvaises hiérarchies des voies du milieu, pour faire échouer la combinaison qui devait donner la terre aux Juifs. Valentin évite d'ailleurs avec grand soin de donner à l'Agneau et aux Ânes, les deux signes les plus en vue après les Poissons, le nom qu'ils ont dans le Zodiaque joannique. L'Agneau est remplacé par le Bélier[279], les Ânes par le Cancer[280], et le Zib n'est jamais nommé[281], quoique ces trois signes le fussent sous leur nom de kabbale dans les Paroles du Rabbi et que le dernier le soit encore dans les Synoptisés, où les pharisiens appellent Jehoudda Baal-Zib-baal et les évangélistes Zibdéos. Mais la Vierge, la Balance, l'Archer et le Capricorne conservent le nom qu'ils ont dans l'Apocalypse. Le Verseau, les Gémeaux, le Lion conservent également leur nom habituel.

 

XIV. — OÙ JÉSUS DÉNONCE L'EUCHARISTIE ET CONDUIT TOUS LES DISCIPLES EN ENFER.

 

Jésus ne veut pas quitter le second ciel sans avoir fourni une interprétation honnête de la Cène telle qu'elle se présentait dans les Évangiles contemporains de Valentin. Avant comme après cette imposture, le même Enfer attend tous les disciples.

Etant donné que Joannès était en croix depuis la veille, quand Jésus célèbre les Noces de l'Agneau, que signifie cette invention des mythologues ? Cette Cœnofiction est la suite naturelle de la Crucifixion. Le Jésus du baptême de lumière, Ieoschoua au grand I, a profité de son passage annuel pour tirer d'affaire le jésus du baptême d'eau, ieoschoua au petit i et au petit pied. C'est tout.

Après avoir chanté l'hymne du Grand nom[282], Jésus efface les voies du milieu, et reste seul avec les disciples dans une gloire fort lumineuse, comme vous pouvez le croire. Approchez-vous de moi, dit-il, et se tournant vers les quatre points cardinaux il dit le Grand nom sur la tête des disciples, il souffle sur leurs yeux pour leur donner la force de regarder et de ne pas tomber à la renverse, comme font les gens du Temple quand ils l'arrêtent sur le Mont des Oliviers. Regardez en haut, leur dit-il, prenez garde à ce que vous voyez. Ce qu'ils voient, nous l'avons déjà dit[283], c'est du feu et de l'eau, les deux figures du sang et da vin, qui sont par leur chaleur deux composés de ce deux principes, le vin désignant plus spécialement l'Orient, l'eau l'Occident. Jésus est à la fois tout cela il n'a pas apporté d'autre mystère au monde — franchement il aurait beaucoup mieux fait de rester chez bill car pour le fond c'est le mystère du nommé Polichinelle —, et sous les espèces eucharistiques le vin n'a été cœnofictivement versé que pour remettre les péchés des disciples, des seuls disciples. C'est pourquoi, dit-il, j'ai pris une coupe de vin, je l'ai bénie et je vous l'ai donnée en disant : C'est le sang du testament qui sera versé pour vous, pour la rémission de vos péchés[284]. Voilà qui est catégorique et qui tranche avec les formules inintelligibles des versions substituées.

Cette grâce n'intéresse donc pas les païens. Néanmoins Jésus profite de l'occasion qui s'offre à lui d'effacer dans leur esprit le détestable effet qu'y produisent toujours les paroles de Joannès au Jourdain, à savoir que le feu est la matière de l'Esprit Saint et que l'objet de l'Esprit-Saint en 789 était de tomber sur l'Occident pour le brûler. Au contraire, dit-il, l'Esprit attire toutes les âmes pour les conduire au lieu de la lumière[285]. Et, mensonge qui fait suite au premier : C'est pourquoi je vous ai dit : Je suis venu pour jeter le feu sur la terre, c'est-à-dire : Je suis venu pour purifier les péchés du monde entier par le feu ; et par ce feu bien intentionné il entend le baptême qui sera donné dans la lumière lors de l'émanation du Plérôme.

C'est pour qu'il y ait du sang dans l'affaire qu'on a percé son flanc d'une lance, mais c'est une sacrifiction bien involontaire de sa part et dont le bar d'Abbas se serait parfaitement dispensé s'il eût été consulté. D'ailleurs, cette effusion se place dans l'après midi du 16 nisan, deux jours après le mythe de la Cène. Ce sang ne remet nullement les péchés des disciples. Encore ne pourrait-il les remettre avant d'avoir été versé. Jésus n'a donc pas pu stipuler cela le 15. Non, ce qui remet les péchés, ce sont les mystères de la lumière, c'est-à-dire les dénominations et les noms de la lumière, en un mot ce sont les puissances divines invoquées par leurs différents noms. Or Joannès ne les a pas tous connus, puisqu'il a ignoré le treizième Æon et l'Invisible.

 

Sur ce, — changement à vue un peu brusque, — la scène est transportée sur la montagne de Galilée dont il est question dans les Évangiles et qui est celle de Gamala. Les disciples au comble de l'inquiétude font observer à Jésus que jusqu'à présent, admit-on même que le bar d'Abbas ait célébré la Cène, il n'a pas fait, disent-ils, que soient pardonnés nos péchés, que nous avons commis, et nos iniquités, afin que nous devenions dignes des mystères de ton Père. Nous avons donné l'épouvantable confession qui s'ensuit[286] et dans laquelle ils avouent en bloc les crimes qui leur out valu leur renommée de scélératesse[287]. Nous avons donné les invocations que Jésus adresse aux puissances de la lumière et qui sont les invocations de Joannès transposées d'une foule incommensurable d'octaves. Nous avons donné la formule du baptême de fumée qui est le second degré de l'initiation valentinienne[288]. Nous ne revenons pas sur tout cela. La seule chose que nous devions mettre en un relief particulier, c'est la coupure de huit feuillets qui a été pratiquée dans la confession des disciples. Ce qui a été coupé, c'est l'aveu fait par le bar d'Abbas qu'il avait assassiné Ananias et sa femme, parce que ceux-ci lui disputaient l'héritage. Ce qui a disparu également, avec la majeure partie de la troisième diaconie[289], c'est la conclusion morale de toute la Sagesse : onze années passées dans l'Amenti, l'Enfer, où Jésus conduit les disciples et les laisse au milieu des tourments, jusqu'à la fin des siècles. Pour remplacer tout cela, la Sagesse se termine aujourd'hui par une interpolation où l'on a introduit le mot christ, afin de faire croire que ce prétendu christ s'appelait Jésus et qu'il est l'auteur de tons les miracles opérés Par celui-ci dans les Évangiles !

 

 

 



[1] Je réclame l'introduction de ce néologisme dans le dictionnaire pour désigner le cas de Jésus et la différence qu'il y a entre cruci affigere, clouer à la croix, et crucem fingere, représenter la croix.

[2] Connaisseurs en choses du ciel, experts en Dieu, théologiens frottés de kabbale ou mieux kabbalistes tirant vers la théologie, bons moralistes pour la plupart.

[3] C'est le nom de cette secte juive.

[4] Guerre des Juifs, livre II, ch. XII.

[5] Les Évangiles de Satan, première partie.

[6] Lequel avait lu Enoch.

[7] D'après Enoch qui a donné la meilleure définition du Fils de l'homme engendré de Dieu avant la création du monde. Cf. le Livre d'Enoch, édition de l'abbé Migne, ch. XLVI, 1-4 ; XLVIII, 3-7, et LXI, 10-11.

[8] Contra hœreses, livre II.

[9] Pistis Sophia, éd. Amélineau, Paris, 1895, in-8°. Tout ce chapitre est tiré de cet ouvrage.

[10] Excuse déjà plaidée par Cérinthe.

[11] Dans les Synoptisés. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[12] On a ajouté : Quant à Joannès il a bien dit : Je ne suis pas le Christ. Cette citation provient du Quatrième Évangile. C'est une interpolation manifeste du texte de Cérinthe d'abord, de celui de Valentin ensuite.

[13] Pas un instant les Valentiniens ne contestent le bien-fondé de la condamnation à mort du Joannès.

[14] Pistis Sophia, p. 187.

[15] Mais au lieu de sucer le sang, il l'émet, le sue. De là, la sueur de sang de Jésus pendant sa rétrogradation équinoxiale.

[16] Cf. Le Charpentier.

[17] Pistis Sophia, p. 194.

[18] Pistis Sophia, p. 194.

[19] Cf. Les Marchands de Christ et Le Saint-Esprit.

[20] Pistis Sophia, p. 68.

[21] Pistis Sophia, p. 94.

[22] Ils reviennent si souvent !

[23] Pistis Sophia, p. 94.

[24] Il ne faut jamais oublier que son fils aîné disait avoir été transporté du troisième ciel d'où il avait rapporté l'Apocalypse et la solution de toute la kabbale astrologique préalablement adaptée à ses besoins personnels.

[25] Pistis Sophia, p. 37.

[26] Pistis Sophia, p. 37.

[27] Pistis Sophia, p. 117.

[28] Aux pages 97, 101, 102, 104, 111, 119, 121, 125, 167, 177.

[29] Page 102, par exemple.

[30] D'où elle provient sans nul doute.

[31] Pistis Sophia, de la p. 194 jusqu'à la fin.

[32] Pistis Sofia, pp. 141, 148. Ieou est le patron céleste sur lequel été fait le premier homme, mais il est bien antérieur à celui-ci, puisqu'il est fils de Dieu avant la création du monde.

[33] Ne pas oublier qu'il est né dans ce signe, le sixième mois après l'Agneau.

[34] Il résulte d'un autre passage, page 150, qu'elle est accompagnée de sept autres Vierges de moindre éclat : un sabbat de Vierges.

[35] Il ressort de plusieurs passages de Pistis Sophia, notamment p. 151, que non seulement Ieou est au ciel, mais qu'il y commande ras une mesure immense, au point de faire surveiller d'en haut par des anges le Dragon des ténèbres extérieures afin qu'il ne mette pas le monde sens dessus dessous.

[36] Et non selon le ciel où il est son Époux.

[37] Pistis Sophia, p. 62.

[38] Pistis Sophia, p. 31. On peut être sûr que, dans la Sagesse originale, c'est Joannès qui parlait.

[39] Pistis Sophia, p. 83. Ce propos suffit à démontrer qu'on a remplacé Joannès par Pierre, car la façon dont Pierre baissait le sexe féminin ne l'avait pas empoché de se marier et d'avoir au moins deus enfants.

[40] Le Premier mystère, c'est le Verbe Fils de Dieu, alias le Fils de l'homme ; le témoignage de ce mystère, c'est le baptême d'eau qui remet les péchés en vue du baptême de feu ; et celui qui a témoigné de ce mystère au Jourdain, c'est le Joannès baptiseur.

[41] Cf. Le Charpentier.

[42] Pistis Sophia, pp. 62 et 63.

[43] Pistis Sophia, p. 62. En un temps où c'est le Baptiseur qui donnait la rémission par l'eau, et non pas Jésus par l'Eucharistie.

[44] Tout cela est resté dans la Sagesse, malgré les coups de ciseaux et de plume apportés par l'Eglise. C'est en vain qu'en divers écrits, pp. 62 et 63, on a fait avancer l'autre Marie, pour égarer les esprits ; Joannès et Jésus n'ont qu'une seule mère : Eloï-Schabed pendant six mois et Marie pendant trois. Nous avons dit (dans Le Charpentier et dans Les Evangiles de Satan, première partie) par quel artifice verbal la titulaire du premier nom s'incorpore à celle du second nom. Voyez aussi Pistis Sophia, p. 64. Immédiatement après la constatation qu'Eloï-Schabed, mère de Joannès, et Marie, mère de Jésus selon le monde, ne font qu'un, M. Amélineau relève une interpolation criante, laquelle très certainement vient remplacer l'explication que Joannès donnait lui-même des signes employés dans l'horoscope de sa Nativité. Et qui eût pu en donner une meilleure ? Cet horoscope provient de sa propre Apocalypse !

[45] Cf. Le Charpentier.

[46] Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[47] Figure de la mère des Juifs.

[48] Pistis Sophia, p. 60.

[49] Une main qui s'est cru fort habile a glissé à cet endroit : Elle et l'autre Marie (Magdaléenne) la bienheureuse, de manière à faire croire que cette Marie était distincte de la mère de Jésus selon le monde. En ce cas, il n'aurait pas fallu qualifier cette autre Marie de bienheureuse, car comme il est dit ailleurs que Marie Magdaléenne est avec Joannès supérieure à tous les disciples il se trouve que cette femme, dont le corps fut hanté de sept démons au compte de l'Eglise, est déclarée supérieure à Marie, mère de Jésus, laquelle a continué l'œuvre d'Eve sur la terre en y fixant les ténèbres introduites par sa devancière.

[50] Et même la mort.

[51] Matériel, charnel.

[52] Pistis Sophia, p. 102. M Amélineau croit voir à cet endroit un texte évidemment fautif, et tout en reconnaissant que le mot Jésus y est bien, il propose de lire Marie. Mais, loin d'être fautif, le texte est un des rares passages qu'on ait respectés dans la Sagesse primitive. Encore peut-on être sûr qu'on l'y a laissé par inadvertance.

[53] Nous avons cité un autre exemple où Jésus et le jésus sont opposés l'un à l'autre dans la même phrase. Cf. Le Charpentier. Nous en citons encore d'autres plus loin. Nous n'en avons pas compté moins de six dans la Sagesse.

[54] Son ministère compté du Capricorne de 738 au Capricorne de 788.

[55] Pistis Sophia, p. 87.

[56] Pistis Sophia, p. 130.

[57] Nom chaldéen du Capricorne.

[58] Cf. Le Charpentier et L'Évangile de Nessus.

[59] Il en accomplit trois dans Valentin, les trois temps ou signes que Joannès comptait avant les Ânes.

[60] L'Æon-Poissons. Rappelons encore une fois que les douze Æons incarnent les douze cycles du Zodiaque millénaire.

[61] Pistis Sophia, pp. 20, 21. Jésus s'adresse à Marie, la belle en élocution et la bienheureuse. Il s'agit manifestement de la mère du Joannès.

[62] Sur cette théorie, exposée fort obscurément dans les Synoptisés, cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[63] Cf. son horoscope dans Le Charpentier.

[64] Pistis Sophia, p. 3. Il est dit dans le texte : le quinzième jour de la lune, le jour où s'achevait le mois de Thàbé (pour Thébet), le 14 janvier par conséquent, les signes du Zodiaque étant à califourchon sur les mois actuels. Vous savez assez que le 15 nisan 789 Joannès est sorti du Zib pour entrer dans l'Agneau.

[65] Reportés au Guol-golta dans Matthieu.

[66] Le monde païen s'entend. On a vu que, loin d'être détruite, la Judée portait douze récoltes par an. Cf. Le Roi des Juifs.

[67] Il n'est pas étonnant qu'après une aussi longue répétition ils l'attaquent avec assurance, la Cène terminée.

[68] Ils n'ont rien à craindre de lui. S'il est le destructeur du monde païen, il est le Sauveur de la Judée.

[69] Ne jamais oublier que le signe précurseur du Royaume dans le Zodiaque des Millénaires ou Æons, c'est le Verseau, et que Jehoudda le père est par quatre fois désigné sous le nom de Joannès dans les Évangiles.

[70] L'origine solaire de l'Ascension et de l'Émission du Saint-Esprit s'accuse nettement dans les plus anciennes représentations de la Pentecôte, où l'on voit Jésus parvenu au sommet d'une auréole elliptique envoyer ses rayons sur les apôtres. Citons ces deux exemples : la Pentecôte sculptée sur le porche de Vézelay au commencement du douzième siècle, et la Pentecôte peinte de Pyrga dans l'île de Chypre où le culte du soleil a été répandu de toute antiquité.

[71] Les Poissons.

[72] Les Ânes.

[73] Pistis Sophia, p. 13.

[74] Cf. Le Roi des Juifs.

[75] Pistis Sophia, p. 14.

[76] Cela confirme notre soupçon que Bar-Jehoudda était engastrimythe, usait de ventriloquie.

[77] Cf. les Évangiles de Satan, 2e partie.

[78] Afin de ne pas ruiner complètement le système de Joannès, imagine un treizième Æon qui aurait précédé l'Agneau de la Genèse, et qui constitue en quelque sorte le Zib de l'Invisible.

[79] Cf. Le Roi des Juifs.

[80] Pistis Sophia, p. 97.

[81] C'est le lieu qui répond à la Cour du trésor dans le Temple da Jérusalem et où il y avait treize troncs.

C'est le Gazophylakion d'en haut. Sur cette similitude, revoyez la parabole où la veuve de Jehoudda le Gamaléen met dans le tronc les deux lepta qui, selon l'Apocalypse de son fils, la séparent de l'entrée dans l'Æon-Zib. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[82] Pistis Sophia, p. 86.

[83] Surnom donné à la femme de Jehoudda par le Talmud et justifié par la théorie de l'un en deux, deux en un.

[84] Pistis Sophia, p. 8.

[85] Il devait en revêtir un quatrième et dernier, sous le quatrième signe. Cf. Pistis Sophia, p. 8.

[86] Valentin reproduit cette parole qui, nous l'avons rait observe, date d'un temps où la décollation du Joannès n'existait pas encore dans l'Évangile.

[87] Pistis Sophia, p. 8. On se rappelle qu'Éloï-Schabed (aujourd'hui Elisabeth !) est le nom hébreu du serment d'Eloï.

[88] Cf. le discours sur la Vierge du Monde dans les Œuvres d'Hermès Trismégiste, trad. Ménard. (Paris, 1867, in-12°).

[89] Créé le quatrième jour, le Soleil n'a eu sa lumière supportable à l'homme que sous le signe de la naissance d'Adam.

[90] Pistis Sophia, p. 95.

[91] Cf. L'Evangile de Nessus.

[92] Qui répond à notre février.

[93] Toute cette partie de la p. 23 à la p. 28 est terriblement corrompue.

[94] Le Lion, nous l'avons dit, est également la figure des armes parlantes de la famille Cléopas où Jehoudda avait pris femme. (Sur le rôle du Lion dans l'Apocalypse, cf. Le Roi des Juifs.) Dans s mythologie astrologique des Perses, le Lion tient le bâton de commandement qui devient serpent après la Vierge par l'influence de Satan La verge que Moise change en serpent en la jetant à terre est une image de ce mythe. Témoin cet Æon perse conservé au musée de Offices de Florence. (Salle des Inscriptions.) La bande zodiacale sculptée sur le globe ne contient que trois signes : la Balance, le Cancer et le Zib. Il manque la Vierge et le Bélier (Agneau dans l'Apocalypse), qui figurent les équinoxes et sur lesquels le Serpent de la Genèse ne peut rien. Signalons surtout le double petit enfant ailé* qui échappe au Serpent : c'est l'Adam perse. Celui des Juifs n'en est qu'une contre façon.

* Il lui manque une tête, celle d’en bas.

[95] Mais hélas ! Jérusalem n'a pas connu le temps de sa visitation, comme dit Jésus dans les Synoptisés. Cf. Les Evangiles de Satan, deuxième partie.

[96] Les sept fils de Marie, ses deux gendres et leur secte.

[97] Bar-Jehoudda le croyait. Cf. Le Roi des Juifs.

[98] Par les gens de Saül, et arrêté.

[99] Cinquante ans, qu'est-ce en comparaison des mille ans attendus ?

[100] Cependant ils ne sont pas allés jusqu'à la pétrification, nous en avons la preuve par l'accueil que les animaux leur ont fait en 362. Cf. Les Marchands de Christ.

[101] Ce n'est pas un oubli, quoiqu'il soit dit dans l'Évangile : Ils avaient oublié de prendre des pains. C'est la privation du léhem-Zib.

[102] Point de zib dans le désert pour cet oiseau aquatique.

[103] Et même deux.

[104] Voir la mascarade du prétoire et ses suites.

[105] Dame ! ils n'étaient pas contents d'être en croix pour un tel souverain !

[106] Par lui Kapharnahum l'avait été jusqu'aux cieux. Cf. le présent volume, au chapitre Liquidation bar-Abbas.

[107] Et passé sans résultat.

[108] C'est la définition de l'An de grâce, l'Ieou-Shanâ dans Luc.

[109] Je vous donnerai mon nouveau nom à moi-même et le nom de la ville descendue d'auprès de mon dieu, dit le Joannès dans l'Envoi de Pathmos.

[110] Le numéro ne correspond plus aux divisions actuelles.

[111] Le Guol-golta.

[112] C'est absolument cela.

[113] Ses deux voisins de croix l'accablent d'injures.

[114] C'est vrai, Ménahem est mort le dernier, trente ans après son frère aîné.

[115] Cf. Flavius Josèphe dans le Gogotha.

[116] Cf. Flavius Josèphe dans le Gogotha.

[117] Cf. Flavius Josèphe dans le Gogotha.

[118] Cf. Le Saint-Esprit.

[119] Âme, dit la traduction de M. Amélineau. Mais ici âme a le sens de vie, existence, comme dans l'Évangile.

[120] Les membres du sanhédrin qui l'ont condamné sur les réquisitions de Saül. Ils déchirent volontiers leurs vêtements dans les Evangiles et les Actes.

[121] Cf. Le Saint-Esprit.

[122] De stratège du Temple. C'est en effet ce qui lui arriva pour avoir manqué sa seconde expédition de Damas. Cf. Les Marchands de Christ. Mais il reprit son poste plus tard. Cf. Le Saint-Esprit et Le Gogotha.

[123] Elle ne fut veuve que bien tard, si toutefois son mari n'est pas mort après elle.

[124] En 819 Ménahem lui en a tué un, nommé Antipas. Cf. Le Gogotha.

[125] S'il y en avait d'autres qu'Antipas, et c'est probable, ils ont pu suivre leur père en Espagne. Cf. Le Gogotha.

[126] Ils le furent et rudement. Cf. Le Gogotha.

[127] C'est ce qu'ont fait les auteurs des Actes des Apôtres et des Lettres de ce prince transformé en tisserand. Ils l'ont appelé Paul !

[128] Les Hérodes.

[129] Sa mère-grand, alliée aux Amalécites et aux Arabes. Cf. Le Roi des Juifs et Les Marchands de Christ.

[130] Cf. Les Actes des Apôtres.

[131] Ah ! André. André ! Pouvais-tu te douter qu'on lui passerait un jour la ceinture de ton frère Jacques par nécessité ecclésiastique ? Mais aussi pourquoi en avoir donné l'idée aux auteurs des Actes ? Cf. Le Gogotha.

[132] De Tout-Puissant et de Sauveur.

[133] De l'huile qui m'a manqué. Lapidé par Saül, il n'a pu recevoir le chrisme selon la formule de son frère aîné, formule qui sauvait les malades en rendant leurs membres propres à la résurrection.

[134] En effet Jésus le ressuscite dans Luc. Cf. Le Roi des Juifs.

[135] Épître aux Romains, XIII, 7. Existait-elle déjà au temps de Valentin ? J'en doute fort.

[136] D'où procède l'Abbas lui-même.

[137] Accomplissement du thème du monde.

[138] Pistis Sophia, p. 128.

[139] Par la succession des générations.

[140] Disciples de leur père Jehoudda.

[141] L'aîné, il s'agit du Joannès-christ.

[142] Dont il est la figure dans cette seconde diaconie.

[143] Suit l'Extrait des livres du jésus dont tout le texte a été enlevé. Il ne reste plus que ce titre d'autant plus incompréhensible que le chapitre qui vient après est la censure de cet Extrait même.

[144] Celui-ci sous le nom de Jacques junior.

[145] La dissolution de la matière.

[146] Cf. Le Roi des Juifs.

[147] Pistis Sophia, p. 129.

[148] Cf. Le Roi des Juifs.

[149] Cf. L'Évangile de Nessus.

[150] L'Archon est un ministre et un chef aux pouvoirs étendus, mais limités.

[151] Cf. Pistis Sophia, p. 132.

[152] Cf. Le Roi des Juifs, et l'allégorie de la tempête autour de la barque apostolique dans l'Évangile de Nessus, au chapitre intitulé l'Arche d'alliance.

[153] Pistis Sophia, pp. 175, 176. Ces détails, nous les donnons plus loin.

[154] Mille ans. Cf. Le Roi des Juifs.

[155] Pistis Sophia, p. 131.

[156] Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[157] Cf. Le Charpentier.

[158] Cf. Le Charpentier.

[159] Ce membre de phrase revient après chaque ordonnance, comme dans une litanie.

[160] Jésus demande l'impossible. Il faudrait déchirer tout l'Évangile.

[161] Gloutonneries espérées dans l'Eden aux douze récoltes. Dans Luc Jésus reproche à Pierre de n'écouter que son ventre.

[162] Sens facultatif.

[163] Nicolaïtes et autres. Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[164] Sur l'avarice (cupidité) des christiens, cf. Le Gogotha.

[165] C'est le point sensible, Jésus y insiste.

[166] Katalalia. Médisance, invective, etc.

[167] Gelés, d'après M. Amélineau, mais je suis loin, dit-il, de présenter ma traduction comme certaine. Le mot copte qu'il traduit par gelés est un mot unique en son genre et dont on ne connaît pas la signification. Personne moins que moi. Mais étant donné le système de  Bar-Jehoudda, et sachant que la glace des ténèbres extérieures fondra dans la dissolution du Plérôme, j'en conclus que les morts condamnés aux ténèbres extérieures fondront avec elle : ils s'en iront en une vapeur que la lumière dissipera. A la page 139 de Pistis Sophia, Jésus dit d'un de ceux-là que son âme sera perdue dans la glace dure et dans le feu dur, si bien qu'elle sera n'existant plus éternellement.

[168] Soyez tranquilles, traduit M. Amélineau, sans répondre du sens.

[169] Ce membre de phrase revient à chaque ordonnance.

[170] Dans l'énumération que nous avons rapportée plus haut.

[171] Pistis Sophia, p. 151.

[172] Pistis Sophia, p. 158. Il n'a pas seulement pitié au moment déterminé par Joannès, mais en tout temps.

[173] C'est un des motifs relevés dans la condamnation de Bar-Jehoudda.

[174] Saül.

[175] Le roi des Juifs en 788, par exemple. C'est lui que vise Jésus.

[176] Le Premier mystère dans le texte.

[177] L'ensemble des cieux, de la terre et même des ténèbres extérieures.

[178] Le baptême d'eau, le seul connu au temps du Joannès et de ses frères. Joannès l'a reçu par la colombe, il peut donc être tranquille.

[179] C'est le cas de Bar-Jehoudda dans les Évangiles après la Transfiguration, et aussi celui des membres de sa famille qui jouent le rôle d'anges au Guol-golta, notamment Shehimon et Cléopas. Voilà pourquoi Antipas revêt lui-même d'un vêtement blanc le pourpre Bar-Abbas avant de le renvoyer à Pilatus.

[180] Ces fonctionnaires attachés au service de l'invisible jouent un grand rôle dans la mythologie valentinienne.

[181] C'est une des raisons pour lesquelles Jésus aux Noces de Kana lui dit qu'il n'a rien de commun avec elle.

[182] Pistis Sophia, 142, 143. On se prête un corps comme nous nous prêtons un mouchoir. Mais on peut l'abandonner aussi quand il est gênant. Vous avez vu comment Jésus se débarrasse de celui de Bar-Abbas.

[183] Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[184] Pistis Sophia, p. 138.

[185] Il était en exécration, tous les Évangiles le constatent.

[186] Centième, millième avis à ceux qui pourraient croire que le baptiseur et le christ font deux.

[187] L'invocation que Joannès prononçait au moment des baptêmes.

[188] Cf. Le Charpentier.

[189] Nous en réservons quelques-unes pour les chapitres qui suivent.

[190] Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[191] Pistis Sophia, p. 164.

[192] Rappelé dans Pistis Sophia, p. 165.

[193] Je donne simplement le sens.

[194] C'est en 788 qu'il y avait presse. Dans la Sagesse Dieu n'est plus pressé comme le Verbe le dit dans l'Apocalypse.

[195] Fixé pour la perfection des âmes et l'émanation du Plérôme.

[196] C'est à qui croira le plus.

[197] Son âme de morte, car son âme vivante n'y eût compris goutte.

[198] Pistis Sophia, pp. 164, 165.

[199] Toute la loi, surnom de Jehoudda.

[200] Pistis Sophia, p. 174.

[201] Cependant l'Apocalypse ne distingue pas entre ce Dragon et l'Ancien Serpent (Satan).

[202] Sur les chambres célestes il était très ferré : Il y a beaucoup chambres dans la maison de mon Père, dit son revenant dans Cérinthe ; s'il en était autrement, je l'aurais dit.

[203] Pistis Sophia, p. 172.

[204] En réalité le Fils de l'homme.

[205] Pistis Sophia, p. 101.

[206] La Vierge a près d'elle la Balance où elle pèse ce genre d'espèces. C'est le système de Bar-Jehoudda, mais appliqué aux âmes. L'âme doit des comptes à Dieu qui est un préteur intraitable. Que de paraboles chiffrées nous avons vues là-dessus ! Dans la plupart des représentations sérapiques du jugement dernier vous pouvez voir la Balance en fonction.

[207] Il est dit en effet Zorotocoros dans l'invocation du Joannès aux puissances célestes.

[208] Nous l'avons donnée. Cf. Le Roi des Juifs. C'est un chef-d'œuvre de distinguo.

[209] Nous l'examinons plus loin.

[210] Les influences composant l'année tropique. Bar-Jehoudda et ceux qui ont fait son horoscope n'en connaissent que 360. De là leur erreur.

[211] C'est pourquoi Jésus passe quarante jours dans le désert sans boire ni manger.

[212] La Nativité selon Luc suit exactement ce processus. C'est à la fin du cinquième mois que la mère de Joannès est officiellement enceinte, cf. Les Évangiles de Satan, première partie. Ce sont ces détails gynécologiques qui ont valu à cet évangéliste la qualité de médecin. Il faisait aussi de l'otoplastie. À preuve l'oreille qu'il a remise à Saül.

[213] D'un nom que les parents ignorent toujours et qui est celui de sa destinée.

[214] Les ministres du Destin.

[215] Ils savaient que Joannès n'en avait que pour cinquante ans trois mois et vingt-deux jours.

[216] Luc, I, 23.

[217] Luc, I, 31.

[218] Cf. Le Charpentier.

[219] Cf. Le Roi des Juifs.

[220] La croix. Mot qui évoque la figure de la lettre Tau.

[221] De la mauvaise ceinture, celle qui n'est pas en ce cuir de Gamala dont il est dit le corroyeur dans les Actes.

[222] Cf. L'Évangile de Nessus.

[223] Parfaitement quand il passe, il est la croix de l'Agneau.

[224] Is-Kérioth en joue le rôle dans Cérinthe.

[225] Se suicider. Se tuera-t-il lui-même ? disent les pharisiens en parlant de Jésus, qui de son côté leur parle de sa mort prochaine. Cf. L'Évangile de Nessus.

[226] Jésus dans les Synoptisés, c'est Bar-Jehoudda prédisant sa mort, et la forçant de s'approcher de lui au jour dit.

[227] C'est pourquoi Bar-Jehoudda, qui s'était fixé mille ans dans le Royaume, s'écrie : Père, pourquoi m'as-tu abandonné ?

[228] Les païens.

[229] Les Juifs.

[230] Le Jésus valentinien qui parle ici.

[231] Les païens toujours, par opposition aux Juifs.

[232] Précepte recueilli par Clément le Romain.

[233] La divinité pure, et non le culte d'un juif condamné pour ses crimes.

[234] Tout cela, ou peu s'en faut, devait disparaitre le 15 nisan 789.

[235] A nous autres Valentiniens. Jésus, c'est Valentin.

[236] Son mari et son premier-né.

[237] Pas encore ! Nous ne sommes toujours que sous le Zibdéos (Verseau) de 788.

[238] L'un est le Figuier, l'autre la Vigne. Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[239] Le Mont Ararat où s'est arrimée l'arche de Noé.

[240] Préposés aux choses du monde depuis le déluge. Ce sont d'assez vilains Archons, ils correspondent tous au mauvais signe.

[241] Pistis Sophia, p. 183. On voit que, pour n'être pas d'Enoch, le livre qui porte son nom n'en était pas moins bien antérieur à Jehoudda le Gamaléen et à son maître Joshua ben Peraïa. Le Sermon sur la Montagne est tiré à la fois de Livre d'Enoch et de la Sagesse valentinienne.

[242] Des douze Æons auxquels correspondent les douze fils de Jacob et, dans la mystification évangélique, les douze apôtres. En un mot ce sont les pères du millénarisme hébraïque.

[243] Cf. Le Charpentier.

[244] Comme dans l'exemple déjà cité plus haut, il n'en reste plus que le titre : Extrait des Livres du sauveur.

[245] Pistis Sophia, p. 185.

[246] Il s'est trompé très exactement de vingt-cinq mille jours, puisqu'il faisait remonter le monde en cours à cinq mille ans.

[247] D'où également les 365 Liturges. Il s'explique plus amplement là-dessus à la p. 187.

[248] Par opposition aux noms toujours corruptibles qu'ils ont dans le langage humain.

[249] Pistis Sophia, p. 188.

[250] Remarquez les exagérations inhérentes à toutes ces Ecritures. Sauf Simon de Cyrène, les plus éloignés parmi ceux qui avaient pris la campagne avec lui venaient de Tyr et de Sidon. Cf. Le Roi des Juifs.

[251] Pierre. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[252] On remarquera qu'avec Ménahem, les assistants mâles ne sont que six. Joannès est le septième, mais on n'a pas à le nommer, il est incorporé à Jésus.

[253] Cf. Le Roi des Juifs.

[254] Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[255] Emané. C'est l'émanation qui commence, annoncée pendant la seconde diaconie.

[256] Cf. Le Saint-Esprit.

[257] Réintégration de toutes choses : de la maison de David dans les biens qui lui ont été pris par les l'érodes, les Césars, les Arabes, les Syriens, les Grecs, etc. : réintégration des Juifs dans le Royaume du monde qui est à eux par droit de naissance ; réintégration de la femme mariée dans son homme redevenu lumineux comme Ieou, et réintégration dans leur moi originel de tous les Juifs non accouplés, à la condition d'être ou vierges comme le baptiseur ou baptisés par lui. Pour tous les autres, division d'avec eux-mêmes, enténèbrement et mort.

[258] Soyez sûr que Iaphet en vient : audax Iapeti genus. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie, où nous n'avons pas suffisamment fait la différence entre Iaphthav et Eflathah.

[259] Voir pour la croix ansée Le Gogotha.

[260] Le Verbe Fils de l'homme dans l'Apocalypse.

[261] Je passe sur la description des voies du milieu, c'est manifestement une correction de Valentin aux visions imparfaites de l'Apocalypse. Joannès n'avait pas été assez de temps dans le ciel pour les bien voir.

[262] Pistis Sophia, p. 188.

[263] Le pauvre Lazare (Eléazar) et tous les pauvres de l'Évangile, les mendiants de Jéricho et tous les autres mendiants sont de faux pauvres et de faux mendiants. Ce qui leur manque à tous, c'est le Trésor du royaume.

[264] Ils connaissaient très bien toute cette kabbale des Douze, Jésus la leur emprunte, mais c'en est une application nouvelle, car ce sont les Æons qui devaient venir à eux, et non eux aller aux Æons, comme il est dit ici.

[265] Ceux-là sont nouveaux, les disciples n'ont pas connu de treizième Æon.

[266] Les disciples n'ont connu que le baptême des voies d'en bas, le baptême d'eau du Royaume terrestre.

[267] Ces baptêmes sont des illuminations avec un nombre déterminé de lumières.

[268] Ce vague trésor remplace bien mal celui qui devait descendre des cieux à l'appel de Bar-Jehoudda, et qui était d'or plus affilié que de l'or en barre, avec des pierres plus rares que les plus précieuses pierres. C'était la richesse à l'état divin. Le rire juif consolidé !

[269] Dans Luc les Juifs baptisés sont dits plus intelligents que les enfants de la lumière (les anges).

[270] Il y a beau temps en effet !

[271] Pistis Sophia, p. 189. Rome est cette Aliénée (dans le sens latin d'aliena). C'est elle qui a provoqué les disciples à la colère et à la malédiction.

[272] C'est-à-dire dans l'étang de soufre et de feu de l'Apocalypse. L'Aliénée infernale passe cent trente-trois ans et neuf mois à les tourmenter.

[273] Cette femme est la grande prostituée de l'Apocalypse. Elle porte les cheveux que Bar-Jehoudda avait fait vœu de ne point couper qu'il ne l'eût chassée de Jérusalem, vaincue et brûlée.

[274] Particulièrement sous le gouvernement de Tibère Alexandre.

[275] Honorée sous le nom de Diane.

[276] Les biens terrestres.

[277] Il est dit le Parèdre, c'est-à-dire celui qui préside à la luxure.

[278] Le Plutus juif, dieu des richesses et de l'usure.

[279] Pistis Sophia, p. 190.

[280] Pistis Sophia, p. 191.

[281] Sauf dans les invocations où il est nommé avec le Thathak et le Thakthar (les deux Ânes). Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.

[282] Le mot du Plérôme : I-E-O-A.

[283] Cf. L'Évangile de Nessus.

[284] Pistis Sophia, p. 194.

[285] J'attirerai tout à moi, dit Jésus dans le Quatrième Évangile, par application de ce même principe.

[286] On a fait sauter huit feuillets du manuscrit. Un beau catalogue ! De quoi contenir les mille et trois de don Juan !

[287] Cf. Les Évangiles de Satan, première partie.

[288] Cf. L'Évangile de Nessus.

[289] Ce qui était curieux dans cette diaconie, c'était l'ordre et la marche de l'émanation du Plérôme. Car Jésus y spiritualisait beaucoup de choses présentées physiquement dans les Paroles du Rabbi, il y disait le nom des trente-six Décans qui ont travaillé à l'âme dans les corps du monde. Ce sont ces Décans, placés par Valentin sous la direction des cinq Archons du Destin, de l'Archon du soleil et de celui de la lune, qu'on retrouve, dédoublés, portés à soixante-douze et adjoints aux douze apôtres dans Luc. Cf. Les Évangiles de Satan, deuxième partie.