LE MENSONGE CHRÉTIEN - (JÉSUS-CHRIST N'A PAS EXISTÉ)

 

TOME VIII — LES ÉVANGILES DE SATAN (DEUXIÈME PARTIE)

V. — PROTESTATION DES CHRISTIENS.

 

 

I. — LA QUESTION DU TRIBUT.

 

Comme vous l'avez pu voir, nous sommes arrivés à l'année 788 sans que les pharisiens et les Hérodiens n'aient d'autre grief contre Jésus que celui d'avoir violé le Sabbat dans un but humanitaire. Mais cette année a été marquée dans la carrière de Bar-Jehoudda par un acte régalien sur lequel il va falloir que le revenant s'explique : l'ordre à tous les Juifs placés sous le gouvernement de Pilatus, par conséquent ceux de Judée et de Samarie, de tout livrer à leur roi et de refuser aux Romains le tribut que depuis le Recensement ils payaient en monnaie à l'effigie de la Bête.

Cette question du tribut était restée la grosse question posée partout où il y avait des Juifs. Sous ce rapport tous étaient christiens de naissance ; beaucoup ne demandaient qu'à l'être de métier, quand ils considéraient le profit des poissonneries[1]. La jehouddolâtrie avait renversé complètement la situation du Juif : de contribuable il était devenu publicain, et publicain pour son propre compte, sans l'obligation que Rome avait acceptée de reverser l'impôt en écoles, en routes, en marchés, en aqueducs, et en thermes. De la ces capitalisations si rapides, qu'en quelques années toute la fortune d'une ville comme Hypate passe eux mains de l'Église sans qu'il en revienne rien au municipe[2]. Devant de tels miracles le revenant nie-t-il que, sous cette forme au moins, le tribut ait du bon ? Telle est la question que lui posent les pharisiens et les Hérodiens contemporains de Tibère.

LUC, XX, 20. Et, l'épiant, ils envoyèrent des gens qui feignaient d'are justes, pour lui tendre des embûches et le, surprendre dans ses paroles, afin de le livrer au magistrat et au pouvoir de celui qui commandait[3].

Ce second membre de phrase est tout à fait caractéristique. Il enveloppe deux actions qui devaient se faire suite, exactement comme dans le cas de Jacob junior, d'abord condamné par le sanhédrin puis conduit au supplice par le prince Saül, commandant de la garde du Temple. Les synoptiseurs ont transporté la scène à Jérusalem pendant le séjour qu'y fait Jésus avant la pâque de 789, de sorte qu'aujourd'hui ce dispositif semble ne viser que la situation juridique de Bar-Jehoudda vis-à-vis de Pilatus, depuis l'invasion de la Samarie et l'affaire du Sôrtaba. Mais ce n'est pas du procurateur romain qu'il s'agit. Bar-Jehoudda n'était Pas encore justiciable de Pilatus lorsqu'il s'est fait roi en Bathanée, il était justiciable d'Hérode Antipas et da sanhédrin, c'est par les magistrats juifs qu'il avait été condamné pour crimes publics, et c'est par Saül qu'il eût été exécuté, si celui-ci eût pu lui mettre la main dessus dans les quarante jours qui ont suivi la condamnation[4].

Feignant d'être justes, les émissaires d'Hérode et du Sanhédrin feignent d'être, comme Bar-Jehoudda, attachés invinciblement à la lettre de la Loi. Ils s'attendent donc à ce que, dans la peau où il est, Jésus réponde, comme l'homme dont il est le revenant : Non, la Loi vous défend de payer tribut à un souverain étranger, elle vous défend de manier de la monnaie à l'effigie de ce souverain, mon père vous l'a défendu, je vous l'ai défendu moi-même, Ménahem vous l'a défendu[5]. Shehimon et Jacob ont même défendu le tribut frumentaire[6].

Mais comment embarrasser un gaillard qui a fait le Diable quinaud ?

MATTHIEU, XXII, 15. Alors les pharisiens, s'en allant, se concertèrent pour le surprendre dans ses paroles.

16. Ils envoyèrent donc leurs disciples avec des Hérodiens, disant : Maître, nous savons que vous êtes vrai, que vous enseignez la voie de Dieu dans la vérité, et que vous n'avez égard à qui que ce soit ; car vous ne considérez point la face des hommes.

17. Dites-nous donc ce qui vous en semble : Est-il permis de payer le tribut à César, ou non ?

MARC, XII, 13. Mais ils envoyèrent vers lui quelques-uns des pharisiens et des Hérodiens pour le surprendre dans ses paroles,

14. Lesquels étant venus, lui dirent : Maître, nous savons que vous êtes Véridique, et que vous n'avez égard à qui que ce soit ; car vous ne considérez point la face des hommes, mais vous enseignez la voie de Dieu dans la vérité : Est-il permis de payer le tribut à César, ou ne le payerons-nous point ?

Jésus en effet est qualifié de Véridique dans l'Apocalypse, et c'est ce qui donne tant de force à ses mensonges. Quant à Bar-Jehoudda, non seulement il considérait avec horreur la face de Tibère, mais encore il avait considéré avec le même sentiment le revers d'Auguste sur la monnaie génethliaque dite au Capricorne.

Et c'est ce revers qui lui avait inspiré la description de la figure de la Bête dans l'Apocalypse. Aussi n'a-t-on pas maintenu le mot face dans Luc.

LUC, XX, 21. Ainsi ils l'interrogèrent, disant : Maître, nous savons que vous parlez et enseignez avec droiture ; que vous ne faites acception de personne[7], mais que volis enseignez la voie de Dieu dans la vérité :

22. Nous est-il permis de payer le tribut à César, ou non ?

23. Considérant leur ruse, il leur dit : Pourquoi me tentez-vous ?

24. Montrez-moi un denier. De qui porte-t-il l'image et l'inscription ? Ils lui répondirent : De César.

25. Et il leur dit : Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu[8].

26. Et ils ne purent reprendre aucune de ses paroles devant le peuple ; mais ils admirèrent sa réponse, et se turent,

MARC, XII, 15. Jésus, connaissant leur malice, leur dit : Pourquoi me tentez-vous ? Apportez-moi un denier, que je le voie.

16. Et ils le lui apportèrent ; et il leur demanda : De qui est cette image et cette inscription ?De César, lui firent-lis.

17. Alors reprenant, Jésus leur dit : Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. Et ils étaient en admiration de lui.

MATTHIEU, XXII, 18. Mais Jésus, leur malice connue, dit : Hypocrites, pourquoi me tentez-vous ?

19. Montrez-moi la monnaie du tribut. Et eux lui présentèrent un denier.

20. Jésus leur demanda : De qui est cette image et cette inscription ?

21. Ils lui répondirent : De César. Alors il leur répliqua : Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu.

22. Ce qu'ayant entendu, ils furent saisis d'admiration ; et le laissant, ils s'en en allèrent.

Cette admiration, les synoptiseurs la ressentent pour leur propre malice : ils sont en train de rouler les goym, comme Jésus a roulé Satan au désert. Car non seulement Bar-Jehoudda conseille ici, sous Tibère, le paiement du tribut que son père a refusé de payer sous Auguste, mais encore il a l'air de n'avoir jamais vu le revers de la monnaie romaine qu'il a décrite dans son Apocalypse.

De plus, et c'est l'intérêt qu'a poursuivi l'Église en fabriquant cette tentation, il ne se borne pas à conseiller un tribut, il en conseille deux, l'un à César, l'autre à Dieu, jusqu'à ce qu'on mette César hors us l'Empire comme on a mis Dieu hors du ciel. En attendant, le goy qui payait un impôt en paiera deux. C'est le progrès !

 

II. — LE POISSON D'OR.

 

Des critiques — ah ! la triste engeance ! — firent observer que, si Jésus conseillait de payer le tribut, on ne voyait pas qu'il l'eût payé lui-même. A la vérité, montrer le revenant de Bar-Jehoudda dans ce geste adultère, c'était un peu raide ! Voici ce qu'ont imagine les synoptiseurs dans Matthieu. Dans Matthieu seulement !

MATTHIEU, XVII, 23. Lorsqu'ils vinrent à Capharnaüm, ceux qui recevaient les didrachmes s'approchèrent de Pierre, et lui demandèrent : Est-ce que votre maître ne paye pas le didrachme ?[9]

24. Il répondit : Il le paye. Et lorsqu'il fut entré dans la maison, Jésus le prévint, disant : Que t'en semble, Simon ? De qui les rois de la terre[10] reçoivent-ils le tribut se le cens ? de leurs enfants ou des étrangers ?

25. Et Pierre répondit : Des étrangers. Jésus lui dit : Ainsi, les enfants en sont exempts.

26. Cependant, pour ne les point scandaliser, va à la mer, jette  hameçon ; et le poisson qui le premier montera, prends-le ; puis, ouvrant sa bouche, tu trouveras un statère ; l'ayant pris, donne-le pour moi et pour toi.

Ce passage est un de ceux qui ont le plus exercé l'érudition des numismates. Ils n'ont pas encore réussi à se mettre d'accord, comme en témoignent les dissertations que j'ai sous la main au moment où j'écris et où s'entassent les incohérences. Je me contenterai de citer la note de l'Infaillible sur le didrachme. Le didrachme était la contribution d'un demi-sicle, ou de deux drachmes, que les familles juives étaient habituées à payer pour l'entretien du Temple. Vespasien le fit percevoir plus tard pour le Capitole. Les collecteurs s'adressent à Saint-Pierre, soit par respect pour le Sauveur, soit pour engager le disciple à s'acquitter à la place du maître. La réponse du Sauveur suppose clairement sa divinité[11]. Pour ne pas scandaliser ceux qui l'ignorent, il consent à payer ; mais il fait observer qu'il n'est pas soumis à l'impôt, et il relève par un miracle cet acte de condescendance. Le statère avait la valeur d'un tétradrachme, trois francs environ, et par conséquent suffisait pour deux personnes.

Le statère valait quatre drachmes, dit le Saint-Siège. Nullement. Le statère était une monnaie grecque en or qui valait vingt drachmes, environ dix-huit fraie cinquante, et le statère de Cyzique valait jusqu'à vingt' huit drachmes, environ vingt-cinq francs. Il n'y avait qu'un seul statère en argent, celui d'Egine, qui valait trois drachmes, et par conséquent n'eût pu suffire all paiement. En outre, le tribut se payait en monnaie (deniers) à l'effigie de la Bête, ainsi qu'il appert de l'Apocalypse et des Synoptisés eux-mêmes. Si l'Évangéliste eût visé le subside dû au Temple avant 823 et payable en monnaie juive (c'est pourquoi il y avait tant de changeurs sous les portiques), il aurait employé le mot schekel, sicle, et Jésus aurait dit à Pierre : Donne deux sicles, le sicle valant deux drachmes.

On peut donc être certain que si, par nécessité politique, le revenant de Bar-Jehoudda conseille de payer le tribut à Rome en deniers à l'effigie de l'Empereur, il ne conseillerait pas de payer le subside au Temple en une monnaie qui offre d'un côté la tête de Minerve et de l'autre la chouette, attribut de cette vigilante déesse.

Il s'agit donc de tout autre chose ; et Jésus, selon ses habitudes mystificatrices, donne encore une fois le change aux goym. Ce change est dans le poisson, le glorieux Zib qui se vendait si cher au temps d'Apulée sur les marchés de Macédoine et de Thessalie.

Ce poisson est de la bonne eau edénique, laquelle vous le savez assez par la Samaritaine de Cérinthe, est inépuisable comme la vie qu'Ale donne. Ce poisson, lui aussi, est la mine d'or sans fin ; c'est le poisson jubilaire, c'est le Zib éternellement multipliable par dix. La première monnaie qu'il ait fournie, c'est dix didrachmes, quand il n'en eût fallu qu'un pour Bar-Jehoudda. Dix fois dix, cent : Centuplum reddit ! Dix fois cent, Millenium accipies ! C'est en un mot le signe de l'Æon-Zib. Derrière le statère que Pierre lui a extrait de la bouche, se pressent mille autres statères myriamétriques.

Ce poisson, c'est la baleine de Jonas ! Une baleine à Kapharnahum ? Parfaitement. C'est le signe du retour l'âge d'or et à l'Ane d'or. C'est celui qu'ont promis Jehoudda, le fameux Zibdéos, et après lui ses sept fils, les sept démons qui, multipliés eux-mêmes par sept, Trillent quarante-neuf, l'année sabbatique et proto-jubilaire 788. Et jamais vous ne saurez ce qu'il y a d'Agneaux derrière ce Zib, de Taureaux derrière ces Agneaux, de Gémeaux derrière ce Taureau, d'Ânes derrière ces Gémeaux, de Lions derrière ces Ânes, de Vierges derrière ces Lions, de Balances derrière ces Vierges, d'années sabbatiques après ce sabbat de signes, d'années jubilaires après ce sabbat d'années sabbatiques,  d'années millénaires après ce sabbat d'années jubilaires ! Multipliez éternellement sept par sept, et alors seulement vous trouverez le compte. Voilà un exercice hygiénique pour M. Poincaré !

Fiscalement la séméiologie a un tout autre sens. Payez le didrachme, Juifs, mais uniquement pour avoir la paix, car vous ne devez rien ! Faites-vous jehouddolâtres, vous aurez pour caisse le lit de tous les fleuves où coule l'eau du baptême ! Jette tes filets, évêque de Rome qui te dis successeur de Pierre, le premier poisson que tu prendras vaudra dix ; tes deux drachmes payées, il t'en restera encore huit !

 

III. — ADMISSION DES PUBLICAINS À L'APOSTOLAT.

 

A partir de ce moment, la réconciliation est faite avec les publicains. Les publicains deviennent la compagnie ordinaire de Jésus. Il reste moins de place aux sodomistes de la première génération. Honneur aux publicains, gloire aux publicains ! Il n'y en aura jamais trop autour du revenant ! Il faut absolument qu'on en mette un au nombre des apôtres !

MARC, II, 13. Or Jésus-se relira de nouveau près de la mer ; et tout le peuple venait à lui, et il les enseignait.

14. Et lorsqu'il passait, il vit Lévi, fils d'Alphée, assis au bureau des impôts, et il lui dit : Suis-moi. Et, se levant, il le suivit.

15. Et il arriva que, comme Jésus était à table dans la maison de cet homme, beaucoup de publicains et de pécheurs y étaient également avec lui et ses disciples ; car il Y en avait beaucoup qui le suivaient aussi.

16. Les scribes et les pharisiens, voyant qu'il mangeait avec les publicains et les pécheurs, dirent à ses disciples : Pourquoi votre maître mange-t-il et boit-il avec les publicains et les pécheurs ?

17. Ce que Jésus ayant entendu, il leur dit : Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin, mais les malades : car je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs.

LUC, V, 27. Après cela il sortit, et vit un publicain nomme Lévi, assis au bureau des impôts ; et il lui dit : Suis-moi.

28. Et lui, ayant tout quitté, se leva et le suivit.

29. Or Lévi lui fit un grand banquet dans sa maison ; et il y avait une foule nombreuse de publicains et d'autres qui étaient à table avec eux.

30. Et les pharisiens et les scribes en murmuraient, et disaient à ses disciples : Pourquoi mangez-vous et buvez-vous avec les publicains et les pécheurs ?

31. Et Jésus répondant leur dit : Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin, mais les malades.

32. Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs, à la pénitence.

Il a beau, devant les goym, manger avec les publicains impériaux pour ressembler le moins possible au fils aîné de Jehoudda, il considère ces agents comme des pécheurs et des malades. La Loi est là, il lui rend hommage, même en feignant d'y manquer. Car c'est le renversement complet de sa mission judiciaire dans l'Apocalypse. Il commence par cette énormité, lui qui, vivant, a ordonné le refus du tribut et le massacre des Publicains, de choisir la maison d'un juif à la solde de à Bête pour s'y attabler et y boire du vin, lui, Nazir ! Une pareille attitude doit fatalement amener des réclamations, qui jadis se seraient traduites par des coups de sique en plein abdomen. Elles se produiront bientôt.

 

IV. — SUBSTITUTION DE MATHIAS BAR-TOÂMIN À LÉVI.

 

Ne sachant par quel moyen introduire Mathias-bar-Toâmin parmi les douze, les synoptiseurs l'ont substitué à Lévi et l'ont assis, en remplacement de celui-ci, au bureau des impôts. Toute l'Église soutient que le publicain Lévi n'est autre que Mathias, sous le nom de qui elle a préalablement mis l'Evangile où il est question de ce Lévi. Lévi, c'est saint Matthieu, dit-elle[12]. Mais Lévi est un pécheur dans cette scène, et Mathias avait la prétention d'être un juste.

MATTHIEU, IX, 9. Lorsqu'il fut sorti de là, Jésus vit un homme nommé Mathieu assis au bureau des impôts, et il loi dit : Suis-moi. Et, se levant, il le suivit.

10. Or il arriva que, Jésus étant à table dans la maison beaucoup de publicains et de pécheurs vinrent s'y asseoir avec lui et ses disciples.

11. Les pharisiens, voyant cela, disaient à ses disciples : Pourquoi votre maître mange-t-il avec les publicains et les pécheurs ?

12. Mais Jésus, entendant, dit : Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin, mais les malades.

13. Allez donc et apprenez ce que veut dire : J'aime mieux épargner que de punir[13]. Car je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs.

Certes Mathias-bar-Toâmin fut un pécheur, mais il se croyait juste comme son père ; ne vous étonnez pas de le voir percevant l'impôt et maniant du matin au soir la monnaie de la Bête. Dorénavant, c'est pour le compte de son oncle déifié. Avant la fin des Évangiles nous verrons son grand-père Jehoudda déguisé en chef des publicains de Jéricho, et nous avons vu son oncle Shehimon acquittant le tribut pour lui-même et pour le roi des Juifs !

Aucun mot qui ne soit à double sens dans cette infernale composition. Sait-on pourquoi Jésus aime mieux épargner que de punir ? Parce que le premier bénéficiaire de cette pensée, c'est le Juif, — Lévi ou Mathias, le nom ne fait rien à l'affaire ! — qu'on a publicanisé malgré lui, et qui, ayant manqué aux ordonnances de Jehoudda s'il eût été réellement publicain, eût mérité d'être puni et l'eût été en effet par les disciples de l'Agneau. Grâce à Jésus, il semble que ce Juif ait pu continuer son métier sans être tué par les Sicaires et sans perdre ses droits à l'Æon-Zib.

Moralité : les goym sont mystifiés comme il convient. Car si par justes ils entendent les braves gens de tout pays, ils se trompent fort ! Les païens honnêtes sont des pécheurs à raison de leur origine, et des malades à cause de leur incirconcision ; relativement à eux les Kanaïtes et les Sicaires sont des justes et des hommes sains de corps.

 

V. — PARABOLE DU PHARISIEN ET DU PUBLICAIN.

 

Cu donne un tel change sur les sentiments de Jehoudda et de sa secte à l'égard des publicains, qu'on fait à ceux-ci une part meilleure devant Dieu qu'aux Pharisiens ! Cela tient à ce que l'Église naissante a ses publicains qui lèvent la dîme sur les fidèles. Il convient de réhabiliter la fonction ; sinon, que répondront les néophytes aux collecteurs institués par les Lettres de Paul ? Ils leur diront : Vous m'êtes comme le goy et comme le publicain. Lever un nouvel impôt et repousser les publicains serait chose illogique et dépourvue d'eurythmie.

LUC, XVIII, 9. Il dit encore cette parabole pour quelques' uns qui se confiaient en eux-mêmes comme étant justes et méprisaient les autres.

10. Deux hommes montèrent au Temple pour prier : un pharisien et un publicain.

11. Le pharisien, se tenant en avant, priait ainsi en lui-même : Ô Dieu, je vous rends grâces de ce que je ne suis pas comme le reste des hommes, qui sont voleurs, injustes, adultères ; ni même comme ce publicain.

12. Je jeûne deux fois la semaine ; je paye la dîme de tout ce que je possède.

13. Et le publicain, se tenant éloigné, n'osait pas même lever les yeux au ciel ; mais il frappait sa poitrine, disant : Ô Dieu, ayez pitié de moi qui suis un pécheur.

14. Je vous le dis, celui-ci s'en retourna justifié dans sa maison, et non pas l'autre : car quiconque s'exalte sera humilié, et quiconque s'humilie sera exalté.

Nous avons vu cette sentence employée au Repas de noces[14], et elle revient souvent dans les Évangiles. C'est toujours le verset des Psaumes : Deposuit potentes de sede. Elle est dirigée ici contre les pharisiens qui, après avoir fait cause commune avec les publicains impériaux, s'élèvent maintenant contre les publicains ecclésiastiques. Ces pharisiens sont ceux du Talmud. Il ne nous est donc pas possible de nous rai' lier à cette exégèse de l'Infaillible : Ni le pharisien ni le publicain n'étaient dans le temple proprement dit ou maison de Dieu, puisqu'on n'y entrait point, mais dans une Cour du temple. Le pharisien se mettait en vue et cherchait à attirer l'attention de tous ; le publicain, au contraire, ne pensait qu'à Dieu, et n'aurait voulu être remarqué par personne.

Ni l'un ni l'autre n'ont été vus dans le Temple, et il n'eût pas été bon pour le publicain d'y être rencontré par un christien.

 

VI. — GUÉRISON DU SERVITEUR DU CENTURION.

 

C'est assurément l'invention la plus invraisemblable de tout l'Évangile, elle n'y est entrée que par collusion avec les Actes des Apôtres et les Lettres de Paul, quand le baptême fut commercialisé et par conséquent étendu aux goym. Cette extension était diamétralement opposée à l'ordonnance apostolique de Jésus dans le dispositif original : N'allez pas chez les Gentils ! Ordonnance inspirée par l'Évangile du Royaume tel que l'avait prêché Bar-Jehoudda. Il ne suffisait point de montrer Shehimon baptisant un centurion à Césarée[15] et le prince Saül répandant la jehouddolâtrie parmi les Grecs, il fallait établir qu'en son vivant celui qui, de faux en faux, était devenu Jésus-Christ n'aurait pas hésité à entrer chez un romain, ce romain fût-il centurion, si celui-ci eût eu besoin des secours de sa thérapeutique.

LUC, VII, 1. Lorsqu'il eut fini de faire entendre toutes paroles au peuple, il entra dans Capharnaüm.

2. Or un centurion avait un serviteur malade, qui se mourait, et qu'il aimait beaucoup.

3. Ayant entendu parler de Jésus, il lui envoya des anciens d'entre les Juifs, le priant de venir guérir son serviteur.

4. Ceux-ci, étant venus vers Jésus, le priaient avec grande instance, lui disant : Il mérite que vous fassiez cela pour lui :

5. Car il aime notre nation, et il nous a même bâti la synagogue.

Remarquez que les synoptiseurs n'osent pas mobiliser le centurion lui-même. La démarche est faite par les Anciens des Juifs, et l'expression a de quoi surprendre. L'Infaillible fait observer que cet endroit des Évangiles est le seul où le titre d'Anciens ne désigne pas les membres du Sanhédrin. Mais ce sont précisément les membres du Sanhédrin que l'Évangéliste a en vue. Depuis la suppression du dispositif dans lequel Bar-Jehoudda et son beau-frère Eléazar sont condamnés par le Sanhédrin[16], quarante jours avant la pâque, il n'y a aucun inconvénient à ce que les magistrats marquent par une prière l'état qu'ils font de la majesté da prétendant. Il est bien certain que la synagogue de Kapharnahum, où Bar-Jehoudda prêchait le Royaume n'avait point été bâtie par les Romains, mais il n'en était pas de même de celle de Tibériade, ville neuve en toutes ses parties et construite sur le plan romain par Hérode Antipas, tétrarque de Galilée. C'est de celle-là que parlent et que viennent les Anciens des Juifs. Bar-Jehoudda n'y avait jamais mis les pieds, c'était une synagogue d'adultères et de maudits.

6. Jésus donc allait avec eux. Or, comme il n'était plus loin de la maison, le centurion envoya de ses amis lui dire : Seigneur, ne vous donnez point tant de peine, car je ne suis pas digne que vous entriez sous mon toit.

7. C'est pourquoi je ne me suis pas jugé digne de venir moi-même à vous : mais dites un mot, et mon serviteur sera guéri.

8. Car, moi qui suis un homme soumis à la puissance d'un autre, ayant sous moi des soldats, je dis à celui-ci : Va, et il va : à un autre : Viens, et il vient ; et à mon serviteur : Fais cela, et il le fait.

L'Evangéliste a mis la chose en scène de manière que Jésus ne soit entouré que de Juifs, et ne voie pas le centurion. Celui-ci, qui connaît la Loi, sait que Jésus n'entrera pas chez lui. Que Jésus parle, à telle distance qu'il lui plaira, cela suffit ! Ce centurion est un compère à qui l'Evangéliste a soufflé l'esprit jésuite. Aussi l'admiration qu'il excite, éclate-t-elle en un transport.

9. Ce qu'ayant entendu, Jésus fut dans l'admiration et, se tournant vers la foule qui le suivait, il dit : En vérité je vous le dis, je n'ai pas trouvé en Israël même une si grande foi.

10. Revenu à la maison, ceux que le centurion avait envoyés trouvèrent le serviteur qui avait été malade, bien Portant.

Le tour est joué, le goy roulé, Jésus tourne les talons et s'en va sans avoir vu le centurion !

Matthieu fait un pas de plus dans la mystification. Certes Jésus n'entre pas chez le centurion, — jamais personne n'aurait cru cela du Rabbi ! — mais il le voit et il lui parla.

MATTHIEU, VIII, 5. Et comme il était entré dans Capharnaüm, un centurion s'approcha de lui, le priant,

6. Et disant : Seigneur, mon serviteur git paralytique dans ma maison, et il souffre violemment.

7. Jésus lui dit : J'irai, et je le guérirai.

Parole imprudente, s'il en fut ! Jésus ne se rappelle plus un traître mot de la Loi qui défend d'entrer chef les goym et que les Juifs ont respectée en refusent d'entrer dans le prétoire de Pilatus le 14 nisan 788, afin de ne point se souiller et de pouvoir manger la pâque le soir. Heureusement que le centurion, stylé par l'Evangéliste, a étudié la loi juive depuis le jour où il a conclue le Rabbi au Guol-golta. C'est lui qui va tirer Jésus d'affaire, car dans le fond le revenant aimerait mie être crucifié une seconde fois que de guérir un goy, un Romain surtout !

8. Mais le centurion, répondant : Seigneur, dit-il, je au suis pas digne que vous entriez sous mon toit ; mais dites seulement une parole, et mon serviteur sera guéri.

9. Car moi, qui suis un homme soumis à la puissance d'un autre et qui ai sous moi des soldats, je dis à : Va, et il va ; et à un autre : Viens, et il vient : et à mon serviteur : Fais cela, et il le fait.

Par analogie il suffira que Jésus donne ordre au serviteur de guérir, pour que cela soit. Et le supplice d'entrer chez un goy lui sera épargné. Le centurion est devenu plus juif que Bar-Jehoudda et plus jésuite que Jésus !

10. Or Jésus, l'entendant, fut dans l'admiration, et il dit à ceux qui le suivaient : En vérité, je vous le dis : je n'ai pas trouvé une si grande foi dans Israël.

11. Aussi je vous dis que beaucoup viendront de l'Orient et de l'Occident, et auront place dans le royaume des cieux avec Abraham, Isaac et Jacob ;

12. Tandis que les enfants du Royaume[17] seront jetés dans les ténèbres extérieures : là sera le pleur et le grincement de dents.

13. Alors Jésus dit au centurion : Va, et que selon que tu as cru il te soit fait. Et son serviteur fut guéri à cette heure même.

Malheureux ! si Bar-Jehoudda t'avait vu guérir le serviteur d'un des centurions envoyés contre son père au Recensement ! Si surtout il avait entendu dire qu'il y aurait des Occidentaux dans le Royaume avec Abraham, Isaac et Jacob, avec Jehoudda et sou frère assumés en 761 ! Des Occidentaux ? Dis tout de suite des Romains et de ces immondes Gaulois comme il y en avait dans la garde d'Hérode !

 

VII. — LA QUESTION DES JEÛNES ET DU RÉGIME.

 

Les disciples de Jehoudda restés en Palestine, les Juchai-tes, Ebionites et Naziréens, sont quelque peu étonnés des façons de ce Verbe sauveur. Ce n'est pas ainsi que le Rabbi se le figurait et que le Joannès baptiseur l'avait décrit. Que penseront-ils, eux qui connaissent la Loi du naziréat, lorsqu'ils verront le revenant du Nazir boire le vin avec les publicains et n'observer aucun jeûne, eux qui respectent encore l'heure qu'il est, au fond de la Judée, toutes les ordonnances de son père ? Tous comme un seul homme se mettent en mouvement pour protester.

MARC, II, 18. Les disciples de Ieou-Shanâ-os et les pharisiens jeûnaient ; or ils vinrent et lui dirent : Pourquoi les disciples de Ieou-Shanâ-os et ceux des pharisiens jeûnent-ils, et que vos disciples ne jeûnent point ?

19. Et Jésus leur dit : Les fils des Noces[18] peuvent-ils jeûner pendant que l'Epoux est avec eux ? Aussi longtemps qu'ils ont avec eux l'Epoux, ils ne peuvent jeûner.

20. Mais viendront des jours où l'Epoux leur sera enlevé ; et alors ils jeûneront en ces jours-là.

MATTHIEU, IX, 14. Alors s'approchèrent de lui les disciples de Ieou-Schanâ-os, disant : Pourquoi nous et les pharisiens jeûnons-nous fréquemment, et vos disciples ne jeûnent-ils point ?

15. Jésus leur répondit : Les fils de l'Epoux peuvent-ils s'attrister pendant que l'Epoux est avec eux ? Mais viendront des jours où l'Epoux leur sera enlevé, et alors ils jeûneront.

En un mot, ils n'auront suspendu la loi de naziréat que pendant la logophanie de Jésus, — douze mois c'est peu ! — mais sitôt Jésus remonté au ciel, on verra bien qu'ils ont conservé leurs habitudes.

Cette levée unanime et directe des disciples contre Jésus a paru fort compromettante ; les synoptiseurs de Luc l'ont remplacée par une banale observation des pharisiens et des docteurs de là Loi.

LUC, V, 33. Alors ils lui demandèrent : Pourquoi les disciples de Ieou-Schanâ-os jeûnent-ils et prient-ils souvent de même que ceux des pharisiens, et que les vôtres mangent et boivent ?

34. Il leur répondit : Pouvez-vous faire jeûner les fils de l'Époux tandis que l'Epoux est avec eux ?

35. Mais viendront des jours où l'Epoux leur sera enlevé ; alors ils jeûneront en ces jours-là.

36. Il leur faisait aussi cette comparaison : Personne ne met une pièce d'un vêtement neuf à un vêtement vieux : autrement ce qui est neuf déchire le vieux, et la pièce du neuf ne convient pas au vieux.

37. De même, personne ne met du vin nouveau dans des Outres vieilles : autrement le vin nouveau rompra les outres, et se répandra, et les outres seront perdues.

38. Mais il faut mettre le vin nouveau dans des outres neuves ; et l'un et l'autre sont conservés.

MATTHIEU, IX, 16. Personne ne met une pièce d'étoffe neuve à un vieux vêtement : car elle emporte du vêtement tout ce qu'elle recouvre, et la déchirure devient plus grande.

17. Et l'on ne met point de vin nouveau dans des outres vieilles : autrement les outres se rompent, le vin se répand, et les outres sont perdues ; mais on met le vin nouveau dans des outres neuves, et tous les deux se conservent.

MARC, II, 21. Personne ne coud une pièce d'étoffe neuve à un vieux vêtement : autrement l'étoffe neuve emporte une partie de la vieille, et la déchirure devient plus grande.

22. Et personne ne met du vin nouveau dans de vieilles autres : autrement le vin rompra les outres, et le vin se répandra, et les outres seront perdues ; mais le vin nouveau kit se mettre dans des outres neuves.

Selon sa coutume, et il faut convenir qu'il ne peut en adopter une autre, Jésus ne répond pas à la question, car ce n'est pas répondre pour tout le monde que de répondre par cette parabole, c'est répondre pour les seuls initiés. Le temps des jeûnes est passé. Où sont les vêtements et les outres contemporains du Rabbi ? Où sont les jeûnes de ce temps-là ? Il faut de nouvelles outres pour une génération nouvelle et de nouveaux vêtements pour des corps nouveaux. Usées les vieilles outres, usés les vieux vêtements ! Passés les vieux usages ! Mais il faut du temps pour que les estomacs des disciples de Jehoudda s'habituent au vin nouveau.

LUC, V, 39. Et personne, venant de boire du vin vieux, n'en veut aussitôt du nouveau, parce qu'il dit : Le vice est meilleur.

 

VIII. — JÉSUS DANS LA VILLE NATALE DE BAR-JEHOUDDA.

 

Le nouvel esprit dans lequel Jésus engage ses quatre vingt-quatre apôtres fait la plus mauvaise impression sur les disciples de Bar-Jehoudda qui ne pouvaient s'attendre à un pareil revirement dans les idées du Verbe. Aussi Jésus, prudent comme le serpent, attend-t-il pour paraître à Gamala que Bar-Jehoudda se soit fixé à Kapharnahum ; il a peur d'être mal reçu dans la ville natale de celui dont il est le revenant.

LUC, IV, 14. Et Jésus retourna en Galilée[19] par la vertu de l'Esprit, et sa renommée se répandit dans tout le pays.

15. Et ii enseignait dans leurs synagogues, et il était exalté par tous.

16. Et il vint à Nazireth, où il avait été élevé, et il entra, suivant sa coutume, le jour du sabbat, dans la synagogue, el' il se leva pour lire.

Que va-t-on lui donner à lire ? Ce qu'on voudra, Pourvu que ce ne soit ni l'Apocalypse ni les Paroles du Rabbi. Il s'agit, en cherchant bien, de trouver une autre Écriture dans laquelle il soit question moins Formellement, moins mathématiquement, de l'An de grâce, de l'Ieou-Schanâ que le christ a prêché en 785.

Dans Luc la visite de Jésus à Nazireth se place avant les miracles de Kapharnahum. C'est une faute d'ordre. On en a la preuve dans le passage même. Ce que nous avons appris avoir été accompli à Kapharnahum, accomplis-le pareillement ici, dans ton pays. Il s'agit surtout des guérisons ; le bruit en est venu aux oreilles des Naziréens. Mais ce qu'ils demandent, eux, ce sont les signes. Gens simples, Parmi lesquels il n'y a ni scribes ni pharisiens, ils se Contenteront parfaitement de l'un des signes annoncés dans l'Apocalypse. A Nazireth Jésus n'a point les douze avec lui, encore moins les soixante-douze ; il est seul, dans un milieu où l'on attend encore ce que le fils de David avait promis. Allons ! un sèméion seulement, rien qu'un petit sèméion, aussi petit que tu voudras ! Il ne peut en faire aucun. Il a beau expliquer que nul n'est prophète en son pays, — le Fils de Dieu se fait moins grand qu'il n'est ! — que de toutes les veuves d'Israël Elle n'en avait soulagé qu'une seule, à Sarepta en Sidonie, que de tous les lépreux d'Israël Élisée n'en avait guéri qu'un, Naiman le Syrien, on ne donne pas dans cette défaite humiliante, On prend fort mal la chose, on se lève en tumulte, on chasse hors de la ville ce Nazir qui ne peut ou ne veut rien faire pour elle, on le pourchasse jusqu'au précipice au bord duquel elle était bâtie, et, s'il ne disparaissait grâce à son vêtement, on le pousse rait dans les profondeurs du gouffre !

17. On lui donna le livre du prophète Isaïe ; et l'ayant déroulé, il trouva l'endroit où était écrit :

18. L'esprit du Seigneur est sur moi : c'est pourquoi il m'a consacré par son chrisme, et m'a envoyé pour évangéliser les pauvres, guérir ceux qui ont le cœur brisé,

19. Annoncer aux captifs leur délivrance, aux aveugles le recouvrement de la vue, rendre à la liberté ceux qu'écrasent leurs fers, publier l'An de grâce du Seigneur, et le Jour de la rétribution.

20. Et ayant replié le livre, il le rendit au ministre, et s'assit. Et tous, dans la synagogue, avaient les yeux attachés sur lui.

On tronque la citation pour en atténuer la portée et en émousser la pointe. Aux initiés de la rétablir. Il y a dans Isaïe : cc Jour de vengeance, jour où le Seigneur se vengera de ses ennemis[20], c'est-à-dire des paieras, quels qu'ils soient.

Aussi les Gamaléens qui sont censés contemporaine de Bar-Jehoudda ne reconnaissent-ils pas le christ dans ce revenant si modeste dans ses prétentions. Ils écarquillent vainement des yeux que la mort a depuis longtemps fermés, vidés. Jésus pourrait les leur rendre, ruais alors ils verraient, et c'est ce qu'il faut éviter.

21. Or il commença à leur dire : C'est aujourd'hui que-cette écriture que vous venez d'entendre est accomplie.

22. Et tous lui rendaient témoignage, et, admirant les paroles de grâce qui sortaient de sa bouche, ils disaient : N'est-ce pas là le fils de Joseph ?

Mon Dieu, oui, c'est bien lui, mais comme il a changé ! Comme il est devenu jésuite ! D'autre part, comme il est devenu fécond en miracles depuis qu'il s'appelle Jésus ! Pourvu que les Gamaléens ne lui demandent pas de faire dans sa ville natale les pseudo-signes qu'il fournit si abondamment à quelques kilomètres de là, chez l'illustre veuve de Kapharnahum, sa mère selon le monde ! Il se débarrassera d'eux comme il s'est débarrassé successivement du Diable, des saducéens et des Pharisiens. Il va au devant de la critique.

23. Alors il leur dit : Assurément vous m'appliquerez ce proverbe : Médecin, guéris-toi toi-même, et me direz : Ces grandes choses faites à Capharnaüm et dont nous avons ouï parler, fais-les ici dans ta patrie ?

Mais ils ont le bon goût de ne rien lui demander de-Semblable à la guérison de la femme qui n'a pas pu regarder le ciel depuis dix-huit ans, de l'hydropique-Vidé de son eau par un simple attouchement, de L'aveugle, du sourd-muet, du paralytique et du démoniaque rendus à la santé par sa seule volonté. Que ses concitoyens le prennent tel qu'il les a quittés en 788, lorsqu'il est allé à Kapharnahum remettre les péchés dans l'eau du baptême ! C'est le truc qu'il s'agit d'appliquer aux goym. Qu'en échange de ce bon tour les Gamaléens ne lui demandent pas l'impossible !

24. Et il ajouta : En vérité je vous dis qu'aucun prophète n'est accueilli dans sa patrie.

25. Je vous le dis en vérité, il y avait aux jours d'Elie beaucoup de veuves en Israël, lorsque le ciel fut fermé pendant trois ans et six mois, et qu'il y eut une grande famine sur toute la terre ;

26. Et Elie ne fut envoyé à aucune d'elles, mais à une femme veuve, à Sarepta de Sidon[21].

Une Sidonienne !

27. Et il y avait en Israël beaucoup de lépreux au temps du prophète Elisée, et aucun d'eux ne fut guéri, sinon Naaman le Syrien.

Un Syrien !

Il a déjà dit que le jour du jugement les gens de Ninive et ceux de Saba seraient préférés à sa génération... Ici ce sont ceux de Phénicie et de Syrie. 00 commence à en avoir assez.

28. En entendant ces paroles, ils furent tous remplis de colère dans la synagogue.

29. C'est pourquoi ils se levèrent, le jetèrent hors de la ville, et le menèrent au sommet du mont sur lequel leur ville était bâtie, pour l'en précipiter.

30. Mais Jésus, passant au milieu d'eux, s'en alla.

Il a de la chance de n'être qu'un revenant ! Car s'il eût eu un corps, il aurait passé un vilain quart d'heure sur la bosse de son chameau natal. Une bosse étaie l'assiette de la ville où Bar-Jehoudda avait été élevé. Elle est bâtie sur une éminence qui se dresse au milieu d'une haute montagne, ce qui lui a fait donner le nom de Gamel qui signifie chameau ; mais les habitants l'ont corrompu, et la nomment Gamal au lieu de Gamel. Sa face et son côté sont remparés par des vallées inaccessibles. Le côté attaché à la montagne n'est pas d'un abord naturel aussi difficile ; mais les habitants Pont aussi rendu inaccessible par un grand retranchement qu'ils y ont fait. La pente était couverte d'un grand nombre de maisons ; et en regardant du côté du Midi cette ville bâtie comme sur un précipice, il semblait qu'elle fût toute prête de tomber. De ce même Côté s'élève une colline extrêmement haute, et flanquée d'une vallée si profonde qu'elle servait de citadelle ; et, la limite de la ville il y avait une fontaine enfermée dans son enceinte[22].

Nul doute que la maison de Jehoudda et de Salomé ne fût bâtie au sommet de la ville, ne formât château. Ce n'est sans doute pas sans raison que de toutes les villes de la Gaulanitide ils avaient choisi la plus forte, la seule qu'on pût opposer aux Hérodiens en cas de difficultés avec le tétrarque de la région. Bar-Jehoudda s'y était jeté pendant la guerre d'Antipas avec les Arabes et il y avait défié tout châtiment.

Les rues étaient si étroites et si raides que les soldats de Vespasien n'y pouvaient tenir pied ; les maisons bâties en porte-à-faux sur les précipices étaient si légères qu'elles ne pouvaient porter un poids supérieur à celui de leurs habitants ordinaires. La Nazireth des Évangiles étant sur la rive orientale du lac de Tibériade, il n'est pas surprenant qu'à Nazareth, ville construite vers le huitième siècle dans les montagnes occidentales de la Galilée, le mont de la Précipitation, c'est-à-dire la montagne sur laquelle les habitants de Nazareth conduisirent Notre-Seigneur, dans l'intention de l'en précipiter, ne soit pas identifié d'une manière certaine. Ce site traditionnel est au sud de la ville, à une heure de chemin. Il y a là un rocher qui aurait pu très bien servir aux mauvais desseins des compatriotes du Sauveur. Les franciscains ont élevé une église en cet endroit. De là on découvre la plaine d'Esdrelon[23].

Mais ce qu'on y découvre le mieux, c'est l'édifice du Mensonge chrétien.

L'expulsion de Jésus par les Naziréens n'est que dans Luc. Mais sans désigner son pays natal par le nom de Nazireth, Matthieu et Marc reconnaissent que le revenant de Bar-Jehoudda est aussi peu estimé de -ses concitoyens au troisième siècle, que lorsqu'il les a quittés au premier.

MATTHIEU, XIII, 53. Lorsque Jésus eut achevé ces paraboles, il partit de là[24].

54. Et étant venu en son pays, il les instruisait dans leurs synagogues, de sorte qu'étant saisis d'étonnement, ils disaient : D'où est venu à celui-ci cette sagesse et ces miracles ?

55. N'est-ce pas là le fils de ce charpentier ? Sa mère ne s'appelle-t-elle pas Myriam ? Et ses frères Jacques, Joseph[25], Simon et Jude ?

56. Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes parmi nous ? D'où viennent donc à celui-ci toutes ces choses ?

MARC, VI, 1. Étant parti de là, il s'en alla dans son pays, et ses disciples le suivirent.

2. Or, un jour de sabbat étant venu, il commença à enseigner dans la synagogue ; et beaucoup, l'entendant, étaient dans l'admiration de sa doctrine, disant : D'où lui viennent toutes ces choses ? quelle est cette sagesse qui lui a été donnée ? et ces merveilles si surprenantes qui se font par ses mains ?

3. N'est-ce pas là ce charpentier, fils de Myriam, frère de Jacques et de Joseph, de Jude et de Simon ? et ses sœurs ne sont-elles pas ici parmi nous ? Et ils se scandalisaient de lui.

C'est que ce charpentier, successeur de son père dans la barque zibdéenne, avait une réputation déplorable, et on pouvait s'étonner que Jésus consentit à reprendre son rôle, malgré toutes les modifications qu'il y apportait. La réputation de Joseph n'étant pas meilleure, quelque chose de bon peut-il venir de Nazireth ? dit Nathanaël dans Cérinthe[26], — on le supprime comme père ; on supprime également deux de ses fils : Jacob, junior, parce qu'il a été martyrisé par Saül, plus tard converti sous le nom de Paul, et Philippe l'Évangéliste, parce qu'il a été le secrétaire du christ.

MATTHIEU, XIII, 57. Et ainsi ils se scandalisaient à cause de lui. Mais Jésus leur dit : Un prophète n'est pas sans honneur, si ce n'est dans sa patrie et dans sa maison.

58. Et il ne fit pas la beaucoup de miracles, à cause de leur incrédulité.

MARC, VI, 4. Mais Jésus leur disait : Un prophète n'est sans honneur que dans sa patrie, dans sa maison et dans sa famille.

5. Et il ne put faire là aucun miracle, si ce n'est qu'il guérit quelques malades en leur imposant les mains.

6. Et il s'étonnait de leur incrédulité ; il parcourait toutefois les villages d'alentour et il y enseignait.

Il ne put faire aucun miracle non par défaut de puissance de son côté, dit le Saint-Siège, mais par défaut de dispositions de leur part. Leur mauvais vouloir tient la divinité en échec.

Cérinthe avait déjà constaté que Bar-Jehoudda n'était pas prophète en son pays[27], mais il entendait par là tous les pays dans lesquels il le montre prêchant sa propre candidature, c'est-à-dire la Bathanée, la Judée et la Samarie. Les synoptiseurs restreignent cette mauvaise impression à la seule ville de Nazireth. Et comme ils ne veulent pas reproduire la scène où Jésus est expulsé de Gamala par les Naziréens eux-mêmes, ils n'en laissent que la moralité. Cette moralité, nous l'avons déjà donnée : pour les Naziréens, les Ébionites et les Ischaïtes, restés fermes dans l'attente du Royaume, Jésus n'est que l'ombre du christ, et vains sont tous ses discours en comparaison des Paroles du Rabbi.

 

IX. — PROTESTATIONS DE DAR-JENOUDDA ET DEMANDE D'EXPLICATIONS À JÉSUS.

 

Pendant que Jésus revenu à Kapharnahum envoie ses quatre-vingt-quatre apôtres en mission, Bar-Jehoudda est dans la coulisse. Mais tout ce qui se passe au Jourdain et à Gamala, tout ce qu'y fait Jésus, tout ce qu'il dit, lui est fidèlement rapporté par l'Esprit-Saint. Dame, il n'est pas content ! Jésus est-il bien celui qui devait venir ? N'est-ce pas plutôt l'image de celui qui n'est pas venu ? Où est son van ? Son feu ? Son glaive ? Bar-Jehoudda envoie Philippe et Jehoudda Toâmin à la découverte. Dans Luc cette ambassade Part au lendemain de la résurrection de Jacob junior Bar-Jehoudda considère qu'il y a là un précédent dont il pourra se réclamer un jour prochain. Ce dispositif est indubitablement le plus ancien.

LUC, VII, 18. Cependant, les disciples de Ieou-Shanà-os lui ayant rapporté toutes ces choses,

19. Il en appela deux, et les envoya vers Jésus, disant : Êtes-vous celui qui doit venir, ou est-ce un autre que nous attendons ?

Ces deux disciples sont Philippe et Jehoudda Toâmin qui ont transmis l'enseignement du Rabbi. C'est par eux que Joannès négocie avec son revenant devenu méconnaissable sous les traits de Jésus. Mais comme, en les mobilisant le lendemain de la résurrection d'un de ses frères, il reconnaît que celui-ci a été l'objet de cette mesure avant lui, les synoptiseurs n'ont pas pu laisser en place un dispositif aussi contraire à l'intérêt de l'Église. Dans Matthieu il est en prison lorsqu'il dépêche Philippe et Toâmin à Jésus.

MATTHIEU, XI, 2 Or, Ieou-Shanâ-os quand il eut appris dans la prison les œuvres de Jésus [Christ][28], envoyant deux de ses disciples[29],

3. Lui dit : Est-ce vous qui devez venir, ou est-ce un autre que nous attendons ?

LUC, VII, 20. Étant donc venus vers lui, ces hommes lui dirent : Ieou-Shanâ-os Baptiseur nous a envoyés vers vous pour vous demander : Est-ce vous qui devez venir, ou est-ce un autre que nous attendons ?[30]

MATTHIEU, XI, 4. Et Jésus, répondant, leur dit : Allez, rapportez à Ieou-Shanâ-os ce que vous avez entendu et vu ;

5. Des aveugles voient, des boiteux marchent, des lépreux sont guéris, des sourds entendent, des morts ressuscitent[31], des pauvres sont évangélisés :

6. Et heureux est celui qui ne se scandalisera point de moi.

Des morts ressuscitent. Quels ? Nous n'en avons encore vu aucun, en dehors de Jacob junior. Pour employer le pluriel, il faut ou que l'Évangéliste connaisse la résurrection de Jehoudda et de son frère en 761, ou qu'il escompte dans son bilan celles de la femme de Shehimon et d'Eléazar qui sont toutes deux du dernier mois de 788. En tout cas on ne voit pas pourquoi les Naziréens se scandaliseraient, si tous ces miracles étaient advenus sous le pontificat de Kaïaphas. S'ils se scandalisent, comme les gens de Gamala, c'est que l'Évangéliste les repait de fumée. Et puis, qu'eût-ce été que ces quatre ou cinq résurrections en comparaison de celles qu'avait annoncées le christ pour le 15 nisan 789 ? Qui a revu les sept mille hommes tombés avec Jehoudda et son frère au Recensement ? Où est Jacob junior lapidé par le prince Saül en 787 ? Où est Éléazar tué en adar 788 ? Le christ lui-même n'est-il pas toujours dans le roc de Machéron ? Évangéliser les pauvres, c'est très joli ! Mais est-ce qu'il devait y avoir des pauvres sur le pavé d'or de la Jérusalem millénaire ?

Ce dispositif était excessivement maladroit, puisque les deux envoyés de Joannès s'en retournaient n'ayant rien vu et rien entendu qu'un goy ne pût entendre et 'voir par le même moyen, la lecture de l'Évangile. On décida que Jésus opérerait dans Luc, devant eux, ce qu'il avait opéré loin d'eux dans le premier dispositif. Jésus sent bien qu'il n'est pas en règle avec les signes et qu'il ne répond pas à la définition du Fils de Dieu dans l'Apocalypse. Il exécute en hâte quelques tours usuels du Verbe.

LUC, VII, 21. A cette heure même Jésus guérit un grand nombre de personnes affligées de maladies, de plaies et d'esprits malins, et rendit la vue à beaucoup d'aveugles.

22. Et répondant, il leur dit : Allez annoncer à Ieou-Shanâ-os ce que vous avez entendu et vu : que des aveugle voient, des boiteux marchent, des lépreux sont purifiés, des sourds entendent, des morts ressuscitent, des pauvres sont évangélisés :

23. Et bienheureux est celui qui ne sera point scandalisé de moi.

En fait de résurrections, il n'en compte encore que trois, dont deux remontent à 761 et sont déjà presque oubliées. C'est bien peu vraiment, et il faut que Philippe et Toâmin soient furieusement intéressés dans la combinaison Jésus-Christ pour accepter un si maigre chiffre. Mais on a déjà triomphé de résistances autrement fortes chez Ménahem en faisant valoir à celui-ci l'intérêt de la famille. Philippe et Toâmin se taisent donc. Reste à convaincre le peuple, Jésus s'en charge.

 

X. — FICHE DE CONSOLATION À BAR-JEHOUDDA.

 

Dès le moment que le Joannès au fond de la tombe se contente de ce Jésus, celui-ci lui doit bien quelque chose en échange. Il entreprend sa justification non plus comme roi-christ, — il est clair qu'il n'a pas règne mille ans ! — mais comme auteur de l'Apocalypse. Ce n'est pas que cette Révélation se soit réalisée, non, muta elle demeure. Le prophète a été crucifié, oui, mais Sa prophétie est là, enfermant tout l'Ancien Testament les Juifs sont dieux en comparaison des autres hommes, le Royaume du monde leur appartient en attendant l'autre. Voilà ce que, divisés sous l'autorité des procurateurs et des tétrarques, les Juifs n'ont pas voulu voir ; voilà ce que, dispersés parmi les nations, les Juifs doivent comprendre. A ce point de vue, Joannès était christ, il était l'oint du Verbe ; on peut considérer qu'il remplace Élie, et qu'Élie ne viendra pas, comme Certains le croient d'après le prophète Malachie. Sans être Élie en personne, il est venu dans la vertu d'Élie[32], le pouvoir d'Élie. Il s'est trompé d'échéance en annonçant le Royaume des Juifs pour les Ânes de 789, mais il ne s'est trompé qu'en cela : Dieu a parlé par lui, il ne préviendra plus, il arrivera sans dire gare.

Il suit de là que Joannès est plus qu'un prophète, il est oint de Dieu parmi les prophètes, il est le dernier, le thav de la série, après lui il n'y en aura plus d'autres. Sans doute il est inférieur au plus petit des Douze, des Trente-six et des Cent-quarante-quatre mille qui ont une taille à laquelle il ne peut se hausser, mais il est le plus grand après les soldats de la milice céleste. Isaïe, Jérémie ne sont que des pygmées.

En effet, sous un petit volume son Apocalypse contient toute la Loi et tous les Prophètes : c'est la projection lumineuse du plan divin en ce qui touche les destinées du monde.

Aussitôt donc que les deux secrétaires de Joannès Se sont éloignés,

MATTHIEU, XI, 7. Comme ils s'en retournaient, Jésus commença à dire de Ieou-Shana-os à la multitude : Qu'êtes-vous allés voir au désert ?[33] un roseau agité par le vent ?

8. Mais encore, qu'êtes-vous allés voir ? un homme vêtu mollement ? Mais ceux qui se vêtent mollement sont dans les maisons des rois[34].

9. Qu'êtes-vous donc allés voir ? un prophète ? Oui, je vous le dis, et plus qu'un prophète[35] :

10. Car c'est lui dont il est écrit : Voici que moi j'envoie mon Ange devant votre face, lequel préparera votre voie devant vous[36].

En vérité, je vous le dis, il ne s'est pas élevé entre les enfants des femmes de plus grands que Ieou-Shana-os Baptiseur, mais celui qui est le plus petit du Royaume des cieux est plus grand que lui.

LUC, VII, 24. Et lorsque les envoyés de Ieou-Shana-os furent partis, il commença à parler ainsi de Ieou-Shana-os au peuple : Qu'êtes-vous allés voir au désert ? un roseau agité par le vent ?

25. Mais encore, qu'êtes-vous allés voir ? un homme vêtu avec mollesse ? Or ceux qui portent des vêtements précieux et vivent dans les délices, habitent les maisons des rois.

26. Qu'êtes-vous donc allés voir ? un prophète ? Oui, je vous le dis, et plus qu'un prophète.

27. C'est celui dont il est écrit : Voici que j'envoie mon ange devant votre face, pour préparer votre voie devant vous.

28. Car je vous le dis : entre ceux qui sont nés des femmes nul n'est plus grand prophète que Ieou-Shana-os le baptiseur, mais le plus petit dans le Royaume de Dieu est plus grand que lui.

MATTHIEU, XI, 12. Or, depuis les jours de Ieou-Shana-os Baptiseur jusqu'à présent[37] le Royaume des cieux s'obtient par la violence[38], et ce sont les violents qui le ravissent.

13. Car tous les prophètes et la loi ont prophétisé jusqu'à Ieou-Shana-os[39].

14. Et si vous voulez le comprendre, il est lui-même Élie qui doit venir[40].

15. Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende.

Nous en avons, car Jésus ne nous en a pas encore enlevé l'usage, non plus que de nos yeux, et nous entendons fort bien. Kanaïsme et sicariat furent choses légitimes en dépit de l'insuccès. Malgré leurs crimes les disciples ont forcé les portes du ciel. Mais depuis les Jours du Joannès la génération a changé, comme les Vêtements et les outres. Elle a été insensible aux plaintes qu'il a poussées, mais aussi elle ne tonnait pas les joies qu'il a promises.

LUC, VII, 19. Et tout le peuple qui l'écoutait et les publicains reconnurent la justice de Dieu, s'étant fait, baptiser du baptême de Ieou-Shana-os.

30. Mais les pharisiens et les docteurs de la loi méprisèrent le dessein de Dieu sur eux, ne s'étant point fait baptiser par Ieou-Shana-os[41].

Les synoptiseurs ont ajouté cela dans Luc, mais ils savent bien que la prédication de Bar-Jehoudda n'a point eu de succès.

C'est comme s'il avait gémi devant des gens qui n'avaient point d'yeux pour pleurer, chanté devant des gens qui n'avaient pas de jambes pour danser !

LUC, VII, 31. Le Seigneur dit encore : A qui donc comparerai-je les hommes de cette génération ? et à qui sont-ils semblables ?

32. Ils sont semblables à des enfants assis dans la place se parlant l'un à l'autre, et disant : Nous vous avons joué de la flûte, et vous n'avez point dansé : nous avons entonné des chants lugubres, et vous n'avez point pleuré.

MATTHIEU, XI, 16. Mais à qui comparerai-je cette génération ? Elle est semblable à des enfants assis dans la place, qui, criant à leurs compagnons,

17. Disent : Nous avons chanté pour vous, et vous n'avez point dansé ; nous nous sommes lamentés, et vous n'avez poussé ni plaintes ni gémissements.

 

XI. — ANTINOMIE DE RÉGIME ENTRE LE CHRIST ET JÉSUS.

 

Ah ! s'ils avaient eu pour danser les jambes que Bar-Jehoudda et Shehimon ont eues pour fuir, il est clair qu'il y aurait eu plus de mouvement sur les places ! Mais au lieu d'écouter les fils de Jehoudda, les Juifs les ont traités de démoniaques, de Baals-Zib-Baals, comme leur père.

LUC, VIII, 33. Car Ieou-Shana-os est venu ne mangeant point de pain et ne buvant point de vin, et vous dites : Il a un démon en lui.

34. Le Fils de l'homme est venu mangeant et buvant, et vous dites : C'est un homme de bonne chère et qui aime le vin, ami des publicains et des pécheurs.

35. Mais la sagesse a été justifiée par tous ses enfants.

MATTHIEU, XI, 18. Ieou-Shana-os, en effet, est venu ne mangeant ni ne buvant, et ils disent : Il est démoniaque.

19. Le Fils de l'homme est venu mangeant et buvant, et ils disent : Voilà un homme de bonne chère et adonné au vin, ami des publicains et des pécheurs. Mais la sagesse a été justifiée par ses enfants.

Que celui qui a des oreilles entende !

Bar-Jehoudda mangeait et buvait, sans quoi il n'aurait pas vécu jusqu'à cinquante ans, mais il s'abstenait de certaines viandes et des boissons fermentées, notamment du vin que Jésus boit à la pâque. En ce sens, il n'a ni mangé le pain ni bu le vin. En un mot il n'a pas célébré la pâque, et pour ses contemporains il n'a Jamais été qu'un démoniaque. Mais depuis les jours du Joannès, comme le dit élégamment Matthieu, on a Inventé Jésus qui rompt avec le régime jadis imposé au nazie, puisqu'il boit du vin aux Noces de Kana et qu'il célèbre la pâque avec cette boisson fermentée. En ce sens il est mangeant et buvant ; on l'a fait de Nazireth, mais il n'est point nazie. Si on lui imposait le Même régime qu'au Joannès, on verrait immédiatement qu'il n'est que son ombre. Le scribe ne peut s'empêcher de reconnaître qu'ablation faite de Jésus dans ces Ecritures, les enfants de Dieu, Ischaïtes, Naziréens, Ebionites, sont demeurés dans la sagesse de leur régime et de leurs jeûnes prolongés. Par conséquent, le mal qu'aurait fait Jésus, s'il s'était comporté comme dans ces Ecritures, a été effacé par la conduite des enfants de la Sagesse, c'est-à-dire de la Loi juive. Ceux-là ne sont pas dupes d'une mystification dirigée avant tout contre les goym.

il se peut aussi, tant ces idées sont diffuses et obscures, qu'en face des horreurs pascales dont les disciples du Joannès se sont rendus coupables[42], l'Evangéliste proclame sages en comparaison d'eux ceux qui ont accepté la pâque de Jésus, c'est-à-dire l'Eucharistie, avec toutes ses conséquences.

 

 

 



[1] Cf. Les Evangiles de Satan, 1re partie.

[2] Cf. Les Evangiles de Satan, 1re partie.

[3] Eis tô paradounai autón té archè cai tè exousia tou èghémonos.

[4] Dans ce même Luc (XXIV, 20) Cléopas, un des beaux-frères de Bar-Jehoudda, met très bien l'intervalle convenable entre le jugement de mort prononcé par le sanhédrin en adar et la crucifixion qui s'en est suivie le 14 nisan. Et il invoque le témoignage de tous les étrangers alors présents à Jérusalem.

[5] Cf. Le Gogotha.

[6] Cf. Le Saint-Esprit.

[7] Ceci dans la bouche d'un monsieur qui mettait sa tribu au-dessus de toutes les autres, qui se mettait lui-même au dessus de sa tribu, et se disait oint, christ de Dieu, pour la vie éternelle !

[8] Pour le pour premier dispositif, si différent de celui-là, voir Le Roi des Juifs.

[9] Capitation payée par chaque Juif à partir de la chute de Jérusalem en 823. Et nous sommes en 788 ! Pour les commentaires, cf. Le Roi des Juifs.

[10] Les rois de Juda, dont Bar-Jehoudda était le descendant ainsi que Shehimon.

[11] Nullement, mais son origine royale qui le met, lui et ses frères, au-dessus de tout impôt, soit romain, soit juif.

[12] Voyez la note sur le verset 27 dans l'édition du Saint-Siège et l'Introduction à l'Evangile de Matthieu.

[13] Eieon thélô eai ou thusian, que traduisent plus littéralement, mais moins clairement, les mots : J'aime mieux la miséricorde que le sacrifice.

[14] Les Evangiles de Satan, 1re partie.

[15] Cf. Le Saint-Esprit.

[16] Cf. L'Evangile de Nessus.

[17] Le Royaume primitif (la Jérusalem d'or et l'Eden aux douze récoltes), création de Bar-Jehoudda, par opposition au royaume des cieux, évoqué au verset précédent, et création de l'Eglise.

[18] Des noces de l'Agneau.

[19] Galilée transjordanique ou Gaulanitide.

[20] Isaïe, XLII, 2. Vous savez dans quel esprit de basse fourberie opère le malheureux qui donne ce change aux goym sur la vie et le caractère du baptiseur. C'est par l'Apocalypse que Bar-Jehoudda s'était fait christ de Dieu, et Isaïe n'avait rien prédit qui le concernât. Tel n'est pas l'avis du Saint-Siège. Le texte d'Isaïe, dit-il, s'applique à Jésus-Christ, même dans le sens littéral. En effet, Jésus-Christ était Fils coéternel et consubstantiel au Père par sa nature divine ; mais il s'est rendu son serviteur, comme le dit saint Paul (aux Philippiens, II, 7) en se revêtant de la chair et des infirmités humaines.

[21] Bar-Jehoudda avait été précédé par son père dans le personnage d'Elie. Cf. L'Apocalypse dans Le Roi des Juifs.

[22] Guerre des Juifs, livre IV, ch. II, 286. Josèphe qui en fait cette description la fortifia de fossés et de mines pendant l'expédition de Vespasien en 820, après l'exécution de Ménahem par les habitants de Jérusalem. Lorsque Josèphe fut passé aux Romains, Vespasien assisté d'Agrippa qui avait eu tant à souffrir de Ménahem, assiégea la ville avec trois légions, la quinzième, la cinquième et la dixième ; et parmi tant de soldats et d'officiers il n'y en avait pas un qui ne connût. à la résurrection près, l'histoire de Bar-Jehoudda. Aussi, d'après ce que dit Josèphe, Guerre des Juifs,  IV, VIII, 295, nulle part les Romains, frères de ceux que Ménahem avait égorgés à Massada, n'exercèrent vengeance plus complète. Ils n'épargnèrent que les enfants de Philippe bar-Jacim qui avait constamment marché avec Saül contre les christiens, depuis l'expédition de Damas jusqu'à la retraite de Saül en Italie. Sur Philippe bar-Jacim, cf. Le Roi des Juifs, Les Marchands de Christ et Le Gogotha.

[23] Note de l'édition du Saint-Siège.

[24] Il est censé partir de Kapharnahum.

[25] Ménahem, Nathanaël dans Cérinthe. Cf. L'Evangile de Nessus.

[26] Cf. L'Evangile de Nessus.

[27] Cf. L'Evangile de Nessus.

[28] Christ a été ajouté après qu'on eut décidé que Jésus aurait eu chair et que Joannès cesserait d'être le christ historique.

[29] Pour que le témoignage soit deutéronomique.

[30] Ils reproduisent la question dans les mêmes termes, en un mot on copie.

[31] Les synoptiseurs récapitulent, mais en escomptant les résurrections.

[32] Luc, I, 17.

[33] Si le baptiseur a pris le désert, ce n'a été que dans les derniers temps.

[34] Parfaitement, Joannès était de maison royale et prétendait au trône. Mais on ne veut plus qu'il ait été vêtu mollement, qu'il descende de David et se soit dit roi-christ ; c'est maintenant Jésus qui est fils de David, les généalogies ont été mises à son nom. C'est lui qui sera vêtu de pourpre lors de la comparution devant Pilatus.

[35] Il y a ici plus que Jonas.

[36] Répétition de l'emprunt fait à Malachie.

[37] Marc-Aurèle, au moins.

[38] La violence kanaïte et le sicariat. Cf. Le Saint-Esprit et Le Gogotha.

[39] Pour les kabbalistes du genre de Bar-Jehoudda, la Loi n'est qu'une prophétie. Nous avons déjà vu cette idée exprimée dans les mêmes termes par Cérinthe.

[40] C'est ce qu'on dit dans la Nativité selon Luc, I, 17, et ce que confirment les disciples au Concile de Césarée de Philippe.

[41] A fortiori les saducéens, quoiqu'ailleurs on nous les dépeigne accourant en foule au baptême avec les pharisiens.

[42] Cf. Les Evangiles de Satan, 1re partie.