LE MENSONGE CHRÉTIEN - (JÉSUS-CHRIST N'A PAS EXISTÉ)

 

TOME V — LE GOGOTHA

II. — LE CHRIST À TÊTE D'ÂNE.

 

 

I. — SIÈGE DU HAUT PALAIS, FUITE DE SAÜL.

 

Ménahem ordonna de continuer le siège du haut palais, et même, s'il fallait croire Josèphe cambriolé, il aurait, le 17 août après deux jours d'assaut, emporté la forteresse Antonia, taillant en pièces la garnison romaine.

Comme il manquait de machines et ne pouvait en venir ouvertement à la sape à cause des traits que lui lançaient les assiégés, il eut recours à la mine : on commença de loin à y travailler, et lorsqu'elle eut été conduite jusque sous l'une des tours, on en sapa les fondements, on soutint le mur avec des pièces de bois auxquelles on mit le feu avant de se retirer, et, le bois consumé à tour s'écroula. Mais les assiégés avaient prévu le cas, et derrière ce mur les assiégeants en trouvèrent un nouveau qui les arrêta, avant été construit avec une extrême diligence. On a mis dans Josèphe que les assiégés envoyèrent vers Ménahem et les autres chefs pour demander de pouvoir se retirer en sûreté, et que Ménahem l'accorda seulement aux troupes de Philippe Bar-Jacim et aux habitants enfermés avec elles.

C'est un mensonge absurde. Des trois mille hommes de Philippe il n'en restait plus que quelques centaines, les autres avaient expié sous les verges et sur la croix leur attachement aux hérodiens et aux Romains.

D'autre part, nous savons ce qu'il advint de leur chef, de Saül, d'Antipas et de Costobar, ils ne se sont pas rendus par composition au roi des Juifs, qui d'ailleurs ne les y eût reçus que pour les exécuter ensuite avec plus d'éclat, comme il avait fait aux soldats de Métilius.

 

Une bonne fortune inespérée lui livrait en ce palais tous les persécuteurs de sa famille. On ne voit pas Ménahem, fils de Jehoudda, Éléazar, fils de Jaïr, et Absalom rendant à la liberté sous caution Saül, Antipas et Philippe Bar-Jacim qui au point de vue christien étaient beaucoup plus coupables que les Romains. — Celui qui me livre à toi, dit Jésus à Pilate, est plus coupable que toi ! — Le nouveau mur n'arrêta pas les gens de Ménahem qui prirent le palais tout au moins dans la partie occupée par Saül et les siens. C'était le 5 septembre. Antipas fut égorgé, n'ayant pas voulu s'enfuir. Saül et Costobar n'ont dû leur salut qu'à leurs jambes et à la ruse. Pris, ils savaient le sort qui leur était réservé. Philippe s'échappa, caché par des parents, Juifs babyloniens comme lui, et qui étaient venus à Jérusalem pour la pâque. Quelques jours après, il s'enfuit à Gamala sous un déguisement ; il réussit même à maintenir la ville et les pays d'alentour sous l'obéissance des Romains[1].

De leur côté, Saül et son frère réussirent à gagner Césarée[2] où ils rejoignirent Agrippa et Bérénice qui étaient allés au devant de Gessius Florus[3]. Je dirai ailleurs, dit Josèphe, comment Antipas, qui était avec eux dans le palais royal et n'ayant pas voulu s'enfuir, fut tué par les séditieux. Mais il n'y a plus dans la Guerre des Juifs rien de ce qu'il annonce dans sa Vie, et comme on ne voit pas dans quelle circonstance autre que celle-ci il aurait pu le dire sans sortir de son plan, c'est une preuve nouvelle que le Saint-Esprit a remanié tout ce qui touche à cette affaire et au règne de Ménahem.

Dans le passage relatif au meurtre d'Antipas Josèphe donnait les renseignements très circonstanciés qui sont aujourd'hui dans les Actes des Apôtres sur la fuite nocturne de Saül jusqu'à Antipatris[4]. Il y a la près de cinq cents hommes, qui ne sont pas tous romains ; les cavaliers proviennent manifestement des troupes de Philippe Bar-Jacim[5]. La route de Césarée était encore libre le 5 septembre ; rien n'empêchait la garnison romaine, si elle se fut trouvée trop faible dans la forteresse Antonia, de se retirer sans pertes. Or, après avoir laissé Saül avec les cavaliers de Philippe, les légionnaires regagnent la forteresse et s'y enferment. Elle était donc à eux, et leurs camarades n'y avaient pas été massacres les jours précédents.

Le 6 septembre, Ménahem mit le feu au camp[6] que les Romains, restés seuls pour supporter le choc, auraient abandonné pour se retirer dans les tours royales, Hippicos, Phasaël et Mariamne.

Le lendemain, après avoir eu le plus grand chagrin de sa vie, celui d'avoir manqué Saül, Philippe et Costobar, Ménahem en eut la plus grande joie, celle de retrouver dans les égouts du palais le grand-prêtre Ananias avec son frère Ezéchias, qui étaient là depuis le 14 août, de les prendre et de les massacrer en souvenir de leur père Kaïaphas et de leur grand-père Hanan.

 

On lit aujourd'hui dans Josèphe que le commandant de la garnison romaine était Métilius et que, réduit à capituler, il eut la vie sauve, sous la promesse bizarre de se faire circoncire, mais que nonobstant la capitulation, à peine ses troupes avaient-elles déposé leurs armes qu'elles furent massacrées jusqu'au dernier homme. Nous avons montré qu'il ne pouvait être question que de la prise de Massada. Ce parjure est signé Ménahem. Pour le roi-christ de 788, pas de serment entre un Juif de la Loi et un suppôt de la Bête hérodienne ou de la Bête romaine ! Bar-Jehoudda débauche les soldats d'Hérode Antipas, sous les armes, devant l'ennemi[7], et c'est un des principaux motifs de sa condamnation. Point de parole entre le christien et un Juif adultère ! Dans la cour de Kaïaphas, quand il voit son frère accablé de soufflets et d'outrages, Shehimon fait le serment qu'il ne connaît pas cet homme ![8] Pour le dernier frère du crucifié de Pilatus point de traité entre Métilius et lui ! Ce crime religieux, car c'en est un, eut les conséquences les plus terribles pour les Juifs de tout pays. Les villes où ils étaient se jugèrent déliées envers eux de toutes les lois de la nature et de l'hospitalité. On lit dans Josèphe que le jour même où fut fait le massacre des Romains, les Grecs de Césarée coupèrent la gorge aux vingt mille Juifs de la ville sans qu'il en échappât un seul, Florus ayant fait arrêter ceux qui s'enfuyaient et les ayant envoyé aux galères.

Alors il sembla que la terre se soulevât contre les Juifs. Les Syriens se signalent par le massacre de tous ceux qui habitaient les villes de Syrie : on ne voyait partout que des corps morts, vieillards, femmes, enfants, sans sépulture. Les gens de Scythopolis se jettent sur les Juifs, et, aidés d'une partie de ceux-ci, en tuent treize mille. Ceux d'Ascalon en tuent deux mille cinq cents, ceux de Ptolémaïde deux mille, ceux de Tyr tant qu'ils peuvent, ceux d'Ippon et de Gadara en chassent une partie, gardant l'autre à vue. Varus, gouverneur des états d'Agrippa, tua les principaux de la Bathanée, qui venaient lui demander des secours. On n'eut quelque pitié d'eux qu'à Antioche, à Gadara, à Sidon, à Apamée, à Gérasa. Mais les Alexandrins ne se crurent quittes qu'après en avoir tué cinquante mille dans leur quartier séculaire du Delta, et, non contents de cette boucherie, ils retuaient les morts. C'est poussée par toutes les nations que Rome résolut d'en finir avec Jérusalem. Sous la menace du Royaume des Juifs elles se rangèrent du côté de ceux que la veille encore elles appelaient des oppresseurs. Entre les deux tyrannies, celle de la Bête et celle du Christ, si on leur eût donné à choisir par un plébiscite, c'est à la Bête qu'elles seraient allées. Égyptiens de la côte, Égyptiens de la mer Rouge et des nomes éthiopiens, Grecs d'Athènes et d'Alexandrie, Macédoniens, Phéniciens de Tyr et de Sidon, Tyriens surtout, Syriens de Chalcis et de Damas, Arabes, Babyloniens, Grecs des îles et de Cyrénaïque, tous ceux qui connaissaient les Juifs les détestaient, ceux qui ne les connaissaient pas en avaient peur. Depuis que par les apôtres de l'Apocalypse ils avaient révélé au monde le sens intime de leur religion, on ne les voulait ni pour maîtres ni pour esclaves, on ne les voulait plus du tout. Les Romains apparurent comme des libérateurs.

 

Le rôle des Grecs de Césarée s'explique par leur vieille haine contre les Juifs, mais comment expliquer celui de Florus si le massacre de Césarée n'est pas une première réplique à celui de Massada ?

Florus est encore procurateur de Judée au milieu de septembre, et depuis le commencement des hostilités, il n'a pas bougé. Il n'a pas fait un pas pour venger le massacre de Massada qui pourtant remonte au signe des Ânes ou pour le moins au commencement d'août. Il a laissé Ménahem ensanglanter, incendier Jérusalem, assiéger, égorger la garnison romaine dans la tour Antonia, forcer les troupes alliées de Rome dans le haut palais. Cela n'est pas possible ! Il n'est pas possible que pendant près de deux mois Florus soit resté avec le gros de ses troupes à vingt lieues de Jérusalem sans même tenter un mouvement pour venger ses morts et dégager la garnison assiégée dans la forteresse Antonia. Jusqu'à Massada il avait péché par excès de confiance ; s'il n'a pas essayé de réparer sa faute, sa lâche indifférence pour ses soldats égorgés contraste d'une manière bien affligeante avec la férocité qu'on lui prêtre ailleurs envers les Juifs loyalistes ! Non seulement Florus a fait son devoir, avec le regret d'avoir cru trop tardivement au danger que lui signalait Simon, fils d'Ananias, mais c'est en faisant ce devoir qu'il est mort sous les murs de Jérusalem au premier combat dont on a renversé le sens dans Josèphe et dont nous avons signalé l'invraisemblance. Ce n'est pas lui qui a chargé d'innocents Juifs qui venaient à sa rencontre, c'est lui qui a été chargé et tué par des Juifs plus nombreux et mieux postés : Suétone est formel, les Juifs ont tué leur dernier gouverneur dans une circonstance qui a disparu de Josèphe, de Tacite et de tous les historiens[9].

Cet exploit ne saurait être attribué à Ménahem. Il fut certainement accompli par Éléazar Bar-Ananias après l'exécution du roi-christ. Bar-Ananias est le premier qui ait remporté un avantage signalé sur les troupes romaines dans une action régulière. Si Ménahem eût culbuté et tué Florus sous les murs de Jérusalem, ce n'est pas au lendemain d'une telle victoire que Bar-Ananias eût pu le chasser du Temple, l'arrêter et le livrer au supplice.

 

II. — EXÉCUTION DU ROI-CHRIST, FUITE D'ÉLÉAZAR BAR-JAÏR.

 

Tout marche à souhait et selon la loi de la gheoullah. L'ombre de Jehoudda, celle de Jacob junior, celle de Bar-Jehoudda, celle de Shehimon et celle de Jacob sont satisfaites. Ménahem s'est vengé sur les fils de Kaïaphas, il n'y a plus d'autre grand-prêtre que lui, la monarchie davidique est rétablie, l'Apocalypse réalisée en ce point. Il y a bien encore quelques sacrificateurs dans les souterrains du Temple avec Josèphe, on n'a pu les atteindre, ce sera pour demain. Ce maraud de Josèphe n'est-il pas de race royale et du sang des Macchabées ? Sans doute. Mais qu'importe qu'au fond de sa cachette il ait des visées antidavidistes ? On aura sa peau dans quelques jours ! Que veut ce coquin de Bar-Ananias ? Ce que voulait Jehoudda Is-Kérioth, une dictature fondée sur les suffrages du peuple et la grande-prêtrise tirée au sort comme au temps des Juges. Qu'on le surveille étroitement !

 

Mais que faire du Temple, maintenant qu'il est libéré des Saducéens et purifié par l'avènement d'un fils de Lévi et de David ? C'était la demeure d'un Dieu milliardaire, cousu, bardé d'or, trônant sur un peuple souvent affamé, perdu de misère et de lèpre. Tout y était d'or. Il y en avait tant qu'après le pillage par les troupes romaines, et quoique le budget de la révolte eût été taillé dans le filon, il ne se vendait pas dans la Syrie la moitié de ce qu'il valait auparavant. Iahvé aspirait, pompait tout l'or caché dans les paillasses, avalait tout, ne rendait rien, invisible dans un palais immense et plus luxueux que le Palais d'or de Néron, intangible, n'ayant en apparence ni d'yeux pour voir, ni d'oreilles pour entendre, ni de mains pour donner. Mais quelles mains pour prendre ! Enrichissons Dieu, disaient tous les Juifs de la terre ! Et de partout ils venaient, chargés d'offrandes parmi lesquelles il y avait des dépouilles. — C'est pour Dieu, disaient-ils. — Mais il est riche ?Jamais assez !

Sous Pilatus on avait crié contre les prêtres parce qu'ils puisaient dans le trésor sacré pour faire des aqueducs, on venait de s'émouvoir parce que Florus y avait puisé, pour le service de l'Empereur, à ce qu'il disait, Mais maintenant qu'on possédait le tout, c'était offenser Dieu que d'en donner quelque chose au peuple ? On avait chassé les changeurs qui acceptaient la monnaie de la Bête, mais maintenant qu'il n'y avait plus à craindre le retour de cette impiété, n'était-ce pas un sacrilège d'exposer la monnaie du Temple aux regards de personnes circoncises évidemment, mais de naissance incertaine ou vile ? Dans cet édifice qui était la Banque, Ménahem devenait propriétaire des fonds en caisse. Le Verbe régnait par son christ, on ne pouvait sans indiscrétion exiger de Dieu davantage. Le Fils de l'homme, s'il fût descendu en ce moment avec les Douze, les Trente-six et les Cent quarante-quatre mille, eût énormément gêné. En fait de baptême de feu, il ne réussirait pas mieux que les gens de Ménahem, qui venaient d'ondoyer les archives, le greffe et le reste. Les voiles de pourpre qui entouraient le sanctuaire témoignaient par la solidité de leur trame qu'ils avaient pu résister à la crucifixion du jésus et à toutes celles qui s'en étaient suivies dans la maison de David, ils étaient dans un état de conservation remarquable, lorsque Ménahem, vêtu à la royale et de la même couleur qu'eux, avait introduit la pompe davidique dans l'édifice hérodien.

Les sacrificateurs ne craignaient rien tant que la Révolution. Ceux qui au début inclinaient vers le parti kanaïte par haine de Rome, étaient maintenant aplatis devant Ménahem, qui garantissait l'ordre dans le Temple, confirmait les privilèges sacerdotaux et le droit de lever les décimes. Intéressés dans la réaction davidiste pour laquelle combattaient les Prophètes et les Psaumes, ils amenèrent aux pieds du roi toute cette valetaille du Temple, tous ces gens de sacristie et d'office, tous ces petits fournisseurs, les mêmes en tout temps et partout, vivant des miettes tombées de la table des prêtres, confits en petites dévotions funambulesques, de mine hypocrite et basse, fort insolents à l'ordinaire, féroces quand ils se sentaient en nombre, économes de leur peau quand ils se voyaient seuls, tigres pendant la paix, lièvres pendant la guerre, déjà conquis avant d'être battus, déjà esclave avant d'avoir lutté, déjà pris avant d'avoir capitulé, vraie chair à servitude, et qui ne passaient à Ménahem que pour dorer leurs chaînes ! Qui savait si la cour de Salomon n'allait pas refleurir dans la Ville Sainte ?

 

Un homme vit très bien que l'avarice seule, la soif du gain, cette grande tradition de la famille, conduisait le bras du roi-christ, et que la liberté serait sa première victime, après la satisfaction de ses vengeances. Cet homme, c'est Éléazar Bar-Ananias. Il sentit le joint, élargit la brèche, pénétra dans le jeu, se porta contre le tyran, disant haut et clair que ce serait une honte pour les révoltés de recevoir pour maître un homme tel que Ménahem, dont la violence était le seul mérite, que ce Ménahem leur était inférieur et que de tous les chefs possibles il était le dernier à qui ils dussent obéir ![10] Qu'a-t-il fait depuis deux mois qu'il est roi ? À part son facile avantage de Massada, qui a coûté plus cher aux Juifs de Césarée qu'il n'a rapporté à ceux de Jérusalem, a-t-il chassé les Romains de la ville ? Jusqu'à présent il ne règne que pour exécuter les ennemis de sa maison, mais qu'en revient-il au peuple ? Où est la Vigne du Seigneur ? Est-ce que Ménahem partage ? Est-ce qu'il prêche la communauté des biens depuis qu'il les a tous ? Est-ce qu'il détruit le Temple en trois jours ? Est-ce qu'il attend le Fils de l'homme ? Que sert la Loi si la prétendue Révélation est au-dessus des droits de la nation, si sous couleur de christianisme Ménahem fait peser sur Jérusalem une tyrannie pire que celle des Hérodes ? Voila donc ce qu'eût été le Royaume des Juifs si la Grande pâque fût venue en 789 ! Ah ! que Jehoudda Is-Kérioth avait bien vu les choses !

Enflammés par ce discours, les partisans de Bar-Ananias vont au Temple, en forcent l'entrée, trouvent Ménahem vêtu à la royale avec sa suite armée, s'approchent de lui et prennent des pierres pour le lapider. Les davidistes firent d'abord quelque résistance, mais devant l'unanimité de l'assaut ils abandonnèrent apostoliquement leur maître. On tua ceux qu'on put prendre et on chercha ceux qui se cachaient. Ménahem s'était sauvé dans l'Ophel, le vieux quartier qui inclinait vers la vallée du Cédron en face la fontaine de Siloé où le Nazir avait autrefois exposé ses titres à la domination du monde. On l'y découvrit et on l'exécuta en public, — sur la croix, j'en jurerais ! — après lui avoir fait subir des tourments affreux ainsi qu'aux principaux ministres de sa tyrannie, particulièrement Absalom[11].

 

Quant à Éléazar Bar-Jaïr, ne se sentant pas capable de lutter contre Bar-Ananias, il se réfugia dans Massada où il tint pendant trois ans, sans même être inquiété, tout l'effort de Titus étant dirigé contre Jérusalem d'abord. Le portrait d'Éléazar par Josèphe, c'est avant tout celui de Ménahem. Il explique les termes méprisants dont Bar-Ananias s'est servi tout à l'heure et auxquels nous ne sommes pas préparés, les actes qui les justifient ayant été supprimés par le Saint-Esprit.

Éléazar, chef des Sicaires ou Assassins, commandait à Massada. Il était de la race de Jehoudda[12], qui jadis avait persuadé à plusieurs Juifs de ne se point soumettre au Recensement que Quirinius voulait faire[13]. Ces factieux ne pouvaient souffrir ceux qui voulaient obéir aux Romains, les traitaient en ennemis, pillaient leurs biens, emmenaient leur bétail, foulaient leurs moissons[14], disant qu'on ne devait point faire de différence entre eux et les étrangers, puisqu'ils avaient par leur lâcheté trahi leur patrie, et préféré la servitude à la liberté pour laquelle il n'y a rien qu'on ne doive sacrifier. Mais à l'effet on vit bien que ce n'était qu'un prétexte pour couvrir leur inhumanité et leur avarice (dans le sens de soif de gain, mot déjà employé par Josèphe pour Jehoudda leur auteur). Car lorsque ceux qu'ils accusaient d'être des lâches et des perfides (les pharisiens et les saducéens) se joignirent à eux pour faire la guerre aux Romains, ils (les gens de Ménahem) les traitèrent encore plus cruellement qu'auparavant, principalement ceux qui leur reprochaient leur méchanceté : de là les massacres de loyalistes et l'exécution de chevaliers. Jamais temps ne fut plus fécond en crimes que celui-là l'était parmi les Juifs. Chacun tâchait de surpasser son compagnon en toutes sortes de forfaits et d'impiétés. — On croirait lire du Barnabé, du Saint-Barnabé[15] : Les apôtres ont surpassé tout péché !Ces Sicaires furent les premiers qui, sans épargner leurs compatriotes, se signalèrent par la violence et le meurtre. On n'entendait sortir de leur bouche que des paroles d'outrage ; leur cœur ne respirait que trahison[16], et leur esprit ne se plaisait qu'a chercher des inventions pour faire le mal.

Aucun enseignement de douceur n'avait mitigé leur zèle, aucune doctrine de résignation n'avait tempéré leur ardeur exécrable. Leurs espérances étaient toujours ridicules, leurs ambitions toujours folles, leurs esprits toujours troubles. Les deux historiens de la guerre, Josèphe et Juste de Tibériade, dans l'accablement de la première heure se renvoient les responsabilités de la défaite ; Josèphe, philosophe plus calme et rhéteur plus délié, quand il jette un regard mélancolique et humilié sur les soixante ans qu'à durés l'agonie d'Israël, ne rencontre aucune figure surhumainement grave et haute comme eut été celle de Jésus prononçant le Discours sur la Montagne ; rien que des visages grimaçants, des yeux hagards, des mains rouges, des flammes d'incendie, la plainte sombre des pilles et des éventrés. Ah ! si Jésus eut existé, c'est lui qui, la veille de la chute d'Israël, occuperait tout l'horizon ! L e silence qu'on aurait garde sur lui depuis trente-quatre ans, il aurait bien fallu le rompre ! Sa croix eut raye tout le ciel comme un éclair depuis le Guol-golta jusqu'au Palatin ! Mais devant la faillite des sept fils de Jehoudda, qui eut pense a dire du premier : C'était le fils de Dieu ?

Jusqu'a la mort d'Éléazar, le dernier d'entre eux, les apôtres ont célébré la pâque juive, mange l'agneau sacrifié par eux-mêmes, selon la coutume antique, et en supposant qu'ils y aient mêlé parfois le souvenir amer du roi-christ de 788, nul ne remplaça l'agneau par le pain et le vin de l'Eucharistie substitué dans les Évangiles Synoptisés au sacrifice mosaïque devenu impossible. Le pain non fermenté, la coupe de vin, l'agneau égorgé, mis en croix et rôti, voila la pâque de tous les Bar-Jehoudda, de tous les fils de Joseph le Charpentier et de Maria la Magdaléenne jusqu'à Ménahem, et de tous leurs petits-neveux jusqu'a Bar-Kocheba[17]. Et cette pâque animale se prolongea parmi bien au-delà de la seconde chute de Jérusalem, jusqu'au jour où les Évangélistes prirent aux christiens de Phrygie et d'Égypte l'offrande innocente qui avait été celle de Caïn.

 

III. — L'ENTRÉE DE JÉSUS SUR LES ÂNES.

 

Les Évangiles ont fait entrer l'aventure de Ménahem dans celle de Bar-Jehoudda : Jésus qui est l'Alpha et l'Omega de toutes choses, qui a extrait les sept démons de entrailles de Maria Magdaléenne et qui est le Maître des temps, peut se permettre de tels raccourcis chronologiques, Ménahem a décrit une parabole beaucoup plus étendue que celle de son frère qui s'est terminée au Sôrtaba, il a détaché les Ânes sous le quatrième signe, il est entré à Jérusalem, et s'il a été, lui aussi, abandonné par ses disciples, au moins l'a-t-il été dans l'orientation du Mont des Oliviers. Tous les christiens à qui s'adressent les Synoptisés savent pourquoi Jésus ordonne de détacher l'Âne et le Poulain : Si quelqu'un vous dit quelque chose, vous direz que le Maître en a besoin[18]. Astrologiquement, le Maître, c'est le Seigneur, le Soleil vainqueur de la mort et réparateur éventuel de la déconfiture des sept Fils de Jehoudda depuis le premier-né jusqu'au dernier. Les évangélistes ne sont pas forcés de dire aux goym qu'il y a trente ans d'intervalle entre les deux affaires et que la seconde n'appartient pas au même personnage que la première. La façon dont ils aiment Dieu et dont ils l'honorent ne leur permet pas d'avouer que, le premier roi-christ ayant été arrêté à Lydda sous Tibère, et n'ayant ni célébré l'Eucharistie ni paru sur le Mont des Oliviers, c'est le second qui a fait son entrée sur les Ânes ou pour mieux dire avec les Ânes, sous Néron. Cette entrée ne peut en aucun cas s'appliquer au christ de 788, qui fut amené à Jérusalem sous les Poissons[19].

Arrive à Bethphagé de Jérusalem[20], le Jésus de la fable envoie dans la bourgade voisine prendre l'ânesse et l'ânon qui lui sont nécessaires pour entrer dans la Ville Sainte. Il n'y a point de telles bêtes dans Jérusalem, encore moins dans Bethphagé : Jésus le sait bien, car il a inspiré la Loi qui les y défend.

Bethphagé, comprenant le Gethsémané ou Pressoir d'huile, est le lieu où l'on serrait l'huile destinée  au Temple, l'huile vierge[21], l'huile des onctions sacrées. Il est tout naturel que Jésus s'arrête là d'où fut tirée celle qui servit au sacre de Ménahem. Pour les besoins de la fable, les scribes placent Bethphagé à une distance presque insignifiante de la ville. Les Talmuds le rattachent à la ville même, ils ont raison. Les gens de Bethphagé étaient si bien de Jérusalem qu'à eux seuls il était permis de retourner passer la nuit chez eux pendant les sept jours de la Pâque. C'était un clos planté d'oliviers et, à proprement dire, une dépendance du sanctuaire. Devant cet endroit sacré la curiosité capitulait. Qu'y a-t-il à faire si le cadavre d'un homme tué se trouve dans la ville ? disaient les gens de Jérusalem. — Y aller voir. — Mais s'il est trouvé à Bethphagé[22]. Point de réponse, il est défendu d'y aller voir, cela regarde les prêtres.

 

Si Mathieu n'avait pas fait descendre les deux Ânes des hauteurs de la sphère céleste dans le voisinage de Bethphagé, il n'y aurait pas eu de christianisme. A la base il y a deux Ânes. (Si encore ils n'avaient pas fait des petits !) Sur ces deux Ânes Juda défie toutes les nations de la terre liguées contre lui. Les Juifs règneront un jour.

 

Les Évangélistes ne donnent plus les Ânes comme étant dans l'horoscope de la tribu de Juda. Mais, pour peu qu'il fût christien, tout Juif saisissait le sous-entendu caché dans la prophétie de Zacharie citée par Mathieu pour remplacer celle de Jacob un instant réalisée en Ménahem.

Elle est extraite du discours de Iahvé contre les Syriens de Tyr, de Sidon et de Damas et généralement contre tous les ennemis d'Israël qui occupaient la Judée au temps du prophète. La situation étant redevenue exactement ce qu'elle était en ce temps-la, l'Évangéliste annonce que le Scilo — dans Zacharie c'est Adonaï, le Roi des Rois, le Puissant parmi les Puissants — entrera un jour dans Jérusalem sous le signe de sa victoire, et qu'il chassera les étrangers : J'ôterai leur sang de leur bouche, dit paternellement Iahvé, et leurs abominations d'entre leurs dents, et après l'énumération statutaire des maux qu'il répandra sur le monde : Tressaille grandement, fille de Sion, pousse la clameur de joie, fille de Jérusalem, voici que ton Roi entre en tes murs, juste et victorieux. Il est humble et chevauchant sur un Âne et sur un Poulain fils des ânesses. Je retrancherai d'Ephraïm les chefs (romains) et de Jérusalem la cavalerie (celle de Pilatus, de Fadus, de Tibère Alexandre, de Félix, et des successeurs de Vespasien).

... Je lancerai tes fils, ô Sion, contre tes fils, ô Ionie !

Apres Zacharie on mit Isaïe en avant : Tout cela, dit Mathieu, se fit afin que fût accompli ce qui avait été annoncé par le prophète Isaïe : Dites à la fille de Sion : Voici que ton roi te vient, débonnaire et monté sur une ânesse, et sur le poulain fils d'une bête qui est sous le joug.

Hypocrisie, fausse humilité, malice de scribe faite pour réjouir les initiés. Zacharie et Isaïe sont substitués à Jacob, de manière qu'on ne puisse plus retrouver Ménahem dans l'histoire. Les disciples n'entendirent point cela tout d'abord, dit le Quatrième Évangile[23], mais quand Jésus fut entré dans sa gloire, ils se souvinrent alors que ces choses avaient été écrites de lui, et qu'il les avait accomplies en sa personne (substituée par antidate à celle de Ménahem).

L'entrée ne fait aucune sensation dans Marc, sinon que les christiens disposés là par la main des évangélistes, crient : Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit le Royaume de notre père David[24], lequel va venir ! Hosanna au fils de David ! Hosanna dans les hauteurs ! Le Royaume est toujours de ce monde et l'Apocalypse se réalisera tôt ou tard.

L'entrée est plus développé dans Mathieu, on crie : Béni soit celui qui vient (ou le Roi qui vient) au nom du Seigneur ! Les pharisiens du genre d'Éléazar Bar-Ananias et de ceux qui ont défendu la ville jusqu'à la fin, attirés par le bruit, conseillent à Jésus de faire taire ces cris, mais Jésus répond : Si ceux-là se taisent, les pierres même crieront ! En effet, si elles ne prennent point parti pour les deux pierres de la promesse[25], que restera-t-il à la Judée ?

Sur le passage de Jésus les habitants s'attroupent, demandant : Qui est celui-ci ? Les enfants crient le plus fort. Car ces enfants sont de la même famille que ceux dont Pilatus a jadis versé le sang : ce sont les enfants de Dieu avec des barbes de patriarches[26]. Aussi ne s'étonnent-ils pas que Jésus fasse son entrée à califourchon sur les deux ânes. Toutefois, pour empêcher qu'on ne découvre le sens astrologique et chronométrique de la prophétie un instant réalisée par Ménahem, Marc et Luc ne partent plus que d'un ânon.

Les Enfants qui crient dans le Temple, dans le sanctuaire même : Hosanna au fils de David ! savent les Psaumes par cœur. S'ils crient dans ce texte, c'est pour que les pharisiens s'indignent et demandent : Entends-tu ce que clament ceux-ci ? et pour que Jésus réponde, d'après les Psaumes : Par la bouche des enfants et des nourrissons, tu as établi la louange.

 

Mais Jésus répond cela pour donner le change aux goym. Il ment pour la patrie. Et tous les initiés comprennent son mensonge, car ils sont eux-mêmes ces enfants et ces nourrissons. Et tous le lui pardonnent de grand coeur :

Mentir pour la patrie

C'est le sort le plus beau,

Le plus digne d'envie !

Et tous savent qu'il y a dans le texte auquel il les renvoie : Par la bouche des enfants et des nourrisson tu établis ta force à l'encontre de tes adversaires.

 

IV. — LE CHRIST ASINAIRE.

 

En Grèce, en Afrique, à Rome, partout lorsque Jérusalem tomba en 823, ce fut à qui sur les murs de Rome de toute la Campanie — Pompeï, Pouzzoles où les Juifs pullulaient — peindrait le roi des Juifs sous les traits d'un Âne en croix. Le fameux graffito du Palatin, le Christ à tête d'âne, est beaucoup plus dans l'actualité sous Vespasien que sous Septime Sévère[27].

Ce que les Juifs araméens appelaient le Scilo ou Messiah, les Syriens l'appelèrent comme aux temps anciens le Thartak, et ils lui donnèrent la forme d'un âne revêtu d'un manteau de pourpre et lisant les prophéties[28].

En dehors des dessins que l'Âne christien et la misérable fin de ses apôtres ont suggérés à la fantaisie des Romains, il y a les écrits. Le premier auteur qui renvoi les Juifs à leur idole, c'est Martial né au pays d'où Pilatus était parti pour gouverner la Judée et où s'étaient retirés Antipas, Hérodiade et Saül. Martial entreprend un poète juif qui écrivait sans doute en latin pour mieux braver l'honnêteté et qui avait rythmé de trop près avec un jeune esclave : Tu me jures que non par Jupiter tonnant ? Je n'en crois rien. Circoncis, jure par l'Âne ![29] Prêté sur Jupiter, le serment ne vaut rien, le Juif n'y croit pas ; Martial ne l'accepte que prêté sur le Messie, — le Juif y croit ; mieux que cela, il buse du signe auquel on doit l'Âne d'or d'Apulée.

Minucius Félix, orateur chrestien de Rome et qui semble contemporain de Septime-Sévère, entend dire que parmi les christiens dont les honteuses et criminelles pratiques excitent l'indignation des païens, il en est qui adorent la tête d'un Âne consacré, religion véritablement digne de leur vie, ajoute-t-il. On faisait toutes sortes de plaisanteries sur cet Âne. Il y en avait d'infamantes, d'autres inoffensives. A la longue certaines sont devenues impénétrables, une surtout que j'ai eu beaucoup de peine à saisir. Dans le dialogue où ils devisent de religion[30], Cécilius, païen, reproche à son compère Octavius, philosophe chrestien, de penser comme un jehouddolâtre sur la question des idoles et par là de prêter le flanc au soupçon de connivence avec la secte ignorante et licencieuse des christiens[31].

Il se peut que tu sois de la race de Plaute, lui dit Cécilius, mais enfin de même que tu n'es pas le dernier des philosophes, tu n'es pas non plus le premier des boulangers. Un seul sens s'offre à l'esprit, étant donné qu'Octavius n'est certainement pas boulanger, tandis qu'il peut très bien être esclave, comme l'a été Plaute, ou affranchi de date récente. Car Plaute a commencé par être esclave, il a tourné la meule dans un moulin, il y a supplée l'âne ; l'âne et le moulin sont deux inséparables : l'âne est par l'intelligence le dernier des philosophes, mais par la fonction le premier des boulangers ; il vient avant la farine dans les métamorphoses du blé. Octavius a parfaitement compris cette allusion à l'Asinaire de Plaute : Tout beau, dit-il, point d'injures !

Trouve dans la domus Gelotiana comme le christ asinaire reproduit plus haut, le graffito que voici contient des allusions qui confirment invinciblement notre interprétation du propos de Cécilius à Octavius. De plus il n'est pas très éloigné du temps où Minucius Félix écrivait contre le crucifié de Pilatus, ce scélérat justement puni pour ses crimes[32]. Il est daté par le portrait de l'empereur Gordien qui se trouve à la droite et qui semble fait d'après une monnaie[33]. Cette fois c'est un soldat qui dessine, un soldat reste inébranlablement fidèle à ce devoir militaire que les troupes levées à l'étranger ne sentaient pas de la même façon. Ce soldat se représente le bras tendu, probablement vers les frontières qu'il avait défendues sous Gordien et s'adressant à l'âne christien qui tourne sa meule, — le premier des boulangers, a dit Minucius Félix — au moulin de la servitude : Travaille, âne, comme je travaille moi-même, et tu t'en trouveras bien ! Mais l'âne christien est las et rebuté, il a reçu trop de coups, il ne veut ni porter les armes ni coloniser après avoir accompli son service[34]. Périsse Rome ? il ne sera pas plus malheureux sous les Barbares ! Qu'on le tue, si l'on veut, il tournera, il n'avancera pas !

 

Toutes ces imaginations qui ont leurs racines dans des traditions millénaristes ne nous paraissent saugrenues qu'à cause de notre ignorance. S'il était possible qu'un ancien et un moderne fussent contemporains, il serait plus facile au premier de comprendre le second qu'au second de comprendre le premier, à plus forte raison s'ils étaient séparés par la race et par le climat. Mais les Écritures sibyllines n'étaient pas tellement éloignées des chaldéennes que les Romains instruits ne pussent interpréter les énigmes astrologiques de l'Évangile. Pétrone, dans son curieux passage sur l'influence des signes, et avant lui Manilius, assurent tous les deux qu'un enfant né sous le Verseau doit fatalement aimer les fontaines et les eau jaillissantes. Combien plus, si comme l'inventeur de baptême il est inscrit dans un calcul où son père porte le nom engageant du Verseau ![35] Auguste était né sous le signe du Capricorne réputé bon comme était celui de la Nativité solaire, et il avait une telle foi dans cette constellation qu'il a fait frapper une médaille en son honneur. Ainsi la Bête romaine (horreur !) avait le même signe de géniture que le Sauveur des Juifs ! Celui-ci lui fait expier cette coïncidence et cette primauté par quelques épithètes malsonnantes dans l'Apocalypse[36], mais quelle revanche Tibère a prise au Guol-Golta sur la Bête juive !

. . . . . . . . . . . . . . Pauvre bête.

A peine à tes pieds tu peux voir,

Tu pensais lire au-dessus de la tête !

dit La Fontaine sans se douter, le bonhomme, qu'il parle de son Rédempteur déconfit par Pilatus !

 

En même temps qu'elle s'inclinait devant le pouvoir des astres Rome a connu leur utilité pratique, comme en témoigne ce calendrier dans lequel on retrouve tous les signes qui entourent la croix solaire, a l'exception, des Ânes dont les christiens se réclamaient spécialement et qui sont remplacés par le Cancer, à la mode grecque[37]. Ce calendrier est extrêmement curieux, parce qu'il a été trouve dans la domus aurea de Néron, le palais d'or qui dans la pensée de cet empereur — et dans celle de Lucain aussi — répondait au Cycle d'or ou le peuple-roi était entre sous Auguste. Pensée identique à celle que les parents de Bar-Jehoudda avaient nourrie pour leur fils aine, lorsqu'ils lui firent le thème de géniture repris par lui dans son Apocalypse[38].

 

V. — LE CHRIST CILLOPORCUS[39].

 

Si par un prodige de tératologie, l'Âne eut eu les extrémités d'un porc, il eut été plus significatif encore.

Pour être complet, le Christ devait être fait de deux extrémités animales, les longues oreilles de l'Âne par lesquelles il tenait du ciel et les pieds fourchus du Porc par lesquels il touchait aux enfers. Les Juifs n'avaient jamais sacrifié aucun de ces animaux, d'où les païens concluaient qu'ils respectaient l'un et l'autre jusqu'à l'adoration. Les païens s'égaraient : si les christiens revendiquaient pour Jésus la tête de l'Âne, ils ne lui refusaient point les extrémités du Porc.

Est-ce à dire que ces Juifs portassent si peu de respect au Christ qu'ils se le figurassent ainsi bestialisé ? Point. Mais, coiffé des oreilles de l'Âne, il était en même temps chaussé des pieds du Porc. Car si l'Âne était la sixième maison de Jésus dans l'Empire des vivants ou ciel, et répondait au sixième signe du Zodiaque à compter du solstice d'hiver, de son côté le Porc était l'enseigne de la sixième maison inverse dans l'Empire des morts ou terre. Situés aux deux bouts de la verticale du ciel à la terre, l'Âne et le Porc étaient les deux attributs du Christ venant dans sa gloire au solstice d'été. Ainsi en avaient décidé l'astrologie et la mythologie acceptées par tous les christiens juifs. Bar-Jehoudda lui-même, décrivant les demeures infernales qu'il est allé visiter pendant les trois jours de sa mort[40], affirme solennellement que la sixième est régie par le Porc.

Le premier acte de Jésus étant de donner la vie millénaire aux Juifs et d'envoyer les païens rejoindre les morts logés à l'enseigne du Porc dans les enfers, on peut juger de sa puissance par l'espace inscrit entre les deux signes : l'animal ami des eaux claires du baptême, et l'animal attiré par la fange de la science et de la philosophie. Sur la faculté qu'à Jésus de métamorphoser les puissances terrestres en porcs, c'est-à-dire de les envoyer à la mort selon son bon plaisir, vous avez vu la scène où il en expédie deux mille d'un coup dans le lac de Génézareth[41].

 

Autorisés par les christiens à faire toutes sortes de jeux de mots, au lieu de les appeler Scilitains (de Scilo, Envoyé, comme il est dit dans le Quatrième Évangile) les Romains les nommaient Cillitains (du grec Killos), lisez Onolâtres, adorateurs de l'Âne. La raillerie de l'Âne réuni au Porc prit un tour plus personnel lorsqu'après avoir débarrassé l'homme-légion de deux mille démons sous les espèces de deux mille porcs, Jésus fut représenté dans la mystification évangélique à califourchon sur deux ânes.

Le cillitanisme ou même la cillo-porcolâtrie des christiens jehouddolâtres est un fait très connu, et qui le serait davantage si l'Église n'en avait pas supprimé les traces par la plume de ses gagistes.

Permis au Juif d'adorer un dieu aux pieds de porc d’appeler à son secours l'Âne aux puissantes oreilles ! dit fort bien Pétrone[42].

Les Scilitains livrés au supplice à Carthage, sous Septime-Sévère, n'étaient nullement des habitants d'une certaine bourgade de Scillium, d'ou ils auraient été amenés au prétoire, mais des Juifs qui, pour préparer les Voies du Scilo, avaient commis quelque crime public, allumé quelque incendie. Sur la date passons, elle importe assez peu[43]. Ce qui frappe, c'est le nom que l'histoire de leur supplice a conservé à travers le temps : Martyre des Scilitains, et ce nom, c'est tout ce qu'il y a d'ancien dans la légende[44]. On a pensé qu'ils le tiraient d'une petite ville de la Proconsulaire, Scilium, dont personne n'entendit jamais parler[45], mais ils ne sont pas de Scilium qui n'existe pas, ils appartiennent au Juif qui doit revenir juger la terre au nom de son Dieu. Ils sont douze, comme les Apôtres, sept hommes et cinq femmes, qui prêchent à Carthage la bonne parole d'injustice universelle.

C'était des christiens, de Cyrène sans doute, et qui erraient sur le port de Carthage menaçant la ville de leur pluie d'astres. Les noms de ces colporteurs de mauvaises prophéties sont tous latinisés. Il en est qui éveillent des souvenirs d'Apocalypse et de Judée, Aquilinus et Nartzalus, celui-ci sonnant comme Lazarus ou Nazarus.

 

Quoiqu'ils s'enveloppassent d'un tel réseau d'allégories que les Syriens y perdaient leur grec et les Romains leur latin, les Évangiles dénonçaient à la civilisation le traité de haine qui liait tous les Juifs par l'Apocalypse. Les rabbins éprouvèrent le besoin de rompre avec cet exécrable principe. Les synagogues de Carthage sont des sources de dénonciation, dit Tertullien, des fontaines de persécution. Nullement. Mais qui voudrait être solidaire de ces abominables Scilitains ? En pleine ville, sous Septime-Sévère, un Juif, valet d'amphithéâtre ou bestiaire, prend un pinceau, barbouille sur un tableau un personnage vêtu de la toge avec des oreilles d'âne et un pied fourchu, et qui tient un livre en main. Lequel ? L'Âne d'or d'Apulée, célèbre dans la région, l'Apocalypse, l'Évangile zélote ? On ne le saura jamais. Au-dessus, il met une inscription sur laquelle on lisait : Le Dieu des christiens, avec une épithète : Onocoetès, qui couche avec les ânes, dans un sens péjoratif auquel les pieds du porc donne toute sa pointe[46].

Enchanté de son invention, le Juif la promène dans les rues depuis ce jour on ne parle plus dans la ville que du Dieu de ceux qui couchent avec les ânes[47]. Ce Juif a un succès monstre parmi les gens de Carthage, les soldats, le peuple et les chrestiens. Nous avons ri nous même de ce nom et de cette figure, ajoute Tertullien. Je crois que Tertullien, s'il a vu cela, s'en est moins amusé qu'on ne le lui fait dire, car il était millénariste, de l'école de Montanus, il est vrai, c'est-à-dire ennemi de la jehouddolâtrie.

Voila donc vidée cette question du Christ asinaire qui a mis tant d'érudits à la torture[48]. Rentrons dans Jérusalem d'où elle nous est venue.

 

VI. — AMBASSADE DE SAÜL À NÉRON.

 

La mort de Ménahem fit Éléazar Bar-Ananias chef de la révolte ; il continua de presser sans relâche les Romains dans leurs tours. Les principaux sacrificateurs qui étaient avec Josèphe sortirent de leurs cachettes, ils conseillaient de laisser les troupes romaines se retirer sans dommage, certains que Cestius Gallus viendrait sous peu d'Antioche pour venger leur affront. Voila ce qu'on lit dans la Vie de Josèphe par lui-même.

Mais s'il était encore temps, après l'exécution de Ménahem, de laisser les Romains se retirer sans dommage, que devient l'histoire de la garnison de Jérusalem massacrée jusqu'au dernier homme, sauf leur chef Métilius, contre la promesse qu'il aurait faite de se soumettre à la circoncision ? Cestius Gallus vint vers le milieu de septembre, et il était à Antipatris pendant la fête des Tabernacles ; mais ayant mal pris ses mesures et dispersé ses forces, il fut repoussé sous Jérusalem. Il revint et le 13 octobre il entra, prit son quartier dans la haute ville, près du palais, et même il aurait facilement emporté le Temple si Tyrannus[49] et Priscus, ses lieutenants, ne l'eussent détourné de ce dessein : avis malencontreux qui a prolongé la résistance des Juifs et causé la perte de la ville. Mais Gallus ne paraît avoir eu d’autre but que de dégager la garnison ; il leva le siège si précipitamment, se retira en si mauvais ordre et protégea si mal ses derrières que les Juifs crurent pouvoir poursuivre sans danger et qu'enhardis par cette retraite qui ressemblait à une fuite, ils lui firent subir un échec complet après lui avoir enlevé ses machines. Ces succès inattendus ne firent qu'irriter contre eux les populations voisines acharnées à les perdre. Gallus tua huit mille quatre cents Juifs dans Joppé, cinquante seulement dans Lydda, parce qu'il n'y en avait pas davantage, et comme pour réparer la faute qu'il avait commise de ne point emporter le Temple du premier coup, les habitants de Damas en tuèrent dix mille.

Lors de cet échec, Saül était encore à Césarée avec Agrippa et Bérénice, Costobar et Philippe Bar-Jacim. Comme il avait assisté aux débuts du règne de Ménahem dont il était une des victimes les plus intéressantes, c'est lui que Gallus choisit pour conduire la mission chargée d'expliquer les faits à Néron et d'en rejeter la responsabilité sur Florus qui avait négligé d'intervenir en temps opportun. Florus étant mort, cette version n'atteignait que sa mémoire. Saül partit vers le milieu de novembre. Néron était en Achaïe lorsque Saül et les autres lui apportèrent les nouvelles de Judée, le dernier frère du christ exécuté par les révoltés eux-mêmes, Gallus obligé de se retirer, la légion poursuivie par les Juifs jusqu'à Antipatris, le Temple cédant aux vœux du peuple, organisant la défense, Josèphe envoyé en Galilée, aux prises avec les chefs Galiléens avant même qu'il put l'être avec les Romains, Éléazar Bar-Jaïr retiré dans Massada et terrorisant toute la contrée. Nous perdons toute trace historique de Saül à partir de ce moment, mais la logique nous porte a croire qu'il est revenu rendre compte de sa mission à Cestius Gallus dans Césarée, puis retourné à Corinthe, probablement avec toute sa maison, et nous savons qu'il a émigré à Rome avec elle dans l'année qui a précédé la chute et la mort de Néron. Agrippa restait dans ses états ; contre les révoltés de Galilée Néron avait décidé d'envoyer Vespasien, le meilleur de ses généraux.

 

Quel chemin Saül a-t-il pris pour aller en Italie ? Celui que pris Néron pour y retourner ? On ne sait, mais il est passe par l'Illyrie, province romaine que Néron a peut-être voulu visiter avant de rentrer. C'est la seule occasion que Saül ait eu de passer par l'Illyrie où il n'est certainement jamais allé exprès. Le voyage du prince hérodien à Rome par l'Illyrie était donc une chose connue, puisqu'au troisième siècle l'auteur de la Lettre aux Romains est obligé d'y mêler le tisserand Paulos[50]. C'était une maladresse, mais réparable dans les Actes on fait venir Paul à Rome par Malte et par la Campanie pendant la procurature de Festus, environ sept ans avant son passage par l'Illyrie qui se trouve ainsi reporté sous Claude à une date indéterminée du proconsulat de Gallion en Achaïe.

Saül n'était probablement plus à Corinthe lorsqu'arrivèrent les six mille Juifs que Vespasien y envoya pour être employés au percement de l'isthme. Il était à Rome où Agrippa vint se fixer avec Bérénice au retour de Titus en Italie. Félix n'était peut-être pas mort et il avait des enfants de Drusille dont l'un mourut avec sa  mère dans l'éruption du Vésuve en 832. Il semble que Simon le Magicien soit venu s'établir à Rome dans le temps que Félix y retourna avec Drusille. Il était en grande faveur, ayant fait leur manage et répandu sa Grande Exposition dans le monde latin. Et là il renoua avec Saül, car les premières impostures ecclésiastiques nous montrent Shehimon dit la Pierre poursuivant jusqu'à Rome Saül, sous les traits de Simon le Magicien, et Simon le Magicien, sous les traits de Saül, afin de tirer vengeance de l'un et de l'autre.

Tout ce monde voisine avec le Palatin ou loge au Palatin comme Flavius Josèphe après la campagne de Judée. On s'étonne que Bérénice avec ses quarante-cinq ans ait pu enlever Titus à des patriciennes plus jeunes qu'elle et plus belles : c'est que Bérénice n'a qu'à changer de côté pour sauter de son lit dans celui de Bérénice. ils avait pris Jérusalem après un siège ; Bérénice était déjà dans la place lorsqu'elle prit Titus.

Les Actes, malgré tous leurs détours, avouent que Saül est resté deux ans à Rome dans une petite chambre, mais où est cette petite chambre ? Pas très loin de celle de Bérénice, laquelle est bien près de celle de Néron. C'est même ce qui a permis à l'auteur de la Lettre aux Philippiens d'insinuer qu'il y avait avec le tisserand Paulos des christiens jehouddolâtres dans la maison de César[51]. C'est l'origine des facéties ecclésiastiques dans lesquelles on le montre prêchant devant Néron lui-même, quelque peu ébranlé par l'enthousiasme de ces discours, la divinité du frère aîné de Ménahem. Telle est également l'origine de la correspondance échangée entre l'Apôtre des nations et Sénèque et qui serait à peine digne de leurs cuisinières.

L'auteur de la Lettre aux Philippiens n'ayant pas daté ce faux comme a fait l'auteur de la Lettre aux Galates, il n'y avait plus qu'à la supposer écrite en un temps antérieur à la mort de Sénèque ; et Sénèque ayant prêché une morale admirable que les Pères de l'Église ont essayé d'adapter à la jehouddolâtrie, il convenait que l'Apôtre des nations se fût rencontré avec lui pour la lui inspirer. Comme Sénèque était mort en 818, il n'y avait qu'à dater la Lettre aux Philippiens de 815, par exemple, parce que ces deux sages eussent pu se connaître et s'aimer dans une touchante communauté de vues et de sentiments, le jehouddolâtre redressant les préjugés du philosophe. Toutefois il n'apparaissait pas que Sénèque eut quitté la vie avec la ferme conviction que Bar-Jehoudda fut ressuscité, mais peut00 jamais pénétrer lame d'un philosophe qui fait de politique ? Il se pouvait très bien que Sénèque, peu communicatif depuis le meurtre d'Agrippine et vivant retiré d'une cour frivole, eut emporté ce secret dans la tombe. L'auteur de la Passio Pauli mit dans cet écrit remarquable que de la maison de César il arrivait à Paul un grand concours de croyants en le Seigneur Jésus-Christ, et que leur foi causait chaque jour un redoublement de joie et d'allégresse parmi les fidèles, le précepteur de Néron y ayant une part secrète, mais active[52].

 

VII. — SA MORT EN ESPAGNE.

 

Après un séjour dont il est impossible de fixer la durée, Saül s'est retiré en Espagne où très certainement il est mort. Il y avait de la famille et des amitiés. Pontius Pilatus, qui était venu de la province de Tarragone, y était sans doute retourné, surtout s'il en était originaire. Il est mort, à moins qu'il n'ait été envoyé en Judée à l'âge qu'avait Saül lorsqu'il lapidait Jacob junior, blessait Éléazar et persécutait les frères survivants de Bar-Jehoudda. Antipas, le tétrarque de Galilée et la victime de la journée des Porcs, avait été exilé en Espagne avec Hérodiade : tous deux sans doute étaient morts, mais peut-être pas sans postérité, et ils avaient été suivis dans leur exil par des membres de leur famille qui y avaient fait souche. Car que sont devenus les Salomé[53] et les Aristobule[54] ? On aime à se représenter Saül faisant sauter leurs petits enfants sur ses genoux et leur contant les histoires de la grande époque, la lapidation de Jacob junior, l'affaire ou Shehimon lui enleva l'oreille, la crucifixion de Bar-Jehoudda, l'expédition de Damas et la fuite dans la corbeille, et pour le bouquet Ménahem roi forçant les hérodiens dans le haut palais, Saül lui-même filant au grand trot sur Antipatris après avoir laissé Antipas sur le carreau. Ah ! mes enfants, quel coup ! Et eux criant : Encore ! Encore ! car il en connaissait des histoires de christiens, le cousin Saül à la barbe grifaigne !

 

Ce voyage était connu de l'auteur de la Lettre aux Romains, qui en parle par deux fois[55]. Il a même fallu que l'Église en ramenât Paul, lorsqu'après avoir fixé la martyre de Pierre à Rome en 817 il lui parut mieux de le placer en 819, afin que l'Apôtre des nations fût de la fête. Elle ne peut contester qu'il soit allé en Espagne et puisqu'elle l'a dit elle-même dans la lettre aux Romains ; elle nie simplement qu'il y soit mort. Elle le ressuscite pour être témoin de Pierre et comme elle a ressuscité Shehimon et Jacob, et comme les évangélistes ont ressuscite le fils de la veuve, la fille de Jaïr, Éléazar et Bar-Jehoudda lui-même.

Apres la Lettre aux Romains, l'attestation la plus grave de ce voyage dont il n'est jamais revenu, c'est la Première de Clément aux Corinthiens, faux non moins patent que les Lettres de Paulos et qui leur fait suite. Le faussaire est dit successeur de Pierre à Rome, sa parole a donc le caractère sacré ; il compose en un temps où l'on n'a pas encore reconnu la nécessité de ramener Saül d'Espagne pour le faire mourir à Rome le même jour que Shehimon dit la Pierre. Les Corinthiens sont censés avoir reçu sous Claude la Première et la Seconde lettre que leur adresse le tisserand Paulos. Clément leur annonce que la parole de saint Paulos a été étendue de l'aurore au couchant, qu'il a enseigné la justice à l'univers entier, et qu'il a pénétré jusqu'aux limites de l'Occident[56], par quoi il faut entendre les colonnes d'Hercule. Epiphane[57], qui doit à ses impostures l'épiscopat de Chypre ; Athanase[58], qui doit à ses fraudes le patriarcat d'Alexandrie ; Cyrille[59], qui doit à ses fourberies le patriarcat de Jérusalem, s'en tiennent tous trois à ce que dit la Lettre aux Romains sur le dernier voyage de Saül et répètent qu'il est allé de Jérusalem en Illyrie, d'Illyrie à Rome et de Rome en Espagne où ils le perdent de vue.

À ces trois docteurs viennent s'ajouter Chrysostome, chez qui on peut lire en trois endroits appartenant à des ouvrages différents que l'Espagne est le dernier terme connu de la carrière de Saül[60], et Hiéronymus chez qui on lit qu'il y fut transporté sur des navires étrangers[61], expression caractéristique dont on peut conclure que les Navigations de Paulos ne finissaient pas comme aujourd'hui à Pouzzoles, mais qu'elles se poursuivaient jusqu'en Espagne sur un bateau non moins étranger à l'histoire et non moins inconnu des armateurs que les trois vaisseaux qui, dans les Actes, vont le transporter de Césarée en Italie. C'est plus tard et dans un intérêt qui n'a pas besoin d'être précisé davantage, que les gagistes de la papauté ont contesté, quelques-uns nie tout à fait le voyage en Espagne qui, ne concordant plus avec les nécessités du martyrologe romain, fut relégué au dernier rang des navigations de plaisance.

 

VIII. — LA GUERRE FINALE.

 

La mort de Ménahem donna l'essor à toutes les ambitions, Bar-Ananias étant maître de Jérusalem, Josèphe descendit en Galilée, avec un mandat du Temple, dit-il, à la fois pour faire rentrer les décimes en retard et pour démolir le palais qu'Antipas avait fait bâtir a Tibériade, à cause des figures d'animaux qui y étaient peintes en dépit de la loi. Jésus, fils de Saphias, l'avait prévenu à la tête des bateliers du lac, il avait mis le feu au palais pour le piller, tuant tous les Grecs de la ville et tous ceux qu'il regardait comme ses ennemis personnels. Le zèle subit de Josèphe est des plus suspects ; il semble décidé à profiter de tout, quoiqu'il s'en défende vivement, et s'il n'avait pas l'arrière-pensée d'un prétendant, il aurait la mine d'un traître. Les Galiléens s'étaient soulevés contre ceux de Séphoris qui étaient pour les Romains. Tibériade était divisée, mais le menu peuple, agité par Justus, était pour la guerre à la fois contre Rome et contre Séphoris qui avait grandi aux dépens de Tibériade. Jochanan de Giscala était contre Josèphe, ceux de Gadara et de Gabara contre Jochanan, ceux de Gamala pour les Romains, Josèphe successivement pour les uns et pour les autres, contre ut le monde. Somme toute, guerre civile d'abord, plutôt que révolte contre l'étranger, détachement graduel du Temple, qui, au lieu de compatir à la misère publique, envoyait en Galilée Josèphe avec deux autres délégués pour lever les décimes en retard. Josèphe ne défendit bien que Jotapat et se rendit à Vespasien sans trop se faire prier, Vespasien traita fort durement les Galiléens : il en envoya six mille à Néron pour être employés à l'isthme de Corinthe, il en vendit trente mille, tua, brûla tout le reste.

Jochanan, échappée de Giscala, se jeta dans Jérusalem avec ses hommes et vint renforcer Bar-Ananias. Le Temple ne fut plus qu'une citadelle, un camp où Mars aux pieds crottés remplaça Iahvé. On rejeta les anciens sacrificateurs grands et ordinaires que Ménahem avait maintenus, on tira les dignités au sort comme du temps des Juges, on fit de cette manière un grand-prêtre qui venait tout droit des pâturages[62]. Ménahem avait achevé les Saducéens et le parti des Hérodes, Éléazar Bar-Ananias avait achevé les christiens et le parti de David. Quelques sacrificateurs, tenant pour la monarchie, quelle qu'elle fut, regrettaient déjà Ménahem et espéraient un retour offensif d'Éléazar bar-Jaïr. Ils conspiraient pour arracher le Temple aux intrus, se flattant de le conserver à leur race comme à eux-mêmes, et prévoyant qu'il était perdu pour tous s'il était à la venue immanquable des Romains le dernier foyer de la résistance. Tenons le Temple hors de la Révolution ! telle était la pensée de ces hommes. S'il faut périr, périsse même le Temple ! répondaient les révolutionnaires. Et d'ailleurs ils traitaient de folies et de rêveries les sinistres prédictions des prophètes. Ils ne comprenaient pas la distinction que le parti des décimes faisait entre Jérusalem et le Temple, ils ne séparaient point l'un de l'autre.

 

Les sacrificateurs évincés tentèrent de barrer l'accès de la ville aux Iduméens, qui venaient pour renforcer Bar-Ananias et Jochanan de Gischala. Simon, fils de Mathias, qui commandait les Iduméens, trouva les portes fermées, et Jésus, le plus vieux des sacrificateurs, à la tête de ceux qui lui refusaient l'entrée. Je ne m'étonne plus, dit Simon, de voir que vous assiégez dans le Temple les défenseurs de la liberté publique, puisque vous nous fermez les portes d'une ville dont l'entrée doit être libre à toute notre nation. Vous voulez nous obliger à quitter les armes que nous avons prises. Au lieu de vous en servir pour la défense de notre capitale, vous nous proposez de nous rendre juges de vos différends[63], et dans le même temps que vous accusez les autres d'avoir fait mourir quelques-uns de vos citoyens sans condamnation[64], vous condamnez vous-même toute notre nation par l'outrage que vous faites à vos frères, en nous refusant l'entrée d'une ville qu'on ne refuse pas même aux étrangers qui y viennent par mouvement de piété... Vous nous refusez, en nous refusant l'entrée de votre ville, la liberté d'offrir des sacrifices à Dieu comme ont fait nos pères, et vous accusez en même temps ceux que vous assiégez dans le Temple de ce qu'ils ont puni des traîtres à qui vous donnez le nom d'innocents ! La seule faute qu'ils ont faite est de n'avoir pas commencé par vous qui aviez plus de part que nul autre à une aussi infâme trahison[65]. Mais leur conduite a été trop faible, la nôtre sera plus vigoureuse ; nous conserverons la maison de Dieu ; nous défendrons notre commune patrie contre les ennemis étrangers et domestiques ; et nous vous tiendrons toujours assiégés jusqu'à ce que les Romains vous délivrent, ou que le désir de maintenir la liberté vous fasse rentrer dans le devoir !

Voila la vérité sur Ménahem et sur tous ceux de sa secte. Elle est dans les sentiments de ces Iduméens, de ces fils d'Esaü et d'Amalech que l'Apocalypse rejetait hors du Royaume de Dieu. Ménahem et son parti, c'est le parti des décimes, le vrai parti des trente deniers : le droit populaire confisqué par la restauration davidique, la liberté publique escamotée par la Révélation. Voila ce qu'on n'a pas vu, voila ce qu'il faut voir, voila ce qui juge tout ! C'est au satrapisme assyrien, au roi-dieu que les fils de Jehoudda auraient ramené le peuple, si par Is-Kérioth et par Éléazar Bar-Ananias le peuple ne les eut par deux fois condamnés. Le tremblement de terre qui accueille le dernier soupir de Jésus[66] n'a point éclaté sous Pilatus : ce n'est ni pour Bar-Jehoudda, ni pour Ménahem que le voile du Temple s'est déchiré, c'est pour tout un peuple perdu par eux. La nuit qui suivit l'arrivée de Simon, un orage épouvantable creva sur les Iduméens, debout sous leurs boucliers, et un tremblement de terre, nullement allégorique celui-là, accompagné de mugissements, bouleversa l'ordre de nature : pressage que les trois factions interprétèrent les unes contre les autres et qui devait les accabler toutes, le doyen Jésus d'abord avec les principaux du parti davidiste dont les corps, massacres par les Iduméens, furent laisses sans sépulture.

Que restait-il des œuvres de la Loi, six mois après la mort de Ménahem ? Peu de chose assurément, plus rien de ces rites majestueux qui étaient presque toute la religion. Seuls les Sicaires d'Éléazar Bar-Jaïr surent faire un emploi judicieux et vraiment christien de la nuit de la Pâque, ils saccagèrent Engaddi et offrirent au Seigneur la vie de ses sept cents habitants.

Quoique les signes précurseurs de la fin s'accumulassent contre eux, il dut y avoir un moment de joie pour les défenseurs de Jérusalem, un moment d'arrêt dans les défections des riches tournés vers Vespasien comme vers le saint. Ce fut quand les mêmes signes éclatèrent dans l'Empire et dans Rome, quand on sut Néron mort, Galba, Othon, Vitellius se succédant comme les chefs d'une armée en déroute, la guerre dans Rome, le Capitole assiégé comme était le Temple. Éléazar Bar-Jaïr dans Massada frissonna d'un espoir fou. Le même espoir enfla Simon, fils de Gioras, maître de la montagne et de la plaine autant que Bar-Jaïr en Idumée.

Caressant, lui aussi, le rêve de se faire roi, il entra dans Jérusalem avec ses troupes et occupa les quartiers disponibles. Au milieu de cette anarchie, la population, les Juifs hellènes qui n'avaient pas regagné leurs foyers depuis la pâque du dénombrement, les femmes et les enfants, appelaient ouvertement l'ennemi comme un sauveur. On verra Josèphe se réjouir de ce que Jochanan n'ait point eu temps d'achever les ouvrages qui auraient pu arrêter les Romains autour du Temple. L'intrépide Galiléen n'avait-il pas eu l'audace d'employer des matières préparées pour de saints usages, espérant affermir par un moyen qui était l'effet de son impiété ? Les robustes charpentiers qu'il avait avec lui n'avaient-ils pas construit des tours de défense avec les bois apportés du Liban pour arc-bouter le Temple ? Ces bommes que Josèphe appelle des brigands et des factieux quand ils fortifient le Temple contre la ville, le parti des décimes va les chercher pour jeter la ville contre le Temple. C'est le sacrificateur Mathias qui ouvrit à Simon Bar-Gioras les portes que le sacrificateur Jésus avait fermées à Simon Bar-Cathlas. Cette politique coupa la défense en trois tronçons épars d'un même serpent, Jochanan à l'extérieur du Temple avec l'avantage des hommes et des machines, Éléazar à l'intérieur, avec l'avantage du produit des sacrifices, Bar-Gioras tout autour, avec l'avantage de la complicité sacerdotale, tous trois ne se rejoignant, ne s'enlaçant que pour broyer dans le sanctuaire tons ceux qu'un reste de piété rassemblait au pied de l'autel.

 

A la croisade contre les païens les nations voisines avaient répondu par la croisade contre les Juifs. Les Syriens, les Arabes, les princes allies avaient demandé à servir sous les enseignes de Titus. Tibère Alexandre, qui déjà gouvernait l'Egypte sous Néron et qui avait été dans Alexandrie le premier héraut de Vespasien empereur, pressait la Ville Sainte avec des troupes a moitie juives, Josèphe, passé aux Romains, négociait clandestinement avec les notables, prêchant que Vespasien était le Roi du monde, Dieu ayant révoqué l'Apocalypse.

Cependant Jochanan s'était emparé du Temple, et le jour de la dernière Pâque, celle de 823, il avait, en faisant verser le sang des partisans d'Éléazar, réduit à deux les factions qui déchiraient Jérusalem. Jochanan, malgré tout, est le dernier héros de la Ville expirante. La haine de Josèphe contre les Galiléens de Jochanan vient de ce qu'ils avaient fait du trésor sacré le trésor de guerre. Jochanan finit par prendre — on a peine à croire que ce fût par avarice — des coupes, des plats, des tables, même des vases qui servaient au service divin et dont quelques-uns avaient été donnés par Auguste et sa femme ; il osa prendre aussi l'huile et le vin que les économes conservaient dans l'intérieur du Temple pour les sacrifices. Il disait que Dieu ne leur en voudrait pas d'user ainsi des choses sacrées, puisque c'était pour lui qu'ils combattaient. Et d'ailleurs il avait suspendu les sacrifices à cause de l'impureté des sacrificateurs et de l'origine des ustensiles. Tout le culte d'Israël était dans la main de ce Galiléen. Libre à lui de le confier à celui de sa nation qu'il eut désigné ; Josèphe le lui ayant proposé, il refusa, faisant passer la défense avant tout, et alla jusqu'a manger sans difficulté des viandes proscrites.

 

Dans cet horrible siège, les Romains n'eurent pas d'alliés plus sincères que les Juifs de l'intérieur, si ce n'est ceux de l'extérieur que Tibère Alexandre animait contre la ville. Elle n'eut d'autres défenseurs que les huit ou neuf mille Galiléens de Jochanan et les Juifs mêlés d'Iduméens que commandait Bar-Gioras, en tout vingt-trois mille hommes que la population entassée derrière les murailles, affamée et tremblante, eut voulu voir dans le feu du Scheol. L'approche de la fin, réunissant les deux partis, les avait désarmés l'un contre l'autre, et, sans la famine, alliée invincible des Romains, le sort eut pu tourner. Josèphe, interprète de tous les dévots et de tous les riches, leur faisait du haut des tertres des cours de capitulation, leur exposant que, moyennant le tribut qu'ils avaient toujours payé, ils auraient la paix et surtout sauveraient le Temple, la demeure de Dieu. Il leur montrait qu'ayant souillé cette demeure Dieu abandonnait Jochanan et Bar-Gioras pour se mettre avec Titus.

Mais du haut des murs ils lançaient mille imprécations aux judéo-romains. Comme les premiers jehouddistes, ils criaient qu'ils préféraient la mort au tribut et même à la patrie asservie. Jusqu'au dernier jour, beaucoup attendirent le Royaume qu'avait annoncé l'Apocalypse : Quant au Temple, disaient-ils, Dieu en avait un autre infiniment plus grand et plus admirable, parce que le monde entier était son Temple, et que, s'il était, comme ils le croyaient, le défenseur de celui-là, il ne le laisserait pas périr. Ainsi, aux deux bouts de la chaîne qui va du Recensement de 761 à la chute de Jérusalem, même après l'exécution de Ménahem, nous trouvons attachée la Révélation du Joannès, l'idée du Règne éternel et universel des Juifs. Et cette idée, religieuse sans cesser d'être politique, nous la voyons épanouie dans le langage des derniers défenseurs de Jérusalem, qui en appellent à Dieu de la sentence que Satan, maître du monde, exécutait contre eux. Dominés par la peur de l'Enfer, les Galiléens de Jochanan se livrent mutuellement leur corps pour s'éviter le péché originel et s'habillent en femmes pour sauver les apparences. L'Enfer ou Sodome, voila le dilemme ; ils choisissent Sodome. Cette répugnante folie n'a rien d'obsidional, elle est d'origine religieuse. C'est le retour à l'ancienne prostitution masculine consommée dans le Temple même et qui était dite sacrée, parce qu'elle rendait impossible le péché de génération condamné par la Genèse. Le risque d'un enfant était selon la doctrine du christ un obstacle au Royaume de Dieu. Mon règne aura lieu, disait Bar-Jehoudda à sa mère, lorsque vous aurez foule aux pieds le vêtement de la pudeur et que ce qui est dehors sera dedans, c'est-à-dire, avons-nous expliqué[67], quand l'homme sera redevenu bisexuel comme Adam. Cette imagination stupide eut, en dehors du nicolaïsme, autre aberration apocalyptique[68], le beau résultat que vous voyez. Toutes les fois qu'on viole la nature, elle sen venge par un vice. Celui-ci c'est pas le plus turpide de ceux qu'a inspirés le criminel blasphème du plus grand des prophètes qui ait jamais paru, au dire de Jésus dans Mathieu[69]. Mais il est reste le plus célèbre, et c'est pourquoi le christ asinaire qu'adore Alexaménos est représenté de dos sur le graffito du Palatin.

Dans les derniers jours, la famine, encore plus mauvaise conseillère que la peur, ayant amolli les courages, — une mère tua et mangea son enfant — Bar-Gioras exécuta quelques sacrificateurs et gens du Sanhédrin suspects de trahison. Il tua de même Jehoudda, un des siens, qui voulait rendre une des tours et fit jeter son corps, avec ceux de ses complices, par-dessus les murailles a la vue de tons les Romains. Le pillage et l'incendie de la ville autorises par Titus achevèrent le mal que les gens de Jochanan et de Bar-Gioras avaient pu faire. Ce qui restait du trésor et des ornements du Temple, chandeliers, vases, tables, coupes d'or massif, parfums, habits et tissus précieux, le fameux voile toujours intact, tout fut passé à Titus par-dessus le mur du Temple. Ayant fait le serment de ne se rendre jamais, après avoir parlementé (à l'aide de truchements) avec Titus, et évacué le Temple en feu, il ne leur restait plus qu'à se retirer dans la ville haute et dans le palais. Ils y tuèrent huit mille quatre cents hommes du peuple qui s'y étaient réfugiés. En dépit des crimes par lesquels ils se rattachaient à Caïn et des orgies par lesquelles ils renouvelaient Sodome, les Galiléens de Jochanan rendirent en mourant le dernier souffle de la patrie. Josèphe peut les charger des couleurs les plus sombres : Iahvé Sabaoth parle en eux. Ils ont combattu plus âprement pour leurs passions que les prêtres pour leurs privilèges.

 

L'incendie du Temple est romain, mais celui de la Galerie d'Occident, face à Rome, est juif : il fut allumé par les défenseurs. Sur l'assurance d'un prophète auquel ils étaient attachés[70], six mille gens du peuple[71] périrent, qui s'étaient réfugiés vers la Galerie d'Orient dans l'espoir que Dieu leur enverrait personnellement du secours, car l'année était sabbatique. Mais les Cent quarante mille Anges de la milice céleste s'obstinèrent à rester dans les régions où leur taille et leur constitution ignée les retenaient. La vallée et la fontaine de Siloé furent le dernier asile de la résistance. Là Jochanan et Bar-Gioras, atteints du vertige final, abandonnes de presque tous leurs hommes, tentèrent un dernier effort avec une poignée de braves, tout ce qui restait de cette engeance de vipères, dit Josèphe. Du haut des tours qu'ils ne surent garder ils descendirent dans les égouts où ils furent pris. Dix-huit hommes tenaient encore dans la tour de Siloé, elle s'écroula sur eux, et cet épisode, le point thav du siège de Jérusalem, leur a valu l'inscription au tableau d'honneur de l'Évangile[72].

Le Temple était tombe sans que l'autorité de Moïse eût diminué d'un iota. Pour tous les Juifs, du temps de Vespasien, tant à Rome qu'ailleurs, le seul homme qui vint après Iahvé, c'était toujours Moïse. L'Apocalypse ne valait que parce qu'au fond elle était signée Moise. Il n'y a personne parmi les Juifs, dit Josèphe, qui encore aujourd'hui ne se croie oblige d'observer exactement ses ordonnances et qui ne le regarde comme pressent et prêt à les punir s'ils les avaient violées[73]. On croirait entendre Luc parlant du père et de la mère du Juif consubstantiel au Père : Ils étaient tous deux justes devant Dieu, marchant dans tous les commandements et dans toutes les ordonnances du Seigneur d'une manière irrépréhensible[74].

 

IX. — LA CÈNE DES OISEAUX DE PROIE.

 

La ville brûlée et pillée, les fortifications abattues, le menu peuple de Jérusalem vendu sur place, mal vendu faute d'acheteurs, les hommes pris les armes à la main passés au fil de l'épée, les voleurs envoyés au supplice, les plus jeunes et les plus beaux gardés pour le triomphe, d'autres, ceux qui étaient au dessus de dix-sept ans, envoyés en Egypte pour travailler aux ouvrages publics, d'autres distribués entre les provinces pour servir aux spectacles et aux combats contre les bêtes, d'autres encore, près de cent mille, réduits en esclavage, le reste enlevé par la famine ou la peste, il resta quarante mille Juifs de tout âge à qui Titus permit de se retirer ou ils voudraient. Les plus heureux étaient les morts. Josèphe veut que le siège ait coûté la vie à onze cent mille personnes.

Promise aux Juifs par l'Apocalypse la Cène des oiseaux de proie[75] se fit contre eux ! Les Syriens et les Arabes montrèrent un acharnement et des raffinements de cruauté inouïs : ils s'adjugèrent les transfuges riches qui avalaient leur or avant de quitter la ville et faisaient de leurs entrailles un coffre-fort : ces êtres abominables en tuèrent plusieurs milliers, ouvrirent le ventre avec l'épée, fouillait avec la main pour chercher les pièces d'or, objet de cette immonde convoitise. C'est un Syrien qui avait réclamé la faveur de monter le premier sur la brèche, à l'assaut de la tour Antonia.

Pompée s'était contenté de prendre Jérusalem et de la piller. Titus la ruina jusque dans les fondements, ne conservant d'elle qu'assez de pierres debout pour prouver qu'elle avait été habitée, assez de murs branlants pour empêcher qu'elle ne le fût encore.

A la destruction il ajouta une de ces persécutions par lesquelles Rome a mérité sa chute, deux mille cinq cents captifs brûlés ou sacrifiés aux bêtes dans Césarée pour contenter la population et célébrer la fête de son frère Domitien, d'autres sacrifies de la même façon dans Césarée de Philippe, d'autres dans Béryte, pour faire plaisir aux Phéniciens et célébrer la fête de son père. Antioche n'attendit pas sa venue pour massacrer une partie des Juifs qui s'y trouvaient, pour molester les survivants, les forçant de sacrifier aux dieux de Home et de travailler le jour du sabbat. Un Juif apostat menait évangéliquement toute l'affaire, accusant sou père et les autres Juifs d'avoir allumé l'incendie qui venait de brûler un quartier de la ville, et poussant si avant contre eux qu'ils en vinrent a cesser le sabbat dans Antioche et dans les autres villes de Syrie. Cependant, quelque mal que les renégats et les Syriens leur voulussent et quelque instance qu'ils aient faite, Titus ne consentit ni à chasser les Juifs d'Antioche ni à effacer leurs droits de bourgeoisie. Il allégua non la justice, mais l'embarras où il était de les caser ailleurs, Jérusalem n'étant plus et les autres villes n'en voulant pas. Lorsque d'Antioche il revint a Jérusalem, pour aller de là en Egypte et a Rome, il était suivi d'une foule de prisonniers qu'on venait voir comme on vient voir des bêtes. On voulait les voir dans leurs haillons de honte et de misère, leur défaite paraissant encore au-dessous de la haine qu'on leur avait vouée. Lorsqu'après Jérusalem Machœrous tomba[76], que toutes les terres des morts et des prisonniers furent vendues, réunies au domaine impérial ou données aux Juifs latinisants, on put croire qu'il n'y avait plus de Judée. Enfin lorsque Vespasien commanda qu'en tous lieux qu'ils fussent, les Juifs paieraient au Capitole les didrachmes qu'ils payaient auparavant au Temple, on put croire qu'il n'y avait plus de Juifs.

 

X. — LE RÈGNE D'ÉLÉAZAR À MASSADA.

 

Il y en avait encore, il y avait ceux de la race et de la secte des deux christs. Éléazar-bar-Jair, pendant le supplice de Ménahem, ne s'était enfui de la Ville de David que pour mieux combattre les antidavidistes d'Idumée. Éléazar fut le dernier Sicaire ; mais quand il mourut il n'avait plus personne à tuer, Titus lui avait volé sa vengeance !

Éléazar depuis trois ans commandait, régnait à Massada dans des conditions exceptionnelles d'absolutisme ; les Romains tenaient assiégés dans Jérusalem tous les chefs qui auraient pu s'opposer à lui. Tous les efforts de Vespasien avaient porte sur la Galilée, tous ceux de Titus sur Jérusalem ; on avait laissé Éléazar, maître de l'Idumée, libre de fomenter la révolte par des émissaires et des subsides sinon dans les synagogues d'Egypte où il avait peu de chances, du moins dans celles de Cyrène où les fils de Simon et ceux de Lucius avaient prêché les Paroles du Rabbi[77]. Au début de la guerre les Juifs avaient emporté sur les Arabes la redoutable forteresse de Machœrous, et il semble qu'ils y aient tenu pour Éléazar après la mort de Ménahem. Les Romains ne se tournèrent vers Massada qu'après avoir repris Machœrous. Le dernier boulevard juif, ce ne fut pas Machœrous, ce fut Massada. Le dernier roi des Juifs, ce ne fut ni Ménahem, ni ceux qui se disputèrent la tyrannie dans la Ville Sainte, ce fut Éléazar dans Massada. La couronne de David reforgée par Jehoudda, son dernier fils l'avait posée sur sa tête à Jérusalem ; Éléazar bar-Jaïr, son dernier neveu, la porte dans le Palais d'Hérode à Massada.

Les fils de Jaïr sont d'une trempe plus forte que les fils de Jehoudda. L'Éléazar de 788 est tombe dans la bataille, celui de 823 s'est immolé. Je ne pense pas qu'il y ait rien de plus grand dans l'horreur et dans le désespoir que la journée ou sur son avis les mille Juifs qui ne reconnaissaient d'autre roi que David s'entretuèrent dans Massada, avec les femmes et les enfants, et finirent sur le bûcher qu'ils avaient allumé.

 

Dans Josèphe on prête à Éléazar deux discours encore plus faux qu'éloquents sur l'âme et sa séparation d'avec le corps dans une autre vie. C'est un platonicien qui parle : nulle allusion par Éléazar à son ascendance, à ses parentés, aux Révélations des Joannès, à la résurrection, au jugement futur, au millénarisme de toute sa famille, à la fin de Ménahem, son beau-frère. Les discours d'Éléazar à ses compagnons sont tout entiers de quelque Père de l'Eglise fortement imbu de platonicisme, et surtout mû par la nécessité d'éliminer complètement de l'histoire l'Apocalypse dynastique qui avait fait l'erreur des deux rois-christs et causé la ruine de leur patrie.

L'éloge de la Bête dans la bouche d'un Jaïr, d'un frère de l'Éléazar que Jésus ressuscite à Bathanea, voila ou nous conduit cette nouvelle imposture ! De tous les peuples auxquels les Juifs ont eu affaire, les Romains sont ceux dont ils eurent le moins à se plaindre. Les Romains ne se conduisaient en ennemis que quand les Juifs se conduisaient en révoltés ! Une cause supérieure à la puissance de ces conquérants leur a donné sur les Juifs les avantages qui leur ont donné la victoire ! Et cette cause, c'est la haine spéciale que par leurs folles espérances et leurs ambitions ridicules les Juifs ont allumée dans le cœur de tous les voisins ![78] De telles vérités n'ont pu être confessées par le beau-frère du Juif consubstantiel au Père qu'après l'introduction du : Rendez à César ce qui est à César dans les Évangiles. Il n'y a qu'un faux de plus. Mais c'est si bien sous l'empire de l'Apocalypse que la Judée a vécu sa dernière période sabbatique, le nom de Bar-Jehoudda, surnommé Joannès dans ses Révélations et Jésus dans l'Évangile, est tellement inséparable de ceux de Ménahem et d'Éléazar, qu'il a fallu introduire dans Josèphe un prophète nommé Jésus pour annoncer la catastrophe finale pendant les sept dernières années de Jérusalem ! On a placé les débuts de ce prophète sous la procurature d'Albinus, parce qu'en effet la dernière période sabbatique (816-823) part d'Albinus pour finir à la chute du Temple.

 

XI. — LE FAUX SEPTENNAT DE JÉSUS.

 

Voici d'ailleurs l'économie de cette imposture.

Quatre ans avant la guerre, un illumine du nom de Jésus et fils d'un paysan vient à la Fête des Tabernacles. Il crie : Voix du côté de l'Orient, voix du côté de l'Occident, voix aux quatre vents, voix contre Jérusalem et contre le Temple, voix contre les nouveaux mariés et les nouvelles mariées, voix contre tout le peuple ! Nuit et jour il va par les rues, répétant ce lugubre cri. Quelques-uns de la ville le font prendre et fouetter : il ne se défend ni ne se plaint, ne cessant de répéter ses voix. Alors les magistrats croyant, comme il était vrai, qu'il y avait en lui quelque chose de divin, le mènent à Albinus. Albinus le fait fouetter jusqu'au sang, mais, à chaque coup, sans pousser un gémissement ni verser une larme, il dit d'une voix lamentable : Malheur sur Jérusalem ! Et quand Albinus lui demande d'où il est, d'où il vient, et pourquoi il parle de la sorte, il ne répond rien. Renvoyé comme fou, il erre dans la ville, n'injuriant point ceux qui le battent, ne remerciant point ceux qui le nourrissent, et répétant sans cesse : Malheur sur Jérusalem ! Pendant sept ans et demi il va ainsi, criant d'une voix plus forte et plus claire. Quand Jérusalem est assiégée, il n'en continue que davantage, tournant autour des murs : Malheur sur Jérusalem, malheur sur le Temple ! crie-t-il toujours ; et comme il ajoute : Malheur sur moi !, jeté bas par la pierre d'une machine, il rend l'esprit qui l'agitait.

Examinons cette histoire ; c'est, comme disent les experts en peinture, une réplique en petit format de celle qu'on a mise sous le nom de Jésus dans les Évangiles. Elle est conforme au plan de l'Eglise du quatrième siècle en ce qui touche la paternité de l'Apocalypse : selon l'Eglise, l'Apocalypse n'est plus du Joannès surnommé le jésus à cause de son baptême et le Nazir à cause de son vœu ; elle est d'un autre Joannès, qui l'aurait écrite après la chute de Jérusalem et qui aurait été disciple de Jésus de Nazareth, personnage conventionnel qui réunit en lui deux des surnoms de Bar-Jehoudda. Malheureusement la vérité sur le fond de l'affaire est dans les écrits juifs, dans les écrits païens et dans le Quatrième Évangile : le Joannès de l'Apocalypse et le Jésus de la fable ne font qu'un, c'est le même homme sous deux noms. Et pendant sept ans, de 782, date du consulat des deux Geminus, jusqu'au dernier jour de 788, date de sa crucifixion, il a prêche une Apocalypse dans laquelle il prédisait la destruction de Jérusalem et son remplacement par une Ville descendue des cieux. Or l'Eglise vient de décapiter le Joannès dans l'Évangile de Marc et de Mathieu pour qu'on ne puisse le retrouver sur la croix ; elle a introduit dans Josèphe le passage sur le Joannès emprisonné et mis a mort par Hérode Antipas, le passage sur Jésus-Christ livré par le Temple et crucifié par Pilatus, et le passage sur Jacques, lapidé un peu avant l'arrivée d'Albinus. Comment faire que néanmoins il ait paru, avant la chute de Jérusalem, un certain Jésus qui ne soit pas fils de David et qui ait prêché pendant sept années une Apocalypse semblable à celle du Jourdain, un Jésus dont l'existence offre quelques points de contact avec celle du crucifié de Pilatus sans être chronologiquement identique à celui-ci ? Sous l'empire de cette préoccupation on forge l'histoire du Jésus qui, prêchant sous Albinus, c'est-à-dire après la pseudo-lapidation de Jacques, ne saurait être, malgré la similitude du nom, identifié avec le frère aîné de cet estimable évêque de Jérusalem[79] lequel a depuis longtemps cesse d'être Jacob senior, crucifié avec Shehimon en 802.

 

Voici le raisonnement que le faussaire tend à imposer : A la vérité il a bien paru un Jésus qui a prêché une Apocalypse, mais il n'a pas été connu d'abord sous le nom de Joannès, il s'appelait Jésus Bar-Hanan en circoncision et il a prêché de 816 à 823. Ce Jésus n'était du sang de David ni par l'adultère de Bethsabée ni autrement ; ce n'est donc pas lui que le Talmud désigne sous le nom de Ben-Sotada et l'Évangile sous le nom de fils de David. Il n'était pas fils du grand Jehoudda en Évangile Joseph le Charpentier, Zibdeos ou Zacharie, et de Salomé en Évangile Maria Magdaléenne ou Eloï-Schabed ; il n'avait pas six frères dont le dernier, Ménahem, est la cause de la guerre finale. Son père n'avait pas fondé de secte, c'était un paysan ignorant des Ecritures ; lui-même n'avait reçu aucune éducation. Il a bien paru à une fête des Tabernacles, comme le jésus dans l'Évangile de cet horrible Cérinthe[80]. Mais c'était sous Albinus. Il a bien crié des choses qui sont dans l'Apocalypse : Voix du côté de l'Orient[81], voix du côté de l'Occident[82], voix aux Quatre vents[83], voix contre les nouveaux mariés et les nouvelles mariées[84], voix contre tout le peuple[85]. Mais c'était sous Albinus. Il a bien été arrêté à cette fête, emprisonné et fouetté[86], mais ce n'était pas sous Pontius Pilatus, ce fut sous Albinus. Il disait bien comme le Joannès-jésus : Malheur sur Jérusalem[87] mais c'était sous Albinus, sous Gessius Florus, sous Ménahem et pendant le siège. Ce n'était ni un baptiseur, ni un chef de bande redoutable, il ne s'est nullement dresse contre le Temple et contre Rome, il n'a point été proclame roi-christ au-delà du Jourdain, il n'a point marché sur Jérusalem à la tête de ses partisans, il n'a pas été défait au Sôrtaba, ni arrêté à Lydda ; il ne quittait point l'enceinte de Jérusalem. Il a bien été livre par les magistrats à un procurateur, mais ce fut à Albinus. Il a bien été fouetté de nouveau[88], mais ce ne fut pas de souples roseaux par Pilatus, ce fut de lanières sifflantes jusqu'au sang et par Albinus. Néanmoins il fut renvoyé comme hors de sens[89]. On lui a demandé qui il était[90], d'ou il venait[91], pourquoi il parlait ainsi[92], comme au héros des Évangiles, mais il n'a jamais répondu[93]. Y a-t-il la prétexte a soutenir que le jésus était fils de Jehoudda ? Il n'a pas fini sous Tibère, puis qu'il vivait encore sous Néron, ne cessant de répéter son cri : Malheur sur Jérusalem et qu'il continuait encore, pendant la guerre, à tourner autour des murs sans aucun égard pour l'état de siège qui rendait plus périlleux cet exercice déjà difficile en temps de paix. Il n'a pas été crucifié, puisqu'il est mort dune pierre lancée par une baliste. A la vérité, il a prêché pendant sept ans et demi, comme il appert de l'Apocalypse que les Juifs déicides et les païens infâmes attribuent au jésus, — comment croire de telles gens ?mais encore une fois ce fut depuis Albinus jusqu'à la fin de la guerre.

Notez que, datée de quatre ans avant le siège, l'affaire des Tabernacles remonte à 816 ; elle peut se passer sous Albinus qui part en 817. La prédication de ce second Jésus ayant dure sept ans et demi, celui qui la prêche ne peut avoir été tué que le jour même de la chute du Temple en 823. Il a donc fait, jour et nuit, le tour de Jérusalem pendant toute la procurature de Gessius Florus (817-819) ; pendant tout le règne de Ménahem, dernier frère du vrai jésus ; pendant toute l'expédition de Cestius Gallus, proconsul de Syrie, battu par les Juifs ; pendant toute la guerre de Vespasien en Galilée, et tout le siège de Jérusalem par Titus, assiste de Tibère Alexandre, le bourreau de Shehimon et de Jacob en 802. C'est un gaillard d'une solidité peu commune, et si les Juifs avaient résisté aux Romains comme il a résisté au sommeil, la Judée eut été sauvée par lui sans qu'il fut besoin de la Milice céleste !

 

Remarquez aussi avec quelles précautions l'interpolateur louche à ce second Jésus. Il ne veut point condamner dans le faux Jésus ce qu'il admire dans le véritable auteur de l'Apocalypse à laquelle sont empruntes tous les miracles et toutes les paraboles de l'Évangile. Ce Jésus a l'Esprit-Saint, il y a du divin en lui, les magistrats le reconnaissent ; il a annonce des choses qui n'étaient pas dans l'Apocalypse et qui sont aujourd'hui dans les Évangiles Synoptisés, notamment la chute de Jérusalem pressés par une armée étrangère[94], événement en opposition formelle avec ce qui devait se passer en 789. Tout le monde avait relevé l'anachronisme de cette prophétie placée dans la bouche du Jésus que l'Eglise fait mourir en 782 sous le consulat des deux Geminus ; c'était, comme toutes les compositions du même genre, une prophétie faite après coup. En la plaçant dans la bouche du Jésus que ce faux fait mourir sous Vespasien, on obtient qu'elle soit un simple écho des jérémiades évangéliques où Jésus verse sur Jérusalem des larmes en avance de quarante et un ans[95]. Voila pour le but évangélique de l'interpolation. Le Jésus d'Albinus a un autre but : il vient appuyer les impostures relatives à Saül dans les Actes des Apôtres, impostures que nous allons examiner tout à l'heure. Dans cet écrit, Saül sous le nom de Paul quitte la Judée vers 815, envoyé prisonnier à Néron par Festus, successeur de Félix et prédécesseur d'Albinus, alors qu'historiquement il est attaqué en plein Temple et assiégé dans le haut palais par les gens de Ménahem en 819, sous Gessius Florus, successeur d'Albinus. Le faux Jésus absorbe donc en lui, avec l'approbation de l'Eglise, toutes les Apocalypses de la maison de Jehoudda jusqu'a la chute de Jérusalem : Ménahem, le roi-christ de 819, n'est plus qu'un aventurier sans mandat des cieux. Paul n'est plus dans le corps de Saül en 819, il est à Rome, moitie prisonnier, moitie libre, et il attend que Pierre, crucifié depuis 802 au Guol-Golta, vienne le rejoindre pour être martyr avec lui de ce monstre de Néron. Il importe que dans les sept dernières années du Temple, il n'y ait plus en Judée ni de frère de Bar-Jehoudda, ni d'Hérode ennemi de la maison de David : ni Ménahem ni Saül. Et comme le dernier contact de Paul avec Jacques est date de Félix par les Actes, on interpole Josèphe pour lui faire dire que ce Jacques, frère du christ, est mort lapidé sous Albinus, avant l'Apocalypse dont Albinus fouette l'auteur aux Tabernacles de 816. Il n'est pas étonnant qu'après l'avoir farci de tant de fourberies on se soit demande si Josèphe n'était pas jehouddolâtre au fond de lame, car le Josèphe actuel est le plus grand des Pères de l'Eglise, elle en a canonise qui ne le valent pas !

 

Quant au Juif qui dans les Évangiles synoptisés annonce les mêmes catastrophes et a été promu dieu pour cela, vous chercheriez vainement la trace de sa sinistre mission dans Josèphe. Cet historien qui pousse aujourd'hui la minutie jusqu'a nous conter les faits et gestes de Jésus bar-Hanan, pendant sept ans et cinq mois, ignore incurablement que ce rustre a été précédé sous Tibère par un nomine Jésus-Christ, lequel, étant Auteur de la vie, prédisait aussi leur fin lamentable aux habitants de Jérusalem. Or si l'on en croit l'Eglise interpolatrice, non seulement Josèphe a connu le Jésus des Évangiles, comme il appert des passages sur cet être surhumain, sur Jean-Baptiste, son précurseur, et sur Jacques, son frère, mais encore il l'admirait au point d'avoir pressenti sa consubstantialité avec le Père ! Il semble donc qu'un accomplissement aussi complet de prophéties écrites pour ainsi dire sous sa dictée par Mathieu, Marc et Luc eut été l'occasion de rendre hommage à sa perspicacité sans rivale. D'où vient que Josèphe n'en a rien fait ? De ce qu'en introduisant Jésus bar-Hanan sur le marché pour donner le change aux bons goym, l'Eglise a pris soin de dire qu'on ne le vit parler à personne jusqu'a ce que la guerre commençât[96]. Ce Jésus ne saurait donc être un mauvais surmoulage de l'auteur des Paroles du Rabbi[97], puisqu'il n'a parlé à personne avant le commencement de la guerre. Notez d'ailleurs l'incohérente absurdité de cette imposture sous la plume d'un individu qui vient de nous présenter bar-Hanan comme ayant été fouette pour ses prédictions orales par Albinus, c'est-à-dire deux bonnes années avant le règne de Ménahem, qui est le prologue de la guerre en question.

Le chapitre sur les Signes et prédictions des malheurs arrivés aux Juifs[98] a été ajouté tout entier. En effet il n'est pas remarquable que par son ineptie, il Test encore plus par les fraudes qui décèlent son origine. G'est ainsi qu'on y voit, et toujours avant la guerre, des Juifs assembles pour célébrer la pâque le huitième jour du mois d'avril ! Or vous savez, et Josèphe qui était sacrificateur le savait encore bien mieux, que la pâque se célébrait invariablement le soir du quatorzième jour du premier mois (15 nisan qui répond à avril) et vous avez vu par le Quatrième Évangile que, dans l'après-midi du 14 nisan 7SS, Bar-Jehoudda, prisonnier depuis la veille, avait été mis en croix sans avoir pu célébrer la moindre pâque[99]. Vous vous rappelez que dans cet Évangile Jésus préside un banquet allégorique que les trois Évangélistes synoptisés — et synoptisés dans ce but — transforment en une pâque afin que le christ n'eût pas l'air d'avoir été supplicié sans avoir créé un sacrement vendable. La transformation n'ayant pu se faire qu'au mépris de l'histoire et de la chronologie, et les honnêtes gens, parmi lesquels se rangent tous les christiens non jehouddolâtres, ayant dénoncé cette diabolique imposture, l'Eglise ne pouvait se défendre que par des mensonges en ligne collatérale ; elle avait inséré dans Lactance que, mue en Jésus, Bar-Jehoudda était mort un jour qui correspond au 9 avril[100]. Si donc on montrait les Juifs célébrant la pâque, ne fut-ce qu'une fois, un 8 avril, avant la guerre, ce pouvait être précisément celle que le héros mythique des Évangiles avait célébrée avec les douze apôtres. D'où la date du 8 avril introduite dans Josèphe.

 

Ce n'est pas tout. A cette pâque, dit le faussaire, on vit en la neuvième heure de la nuit, durant une demi-heure, autour de l'autel et du Temple lui-même une si grande lumière qu'on aurait cru qu'il était jour. Or vous pouvez lire dans les Synoptisés que Jésus est arrêté (allégoriquement) sur la Montagne des Oliviers à la troisième veille (neuvième heure) de la nuit, alias trois heures du matin, et que quand il arrive dans la cour du grand-prêtre, le coq chante pour annoncer le petit jour. Vous pouvez lire également dans cette même fable qu'au moment ou Jésus apparaît à ceux qui viennent pour l'arrêter, la lumière qu'il dégage les fait tomber à la renverse, comme morts. L'ecclésiastique qui a falsifié Josèphe suppose que cette lumière insolite a été constatée tant a l'extérieur du Temple qu'à l'intérieur, et cela pendant la durée, une demi-heure, qu'il attribue au trajet accompli par Jésus dans la ville. Les ignorants, dit le faussaire, l'attribuèrent à un bon augure ; mais ceux qui étaient instruits dans les choses saintes (le voila bien, l'Esprit-Saint !) y considérèrent comme un pressage de ce qui devait arriver depuis. Et en effet, comment le Père n'aurait-il pas démenti les ignorants ? Ils avaient crucifie le juif qui lui était consubstantiel !

Ce n'est pas tout. Un peu après la fête (la fameuse pâque qui aurait été célébrée le 8 avril) il arriva le vingt-septième jour de mai une chose que je craindrais, dit le pseudo-Josèphe, de rapporter de peur qu'on ne la prit pour une fable, si des personnes qui l'ont vue n'étaient encore vivantes, et si les malheurs qui l'ont suivie rien confirmaient pas la vérité. Avant le lever du soleil, on aperçut en l'air dans toute cette contrée des chariots pleins de gens armes traverser les nues et se répandre a l'entour des villes (telle la lumière de tout à l'heure autour du Temple) comme pour les enfermer. Il s'est écoulé quarante-neuf jours (sept fois sept, un jubilé de semaines) depuis la pâque, lorsque ce phénomène s'est produit, mais ce qui gâte un peu sa spontanéité, c'est que pour le voir tous les Juifs se sont levés avant le soleil. D'ou vient cette détermination plus étrange que le phénomène lui-même ? Si tous ces Juifs (du sixième siècle pour le moins) ont devance le jour pour voir paraître cette milice (céleste, uniquement céleste), c'est qu'elle était annoncée par le Joannès-jésus dans l'Apocalypse de 781[101] ; qu'elle l'est par Jésus a Kaïaphas dans les Évangiles : Je te dis que des maintenant tu verras le Fils de l'homme paraître sur les nuées du ciel avec ses saints anges ; que ces saints anges devaient être armes jusqu'aux dents pour la défense d'Israël, et que Jésus, revenu a des sentiments moins belliqueux a la suite de la leçon que son prophète a reçue, les annonce encore, disant[102] : Si mon royaume était de ce monde, pensez-vous que mon Père ne m'enverrait pas ses (douze) légions d'anges (les Cent quarante-quatre mille de l'Apocalypse) ?

Mais le Fils de l'homme, sa milice et ses chariots[103] n'ayant paru ni sous l'Agneau de 789, ni sous les Ânes de 819, qu'est-il arrive, goym candides ? Il est arrive qu'on a remplace la tranchante Apocalypse du Joannès par cette piteuse reculade de Jésus de La Palice : Quand vous verrez les armées entourer la ville sainte, c'est que la fin[104] est proche. Eh bien ! ces armées d'investissement, les Juifs les ont vues avant la guerre qui a consomme cette fin cruelle — comprenez-vous, goym ? — et ils ne les auraient point vues si quelqu'un qu'on ne cite pas, mais dont le nom est de matines a complies dans la bouche du faussaire, n'en parlait dans cette belle fable jehouddolâtrique, tanto utile alla Chiesa, comme disait en son temps le bon pape Léon dixième.

Ce n'est pas tout, car le lendemain du quarante-neuvième jour après la pâque, c'est le cinquantième, alias la Pentecôte. Or dans les Actes des Apôtres[105] vous avez vu le Saint-Esprit arriver ce jour-là. Josèphe cambriolé tient donc le plus grand compte de ce phénomène, lorsqu'à la date du 27 mai — sa Pentecôte ne peut tomber qu'au jour adopté par l'Eglise romaine, c'est la même[106] — il fait résonner dans le Temple une voix d'en haut qui presse les sacrificateurs de déménager au plus vite pour céder le lieu saint à Bar-Jehoudda devenu consubstantiel au Père[107] !

Ce n'est pas tout, car le mensonge fleurit les lèvres de l'Eglise comme le miel parfume celles du Verbe. Il vous souvient que dans le système du Juif consubstantiel au Perec le monde des incirconcis est détruit par tiers, cujus pars magna sumus[108] ; que la Jérusalem terrestre est détruite par tiers également pour faire place à la Jérusalem céleste[109] ; que le Fils de l'homme commence ses opérations sous le premier signe, soit l'Agneau[110], pour les terminer sous le quatrième, soit les Ânes ; que pour cette raison Jésus dit dans les Évangiles : Je puis détruire le Temple en trois jours (d'un signe chacun)[111] ; que pour cette raison aussi il ressuscite les deux précurseurs de Bar-Jehoudda[112], ensuite Éléazar et Bar-Jehoudda lui-même le quatrième jour, celui de la création du Soleil ; que le Cycle commençant le 15 nisan 789[113] et marquant le retour de la terre au point de départ du Soleil dans la Genèse, c'est sous le quatrième signe, les Anes, que le Fils de l'homme venant dans le soleil lui-même brûlait les hommes à la réserve des Juifs sauves par le baptême du Joannès. Savez-vous ce que tout cela devient dans le chapitre sur les Signes et prédictions des malheurs arrivés aux Juifs ?

Oyez, goym : Si l'on veut considérer tout ce que je viens de dire, conclut le faussaire, on verra que les hommes ne périssent que par leur faute... Ainsi les Juifs après la prise de la forteresse Antonia (par les Romains) réduisirent le Temple au quart[114], quoiqu'ils ne pussent ignorer qu'il est écrit dans les Livres Saints que la Ville et le Temple seraient pris[115] lorsque cela arriverait. Mais ce qui les porta surtout à cette guerre, c'est un autre passage de la même Écriture ou il est dit qu'on verrait en ce temps-la un homme de leur pays commander a toute la terre. Cette Écriture, c'est l'Apocalypse, non celle de Pathmos, mais celle du Jourdain, et le prophète qui a tout perdu, le prophète qui est cause de tout, depuis 788 jusqu'à la fin misérable des six mille hommes du peuple brûlés dans la Galerie d'Orient ou précipités, c'est celui-là même dont l'Eglise a imposé la sinistre image par les moyens qu'il prêchait : le fer, le feu, la destruction. Et cette fois voici du Josèphe authentique : Ce malheureux peuple est d'autant plus à plaindre qu'ajoutant aisément foi à des imposteurs qui abusaient du nom de Dieu pour le tromper, il fermait les yeux et se bouchait les oreilles pour ne point voir et ne point entendre les signes certains et les avertissements véritables par lesquels Dieu lui avait fait prédire sa ruine[116].

 

XII. — LA BÊTE VESPASIENNE.

 

Pendant la guerre les Juifs d'Egypte avait fourni des hommes et peut-être de l'argent contre les Zélotes qu'ils redoutaient, ayant déjà payé pour leur démence. Philon ne l'eut peut-être pas fait, mais son neveu Tibère, fils de l'alabarque Alexandre, avait entraîné toute la famille. Les Alexandre étaient des Juifs césariens, suppôts de la Bête, très fiers de leurs charges et de leurs insignes. Les Juifs d'Egypte avaient un Temple à Héliopolis, moins riche sans doute, mais plus vieux que le Temple hérodien de Jérusalem. Celui-ci tombé, les Sicaires pouvaient nourrir l'espoir de rétablir la sacrificature dans celui-là, hors de la Ville de David. En allant en Egypte, ils retournaient à la source des Paroles du Rabbi. Jehoudda, leur maître, en avait jadis ramené l'Apocalypse du Fils de l'homme, développée et défendue par ses sept fils. Sans pouvoir être comparé au Temple de Jérusalem, le Temple d'Héliopolis était le seul après lui. Il existait depuis trois siècles et demi, bâti par le grand-prêtre Onias, transfuge de Jérusalem, dans un but de suppléance religieuse, au cas où le sanctuaire de Jérusalem viendrait à manquer. Il avait ses sacrificateurs a lui, une lampe à défaut de chandelier, des revenus et des biens. Ses portes étaient de pierre ; sur cette pierre il y avait des hiéroglyphes, et ces hiéroglyphes sont ceux qui étaient sur la pierre du témoignage gravée par Iahvé lui-même, au dire de Zacharie et de Jehoudda[117]. Toute la magie de Bar-Jehoudda venait d'Egypte, nous vous l'avons déjà dit d'après Tacite, Suétone, Mathieu, le Talmud et le prologue du Quatrième Évangile[118].

Depuis soixante ans la secte de Jehoudda luttait contre les Juifs bestialisés par Hérode. Les Sicaires trouvèrent des Juifs descendus plus bas, vespanianisés par Alexandre, ce renégat qui, de la même nation qu'eux[119], avait changé de religion et crucifié deux de leurs maîtres, Shehimon et Jacob. Une phrase trop suggestive a sauté de Tacite à l'endroit où il est question des représailles qu'ils exercèrent[120]. Alexandrie était le siège du gouvernement d'Alexandre hier encore lieutenant de Titus devant Jérusalem et qui avait sinon conseille tout, du moins consenti a tout. Ces âmes de fer se jetèrent sur ceux qui cédaient à la Bête et comme en Judée, comme à Corinthe, comme à Éphèse, ils les égorgèrent christiennement. Livrés par les parents des victimes, poursuivis jusqu'à Thèbes et ramenés dans Alexandrie, ils subirent les tourments les plus affreux avec une constance et une sérénité qui semblent avoir manqué à Bar-Jehoudda et à ses frères. Nul ne put les amener à reconnaître Vespasien, un incirconcis, pour roi. Inflexibles dans leur Loi, insensibles à la douleur, tous, au nombre de plus de six cents, persistèrent dans leur résolution. Mais dans cet horrible spectacle rien ne parut plus merveilleux que l'opiniâtreté incroyable des jeunes enfants a refuser de donner à l'Empereur le nom de Seigneur[121], tant la forte impression que les maximes de cette secte furieuse avaient faite dans leur esprit les élevait au-dessus de la faiblesse de leur âge. Ce qui rendait ces enfants si durs a la souffrance, c'est l'assurance qu'ils ressusciteraient prochainement pour se retrouver avec leurs parents dans l'Eden, tandis que leurs bourreaux seraient plongés dans le feu qui ne s'éteint point et connaîtraient le ver qui ne meurt point. Ils ont mérité que Jésus donnât ordre aux disciples de ne point les brutaliser et de les laisser venir à lui[122].

De même qu'en Judée ils avaient été cause de la mine du Temple de Jérusalem, de même en Egypte ils furent cause de celle du Temple d'Héliopolis. Après quelque temps il fallut le fermer et le détruire.

 

D'Alexandrie la contagion gagna la Cyrénaïque où les fils de Simon de Cyrène, Alexandre et Rufus, et ceux de Lucius[123] avaient planté la foi millénariste. Jonathas, un vrai tisserand peut-être[124], se fit christ intérimaire à la façon de Theudas sous Claude[125]. Il emmena au dessert une foule d'hommes simples à qui il avait promis de montrer des signes et des prodiges. Dénoncés par les autres Juifs, on n'eut pas de peine ales prendre. A leur tour, dénonçant les dénonciateurs comme étant de la même faction, ils réussirent à en faire tuer trois mille.

Sur ce mouvement Josèphe ne s'explique pas clairement du tout, ou plutôt ce n'est pas lui qui parle. On ne voit pas comment Jonathas, envoyé pieds et poings lies a Vespasien, peut accuser raisonnablement Josèphe, qui avait pris le nom de l'empereur[126] et vivait à Rome dans le palais, de lui avoir fourni des recrues et fait passer des subsides ! Josèphe, dans la situation où il était, ne pouvait ni aider naturellement les christiens de Cyrène ni conspirer avec eux, fut-ce de loin. Il ne sait même plus de quelle manière finit Jonathas. Vespasien le fit brûler, dit-il ici. Et ailleurs : Vespasien lui fit trancher la tête. Un seul homme avait pu fournir des recrues et des subsides ! Jonathas, c'est Éléazar-bar-Jaïr, beau-frère de Ménahem, pendant les trois années qu'il fut maître de Massada. On n'a eu qu'un but en mêlant Josèphe à cette affaire, c'est de rompre le lien qui rattache Jonathas sous Tibère à Bar-Jehoudda par Simon de Cyrène, sous Néron a Ménahem par Éléazar, et sous Trajan a la grande révolte des Juifs Cyrénéens. Quand on veut saisir le fil de l'histoire ecclésiastique il faut toujours avoir présent à l'esprit le mensonge sans lequel il n'y aurait pas de christianisme : Salomé, Shehimon, Cléopas et sa femme racontant que Simon de Cyrène avait été crucifié à la place de Bar-Jehoudda, et les fils de Simon consentant, peut-être de bonne foi, à cette substitution, avec ceux de leur oncle Lucius.

 

 

 



[1] Vie de Josèphe. Tous détails dont il n'y a plus trace dans la Guerre des Juifs où ils devraient être et où ils ont été, encore plus explicites sans doute.

[2] Guerre des Juifs, livre II. ch. XLI, 222.

[3] Il est dit : Gessius Florus dans la Vie de Josèphe.

[4] On ne sait plus où était exactement la ville d'Antipatris, et au Moyen-âge on la plaçait au lieu dit actuellement Arsuf, si près de la mer qu'il y aurait eu inévitablement un port. Mais Antipatris, construite sur l'emplacement de Kapharsaba, aujourd'hui Kafr Saba, n'a rien de maritime, et d'ailleurs on a trouvé qu'au lieu de répondre à Antipatris Arsuf était Apollonie. Antipatris était dans les terres, en plaine, à quarante-deux milles romains de Jérusalem. Il n'en restait plus à Saül que vingt-six pour être à Césarée.

[5] Actes des Apôtres, XXIII, 31.

[6] Stratopedon, sans doute situé entre la forteresse Antonia et le palais d'Hérode moins facile à emporter.

[7] Cf. le Roi des Juifs.

[8] Cf. le Roi des Juifs.

[9] Suétone, Néron.

[10] Les actes antérieurs de Ménahem étant supprimés de Josèphe, ce portait méprisant n'est plus aucunement préparé. Qu'avait donc fait Ménahem ! Voilà ce qu'on se demande.

[11] Josèphe ne dit plus de quel supplice fut puni le roi-christ de 819. C'est depuis qu'il ne dit plus de quelle façon a péri le roi-christ de 788.

[12] Il était fils de Jaïr qui avait épousé la sœur de Jehoudda, père du christianisme. En même temps, par le mariage de Thamar avec son frère Éléazar l'aîné (le ressuscité de l'Évangile), il était le beau-frère des Sept fils de Jehoudda.

[13] Cf. le Charpentier.

[14] Cf. le Roi des Juifs et le Saint-Esprit.

[15] Cf. le Roi des Juifs.

[16] A Gamala contre Antipas (cf. le Roi des Juifs), à Massada contre Métilius.

[17] Révolte sous Hadrien.

[18] Mathieu, XXI, 1.

[19] Le 14 nisan, veille de l'Agneau.

[20] Il les envoie prendre à la bourgade voisine (Mathieu) que les scribes de l'Église moderne disent être Béthanie, d'après ce qu'ils infèrent de Marc et de Luc. En effet Béthanie-lez-Jérusalem était à quinze stades en arrière de Bethphagé, mais il ne s'agit pas de cette Béthanie-là dans l'Évangile, il s'agit de Bathanea en Bathanie, au-delà du Jourdain. (Cf. le Roi des Juifs.)

[21] Vous avez vu le cas qu'en fait l'Apocalypse. Cf. le Roi des Juifs.

[22] Gemara de Babylone, Mischnah, I, 3, Mischnah, traité Megiloth, I, 11.

[23] Quatrième Évangile, XII, 16.

[24] Père de la ville. On disait la Ville de David.

[25] Cf. le Roi des Juifs.

[26] Le Charpentier.

[27] Personne ne nie que le dessin au stylet trouvé au Palatin dans la domus Gelotiana ne vise un Jehouddolâtre nommé Alexamenos en adoration devant le roi-christ, vu de dos et dont la tête est remplacée par celle d'un âne. Alexamenos adore Dieu, dit l'inscription grecque. Alexamenos est imberbe et porte les cheveux courts. On y a vu un soldat et il se peut bien que telle ait été l'intention du dessinateur, si tout cas ce graffito est du troisième siècle, mais rien de moins certain. Nous verrons tout à l'heure si l'imberbe Alexamenos, adorant un homme à tête d'âne et vu de dos ne serait pas purement et simplement un de ces Galiléens qui se rasèrent pendant le Siège et se déguisèrent en femmes. L'Eglise déclare que cette représentation du Roi des Juifs sous la forme d'un âne est un blasphème horrible. Mais comme elle sait tirer parti de tout, elle rapproche ce graffito de la lettre de Paul aux Philippiens où il est dit que la foi jehouddolâtrique s'était répandue jusque dans le palais de Néron. De la domus Gelotiana le Christ asinaire a été transporté au Musée Kircher, salle n° III. Menacé d'une destruction certaine par le temps, salpêtré, crevassé, traversé de lignes qui contrarient les caractères déjà grossiers de l'inscription, on ne peut le reproduire clairement qu'en forçant les traits. La reproduction exacte de la paroi sur laquelle il est gravé serait aller contre notre but qui est en toutes choses de réduire au minimum la difficulté de compréhension.

[28] Cf. Eliphas Lévi, Histoire de la Magie.

[29] Epigrammes, livre XI, 94.

Ecce negas, jurasque mihi per templa Tonantis.

Non credo : jura, verpe, per Ancharium.

On lit maintenant Anchialum qui n'a aucun sens. Mais l'intention de Martial est claire, et elle domine toutes les interprétations proposées par Anchialus qui a d'ailleurs le même défaut que Jésus, celui de n'exister point. Sur les divagations des savants, cf. Moïse Schuhl, rabbin, Les préventions des Romains contre la religion juive, Paris, Durlacher, in-8° (sans date.)

[30] L'Octavius de Minucius Félix.

[31] Celle des christiens Nicolaïtes est restée célèbre par ses débordements.

[32] Cf. le Roi des Juifs.

[33] Gordien III. Voyez ses grands yeux et ses traits largement découpés sur le buste qui est aux Offices de Florence.

[34] Dans son œuvre destructrice, le temps a ménagé ces images grossières, mais marquées au coin de la vérité. Nous sommes sûr que celles-là sont l'expression spontanée du sentiment universel, et elles ont ceci d'éloquent qu'elles parlent du peuple auquel tout revient un jour ou l'autre.

[35] On se souvient que Jehoudda est appelé tantôt Zachûri, nom chaldéen du Verseau, tantôt Zibdéos (Faiseur de Poissons) qui en est l'équivalent.

[36] Cf. le Charpentier.

[37] Les sept figures qui sont au-dessus du calendrier (la première et la sixième ont disparu) sont celles des sept jours planétaires à partir de Saturne. On distingue assez bien le Soleil, la Lune, Mars et Venus. Au-dessous des sept figures sept trous sont disposés pour recevoir des fiches. Le mois se compose de trente jours comme dans le calendrier d'Abraham, quinze jours à la droite, quinze jours à la gauche. Les douze signes, en allant de l'Orient à l'Occident et de l'Occident à l'Orient, sont ceux que nous connaissons, à part les Ânes, avons-nous dit. Vingt-quatre trous sont disposés pour recevoir la fiche mobile de la quinzaine. Les signes se présentent dans le même ordre, si ce n'est que le Verseau et les Poissons se trouvant au-delà du bras est de la croix, le calendrier romain avance de deux signes sur l'immuable calendrier juif.

[38] Cf. le Roi des Juifs.

[39] Âne et porc.

[40] Valentin, en sa Sagesse, éd. Amélineau. La descente de Jésus aux enfers est des plus anciennes. Elle se trouvait dans les thèmes qu'a corrigés Valentin vers 200 de l'Erreur christienne et dans ceux qu'à connus Celse au quatrième siècle.

[41] Cf. le Roi des Juifs.

[42] Judæo licet et porcinum numen adoret

Et cilli summas advocet auriculas !

Au lieu de cilli, les copistes ont mis cœli, contresens évident. Je signale la manœuvre à M. Laurent Tailhade, pétronisant.

De tous latins de la décadence — il est contemporain d'Élagabale — Pétrone est le seul qui emploie le mot cillus, pour designer l'âne. C'est donc un mot qu'il ne tient pas de la tradition, mais du grec κίλλος. Sa langue est d'ailleurs toute farcie de grec, et de grec syrien. De son côté, le grammairien Festus est le seul qui emploie le mot cilo dans le sens de : Celui qui a la tête pointue, élevée, et le mot, en ce sens-là, ne se rattache à aucune racine grecque. L'un et l'autre ne viennent-ils pas de Scilo, qui est le vieux nom hébreu du Messie Tout-Puissant ? Cette question serait digne d'un hébraïsant, et elle passe trop loin de ma compétence pour que j'insiste davantage.

[43] Que le supplice des Scilitains soit de 180 de l'Erreur christienne, comme le pense M. Monceaux (Histoire littéraire de l'Afrique chrétienne) ou qu'il se place plus avant dans l'histoire, il n'importe pour le moment. Je pense pour ma part qu'il eut lieu après 207, sous Septime-Sévère qui eut à défendre les villes d'Afrique et les mœurs contre le christianisme jehouddolâtre.

[44] Il n'est d'ailleurs que sur le titre, sauf dans la version grecque de la Passion des Scilitains qu'à de nombreuses altérations on devine être postérieure à la latine. Le scribe grec, séparé par un long temps, plusieurs siècles peut-être, de la version latine, croit devoir faire un peu de géographie et peut-être un peu plus que de la géographie. C’est un catholique qui entend que ces martyrs, les premiers de l'Afrique, soient disciples du pseudo-Jésus de Nazareth, et non des Scilitains plus ou moins jehouddolâtres. Ils étaient, dit ce scribe, originaires d'Ischlé en Numidie. C'est à tort que dans les versions modernes ont orthographié Scillitains (en ce cas ce serait : Cillitains), il faut dire Scilitains comme le fait le calendrier de Carthage.

[45] Quoique la Numidie n'existât point en tant que province distincte en 180, Scillium aurait pu se trouver dans la partie numide de la Proconsulaire. On n'en trouve pas de mention avant le cinquième siècle, mais on a découvert à Chemtou (Simitthu) une épitaphe où se lit Iscilitana, et on est tenté d'identifier Simitthu avec Scillium et Scillium avec Ischlé. (Voir M. Paul Monceaux.)

[46] Apologétique, XVI et Ad Nationes, l. Ier, XIV. Les deux récits diffèrent, ce qui s'explique : il n'y a rien de vrai que le fait lui-même.

[47] Et non du Dieu qui couche avec les ânes. On a pensé, en effet, que cette plaisanterie visait le Juif consubstantiel au Père, et à ce point de vue elle est injustifiable, elle n'aurait même pas été comprise de ceux à qui elle s'adressait. Il ne faut pas oublier qu'il y avait des femmes parmi les Scilitains qui furent exécutés à Carthage et précisément la compagne de l'Âne dans Apulée est elle-même une condamnée à mort. Il ne faut pas oublier non plus les nombreux excès dont les christiens nicolaïtes se sont rendus coupables dans leurs réunions nocturnes. C'est le mariage de toutes ces idées qui a inspiré méchante composition dont l'auteur de l'Apologétique dit s'être bien amusé.

[48] Ce fut, il m'en souvient, le sujet de mon dernier entretien avec le regretté Henri Bouchot, qui était de l'Institut et méritait d'en être, avec ceci de charmant qu'il n'en avait pas l'air.

[49] L'ancien préteur d'Éphèse qui opéra avec Saül, Tibère Alexandre et Démétrius contre Shehimon et Jacob. (Cf. le Saint-Esprit.)

[50] Aux Romains, IV, 19.

[51] Aux Philippiens, IV, 22. Salutant vos qui mecum sunt fratres ; salulant vos omnes sancti, maxime autem qui de Cœsaris domo sunt.

[52] Concursus quoque multus de domo Cœsaris (c'est l'expression de la Lettre aux Philippiens que le faussaire a sous les yeux) ad eum credentium in Dominum Jesum Christum, et augmentabantur quotidie fidelibus gaudium magnum et exultio. Sed et institutor imperatoris, etc.

[53] Fille d'Hérodiade et veuve de Philippe, tétrarque de Gaulanitide, Bathanée et Trachonitide. Cf. Le Roi des Juifs.

[54] Second mari de Salomé après le mort de Philippe.

[55] XVI, 24. J'espère que, lorsque je partirai pour l'Espagne (fait acquis et qu'exploite l'auteur de la Lettre aux Romains), je vous verrai en passant (séjour à Rome) et que vous m'y conduirez, après que j'aurai un peu joui de vous. (Principe de l'entretien de la dignité épiscopale par la cotisation des croyants et développé dans les versets 25-27.)

XVI, 28. Lorsque j'aurai terminé cette affaire (le voyage à Jérusalem pour porter la collecte de Macédoine et d'Achaïe que l'Apôtre de nations est censé avoir faite pour les saints) et que je leur aurai remis le fruit des collectes, je partirai pour l'Espagne, en passant par chez vous.

[56] Clément romain, Première aux Corinthiens, 5 (Patrologie grecque de Migne). Notons que Clément est à lui seul un syndicat de scribes à la solde de l'Église de Rome.

[57] Épiphane, Contra hœreses, XXVII, 6.

[58] Athanase, ad Dracontium.

[59] Cyrille, Catéchèses, 17. Il faut faire les réserves les plus expresses sur l'authenticité de ces documents. En tout cas ils émanent de scribes qui ne peuvent être antérieurs à la fin du quatrième siècle.

[60] In Matthæum Homel., LXXV, LXXVI : De laudibus Pauli, VII, et Præfatio in Epistolam ad Hebrœos, avec cette observation que dans ce dernier ouvrage on fait dire à Chrysostome qu'après l'Espagne Saül serait retourné en Judée, ce qui est en opposition avec les deux précédents. Un homme d'Église romaine a modifié l'itinéraire afin que de Judée l'Apôtre des nations pût revenir une seconde fois en Italie pour y être martyr avec Pierre. Il a négligé de mettre les deux autres passages en harmonie avec cette imposture qui est spéciale à l'Église Rome et conforme à ses plans d'usurpation.

[61] In Isaiam, XI, 14.

[62] Le premier acte des révolutionnaires lorsqu'ils s'établirent dans le Temple, après en avoir chassé Ménahem, fut de changer l'ordre établi touchant le choix des sacrificateurs, qui se transmettaient successoralement les charges. L'usage avant les Rois était de remettre au sort le soin de désigner le grand-prêtre et les sacrificateurs. Mais, dit Josèphe, ils furent confondus dans leur malice, car ayant fait jeter le sort sur l'une des familles de la tribu consacrée à Dieu (la tribu de Lévi) il tomba sur Phanias, qui non-seulement était indigne d'une telle charge, mais qui était si rustique et si ignorant qu'il ne savait rien du sacerdoce. Ils le tirèrent malgré lui de ses occupations champêtres et le revêtirent de l'habit sacerdotal.

[63] Le parti des sacrificateurs évincé par le sort les aurait laissés entrer, s'ils avaient promis de marcher contre Éléazar Bar-Ananias et Jochanan de Gischala.

[64] Ménahem et ses ministres.

[65] Ménahem avait trahi le peuple : roi-prêtre, il aurait levé les décimes et davantage.

[66] Dans Mathieu et autres.

[67] Cf. le Charpentier.

[68] Sur les Nicolaïtes, cf. le Charpentier et le Saint-Esprit.

[69] Mathieu, XI, 11.

[70] Nul autre que l'auteur de l'Apocalypse.

[71] Le chiffre de ces illuminés semble avoir été grossi comme beaucoup d'autres appartenant au même récit de Josèphe. Mais il n'y a rien d'étonnant à ce que la galerie et sa plate-forme puisent recevoir six mille personnes.

[72] Cf. le Roi des Juifs. Je pense que les six mille malheureux brûlés sur la Galerie Orientale peuvent être rapprochés de ces dix-huit christiens millénaristes.

[73] Antiquités judaïques, II, VII.

[74] Luc, I, 6.

[75] Cf. le Roi des Juifs.

[76] Les révoltés avaient pris cette forteresse sur les Arabes.

[77] Sur Simon de Cyrène et Lucius son frère, cf. les Marchands de Christ et le Saint-Esprit.

[78] Second discours d'Éléazar à Massada, Guerre des Juifs, VII, 24.

[79] Cf. le Saint-Esprit.

[80] Le Quatrième. (Cf. le Roi des Juifs.)

[81] Cf. l'Apocalypse dans le Roi des Juifs, à toutes les pages et particulièrement le chapitre VII, 2, de l'Apocalypse.

[82] Cf. l'Apocalypse dans le Roi des Juifs, à toutes les pages et particulièrement ch. XVI de l'Apocalypse. Et Mathieu, XXIV, 27.

[83] Cf. Apocalypse, VII, 1 : Je vis quatre Anges qui étaient aux quatre coins de la terre et qui retenaient les quatre vents de la terre, pour qu'ils ne soufflassent point, etc. Et Mathieu, XXIV, 30 : Il (le Fils de l'homme) enverra ses anges qui rassembleront ses élus des Quatre vents de la terre.

[84] Cf. le Roi des Juifs (XVIII, 23 de l'Apocalypse) : La voix de l'époux et de l'épouse ne sera plus entendue. Mathieu, XXIV, 19, et Luc, XXI, 23 : Malheur aux femmes enceintes et à celles qui nourriront en ces jours-là ! Et Luc, XVII 27, 30 : Ils se mariaient et mariaient leurs enfants... et le déluge vint et les perdit tous... Ainsi en sera-t-il le jour où le Fils de l'homme sera révélé. Luc encore, XXII, 29 : Heureuses les stériles, et les entrailles qui n'ont pas engendré, et les mamelles qui n'ont point allaité !

[85] Malheur à cette génération ! C'est la substance même de l'Apocalypse. Vingt exemples dans l'Évangile. Luc, XXI, 32 : En vérité, je vous le dis, cette génération ne passera pas que toutes ces choses ne soient accomplies.

[86] Cf. le Roi des Juifs.

[87] Les trois Synoptisés, Marc, Mathieu, Luc : Il n'en restera pas pierre sur pierre.

[88] Pilatus fouette Bar-Jehoudda de sa propre main dans Mathieu.

[89] Luc, XXIII, 4 : Je ne trouve aucune cause de mort en cet homme, dit Pilatus. Luc, XXIII, 11 : Hérode avec sa cour s'en moqua et se joua de lui.

[90] Luc, XXIII, 3 : Es-tu le Roi des Juifs ?

[91] Luc, XXIII, 6 : Pilatus, ayant entendu nommer la Galilée, demanda si cet homme était Galiléen.

[92] Luc, XXII, 67 : Si je vous le dit, vous ne me croirez pas.

[93] Luc, XXIII, 9 : Il (Hérode Antipas) lui faisait donc beaucoup de questions, mais Jésus ne lui répondait rien.

[94] Luc, XXI, 20.

[95] Au compte de l'Eglise, dont la chronologie est entièrement fausse, ainsi que nous l'avons démontré tant de fois.

[96] Guerre des Juifs, VI, XXXI, 476.

[97] C'est le titre véritable des écrits ou Révélations (d'où le mot d'Apocalypse) de Bar-Jehoudda sous le nom de Joannès. Nous y consacrerons tout un chapitre, le moment venu.

[98] C'est le trente et unième du livre VI.

[99] Cf. le Roi des Juifs.

[100] Nous avons cité ce passage dans les Marchands de Christ.

[101] Cf. le Roi des Juifs.

[102] Le Roi des Juifs.

[103] Le quadruple char jadis décrit par Ézéchiel.

[104] Ou désolation. (Luc, XXI, 20.)

[105] Les Marchands de Christ.

[106] Du 9 avril au 27 mai il y a juste cinquante jours. Si le compte était de Josèphe ou simplement d'un Juif il partirait du 15, selon la Loi pour aboutir au 5 juin.

[107] Les Marchands de Christ.

[108] Le Roi des Juifs.

[109] Le Roi des Juifs.

[110] Le Roi des Juifs.

[111] Pour comprendre le propos de Jésus dans la mystification évangélique, il faut savoir que dans le système de Bar-Jehoudda un jour est comme un cycle, et que chacun de ces jours est représenté par un signe sur le Zodiaque millénaire.

[112] Jehoudda, son père, et Zadoc, son oncle. Cf. le Charpentier.

[113] Le Cycle final, les Mille ans pendant lesquels Bar-Jehoudda devait régner en attendant le Père.

[114] Incompréhensible. On lit le plus souvent au quarré, ce qui a le mérite d'être plus incompréhensible encore.

[115] Il n'est question de prise ni dans Zacharie, qui est le seul prophète ancien où s'affirme la doctrine du renouvellement de Jérusalem par tiers, ni dans l'Apocalypse où Bar-Jehoudda développe cette prophétie. Le baptême de feu n'abolissait la Jérusalem terrestre que pour la remplacer par une ville descendant des cieux, c'est-à-dire éternelle. (Cf. Le Roi des Juifs).

[116] Guerre des Juifs, VI, XXX, 475.

[117] Cf. le Roi des Juifs.

[118] Cf. le Charpentier.

[119] Ejusdem nationis, dit Tacite (Histoires, l. I, ch. XI).

[120] Les mots Ejusdem nationis, égarés dans le texte remanié, s'appliquent maintenant à la nationalité égyptienne. Or il n'est pas possible que Tacite, si bien documenté par Apion et par Josèphe, ait pris Tibère Alexandre pour un Égyptien. Ce qui caractérise Alexandre, c'est précisément son judaïsme originel.

[121] Ce nom ne peut convenir qu'à leurs rois légitimes, comme était Jehoudda. C'est en partie pourquoi celui-ci est appelé Seigneur dans les Évangiles. Toutefois le nom de Seigneur revient de droit à tout Juif, de famille royale ou non, par comparaison avec un incirconcis grec ou romain. Shehimon dit la Pierre est appelé Seigneur par Cornélius ; Saül dit Paul est appelé Seigneur par les magistrats de Philippes. Tout Juif est dieu, quand il est présenté en même temps comme jehouddolâtre. A Lystre, Barnabé est Jupiter, Paul est Mercure. Cf. Le Saint-Esprit.

[122] C'est-à-dire de les admettre au baptême sans attendre qu'ils fussent hommes faits.

[123] Sous le nom de qui on a mis un Évangile. Cf. le Saint-Esprit.

[124] A la façon d'Aquila, c'est-à-dire travaillant au relèvement de la tente de David. Cf. le Saint-Esprit.

[125] Cf. le Saint-Esprit.

[126] Flavius.