LE VRAI ET LE FAUX SUR PIERRE L'HERMITE

 

SIXIÈME PARTIE. — Renseignements sur la résidence de Pierre l'Hermite après la première croisade et sur sa mort.

 

 

Retour des croisés dans leur patrie.

Après la déroute des Égyptiens à Ascalon, l'armée franque victorieuse retourna à Jérusalem : le plus grand nombre des croisés voulaient rentrer dans leur patrie : dès le commencement du mois d'août ils avaient fait leurs préparatifs de départ, mais l'approche de l'armée d'Al-Afdhal les avait interrompus. Robert de Flandre, Robert de Normandie et Raimond de Toulouse se mirent en mouvement les premiers ; outre leurs propres troupes, ils emmenaient tous ceux qui ne voulaient pas demeurer en Palestine : ils se dirigèrent tout d'abord sur Laodicée. Raimond cependant n'avait pas l'intention de quitter l'Orient : les autres comptaient s'embarquer dans ce port[1].

Laodicée était, précisément, à cette époque, assiégée par Bohémond et par une flotte, forte de 120 voiles, commandée par Dagobert, archevêque de Pise, qui fut plus tard patriarche de Jérusalem[2]. Tous deux purent bientôt reconnaître à des signes évidents que cette entreprise était vue d'un mauvais œil par les princes qui arrivaient du sud, et ils y renoncèrent. Dagobert s'entremit entre Bohémond et les princes ses rivaux[3] ; l'entente s'établit bientôt, du moins en apparence, et les deux Robert, après avoir passé un traité de navigation[4] avec les habitants de Laodicée, purent enfin s'embarquer : ces faits se passaient certainement au mois de septembre ; les navires qui emportaient les princes vers l'Occident étaient très-probablement des vaisseaux grecs, et ils emmenaient avec eux les pèlerins qui les avaient suivis et dont, assurément, les petites gens et les pauvres formaient la majorité. Robert de Flandre rentra dans sa patrie pendant l'hiver de 1099-1100 et y fut reçu avec toutes sortes d'honneurs : il avait, sans doute, en passant, rendu visite au pape, pour lui remettre la lettre adressée au Souverain-Pontife par les pèlerins restés en Palestine. Robert de Normandie passa par Constantinople, gagna la Pouille, où il épousa une parente de Robert Guiscard, Sybille, fille du comte Guillaume de Conversana, et ne rentra en Normandie qu'au bout d'une année[5].

Retour de Pierre l'Hermite en Occident.

Il est probable que la plupart des pèlerins débarquèrent dans un port d'Italie et qu'ils regagnèrent de là leur patrie en passant par Rome. On ne saurait plus démontrer si l'Hermite a suivi ce chemin, car, nous l'avons déjà dit, aucune source primitive ne contient rien de certain à cet égard. Mais la chose n'a rien d'improbable. Nous l'avons vu déjà parmi ceux qui poussaient énergiquement à l'achèvement de l'entreprise, afin d'accomplir leur vœu et de pouvoir, après cela, retourner dans leur pays ; nous l'avons vu aussi suivre avant le temps l'attrait de son cœur, mais arrêté dans son élan par Tancrède et ramené de force au camp. Il est donc permis de supposer qu'il ne resta pas en arrière lorsque les premiers partants dirent adieu aux Lieux-Saints et prirent d'un cœur léger le chemin de leur patrie.

Nous devons avouer que cette supposition est en désaccord avec les données d'Albéric et de Thevet ; ce dernier historien est bien plus récent que le premier : tous deux fixent le départ de Pierre l'Hermite à une autre date : l'un à l'année 1101, l'autre à une année plus tard. Thevet raconte[6] que les conseils et l'énergie de Pierre l'Hermite entraînèrent les Croisés à la conquête d'Aère, de Tripoli et de Beyrouth, qui furent ainsi arrachées des mains des Sarrazins. D'après lui, le roi Baudouin aurait demandé[7] à Pierre de diriger les travaux de fortification et de reconstruction de la ville d'Acre : l'Hermite aurait accepté cette tâche et y aurait déployé toutes les qualités d'un capitaine sage et expérimenté. D'après cela, il aurait donc encore été en Palestine en 1104, car la prise de la ville d'Acre par Baudouin est du 26 mai de cette année, et, comme les travaux de fortification et de reconstruction ont dû se prolonger pendant un certain temps, il faudrait reculer le départ de Pierre à une autre année : c'est la déduction que d'Oultreman a tirée du récit de Thevet, et il fixe ce départ à l'année 1111[8]. Mais si nous essayons de remonter aux sources, nous ne trouvons rien qui ait pu fournir à Thevet ma-fière à ce qu'il avance : si ce renseignement lui est parvenu par tradition orale, conservée dans le Levant, comme ceux qu'il a, dit-il, reçus sur la mort de Pierre, nous savons le fond qu'on peut faire sur ces renseignements verbaux recueillis des centaines d'années après la mort du héros : ils ont exactement autant de valeur que si Thevet les eût simplement inventés.

On trouve, nous l'avons déjà dit, dans la Chronique[9] d'Albéric à l'année 1101 (sans doute, il faut lire 1100, nous le verrons tout à l'heure) et dans une charte[10] éditée pour la première fois par Polain, et qui expose les choses en des termes à peu près identiques à ceux de la chronique, un renseignement d'où l'on peut déduire la durée du séjour de l'Hermite en Terre-Sainte après la prise de possession du pays par les croisés. Albéric fixe à cette année là le retour de Pierre dans sa patrie, mais sans indiquer la cause de cette prolongation de séjour ni le rôle joué par l'Hermite pendant cette période. La Charte de Polain entre dans plus de détails et nous devrons y revenir.

Voici la relation d'Albéric à l'année 1101 : Le comte Conon de Montaigu[11] et son fils, le comte de Clermont[12] retournèrent dans leur patrie avec leurs compatriotes : ils voyagèrent en compagnie d'autres pèlerins, nobles et vilains, parmi lesquels Pierre l'Hermite, l'instigateur du saint pèlerinage. Pendant la traversée ils se trouvèrent en danger de mort : désespérant de leur vie, ils prièrent en faisant acte de soumission à la volonté de Dieu cet firent unanimement vœu de bâtir une église en l'honneur ide Dieu et de N. S. Jésus-Christ, s'ils échappaient à ce péril. Dès qu'ils eurent prononcé ce vœu, la mer se calma, le ciel redevint bleu comme le plus pur saphir : à leur arrivée dans la Gaule belgique, les pèlerins accomplirent leur vœu et, sur le conseil de Pierre, ils construisirent une église qu'ils dédièrent au S. Sépulcre.

Afin de permettre de mieux apprécier le degré plus ou moins grand de vraisemblance de ce récit, il faut commencer par dire quelques mots d'Albéric lui-même. On reconnaît au premier coup d'œil que ce chroniqueur n'a fait que reproduire mot pour mot les renseignements historiques tels qu'il les trouvait dans les sources où il puisait, en les cousant les uns aux autres au fur et à mesure : en général il prend soin d'indiquer ces sources[13] ; or, précisément, pour le passage que nous venons de rapporter, il n'en indique point. Mais Scheffer-Boichorst, qui a donné ses soins à la dernière et excellente édition de cette chronique dans les Mon. Germ. prouve d'une manière irréfutable que, justement, ce renseignement sur Pierre l'Hermite ne vient pas d'Albéric, le moine de Trois-Fontaines, mais qu'il a été interpolé dans sa chronique par un moine. du couvent de Huy, près de Liège. La chronique d'Albéric s'étend jusqu'à l'année 1252 : l'interpolateur doit l'avoir remaniée au plus tard en 1295 et il y a, en tout cas, introduit les données concernant le monastère de Huy[14]. A-t-il tiré uniquement d'une source verbale le renseignement sur Huy et Pierre l'Hermite ou bien a-t-il sous les yeux un document écrit ? On ne pourrait plus l'établir avec certitude ; mais la dernière hypothèse est assez vraisemblable, car le millésime auquel l'écrivain rattache ces renseignements, aussi bien que les noms des nobles revenus d'Orient qu'il donne et la liste des prieurs du monastère de Huy depuis sa fondation[15], intercalée postérieurement dans la chronique d'Albéric, indique que l'auteur avait sous les yeux des documents écrits. En tout cas, nous n'allons pas jusqu'à nous permettre de supposer qu'il connaissait la charte 'publiée par Polain et que c'est de là qu'il a tiré ce qu'il raconte sur le retour de Pierre l'Hermite et la fonda-Mon du monastère de Huy : nous croyons, tout au contraire, que c'est l'auteur de cette charte qui a connu la chronique de l'interpolateur et y a puisé. En effet, si c'était l'interpolateur qui avait fait des emprunts à la Charte de Polain, il serait difficile de comprendre pourquoi il n'aurait introduit dans la chronique que la première partie de la charte et non pas la seconde, celle où il est parlé de la mort et des funérailles de Pierre l'Hermite : il aurait dû attacher autant d'importance à ces renseignements qu'à ceux qui concernaient le retour d'Orient et la fondation de l'église de Huy.

On retrouve bien, dans différents passages d'Albéric, la première moitié de cette deuxième partie jusqu'aux mots non tenebant, mais il n'y a pas une syllabe de la seconde moitié, celle où est relatée la Translation et qui commence par les mots Sequenti tempore. Nous la trouvons, au contraire, presque mot pour mot dans les Gesta Pontificum  Leodiensium de Gilles d'Orval (Aegidius Aureæ Vallis)[16] ; et l'on sait qu'Albéric s'est servi de ce livre. Le moine Gilles d'Orval a écrit ses Gesta entre les années 1247 et 1251 ; mais il a ajouté postérieurement des notes marginales[17] et c'est dans ces notes que se trouve la deuxième partie de la charte de Polain ; il est évident qu'Albéric ou son interpolateur n'ont pas connu cette note marginale, soit qu'elle ne fût pas encore écrite à l'époque où l'interpolateur achevait son travail, soit qu'elle n'eût pas encore été ajoutée dans l'exemplaire qu'il avait sous les yeux : sans cela il en aurait bien certainement fait son profit. Nous sommes ainsi amenés à conclure que le contenu de la Charte de Polain a été emprunté à la Chronique d'Alberic et aux Gesta de Gilles d'Orval, mais à des manuscrits plus complets que ceux dont se sont servis jusqu'à nos jours les divers éditeurs des œuvres d'Albéric et de Gilles d'Orval[18]. Si donc la Charte de Polain doit avoir été écrite dans la deuxième moitié du XIIe siècle, certainement après l'année 1253 et probablement après le remaniement de la Chronique d'Albéric par son interpolateur, cela n'empêche que le renseignement fourni par Albéric, fixant à l'année 1101 le retour de Pierre l'Hermite et la fondation de l'église de Huy, renseignement que l'auteur de la Charte de Polain a emprunté à la Chronique d'Albéric, remonte très-probablement à une époque beaucoup plus ancienne et porte ainsi les signes caractéristiques d'une source d'une grande valeur.

La conclusion qui semblerait tout indiquée par la lecture et de la Chronique d'Albéric et de la Charte de Polain, c'est que le retour de Pierre en Europe a eu lieu en 1101, et que, par conséquent, il a prolongé son séjour en Terre-Sainte pendant un certain temps après la fin de la croisade ; tel serait le sens de ces expressions de la Charte de Polain : qui cum duce Godefrido de Bullone in subsidium sancte terre fuerunt ; ces expressions, disons le tout de suite, ne se trouvent pas dans Albéric et, chez Gilles, elles ont une autre signification. Mais cette indication n'implique pas que Pierre n'ait commencé qu'en 1101 son voyage de retour ; il n'en ressort qu'une chose, c'est que c'est cette année là que Pierre est rentré dans sa patrie : cela n'empêcherait pas qu'il pût avoir quitté la Syrie dès l'année 1100, peut-être même plus tôt encore ; cela est même très probable, et nous allons essayer de le démontrer. Le récit de Gilles d'Orval semble indiquer que l'époque de son départ ne peut être comprise qu'entre les mois de septembre et de décembre de l'année 1099 : ce sont les mois pendant lesquels les fonctions de patriarche de Jérusalem étaient provisoirement remplies par Arnoulf qui, au moment du départ de l'Hermite, lui remit des reliques avec un privilège, destinés à Otbert, évêque de Liège.

Sachant que d'autres croisés étaient rentrés dans leur patrie beaucoup plus tôt et trouvant dans Albéric l'indication de ce retour tardif de Pierre et du comte Conon de Montaigu, l'auteur de la Charte de Polain ne pouvait s'expliquer ce retard que d'une manière ; c'est que ces deux pèlerins avaient prolongé leur séjour en Palestine pour prêter aide à Godefroi : c'est, du reste, ce qui semble avoir été aussi la pensée d'Albéric, bien qu'il ne le dise pas positivement ; il ne parle du retour de Pierre qu'à l'année 1101, après avoir relaté, à cette même année, le retour du comte de Flandre et la mort de Godefroi. Cependant ce n'est point là un de ces renseignements qui ne laissent plus de place au doute, car, nous l'avons dit, l'époque où ces deux personnages ont quitté la Syrie n'est pas indiquée.

Mais nous avons eu déjà l'occasion de remarquer incidemment[19] qu'Albéric lui-même rapporte, à l'année 1208, que, le 15 août de la dite année, le monastère, qui formait jusqu'alors un prieuré, fut élevé à la dignité d'abbaye, et que la cérémonie eut lieu précisément le jour du 108e anniversaire de la pose de la première pierre. La fondation de l'église de Neufmoustier remonte donc au 15 août 1100, et non 1101 ; par conséquent, l'arrivée des pèlerins au nombre desquels on dit que se trouvait Pierre doit être fixée, non pas à l'année 1101, niais à l'année 1100, à moins qu'Albéric n'ait fait une erreur de calcul et n'ait écrit 108, lorsqu'il aurait fallu écrire evolutis 107 annis ; mais cela n'est pas très-probable, car le nombre 108 correspond très-exactement au catalogue des princes et des abbés. Il est possible qu'Albéric ait trouvé la date 1101 dans la source où il a pris ce renseignement ; dans ce cas, l'erreur, car il y a probablement erreur, devrait être attribuée au document original. On sait que, pour les événements de cette époque, les écrivains contemporains eux-mêmes ne font pas toujours preuve d'une grande exactitude ; Guibert, par exemple, place le concile de Clermont en 1097. S'il en est autrement, c'est qu'Albéric a commis une erreur de calcul.

Si nous admettons l'indication de la date que donne Albéric, malgré la légère erreur qu'elle renferme, et celle des noms des pèlerins revenus de Syrie comme des renseignements originaux, nous arrivons à ce résultat, que Pierre l'Hermite est rentré dans sa patrie en l'an 1100, et non pas en 1101 ; quant au reste, il n'est plus possible de préciser s'il est parti de Syrie avec Robert de Flandre ou seulement à une époque postérieure, ni, dans ce dernier cas, de combien il aurait prolongé son séjour en Terre-Sainte et quelles y auraient été ses fonctions. Tout ce qui a été écrit de précis à cet égard à des époques postérieures est de pure invention : parmi tous ces récits fantaisistes il faut citer, au premier rang celui de Thevet, dont nous avons déjà parlé, et qui a en partie servi de base à celui de d'Oultreman et des admirateurs de ce dernier.

Nous avons cité, d'après Albéric[20], la légende de la tempête qui aurait assailli les pèlerins à leur retour, et pendant laquelle ils n'auraient dû leur salut qu'au vœu fait par eux de construire dans leur patrie une église en l'honneur de Dieu, s'ils échappaient à la mort. Naturellement les romanciers, car on ne peut les nommer autrement, l'ont arrangée à leur façon. D'Oultreman[21] fait de cette tempête une telle peinture, que l'on pourrait croire qu'il y a assisté en personne : Le mal auoit surmonté l'art, et les nautonniers se rendoient, quand le vénérable Pierre l'Hermite, à qui le cœur n'auoit jamais failly à la vete de la mort ; qui croyoit pouvoir aussi facilement entre porté au ciel par eau que par terre ; couroit çà et là par le vaisseau, tantost donnant courage aux matelots par ses paroles, tantost par ses exemples, mettant la main à la pompe, et exhortant les soldats à faire le mesme ; mais surtout il trauailloit à les mettre en bon estat, et les disposer à une mort chrestienne, et courageuse. Il n'oublia pas pourtant de les exciter à inuoquer l'aide de Dieu, et de sa glorieuse mère, et des autres Saints, afin d'estre déliurez de ce péril. Chacun d'eux, selon le prouerbe, qui dit que pour auoir de la deuotion, il faut se mettre en mer, se mit à inuoquer les Saints, auxquels il estoit plus affectionné ou ceux qui semblât auoir eu plus de puissance de Dieu sur ce furieux Element : comme sainct Nicolas, Euesque de Myre, et autres semblables. Le comte de Clermont reclama l'aide et secours particulier du Bien-heureux précurseur de Jesus-Christ, sainct Jean Baptiste, et fit uœu de luy bastir vne Eglise en ses terres en cas qu'il luy pleust le délivrer de ce danger. Grand cas ! Il n'eust pas plutost prononcé ces paroles, que les vents, lesquels, pour parler auec les Poètes, ne sont que bouches sans oreilles, deuindrent oreilles sans bouches : la mer se dessenfia, le ciel se rasserena, bref la bonasse reuint ; et vn vent poupier des passa heureusement au port[22]. Vion reproduit mot pour mot ce récit de d'Oultreman parce que, dit-il, aucun écrivain n'a raconté cet événement avec plus d'agrément.

Il est permis de douter qu'il existe aucune relation entre la fondation de l'église de Neufmoustier et le retour de nos pèlerins. Sans doute, l'église a dû être construite à la suite d'un vœu ; mais la légende s'est emparé d'un fait vrai et lui a donné la forme sous laquelle nous le présente la relation d'Albéric. Peut-être trouverons nous dans Gilles d'Orval les éléments nécessaires pour démêler la part qui revient à Pierre l'Hermite dans cette fondation. Voici ce que rapporte ce chroniqueur : Après avoir reçu du patriarche de Jérusalem, Arnoulf, pour des remettre à Albert, évêque de Liège, des reliques du Sépulcre de N. S. et de St. Jean-Baptiste, avec les privilèges pour les croisés, Pierre revint dans le pays de Liège, où il fonda une église en honneur du S. Sépulcre et de St. Jean-Baptiste ; ce personnage vénérable y forma, avec quelques autres hommes pieux, une communauté à laquelle il donna la règle de S. Augustin. D'après cela, c'est Pierre qui est désigné comme le fondateur de cette église ; Gilles ne dit rien d'un comte Conon ni d'un vœu fait à l'occasion d'une tempête. Albéric n'aurait-il pas puisé d'abord dans d'autres sources où il n'était question que de Conon et de son retour ? puis, voyant que Gilles donne Pierre l'Hermite comme le fondateur de l'église de Neufmoustier, n'aurait-il pas fait un seul tout de retour de l'Hermite et de celui du comte, à qui son autre source attribuait la fondation de l'église ? dès lors ne serait-ce pas uniquement dans Gilles qu'il aurait pris la part qu'il attribue à Pierre dans cette fondation ? Si cette supposition est vraie, la date assignée par Albéric au retour de Pierre n'offrirait plus que bien peu de garanties d'exactitude, puisqu'il serait prouvé que le chroniqueur a tiré de son modèle des conclusions arbitraires. Mais nous n'avons pas le droit de faire une pareille hypothèse. Nous nous en tenons à l'opinion que nous avons déjà émise et que nous croyons bien fondée, à savoir qu'à côté des données fournies par Gilles au sujet de la part prise par Pierre à la fondation de l'église de Neufmoustier, Albéric a eu sous les yeux un document ou renseignement différent, ou d'autre origine, sur la date du retour de Pierre, document dans lequel était contenue la légende de la tempête cette opinion, nous la maintenons au risque de ne pouvoir, précisément à cause de cela, mettre Albéric complètement d'accord avec Gilles, bien qu'il ait eu connaissance du renseignement fourni par celui-ci.

Gilles, on le voit, n'indique pas l'année où Pierre revint de la Palestine. Évidemment il n'en savait rien, sans quoi il ne se fût pas contenté d'employer des termes aussi généraux que his diebus : il eût précisé la date, comme il le fait souvent à propos d'autres faits. Immédiatement avant il avait parlé de la mort et des funérailles de l'empereur Henri IV ; il avait relaté la translation des restes de l'empereur de Liège à Spire. Ces événements se passaient en l'année 1106[23] ; or, comme il fait aussitôt après le récit du retour de Pierre et de la fondation du monastère de Huy et commence par ces mots his diebus, on peut tout d'abord supposer qu'il s'agit là de faits qui se sont également passés en 1106 ; mais la désignation d'Arnoulf comme patriarche de Jérusalem rend la chose inadmissible. On sait, en effet, qu'Arnoulf occupa provisoirement le siège patriarcal du lei août à Noël de l'année 1099 : à la fin de décembre 1099 la dignité de patriarche fut confiée à Dagobert de Pise.

Arnoulf monta une seconde fois sur le trône patriarcal en 1111, et conserva cette dignité jusqu'en 1118, époque de sa mort[24]. C'est donc seulement soit en 1099 soit de 1112 à 1118 qu'il a pu charger Pierre l'Hermite de porter à l'évêque de Liège des reliques et un privilège, et il faudrait également placer le retour de Pierre soit en 1099 soit entre les années 1112 et 1118. Dans le premier cas, Pierre aurait quitté la Syrie dès la fin de la croisade, ce qui détruirait toutes les suppositions faites au sujet de son séjour plus ou moins prolongé en Terre-Sainte après la bataille d'Ascalon ; dans le second cas, nous nous trouverions en contradiction formelle avec la relation d'Albéric, puisque celui-ci fixe le retour de Pierre l'Hermite à l'année 1101.

Mais il existe entre Gilles et Albéric une autre contradiction frappante : d'après Gilles, le patriarche Arnoulf aurait confié à Pierre, au moment de son départ de Palestine, les reliques et le privilège destinés à l'évêque Otbert, et Pierre n'aurait fondé l'église de Huy qu'après avoir rempli, son message : d'après Albéric, au contraire, le privilège n'aurait été envoyé à Otbert que lorsque Pierre était déjà installé à Huy et avait présidé à la fondation de l'église. Il n'est point douteux que les choses peuvent s'être passées comme le dit Albéric, mais alors ces faits se rattacheraient au deuxième patriarcat d'Arnoulf, par conséquent à la période comprise entre les années 1112 et 1118. Ce qui est certain, c'est que, si le récit d'Albéric s'écarte sur ce point de celui de Gilles, c'est que les renseignements qu'il a recueillis d'autre part l'ont contraint à faire ce changement.

Pierre moine et prieur au monastère de Neufmoustier près Huy.

Avec la relation - d'Albéric d'abord et, en seconde ligne, celle de Gilles comme point d'appui, nous pouvons admettre comme historiquement vraisemblable : que Pierre revint d'Orient en 1099 ou 1100, en compagnie de pèlerins originaires du pays de Liège ; que, sur les instances de ses compagnons, il fit choix, aux environs de Huy, d'un emplacement sur lequel on jeta les fondements d'une église placée sous le vocable du St-Sépulcre, à côté de laquelle il construisit un monastère ; qu'il s'enferma dans ce monastère avec quelques autres religieux, peut-être des pèlerins revenus d'Orient comme lui, résolus à y vivre sous la règle de saint Augustin et à y terminer ses jours dans le calme et la retraite.

On sait que les Chanoines du St-Sépulcre de Jérusalem suivaient la règle de saint Augustin. Un privilège de l'année 1114 donné par le patriarche Arnoulf et qui a été conservé, nous montre ce prélat leur prescrivant de suivre en conscience la stricte observance de leurs règles[25]. Peut-être Arnoulf envoya-t-il, à la même époque, c'est-à-dire, vers 1114, un privilège analogue aux religieux de Neufmoustier, et accrut-il expressément la rigueur de leur règle : cela est d'autant plus probable, que Gilles reproduit dans une note marginale une partie du privilège de l'église de Neufmoustier et que ce morceau a été évidemment écrit de la même main que le privilège de l'église de Jérusalem. L'église du St-Sépulcre à Jérusalem était l'église-mère de celle de Neufmoustier ; les chanoines des deux églises étaient liés à la même règle et, par le fait de cette dépendance, il devait exister entre elles des relations actives.

D'après Albéric, Pierre l'Hermite ne fut pas seulement l'un des fondateurs de cette église et de cette communauté ; il en fut aussi le premier prieur[26]. Cette indication est le seul point lumineux qui perce l'obscurité dont sont entourées les dernières années de Pierre. Tout ce que Vion raconte sur ce qu'il peut avoir fait ou n'avoir pas fait pendant la période comprise entre son retour de Syrie et sa mort, sur ses motifs pour agir de telle ou telle façon[27], tout cela n'est que pure fantaisie. Nous l'avons dit et le répétons, personne ne sait rien de plus sur son compte[28].

Mort de Pierre, à Huy.

Pierre l'Hermite mourut, dit-on, fort avancé en âge, à Huy, le 8 juillet 1115[29]. C'est très-probablement dans un nécrologe de monastère que Gilles a trouvé l'indication du jour et du mois ; la date de l'année se trouve dans la Contin. Valcellensis de Sigebert[30], à l'année 1115 ; elle ressort également de la lecture du Catalogue des Prieurs donné par Albéric à l'année 1208[31] : on y voit que le premier successeur de Pierre se nommait Jean, qu'il gouverna le monastère pendant 30 ans et mourut en 1146 ; on peut également déduire cette date de la Charte de Polain, car on y trouve ce passage : quinto decimo prioratus sui anno diem clausit extremum octavo idus julii[32]. On lui fit des funérailles solennelles auxquelles assistèrent tout le clergé et le peuple de Huy[33], et il fut enterré à côté de l'église qu'il avait fondée, du côté de l'Orient[34].

Si, au lieu de s'en rapporter à des chroniqueurs dont les relations ont été écrites 145 ans après la première croisade, on s'en rapportait au récit de Thevet, que nous avons déjà cité, récit que l'on pourrait rapprocher de celui d'Ekkehard d'Aura, ou si l'on prétendait attacher une importance toute particulière au silence gardé par les écrivains contemporains de l'Hermite sur le lieu de sa résidence après la croisade, il faudrait admettre que la fin de Pierre l'Hermite a été toute différente de ce que nous avons vu jusqu'ici. Thevet vivait vers la fin du XVIe siècle ; à l'en croire, les Arméniens lui auraient affirmé que Pierre avait été empoisonné par un médecin grec, nommé Zénon, natif de Trianda, près Gallipoli[35]. Plusieurs Grecs lui auraient également dit que leurs historiens le faisaient mourir à Constantinople d'une fièvre contractée à l'époque où il avait été envoyé en mission dans cette ville demander du secours à l'empereur[36]. Thevet ne donne pas le nom de ces historiens et l'on avouera qu'il n'y a pas à tenir compte de renseignements qui apparaissent pour la première fois cinq cents ans environ après la première croisade. Nous avons déjà dit, au commencement de ce chapitre, notre manière de voir à cet égard.

Si nous passons à Ekkehard, nous avons déjà cité, à l'occasion, cette note qu'il insérait, au sujet de Pierre, dans son édition de 1101 : quem multi postea hypocritam esse dicebant : dans son édition de 1106, il a changé le mot esse en fuisse : peut-être a-t-il fait ce changement, parce que dans l'intervalle il aurait entendu dire que Pierre avait cessé de vivre ; mais ces expressions sont trop vagues pour qu'il soit possible d'en conclure que la mort de Pierre remonte à une époque beaucoup plus reculée que celle que nous avons admise.

Enfin le silence gardé, au sujet du lieu où Pierre résida, par les historiens proprement dits de la croisade, Guibert, Baudri, Robert et Albert, ne peut pas être invoqué comme un témoignage propre à infirmer les indications d'Albéric de Trois-Fontaines. Il est, du reste, possible qu'à l'époque où il écrivait le passage de sa chronique relatif à la tentative de fuite de Pierre, Guibert sût qu'il était encore en vie et que ce soit le motif pour lequel il lui adressait la vive apostrophe que l'on sait.

Paulin Paris dit, il est vrai, qu'il est fort douteux que Pierre soit revenu de la croisade[37] ; nous serions d'accord avec lui, si le retour de Pierre n'était affirmé par un double témoignage : celui d'Albéric, qui a eu à sa disposition des sources plus anciennes, c'est un fait que nous sommes obligés d'admettre, et celui de Gilles d'Orval, qui indique la date précise de sa mort. Nous avouerons, si l'on veut, que nous ne possédons pas à l'égard de ce point historique une certitude exempte de doute, mais il nous semble qu'il y a de très-grandes probabilités pour que nous soyons dans la vérité. Peut-être découvrira-t-on un jour quelque document authentique, qui confirme d'une manière éclatante les renseignements d'Albéric et de Gilles : peut-être trouvera-t-on dans quelque nécrologe le nom de Pierre l'Hermite ; peut-être pourra-t-on fournir à l'appui d'autres preuves indirectes : mais jusqu'à ce jour on ne connaît rien de plus authentique sur les années qu'il a vécues après la première croisade[38].

Du tombeau de Pierre l'Hermite.

Nous terminerons cette étude par les renseignements que nous fournissent Gilles d'Orval et la Charte de Polain sur la translation de la dépouille mortelle de Pierre l'Hermite dans l'église de Neufmoustier : Gilles y assistait en personne. En 1240, il se répandit, dans le clergé de l'époque, un livre écrit par Jacques de Vitry, évêque d'Acre, qui attira de nouveau l'attention sur la personne de l'Hermite : on décida alors, en réunion du Chapitre, d'exhumer les restes de Pierre et de les transférer dans l'intérieur de l'église ; cette cérémonie eut lieu le 12 octobre 1242[39]. A partir de cette époque, un sarcophage de pierre élevé devant l'autel de cette église indiqua la place où reposait sa dépouille mortelle ; sur une plaque de marbre on lisait cette inscription :

Inclita per merita clarus jacet hic eremita

Petrus, qui vita vere fuit Israëlita :

Hoc modo, Petre, petra premeris, quamvis super œthra

Vivere cum petra Christo credaris in œthra[40].

Suivant Villenfagne[41], en 1633 le nonce du pape, Caraffa, donna ordre d'enfermer ces ossements dans une cassette pour les y conserver, mais à l'époque de la révolution, en 1793, l'église et le monastère furent dévastés et incendiés, et les reliques de Pierre l'Hermite furent détruites dans ce désastre[42]. La pierre sépulcrale aurait seule été retrouvée plus tard et existerait encore[43].

La ville d'Amiens a élevé une statue à Pierre l'Hermite. Ce monument, dû au ciseau du sculpteur Gédéon Forceville fait l'ornement de la place Saint-Michel ; il a été inauguré le 29 juin 1854[44].

 

FIN DE L'OUVRAGE

 

 

 



[1] Nous trouvons des renseignements authentiques à Cet égard dans la lettre que les croisés restés en Palestine écrivirent de Laodicée au Pape et que Robert de Flandre porta en Europe. Elle e été souvent réimprimée et Ekkehard en e copié littéralement la plus grande partie dans sa Chronique : cf. Forschungen zur deutschen Geschichte, XIII, 400 se. et notre édition de l'Hierosol. d'Ekkehard p. 146 ss., et encore Riant, Inventaire, n° CXLIV (p. 201). D'après cette lettre, le comte Raimond de Toulouse faisait une tournée et avait l'intention de repartir sous peu de Laodicée pour retourner à Jérusalem, mais il n'exécuta pas ce projet. Il se rendit au printemps de l'an 1100 à Constantinople, d'où il revint en Syrie en 1101, au printemps, avec les Lombards. Voy. Ekkehard, Hieros., p. 186.

[2] Au sujet de l'arrivée de la flotte des Pisans sur la côte de Syrie au mois de septembre 1099, voy. Heyd, Italienische Handelscolonien zur Zeit der Kreuzzüge, dans la Zeitschrift für gesammte Staatswissenschaft, Tubingen 1860, vol. 16, p. 7, et le dernier ouvrage du même auteur, intitulé : Geschichte des Levantehandels (Stuttg. 1879) I, 149.

[3] Voy. la Lettre des Croisés (Hieros., p. 186). Sur Dagobert, voy. Ekkehard, Hierosol, p. 185.

[4] Cela semble ressortir nécessairement des expressions d'Orderic Vital X, 779 (Le Prévost IV, 74). Il est très vraisemblable que ce furent surtout des vaisseaux grecs qui servirent au rapatriement des croisés. On ne saurait plus établir si tous on un petit nombre seulement passèrent, au retour, par Constantinople.

[5] Sur les deux Robert, voy. Ekkehard, Hieros. p. 187, et Kugler, Gesch. der Kreuzz. p. 72, s.

[6] Dans son livre très rare et très précieux, intitulé : Portraits et vies des hommes illustres grecs, latins et payens, recueillis de leurs tableaux, livres, médailles antiques et modernes, par André Thevet, angoumoysin, premier cosmographe du Roy, Paris 1584, 2 vol, in-fol. tom. II, f. 241, il écrit entre autres choses : Et comme j'ay dit, le premier moteur et harangueur fut nostre Pierre l'Hermite, lequel, ayant esté auparavant en la Palestine, estant de retour en France, provoqua ceste trouppe chrestienne qui estait d'une miliaase d'hommes pour aller conquerir la terre sainte et la ville de Jérusalem. Par l'advis de ce bon père, plusieurs villes furent prinses, et réduites au Christianisme, entre autres celles d'Acre, Baruth et Tripoly, quelque résistance que pussent faire les infidèles, non sans grande effusion de sang tant d'une part que d'autre. Après. Acre, jadis nommé Ptolémaïde, fut par le moyen de l'Hermite bien fortifiée, la ruine de laquelle on voit aujourd'hui entre deux portes, lesquelles sont de present, comme j'ay veu, ruinées tant par la barbarie que l'injure du temps. Selon P. Lelong, Thevet était un indigne menteur et un écrivain fort ignorant. Voy. Hody, Descript. des Tombeaux de Godefroi de Bouillon, Brux. 1855, p. 157.

[7] Ceci, à vrai dire, c'est d'Oultreman qui l'ajoute au récit de Thevet.

[8] Pag. 101 : Or, si tout cela est, comme raconte Thevet, il faut dire que Pierre ne partit point de la terre sainte avant le milieu de l'an mil cent onze : auquel, selon Guillaume de Tyr, la ville d'Acre fut prise sur les Turcs, le 23 d'avril. Cette dernière date est inexacte et ne se trouve pas dans Guillaume de Tyr.

[9] Mon. Germ. SS., t. XXIII, 815. Voy. aussi, éd. allem., suppl. VII.

[10] Bulletin de l'Académie royale des Sciences de Belgique, t. XXI, IIe part. 1854, p. 379-391, et éd. allem., suppl.

[11] Province de Brabant, arr. de Louvain.

[12] Province de Liège, arrond. de Liège. Ce comte de Clermont avait nom Lambert et vécut jusqu'à l'année 1147 ; Conon, son père mourut le 30 avril 1105 au château de Dolhain, près Liège. Sur ces deux personnages, voy. Reiffenberg, Monuments V, CXLII et CLIV.

[13] Voici comment s'exprime à cet égard M. le Dr Wilmans dans son étude intitulée : Abhandlung über die Chronik Alberichs (Archiv. de Pertz X, 194) : En général, il cherche à compléter une relation par l'autre en arrangeant les choses de manière que le récit suive son cours suivant l'ordre chronologique ; il classe aussi les faits dans chaque année suivant le même ordre, de sorte que parfois il se trouve que les mêmes écrivains sont cités trois fois et plus au cours d'une même année. Albéric pousse les choses si loin en ce sens, que souvent il interrompt une citation au milieu d'une phrase, intercale une portion de texte prise dans un autre auteur, puis reprend le premier là où il l'avait laissé.

[14] Voy. Scheffer-Boichorst, préface de l'édition de la Chronicon monachi Triumfontium a monacho novi Monasterii Hoiensis interpolata, Mon. Germ. SS. XXIII, 648 : Quo tempore interpolator sua adiecerit ; accuratius definiri non licet. Certo ante annum 1295 scripsit. Voy. aussi Dr Winckelmann dans la Zeitschrift de Sybel, 34, 188.

[15] L'interpolateur relate, à l'année 1208 (Mon. Germ. SS., XXIII, 889), comment le prieuré de Huy fut transformé en abbaye et comment le prieur alors en fonctions, Alexandre, fut sacré abbé le 15 août 1208, en la fête de l'Assomption, par Hugues, évêque de Liège ; il fait suivre ce récit d'une liste exacte des prieurs qui ont gouverné le monastère depuis Pierre l'Hermite. Voy. suppl. VIII de l'éd. allemande, l'extrait du chap. d'Albéric relatif à l'année 1208.

[16] Chapeauville, Qui Gesta Pontificum Leodiensium, scripserunt auctores prœcipui, tom. II, 47, ss. Voy. aussi, suppl. VII de l'éd. allemande, la relation de Gilles ad ann. 1101, à côté de celle d'Albéric et de la Charte de Polain.

[17] Sur ce point, voy. l'étude de Wilmans sur Albéric dans les Archives de Pertz X, 218 es. ; et Scheffer-Boichorst dans les Mon. Germ. SS., XXIII, 646, ss. Chapeauville a déjà exactement établi par l'étude de l'écriture que les notes marginales sont de la même main qui a rédigé les Gesta : d'autres l'ont argué d'erreur et ont prétendu qu'un chanoine de Huy, nommé Maurice, aurait dédié son œuvre à Gilles, mais quelques auteurs récents, tels que Wilmans et Hirsch, ont, à bon droit, pris sa défense. Voy. Wilmans, op. cit. p. 220.

[18] Signalons d'abord, parmi les éditions de la chronique d'Albéric, la lacune qui se trouve dans l'édition de Leibnitz comme dans celle des Monum. Germ. à l'année 1116 ; Scheffer-Boichorst l'avait cependant signalée le premier ; il est facile de la combler au moyen de la Charte de Polain. Ce passage est présenté comme il suit, dans Leibnitz, p. 281, et dans les Mon. Germ., p. 821, lign. 37 : Post Arnulfum patriarcham Jerosolimitanum, qui privilegium cruce signatorum ad opus ecclesie Novi Monasterii Hoyensis, procurante venerabili sacerdote Petro heremita, qui in eadem ecclesia transmisit. Otberto tunc temporis Leodiensi episcopo, fuit Patriarche Guermundus, cui successit Stephanus, deinde Guillelmus. A propos du mot ecclesia, qui précède le mot transmisit, Scheffer-Boichorst fait cette remarque : Aligna omisse esse videntur ; forte supplendum est ; edificanda laborabat. Cette correction peut être exacte quant au sens du passage en question, mais, à moins qu'un lapsus calami n'ait déjà induit Albéric en erreur, il avait pu lire dans son modèle : in qua ecclesia dictus Petrus primus fuit prior et tutor ; ces mots se trouvent également dans la Charte de Polain. Voy. Suppl. VII de l'éd. allem. On trouve également Huyum au lieu de hominum, et cette lecture nous parait préférable. Enfin, il existe dans l'édition de Gilles, publiée par Chapeauville, p. 48, une lacune que l'on peut combler au moyen de la Charte de Polain ; il faut, après les mots in locello lapideo, ajouter habente intus scrinium bene compositum.

[19] Voy. Suppl. VIII de l'éd. allem.

[20] Ad ann. 1101.

[21] PP. 102 ss.

[22] Dans Pavie, L'Anjou dans la lutte de la chrétienté contre l'islamisme, on trouve, à la p. 8, une relation analogue, au sujet du voyage de Foulques d'Anjou, après son premier pèlerinage, vers 1015, et de la fondation du monastère de Saint-Nicolas d'Angers ; la voici : Le navire qui portait notre comte en Pales-fine fut, durant la traversée, assailli par une furieuse tempête, le long des côtes de l'Asie-Mineure. Dans sa détresse, l'équipage invoqua saint Nicolas, archevêque de Myre en Lycie et patron des marins, qu'il avait cent fois, sur ce littoral, sauvés miraculeusement du naufrage. Foulques se joignit à ces supplications et promit au saint, s'il échappait au péril, de lui bâtir un monastère à son retour en Anjou. Peu d'instants après, les vents tombèrent, et le navire poursuivit paisiblement sa route. M. Pavie a tiré ce récit d'un manuscrit du XIe siècle, qui se trouve à la bibliothèque d'Angers, sous le n° 113, fol. 162°°. Sur les vœux faits par des pèlerins pendant une tempête, pour échapper à la fureur des éléments, voy. Röhricht et Meissner, Deutsche Pilgerfuhrten nach dem h. Lande (Berlin 1880), p. 19.

[23] L'empereur Henri IV mourut à Liège, le mardi 7 août 1106 ; son corps arriva à Spire le 3 sept. de la même année ; le cercueil fut placé dans le caveau des empereurs, le 7 août 1111. Voy. Giesebrecht, Gesch. der deutschen Kaiserzeit, III, 736 et 1146 ; Floto, Kaiser Heinrich IV, II, 420 ; Gœrz, Mittelrheinische Regesten, Ire partie (Coblenz 1876), p. 468, n° 1640.

[24] Voy. Ekkehard, Hieros., XXIX, 2, p. 264.

[25] Ce privilège se trouve dans le Cartulaire du Saint Sépulcre, M. de Rozière, n° 25, p. 45.

[26] Voy. Suppl. VIII de l'éd. allemande.

[27] Vion s'amuse à discuter, p. 406 ss., pourquoi Pierre, à son retour de Jérusalem, n'est pas allé résider à Amiens, et il arrive à conclure que ce qui l'en a empêché, c'est que de 1100 à 1112 la guerre exerça ses ravages dans ce pays. Mais il ajoute que Pierre rentra en France en abordant soit à Saint-Valery-en-Ponthieu, soit à Boulogne, où la comtesse Ida devait accueillir avec empressement le gouverneur de ses fils, celui qui avait fermé les yeux à son cher Godefroi, et qui lui apportait de fraîches et positives nouvelles de l'avènement de Baudouin Ier. Il s'étend ensuite en longs raisonnements pour affirmer que Pierre est resté étranger aux guerres et aux luttes qui faisaient rage autour de lui, preuve que, dès lors, il avait dit adieu pour toujours au métier des armes Pierre aussi devait entendre ces voix, non plus du ciel, mais du foyer, qui rappellent l'homme cruellement éprouvé au toit de ses premières tendresses, aux humbles occupations de son enfance et à l'obscurité de ses premiers jours, etc. Encore une autre histoire qui rentre dans la même catégorie que les passages cités ci-dessus ; Polydore Virgile, d'Oultreman et autres veulent à toute force que Pierre soit l'inventeur du Chapelet. Voy. Polydori Vergilii De rerum inventoribus, lib. V, c. 9 ; d'Oultreman p. 122 ; Vion p. 422 ; Paulet p. 122.

[28] Suivant Palgrave, The History of Normandy and of England, vol. IV, Londres 1864, p. 436, Pierre, après son retour de Palestine, serait entré en conflit avec saint Bernard. J'ignore d'où Palgrave a tiré ce renseignement. On trouve dans cet écrivain des choses bien singulières sur le compte de Pierre. Ainsi, pour ce qui concerne la situation de Pierre avant la première croisade, il est complètement d'accord avec d'Oultreman, puis il le présente comme un compagnon de Bohémond, puis comme un homme-lige de Robert Guiscard, puis comme le caractère le plus saillant de son époque. Toujours d'après le même écrivain, Pierre aurait ourdi avec le pape Urbain et Bohémond mie conspiration contre l'empereur Alexis et tenté de renverser l'empire grec. Il aurait, par ses intrigues, été cause de la perte de millions d'hommes, etc. — Autant d'affirmations qui auraient besoin d'être prouvées, mais les preuves, Palgrave ne les fournit pas et ne peut pas les fournir.

[29] D'Oultreman dit, p. 106, qu'il était âgé de 62 ans ; au commencement de son livre, il l'avait fait naître en 1053. Mais il a emprunté cette date à Thevet ; celui-ci écrit dans ses Pourtraits, II, p. 241 : Âgé de 62 ans mourut en Constantinople, ainsi que les Grecs m'ont asseuré l'avoir par escrit dans leurs histoires, non sans souspeçon de poison. Gilles d'Orval dit seulement : Consummato autem vite suce currioulo, in bona senectute diem clama extremum 8 Idus Julii. Cette date du 8 juillet est également fixée par Fisen dans les Flores ecclesiæ Leodiensis, sive vine vel elogia sanctorum et aliorum qui illustriori virtute banc diocesin exornaverunt, 1647, in-fol., au 8 juillet. Dans l'Appendix ad Molanum de Natale Belgii, on trouve une autre date : Die 15 Julii ; c'est une erreur ; erronée également l'indication de Le Prévost, qui place la mort de Pierre au 6 juin.

[30] Mon. Germ. SS., VI.

[31] Voy. Suppl. VIII de l'éd. allemande.

[32] Voy. Suppl. VII de l'éd. allemande.

[33] Charte de Polain, Suppl. VII de l'éd. allem. : Versus Austrum.

[34] Gilles, Suppl. VII de l'éd. allemande.

[35] Voici le passage de Thevet, dans sa Cosmographie universelle, p. 571 : Les Arméniens m'ont pareillement asseuré avoir par escrit dans leurs chroniques, que pour certes ce Tristan (L'Hermite), qui estait un homme accort, brusc, de grande corpulence et d'un maintien farousche, portant sa barbe longue jusqu'au nombril, fort espesse et un peu lousche, fut empoisonné par un médecin grec nommé Zénon, natif du village de Triandæ, pres Gallipoli. D'après Touchard-Lafosse, Histoire des environs de Paris, III, il serait mort à Tours.

[36] Thevet, Cosmog. univ., loc. cit. Toutefois plusieurs Grecs m'ont asseuré avoir escrit dans leurs histoires, qu'il mourut d'une fièvre continue au Patriarchat de Constantinople, demandant secours à l'Empereur grec contre les Infidèles qui tourmentaient les Chrestiens en Asie ; estant envoyé comme Ambassadeur de la part des Princes Catholiques, qui avaient peu auparavant prins les villes d'Acre et d'Antioche.

[37] La Chanson d'Antioche, II, 353 : Il est fort douteux que Pierre soit revenu de la croisade et qu'il se soit entendu, aussitôt son retour, avec Lambert le Pauvre, seigneur de Clermont en Beauvaisis, pour fonder l'abbaye de Neufmoustier, dans le diocèse de Liège et près de Huy.

[38] Dans une lettre adressée à Paulin Paris, M. Paulet a osé écrire (voy. Recherches, p. 164) que la lecture de tous les annalistes belges des XIIe et XIIIe siècles fait évanouir tous les doutes sur le retour de Pierre l'Hermite, et qu'en dehors de Guy de Basoches, de Gilles d'Orval et d'Albéric, le fait est encore confirmé par un grand nombre de documents et de chroniques du XIIe siècle. Cela n'est-il pas bien plaisant et ne dénote-t-il pas des études bien superficielles ? Nous serions fort curieux de les connaître, ces fameux documents. Déjà, nous avons signalé dans Paulet une affirmation semblable au sujet de la vision attribuée à Pierre l'Hermite. Il est regrettable que les Chartes du Cartulaire de Molesme, mises en lumière par M. L. Vieillard et dont nous avons déjà parlé, ne permettent pas de tirer une conclusion positive au sujet de la résidence de Pierre après la première croisade ; et cela est d'autant moins possible que la date de 1100, admise par M. Vieillard, et l'identité de nom du signataire et de notre Hermite ne sont que des suppositions.

[39] Le récit de Gilles d'Orval est trop simple pour d'Oultreman : cela ne lui suffit pas. Lui, comme toujours, il sait exactement comment les choses se sont passées et l'admirable spectacle qu'ont eu ceux qui assistaient à cette cérémonie. On procéda, selon lui, à l'ouverture du cercueil en présence de quelques témoins, et l'on craignait, après 127 ans, de ne plus trouver entiers les ossements de Pierre : Mais, chose estrange ! on trouva non seulement les os, mais tout le corps entier, sans aucune corruption, ny pourriture ; même la barbe, qu'il auoit tousjours portée longue à la façon des pèlerins, fut trouuée toute telle qu'elle estait le jour qu'il mourut. Je vous laisse à penser de quelle consolation furent saisies les âmes des Religieux qui furent presens à ce spectacle ; de voir combien Notre Seigneur honore la vertu de ses serviteurs. De même Vion, p. 417 ; Poulet, Recherches, p. 147, ajoute : Il est remarquable de voir combien les corps enterrés dans ce siècle privilégié se conservèrent longtemps en terre. Nous trouvons à chaque pas des corps entiers, cent ans après leur inhumation. Rien n'y manque et l'on peut même reconnaître au visage la profession du mort. Voy. aussi Paulet, p. 127.

[40] Ces vers ont été transmis par Gilles d'Orval. Voy. Suppl. VII de l'éd. allem. Ils sont reproduits par d'Oultreman p. 110, Vion p. 418, et Paulet p. 125. On les trouve encore dans un manuscrit de l'année 1761, publié par M. Morin (de l'Académie des sciences), conservé à la bibliothèque du Palais des Arts, à Lyon, fonds de l'Acad. n° 142, et cité dans le Catalogue de Delandine t. III, p. 480, n° 1490, avec le titre : Anecdotes peu connues sur la mort et sur le lieu de la sépulture de Pierre l'Hermite. Citons encore une lettre sur Pierre l'Hermite à Philippeville, écrite par Morand le fils, docteur en médecine de la faculté de Paris, etc., le 17 juin 1761 et adressée à M. Fréron : elle a été reproduite par Delandine dans son Catalogue des Manuscr. de Lyon, Lyon 1812, vol. in-8°, t. III, p. 480-481 ; elle avait été publiée, revue et corrigée, dans l'Année littéraire 1761, t. IV, p. 117. Michaud admet que Morand avait lu cette épitaphe sur la pierre tombale de Pierre l'Hermite à Huy. (Voy. Michaud, Hist. des Croisades). Mais cela ne ressort pas de la lecture de cette lettre, pas plus qu'elle ne démontre qu'il l'ait seulement vue en 1761. Morand ne connaissait pas les relations d'Albéric et de Gilles, mais il avait vu et lu à Huy la Charte de Polain, et il en donne, dans sa lettre, un extrait traduit en français. Il fait un portrait de Pierre que nous nous permettrons de citer ici : L'enthousiasme d'un seul homme fut une révolution générale dans cette partie du monde. Pierre avait tout l'honneur de l'entreprise ; prédicateur, négociateur, guerrier, il marchait à la tête des croisés, le froc et le casque en tête, un bourdon à la main, une épée et un chapelet à son côté. Il se bat contre les Infidèles avec un courage héroïque ; il fait des prodiges à la prise de Jérusalem en 1099 ; en un mot, c'est un des plus grands acteurs de l'histoire des croisades.

[41] Recherches sur l'histoire de la ci-devant principauté de Liège, 1817, pp. 551-553.

[42] D'après Gorrissen, Histoire de la ville de Huy, p. 77, et Paulet, p. 125, la dépouille mortelle de Pierre l'Hermite aurait été transi portée à Namur et conservée dans la cathédrale de cette ville.

[43] Voy. aussi Paulet, pp. 125 et 127. L'auteur de l'article sur Pierre l'Hermite dans la Nouvelle Biographie générale commet donc une erreur lorsqu'il écrit, t. 40, p. 186 : Son corps s'y voit encore. Villenfagne, op. cit. : Le possesseur actuel de l'abbaye de Neuf-Moustier a trouvé, en démolissant l'église, la pierre antique sous laquelle le saint fondateur de cette maison avait été enterré il la conserve et avec raison, comme un monument précieux. L'antique abbaye appartient actuellement à un riche fabricant de papiers, M. Godin ; un beau château, entouré d'un splendide parc, s'élève sur son emplacement. On nous permettra d'ajouter encore ici quelques renseignements sur l'état actuel du monument funéraire de Pierre l'Hermite à Huy. Ils sont extraits d'une lettre adressée le 2 mai 1879 à M. le comte Riant, et que celui-ci a eu l'amabilité de nous communiquer : J'ai vu par hasard au Musée de l'Institut archéologique liégeois le nécrologe de Neufmoustier, qui était le grand cheval de bataille de M. Grandgagnage. Il est toujours bon de savoir ce qu'il est devenu. Il est au moins du XIIIe siècle et on a continué à y inscrire les noms des bienfaiteurs jusqu'à la Révolution. J'ai été à Huy voir le monument de Pierre l'Hermite. C'est le personnage que les Hutois connaissent le moins ; je l'avais en vain demandé à quatre libraires ou imagiers, lorsque j'ai eu la chance de rencontrer un député de Bruxelles qui venait de Neufmoustier et m'a envoyé voir le monument, qui a été érigé par M. Godin, oncle du propriétaire actuel. — Il se compose : 1° d'une statue en grès, due au sculpteur Hulleux (1857), posée sur un piédestal qui est au-dessus d'une crypte ; on voit de semblables chefs-d'œuvre dans les cimetières de chef-lieu de canton. — Au centre de la susdite crypte, cruciforme et humide, se trouve un petit monument funéraire représentant Pierre l'Hermite couché, au-dessus de bas-reliefs, exécutés dans le goût des projets de Villeneuve-Bargemont. Le tout doit dater du commencement de ce siècle ou environ, et c'est, du reste, en bien mauvais état. On parle d'une prochaine restauration.

[44] La gravure placée en tête du livre de Vion représente cette statue : on y voit Pierre l'Hermite en froc, avec la ceinture de corde, à laquelle est suspendu le chapelet : de la main droite il élève une croix ; la gauche est appuyée à la poitrine ; la barbe est courte, l'attitude celle d'un homme jeune ; il prêche la croisade. — On nous permettra d'ajouter à la liste des portraits de Pierre l'Hermite que nous y avons donnée, l'indication de quelques autres portraits que M. le comte Riant nous a fait connaître. Ce sont : Une miniature, où l'Hermite est représenté au moment où il remet au Pape la lettre du patriarche Siméon ; elle se trouve dans le précieux Manuscrit de Bruxelles n° 9045 (où est contenue l'Estoires d'Eracles) ; une Vignette, rappresentante Pietro Eremita inspirato da Dio, dans le Codex Marcianus XXII, 124 (Valentinelli VI, 8) ; la société de l'Orient latin a fait photographier cette partie du Codex, et elle est publiée dans le De Passagiis in Terram Sanctam, éd. C. N. Thomas, Ven. 1879 ; elle se trouve également dans Kugler, Gesch. der Kreuzz., p. 19. La Bibliothèque nationale de Paris possède plusieurs portraits gravés dont voici la liste : 1° Portrait ovale, figure à mi-corps, de trois quarts à gauche ; légende : 1680. Pierre l'Hermite, Pr du nom, autheur de la première croisade, et Pr vice-roy de Jérusalem. B. Moncornet excu. cum privilegio regis ; — 2° Copie moderne dans le même sens dans un cadre carré ; en haut : Histoire de France ; en bas : Pierre l'Hermite. N. pinxit. — Landon direxit ; — 3° Médaillon enfermé dans un cadre carré. Figure à mi-corps, de trois quarts à gauche ; en bordure : Pierre l'Hermite ; au bas : Pierre l'Hermite, autheur de la première croisade et premier vice-roy de Hiérusalem, nacquit à Amyens l'an 1053, etc. (17 lignes de légende). A Paris chez Vallet graveur du roy, Rue S. Jacques, au Buste de Louis XI V. C. P. R. — 4° Copie du précédent, en sens opposé, sans adresse.— 5° Portrait carré. Figure à mi-corps, de trois quarts à gauche, costume de philosophe grec, tiré des Vies des hommes illustres par Thevet (Paris 1584, in-fol. p. 241) ; en tête : Pierre l'Hermite, chapitre 15. — 6° Copie agrandie du précédent dans le même sens ; légende : Petrus l'Hermite, Eersten aenleyder van den aentocht op t'h. landt. fol. 86. — 7° Copie du n° 5, dans le sens opposé et avec l'adjonction, dans les angles supérieurs, de deux médaillons, dans lesquels sont gravées à droite les armes des rois de Jérusalem, à gauche les armes de Pierre l'Hermite ; au bas : Vera effigies venerabilis Petri Eremitæ qui auctor primœ cruciatœ anno Domini MLXXXX V. Nobili ac generoso viro D. Jacobo l'Hermite in supremo consilio statua Belgicæ ac Burgundiæ circa personam regis catholici Philippi IIII in Hispania Thesaurario etc. hoc sanguinis sui ac familia illustre ornamentum, ac se œri incisum S. a Bolswert observantiœ ergo. LMDC. — 8° Le même dans le sens opposé et moitié moins grand. Au bas dans un cartouche : Pierre l'Hermite.