HISTOIRE DE LA GRÈCE

PREMIER VOLUME

CHAPITRE II — LÉGENDES CONCERNANT LES HÉROS ET LES HOMMES

 

 

La Théogonie hésiodique ne raconte rien qui ressemble à une création de l’homme, et il ne semble pas non plus que l’imagination grecque, clans sa veine légendaire, s’occupât beaucoup d’une telle idée, vu qu’ordinairement elle faisait remonter les hommes actuels par une série de générations à quelque premier père, issu lui-même du sol, ou d’un fleuve voisin, ou d’une montagne, ou d’un dieu, d’une nymphe, etc. Mais l’auteur du poème hésiodique les Travaux et les Jours nous a donné, concernant l’origine de la race humaine, un récit conçu clans un esprit tout différent, plus en harmonie avec le ton moral, grave et mélancolique qui règne dans ce poème[1].

D’abord (nous dit-il) les dieux olympiques firent la race d’or, — hommes bons, parfaits et heureux, vivant des productions abondantes et spontanées de la terré, jouissant du repos et de la tranquillité comme les dieux eux-mêmes. Ils n’étaient sujets ni à la maladie ni à la vieillesse, et leur mort ressemblait à un doux sommeil. Après leur mort ils devinrent, par la décision de Zeus, les démons gardiens terrestres, qui veillent invisibles sûr la conduite de l’humanité, et sont doués du royal privilège de lui dispenser la richesse, et de tenir compte des bonnes et des mauvaises actions[2].

Ensuite, les dieux firent la race d’argent, qui différait de la race d’or et lui était fort inférieure, tant au moral qu’au physique. Les hommes de cette race étaient sans foi ni loi, méchants les uns pour les autres, pleins de dédain peur les dieux immortels, auxquels ils refusaient de rendre un culte ou d’offrir un sacrifice. Zeus dans sa colère les ensevelit dans la terre. Mais là, ils jouissent encore d’un honneur secondaire, comme étant les Bienheureux des Enfers[3].

En troisième lieu, Zeus fit la race d’airain, entièrement différente de la race d’argent. Ils étaient faits de frêne dur, leur humeur était querelleuse et leur nature terrible ; ils avaient une force immense et une âme dure comme le diamant, ils ne semaient pas ni ne touchaient à du pain. Leurs armes, leurs maisons, leurs instruments étaient tous d’airain : il n’y avait pas alors de fer. Cette race, combattant éternellement, dont les membres succombèrent sous les coups les uns des autres, s’éteignit et descendit au royaume d’Hadês sans nom ni privilège[4].

Ensuite, Zeus fit une quatrième race, de beaucoup plus juste et meilleure que la précédente. Ce furent les héros ou demi-dieux, qui combattaient au siége de Troie et à celui de Thèbes. Mais cette brillante génération s’éteignit aussi : quelques-uns périrent à la guerre, d’autres passèrent, grâce à Zeus, à un état meilleur dans les îles des Bienheureux. C’est là qu’ils habitent au sein de la paix et du bien-être, sous le gouvernement de Kronos, récoltant trois fois par an les productions spontanées de la terre[5].

La cinquième race, qui succède aux héros, est de fer : c’est la race à laquelle le poète lui-même appartient, et il en exprime son amer regret. Il trouve ses contemporains méchants, malhonnêtes, injustes, ingrats, adonnés air parjure, ne se souciant ni des liens de la parenté ni des ordres des dieux : Nemesis et Ædôs (reproche moral que l’on se fait à soi-même) ont quitté la terre et sont retournées vers l’Olympe. Combien il souhaite ardemment que son existence eût été placée ou plus tôt ou plus tard[6] ! Cette race de fer est condamnée à des crimes, à des soucis, à des maux continuels ; elle n’a du bien qu’en faible proportion ; mais le temps viendra où Zeus y mettra fin. Le poète n’ose pas prédire quelle sorte de race lui succédera.

Telle est la série des races d’hommes distinctes qu’Hésiode ou l’auteur du poème les Travaux et les Jours énumère comme ayant existé jusqu’à son propre temps. Je la donne telle qu’elle est, sans ajouter beaucoup de confiance aux diverses explications que les critiques ont proposées. Elle s’éloigne sous plus d’un rapport du ton et du sentiment qui dominent en général dans la légende grecque ; de plus,

la succession des races n’est ni naturelle ni homogène ; la race héroïque, en effet, n’a pas de dénomination empruntée à un métal, et n’occupe pas une place légitime en succédant immédiatement à la race d’airain. La conception des démons n’est pas non plus en harmonie, soit avec Homère, soit avec la Théogonie hésiodique. Dans Homère, c’est à peine s’il y a une distinction quelconque entre les dieux et les démons : en outre, il dit que les dieux vont çà et là et visitent les cités des hommes sous divers déguisements dans le but de surveiller les bonnes et les mauvaises actions[7]. Mais dans le poème que nous étudions maintenant, la distinction entre les dieux et les démons est générique. Les derniers sont les invisibles habitants de la terre, les restes de la race d’or j adis heureuse que les dieux olympiques ont faite la première ; les restes de la seconde race ou race d’argent ne sont pas des dénions, ils ne sont pas non plus des habitants de la terre, mais ils jouissent encore d’une honorable existence après leur mort en qualité de Bienheureux dans les Enfers. Néanmoins, les démons hésiodiques ne sont en aucune sorte ni auteurs ni fauteurs du mal ; au contraire, ils composent la police invisible des dieux, dans le but de réprimer la mauvaise conduite dans le monde.

Nous pouvons retrouver, je pense, dans cette quintuple succession de races terrestres, exposée par l’auteur du poème les Travaux et les Jours, la rencontre de deux veines ale sentiment qui, sans s’accorder l’une avec l’autre, sont toutes deux coexistantes dans l’esprit de l’auteur. La tendance de son poème est entièrement didactique et morale. Bien que profondément pénétré de l’injustice et de la souffrance qui assombrissent la face de la vie humaine, il s’efforce cependant de conserver, et en lui et .dans les autres, la conviction qu’au total, l’homme juste et laborieux s’en tirera bien[8], et il insiste en grand détail sur les leçons de prudence et de vertu pratiques. Ce sentiment moral, qui dicte son appréciation du présent, guide aussi son imagination quant au passé. Il aime à jeter un pont sur l’abîme qui sépare les dieux et les hommes dégénérés en supposant des races antérieures, la première complètement pure, la seconde moins bonne que la première, et la troisième pire encore que la seconde ; à montrer, de plus, comment la première race passait par un doux sommeil de la mort à une glorieuse immortalité ; comment la seconde race était assez mauvaise pour contraindre Zeus à l’ensevelir dans les enfers, tout en lui laissant encore un certain degré d’honneur ; tandis que la troisième se porta à de tels excès de violence, qu’elle périt victime de ses propres fureurs, sans nom ni honneur d’aucune sorte. La conception de la race d’or devenant après la mort les démons bons gardiens, que quelques critiques supposent être tirés d’une comparaison avec les anges orientaux, se présente elle-même au poète, en partie comme rapprochant cette race des dieux, en partie comme un moyen de constituer une triple gradation dans l’existence qui suit la mort, proportionnée au caractère qui distinguait chaque race pendant la vie. Les dénominations d’or et d’argent données aux deux premières races se justifient comme celles que Simonide d’Amorgos et Phocylide donnent aux différents caractères de femmes, et qu’ils tirent du chien, de l’abeille, de la jument, de l’âne et d’autres animaux ; et l’épithète d’airain s’explique particulièrement par le rapport avec le métal dont cette troisième race d’humeur querelleuse faisait un si grand emploi pour ses armes et ses autres instruments.

C’est jusque-là que nous pouvons suivre d’une façon assez intelligible la veine de préceptes moraux : nous trouvons les révolutions du passé arrangées de manière û servir en partie comme leçon morale, en partie comme préface appropriée au présent[9]. Mais à la quatrième place dans la liste vient la race divine des Héros, et ici le poète ouvre une nouvelle veine de pensée. Il rompt la symétrie de son passé moral, pour faire place à ces êtres chéris de la foi nationale. En effet, bien que la pensée de l’auteur lui-même du poème les Travaux et les Jours eût un caractère didactique, comme celle de Phocylide, de Solôn ou de Théognis, cependant il avait présente à l’esprit, sentiment qu’il partageait avec ses compatriotes, la peinture des anciens temps de la Grèce, telle qu’elle était exposée dans les mythes qui avaient cours, et plus encore dans Homère et dans ces autres productions épiques, seule littérature, seule histoire existant alors. Il lui était impossible d’exclure de son esquisse du passé, soit les grands personnages, soit les glorieux exploits que ces poèmes ennoblissaient. Bien plus, s’il avait consenti lui-même à une telle exclusion, l’esquisse serait devenue un objet repoussant pour ses auditeurs. Mais les chefs qui figuraient devant Thèbes ou devant Troie ne pouvaient pas être bien identifiés soit avec la race d’or et. le race d’argent, soit avec la race d’airain ; de plus, il était essentiel qu’ils fussent placés immédiatement en contact avec la race actuelle, parce que leurs descendants réels ou supposés étaient les principaux et les plus remarquables des hommes existants. C’est ce qui obligeait le poète à leur assigner la quatrième place dans la série, et à interrompre le cours du mouvement moral, pour les intercaler entre la race d’airain et la race de fer, bien qu’ils n’offrent aucune analogie quelconque ni avec l’une ni avec l’autre. La race de fer, à laquelle appartient malheureusement le poète lui-même, succède légitimement, non à la race héroïque, mais à la race d’airain. A la place de cette fière humeur querelleuse, caractère des hommes de cette dernière race, et qui les poussait à se détruire eux-mêmes, la race de fer montre une réunion de méchanceté et de vices plus petits et plus bas. Ce n’est pas par suicide qu’elle périra, mais elle devient de plus en plus mauvaise, et elle perd graduellement sa vigueur, de sorte que Zeus ne consentira pas à conserver plus longtemps une telle race sur la terre.

Je conçois la série des races imaginée par l’auteur du poème les Travaux et les Jours comme le produit de deux veines d’imagination distinctes et sans rapport entre elles, la veine didactique ou morale se confondant avec la veine mythique ou épique primitive. Son œuvre est remarquable comme étant la plus ancienne production didactique des Grecs, et l’un des premiers symptômes d’un ton nouveau de sentiment pénétrant dans leur littérature, pour ne jamais s’éteindre dans la suite. La tendance du poème les Travaux et les Jours est antihéroïque. Loin de chercher à inspirer de l’admiration pour une entreprise aventureuse, l’auteur inculque la justice la plus stricte, la frugalité et le labeur les plus constants, et une appréciation froide, pour ne pas dire inquiète, de tous les plus petits détails de l’avenir. Prudence et probité sont ses moyens ; bien-être et bonheur pratiques, son but. Mais il sent profondément, et il expose avec amertume les divers genres de méchanceté de ses contemporains, et combien ils sont au-dessous de, ce type capital. Il se détourne avec déplaisir des hommes actuels, non parce qu’ils sont trop faibles pour jeter soit la lance d’Achille, soit une énorme borne, mais parce qu’ils sont rapaces, fourbes et dénués de principes.

Les démons introduits pour la première fois dans l’atmosphère religieuse du monde grec par l’auteur du poème les Travaux et les Jours, comme différant des dieux par le caractère générique, mais étant essentiellement bons et composant les agents et la police intermédiaires entre les dieux et les hommes, sont dignes d’attention. Ils sont le germe d’une doctrine qui, dans la suite, éprouva plus d’un changement et acquit une grande importance, d’abord comme l’un des éléments constitutifs de la foi païenne, puis comme l’un des moyens qui contribuèrent à sa ruine. On se rappellera que le reste des êtres demi méchants constituant la race d’argent, qui furent ensevelis dans la terre, bien qu’ils ne soient pas reconnus comme démons, sont encore considérés comme avant une existence réelle, un nom et de la dignité dans les enfers. De là il n’y avait pas bien loin à les traiter aussi comme des démons, mais des démons d’un caractère vicieux et méchant : ce pas fut fait par Empédocle et Xénocrate, et, dans une certaine mesure, encouragé par Platon[10]. C’est ainsi que les philosophes païens en vinrent à admettre des démons à la fuis bans et méchants, à tous les degrés ; et on trouva ces démons utiles comme un moyen d’expliquer bien des phénomènes pour lesquels l’on ne pouvait convenablement admettre l’action des dieux. Ils servaient à délivrer les divinités de l’odieux attaché aux maux physiques et moraux, aussi bien que de la nécessité de se mêler constamment d’affaires peu importantes. On défendit les cérémonies répréhensibles de la religion païenne, par cette raison qu’il n’y avait pas d’autre moyen d’apaiser les exigences de ces êtres méchants. Les démons étaient le plus souvent cités comme causes de mal, et c’est ainsi que le nom en vint insensiblement à entraîner avec lui un mauvais sens, l’idée d’un être méchant formant contraste avec la bonté d’un dieu. C’est ainsi qu’il fut trouvé par les écrivains chrétiens quand ils commencèrent leur polémique avec le paganisme. Une partie de leur argumentation les amena à identifier les dieux païens avec les démons dans le mauvais sens, et le changement insensible opéré dans l’acception admise du mot leur prêta un appui spécieux. Ln effet, ils pouvaient aisément montrer que non seulement dans Homère, mais dans le langage général dés anciens païens, il était parlé de presque tous les dieux comme de démons. Ainsi donc, à la lettre, Clément et Tatien ne semblaient rien affirmer de plus contre Zeus et Apollon que ce que renfermait le langage du paganisme lui-même. Cependant les auditeurs d’Homère et de Sophocle auraient fortement repoussé la proposition si elle eût été avancée clans le sens que le mot démon eut à l’époque et dans le cercle de ces écrivains chrétiens.

Dans l’imagination de l’auteur du poème les Travaux et les Jours les démons occupent une place importante et sont regardés comme exerçant une sérieuse influence pratique. Quand il fait des remontrances aux. maîtres qui l’entourent sur leur injustice et leur corruption si manifestes, il leur rappelle le nombre immense de ces immortels serviteurs de Zeus qui veillent perpétuellement au milieu de l’humanité, et par l’entremise desquels les châtiments des dieux descendront même sur les méchants les plus puissants[11]. Sa supposition que les démons n’étaient pas des dieux, mais des hommes décédés ayant appartenu à la race d’or, lui permettait de multiplier leur nombre indéfiniment sans trop diminuer la dignité divine.

Comme ce poète, enchaîné parles légendes courantes, a introduit la race héroïque clans une série à laquelle elle n’appartient pas légitimement, ainsi il a, sous la même influence, fait entrer dans une autre partie de son poème le mythe de Pandôra et celui de Promêtheus[12] comme un moyen d’expliquer la diffusion primitive et l’abondance actuelle du mal au milieu de l’humanité. Toutefois ce mythe ne peut en aucune manière concorder avec sa quintuple échelle de races distinctes ; c’est, de fait, une théorie complètement différente imaginée pour expliquer le même problème, à savoir l’humanité ayant passé d’un état supposé de bonheur antérieur à un état de douleur et de souffrance actuelles. Une telle inconséquence n’est pas une raison suffisante pour mettre en question l’authenticité de l’un ou de l’autre passage ; car les deux histoires, bien que l’une contredise l’antre, s’harmonisent toutes deux avec l’idée dominante qui dirige l’âme de l’auteur, à savoir une appréciation du présent qui est à la fois une plainte et un enseignement. Ce qui prouve que tel était son dessein, c’est non seulement l’esprit entier de son poème, mais encore ce fait remarquable que sa propre personnalité, ses aventures et sa parenté propres et ses propres souffrances y figurent d’une manière saillante. Et cette introduction d’éléments personnels communique à l’œuvre un intérêt particulier. Le père d’Hésiode vint de Kymê (Cymes) en Æolia, en vue d’améliorer sa condition, et s’établit à Askra en Bœôtia, au pied du mont Hélicon. Après sa mort, ses deux fils partagèrent le patrimoine ; mais Hésiode se plaint amèrement (le ce que sou : frère Persês usa de fourberie, l’attaqua en justice et obtint une décision injuste de juges corrompus. De plus, il reproche à son frère sa préférence pour les procès et l’agitation stérile de l’agora, dans un moment où il devrait travailler dans le champ pour gagner sa subsistance. Askra, en effet, était un endroit misérable, repoussant et en été et en hiver. Hésiode n’avait jamais traversé la nier, une seule fois exceptée, en allant d’Aulis en Eubœa, où il se rendit pour assister aux jeux funèbres d’Amphidamas, chef de Chalkis : il chanta un hymne et gagna comme prix un trépied qu’il consacra aux Muses sur l’Hélicon[13].

Ces détails, quelque peu nombreux qu’ils soient, ont tan prix particulier, en ce qu’ils sont le plus ancien document authentique au sujet de la conduite ou des souffrances d’une personne grecque réelle quelconque. Il n’existe aucun témoignage extrinsèque digne de foi concernant rage du poème les Travaux et les Jours. Hérodote regarde Homère et Hésiode comme appartenant à la même époque, quatre cents ans avant son propre temps ; et il y a encore d’autres mentions dont les unes placent Hésiode avant Homère, et les autres après. En considérant les preuves intrinsèques, nous pouvons remarquer que le poème, par le sentiment et le ton qui y sont répandus, ainsi que par son dessein, diffère beaucoup de l’Iliade et de l’Odyssée, et est analogue à ce que nous lisons au sujet des compositions d’Archiloque et de Simonide d’Amorgos. L’auteur du poème les Travaux et les Jours prêche, en effet, en moraliste, mais ce n’est pas un satirique ; mais, à cette différence près, nous trouvons en lui la même prédominance du sentiment de l’actuel et du positif, la même disposition à faire de la muse l’interprète de ses propres griefs personnels, le même emploi de la fable, Esopique en manière de démonstration, et la même opinion défavorable sur le sexe féminin[14], traits qui peuvent tous être retrouvés dans les deux poètes mentionnés ci-dessus, en les plaçant tous deux en contraste avec l’épopée homérique. Une telle analogie intérieure dans l’absence de témoignage valable est le meilleur guide que nous puissions suivre pour déterminer la date du poème, que nous placerions conséquemment peu après l’an 700 avant J.-C. Le style pourrait, il est vrai, fournir une preuve que l’antique et uniforme hexamètre, quoique bien adapté aux récits légendaires continus ou aux hymnes solennels, avait quelque chose de monotone quand on l’employait soit pour servir à un but polémique, soit pour graver dans l’esprit une leçon morale frappante. Quand les poètes, les seuls auteurs existant alors, commencèrent pour la première fois à appliquer leurs pensées aux dangers et aux luttes de la vie réelle, on vit que le vers, soit pour attaquer, soit pour instruire, réclamait un mètre nouveau, plus vif et plus mordant ; et ce besoin produisit le vers élégiaque et le vers iambique, tous deux vraisemblablement contemporains, et tous deux destinés à remplacer l’hexamètre primitif pour les courtes effusions de pensées qui alors commençaient a être en vogue.

 

 

 



[1] Hésiode, tel qu’il est cité dans l’Etymologicon Magnum (probablement le Catalogue Hésiodique des Femmes, comme le considère Marktscheffel, le plaçant Fragm. 133), donne la parenté d’un certain Brotos, qui doit vraisemblablement être compris comme le premier homme.

[2] Opp. Di., 120.

[3] Opp. Di., 140.

[4] Le frêne était le bois dont on faisait les hampes de lance (Iliade, XVI, 142) : les Νύμφαι Μέλιαι sont nées en même temps que les Gisantes et les Erynnies (Theog., 187), — Gensque virum truncis et duro robore nata. (Virgile, Æneid., VIII, 315), — cœurs de chêne.

[5] Opp. Di., 157.

[6] Opp. Di., 173.

[7] Odyssée, XVII, 486.

[8] Il y a quelques vers dans lesquels il semble croire que, sous les maîtres actuels, méchants et perfides comme ils le sont, il n’est de l’intérêt d’aucun homme d’être juste (Opp. Di., 1270). En somme, cependant, il est convaincu du contraire.

Plutarque rejette les quatre vers ci-dessus mentionnés, sans autre raison, à ce qu’il semble, que parce qu’il Ies croyait immoraux et indignes d’Hésiode (V. Proclus, ad loc.). Mais ils s’accordent parfaitement avec le caractère du poème ; et la règle de Plutarque est inadmissible, quand il s’agit de déterminer la question critique de savoir ce qui est authentique ou non.

[9] Aratus (Phænomen., 107) ne donne que trois races successives : — la race d’or, la race d’argent et celle d’airain ; Ovide y ajoute la race de fer (Métamorphoses, I, 89-114) ; ni l’un ni l’autre ne mentionnent la race héroïque.

Les observations de Buttmann (Mythos der aeltesten Menschengeschlechter, t. II, p. 12 du Mythologus) et de Vœlcker (Mythologie des Iapetischen Geschlechts, § 6, pp. 250-279), sur cette série de races distinctes, sont ingénieuses et peuvent être lues avec profit. Ils reconnaissent tous les deux le caractère disparate du quatrième anneau dans la série, et chacun d’eux l’explique d’une façon différente. Ma manière de voir se rapproche davantage de celle de Vœlcker, avec quelques différences considérables ; une de ces différences, c’est qu’il rejette les vers concernant les démons, tandis que je les regarde comme étant une des parties essentielles de tout le système.

[10] V. le sujet mentionné dans le chapitre III du 2e volume.

[11] Opp. Di., 252.

[12] Opp. Di., 50-105.

[13] Opp. Di., 630-650, 27-45.

[14] Cf. la fable (αϊνος) dans les Travaux et les Jours, v. 200, avec celles qui se trouvent dans Archiloque, Fragm. 38 et 39 ; Gaisford, touchant le Renard et le Singe ; et la légende de Pandôra (v. 95 et v. 705) avec le fragment de Simonide d’Amorgos concernant les femmes (Fragm. 8, éd. Welcker, v. 95-115), et Phocylide ap. Stobæum, florileg. LXXI.

Isocrate assimile le caractère du poème les Travaux et les Jours à celui de Théognis et de Phocylide (ad Nikokl., Or., II, p. 23).