LE CARACTÈRE DE LOUIS XV

 

— VII —

 

 

Un Hérode ! Il fallait une rare excitation des esprits pour qu'on pût comparer le faible Louis XV au féroce roi de Judée. Le roi n'est ni un prodigue, ni un magnifique, ni privé de sagesse, nous dit encore d'Argenson, mais il est facile, léger et mol[1]. — Que peut-on faire sous un maître qui ne pense ni ne sent ? disaient les mécontents[2]. Louis XV pensait et sentait, mais il n'agissait pas, et il laissait faire. A quarante ans on retrouve en lui les contrastes que nous avons signalés plus d'une fois. Il est bon au fond ; dans l'habitude de la vie il a une douceur de caractère et une facilité qui ne se démentent presque jamais[3]. D'Argenson l'appelle le meilleur des hommes, le roi le plus doux et le plus tendre de cœur qui ait régné depuis longtemps[4]. Mais tel était son caractère que, doux naturellement, quand il croyait son autorité attaquée, il était capable de la plus sévère violence[5]. Avec cela dissimulé : il le fut toujours[6], et chaque renvoi de ministre en donna une nouvelle preuve. Non que ces coups d'autorité lui plussent il ne s'y décidait qu'à la dernière extrémité et à contre cœur[7] ; non qu'il fat insensible aux services rendus, car il savait au contraire les apprécier[8], et ses affections étaient aussi profondes que sincères[9]. Toujours d'ailleurs aussi inconséquent dans ses propos[10], et aussi embarrassé avec les personnes qu'il ne connaissait pas[11]. Avec un alourdissement physique[12] qui ne l'empêchait pas de se livrer avec ardeur aux exercices violents et de faire de continuels déplacements[13], le roi semblait prendre un plus grand dégoût des affaires et une croissante indifférence pour les choses de l'Etat[14]. Hélas nous ne travaillons plus guère, disait le comte d'Argenson à son frère en décembre 1749 ; il faut prendre 'c trop de choses sur soi; ainsi la dissipation fait abréger le travail chaque jour, et ce qu'on en dit dans le public est vrai[15].

Louis XV était cependant moins oisif qu'il ne le paraissait. Sans parler du travail forcé avec ses ministres et avec l'évêque de Mirepoix qui lui apportait régulièrement la feuille des bénéfices, que le roi examinait sérieusement, s'attachant à pourvoir les plus dignes[16] ; sans nous arrêter à cette triste et journalière occupation qui consistait à prendre connaissance des rapports de police[17], la politique secrète suivait son cours, et le roi s'en occupait assidûment. Quand d'Argenson parlait en décembre 1747 du triomphe de l'hôtel de Conti[18], il ne se doutait pas de la portée de ce triomphe.

On est toujours étonné de l'immixtion de M. le prince de Conti dans les affaires de l'État, écrit-il le 23janvier 1748. M. le comte de Saint-Séverin ne bouge pas de son cabinet, où ils travaillent des quatre et cinq heures. Ce prince porte souvent de gros portefeuilles chez le Roi et travaille longtemps avec Sa Majesté ; il s'enferme aussi longtemps avec le ministre de la guerre[19].

J'ai marqué dans mon journal, dit à son tour le duc de Luynes dans son Extraordinaire[20], que M. le prince de Conti travailla dimanche dernier (11 février 1748) avec le Roi. Tout le monde demande quel est le sujet de ce travail ; il paroit que personne ne le sait... Il y a des gens qui prétendent que M. le prince de Conti s'est instruit sur différentes matières dont il vient rendre compte au Roi. On dit qu'il travaille beaucoup et qu'il a plusieurs secrétaires qui paraissent fort occupés[21].

On croyait alors que Mme de Pompadour jouait le prince de Conti en lui procurant avec le roi un travail illusoire, pour exposer tous ses projets et ses vagues idées[22]. Mais, malgré l'apparente disgrâce du prince[23] et sa brouillerie déclarée avec Mme de Pompadour[24], il continuait à venir de temps en temps avec son gros portefeuille, et l'on ne tarda pas à voir que la charge de grand prieur de France[25] ou le choix d'un emplacement pour la statue du roi[26], n'étaient point l'objet de ce travail mystérieux :

J'ai déjà parlé du travail de M le prince de Conti avec le Roi, écrit le duc de Luynes, dans son Extraordinaire (28 septembre 1750). Ce travail continue toujours, et les gens les mieux instruits ignorent absolument de quelles matières ou y traite. M. le prince de Conti arrive de temps en temps avec un portefeuille plus ou moins grand, et quelquefois le travail dure assez longtemps. Il manda il y a quelque temps à M. de Gesvres, de l'Isle-Adam, qu'il ne pouvoit venir travailler avec le Roi, parce que les affaires dont il avoit à lui rendre compte n'étoient pas prêtes. Tout ce qu'on peut juger, c'est qu'il y est question de projets sur diverses matières : guerre, finances, peut-être politique. M. le prince de Conti avoit à parler, il y a quelque temps, de la vente de l'hôtel de Conti. M. de Gesvres, que cette affaire regardoit aussi, lui demandoit souvent s'il en avoit parlé au Roi, et M. le prince de Conti l'avoit toujours oublié; enfin M. de Gesvres le demanda au Roi, et le Roi lui dit : Voilà comme il est, il oublie toujours de me parler de ses affaires. Il est assez singulier qu'avec cette intimité de travail sans fonctions connues, bien loin d'être en grande liaison avec Mme de Pompadour, il n'alloit jamais chez elle…   Tout ce que l'on sait par rapport au travail, c'est que M. le prince de Conti a parlé quelquefois de mémoires qui lui avoient été envoyés…[27]

Mme de Pompadour, écrit d'Argenson en janvier 1751, voudrait se voir défaite de M le prince de Conti, et croit y voir la gloire du roi, mais le dommage de la France la touche peu[28]. En 1751, ce prince voulut entrer au Conseil avec le rang de ministre, et il échoua[29]. C'était le moment où la maîtresse, voulant se renfermer dans le rôle d'amie — elle s'était fait faire pour Bellevue une statue où elle était représentée en déesse de l'amitié[30], — n'en aspirait que plus ardemment au rôle de premier ministre[31]. Provisoirement elle n'était que le premier médecin[32], et si on lui refusait encore l'autorité d'un ministre, l'on se plaisait à célébrer ses talents d'esculape et les obligations qu'on lui devait[33]. On oubliait que ce n'était point assez qu'il n'y eut plus de coupables relations entre le roi et la favorite; et qu'après le retranchement du péché, il fallait le retranchement du scandale[34].

Ce retranchement n'eut pas lieu : malgré les bruits qui avaient couru au commencement de 1751, les choses restèrent dans le même état. La religion n'était pas assez forte chez le chrétien pour se traduire dans les actes; la tendresse assez vive chez le père, le caractère assez énergique chez l'homme pour qu'il décidât entre la famille et la maîtresse. Au fond, Mme de Pompadour était à charge au roi, tandis que ses filles avaient son affection et, s'il avait osé, ses préférences. En dépit des voyages à Bellevue, Mesdames tenaient une large place dans la vie de leur père[35], et, sans parler des courses et des chasses, le roi avait (fin d'octobre 1751) des soupers particuliers avec ses Sept enfants[36]. La reine elle-même ne cessait d'être l'objet d'attentions et de prévenances[37].

Au milieu de cette vie troublée parles événements du dehors et plus encore par les intrigues de la cour, partagée entre ces influences rivales, et où les plaisirs faciles avaient toujours trop de part[38], un événement douloureux éclata comme un coup de foudre : Madame Henriette, la fille préférée du roi, mourut le 10 février 1752. On ne peut exprimer la douleur dans laquelle le roi est plongé, écrit le duc de Luynes. Louis XV s'enferma à Trianon avec la reine et ses enfants[39]. Il ne fut pas question de Mme de Pompadour c'était dans sa famille et non près d'elle que le roi cherchait des consolations[40], Il fut longtemps d'une tristesse affreuse. Sa douleur ne fit que resserrer les liens qui l'unissaient aux siens[41] : Madame Adélaïde hérita de l'affection qu'il portait à Madame Henriette; elle eut l'appartement de la comtesse de Toulouse, que sa sœur n'avait pu obtenir, et bientôt on lui en fit, à grands frais, préparer un plus somptueux.

C'est alors que Mme de Pompadour, délaissée comme maîtresse et ne retenant plus le roi que par la force de l'habitude, conçut un projet singulier, dont la trace nous a été conservée par un curieux document des instructions remises par elle à un agent secret, envoyé à Rome quelques aunées plus tard. Laissons-la nous exposer ce projet :

Au commencement de 1752, déterminée, par des motifs dont il est inutile de rendre compte, âne conserver pour le Roi que les sentiments de la reconnaissance et de l'attachement le plus pur, je le déclarai à Sa Majesté, en la suppliant de faire Consulter les docteurs de Sorbonne, et d'écrire h son confesseur pour qu'il en consultât d'autres, afin de trouver les moyens de me laisser auprès de sa personne (puisqu'il le désirait) sans être exposée au soupçon d'une faiblesse que je n'avais plus. Le Roi, connaissant mon caractère, sentit qu'il n'y avait pas de retour à désirer de ma part et se prêta à ce que je désirais. Il fit consulter des docteurs, et écrivit au P. Pérusseau, lequel lui demanda une séparation totale[42]. Le Roi lui répondit qu'il n'était nullement dans le cas d'y consentir ; que ce n'était pas pour lui qu'il désirait un arrangement qui ne laissât point de soupçons au public, mais pour ma propre satisfaction ; que j'étais nécessaire au bonheur de sa vie, au bien de ses affaires; que j'étais la seule qui osât dire la vérité, si utile aux rois, etc. Le bon Père espéra dans ce moment qu'il se rendrait maître de l'esprit du Roi, et répéta toujours la même chose. Les docteurs firent des réponses sur lesquelles il aurait été possible de s'arranger, si les Jésuites y avaient consenti. Je parlais dans ce temps à des personnes qui désiraient le bien du Roi et de la religion ; je les assurai que Si le P. Pérusseau n'enchaînait pas le Roi par les sacrements, il se livrerait hune façon de vivre dont tout le monde serait fâché[43]. Je ne le persuadai pas, et l'on vit en peu de temps que je ne m'étais pas trompée[44].

Mme de Pompadour était-elle sincère dans cette tentative ? Nous ne savons. Toujours est-il qu'ayant échoué dans ses plans, elle ne fut que trop justifiée dans ses prévisions. Tout porte à croire même qu'elle ne fut pas étrangère à cette façon de vivre qui commença vers le mois de février 1753[45], et se prolongea jusqu'aux derniers temps de la vie de Louis XV. Malgré les avertissements du ciel[46], malgré les influences de la famille et une sainte conspiration en faveur de la religion et du devoir[47], malgré la présence de Madame Infante, qui résida un an à la cour (septembre 1752 à septembre 1753), les mauvais penchants du roi, favorisés par la complaisance intéressée de son ancienne maîtresse[48], prévalurent désormais, et l'entraînèrent dans une licence de mœurs de plus en plus effrénée. Nous l'avons déjà dit : nous ne sommes point ici l'historien des amours royales. Qu'il nous suffise d'indiquer en passant les étapes de ces ignominies, depuis la petite Murphy, qui eut trois années de faveur (1753-1755) et dont Mme de Pompadour fit élever la fille[49], jusqu'à Mlle de Romans (1760 et années suivantes), qui se vantait de la noble origine du bel enfant qu'elle se plaisait à tenir en public dans ses bras[50] ; sans parler des mystères du Parc-aux-Cerfs[51], et de ces jeunes victimes choisies pour le sacrifice, et pourvues d'une dot, après avoir été l'objet d'une passagère faveur[52]. Ces turpitudes sont trop honteuses, el d'ailleurs trop connues, — car c'est la chronique scandaleuse du règne de Louis XV qu'on sait le mieux, pour que nous nous y arrêtions.

A la veille de cette nouvelle et déplorable transformation du roi, d'Argenson, dont le Journal éclaire ces désordres d'un jour complet[53], sans tomber dans les graveleuses amplifications des chroniqueurs orduriers, d'Argenson nous peint cette nature molle et apathique, qui ne secondait que trop bien les desseins de ceux qui, par un infâme calcul, endormaient le malheureux roi dans l'ivresse des sens, pour se donner le facile triomphe de régner sans partage et sur le roi avili, et sur le royaume livré à l'abandon et au pillage.

Voici, écrit-il en décembre 1752, toutes les passions du Roi et tout le ressort du gouvernement : Laissez-moi en repos, que j'aie la paix, que je n'aie point de déshonneur, qu'on me laisse aller à mes campagnes, à mes petits plaisirs, à mes habitudes ; quelques bâtiments, de petites connaissances, quelque curiosité, quelques recherches que je ne crois pas bien chères. Que j'aie la paix à la cour, dans le royaume et avec mes voisins ; je serais bien aise encore d'obtenir quelque gloire qui ne me donnât pas de peine, l'ordre ancien et accoutumé, sans examen, la religion du pays. C'est Morphée qui règne, ou une belle paresseuse qui a les chairs fermes et l'âme molle, bonnes gens fabriqués ainsi par le ciel, sans vices et sans vertus[54].

Mme de Pompadour fut satisfaite. Le roi, qui se bornait à des vœux stériles pour être aimé de son peuple, et qui ne faisait rien pour l'être[55], se résigna enfin, et lâcha ces rênes qu'il n 'avait jamais su tenir d'une main assurée. Je les laisserai faire, dit-il ; qu'ils me laissent seulement quelques chevaux pour me promener[56] ; et, à Mme de Pompadour et Gontaut, en parlant de l'assemblée de républicains des grandes robes : Les choses comme elles sont dureront autant que moi[57]. La marquise de Pompadour eut rang de duchesse à la cour[58] ; elle put disposer de tout, de dire nous tout à son aise[59] ; elle put faire et défaire les ministres, et être, comme on disait, le cardinal de Fleury et demi[60].

 

 

 



[1] D'Argenson, t. VI, p. 463.

[2] Idem, t. V, p. 214.

[3] Voir Luynes, t. IX, p. 232 ; t. X, p. 322, note.

[4] D'Argenson, t. V, p. 374 et 403. La cour, dit-il ailleurs, empêche le roi de régner et de retrouver en lui les vertus qu'il a. (t. VI, p. 322) — Un roi tendre, sensible, doux et irrésolu, dit-il encore (t. VII, p. 274-75).

[5] D'Argenson, t. VI, p. 161-62 ; cf. t. V, p. 454.

[6] Mme de Pompadour disait à sa femme de chambre, en parlant d'un commencement d'intrigue du roi avec la marquise de Coislin : Vous ne le connoissez pas, la bonne ; s'il devoit la mettre ce soir dans mon appartement, il la traiteroit froidement devant le monde et me traiteroit avec la plus grande amitié. Telle a été son éducation, car il est bon par lui-même et ouvert. Mémoires de Mme de Hausset, l. c., p. 465.

[7] Voir le duc de Luynes, t. VIII, p. 83. Voir aussi d'Argenson, t. V, p. 319.

[8] Voir une lettre du roi, dans Luynes, t. VII, p. 196, note.

[9] On peut le voir par son attitude à la mort du comte de Coigny (Luynes, t. VIII, p. 465, et t. IX, p. 187-88). — Le roi en a été à me faire peur, écrivait Mme de Pompadour (lettre publiée dans les Mélanges de la Société des bibliophiles, en 1856.)

[10] Luynes, t. IX, p. 232.

[11] Luynes, t. VII, p. 106.

[12] Le roi qui, en 1737, pesait 165 livres, et pesait 185 en avril 1746. Luynes, t. VII, p. 294.

[13] Voir Luynes, t. IX, p. 288 ; t. X, p. 31, 40, 292. En juillet 1750, le roi faisait cinq chasses par semaine ; avec ses deux meutes, il avait pris cent soixante et onze cerfs en 1748 et à peu prés 3.000 dans les seize années précédentes. Voir sur les voyages, Luynes, passim, d'Argenson, t. VI, p. 23, 75, 135, 146, et Barbier, t. IV, p. 372, 383. On voit, en comparant les mss. 14436 et 14120, que le nombre des voyages à Choisy, de 1747 à 1752, fut, en moyenne, de onze par an.

[14] Voir Luynes, t. VII, p. 263 et 329 ; d'Argenson, t. VI, p. 71,73.

[15] D'Argenson, t. VI, p. 85.

[16] Luynes, t. VII, p. 204.

[17] Voir d'Argenson, t. VI, p. 108 et 230. Il prétend que c'était une des grandes occupations de son frère de travailler à l'espionnage en vue de plaire au roi.

[18] D'Argenson, t. V, p. 119.

[19] Idem, ibid., p. 167.

[20] Pendant plusieurs années, le duc de Luynes consigna, dans cette partie séparée de ses Mémoires, les particularités intimes ou secrètes qu'il ne voulait pas laisser venir à la connaissance de ceux auxquels il communiquait le travail dont il voulait faire comme un code du cérémonial de la cour.

[21] Mém. de Luynes, t. IX, p. 177.

[22] D'Argenson, t. V, p. 184. Dans les Mémoires de son ministère, d'Argenson fait un portrait peu flatté du prince : Cependant, ajoute-t-il, le roi l'écoute souvent et longuement. C'est, dit-on, l'ouvrage d'une intrigue ; on a flatté Sa Majesté d'avoir eu part à son éducation, et on l'a touchée de quelque commisération pour un prince plus appliqué que les autres (t. IV, p. 176).

[23] M. le prince de Conti est quasi retiré à l'Isle-d'Adam et fréquente peu la cour ; il parle hautement contre la paix et contre le ministère. D'Argenson, t. V. p. 384 (février 1749).

[24] En mars 1749. Voir d'Argenson, t. V, p. 423.

[25] Voir Luynes, t. X, p. 138-140.

[26] Voir d'Argenson, t. VI, p. 17 : d'Argenson prétend que Conti y était intéressé pour procurer une vente avantageuse de son hôtel.

[27] Mém. de Luynes, t. X, p. 438-39.

[28] D'Argenson, t. VI, p. 340-41. Nous examinerons plus loin ces desseins si pernicieux à la patrie dont parle ici l'ancien ministre des affaires étrangères.

[29] Idem, ibid., p. 415, 423.

[30] Idem, ibid., p. 351 ; cf. t. VII, p. 101.

[31] Mme de Pompadour vient de lire les mémoires manuscrits de M. de Torcy sur la paix d'Utrecht, et elle en parle volontiers avec ses amis, faisant, à tort et à travers, la savante en politique, affectation de caractère de femmelette ; mais ce que cela dénote réellement, c'est qu'elle compte de gouverner l'État de plus en plus comme premier ministre. D'Argenson, t. VII, p. 74.

[32] Mme de Pompadour est le premier médecin du roi. D'Argenson, t. VI, p. 387.

[33] Certes nous avons obligation à cette dame d'empêcher que le roi ne tombe dans ces maladies qui viennent de l'ennui ; il faut convenir qu'elle le fait bien porter, qu'elle le promène, qu'elle l'amuse, qu'elle le contient. D'Argenson, t. VII p. 384.

[34] S'il y intervenait quelque prêtre, plus éloquent, plus puissant en paroles que le bonhomme Pérusseau, cet homme dirait : ce n'est pas tout que le retranchement du péché, il faut celui du scandale. D'Argenson t. VI, p. 352. — On dit, écrit d'Argenson en février 1751, qu'avec le jubilé il y a des brefs particuliers, et un, entre autres, à l'archevêque de Paris, où Sa Sainteté lui ordonne de remontrer au roi le scandale qu'il donne par ses amours, le rendant responsable de la continuation de ce scandale s'il continue, et on dit que cela s'est traité dans la longue conversation que le roi a eue de dernièrement avec ce prélat (p. 363).

[35] On ne peut pas avoir plus d'amitié que le roi en a pour Madame, dit Luynes en juillet 1751, t. XI, p. 160.

[36] Luynes, t, XI, p. 271.

[37] Idem, ibid., p. 261. Chaque matin, à partir de cette époque, la reine se rendait chez le roi ; jamais le roi ne la refusait pour les choses qu'elle demandait. Mémoires du président Hénault, p. 217, 219.

[38] Il y eut, à la fin de 1751, un commencement d'intrigue avec la jeune comtesse de Choiseul. Voir d'Argenson, t. VII, p. 20, 13, etc., et 382. M. Campardon entre dans des détails circonstanciés sur les rivales qu'on chercha à donner à Mme de Pompadour (p. 137-166). — Voir sur les passades, d'Argenson, t. VI, p. 364-65.

[39] Luynes, t. XI, p. 403, 405.

[40] D'Argenson, t. VII, p. 117. C'est par erreur que d'Argenson parle d'un logement de Pompadour à Trianon ; il est démenti par les détails que donne Luynes (t. XI, p. 406-407).

[41] D'Argenson, t. VII, p. 116. Il paraît ne vouloir plus faire sa société que de sa famille, en patriarche et en bonhomme.

[42] L'on dit, écrit d'Argenson à la date du 8 mars 1752, que les gens zélés pour la dévotion du roi ont consulté avec les Jésuites à la Sorbonne pour savoir Si, dans le cas où est le roi, il peut continuer h vivre avec la marquise comme son amie après y avoir vécu comme sa maîtresse, ne se passant plus de péché charnel entre eux deux ; mais comme il a été exposé qu'elle était mariée et que son mari était ici, l'on a répondu négativement, de sorte que l'idée de dévotion ou de la conserver échoue insensiblement. (T. VII, p. 137)

[43] M. Michelet, en citant ce document, a commis ici une singulière erreur d'interprétation. Il prétend, et il ajoute entre parenthèses, dans le texte, que c'est en refusant les sacrements au roi qu'on le tiendrait (Louis XV, p. 307). Obéissant à d'aveugles préjugés ou à d'étranges préoccupations, l'auteur torture parfois les documents originaux jusqu'à leur faire dire le contraire de ce qu'ils disent.

[44] Publié pour la première fois par M. Alexis de Saint-Priest dans la Revue des Deux-Mondes du 1er avril 1844, d'après les mss. de M. de Choiseul, et reproduit dans son Hist. de la chute des Jésuites au XVIIIe siècle, p. 33 et suiv. (éd. de 1846).

[45] Voir d'Argenson, t. VII, p. 408, 409, 436, 439-40, 456, 463, etc.

[46] Il (le roi) sait ce que dit le peuple, car il veut qu'on lui rapporte tout ; il sait donc que toute la populace disait sur la mort de Madame : Voilà ce que c'est que d'offenser Dieu et de rendre son peuple misérable ! Dieu lui retire sa fille bien-aimée. D'Argenson, t. VII, p. 117.

[47] Voir d'Argenson, t. VII, p. 130-133, 303, 305, 307.

[48] C'est ce qu'affirment d'Argenson, t. VII, p. 408 et 457 ; Mme du Hausset, l. c., p. 480 ; Soulavie, dans plusieurs de ses écrits.

[49] C'est en mai 1753 qu'apparaît la petite Murphy, qui fut installée au Parc-aux-Cerfs dans une jolie maison, avec une gouvernante, une femme de chambre, une cuisinière et deux laquais ; elle devint bientôt enceinte, et fut finalement logée dans le château. Elle fut, en décembre 1755, mariée à un gentilhomme d'Auvergne et dotée de 200.000 livres. Voir d'Argenson, t. VII, p. 436, 439-41,463 ; t. VIII, p. 2, 39, 57, 114, 173, 183, 217, 255, 263, 297 ; t. IX, p. 115, 144, 151, 158, 169 ; Luynes, t. XIII, p. 435 ; t. XV, p. 325 ; Barbier, t. V, p. 360-61. 372 ; t. VI, p. 246 ; Mme du Hausset, l. c., p. 455-63; Soulavie, Mém. du maréchal duc de Richelieu, t. IX, p. 164 et suiv., etc.

[50] On a deux lettres de Louis XV à Mlle de Romans. Toutes deux sont relatives à la naissance de l'enfant que le roi eut de cette maîtresse. Dans l'une, datée du 8 décembre 1761, le roi écrit : Je me suis très bien aperçu, ma grande, que vous aviez quelque chose dans la tête lors de votre départ d'ici ; mais je ne pouvais deviner ce que ce pouvait être au juste. Je ne veux point que notre enfant soit sous mon nom dans son extrait baptistaire ; mais je ne veux point non plus que je ne puisse le reconnaître dans quelques années, si cela me plaît. Je veux donc qu'il soit mis Louis-Aimé ou Louise-Aimée, fils ou fille de Louis le Roy ou de Louis Bourbon, comme vous le voudrez ; pourvu qu'il n'y ait pas de … (blanc) de votre côté, vous y ferez mettre ce que vous voudrez… Et dans la seconde lettre, datée du 13 janvier 1762 : … Vous ferez dire au curé, sous le secret de la confession, de qui est cet enfant, de n'en jamais parler et de ne point montrer ni de donner d'extrait de ce baptême, que de ma part, si cela lui est possible, comme je le croîs. Le parrain et la marraine, deux domestiques dont vous serez sûre du secret ; le nom Louis-Aimé, fils de Louis de Bourbon et de votre nom, dame de Meilly Coulange. Ces lettres ont été publiées par MM. de Concourt, Les maîtresses de Louis XV, t. 11, p, 83, note, d'après les autographes. Voir, sur Mlle de Romans, Barbier, t. VII, p. 426-27 ; Mme du Hausset, l. c., p. 580-84 ; Mme Campan, t. III, p. 29-32 (les Anecdotes de Mme Campan sont sujettes à caution) ; Soulavie, Mém. du maréchal duc de Richelieu, t. IX, p. 349-51 (auteur encore plus suspect, est-il besoin de le dire ?) ; Vie privée de Louis XV, par Mouille d'Angerville, t. I, p. 33-35, etc.

[51] Relativement au Parc-aux-Cerfs, nous ne pouvons mieux faire que de reproduire le résumé placé par le regrettable M. Th. Lavallée en tête du curieux mémoire de M. J.-A. Le Roi, le savant conservateur de la bibliothèque de Versailles : Le Parc-aux-Cerfs était le nom d'un quartier de Versailles…, bâti sous Louis XIV sur l'emplacement d'un parc à bêtes fauves, datant de Louis XIII, et qui en avait gardé le nom. Quant au sérail, voici à quoi il se réduit, Louis XV avait acheté secrètement, dans une impasse déserte de ce quartier, une petite maison bourgeoise où pouvaient à peine loger trois personnes, et dans laquelle son valet de chambre faisait élever quelques jeunes filles, ordinairement vendues par leurs parents. Il n'y en avait que deux en général, dit Mme du Hausset, très souvent une seule ; quelquefois le Parc-aux-Cerfs était vacant cinq ou six mois de suite. Lorsqu'elles se mariaient, on leur donnait des bijoux et une centaine de mille francs. Il ne paraît pas que le nombre de ces victimes, immense d'après tous les historiens, ait dépassé une trentaine, le roi n'ayant gardé cette maison que de 1755 à 1771 (il est constant, au outre, que le Parc-aux-Cerfs fut fermé en 1765 pour plusieurs années). M. Le Roi appuie cette curieuse découverte historique de pièces irréfutables ; mais cela n'empêchera pas les historiens de scandales de parler des centaines de millions et même des milliards que coûta le Parc-aux-Cerfs, Curiosités historiques sur Louis XIII, Louis XIV, Louis XV, Mme de Maintenon, Mme de Pompadour, Mme du Barry, etc. (Paris 1864), introduction, p. XVI-XVII. L'acte d'acquisition de la trop fameuse maison est du 25 novembre 1755 (id p. 236 37). — Voir sur le Parc-aux-Cerfs, Mme du Hausset, l. c., p. 413 et 480 ; Barbier t. V, p. 360-61, 372 ; t. VII, p. 426, etc. On voit par ce que dit cet auteur qu'avant 1755, et dès 1753, la petite Murphy avait été mise dans une maison du Parc-aux-Cerfs.

[52] Voir d'Argenson, t. VII, p. 408 : t. VIII, p. 208-209, 217, 274 ; t. IX, p. 144, 170, 280 ; Luynes, t. XV, p. 325 ; Barbier, t. VI, p. 263 ; t. VII, p. 426 ; Mme du Hausset, l. c., p. 450 et suiv., 464.

[53] Le duc de Luynes. Si instructif pour les temps de Mmes de Mailly, de Vintimille et de Châteauroux, plus discret sur le règne de Mme de Pompadour, devient, à partir de 1752, beaucoup moins intéressant et moins complet.

[54] D'Argenson, t. VII, p. 354.

[55] Voir d'Argenson, t. VII, p. 7, 153, 232.

[56] D'Argenson, t. VII, p. 232.

[57] Mém. de Mme du Hausset. — Et encore, au dire de Soulavie : Je ne vois pas comment, après moi, cela se terminera. (L'art de l'histoire, préface des Pièces inédites sur les règnes de Louis XIV, Louis XV et Louis XVI, t. I, p. XXI.)

[58] Elle prit le tabouret le 17 octobre 1752.

[59] Voilà bien des mardis où le roi ne pourra vous voir, disait-elle en août 1752 aux ministres étrangers, car je ne crois pas que vous veniez nous chercher à Crécy. D'Argenson, t. VII, p. 281. Cf. les lettres de Mme de Pompadour reproduites par MM. de Concourt, l. c., t. II, p. 68 et suiv.

[60] D'Argenson, t. VII, p. 282.