HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE V. — L'EXPULSION DES ANGLAIS. - 1449-1453.

 

CHAPITRE VII. — LA LÉGATION DU CARDINAL D'ESTOUTEVILLE.

 

 

1451-1452

 

Motifs de l'envoi du cardinal d'Estouteville comme légat. — Caractère de ce personnage. — Démarche préalable faite par lui auprès de Charles VII ; le Roi refuse de le recevoir à titre de légat. — Le cardinal part néanmoins et triomphe de la résistance du Roi. — Le cardinal à Lyon, puis à Tours. — Impossibilité où il se trouve de remplir le premier objet de sa mission, la pacification de la France et de l'Angleterre. — Affaire de l'abrogation de la Pragmatique sanction ; relations de Charles VII avec le Saint-Siège à ce sujet ; assemblées du Clergé à Bourges en 1444, à Rouen et à Chartres en 1450 ; résultats négatifs de ces assemblées ; le Roi en convoque une nouvelle à Bourges. — Le cardinal d'Estouteville s'occupe, en attendant, de la révision du procès de Jeanne d'Arc, et procède à la réforme de l'université. — Il insiste en vain pour avoir un nouvel entretien avec le Roi avant de se rendre à Bourges ; entretien du cardinal avec l'archevêque de Narbonne ; dispositions du clergé. — Opinion exprimée par l'archevêque de Reims dans une épître au Roi. — Assemblée de Bourges ; la Pragmatique de Saint-Louis y est produite ; succès de la fraude ; opposition de quelques prélats à la Pragmatique sanction. — Ambassade de l'archevêque de Tours à Rome. — Lettre de Nicolas V au Roi. — Conclusion.

 

Dans les pages qui précèdent, nous avons vu apparaître un personnage considérable, venu en France comme légat du Pape. La légation du cardinal d'Estouteville se rattache à de graves affaires politiques ou religieuses ; elle mérite d'être l'objet d'une étude attentive. Nous allons essayer d'en indiquer le but réel, de faire connaître les circonstances au milieu desquelles elle se produisit, d'en dégager les résultats.

Le principal motif qui semble avoir déterminé Nicolas V à envoyer un légat à Charles VII était une pensée de conciliation entre les princes chrétiens : il s'agissait de procurer une paix définitive entre la France et l'Angleterre.

Mais, à côté de ce motif, officiellement mis en avant, il y en avait un autre qui, pour avoir été passé sous silence dans les lettres d'investiture, n'en avait pas moins une haute importance : nous voulons parler des rapports de Nicolas V avec Charles VII et de l'abrogation de la Pragmatique sanction, vivement désirée par la Cour de Rome.

La situation de l'Italie, la perspective d'une intervention de la France dans les luttes soulevées par les rivalités des puissances italiennes préoccupait alors vivement le Saint-Siège le cardinal avait également mission de sonder à cet égard les intentions de Charles VII.

Le cardinal était enfin chargé de travailler à la réforme des collégiales, des écoles, et spécialement de l'Université de Paris, au sein de laquelle de nombreux abus s'étaient glissés.

Le cardinal d'Estouteville allait donc toucher à la plupart des questions qui s'agitaient en ce moment, et y apporter, au nom du Saint-Siège, sa part d'action et d'influence.

Les progrès constants de l'Islamisme[1] causaient à la catholicité tout entière un légitime effroi ; il était naturel que Nicolas V, marchant sur les traces de ses prédécesseurs, travaillât à mettre un terme aux guerres qui s'agitaient entre les princes chrétiens, afin d'unir toutes les forces contre les Turcs. L'empire grec de Constantinople, fragile barrière opposée à l'invasion musulmane, était alors à la merci du sultan Amurath, et un nouvel assaut contre le faible héritier des Paléologue était imminent. En dehors de la Hongrie et de la Cour de Rome, aucun État ne se préoccupait d'arrêter le flot de l'invasion. Le nouveau sultan qui venait de succéder à Amurath, Mahomet II, jeune, entreprenant, doué de rares qualités, ne pouvait manquer de se tourner vers Constantinople quand l'occasion paraitrait favorable. Le trône impérial était occupé, depuis le mois de novembre 1448, par Constantin Paléologue, prince sans autorité, sans prestige, dénué des ressources militaires et financières qui lui auraient permis de résister à ce choc. Quelque temps auparavant, à la réception d'une lettre adressée au Roi, où, du vivant de l'empereur Jean son frère, Constantin faisait part des efforts tentés pour s'opposer aux infidèles, Charles VII avait répondu par des félicitations auxquelles se mêlait le regret que le défaut d'union entre les États chrétiens et la guerre qu'il avait à soutenir contre les Anglais le missent dans l'impossibilité de lui prêter assistance ; il n'aurait, disait-il, rien plus à cœur que de combattre les infidèles, à l'exemple de ses ancêtres ; si la paix se faisait avec ses adversaires, il s'empresserait de déférer à la requête qui lui était adressée[2].

Le prince de l'Église auquel Nicolas V confiait la mission de travailler à réconcilier la France et l'Angleterre, était un Français, fixé depuis longtemps à Rome, et qui, malgré la haute situation dont sa famille jouissait dans le royaume, était tout Italien de cœur[3].

Guillaume d'Estouteville était le second fils de Jean, seigneur d'Estouteville, bouteiller de France sous Charles VI, et de Marguerite d'Harcourt. Jean était mort en Angleterre durant sa captivité (1436), et son fils aîné Louis lui avait succédé dans la charge de grand bouteiller[4]. Né vers 1400, Guillaume entra dans l'Ordre de Saint-Benoît, et ne tarda pas à aller résider à. la Cour pontificale, où la faveur d'Eugène IV le mit en possession d'importantes dignités. Cardinal le V des ides d'août 1437 (28 août) — d'autres disent le 18 décembre 1439 il avait le titre d'archidiacre d'Outre-Loire au diocèse d'Angers, quand, le 30 mars 1.439, le Pape l'appela à occuper ce siège épiscopal ; il en garda le titre[5] sans en remplir la charge, qui fut dévolue, à son compétiteur Jean Michel, élu du chapitre[6]. Eugène IV le dédommagea en l'appelant (3 novembre 1439) à l'évêché de Digne ; en 1441, il reçut en commande l'évêché de Nîmes, et en 1444 celui de Béziers ; enfin, en janvier 1450, il fut promu à l'évêché de Lodève. Il était en outre prieur de Beaumont-en-Auge, de Grandmont près Rouen, de Saint-Martin des Champs, et abbé du Mont Saint-Michel[7]. Guillaume acquit ainsi une fortune considérable, dont, par la suite, il devait faire un usage qui rendit à Rome son nom célèbre[8].

Le cardinal d'Estouteville n'était point, paraît-il, des plus édifiants parmi les membres du sacré collège[9] : les tristes mœurs du temps avaient marqué sur lui leur empreinte ; toutefois il est permis de penser que les légèretés de sa vie ne furent que passagères. Sous le pontificat d'Eugène IV, Guillaume d'Estouteville fut l'un des trois cardinaux chargés d'instruire le procès de canonisation de saint Bernardin, et Nicolas V lui confirma cette mission. On sait que la canonisation fut proclamée le jour de la Pentecôte de l'année 1450 (24 mai). C'est peu de temps après cette grande solennité, qui eut dans toute l'Italie un grand retentissement[10], que Nicolas V désigna le cardinal pour remplir en France les fonctions de légat.

Par un bref en date des Ides d'août (13 août), il fut investi de la mission de travailler à une pacification entre Charles VII et Henri VI, afin que les deux princes qui étaient à la tête de la république chrétienne pussent unir leurs forces contre les infidèles[11]. C'était sur l'initiative du duc de Bourgogne, qui venait d'envoyer dans ce but une ambassade à Rome[12], que cette tâche était entreprise[13]. En même temps le Pape chargeait le, cardinal Nicolas de Casa, alors légat en Allemagne, où il procédait, avec un zèle admirable, à la réforme de l'Église, de se rendre en Angleterre pour agir auprès de Henri VI tandis que le cardinal d'Estouteville s'emploierait auprès de Charles VII[14].

Les relations entre la cour de Rome et la France étaient alors assez tendues. Le Pape savait que le Roi n'avait pas renoncé à provoquer la réunion d'un concile, dont il avait été parlé lors des négociations pour la renonciation de l'antipape Félix V au trône pontifical. Charles VII désirait que ce concile fût tenu à Lyon[15], et il avait mémo envoyé Un ambassadeur à Rome pour entretenir Nicolas V à ce sujet[16]. En outre, les desseins que l'on prêtait au Roi en Italie n'étaient point sans éveiller les susceptibilités du Souverain Pontife et sans exciter ses craintes[17].

Le cardinal d'Estouteville résolut de prendre les devants, afin de se ménager un accueil favorable. Avant même d'avoir reçu l'investiture officielle, il s'adressa au Roi pour lui faire part des intentions du Pape[18]. Dans une seconde lettre, datée du 28 août, le cardinal annonçait que, conformément à ce qu'il avait écrit au Roi, le Pape avait désigné deux légats chargés de se rendre, l'un en France, l'autre en Angleterre. Et, ajoutait-il, pour ce qu'il sait bien que je suis votre sujet et serviteur et ne ferai en cette matière chose qui ne vous soit agréable, plutôt que nul autre il m'a ordonné à aller vers vous. Le cardinal disait en terminant qu'il envoyait Guillaume Seguin, protonotaire apostolique, pour exposer au Roi l'objet de sa mission, et qu'il se proposait de partir dans un délai de six à sept jours[19].

A l'arrivée de Guillaume Seguin, qui joignit le Roi à Taillebourg, le Conseil délibéra sur la communication faite au nom du cardinal ; la réponse fut donnée le jour même[20], en présence de Charles VII. Le Roi ne peut croire, disait-on, que monseigneur d'Estouteville, qui est noble et sage seigneur, vienne en France, pour aucune grosse matière touchant la paix des royaumes de France et d'Angleterre, sans avoir pour cela son agrément ; ce n'est point une affaire qu'on doive mettre en négociation sans avoir préalablement averti le Roi. L'envoyé du cardinal était chargé d'écrire à son maître qu'il voulût un peu delayer son partement de Rome jusqu'à ce que sur ce il eût le bon vouloir du Roi, et qu'il eût fait savoir au Roi les matières pour lesquelles il venoit et à quelle requête. Si le cardinal était déjà en route et près des frontières du royaume, il serait averti de n'y point entrer à titre de légat, car le Roi avait le privilège que nul ne pouvait se porter comme légat dans ses États, et pour rien au monde il ne voudrait souffrir que ce privilège fût enfreint ; et, disait-on en terminant, ne seroit pas honneur à mon dit seigneur d'Estouteville de commencer à y essayer et à la fin soi en désister[21].

Le mécontentement du Roi était-il motivé uniquement par la violation du privilège qu'il invoquait ? Il semble y avoir, dans la réponse faite à l'envoyé du cardinal, une allusion à l'intervention du duc de Bourgogne. Au mois de juin précédent le Roi avait été sollicité, au nom de ce prince, de s'associer à une croisade contre les Turcs, et, dans ce but, de faire la paix avec l'Angleterre quand il en serait requis par le Pape[22]. L'ambassadeur avait même annoncé que des démarches avaient déjà été faites auprès du roi d'Angleterre[23]. Charles VII n'ignorait pas qu'une autre ambassade bourguignonne s'était rendue à Rome pour solliciter le Pape de prendre en main l'affaire de la pacification ; c'en était assez pour exciter sa susceptibilité. Que se proposait Philippe le Bon ? Était-il, bien sincère dans le désir qu'il témoignait de s'opposer aux démonstrations menaçantes des infidèles ? Pourquoi cet empressement à solliciter à la fois Henri VI et Charles VII de se réconcilier et le Pape de s'interposer ? Le duc de Bourgogne ne cherchait-il pas, au moyen de cette intervention du Saint-Siège, à prévenir une attaque contre Calais, qui semblait alors imminente, et qui lui apparaissait comme une menace pour sa propre sécurité ?

Eu tout cas, la conclusion de la paix entre la France et l'Angleterre était une difficile entreprise. Au lendemain de la conquête de la Guyenne, alors que les Français étaient dans l'ivresse du triomphe et les Anglais sous le coup de la double humiliation qu'ils venaient de subir et de la perte de leurs Conquêtes, elle présentait évidemment fort peu de chance de succès. Sur quelles bases aurait-elle pu s'opérer ? Loin de renoncer à aucun de ses avantages, Charles VII avait l'intention bien arrêtée de les compléter par l'occupation de Calais : les dépêches de l'ambassadeur florentin Acciajuoli, que nous avons citées plus haut, ne laissent aucun doute sur ce point ; elles nous montrent que, si la paix devait se conclure avec l'Angleterre, c'était à la condition qu'elle abandonnerait Calais, et qu'on estimait que le gouvernement anglais subirait cette condition. Mais pouvait-on espérer, au cas où l'assentiment de Henri VI serait acquis, que son peuple tolérerait que la paix frit faite au prix de tels sacrifices ? L'Angleterre était humiliée, indignée, frémissante ; elle songeait bien plus à prendre sa revanche contre le vainqueur qu'à accueillir des ouvertures de paix. C'était donc une entreprise bien chimérique que celle d'un accommodement ; c'était se mettre au travers de projets sérieusement conçus, de préparatifs militaires activement poursuivis, et que Charles VII ne paraissait nullement disposé à abandonner.

Tel était l'état des choses au moment où le cardinal d'Estouteville arrivait en France.

II avait, au passage, visité le duc de Milan, avec lequel il entretenait d'affectueuses relations, et aussi le duc de Savoie et le Dauphin. Nous avons deux lettres du cardinal à Sforza, en date des 1°* et 27 décembre. Dans la première, il annonçait le desSein de se rendre à bref délai vers le Roi et de s'entendre avec l'ambassadeur de Florence pour agir conformément aux intérêts du duc ; dans la seconde, il lui disait qu'après avoir de nouveau conféré avec le duc de Savoie et le Dauphin il était revenu à Lyon, où il avait été reçu honorablement, comme légat du Pape, par ordre du Roi très chrétien, lequel avait député vers lui plusieurs prélats et seigneurs pour l'accompagner à travers le royaume, et qu'il allait partir pour joindre le Roi à Tours[24].

Que s'était-il passé dans l'intervalle ? En recevant la réponse faite à son envoyé, le cardinal avait écrit de nouveau à Charles VII. La lettre, tout entière de sa main, était datée de Castel Saint-Jehan en Lombardie (Castel-San-Giovanni), le 23 octobre. Apprenant que sa nomination comme légat avait été accueillie avec défaveur, le cardinal en témoignait son profond chagrin. S'il eût pu savoir que la chose déplaisait au Roi, il se serait efforcé de s'excuser auprès du Pape. Mais il n'avait pas seulement mission de négocier la paix, négociation où il avait ordre de prendre pour guide les volontés du Roi ; il avait à traiter plusieurs autres grandes matières et charges, et il était persuadé que, quand il plairait au Roi d'en entendre l'exposé, jamais Roi n'aurait été si content d'un Pape que le Roi ne le serait du Pape actuel, et le Roi verrait clairement que le cardinal était un loyal sujet et serviteur. Et vous jure sur ma foi, ajoutait-il, que si j'eusse su que cette chose ne vous eût été agréable avant mon partement de Rome comme je rai su plus de quinze jours après mon partement, jamais je n'eusse entrepris mon voyage, dusse-je perdre tout mon état et honneur envers notre Saint Père et le Saint-Siège apostolique, car je vous désire obéïr comme à mon souverain seigneur et crains déplaire de tout mon cœur. Le cardinal envoyait un de ses serviteurs pour supplier le Roi de désigner un lieu où il pût- l'entretenir des matières que le Pape l'avait Chargé de lui exposer, bien certain que, quand il l'aurait ouï, il serait très satisfait. Et pour l'honneur de Dieu et du Saint-Siège apostolique, disait-il, ne faites pas ce deshonneur à notre. Saint Père et à moi, votre très obéissant sujet et serviteur, de ne moi vouloir recevoir comme légat en votre royaume, considéré, que, en temps passé, avez reçu d'autres cardinaux connue légats en votre royaume, et qui n'étoient pas vos sujets Comme moi ; car ce seroit un grand deshonneur au Pape et à 'nui une confusion perpétuelle en cour de Rome et dans toute l'Italie ; et là où j'ai quelque peu de réputation, en Italie et cour de Rome, de quoi je vous puis mieux servir, je la perdrois en tout si cette confusion me souffriez être faite, et serois de tout infamé et vitupéré ; et mieux me vaudroit être mort, car tous les Italiens et courtisans diroient que je serois en votre male grâce, et ne seroit homme qui fit, compte de moi. Et pour Dieu, mon souverain seigneur, ne veuillez pas mettre en totale confusion et despération votre loyal sujet et serviteur, qui tout le temps de sa vie vous a servi loyalement à son pouvoir, autant que cardinal qui fut en cour passé vingt ans. J'en appelle en témoins tous ceux de votre royaume qui ont été à Rome en l'an jubilé naguère passé ; et se daigne votre grande clémence et miséricorde soi incliner à me pardonner, moi qui ai failli vous faire grand service et désirant trop ardemment vous voir sur tous les princes et seigneurs du monde. Le cardinal terminait en déclarant que si, quand le Roi lui aurait donné audience, il voulait qu'il s'en retournât vers le Pape, il serait prêt à obéir à ses commandements comme son vrai sujet et serviteur[25].

Voyant que le cardinal était déjà en route, et ne pouvant empêcher sa venue, Charles VII s'était décidé à le recevoir ; il faut dire qu'aux instances du cardinal s'était jointe une démarche du Pape, qui avait envoyé au Roi un ambassadeur[26]. L'évêque de Clermont et l'évêque de Tulle eurent mission de se rendre à Lyon au-devant du légat du Saint Siège[27], et un écuyer d'écurie du Roi, Rogerin Blosset, alla leur porter les instructions royales[28]. Les deux prélats arrivèrent le 29 décembre à Lyon, et se mirent aussitôt en relation avec le cardinal d'Estouteville. Nous avons trouvé monseigneur le cardinal, écrivaient-ils au Roi en date du 30 décembre, bien disposé et de bon vouloir à vous obéir et faire tout ce que vous plaira lui ordonner ; et nous avons besogné avec lui sur la matière de point en point, selon la forme et teneur de nos instructions. Blosset, en retournant vers le Roi, était chargé de lui communiquer tous les documents relatifs aux négociations que le cardinal se proposait d'entamer, et de rapporter aux deux prélats de nouvelles instructions[29].

Sur ces entrefaites, Guillaume d'Étampes, évêque nommé de Montauban, revint de Rome. Il était porteur d'une lettre du Pape, et chargé par celui-ci d'exposer de sa part certaines choses au Roi. Charles VII répondit à Nicolas V qu'il différait sa réponse jusqu'au moment où il aurait conféré avec le cardinal d'Estouteville[30].

Le cardinal arriva à Tours au mois de février 1452[31]. Il commença par exposer au Roi la requête du Souverain Pontife, savoir qu'il voulût bien faire la paix avec le roi d'Angleterre. La guerre qui se poursuivait entre les deux princes portait un grand préjudice à la foi catholique, et en porterait on plus redoutable encore si, dans un bref délai, un bon accord ne s'établissait entre les deux royaumes : car on voyait de jour en jour les mécréants faire des entreprises contre les chrétiens et conquérir de nouveaux pays[32].

Le Roi examina la requête, et fit répondre qu'il avait toujours voulu et voulait encore la paix, afin d'obvier à l'effusion du sang chrétien et de procurer le bien de la chose publique ; il était prêt à tendre à ce but par toutes bonnes voies ; il s'était Mis en son devoir à diverses reprises pour y parvenir, et se rendrait volontiers aux justes raisons qu'on invoquerait à ce sujet ; il était également disposé à s'employer contre les mécréants en tout ce qui lui serait possible, soit secours d'hommes, soit subvention financière, et à consacrer une partie de ses ressources à repousser et chasser les Sarrasins[33].

Telle fut, en substance, d'après Jean Chartier, la réponse donnée au cardinal. Le chroniqueur officiel ajoute que l'archevêque de Ravenne[34], à défaut, sans doute, de Nicolas de Cusa, retenu en Allemagne, se rendit en Angleterre pour adresser la même requête à Henri VI, et solliciter son concours contre les infidèles. Mais l'envoyé du Saint-Siège ne reçut, parait-il, d'autre réponse que la suivante : Quand nous aurons autant conquis de pays sur le roi de France que le roi de France en a conquis sur nous, il sera temps alors de parler de cette matière[35].

Si la mission du cardinal d'Estouteville se fût bornée à ce qui en était le but ostensible, elle n'avait plus de raison d'être : l'échec était complet. Mais cette mission était loin d'être remplie : elle avait pour but véritable d'amener Charles VII à consentir à l'abrogation de la Pragmatique sanction. Malheureusement les détails sur les négociations entamées à ce sujet nous manquent absolument. Essayons toutefois de réunir les rares données qu'on possède. Il nous faut d'abord examiner ce qu'était devenue l'affaire de la Pragmatique depuis le point où nous l'avons laissée[36].

 

La question des rapports de l'Église et de l'État n'avait cessé d'être agitée entre Eugène IV et Charles VII. Le pape avait fait d'incessants efforts pour obtenir l'annulation d'un acte qu'il regardait avec raison comme attentatoire à la dignité et aux droits du Saint-Siège[37]. A l'époque où Charles VII prit en main l'affaire du schisme, les relations entre Rome et la cour de France étaient assez tendues. Nous en avons pour preuve ce passage des instructions données par Charles VII à l'archevêque d'Aix, au mois de décembre 1446 : Item soit remontré à notre Saint Père la grande foule et deshonneur qui, depuis peu de temps en ça, a été faite au Roi et à sa couronne en cour de Rome en plusieurs manières, ce que bonnement le Roi ne pourroit plus tolérer ni dissimuler. Et premièrement au regard des églises cathédrales, desquelles le Roi est protecteur et duquel la temporalité d'icelles est tenu et non d'autres, sans être sujette ou tenue d'aucun duc ou comte, ou autre seigneur du royaume de France. Et, par ce moyen, les bulles que notre Saint Père a accoutumé d'envoyer après ce que aucun est promu à archevêché ou évêché se doivent adresser au Roi et non à autre, comme à celui à qui en appartient la délivrance de la temporalité, et auquel l'on doit faire les foi et hommage ou serment de fidélité de la temporalité d'icelle église et non à autre. Toutefois, puis aucun temps en ça, par le moyen d'aucuns étant en cour de Rome, notre Saint Père a fait adresser ses bulles et ses lettres de la promotion d'archevêchés ou évêchés à aucuns ducs ou autres seigneurs sujets du Roi, ce qui ne se doit faire, et qui est à la grande foule et deshonneur de la couronne, et aussi à la grande charge des églises cathédrales, car par ce sembleroit que la temporalité fût sujette d'autre que du Roi, qui ne fut oncques vu en ce royaume ni autre part.

Souvent le Pape faisait directement les promotions aux sièges vacants sans consulter le Roi. Charles VII avait fait entendre à ce sujet de vives représentations. L'archevêque d'Aix était chargé de demander au Pape que dorénavant il veuille pourvoir aux églises cathédrales de ce royaume et du Dauphiné de Personnes plaisantes et agréables au Roi et à lui féables, pour les inconvénients qui en pourroient advenir, et ne pas lui faire Pis que notre Saint Père fait aux rois d'Espagne et d'Angleterre, et aussi en aucuns lieux de ce royaume, auxquels lieux il ne pourvoit d'archevêchés et d'évêchés sinon au bon plaisir des rois et autres princes..... Et pour ce soit requis à notre Saint Père que, quand aucun archevêché ou évêché vacquera en ce royaume à. sa disposition, il lui plaise d'attendre l'avis et requête du Roi, afin d'y pourvoir de personne à lui plaisant et féable, car il y a trop grand intérêt[38].

Nous ignorons quelle suite fut donnée à ces réclamations. La mort d'Eugène IV, survenue à ce moment ; les négociations entamées pour la pacification de l'Église empêchèrent sans doute qu'elles fussent l'objet d'un sérieux examen. Mais il n'est pas douteux que, lors de la grande ambassade envoyée, en juillet 1448, pour faire obédience au nouveau pape, et dans les autres échanges d'ambassades entre la cour de Rome et la France, les points en litige n'aient été agités. Nous savons même qu'en cette année un ambassadeur fut chargé de demander formellement au Roi l'abrogation de la Pragmatique[39]. Mais l'intervention de Charles VII dans l'affaire du schisme, le rôle prépondérant qu'il y joua, la nécessité de ménager un prince qui rendait à l'Église un service aussi signalé, durent imposer à Nicolas V une certaine réserve dans les revendications au sujet de la Pragmatique.

Charles VII n'avait cessé de s'appuyer sur le clergé de son royaume et de le convoquer à des réunions solennelles. C'est pour se conformer à ses vœux qu'il avait édicté la fameuse loi connue sous le nom de Pragmatique sanction. Il se trouvait en présence de deux courants contraires : d'un côté, la cour de Rome ne cessait de réclamer contre la Pragmatique sanction et d'en demander l'abrogation ; de l'autre, l'immense majorité du corps épiscopal proclamait, avec l'archevêque de Reims, Jean Jouvenel des Ursins, la Pragmatique une loi juste et sainte[40]. Tout en maintenant l'édit de Bourges, Charles VII ne se refusait pas à accueillir les représentations du Saint-Siège. Certains prélats faisaient même un grief au Roi de son attitude à l'égard de la cour de Rome, et lui reprochaient de ne point faire observer assez strictement la Pragmatique. Ou allait jusqu'à dire qu'il la violait : Vous la rompez, disait Jean Jouvenel dans son épître Verba mea auribus, en écrivant à notre Saint Père, en promettant d'envoyer argent largement, qui est très mal fait ; et ceux qui vous le conseillent, voire qui ne vous en avertissent, font mal[41].

C'est pour répondre au désir d'Eugène IV que le Roi avait décidé, en 1444, la réunion d'une assemblée du clergé[42]. Elle devait se tenir à Bourges, au mois de mai[43]. Différée jusqu'au mois de septembre[44], elle paraît avoir été tenue[45] ; mais elle n'eut aucune importance. Nous voyons que, dès l'année suivante, l'Université demandait au Roi de provoquer la réunion à Paris d'une autre assemblée de prélats de son royaume[46].

A cette même époque un nouvel envoyé du Saint-Siège vint réclamer l'abrogation de la Pragmatique[47]. Nicolas V fit renouveler cette requête peu de temps après son élévation au pontificat[48]. Des pourparlers furent entamés entre l'évêque de Minturnes, ambassadeur du pape, et le Conseil royal ; des articles préliminaires furent même rédigés[49]. Sur la demande du légat de Nicolas V[50], une assemblée du clergé fut convoquée à Rouen aussitôt après l'occupation de cette ville (novembre 1449) ; elle devait se tenir le 31 décembre[51]. Son objet spécial était de soumettre au clergé de France les difficultés survenues entre le Saint-Siège et la Couronne relativement à la Pragmatique[52]. L'assemblée de Rouen, qui siégea durant la seconde quinzaine de janvier 1450[53], paraît avoir été peu nombreuse. Absorbé par les soins de sa campagne, le Roi ne put y prendre part, et l'on n'aboutit à aucune conclusion[54].

Peu après, Charles VII adressa aux prélats et gens d'église une nouvelle convocation pour une assemblée qui devait se tenir à Chartres le 15 mai 1450[55]. Il fit part de ses intentions au duc de Bourgogne[56] et au Dauphin. Le premier prit des mesures pour se faire représenter à Chartres[57]. Le second, à la date du 12 avril, convoqua les prélats du Dauphiné pour s'entendre sur l'objet de la réunion et nommer des députés : Nous avons reçu, écrivait-il, certaines lettres de Monseigneur par lesquelles nous écrit que faisions assembler les prélats et clergé de notre pays pour envoyer à certaine journée prise au lieu de Chartres, au quinzième jour du mois de mai prochain, touchant le fait de l'Eglise... Et sommes avertis que c'est pour la cassation et rupture de la Pragmatique sanction, qui est la chose qui touche grandement nous, vous, et tout le bien du pays[58].

La réunion eut lieu au jour fixé, sous la présidence de Jacques Jouvenel des Ursins, évêque de Poitiers et patriarche d'Antioche. Parmi les prélats qui y assistèrent, on cite Jean Jouvenel des Ursins, archevêque de Reims, Pierre Beschebien, évêque de Chartres, et Thomas Basin, évêque de Lisieux ; comme à Rouen, le Pape fut représenté par l'évêque de Minturnes[59]. Le procès-verbal de la première séance fut rédigé par Miles d'Illiers, doyen de Chartres[60].

Que se passa-t-il à Chartres ? Les documents qui pourraient nous éclairer à cet égard ont disparu[61]. Il n'est pas douteux que la question en litige fut posée, mais non tranchée ; le Roi, d'ailleurs, était absent[62].

Nous n'avons pour nous renseigner que quelques passages d'une épître de Jean Jouvenel où il est fait allusion à cette assemblée. Il ne sera pas inutile de les reproduire :

Et est vray que par vostre ordonnance les prelats de vostre royaume ont esté assemblés à Rouen et à Chartres pour le fait de la Pragmatique sanction, et cuidoient que y deussiés estre ; et à Chartres avoient en leur ymaginacion que vous ou monseigneur vostre chanceillier dussiés estre presens. Et y eut par aucuns des Clameurs et plaintes faictes, qui furent baillées par escript à moy mesure, car la chose me touchoit fort à cause de mon esglise, pour les mettre par escript. Et mesmement se plaingnoient et complaignoient, car les esglises où vous avez droit de regale, quant elles vacquent en regale, vous donnés les proffis de la regale, c'est assavoir du temporel de l'esglise, à aucuns. particuliers, et, se ne les donnés, si les prennent-ils, ou vos officiers, ce qu'ilz en pevent avoir sans riens mettre en repparacions[63].

Il parait que, sur la question qui devait être l'objet principal du débat, les avis furent partagés : certains prélats allèrent jusqu'à mettre en doute le droit du Roi à édicter un acte tel que la Pragmatique. L'archevêque nous révèle le fait en ces termes :

Je suis prelat, comme indigne, et ne vouldroye pas dire chose qui fut ou deshonneur de nostre Saint Père. De toutes les personnes ecclesiastiques, que il n'y ait abus, il en y a largement. Et, comme chef et la première personne ecclesiatique[64], appelés vos prelas et ceulx de votre saut, et y povez pourvoir. Et pour ce que, à Chartres, aucuns en vouldront faire doubte, je me levé et dis que, l'an mil IIIc IIIIxx et XVIII, la matière fut haultement traitée, et conclut que vous povès presider au conseil de vostre esglise de France, et, par leur advis et de ceulx de vostre sang et conseil, conclurre au fait des libertez et franchises de vostre esglise et en faire loy, ordonnance et pragmatique sanction, et icelle faire garder et observer par toutes voyes deues et raisonnables[65].

L'assemblée de Chartres ne donna satisfaction ni au Pape, qui demandait l'abrogation de la Pragmatique, ni aux prélats du royaume qui, tout en sollicitant la réforme de certains abus, réclamaient la stricte exécution de l'édit de 1438. C'est ainsi que, dès 1445, l'évêque Jean Jouvenel avait laissé percer son mécontentement. Dans son Discours sur la charge de chancelier, il disait : Une bonne conclusion une fois prinse, jamais ne se doit muer ou changer ; et mesmement quant elle concerne le bien publique et utilité du royaume ; ne le Roy n'en devoit pas du tout croire les gens d'esglise, et devoit appeller gens laicz clers ad ce congnoissans, car par le moyen des collations que entreprend le Pape et des procès qui vont à court de. Romme, tout l'or de ce royaume, qui est le vray et pur sang d'icelluy, s'en pert, et est comme en une manière de exinanicion d'un corps humain évacué de sang auquel on tient la chandelle en la main[66].

C'est seulement en 1452 que, dans une nouvelle assemblée tenue en présence du cardinal d'Estouteville, les points en litige furent remis en discussion, et cette fois, avec une solennité inaccoutumée.

Le cardinal n'avait point tardé à reconquérir les bonnes grâces du Roi qui, pendant son séjour à Tours, lui fit cadeau d'une haquenée[67]. De Tours, il se rendit à Rouen où, d'accord avec Charles VII, il prit en main l'affaire de la révision du procès de Jeanne d'Arc, sur laquelle nous reviendrons ultérieurement : du 2 au 6 mai, il procéda à l'audition de nombreux témoins. Le 11 mai, il était à Paris[68], d'où il rendit compte au Roi de ce qu'il avait fait à Rouen[69]. Là, le cardinal s'occupa d'un des objets de sa mission : la réforme de l'Université de Paris.

Dès 1447, on s'était occupé de cette matière, et des commissaires avaient été désignés à cet effet. A l'arrivée du cardinal, Charles VII nomma une commission composée de l'évêque de Paris ; l'évêque de Meaux ; Arnaud de Marle, président au Parlement ; Georges Havart, maître des requêtes ; Guillaume Cottin, président aux enquêtes ; Miles d'Illiers, doyen de Chartres et conseiller au Parlement ; Robert Ciboule, chancelier de l'église cathédrale de Paris, et Jean Simon, avocat du Roi, pour travailler à la réforme de concert avec le légat pontifical et s'occuper spécialement des privilèges royaux[70]. Le cardinal se fit représenter les anciens statuts, en particulier ceux rédigés en 1366 par les cardinaux de Montaigu et de Saint-Marc. Après un examen approfondi, il promulgua, à la date du ter juin, le nouveau code qui devait régir l'Université, et qui touchait, Pour chacune des facultés, à tous les points de discipline, de Morale et d'enseignement[71].

Pendant son séjour à Paris, le cardinal d'Estouteville ne s'occupa point exclusivement de la réforme de l'Université. Le 31 mai, il donna des lettres autorisant Marguerite d'Orléans, veuve de Richard de Bretagne et ses filles, à sortir quand elles le voudraient du monastère de Longchamps, où elles s'étaient retirées[72]. De Paris il se rendit à Orléans, où, le 9 juin, il accorda des indulgences pour la célébration de la fête annuelle du 8 mai en l'honneur de Jeanne d'Arc[73].

L'assemblée du clergé qui devait se tenir à Bourges, avait été fixée d'abord au 1er mai ; elle fut ensuite renvoyée au mois de juin. Avant de s'y rendre, le cardinal désirait vivement avoir un nouvel entretien avec le Roi : il écrivit à celui-ci pour le solliciter. Charles VII lui envoya l'archevêque de Narbonne, chargé de conférer avec lui. Ce prélat joignit le cardinal à Chartres vers le 1er juin[74], et s'empressa de rendre compte au Roi de sa mission. Le cardinal avait résolu d'aller trouver le Roi, si c'était son bon plaisir, avant l'assemblée de Bourges, dans le dessein de connaître son sentiment sur le fait de la modération de la Pragmatique, car il avait le ferme vouloir de se gouverner et conduire conformément à son bon plaisir ; il avait vu plusieurs des prélats qui devaient assister à l'assemblée, et, dans les conversations échangées avec eux, il avait constaté que la plupart ne voulaient avoir aucun souverain, fût-ce le Pape ou un autre ; si donc l'initiative en cette matière et la modération ne venaient du Roi, il lui serait difficile de prendre avec eux une conclusion qui fût à l'honneur du Saint-Père et au sien propre, et il y aurait de grands délais[75]. Le cardinal avait su par le Pape que des gens dignes de foi l'avaient informé des intentions des Anglais : ceux-ci étaient décidés à ne point entendre à la matière de la paix, pour laquelle il avait eu sa charge principale ; le cardinal désirait donc que, les autres affaires une fois expédiées, il pût retourner en Italie, car il ne voulait pas prolonger davantage son absence. Le cardinal avait su également qu'on avait dit au Roi qu'il avait excédé les termes des lettres remises par lui aux Montils ; il protestait à ce sujet, car, disait-il, il ne serait Peint trouvé qu'il eût rien fait en dehors de ce qu'il avait promis. En outre, il avait mission d'entretenir le Roi du fait de l'argentier.

Charles VII était alors au château de Chissay, occupé à l'examen de la procédure contre Jacques Cœur. L'archevêque de Narbonne fit observer au cardinal que, vu le petit logis où se trouvait le Roi, la présence du duc d'Alençon et de plusieurs seigneurs qui occupaient tout le château, il serait difficile qu'il pat être reçu. D'ailleurs le Roi se proposait de se rendre très prochainement à Bourges. Chercher à le joindre auparavant serait retarder encore la réunion de l'assemblée, car le Conseil ne pourrait quitter Montrichard tant que le cardinal serait à la Cour, et les prélats mandés à Bourges, sachant que Personne n'était encore arrivé, retarderaient leur départ.

Le cardinal insista cependant pour voir le Roi, ne fût-ce que l'espace d'une soirée ; il lui semblait que sa venue profiterait beaucoup à sa matière et à son fait. Depuis son départ, on avait retardé la date de l'assemblée et fait certaines mutations. Durant son séjour à Paris, plusieurs parlaient de l'affaire en termes fort différents ; il en aurait volontiers avisé le Roi. Finalement, par déférence pour les désirs de ce prince, il se décida à poursuivre sa route : il déclara qu'il passerait par Orléans, où il s'arrêterait le jour du Saint-Sacrement ; de là, s'il n'avait aucune nouvelle du Roi, il gagnerait Bourges.

Le cardinal était dans cette ville le 16 juin[76]. Dans les premiers jours de juillet, Charles VII arriva au château de Mehun : il put donc donner satisfaction au cardinal et s'entretenir avec lui avant la réunion. A ce moment, le Roi venait justement de faire partir pour Rome un de ses serviteurs, porteur d'un message adressé au Pape[77].

Le cardinal — on a pu le voir par la lettre de l'archevêque de Narbonne — était fort préoccupé des dispositions qui se manifestaient au sein du clergé de France. Si de rares prélats se montraient disposés à seconder les vues du Saint-Siège, l'immense majorité était hostile à toute pensée de révocation, et même de mutation de la Pragmatique. Voici ce que nous pouvons lire à ce sujet dans l'épître déjà citée de l'archevêque de Reims :

Nostre Saint Père Eugène, et aussi Notre Saint Père Nicolas, qui est de present, ont envoyé devers vous pour faire de vostre consentement aucunes mutations ; sur lesquelles requestes avez par diverses foys assemblé vos prelats, et y a eu de diverses ymaginations et oppinions, et riens n'a esté ne mué ne conclud.

On dit que de present à monseigneur le cardinal d'Estouteville avez fait response que de reschef assemblerez vos prelats sur ceste matière ; mais je ne puis pas bien congnoistre quelle necessité il en est, ne n'a espoir[78] esté ; car tous vos prelats, comme vos humbles chappellains, sont prez et appareilliés, et ainsi l'ont dit et declairé à toutes leurs assemblées, de obeyr à Nostre Saint Père et à vous. Ayez seulement cinq ou six conseilliers bien prins, non ayans enffans à pourveoir, et ne prenés pas ceulx qui en ont eu de pourveus, ou de leurs amis ; car il n'est doubte que ilz seroient trop favorables. Et se bon vous semble demandez par serment à part à aucuns de vos prelats qui leur en semble, et que on considère la povreté et vuidenge d'argent de vostre Royaume ; sur quoy aussi elle est fondée ; et puis en faicles ce que bon vous semblera. Et en ce vous dies les parolles dictes ad ce vaillant empereur Josué : Quecumque volueris faciemus obediemus et litai. Mais il y a plus. Je sauroye voulentiers à ceulx qui sont d'oppinion de assembler les prelats se il est, en la voulenté et disposition des prelats de la muer. On dit que l'imagination de vostre conseil si est que ilz la vous firent faire, et que sans eulx vous ne la devez point muer ; ou ilz firent mal de le vous conseillier, ou ilz firent bien. Se ilz firent mal, pourquoy de la deliberation de ceulx de vostre sang et conseil en faictes vous une Pragmatique sanction ? Se la chose fut justement et sainctement faicte, pourquoy fait on l'assemblée sinon pour la muer ?[79]

Non seulement l'archevêque de Reims estimait que l'assemblée ne devait point être tenue, mais il pensait que, si des réformes — dont il ne méconnaissait point la nécessité — devaient être opérées, c'était au Roi à en prendre l'initiative. Selon ce prélat, le Roi devait mettre le Pape en demeure de réunir en concile général, ainsi que, comme il le disait, Nicolas V s'y était engagé. Le Roi s'y ferait représenter et tiendrait la main à l'exécution des résolutions prises. Au besoin même, on se passerait du Pape. Voici, en effet, ce qu'on lit dans la même Épître :

Et croy que, se il vous plaisoit de vous adviser et reformer les abbus qui sont en vostre royaume, que vous feriez bien que, par vostre moyen, en ung bon Consille general, remesde y feust mis. Et se Nostre Saint Père ne vouloit convoquer le Consille pour y reruedier et pourveoir, que, aprez ce que auriez reinedié aux abbus qui touchent les juridiction et pollice temporelles, que y devriez Par bon conseil y mettre remesde se cause y trouvez. Et qui vouldroit cerchier les escriptures anciennes, les deffaultes des prebtres ont esté causes en divers temps que les princes temporels, voire aucunesfoys les tirans, ont fait sur l'Esglise et aultre peuple de Merveilleux exploix. Et se ou me dit pourquoy je ne dy aussi bien que on ait recours au Pape pour reformer telz abbus, car c'est à. luy affaire ; et ne scay que faire de moy repentir d'avoir mis en escript ce quo dessus est dit ; toutevoye il n'y a riens que je n'aye trouvé en escript ; et ne vouldroye pas dire que en Nostre Saint Père ne ès cardinaulx, ne aultres estans en court de Romme, les choses dessus dictes ayant lieu[80].

Quel était le sentiment de Jean Jouvenel sur la question qui devait être résolue à Bourges ? Le passage suivant est fort instructif sous ce rapport :

Et encores y a il une aulire chose forte à considerer, c'est assavoir que c'est du contenu de la Pragmatique sanction. C'est consentir que les status, ordonnances, constitutions et loys des sains consilles generaulx des Saints Pères et de vos predecesseurs soient gardés et observez ; ont puissance vous ne les prelas de vostre royaume les immuer ou innover, ou conseillier effectuelment chose qui les doye muer ou interpreter ? je croy que non. Et combien que ce soit les decrès du conseil de Basie, toutevoye ceux qui estoient à Basie ne les ont pas fait de nouvel ; ce sont les anciens que ilz ont ordonnez estre gardés et observez ; et se aucune chose y a esté muée, ce a esté plus les adoulcir que aultrement, et ce qui par eulx fut fait fut à paine ratiffié et emologué par Nostre Saint Père Eugène. Et si dit on que Nostre Saint Père Nicolas, qui au jour d'uy est, a dit plainement que il ne luy en chault. Et tout ce qu'il fait faire ses diligences de la muer ou changer ce sont aucuns aspoir cardinaulx et aultres de court de Romme qui ne ont regard que à leur singulier proffit pour mener les grans estas et bobans desplaisans à Dieu et au monde... Et se on me disoit que ès assemblées où j'ay esté mon oppinion estoit, en effect, que il la valoit mieux muer, bien est vray que j'ay dit que de deux maulx le mendre est à eslire, et que c'est mains mal, tout consideré, de la muer et changer selon les articles pourparlées entre les ambaxadeurs du Pape et de vostre conseil, que d'en user comme on fait, car la forme et manière d'en user estoit inciville et desraisonnable, de present en partie la chose cesse ; et ne faisoient pas les prelas, au moins aucuns, leur devoir selon le contenu d'icelle, mesmement au regard de conferer les benefices. Et croy en tout bon jugement que il fault practiquer la regle de droit : Nichil est enim tam naturale unumquoque dissolvi quam eo ligamine quod ligatum est. C'est assavoir que la response du Roy devroit estre que Nostre Saint Père fist consille general, ainsi qu'il l'a promis, comme l'en dit ; et que le Roy Y envoieroit, et ce qui seroit deliberé et conclud le Roy tendroit ; et espoir ce seroit ung grant bien ; car le Pape par ce moyen se esmonveroit plus test à la tenir[81].

C'est dans le courant du mois de juillet que s'ouvrit l'assemblée de Bourges, la plus nombreuse et la plus solennelle de toutes celles qui aient été tenues sous le règne de Charles VII, car, indépendamment de la présence d'un légat du Saint-Siège, elle comptait des représentants des provinces récemment soumises à la domination royale. A l'assemblée de 1438, on n'avait pu convoquer les prélats et gens d'église de la Normandie et de la Guyenne : cette fois, la France entière était rassemblée autour du Roi et du légat[82]. Avec les membres de l'épiscopat et les délégués des chapitres et universités[83], Charles VII avait convoqué des docteurs en théologie[84] et des conseillers du Parlement[85]. Nicolas de Fribois, notaire et secrétaire du Roi, récemment entré dans le Conseil, tenait la plume.

Il serait du plus haut intérêt de connaître les discussions auxquelles se livrèrent les membres de l'assemblée et les délibérations prises. Par malheur, nous ne sommes guère mieux renseignés sur ce qui se passa à Bourges en 1452 que sur ce qui s'était passé à Chartres en 1450[86].

tin point d'une grande importance résulte néanmoins des rares données que nous possédons. C'est que, pour la première fois, on vit alors apparaître cette fameuse Pragmatique de saint Louis sur laquelle, jusque-là, l'histoire était restée muette. Voici ce qu'on lit dans un mémoire sur le rétablissement de la Pragmatique de 1438, présenté par Thomas Basin à Louis XI à la fin de 1464 :

Item, et n'est pas chose nouvelle que les Boys et princes catholiques aient donné remèdes et provisions contre telles et semblables entreprises faictes par court de Romme contre les decrez des sains Pères et les libertez et droitures tant de l'Église gallicane que d'autres. Car ainsi bnt fait voz très nobles et dignes progeniteurs et antecesseurs, comme saint Loys en son temps, duquel j'ai veu l'ordonnance escripte et sellée en semblables matières, qui fut monstrée et exhibée aux conventions solennelles raides de l'Église gallicane à Chartres et à Bourges, par la convocacion de vostre feu père, de bonne memoire[87].

D'un autre côté, on lit dans l'épître précitée de Jean Jouvenel des Ursins, adressée à Charles VII :

Et n'estes pas le premier Roy qui a fait telles choses : car qui bien voit l'histoire de Philippe le Conquerant, il ordonna ; si fist saint Loys, qui est saint et coroné, et fault dire qu'il fist très bien ; vostre père et aultres les ont approuvées[88].

Voilà donc deux prélats, défenseurs passionnés de la Pragmatique de 1438, qui, pour la première fois, invoquent la Pragmatique de saint Louis, et l'un d'eux va jusqu'à affirmer qu'il a VU L'ORDONNANCE ESCRIPTE ET SCELLÉE qui fut produite à Chartres et à Bourges.

Nous avons, en effet, une copie informe, sur papier, de la fameuse Pragmatique, d'une écriture du XVe siècle, n'ayant ni date, ni signature, avec ce titre : Coppia Pragmatice sanctionis sancti Ludovici Francorum regis, producte in congregatione Carnotensi anno Domini mill. CCCC quinquagesimo[89].

On lit dans un ancien inventaire de la Chambre des comptes : Copie extraicte en la Chambre des comptes à Molins et signée par Gilbert Gayet et Jean Regnart, secretaires de monseigneur le duc, des lettres par lesquelles Pape Martin octroya au Roy Philippe que aucun ne puisse proufferer sentence de interdit ou excomuniement ou royaume de France sans mandement du Saint Siège apostolique. Et auxdites lettres est attaché les pareilles lettres du Pape Gregoire ; et en outre y est attachié la copie de la Pragmatique sanction du Roy saint Loys, escripte en papier et produite en la congregalion faite à Chartres, et fut donnée ladite Pragmatique sanction à Paris au mois de mars l'an mil IIc LXVIII[90].

Ce n'est donc point en 1438, à la première assemblée de Bourges d'où sortit la Pragmatique de Charles VII, que, comme certains l'ont pensé, la Pragmatique de saint Louis fit son apparition : c'est au plus tôt en 1450. La Pragmatique, comme la remarqué justement M. Viollet[91], apparaît pour la première fois au XVe siècle ; elle n'est citée ni au XIIIe ni au XIVe siècle, et elle se montre fort à propos pour aider au succès de la Pragmatique de Charles VII. Ce fut le moyen suprême mis en avant par certains prélats, défenseurs ardents des libertés de l'Église gallicane, pour empêcher l'abrogation d'un acte attentatoire aux droits du Saint Siège, acte vivement attaqué dès lors par d'autres prélats qui n'avaient cessé de prendre auprès du Roi la défense de l'Église romaine[92].

Parmi ceux-ci, nous pouvons citer Guillaume de Montjoye, évêque de Béziers de 1424 à 1451, auteur d'un traité contre la Pragmatique[93] ; Bernard du Rozier, chanoine de Toulouse, référendaire des papes Eugène IV et Nicolas V, évêque de Bazar en 1447, de Montauban en 1451, archevêque de Toulouse en 1452[94] ; Pey Berland, le saint archevêque de Bordeaux, qui se fit représenter à l'assemblée de Bourges et donna le mandat formel de demander l'abrogation de la Pragmatique[95] ; Élie de Bourdeille, évêque de Périgueux en 1447, depuis archevêque de Tours et cardinal, qui figura parmi les opposants de l'assemblée de Bourges et se montra sous Louis XI l'un des prélats les plus hostiles à cet acte : on lui doit une dissertation contre la Pragmatique[96] ; enfin Richard Olivier, l'official de la cathédrale de Rouen dont le rôle avait été si considérable lors de l'occupation de cette ville, évêque de Coutances en 1453, cardinal en 1456, qui fut condamné en 1458 à une amende de dix mille livres pour avoir attaqué publiquement la Pragmatique[97].

Ce fut, à coup sûr, un trait de génie de la part des défenseurs de l'acte de 1438 que d'avoir introduit dans le débat un document dont l'authenticité était, à la vérité, douteuse, mais que, en l'absence de tout moyen de contrôle, on n'hésita point à accepter.

Rien ne montre mieux le succès de la fraude que le mémoire où, quelques années plus tard, Élie de Bourdeille s'attachait à démontrer que la Pragmatique attribuée à saint Louis ne saurait être invoquée pour justifier la Pragmatique de 1438 ; qu'elle n'est point en contradiction avec l'esprit de piété et de dévouement au Siège apostolique qui animait le saint Roi ; que d'ailleurs les faiblesses des saints ne doivent pas, être imitées.

Le Parlement de Paris devait, à son tour, s'emparer de la Pragmatique de saint Louis et en affirmer l'existence. On lit dans les remontrances adressées à Louis XI au sujet de l'abrogation de la Pragmatique (faite par ce prince en date du 27 novembre 1461) : Item et entre les autres, l'an 1268, par le Roy saint Loys fut faite une ordonnance et edict general, par lequel il voulut et ordonna qu'on pourveust par election aux prelatures et dignitez electives, et par collations et presentations des collateurs et patrons aux benefices non electifs, et que toutes exactions et charges, importunitez de pecunes, imposées Ou à imposer par cour de Rome en ce royaume, cessassent, ne feussent aucunement levées ou exigées, comme ces choses et autres plus à plein apparent par les ordonnances du Roy saint Loys, qui fut de telle renommée que chacun sait... Lesdites ordonnances ont esté longtemps observées et gardées[98].

 

Les décisions de l'assemblée de Bourges furent communiquées au Pape par une ambassade à la tête de laquelle fut placé Jean Bernard, archevêque de Tours. Ce prélat partit Pour Rome au mois d'octobre, porteur d'une lettre du Roi, et Muni d'instructions et de pouvoirs[99]. Nous ne possédons point le texte de ces documents, mais nous avons la lettre écrite par Nicolas V au Roi, à la réception de l'ambassade ; elle nous permettra d'apprécier la nature des communications faites au Souverain Pontife et l'accueil qu'elles reçurent[100].

Le Pape avait entendu l'exposé fait par l'archevêque. Il comprenait que le royaume de France, épuisé par quarante années de guerre, ne pût plus soutenir des charges acceptées de grand cœur alors qu'il était en paix et florissant ; il n'aurait pas l'ingratitude d'oublier avec quel empressement, avec quelle sollicitude, au début de son pontificat, alors que le schisme divisait l'Église, le Roi lui avait rendu la paix et l'unité : ce serait un crime de ne point avoir sans cesse en mémoire le zèle et le dévouement avec lesquels le Roi avait contenu ceux qui voulaient jeter le trouble dans l'Église. Dieu a permis que, dans un temps où la charité d'un grand nombre est refroidie et où règne l'indignité, Sa Majesté, animée de la charité du Christ, soit placée à la tète du royaume très chrétien. Puisse-t-Il conserver pour son Église et pour le Saint-Siège la personne du Roi ! Puisse le pontife jouir longtemps de sa protection et l'avoir pour défenseur ! Le Pape ajoutait :

Tels sont les sentiments que nous avons exprimés au dit archevêque, en présence de nos vénérables frères les cardinaux de la Sainte Église Romaine, désirant non l'or et les richesses du royaume très chrétien de France, mais uniquement le salut des âmes. En vous envoyant, en effet, des ambassadeurs et des légats, ce n'était pas le désir d'acquérir des biens temporels qui nous animait ; ce n'était point la soif de posséder ces richesses terrestres et passagères : nous n'avions souci que des biens éternels, je veux dire du salut des âmes. Nous prions donc Votre Majesté de croire que, maintenant encore, nous n'avons d'autre but ni d'autre désir que de veiller au salut des âmes et de les retenir des voies de la perdition. Car, en ce qui concerne le salut, on ne peut apporter l'excuse de l'ignorance : là se vérifie surtout cette parole de l'apôtre : Si quelqu'un veut ignorer la loi divine, il sera lui-même ignoré et rejeté de Dieu. Aussi avons-nous supplié et, supplions-nous encore Votre Majesté de rejeter ce qu'elle ne peut conserver sans blesser sa conscience.

Que sert, en effet, à l'homme de gagner l'univers s'il vient à perdre son âme ? et quel bien pourrait-il recevoir en échange du bonheur éternel ? L'Église est une ; la foi qu'elle enseigne est une : c'est donc par les mômes lois qu'elle doit gouverner et régner dans le monde entier. Personne, quel que soit son pouvoir, ne peut se soustraire à ces lois s'il veut demeurer dans le bercail de Jésus-Christ, et être du nombre de ces brebis que le Christ a confiées à Pierre en lui disant : Pais mes agneaux. Que celui qui agira autrement sache bien qu'il encourra les peines que les saints canons et le droit ecclésiastique infligent à ceux qui transgressent les lois de l'Église. Penser le contraire équivaudrait à douter du Pouvoir apostolique.

Si nous ne vous parlions de la sorte, ou nous méconnaîtrions nos devoirs de successeur de Pierre, à qui sont confiées les brebis du Seigneur, ou nous semblerions exclure Votre Majesté du nombre de ces brebis, et nous ne pourrions apporter aucune excuse de notre silence au tribunal de ce Pontife Éternel qui jugera les vivants et les morts et dont nous sommes ici bas le représentant.

Nous avons développé plus au long au susdit archevêque ces Pensées que nous venons d'exprimer brièvement à Votre Majesté. Nous le chargeons de les lui commenter et de les lui expliquer Pleinement. Daigne Votre Majesté accorder une entière confiance à ce qu'il lui dira à ce sujet, et aussi à propos de certaines affaires Particulières que nous lui avons confiées, afin qu'il les rapporte à. Votre Sérénité, à laquelle nous recommandons très affectueusement notre personne, le Siège apostolique et l'Église toute entière[101].

Ainsi se termina la légation du cardinal d'Estouteville.

Elle n'avait réussi que sur un point secondaire : la réforme de l'Université. La paix avec l'Angleterre n'avait même pas été l'objet d'un préliminaire de négociations. La Pragmatique sanction n'avait pu être ni abrogée ni même modérée. Mais le rôle du cardinal comme pacificateur n'avait pas été Complètement stérile : avant de regagner l'Italie, il avait, on l'a vu, prévenu une rupture imminente entre le duc de Savoie et la France, et il s'était entremis dans la querelle du Dauphin avec son père. Enfin il avait pris en main une affaire qui tenait fort à cœur au Roi : la révision du procès de Jeanne d'Arc, et il allait appuyer auprès de la cour de Rome les instantes démarches de Charles VII en faveur de la réhabilitation de la Pucelle.

 

 

 



[1] Voir t. IV, chapitre VIII in fine.

[2] Lettre datée de Razilly, Ms. lat. 5414A, f. 71. A la suite se trouve une lettre du chancelier datée de Saint-Martin de Candes, le 23 août. Ces indications se rapportent évidemment à l'année 1446.

[3] Conosco lui essere più Italiano che Francese. Lettre de J. B. degli Artezani da Cremone, secrétaire du cardinal, à Cicho de Calabria, chancelier du duc de Milan, 16 juin 1452. Ms. ital. 1586, f. 133.

[4] Voir le P. Anselme, t. VIII, p. 90.

[5] Il est appelé le Cardinal d'Angers, et c'est avec ce titre qu'il signe des lettres en date des 1er et 21 décembre 1451.

[6] Voir plus haut, t. III, chapitre XIV.

[7] Gallia christiana, t. III, col. 1128 ; t. VI, col. 360, 455, 569 ; t. XI, col. 90, 528, 852 et Instr., col. 58 et 119.

[8] Voir Pastor, Histoire des Papes depuis la fin du moyen âge, trad. fr., t. II, p. 7.

[9] Le P. Anselme dit (t. VIII, p. 91), qu'il eut d'une dame romaine deux enfants naturels, qui s'établirent dans le royaume de Naples où ils laissèrent postérité.

[10] Voir Pastor, t. II, p. 72 et suivantes.

[11] Et cum Franciæ et Angliæ regna sint firmissima et fortissima prœsidia reipublicæ Christianæ, iis regnis laborantibus, consequens esse universam Christianitatem opportuna subventione carentem, cum sumo periculo etiam lidei catholicæ laborare, prœsertim diversis plagis mundi infidelibus contra christianos insurgentibus, ad pacificandum prœfatum regnum Francia convertimus omnes nostros sensus et spirites. Raynaldi, ann. 1451, § VII.

[12] On lit dans une dépéche envoyée de Rome à Sforza, à la date du 8 juillet : Gli ambasciadori del duca di Borgogna furono qui et esposono al santo Padre Panimo et desiderio del loro signore essere di l'are impresa dell'acquisto di terra sauta, supplicando alla Sua Beatitudine accio die questo posso seguire mandi suoi legati a tractare pacie tra Re di Francia et Re d'Ynghilterra. Ms. Ital. 1682, f. 106.

[13] Dum ad paciticandum ipsa rogna continuo reddemur attentione solliciti, dilectus filius nobilis vir Philippus, dux Burgundiæ, intensis desideriis affectans inter reges et principes ipsos aligna salubria et honesta pacis et amititia media reperiri, et rogna ipsa eorumque incolæ in pacis et quietis dulcedine conquiesrant, insignem ad nos ambassiatam destinavit per quam, inter cœtera nobis destinare curavit jam tempus, ut sperabat, adosse congruum et propitium ut inter eosdem reges et principes pacis et concordiæ fœdera tractarent, plurimumque opportunum et saluberrimurn existere. Bref du XVIII des Calendes de septembre, adressé à Nicolas de Cusa. Raynaldi, l. c.

[14] Bref du 13 août. Pastor, édit. allemande, t. I, p. 663. — Il ne semble pas que Nicolas de Cusa se soit rendu en Angleterre. Voir Pastor, édit. française, t. II, p. 98, note, 120 et suivantes, 124-125.

[15] Voir un mémoire adressé à Sforza, en date du 12 septembre 1451, qui se trouve dans l'Archivio Sforzesco (ms. ital. 1585, f. 223), et qui a été reproduit en partie par Buser (Die Besichungen der Mediceer su Frankreich, p. 372-374). On y lit (ms. ital. 1585, f. 223, v°) : Ha etiam il Papa ad presens a la voluntate soa, per il timore del concilio che se debe fars in brevi a Lione secondo la conventione mu la Sanctitate Soa facte ne la unione tractuta per mezanitate desso Re de Franza...

[16] Il est question de cette ambassade et du projet de Concile dans une lettre citée par Voigt (Enea Silvio, t. II, p. 19-20, note), d'après les archives de Kœnigsberg.

[17] Voir chapitre VI.

[18] Cela résulte de la lettre qui suit.

[19] Original, ms. lat. 9071, f. 32.

[20] Il faut noter que la lettre du cardinal porte : Du cardinal d'Estouteville. R. le XXVIIIe jour de septembre mil CCCCLI à Taillebourg ; et le document visé ici commence ainsi : Le XXVIe jour de septembre l'an CCCCLI, à Taillebourg, Me Guillaume Seguin apporta lettres au Roy de Mgr le cardinal d'Estouteville...

[21] Copie du temps, ms. fr. 1001, f. 42. — Il y avait parmi les manuscrits Joursanvault un document ainsi visé (n° 403) : Refus du Roi de recevoir Guillaume d'Estouteville comme légat du Pape. Le même n° contenait plusieurs lettres originales du cardinal d'Estouteville au Roi.

[22] Dans le discours adressé par l'évêque de Chalon au Roi, dans les premiers jours de Juin 1451, pour le déterminer à entreprendre une croisade, l'ambassadeur du duc de Bourgogne faisait luire la perspective d'une paix avec l'Angleterre, conclue par la médiation de son maître : Nous avons ordonnance de vous supplier qu'il vous plaise, en faveur de ladicte sainte matière et pour l'onneur et reverence de Jhesu Crist, encliner vostre très noble courage à tout bien de paix ou de longues treves avecques vostre adversaire le roy d'Angleterre toutes et quantes foiz que en serez prié et requis par nostre saint Pere ou ses legats de par luy. Ms. fr. 5737, f. 23.

[23] A nostre parlement de devers luy il avoit envoyé en Angleterre qiierir sauf conduit pour quarante ou cinquante chevaulx, affin de exhorter le roy de Angleterre de avoir advis sur le petit estat de la chretienté et qu'il se vueille dispéser à tout bien et bon moyen de paix ou de longues treves envers vous. Ms. fr. 5737, f. 23.

[24] Ms. italien 1585, f. 229 et 238. — Le cardinal était encore à Lyon le 17 janvier : ce jour-là le Conseil de ville lui fit offrir deux douzaines de torches de cire de deux livres et deux douzaines de boites de confitures. Archives mun. de Lyon, BB 5, f. 157 v°.

[25] Original au British Museum, Additional mamuscripts, 21512, f. 2.

[26] Dans une dépêche du 3 décembre, datée de Poitiers, Angelo Acciajuoli disait : Niente feci, per lo ambasciadore del Papa, die lo tonne tucto di occupato. Archives de Florence.

[27] Mgr l'evesque de Clermont, conseiller du Roy, IIIIc l. pour son voyage à Lyon au devant du cardinal d'Estouteville, qui venoit en ambaxade devers le Roy. — Mgr l'evesque de Tuelle, IIIc l., idem. Cabinet des titres, 685, f. 166 v°.

[28] Cela résulte de la lettre des deux évêques, citée ci-dessous.

[29] Original, ms. lat. 9071, n° 33. — On lit au verso : R. des evesques de Clermont et de Tuelle le Vme jour de janvier M CCCC LL. — Rogerin Blosset fut renvoyé de nouveau, en janvier, à Lyon, au-devant du cardinal (ms. 685, f. 158 v°).

[30] Lettre sans date, écrite à Tours. Ms. latin 5414A, f. 94 v°.

[31] Il venait de recevoir du pape un nouvel évêché en commende : le 26 janvier 1452, Nicolas V annonçait au clergé de Maurienne qu'il avait nommé le cardinal d'Estouteville évêque de Maurienne. Chartes du diocèse de Maurienne (Chambéry, 1864, in-8°), P. 272.

[32] Jean Chartier, t. II, p. 325.

[33] Jean Chartier, t. II, p. 325.

[34] C'est par erreur que Chartier dit (p. 326) : L'arcevesque de Ravenne, qui estoit de la maison et famille des Ursins de Rome. L'archevêque de Ravenne était alors Bartholomeo Roverella, et non Latino Orsini. Voir Ughelli, Italia sacra, t. II, p. 391.

[35] Chartier, t. II, p. 326.

[36] Voir tome III, chapitre XIII.

[37] Voir tome III, chap. XIV. Thomas Basin dit à ce propos (t. I, p. 319) : Ad eam vero abolendam... non paucis referri possit quoties legatos ad dictum regem Romanus pontifex destinavit, nunc cardinales, nunc inferiores prælatos.

[38] Memoire et instructions à monseigneur l'arcevesque d'Aix sur ce qu'il a à beioigner devers nostre Saint Pore pour les affaires du Roy, ainsi que plus amplement le Roy lui a dit et aussi lui a esté remonstré par les gens de son Conseil. Bibliothèque de l'Institut, Portefeuilles de Godefroy, 121, f. 36.

[39] Voir Du Boulay, Historia Universitatis Parisiensis, t. V, p. 543.

[40] Ms. fr. 2701, f. 100 v°.

[41] Ms. fr. 2701, f. 100 v°.

[42] Voir Ch. Jourdain, Index chronologicus, etc., p. 269.

[43] Quittance donnée le 26 mars 1444 pour avoir porté à tous les prélats de la sénéchaussée de Carcassonne des lettres du Roi les convoquant à Bourges pour le mois de mai. Fontanieu, 119-120.

[44] C'est ce qui résulte d'une délibération de l'Université de Paris en date du 21 août. Jourdain, Index chronologicus, etc., p. 269.

[45] Voir le Journal du prieur Maupoint, dans les Mémoires de la Société de l'histoire de Paris, t. IV, p. 34.

[46] Instructions aux ambassadeurs envoyés au Roi, dans Du Boulay, t. V, p. 535.

[47] Du Boulay, t. V, p. 533-534.

[48] Du Boulay, t. V, p. 543.

[49] Épitre de Jean Jouvenel, déjà citée, f. 101.

[50] Cela résulte du texte de la délibération prise à ce sujet par l'Université de Paris. Du Boulay, t. V, p. 549.

[51] Le 17 novembre 1449, on donnait au chapitre de Notre-Dame de Paris communication d'une lettre du Roi portant convocation pour le 31 décembre. Registres capitulaires, aux Archives, LL 116, f. 402 v°. — La lettre de convocation n'étant point parvenue à. certains destinataires, le Roi en adressa une nouvelle de Jumièges, le 11 janvier 1450, au chapitre de Saint-Martin de Tours. Thesaurus novus anecdotorum, t. I, col. 1818.

[52] Registres capitulaires, l. c., f. 402 v° et 405. On lit dans une lettre de Charles VII à Nicolas V, en date du 9 mars : Super quibusdam differentiis inter Vestram Sanctitatem et Ecclesiam nostram gallicanam concordandis. Ms. lat., 5414A, f. 94, et Spicilegium, t. III, col. 785.

[53] Cela est établi par les registres capitulaires de la cathédrale de Rouen, que M. Ch. de Beaurepaire a bien voulu dépouiller à notre intention. Le chapitre nomma le 17 janvier ses délégués. — Les délégués du chapitre de Notre-Dame de Paris présentèrent les 9 et 13 février leur rapport sur l'assemblée à laquelle ils avaient pris part. Archives nationales, LL 116, f. 411 v° et 413.

[54] C'est ce qui résulte de la lettre de Charles VII du 9 mars. il fut question à Rouen des privilèges de l'Université : le 17 janvier 1450 (et non 1451), l'Université entendait le rapport présenté par ses délégués envoyés au concile de Rouen pour la tuition et conservation de ses privilèges (Du Boulay, t. V, p. 554).

[55] Lettre de Charles VII à Nicolas V, en date du 24 mars 1450. Ms. lat. 5414A, f. 94. Le 17 avril, le chapitre de Notre-Dame de Paris, conformément à une lettre reçue du Roi, désignait ses délégués à l'assemblée de Chartres. Archives, LL 116, f. 427. — Le chapitre de la cathédrale de Rouen nomma ses délégués le 6 mai. Registres capitulaires.

[56] Le 13 avril 1450, le héraut Berry, porteur de la missive royale, était près du duc à Bruxelles. Lettre du duc de Bourgogne au Roi, dans le ms. fr. 5041, f. 13.

[57] Lettres du duc en date du 10 mai 1450, donnant à Guillaume Fillastre, évêque de Toul, et à Antoine Haveron, prévôt de Mons, des pouvoirs pour le représenter à l'assemblée de Chartres. Original, Fontanieu, 877, n° 92. — Les ambassadeurs furent employés à cette mission du 10 mai au 26 juin. Archives du Nord, B 2004, f. 179 v°, 181 et 183 ; 2008, f. 111 et 111 v°.

[58] Lettre du Dauphin à l'évêque de Grenoble en date du 12 avril 1450. Lettres de Louis XI, t. I, p. 147.

[59] Lettre de Charles VII à Nicolas V, en date du 9 mars. Ms. latin 5414A, f. 94, et dans Spicilegium, t. III, col. 785. Le légat pontifical avait quitté Paris le 2 mai pour se rendre à Chartres (Archives, LL 116, f. 430).

[60] Voir un document cité par M. de Lépinois, Histoire de Chartres, t. II, p. 100. L'Université Université de Paris fut représentée à l'assemblée. Voir Du Boulay, t. V, p. 554.

[61] On lit dans l'Inventoire des sacz et lettres du Roy estans à Tours en 1461 (ms. fr. 2899, f. 80 v°) : Item ung autre sac où sont les besongnes et choses traictées à l'assemblée des prelaz et gens d'eglise à Chartres en l'an M CCCC L. — Rien ne nous est resté de ces documents.

[62] Charles VII était alors à Argentan, se préparant à entreprendre le siège de Caen.

[63] Ms. fr. 2701, f. 108.

[64] Ailleurs, dans la même épître (f. 89), Jouvenel dit : Et est ung Roy comme ung vaillant preslat, car, au regart de vous, mon souverain seigneur, vous n'estes pas simplement personne laye, mais preslat ecclesiastique, le premier en vostre royaume qui soit aprez le Pape, le bras dextre de l'Esglise.

[65] Ms. fr. 2701, f. 100 v°. Passage cité par Godefroy dans son recueil des historiens de Charles VI, p. 629.

[66] Ms. fr. 2701, f. 47 v°.

[67] Loys Sureau, escuyer, IIIIxx XVI l. V s. pour une haquenée donnée au cardinal d'Estouteville. Cabinet des titres, 685, f. 165.

[68] Archives, LL 117, f. 194.

[69] Lettre en date du 22 mai. Procès de Jeanne d'Arc, t. V, p. 366.

[70] Ils sont nommés dans les lettres du cardinal. Du Boulay, t. V, p. 577.

[71] Voir ces statuts, qui furent promulgués le 29 juin suivant, dans Du Boulay, t. V, p. 562-77. Cf. Crevier, Histoire de l'Université de Paris, t. IV, p. 172-194.

[72] Ms. fr. 2107, f. 192.

[73] Procès de Jeanne d'Arc, t. V, p. 299.

[74] Tous les détails qui suivent sont extraits d'une lettre de Louis d'Harcourt, archevêque de Narbonne, au Roi, en date du 2 ou 3 juin, qui se trouve en original dans le recueil de Le Grand, vol. IV, n° 23. — Le quantième est resté en blanc ; mais on lit au dos : De Mgr de Narbonne, le Ve jour de juing 1452. Cette lettre a été publiée dans l'ouvrage de Pinsson : Caroli septimi Francorum Regis Pragmatica Sanctio (1866, in-fol), p. 989.

[75] Avec ce il avoit parlé à plusieurs des prelaz de vostre royaume de ladicte journée, et, en communicant avec eulx, avait de la pluspart senty qu'ilz ne vouldroient avoir ne cognuistre point de souverain, ne Nostre Saint-Père, ne autre, et que se l'ordre de ceste matière et la moderacion ne partoit aucunement de vous, que à peine il pourroit avec iceulx prendre conclusion qui feust ne à l'onneur de Nostre dit Saint Pere ne au sien, et que il n'y oust Brant trait et longueur de temps. Lettre de l'archevêque de Narbonne.

[76] Cela résulte de la lettre de son secrétaire, écrite le 16 juin, à Bourges. Ms. ital. 1586, f. 133.

[77] On voit par une lettre de Georges de Annono que le 19 juillet 1452, un envoyé du Roi du nom de Richard passa par Vigevano, se rendant auprès du Pape. Ms. ital. 1586, f. 153.

[78] Expression familière à Jean Jouvenel et qu'on retrouve souvent dans ses Épîtres. Elle est employée également par Georges Chastellain.

[79] Ms. fr. 2701, f. 100 v°.

[80] Ms. fr. 2701, f. 115.

[81] Ms. fr. 2701, f. 100 v°-101.

[82] Le troisième compte de Mathieu Beauvarlet contient la mention suivante : A Jehan le Gentils et Nicolas de Saint-Remi, chevaucheurs de l'ecurie du Roy, envoyez à plusieurs prelats avec lettres closes du Roy touchant le fait de l'assemblée des prelats et gens d'eglise qui devoit estre prochainement après à Bourges pour le fait de la Pragmatique Sanction. Extrait dans Le Grand, vol. IV, n° 23, et vol. VI, f. 302.

[83] Le 21 juin, l'Université de Paris nommait ses délégués. Jourdain, Index chronologicus, etc., p. 271. Du Boulay dit le 29 (t. V, p. 577).

[84] Guillaume Bouillé, docteur en theologie, XX l. pour sa despense qui luy conviendra faire à Bourges à l'assemblée des prelats et gens d'eglise qui y doit estre pour le fait de la Pragmatique Sanction. Troisième compte de Mathieu Beauvarlet : Cabinet des titres, 685, f. 158.

[85] Me Estienne de Montdidier et messire Pierre de Tuillières, conseillers au Parlement, pour un voyage à l'assemblée de l'Eglise de France tenue à Bourges en juillet et aoust 1452, IIc l. Douzième compte d'Étienne de Bonney, dans le ms. 685 du Cabinet des titres, f. 152 v°.

[86] Les pièces existaient cependant ; on lit dans le compte de Mathieu Beauvarlet : Noël de Fribois, conseiller du Roy, XL l., en septembre, pour plusieurs escriptures faictes à Bourges pour le fait de la Pragmatique. (Ms. 685, f. 158.) C'est le même Noël de Fribois qui dressa l'expédition authentique de la Pragmatique sanction de 1438, conservée aux Archives nationales (J 941, n° 1).

[87] Œuvres de Thomas Basin, t. IV, p. 83. M. Quicherat se trompe (t. I, p. 319, note) en plaçant en septembre 1440 l'assemblée de Bourges à laquelle l'évêque de Lisieux fait allusion : il s'agit de l'assemblée de 1452.

[88] Ms. fr. 2701, f. 101 ; cf. Godefroy, Histoire de Charles VI, p. 692.

[89] Archives, P 13882, cote 60 ter. Cette copie a été signalée par M. Ch. Gérin, dans son livre intitulé : Les deux Pragmatiques attribuées à saint Louis, 2e édition. Paris, 1869, in-12, p. 242.

[90] Inventaire des titres estant en la Chambre des comptes à Villefranche en Beaujolois (septembre 1469-mars 1470). Copie de 1754. Archives, R 4°, 1110, f. 35 v°. Cette note, copiée par Du Puy (vol. 755, f. 5), a été citée par M. Ch. Gérin, l. c., p. 241.

[91] Bibliothèque de l'École des chartes, t. XXXI, p. 186.

[92] Le docteur Karl Rösen, dans son opuscule : Die Pragmatisehe Sanction welche unter dem namen Ludwig's IX... auf uns gekommen ist (München, 1853, in-8°), se demande si l'auteur de la fraude ne serait pas Thomas Basin.

[93] Putamusque ad hœc tempora pertinere tractatum alium satis prolixum, quem equè ac superiorem reperimus in Bibliotheca Collegii Navarrici Parisiensis, auctore Guillelmo de Montjoye, episcopi Biterrensi, quem Rex de bis consuluerat : distinctum in quatuor Avisamenta, ut vocat, hoc est monda seu concilia. Sponde, Annalium em. card. Cœs. Baronii Continuatio, t. II, p. 360.

[94] Ac nihilominus contra eam ipsosque ejus fabricatores, ac Regis edictum, archiepiscopus Tolosanus (Bernardus, ut puto, de Rossergio, inclytus juris professor) eodem tempore tractatum edidit pro auctoritate redis apostolice, titulo : Accensus veri Luminis Francorum, christianissimi Regis et Regni, contra tenorem Pragmaticæ Sanctionis. Sponde, l. c. Voir ms. lat. 4242, f. 407 v°-550.

[95] Chronique bordelaise, t. I, p. 18 ; Sponde, t. II, p. 475.

[96] Opus pro Pragmaticas sanctionis abrogatione (Rome, 1486, in-4°), imprimé par Pinsson dans son recueil sur la Pragmatique.

[97] Voir Gallia christiana, t. XI, col. 893.

[98] Ordonnances, t. XV, p. 196. — C'est par erreur que Du Puy, en publiant ce document (Traitez des droits et libertez de l'Église gallicane, t. I, p. 3 et suivantes) lui assigne la date de 1461 ; le texte même établit qu'il est postérieur à la mort de Pie II, survenue le 16 août 1464. — Déjà dans un édit donné par le Roi en son Parlement, en date du 17 février 1464, on avait mentionné en ces termes la Pragmatique de saint Louis : Quodque anno Domini millesimo ducentesimo sexagesimo octavo, mense martii, 8toriose memorie sanctus Ludovicus, quondam Rex Francie, predecessor noster, suo edicto perpetuo ordinaverit, etc. Ordonnances, t. XVI, p. 161.

[99] Mgr l'arcevesque de Tours, XIIc l. pour aller au mois d'octobre, par l'ordonnance du Roy et de l'advis de l'Église de France nagueres assemblée à Bourges, devers le Pape luy remonstrer et faire savoir la responce faicte à Mgr le cardinal d'Estouteville touchant la matiere pour laquelle il estoit venu. Quatrième compte de Mathieu Beauvarlet, l. c., f. 166 v°. Cf. Legrand, IV, n° 23, et VI, f. 302. — Les documents relatifs à cette ambassade sont visés dans l'Inventaire cité ci-dessus (Fr. 2899, f. 82) : Et le voyaige que fit Mgr de Tours à Romme, touchant l'assemblée des prelaz à Bourges pour la Pragmatique, avecques aucuns doubles d'instructions et povoirs.

[100] Cette lettre porte la date du 1er février. — Le cardinal d'Estouteville était rentré a Rome le 3 janvier (Pastor, l. c., t. II, p. 96 note).

[101] Spicilegium, t. III, p. 790-91.