HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE IV. — CHARLES VII PENDANT LA TRÊVE AVEC L’ANGLETERRE - 1444-1449.

 

CHAPITRE VIII. — LA POLITIQUE ROYALE EN ITALIE ENTREPRISE SUR GÊNES ET SUR ASTI.

 

 

1444-1447

 

Intérêts politiques de la France en Italie : le duc d’Orléans et le duché de Milan ; le roi René et le royaume de Naples ; la possession de Gênes : lettres d’abolition données aux Génois. — Impression causée en Italie par la victoire de Saint-Jacques ; ouvertures faites au Dauphin par le duc de Milan et la république de Gênes ; le duc de Savoie conclut avec lui un traité. — Négociations avec le duc de Milan : mission de Gaucourt ; ambassade de l'évêque d’Albenga ; conditions de l’alliance projetée. — Nouvelle ambassade milanaise à Nancy et à Châlons : relation des ambassadeurs. — Négociations avec le duc de Savoie : projet d’occupation de Gênes et de conquête du Milanais ; traité secret passé à Genève. -— Inquiétudes du duc de Milan ; battu par les Vénitiens, il se retourne vers la France : ambassade de Thomas Tibaldo ; instructions données à cet ambassadeur ; traité de Tours. — Difficultés faites par le duc de Milan ; nouvelle ambassade de Tibaldo. — Projet d’une entreprise sur Gênes ; Charles VII se met en relations avec les seigneurs génois et prend avec eux des arrangements ; envoi d’une ambassade à Marseille ; dispositions concertées par les ambassadeurs avec Janus de Campo Fregoso. — Campo Fregoso occupe Gênes ; une fois en possession du pouvoir, il chasse les Français qui l’avaient accompagné. — Étonnement des ambassadeurs restés à Nice ; ils comptent sur une prompte revanche ; rapports qu’ils adressent à la Cour et au Dauphin ; conseil tenu à Romans avec le Dauphin ; la marche sur Gênes est décidée. — Échec subi par les ambassadeurs, qui sont contraints de quitter Gênes sans coup férir. — Relations avec les puissances italiennes ; attitude de Philippe-Marie ; sa correspondance secrète avec Sforza ; conclusion définitive du traité avec la France. — Délais apportés par Philippe-Marie à la remise d’Asti ; il entame de nouvelles négociations ; sa mort. — Charles VII revendique les droits du duc d’Orléans sur le duché de Milan ; Dresnay s’installe à Asti, entame des négociations avec Sforza, et se met en campagne ; il est battu devant Bosco. — Arrivée du duc d’Orléans à Asti ; impuissance de ce prince ; Charles VII abandonne la partie.

 

La trêve avec l’Angleterre était à peine signée que Charles VII tourna ses regards du côté de l’Italie.

L’intervention royale dans cette contrée était vivement souhaitée par le duc d’Orléans, qui avait conclu récemment avec le duc de Milan, pour la restitution de la seigneurie d’Asti, un traité dont il ne parvenait point à obtenir l'exécution. Charles d’Orléans entretenait le secret espoir de devenir lui-même un jour duc de Milan, du chef de sa mère Valentine[1] ; nous avons vu plus haut le comte d’Angoulême faire allusion à la revendication des droits de son frère en Lombardie[2] : à coup sûr, celui-ci eût préféré qu’au lieu de diriger les gens de guerre sur la Suisse et la Lorraine, le Roi leur fît franchir les Alpes. Au moment où cette double expédition venait d’être décidée, le duc d’Orléans donna au sire de Gaucourt, envoyé vers Frédéric III, des instructions spéciales : il le chargeait de faire hommage en son nom au nouveau roi des Romains de la seigneurie d’Asti[3], et de le solliciter d’agir en sa faveur auprès du duc de Milan afin d’obtenir la délivrance de cette ville[4]. Au mois d’octobre suivant, Gaucourt partit pour Nuremberg ; mais le succès de son ambassade fut compromis par les difficultés survenues entre la cour de France et le roi des Romains au sujet de l’occupation de l’Alsace.

Un autre prince du sang était encore plus étroitement mêlé aux affaires italiennes : c’était René d’Anjou. Quelque vague que fût désormais pour lui l’espoir de recouvrer son royaume de Sicile, il n’en maintenait pas moins ses prétentions, se réservant de les faire valoir en des temps meilleurs. A la déclaration du pape en faveur de son rival Alphonse, aux actes par lesquels la succession au trône des Deux-Siciles était assurée à Ferdinand, fils bâtard du roi d’Aragon, René ne cessa d’opposer les revendications de la justice et du droit. Un ambassadeur vint en son nom à Rome : là, dans l’église de Saint-Pierre, agenouillé aux pieds du Pape, en présence des cardinaux de Térouane[5] et d’Estouteville, il fit entendre (8 juillet 1445) une solennelle protestation, demandant au Souverain Pontife de déclarer que les lettres par lesquelles il reconnaissait Alphonse comme roi de Sicile n’avaient point été données en pleine liberté, qu’il n’avait pas eu l’intention de porter préjudice aux droits de René et de ses héritiers, mais voulait au contraire les maintenir, et qu’il considérait toujours René comme son vassal. Eugène IV répondit que, pour éviter un plus grand mal et conjurer un péril imminent, il avait été obligé de céder aux exigences du roi d’Aragon, mais qu’il n’entendait pas préjudicier au droit de la maison d’Anjou[6].

Il y avait en Italie une puissance que le roi René avait toujours trouvée prête à le seconder : c’était la république de Gênes, où le souvenir de la domination française n’était point effacé. A la fin de 1435, les Génois avaient secoué le joug du duc de Milan et recouvré leur indépendance. Thomas de Campo Fregoso, retiré de la scène depuis 1421, avait reparu à main armée ; on l’avait aussitôt nommé doge. Thomas se montra l’allié fidèle du roi René pendant sa campagne de Naples[7]. Renversé par Jean-Antoine de Fiesco (décembre 1443), il fut remplacé par Raphaël Adorno. Mais cette élection n’obtint pas l’assentiment de tous, et le pouvoir du nouveau doge resta incertain[8]. Au commencement de 1444, Charles VII reçut de Gênes une ambassade au sujet d'une plainte formulée en son nom : un navire portant la bannière royale avait été capturé par des Génois dans le port d’Aiguemortes. Durant le séjour des ambassadeurs[9], le roi donna des lettres (juillet 1444) portant abolition aux habitants de Gênes qui feraient obéissance à la Couronne. Dans ces lettres, où il prenait le titre de seigneur de Gênes (Januæ dominus), Charles VII rappelait le temps où son père avait possédé la seigneurie et y avait institué comme gouverneur le maréchal de Boucicaut ; il faisait allusion aux troubles survenus depuis que les Génois s’étaient soustraits à l’autorité royale ; il déclarait avoir reçu de plusieurs habitants, ses fidèles et bienveillants, des lettres attestant leurs regrets de s’être laissé aller à subir la domination des tyrans et en même temps leur désir d’obtenir une rémission générale des excès et délits commis contre la maison de France. Consentant à oublier le passé, le Roi pardonnait aux Génois le crime de lèse-majesté dont ils s’étaient rendus coupables ; il renonçait à toutes poursuites contre les habitants, et donnait ordre au gouverneur et aux officiers de sa ville de Gênes de faire observer ses lettres de rémission à l’égard de tous les Génois rentrant dans l’obéissance royale[10].

La nouvelle de la victoire remportée sur les Suisses par le Dauphin (26 août 1444), causa en Italie une vive impression. C’était le moment où Raphaël Adorno, que le roi d’Aragon avait su rattacher à sa cause, venait de conclure un traité avec Alphonse V et de déclarer Gênes tributaire de ce prince[11]. Tandis que le Pape se montrait plein de bienveillance pour le jeune Louis, nommé gonfalonier de l’Église, et que le duc de Milan lui proposait, dit-on, de le reconnaître pour héritier, Gênes lui fit aussi des ouvertures : une ambassade vint, au nom d’un groupe de nobles Génois, offrir au jeune prince de le mettre à la tête de la Seigneurie[12]. Le duc de Savoie, à son tour, s’empressa, on l’a vu, de traiter avec le Dauphin. Il conclut avec lui une alliance offensive et défensive, lui abandonna tous ses droits sur les comtés de Valentinois et de Diois, et passa en même temps un traité de commerce et d’extradition[13].

Le temps n’était pas éloigné où la politique royale allait chercher à tirer parti de ces avantages. Aussitôt que le Dauphin fut revenu à Nancy près de son père, des négociations furent entamées avec le duc de Milan. Il ne s’agissait pas seulement de la restitution de la seigneurie d’Asti au duc d’Orléans, mais encore du passage de l’héritier du trône en Italie. Dans le courant de l’hiver — sans doute après avoir rempli à Nuremberg sa mission près du roi des Romains, — Gaucourt s’était rendu à la cour du duc de Milan. Il sollicita Philippe-Marie : 1° de s’employer auprès de Frédéric III pour procurer la délivrance du jeune duc Sigismond et sa réintégration dans ses états ; 2° de restituer au duc d’Orléans la ville et le territoire d’Asti. Philippe-Marie répondit qu’il était disposé à agir en toutes choses suivant le bon plaisir du roi de France, et promit d’intervenir auprès du roi des Romains ; il ajouta qu’il aurait fait partir incontinent une ambassade pour se rendre près de ce prince, n’était le bruit répandu à Milan et dans toute la Lombardie que le duc Sigismond venait d’être mis en liberté ; il annonça le prochain envoi d’ambassadeurs au Roi pour lui porter ses offres de service et recevoir ses instructions. Quant à l’affaire d’Asti, il se réservait de communiquer ses intentions par ses ambassadeurs[14].

L’évêque d’Albenga, en compagnie d’un autre conseiller du duc de Milan[15], se rendit aussitôt près de Charles VII. Le duc faisait savoir au Roi qu’il se mettait entièrement à sa disposition pour intervenir dans l’affaire du duc Sigismond. En ce qui concernait la seigneurie d’Asti, il demandait un sursis : l’intention du duc n’avait jamais été de retenir ou aliéner Asti ; mais certaines difficultés avaient retardé la délivrance aux mains du duc d’Orléans, et cette délivrance ne pouvait, à l’heure présente, être effectuée sans péril. Le duc donnait en outre mission à ses ambassadeurs de confirmer le traité d’alliance conclu jadis par son père avec Charles VI[16]. De plus, ils devaient s’entendre avec le Dauphin relativement à un projet d’expédition du jeune prince en Milanais : excellent moyen de tenir les gens de guerre éloignés du royaume et en même temps de favoriser les desseins du roi René dans le sud de l’Italie[17].

Il résulte d’un acte de la chancellerie du duc de Milan[18] que ce prince se montrait disposé à donner au Dauphin toute l’assistance possible[19], à la condition que celui-ci n’entreprît rien au détriment de sa personne et de ses états, ne prêtât assistance à aucun, de ses adversaires, mais le favorisât au contraire par tous les moyens. Gomme sûreté des conventions à intervenir, le duc demandait que le Roi et tous ceux de son lignage garantissent l’accomplissement du traité, offrant en retour, en ce qui le concernait, de faire donner pareille garantie par un prince italien au choix du Dauphin[20]. Enfin le duc se déclarait disposé à remettre la ville d’Asti aux mains d’une personne ayant à la fois la confiance du duc d’Orléans et la sienne ; cette remise aurait lieu pendant un temps déterminé, après lequel la ville devrait être livrée au duc. Le duc voulait ainsi mettre son honneur à couvert au sujet de certaines paroles étranges et menaçantes qui auraient été proférées contre lui, et sur lesquelles il ne voulait pas insister[21].

Les choses ne marchèrent pas aussi vite que les premières ouvertures du duc de Milan auraient pu le faire espérer. Au mois d’avril 1445, une nouvelle ambassade milanaise vint trouver le Roi à Nancy. Guidés par Boniface de Valpergue, les ambassadeurs arrivèrent sans encombre dans cette ville, non sans avoir, depuis Dijon surtout, couru de grands périls. Le Roi leur fit un accueil affable et empressé[22]. Ils eurent ensuite une audience solennelle, pour exposer l’objet de leur mission, en présence du comte du Maine, du duc de Calabre, du comte de Clermont, du comte de Saint-Pol, etc. Charles VII exigea que les déclarations verbales des ambassadeurs fussent mises par écrit, afin de servir de base aux négociations.

Les envoyés milanais s’exécutèrent aussitôt ; mais ils attendirent longtemps la réponse du Roi. Après douze jours passés à Nancy, ils suivirent la Cour à Châlons ; le 26 mai, au moment où ils envoyaient leur rapport, ils n’étaient point encore expédiés. On était en négociations avec la duchesse de Bourgogne, et la réconciliation à ménager entre le roi René et le duc Philippe absorbait tous les esprits. La relation des ambassadeurs[23] nous fournit des renseignements intéressants sur les intrigues de la Cour[24] ; elle en contient aussi sur les affaires politiques. Voici ce qu’on y lit à cet égard : De la venue en Italie, il n’en est plus question ; du moins on n’en parle pas. Les gens d’armes sont bien encore épars çà et là dans le royaume, mais tous débandés. Outre cela, nous avisons Votre Seigneurie que, par le seigneur Théodore (de Valpergue) lequel est du conseil du Roi, par l’archevêque de Lyon, et par deux autres conseillers, il a été tenu divers propos en manière de raillerie et avec jactance sur les affaires d’Asti et aussi sur le fait de Gênes. Tous sont résolus, coûte que coûte, à tenter, n’importe par quel moyen, le passage en Italie... Nous n’avons pu encore nous entretenir avec le roi René ni avec l’illustre seigneur Dauphin ; et cela parce que le seigneur Dauphin n’est point dans cette ville, mais dehors à prendre son déduit. Le roi René est, paraît-il, en grand souci à propos de la flotte que, dit-on, le roi d’Aragon et les Génois arment pour venir ravager la Provence. Et pour cela Sa Majesté se met en mesure d’envoyer des gens d’armes en Provence.

Les négociations avec le duc de Milan n’aboutirent point à un résultat immédiat. Quant aux difficultés avec la république de Gênes, elles ne furent aplanies qu’après de longs pourparlers. Plusieurs ambassadeurs Génois vinrent trouver le Roi[25]. Enfin, le 22 novembre 1445, fut conclu en Provence, entre les commissaires de Charles VII et Napoléon Lomellini, député de Gênes, un arrangement au sujet du vol de la galère royale : la république prenait l’engagement de restituer la galère et de livrer les auteurs de l’attentat ; dans le cas où ils ne pourraient être saisis, ils seraient bannis du territoire de. la république[26].

On a vu que le gouvernement royal méditait une intervention en Italie et voulait occuper Gênes. Avant d’entrer dans l’exposé des faits relatifs à cette entreprise, il faut examiner ce que fit Charles VII pour en assurer le succès.

 

Dès le mois d’octobre 1444, le Dauphin, on l’a vu, s’était allié au duc de Savoie. Dans le courant de 1445, la question de la pacification de l’Église amena entre la France et la Savoie un fréquent échange d’ambassades ; au mois de juin, des envoyés de Louis de Savoie étaient à Châlons, auprès du Roi, en même temps que les ambassadeurs milanais[27]. Peu après, deux ambassadeurs partirent pour la cour de Savoie, porteurs de lettres du Roi[28]. La nomination du Dauphin comme gonfalonier de l’Église le mit en relations avec les cours italiennes[29]. A la fin de 1445, les pourparlers entre le Dauphin et le duc de Savoie furent repris. Il s’agissait de faire un pas de plus dans la voie où. l’on s’était engagé. Le but poursuivi était de rentrer en possession delà seigneurie de Gênes ; puis, ce résultat obtenu, de se tourner vers le Milanais, dont la conquête devait être entreprise de concert avec le duc de Savoie. Les négociations furent conduites par Jean de Grolée, prévôt de Montjou, qui, quoique sujet du duc, était en même temps conseiller du Roi[30]. Un traité secret fut passé à Genève au mois de février 1446. Voici quelles en étaient les clauses :

Le Dauphin, lors de son passage en Italie à la tête d’une armée pour opérer le recouvrement de Gênes, aura la faculté de traverser le territoire du duc de Savoie ; des vivres lui seront fournis à un taux modéré ; le passage s’effectuera par le col d’Argentière, le val Stura, puis par le Piémont, en traversant Bra ou Cherasco ; le duc de Savoie favorisera l’occupation de Lucques et de toute la seigneurie de Gênes, qui appartiendront en toute propriété au Roi, au Dauphin, et à leur successeurs ; après l’occupation de Lucques et de Gênes, on entreprendra la conquête du duché de Milan ; les villes, places fortes et territoires situés autour du Pô et à l'est du marquisat de Montferrat, savoir Parme, Plaisance, Tortone, etc., appartiendront au Dauphin, sauf Alexandrie et son territoire qui seront cédés au marquis de Montferrat, comme prix de l’appui qu’il aura donné aux princes alliés ; les villes, places fortes et territoires situés au nord du Pô, c’est-à-dire tout le pays compris entre le cours du Cervo (affluent de la Sezia), de l’Adda et du Pô, jusqu’aux Alpes, savoir Novare, Côme, Milan, Lodi, Pavie, etc., appartiendront au duc de Savoie ; quant aux pays situés au-delà de l’Adda dont on pourrait entreprendre la conquête, ils seront partagés entre le Dauphin et le duc de Savoie, dans la proportion de deux tiers au premier et un tiers au second : le duc aura pour sa part les terres voisines de la portion du Milanais déjà conquis à son profit. Pour parvenir à cette conquête, le Dauphin sera tenu de fournir au duc six mille hommes d’armes et de trait, dont la solde, à la charge du duc, sera de vingt florins par mois pour chaque lance fournie et dix florins pour chaque archer ; pareille solde sera attribuée aux troupes qui seraient fournies au Dauphin par le duc. Toutes les clauses du traité devront être ratifiées par le Roi[31].

Ce pacte entre le Dauphin et le duc de Savoie resta-t-il à l’état de projet ? Fut-il sanctionné par le Roi ? Nous avons le texte d’un appointement fait à cette époque (30 mars 1446) par Charles VII avec le duc de Savoie[32] ; mais il n’est question ici que d’arrangements relatifs à la pacification de l’Église. Nous avons aussi la formule de pouvoirs donnés, peu après, à des ambassadeurs envoyés à la Cour de Savoie et le texte des instructions qui leur furent remises[33] ; mais ces documents ne parlent que de traités d’alliances à conclure soit avec le duc, soit avec les Suisses, et sont muets au sujet du traité secret. Tout porte à croire que la combinaison projetée par le Dauphin fut aussi vite abandonnée que conçue. La disgrâce, la condamnation et la mort du vice-chancelier Guillaume Bolomier, survenues dans le cours de l’année 1446, semblent n’avoir point été sans influence sur cet échec[34].

Une autre négociation, relative à l’affaire des comtés de Valentinois et Diois, entamée au même moment, reçut une meilleure solution. Au mois de novembre 1444, le duc de Savoie avait fait au Dauphin l’abandon de ses prétentions sur ces deux comtés ; par un traité passé le 3 avril 1446, il fut décidé que, moyennant l’abandon de l’hommage de la baronnie de Faucigny, autrefois cédé par le comte Amé de Savoie au roi Jean, les comtés de Valentinois et de Diois seraient définitivement mis en la possession du Dauphin[35].

Malgré le secret apporté aux pourparlers entre le duc de Savoie et le Dauphin relativement à un projet de descente en Italie, il était difficile que la diplomatie milanaise, qui avait partout ses agents, n’en fût point instruite. Dans des instructions données par le duc de Milan, en date du 9 novembre 1445, à Otto de Marliano, son ambassadeur près le roi d’Aragon, Philippe-Marie se montrait préoccupé de la menace d’une intervention de la France[36]. Au milieu des inquiétudes que lui causaient les succès des Vénitiens, il se mit de nouveau en relations avec Charles VII. Un chevalier milanais alla trouver le Roi[37] ; celui-ci, de son côté, fit partir de Chinon, au mois d’août 1446, deux ambassadeurs pour Milan[38]. C’est à ce moment qu’une brillante victoire, remportée à Casai Maggiore (28 septembre), par Michel Attendolo, général des troupes vénitiennes, vint mettre le duc de Milan à deux doigts de sa ruine[39]. A tout prix il fallait conjurer le danger : Philippe-Marie s’adressa à la fois à son gendre Sforza, au roi Alphonse et à Charles VII.

Le 17 octobre 1446, le duc donnait des instructions à Thomas Tibaldo de Bologne, grand maître de sa maison, envoyé vers le Roi et le Dauphin. Tibaldo devait s’entendre avec Théodore de Valpergue, lequel était au courant des intentions du duc, et suivre en tout ses conseils. Il s’agissait d’obtenir l’envoi en Italie de dix mille combattants, soit cinq mille chevaux et cinq mille archers. Moyennant ce secours, le duc s’engageait à opérer, avant Pâques, la remise aux mains du Roi et du Dauphin des villes de Gènes et d’Asti. Cette remise accomplie, le Roi et le Dauphin devaient l’aider à recouvrer tout ce que les Vénitiens lui avaient enlevé, savoir Bergame et le Bergamasque, Brescia, et toute la contrée environnante, avec cette stipulation qu’ils ne pourraient conclure avec les Vénitiens aucune paix, trêve ou confédération sans l’agrément du duc, lequel ne pourrait non plus traiter séparément. Une fois la conquête opérée, s’il plaisait au Roi et au Dauphin de faire quelque entreprise en Italie, ils en auraient pleine liberté, pourvu que ce ne fût pas contre le roi d’Aragon, avec lequel le duc était lié par un traité ; le duc leur donnerait, même à ses dépens, quatre mille cavaliers et mille fantassins ; il irait jusqu’à deux mille fantassins si on l’exigeait. Il serait entendu, d’ailleurs, que le duc ne pourrait conclure aucun traité de paix, de trêve ou d’alliance sans l’agrément et le consentement du Roi et du Dauphin.

Le duc ajoutait : Nous te disons bien, Thomas, que, comme tu le sais, il n’a été rien tenu dans le passé des promesses faites par le roi d’Aragon, et nous estimons qu’il en sera de même dans l’avenir ; c’est pourquoi, pouvant le faire, notre honneur sauf, nous te certifions, et nous voulons que de notre part tu le déclares au Roi et au Dauphin, que l’offre de les aider contre n’importe qui en Italie, nous la ferons de même quant au fait du royaume (de Naples), étant assuré que nous serons en mesure de leur donner ce secours tout en gardant notre honneur.

La ligue entre la France et le duc de Milan devait avoir une durée d’au moins deux ans. Elle n'avait rien de commun avec l’alliance au sujet de laquelle étaient venus à Milan les ambassadeurs du Roi : celle-ci était perpétuelle, et la ligue était à terme ; elle devait donc être conclue séparément. Si le Roi ne se souciait point de la contracter, elle pourrait être faite avec le Dauphin seul, et réciproquement avec le Roi sans la participation du Dauphin ; mais si l’on ne pouvait traiter qu’avec l’un de ces princes, mieux valait que ce fût avec le Dauphin qu’avec le Roi. En outre, l’envoyé du duc avait charge de faire trois ouvertures différentes relativement à la cession d’Asti, et de communiquer d’abord les deux premières au Roi et au Dauphin ; la troisième ne devait être produite qu’en cas de nécessité absolue et dans l’hypothèse de la conclusion de la ligue.

Par la première, le duc offrait de donner, sa vie durant, le gouvernement d’Asti au Dauphin, lequel pourrait ensuite, soit le restituer, soit le donner à qui bon lui semblerait ; la ville devrait être placée par le Dauphin aux mains de Théodore de Valpergue, ou du maréchal de la Fayette pour la gouverner en son nom. — Par la seconde, le duc abandonnerait Asti au Dauphin, lequel, si cette combinaison lui agréait, pourrait dédommager le duc d’Orléans par l’abandon de quelque place ou terre ; en ce cas, le Dauphin placerait à Asti, comme gouverneur, qui bon lui semblerait. — Par la troisième, le duc, une fois la ligue conclue, restituerait Asti au duc d’Orléans, mais à la condition que le Roi, le Dauphin et le duc de Bourgogne promettraient que, tant qu’il vivrait, le duc ne recevrait aucun dommage ni offense, soit de ladite ville, soit du duc d’Orléans ; le cas survenant, le Roi, le Dauphin et le duc se déclareraient contre le duc d’Orléans ; enfin, la ville serait confiée aux mains d’un gouverneur, lequel serait, soit Théodore de Valpergue, soit le maréchal de la Fayette, et cela tant que le duc vivrait, ou tout au moins pendant dix années[40].

L’ambassade du duc de Milan arriva à Tours au mois de novembre 1446[41]. Les premiers pourparlers paraissent avoir été entamés avec le Dauphin. C’est seulement à la date du 18 décembre que Charles VII donna des pouvoirs à quatre de ses conseillers pour traiter avec Tibaldo ; c’étaient Pierre de Brezé, le seigneur de Précigny, Baudoin de Tucé et Boniface de Valpergue[42]. Rédigés le 20 décembre[43], les articles du traité furent définitivement adoptés le 27, et le Roi y donna son approbation par lettres patentes du 29[44]. En voici la substance :

Le Roi s’unit au duc de Milan par un traité portant ligue et confédération ; il promet de donner son appui à ce prince contre n’importe qui, sauf le pape Eugène. Sont également exceptés de part et d’autre : le roi de Sicile, le duc de Savoie, le marquis de Montferrat, et aussi, mais sous réserve[45], la république de Florence.

Le Roi s’engage à faire passer en Italie, dans le plus bref délai, et au plus tard avant la fin de mars, deux mille chevaux et deux mille fantassins, ces derniers soldés sur les revenus de la ville d’Asti. Une fois la ville de Gènes mise aux mains du Roi, que ce soit par l’intervention du duc de Milan ou d’une autre manière, le contingent des fantassins sera porté de mille à cinq mille hommes. Les troupes auxiliaires seront employées à procurer au duc le recouvrement des villes et provinces de Brescia et de Bergame.

Le Roi promet, lorsqu’il aura conclu avec l’Angleterre, soit une bonne paix, soit une trêve de longue durée, de faire passer en Italie un contingent supplémentaire de trois mille chevaux. Toutes ces troupes seront soldées aux dépens du Roi jusqu’à la prise des villes susdites. Toutefois, s’il advenait que le Roi eût en Italie des forces s’élevant à cinq mille chevaux et cinq mille fantassins pour porter secours au duc, et que Brescia et Bergame ne fussent point recouvrés, le Roi ne serait tenu à laisser que pendant six mois au service du duc les troupes que celui-ci voudrait garder pour le servir aux dépens de la couronne.

En vertu de ladite ligue et confédération, le Roi promet d’envoyer des ambassadeurs à Florence pour engager les Florentins à cesser toute hostilité contre le duc ; il en enverra de même à Venise, et ailleurs où besoin sera. En cela et en toutes choses il prêtera aide et faveur au duc, comme son bon ami, allié et parent.

Le Roi promet d’envoyer vers ses alliés les Suisses et vers ses autres amis d’au delà des Monts, pour les prier et requérir de donner leur appui au duc.

Le Roi sera content que, si le duc trouve un bon appointement avec les Vénitiens et ses autres ennemis, il le prenne, selon ce qui lui paraîtra le plus avantageux, mais seulement avec la participation du Roi ou de ses représentants, et à la condition d’avoir au préalable obtenu leur adhésion.

De son côté, le duc déclare conclure avec le Roi bonne ligue et confédération, et promet de remettre à Théodore de Valpergue, que le Roi enverra dans ce but, les ville et seigneurie d’Asti. Aussitôt l’arrivée de celui-ci en Milanais, le gouvernement d’Asti lui sera confié, pour toute la durée de la vie du duc[46].

Le duc promet également de délivrer et mettre aux mains du Roi, avant la fête de Pâques prochaine, la ville et la seigneurie de Gênes, et de remettre dès à présent, soit au Roi, soit à celui qu’il plaira au Roi de désigner, toutes les terres tenues par le duc dans ladite seigneurie, sauf le château de Novi et son territoire, qui ont toujours été possédés par lui. Leduc promet en outre tout son concours pour que la ville de Gênes soit mise dès à présent en la possession du Roi, et, en tout cas, au plus tard et sans nulle faute, avant Pâques.

Le duc promet enfin qu’une fois que Brescia et Bergame seront rentrés en sa possession, ou qu’une bonne paix aura été conclue avec ses ennemis, s’il plaît au Roi de faire une entreprise en Italie, il mettra à sa disposition trois mille chevaux et mille fantassins, soldés aux dépens du duc pour une durée de six mois, avec faculté de les employer contre n’importe quel prince d’Italie, sauf ceux désignés plus haut, et aussi sauf le roi d’Aragon, à moins que celui-ci ne manque à ses promesses envers le duc.

Le présent traité est fait pour toute la durée de la vie des deux princes. Pendant ce temps, aucun d’entre eux ne pourra conclure en Italie de paix ou de trêve sans le consentement de l’autre.

Dans un article final, Thomas Tibaldo déclarait que comme, dans les stipulations du traité, il avait sur plusieurs points outrepassé les pouvoirs donnés par son maître, le Roi, par condescendance et faveur[47], consentait à ce que le duc de Milan eût jusqu’à la fin de février pour donner ses lettres de ratification. Le traité ne serait valable qu’après cette formalité remplie, mais alors même que le duc n’en ratifierait pas tous les articles, il serait dans l’obligation de remettre, avant la fête de Pâques, la ville d’Asti aux mains du Roi ou de Théodore de Valpergue, son représentant. Il demeurerait en outre acquis que la ligue entre le Roi et le duc aurait une durée de vingt années ; que le duc serait libéré de tout engagement pris par lui envers le duc d’Orléans ou les siens, relativement à la restitution d’Asti ; que dans le cas où le Roi ne trouverait d’autre satisfaction à offrir au duc d’Orléans, il pourrait lui délivrer Asti, pourvu que ce fût avec la participation et l’agrément du duc de Milan. Enfin, alors même que le duc ne ratifierait point les autres articles susdits, il serait tenu, une fois le Roi en possession de la ville de Gênes, de mettre aux mains de celui-ci ou de ses officiers, réellement et sûrement, toutes les terres et forteresses qu’il occupait présentement dans la seigneurie, sauf le château de Novi. Il en serait de même des stipulations relatives à Asti, lesquelles conserveraient leur valeur[48].

Aussitôt après la signature du traité, Charles VII fit partir Théodore et Boniface de Valpergue pour la Cour de Milan, avec mission de prendre en son nom possession d’Asti[49]. De généreux dons furent faits à Thomas Tibaldo et aussi à Louis de San Severino, qui l’avait rejoint à Tours. Les deux seigneurs milanais furent en outre défrayés de tous leurs dépens[50].

Dans les premiers jours de janvier, Philippe-Marie fit procéder à l’examen des conventions passées à Tours. Elles ne laissaient pas de soulever quelques objections. La principale portait sur le long délai fixé pour l’envoi des troupes et sur la durée de leur concours, limitée à six mois, ce qui ne donnait pas un temps suffisant pour le recouvrement de Brescia et de Bergame. Il fut décidé que Thomas Tibaldo retournerait en France. De nouvelles instructions lui furent remises à la date du 15 janvier[51]. Il devait s’efforcer d’obtenir les modifications suivantes : les cinq mille cavaliers et les cinq mille fantassins resteraient en Italie non pas seulement pendant une durée de six mois, mais jusqu’à la fin de la guerre ; le duc de Savoie et le marquis de Montferrat ne seraient point mentionnés parmi les princes exceptés du traité, mais figureraient comme adhérents et alliés du duc. Le duc autorisait d’ailleurs son envoyé à passer outre si ces satisfactions ne pouvaient être obtenues ; il se déclarait disposé à conclure la ligue aux conditions suivantes : le Roi ne serait point obligé de lui donner aide ou subside pour le recouvrement de Brescia et de Bergame ; de son côté le duc ne serait pas tenu de donner aide ou subside pour faciliter l’occupation de Gênes ou d’autres lieux, mais seulement d’abandonner les terres qu’il tenait dans les seigneuries, sauf Novi, dans le cas où le Roi se serait rendu maître de la ville de Gênes et y régnerait en souverain. Quant à Asti, il voulait bien l’abandonner, mais uniquement au Roi et au Dauphin, ou à leur représentant, et non à aucun Italien ou à quelqu’un étant sous la dépendance de quelque seigneur de France[52].

C’est pendant le cours de ces négociations que Charles VII résolut de faire de vive force la conquête de Gênes.

 

Nous avons vu que, lors de l’arrangement conclu avec la France, à la date du 22 novembre 1445, un certain Napoléon Lomellini avait été le représentant de Gênes. Or, c’est un Antoine Lamelun, noble citoyen de Gênes, qui est nommé dans des lettres de créance adressées par Charles VII, au mois d’août 1446, au duc Raphaël Adorno, à Bernabo Adorno, à Jean-Antoine de Fiesco, à Jeau-Antoine de Spinola et à Théodore Doria[53]. Ce personnage fut chargé de sonder les principaux citoyens de la république ; il paraît avoir réussi surtout auprès de Jean-Antoine de Fiesco, amiral de Gênes, celui-là même qui, au mois de décembre 1442, avait renversé Thomas de Campo Fregoso.

Le Roi entretint une correspondance suivie avec Fiesco, le pressant de traduire en actes les protestations de dévouement qu’il ne cessait de faire, et combina avec lui les mesures à prendre[54]. En même temps des négociations furent entamées avec Janus de Campo Fregoso et d’autres citoyens de Gênes, lesquels, depuis la révolution qui avait fait parvenir Raphaël Adorno au trône ducal, s’étaient établis à Nice. Lazare de Castro, sénéchal du Roi dans le comté de Provence, conclut, à la date du 25 octobre, un traité portant trêve entre Janus et ses compagnons d’une part, et Jean de Spinola, d'autre part, qui étaient au moment d’en venir aux mains[55]. Bientôt arrivèrent à Marseille cinq gros navires, armés en guerre, montés par Janus de Campo Fregoso et Benoît Doria. De là ces deux personnages envoyèrent un message au Roi, lui faisant savoir que, si c’était son plaisir, ils avaient l’intention de le faire seigneur de Gênes et de toute la contrée[56]. Charles VII accueillit avec empressement cette ouverture et nomma Benoît Doria capitaine de la flotte qui devait opérer à Gênes. Dès le 7 novembre, Doria prenait ce titre dans une lettre adressée aux seigneurs protecteurs de Saint-Georges pour les engager à remettre Gênes aux mains de Charles VII, sans tenir compte de l’opposition de leur duc : c’était, disait-il, le meilleur moyen d’avoir la paix, d’éviter la colère du Roi, et de recouvrer les dépenses que ce prince avait promis de payer ; s’ils ne se soumettaient, le Roi était bien décidé à les traiter en rebelles[57].

Pour parvenir à l’exécution de son dessein, Charles VII résolut de faire partir une ambassade pour Marseille. L’archevêque de Reims venait de recevoir la mission de se rendre en Savoie pour traiter avec le duc et poursuivre la grande affaire de la pacification de l’Église. C’est sur lui que le Roi fixa son choix comme chef de l’ambassade ; il lui adjoignit Charles de Poitiers, seigneur de Saint-Vallier, Jacques Cœur, Jean de Chambes, Tanguy du Chastel, alors sénéchal de Beaucaire, Guillaume, bâtard de Poitiers, et Charles de Castillon[58]. Ces ambassadeurs avaient ordre de s’entendre définitivement avec les nobles génois et de s’occuper de l’équipement d’une flotte.

Le 21 décembre 1446, Guillaume, bâtard de Poitiers, conseiller et chambellan du Dauphin, agissant au nom du Roi, passait avec Jean-Louis de Fiesco, comte de Lavagna, et ses deux fils Antoine-Marie et Jean-Philippe, un traité par lequel ils s’engageaient à donner, comme fidèles sujets et vassaux, tout leur concours au Roi et au Dauphin dans leur tentative pour occuper la seigneurie de Gênes, et à leur faire restituer toutes les terres, châteaux et villes usurpés par le duc de Milan ou par d’autres ; pareil engagement était pris pour faire restituer au roi René ses possessions dans le royaume de Naples, usurpées par le roi d’Aragon ou par d’autres. Fiesco devait toucher une pension mensuelle de deux cents ducats jusqu’au moment où serait opéré le recouvrement des terres et places susdites ; d’autres avantages étaient assurés à lui et à ses fils[59].

Cependant l’anarchie la plus complète régnait à Gênes. Le parti français était soutenu par le Pape, qui poussait les Génois à se donner à Charles VII[60]. Raphaël Adorno s’étant démis du pouvoir (4 janvier 1447), le conseil confia la régence à douze citoyens désignés par lui. Mais la faction des Adorni, encouragée par le roi d’Aragon, parvint à faire arriver au pouvoir Bernabo Adorno, entièrement à la dévotion d’Alphonse, qui reçut de ce prince une garde de seize cents Catalans[61].

De Marseille, les ambassadeurs de Charles VII se transportèrent à Nice pour y prendre les derniers arrangements avec Janus de Campo Fregoso et les autres nobles génois[62]. Jacques Cœur paraît avoir joué le principal rôle dans les négociations ; c’est lui qui présida aux préparatifs de l’expédition. Nous avons une lettre du Roi, où il s’intitule seigneur de Gênes, adressée aux nobles génois pour leur annoncer l’envoi d’un de ses écuyers d’écurie, chargé de s’entretenir avec eux et avec son argentier[63]. Janus ne tarda pas à se mettre en campagne. Il s’empara d’abord, au nom du Roi, de plusieurs places du littoral[64], et se ménagea des intelligences dans Gênes, où il avait de nombreux amis. Des navires, armés en guerre par les ambassadeurs, se tenaient prêts à partir au premier signal[65]. Tout avait été si bien combiné que, soit à la Cour de France, soit à Florence où le Roi avait fait part de ses projets[66], soit à Milan où rien n’échappait à l’œil vigilant du duc Philippe-Marie, on regardait déjà l’occupation de Gênes comme un fait accompli[67].

Le 30 janvier[68], Janus de Campo Fregoso, qui avait en sa compagnie un représentant du Roi, Guillaume, bâtard de Poitiers, se présentait devant Gênes, monté sur une galère portant trois cents hommes. Il entra dans le port sans éprouver de résistance. Aussitôt le débarquement opéré, Janus prend en main la bannière de France, et, la déployant, s’avance à travers la ville, suivi d’un nombreux cortège d’amis en armes. Janus se porte sur le palais, dont il s’empare de vive force. Ce premier succès obtenu, il se fait aussitôt proclamer doge par ses partisans[69]. Bernabo Adorno, abandonné de tous, ne tente même pas de résister et prend la fuite[70]. A peine maître du pouvoir, Janus n’a rien de plus pressé que de chasser le bâtard de Poitiers et les autres Français qui l’avaient accompagné[71].

Grand fut l’étonnement des ambassadeurs restés à Nice, prêts à partir au premier signal, quand ils apprirent ce qui venait de se passer[72]. Leur premier mouvement fut de s’en retourner à Marseille : ils croyaient la partie perdue. Pourtant les renseignements apportés par le bâtard de Poitiers étaient plus rassurants. Comment se résigner à croire que Janus se fût rendu coupable d’une aussi noire trahison ? Les témoignages de sympathie prodigués au bâtard par les habitants de Gênes ne donnaient-ils pas lieu de compter sur une prochaine revanche ? D’ailleurs Jean-Antoine de Fiesco occupait une des portes de la ville et avait juré de demeurer fidèle au Roi ; Fiesco possédait de nombreux amis à Gênes et au dehors : avec son concours on pourrait se rendre maître de la situation. Le comte de Lavagna et ses fils avaient renouvelé leurs serments. En outre les Spinola et les Adorni avaient déclaré que, si Janus ne tenait parole, ils le renverseraient et proclameraient le Roi. Le bâtard annonçait enfin que, à son retour, il avait été rendre visite au marquis de Final, dont le concours était acquis à la cause royale[73].

Dans un rapport circonstancié adressé au Dauphin[74], le bâtard de Poitiers manifestait les mêmes espérances. Tout en le congédiant, Janus avait protesté qu’il tiendrait ce qu’il avait promis et l’avait engagé à faire venir à Gênes les ambassadeurs du Roi. Une fois ceux-ci arrivés, on verrait à prendre, bonne conclusion. Le bâtard insistait pour que le Dauphin entrât personnellement en scène. Si ce prince consent à venir, rien n’est perdu ; sa présence sera un remède aux difficultés de la situation ; alors même que Janus et le duc de Milan manqueraient à leurs engagements, le Roi et le Dauphin atteindraient le but. Plût à Dieu qu’ils fussent informés de l’amour et de la sympathie qu’ont pour eux les Génois, qui désirent tant les avoir pour seigneurs ! Toute l’Italie, ajouta-t-il, a l'œil à votre venue ; il est nécessaire d’avoir bon conduit et avis. Il semble à vos serviteurs et à moi que, si le duc de Milan vous remet Asti, vous devez aller jusque-là et faire passer trois mille chevaux. Monseigneur de Savoie devra vous accompagner et vous recevoir dans ses pays, conformément à ce qui lui a été dit par monseigneur de Tucé et Charles de Castillon. Messire Benedetto (Doria) est de plus en plus disposé à tenir ses promesses. Nous n’attendons plus que monseigneur l’argentier (Jacques Cœur) pour faire voile... J’ai pris l’hommage et les serments de plusieurs à Gênes, et j’ai leurs scellés. Ainsi, délibérez votre père et vous : Gênes est et sera vôtre, sauf la lâcheté de vos serviteurs[75].

De son côté Jacques Cœur, dans une lettre datée de Montpellier, le 17 février, et adressée à Brezé et Précigny, s’exprimait en ces termes : Si le Roi veut approcher jusqu’à Lyon et qu’on fasse passer les gens d’armes par deçà, je ne fais nul doute que nous n’obtenions ce que nous demandons, à l’honneur du Roi, et plus sûrement que nous ne l’eussions eu d’une autre manière. Veuillez donc y tenir la main... Je vais expédier les États, et m’en vais jour et nuit devers messeigneurs (ses collègues) à Nice. Il est de nécessité que le Roi s’avance et que les gens d’armes passent promptement, car les nobles et la plupart des gens du pays n’attendent que d’être aidés ; ils se mettront sus contre les traîtres ; je vous promets qu’ils veulent la seigneurie du Roi. Et pour cela, s’il vous plaît, faites faire diligence que les gens d’armes viennent[76].

Le seigneur de Saint-Vallier et Jacques Cœur ne tardèrent pas à se rendre à Romans près du Dauphin. Là on tint conseil, en compagnie d’un noble génois, Andréas Squarza, parent de Benoît Doria. D’importantes résolutions furent prises. Prompte intervention à Gênes ; entrée immédiate du Dauphin en Italie, à la tête de dix mille chevaux et trois mille fantassins ; coopération de Benoît Doria, avec sa flotte, pour contraindre à la soumission ceux qui avaient usurpé le pouvoir, telles furent les mesures arrêtées. Il importait de les mettre sans retard à exécution. Andréas Squarza écrivit à Charles VII dans les termes les plus chaleureux, le pressant de prendre cette initiative, l’assurant qu’il pouvait compter sur l’attachement et l’entière fidélité des Gênois[77]. Benoît Doria, qui croisait avec ses vaisseaux près des îles d’Hyères, protestait en même temps de son dévouement, et suppliait le Roi de marcher résolument en avant : Que le Dauphin, disait-il, entre promptement en Lombardie ; qu’il occupe Asti, et tout ce que nous désirons s’accomplira[78].

Dans les premiers jours de mars, les ambassadeurs français s’embarquèrent à Villefranche, près de Nice, et firent voile vers Gênes[79]. Aussitôt arrivés, ils sommèrent Janus de Campo Fregoso de remplir ses engagements et de remettre aux mains du Roi la ville et la seigneurie. Mais Janus répondit qu’il en avait fait la conquête par l’épée, et qu’il les garderait par l’épée envers et contre tous. Les envoyés de Charles VII ne disposaient pas de forces suffisantes pour entreprendre une lutte à main armée et faire respecter le droit de leur maître ; ils durent reprendre le chemin de la Provence. Tant d’efforts et de sacrifices[80] avaient été faits en pure perte. La politique royale subissait un grave échec et son prestige en Italie se trouvait compromis. Le mécontentement fut grand à la Cour : C’est merveille du déplaisir qu’on a eu du fait de Gênes, écrivait au Dauphin un de ses confidents ; et s’excusent ceux qui y ont été les uns sur les autres[81]. Quant au jeune Louis, il ne dissimula point sa joie[82] ; il avait dès lors sa politique personnelle, et se souciait peu de seconder les desseins de son père.

On se résigna pourtant ; car, peu après, nous trouvons un des principaux conseillers du Roi en correspondance avec Janus de Campo Fregoso. Le doge de Gênes, répondant à Jacques Cœur, le remerciait des informations qu’il lui avait données sur l’état des affaires et sur les négociations avec l’Angleterre ; il l’assurait de ses dispositions favorables à la France et de son désir d’agir d’une manière conforme aux intérêts et à la grandeur du royaume[83]. Nous avons même une lettre du doge au Roi, apportée par des ambassadeurs du roi de Chypre venus à Gênes : Janus sollicitait Charles VII d’intervenir pour sauver le royaume de Chypre d’une ruine imminente, offrant de mettre sa flotte et ses ports à la disposition du Roi[84].

 

On avait définitivement échoué à Gênes. Serait-on plus heureux du côté d’Asti ? Le bruit courait qu’il se préparait en France une grande expédition dans le nord de l’Italie. Au commencement de février, un écuyer de Charles VII, traversant Florence en se rendant près du Pape, avait affirmé que deux mille chevaux avaient déjà franchi les Alpes, qu’Asti ne tarderait pas à être aux mains des Français, et qu’au printemps le Dauphin viendrait en personne, à la tête de cinq mille chevaux, pour porter secours au duc de Milan contre ses ennemis[85]. C’était d’ailleurs en Italie la croyance générale[86].

Charles VII était alors en relations non seulement avec le duc de Milan, mais avec les républiques de Florence et de Venise. Les Vénitiens lui avaient même envoyé un ambassadeur pour l’assurer de leurs bonnes dispositions[87]. En même temps que Théodore de Valpergue se rendait en Milanais pour prendre possession, au nom du Roi, de la ville et de la seigneurie d’Asti[88], Baudoin de Tucé partit pour l’Italie ; il était chargé d’une quadruple mission pour le duc de Milan et pour les seigneuries de Florence, de Gênes et de Venise[89]. Tucé était accompagné de Charles de Castillon[90]. C’était le moment où le Dauphin quittait la Cour pour se rendre en Dauphiné, et ce voyage n’était point étranger aux desseins de la politique royale. Le Roi lui-même songeait à se rendre en Lyonnais pour être à portée des événements et pouvoir parer plus facilement à toutes les éventualités[91]. Enfin le roi René s’apprêtait à partir pour la Provence, où il ne tarda pas à fixer sa résidence. Tous les regards, on peut le dire, étaient tournés vers l’Italie.

Cependant le duc de Milan s’efforçait par tous les moyens de sortir de la situation critique où il se trouvait. Tout en poursuivant ses négociations avec la France, il conclut un arrangement avec son gendre : moyennant d’importantes concessions, Sforza passa au service du duc avec le titre de lieutenant et capitaine général[92]. En outre, Philippe-Marie obtint le concours du roi d’Aragon, qui s’engagea à lui payer, pendant deux ans, une somme de quatre-vingt-quatorze mille ducats[93].

Dans la correspondance secrète échangée entre le duc et Sforza, il est fait allusion aux négociations avec la France. Chose curieuse, le Dauphin seul est mentionné. Le 31 décembre 1446, Philippe-Marie fait part à son gendre de la démarche de Thomas Tibaldo auprès du Dauphin : il a trouvé ce prince disposé à prêter au duc aide bonne et forte[94] ; mais, pour obtenir ce secours, le duc est contraint d’abandonner Asti[95]. Sforza répond le 2 février : M’est avis que le secours offert par le Dauphin est chose bonne ; m’est avis aussi que son amitié est pour vous chose capitale. Je dis ceci parce que, si l’engagement relatif à Asti n’était pas tenu, le Dauphin en demeurerait mécontent. Mais en même temps j’ajoute que Votre Seigneurie doit se conduire de telle façon qu’il ne puisse y avoir dans son pays autre coq ni autre poule que Votre Seigneurie[96]. — Nous reconnaissons que vous dites vrai en ce qui concerne Asti, réplique le duc. Ne point la délivrer au Dauphin serait l’indisposer contre nous. Nous avons donc résolu de lui en faire délivrance ; mais nous aurons bien égard à vos sages représentations et conseils[97].

Tout semblait prêt pour l’action. Le 11 mars, le duc de Milan écrivait à Sforza qu’il était entièrement d’accord avec le Dauphin et qu’il attendait le retour de son ambassadeur. Tibaldo avait dû conclure définitivement le traité par lequel le duc cédait Asti au Dauphin, à charge de lui fournir un nombre considérable de cavaliers et de fantassins[98]. En effet, les derniers arrangements avaient été pris à la date du 24 février, et le duc y donna son approbation le 16 avril[99]. Dans le courant de février, Charles VII avait fait partir ses gens de guerre pour Lyon, sous la conduite d’un de ses huissiers d’armes, Jean de Lizac[100]. A leur entrée en Italie, Regnault de Dresnay, bailli de Sens, devait en prendre le commandement. Un autre corps de troupes se trouvait en Provence, à la disposition du Dauphin et du roi de Sicile, et n’attendait qu’un signal pour franchir les Alpes[101].

Thomas Tibaldo ne tarda pas à rejoindre son maître. Nous le trouvons à Asti le 4 mai. Là, dans l’église de Saint-Second, en présence de Boniface de Valpergue et par-devant deux notaires, il jura solennellement, sur le livre des Évangiles et entre les mains de Regnault de Dresnay, représentant du Roi et du Dauphin, de délivrer, dans un délai de deux mois, les châteaux, forteresse, portes et citadelles d’Asti, à condition que les gages arriérés des officiers, capitaines, châtelains et connétable seraient payés par le nouveau gouverneur au nom du roi de France[102].

Ce nouveau délai, s’ajoutant à tant d’autres, n’était point fait pour satisfaire le représentant du Roi, qui, aux termes du traité, devait obtenir une livraison immédiate. Invoquant la teneur de son mandat et une lettre reçue de son maître Regnault de Dresnay menaça le duc de Milan, s’il n’obtenait satisfaction, de quitter aussitôt le Milanais pour retourner près du Roi, Philippe-Marie lui répondit par une lettre suppliante : il allait envoyer en France un de ses familiers, pour protester de son ferme vouloir de rester en bon accord avec le Roi et le Dauphin ; il écrirait à ces deux princes qu’il retenait leur envoyé, assumant toute la responsabilité du retard[103]. Évidemment le duc ne cherchait qu’à gagner du temps. Les instructions données à ses envoyés en France prouvent même qu’il voulait obtenir de nouvelles concessions[104] ; mais tous les efforts de sa diplomatie restèrent infructueux[105].

Tandis que les choses traînaient ainsi en longueur et que Dresnay attendait de jour en jour la livraison d'Asti, un grave événement vint modifier la situation. Depuis plusieurs mois la santé du duc de Milan inquiétait vivement son entourage ; au commencement d’août, il tomba malade ; le 13 août, il succombait à l’âge de cinquante-six ans.

En mourant, Philippe-Marie laissait un testament par lequel il instituait pour héritier le roi d’Aragon Alphonse V, l’ennemi juré de la France[106] ; mais de nombreux compétiteurs allaient se présenter : Charles d’Orléans, l’héritier légitime, du chef de sa mère Valentine Visconti[107] ; le duc de Savoie, dont la sœur était l’épouse de Philippe-Marie ; enfin François Sforza, à titre d’époux de Blanche-Marie, fille naturelle du feu duc.

Le premier acte de Charles VII, à la nouvelle de la mort du duc de Milan, fut d’écrire au duc de Savoie pour revendiquer hautement les droits de son cousin d’Orléans, et pour le prier de ne donner à ce prince aucun destourbier ou empeschement[108]. Ordre fut donné à Regnault de Dresnay d’occuper militairement Asti, et une armée fut dirigée sur la Lombardie. La république avait été proclamée à Milan, où quatre citoyens formaient un conseil suprême qui devait être renouvelé tous les deux mois. Charles VII députa un de ses écuyers vers la Communauté de la ville de Milan, et chargea Jean de Dresnay de porter à Regnault ses instructions[109].

Les événements marchaient vite en Italie. Dès le 15 septembre la république de Milan avait conclu une trêve avec la république de Venise et ouvert des négociations pour la paix. En même temps elle faisait appel à Sforza pour résister d’une part au duc de Savoie qui, secondé par le marquis de Montferrat, s’était avancé jusqu’à Novare à la tête de dix mille hommes, et d’autre part au Dauphin qui, disait-on, marchait en personne sur la Lombardie avec une puissante armée[110]. Regnault de Dresnay avait occupé Asti la veille même de la mort du duc[111], et disposait de cinq cents lances et d’un certain nombre d’archers[112]. Il ne tarda pas à entrer en négociation avec Sforza. D’un autre côté le duc de Bourgogne, qui s’était très nettement prononcé en faveur du duc d’Orléans et lui avait promis dix mille écus pour l’aider à conquérir le duché de Milan, intervint auprès de Sforza en faveur de son cousin[113].

Le célèbre condottiere semblait devoir être l’arbitre de la situation. Dès le 3 septembre, il avait franchi l’Adda et était entré sur le territoire de Lodi. Le 15, le château de Saint-Colomban tombait en son pouvoir. A ce moment, Pavie le reconnut pour seigneur, et il fit dans cette ville une entrée solennelle. Tortone ne tarda pas à suivre l’exemple de Pavie. De Pavie, Sforza marcha sur Plaisance, dont il entreprit le siège[114]. A la date du 2 octobre, sa femme, Blanche-Marie Visconti, lui écrivait en termes pressants pour l’engager à s’entendre avec la France[115].

Cependant Regnault de Dresnay, ayant reçu les renforts attendus, se mit en campagne. A la tête d’environ trois mille chevaux, il envahit le territoire d’Alexandrie et s’empara de plusieurs places. Cette attaque causa une vive alarme et amena dans la contrée un soulèvement général : en Italie comme en Alsace, les gens de guerre français semaient la terreur sur leur passage[116]. Les habitants d’Alexandrie se tournèrent vers Sforza, implorant son assistance ; celui-ci se borna à leur donner de bonnes paroles ; mais il envoya un message à Dresnay pour lui demander de respecter Pavie et Tortone. Le chef de l’armée royale répondit qu’il n’entendait rien faire qui pût rompre l’ancienne alliance de Sforza avec la Couronne ; il lui offrit même de la renouveler[117]. Sforza accueillit favorablement cette ouverture : nous avons le texte d’un sauf-conduit délivré, à la date du 15 octobre, à deux envoyés de Dresnay[118].

A ce moment, Dresnay faisait le siège de Bosco, situé non loin d’Alexandrie ; la reddition de ce château aurait mis la ville à la merci du vainqueur. Bosco était à la veille de capituler quand un effort suprême des Milanais vint changer la face des choses. Bartolomeo Colleoni et Astorre Manfredi, à la tête de quinze cents hommes, furent envoyés au secours des assiégés. Giovanni Trotti partit d’Alexandrie : avec une force presque égale. Le 17 octobre, Dresnay fut attaqué de deux côtés à la fois. Tout d’abord, les Français réussirent à tailler en pièces le corps de Trotti, dont ils firent un carnage effroyable. Mais, pendant ce temps, l’aile commandée par Dresnay était aux prises avec Colleoni et Manfredi : elle fut mise en déroute et contrainte de déposer les armes. Fait prisonnier, avec la plupart des siens, Dresnay fut emmené à Alexandrie. Sur trois mille Français, trois cents à peine, paraît-il, parvinrent à s’échapper[119].

Fort de l’appui du Roi et du duc de Bourgogne, le duc d’Orléans s’était mis en route pour la Lombardie. A son arrivée, il apprit l’événement qui portait un coup si fatal à sa cause. Le duc poursuivit néanmoins sa marche et vint s’établir à Asti. Il fit son entrée dans cette ville le 26 octobre et reçut le 10 novembre le serment de fidélité des habitants[120]. Charles d’Orléans devait séjourner dans sa seigneurie d’Asti jusqu’au mois d’août de l’année suivante, sans parvenir à aucun résultat. Malgré ses efforts personnels, malgré l’intervention de la diplomatie royale, les chances favorables ne se produisirent plus. Charles VII ne tarda pas à se convaincre que, pour le moment, il n’y avait rien à faire ; il déclara qu’il ne voulait entendre parler du règlement de la succession au duché de Milan que lorsque la paix de l’Église serait assurée.

 

 

 



[1] La succession de ce duché appartenait au duc d'Orléans, à défaut d'hoirs mâles, nés en légitime mariage, provenant de la lignée de Jean Galéas Visconti.

[2] Voir ci-dessus, chapitre premier.

[3] Il avait reçu l'investiture de cette seigneurie par lettres de l'empereur Sigismond en date du 18 septembre 1413.

[4] Original, Archives nationales, K 58, n° 2. Ce document a été publié en 1880 par le comte de Circourt, dans le précieux opuscule intitulé : Documents luxembourgeois à Paris concernant le gouvernement du duc Louis d'Orléans (tirage à part du t. XL des Publications de la Société historique de l'institut royal grand-ducal de Luxembourg), p. 93-95.

[5] Jean Le Jeune.

[6] Voir le Roi René par Lecoy de la Marche, t. I, p. 267.

[7] Lecoy de la Marche, le Roi René, t. I, p. 267.

[8] Voir Sismondi, Histoire des républiques italiennes, t. X, p. 55 et suivantes ; Varese, Storia della repubblica de Genova, t. III, p. 276 et s.

[9] Charles de Chantepleure, escuier, XIII l. XV s., pour avoir conduit en certaines contrées Syfron Roy, sire du Solier, et Anthoine de La Vernace, du pays de Gênes, venus devers le Roy luy remonstrer certaines choses. Sixième compte de Jean de Xaincoins (1er octobre 1443-39 septembre 1444), dans le ms. 685 du Cabinet des titres, f. 85 v°.

[10] Léonard, Recueil des traitez, t. I, p. 461.

[11] Extrait dans Osio, Documenti diplomatici, t. III. p. 357. Voir Barth. Facio, Comment. de rebus gestis ab Alphonse I, dans Straevins, t. IX, part. III, fol. 125 et suivants.

[12] Voir la relation du commandeur d'Issenheim, dans Tuetey, les Écorcheurs sous Charles VII, t. II, p. 523.

[13] Traité d'alliance et de confédération signé par le Dauphin le 17 octobre 1444 à Ensisheim, et par le duc de Savoie à Chambéry le 27 décembre suivant (Archives de Turin, Trattati, paquet 9, n° 2) ; arrangement au sujet des comtés de Valentinois et de Diois (mêmes dates : Archives de Grenoble, D 3030, et Fontanieu, 119-120) ; traité de commerce, en date du 21 novembre (ind. Le Grand, vol. VII, f. 1 v°).

[14] Ces détails sont empruntés aux instructions données à l'évêque d'Albenga, citées ci-dessous.

[15] Il est nommé dans le document : Dominum Franciscum militem et doctorem.

[16] Proposita coram Regia majestate christianissimi regis Francie, etc. Copie du temps dans Fontanieu, 119-120 ; copie moderne, Le Grand, VII, f. 68 v° et suiv.

[17] Voir un document en date du 26 décembre 1444, dans Osio, Documenti diplomatici, t. III, p. 351. C'est une lettre de Cosme de Médicis à Sforza (offrant malheureusement des lacunes causées par le mauvais état de l'original) où sont mentionnés ces projets. — Les Florentins étaient alors en pourparlers avec Alphonse. Dans des instructions données à ses ambassadeurs à Naples, Médicis recommandait que, dans les négociations en vue de la paix, on s'attachât à ménager les susceptibilités de la maison de France.

[18] En date du 23 février 1445, dans Osio, Documenti diplomatici, t. III, p. 365.

[19] Ogni adiuto e favore a luy possibile.

[20] E la secureza che pare ad esso nostre signore che se recheda monsignore Dalfino per ohservatione de tale cesse si è chel re di Franza e tuta la Casa de Franza prometta e se obliga a questo, offerendosse la excellentia d'esso nostro signore per la parte sua de fare che qualunca signore de Italia che piacerà ad ssso mons. Dalfino prometterà per luy. Osio, Documenti diplomatici, t. III, p. 365.

[21] E questo rechede esse signore per certe parole stanic e menaze qui sono usate par alcuni dal canto de là, quale non vole dire per honestà son e de quelli che hamno dicte simile parolle. Osio, Documenti diplomatici, t. III, p. 365.

[22] Con letissima acoylenza.

[23] Cette relation est publiée par Osio, t. III, p. 366-369, d'après l'original aux Archives de Milan. Il faut noter que partout on a imprimé Samiere au lieu de Nanciere. Aussi l'annotateur a-t-il supposé gien à tort que le lieu désigné pouvait dire Semur, dans le Jura.

[24] Voir plus haut, chapitre III.

[25] Paiement de 68 livres 18 s. t., fait à Chinon à Alvaire de Grimault, fils de messire Philippe de Grimault, du pays de Gênes. Autre paiement de 151 livres à Siffon Roy, sire du Solier, Antoine de Vernace, du pays de Gênes, et Charles de Chantepleure, pour leur voyage de Gennes à Tours. Huitième compte de Xaincoins, l. c.. fol. 101 et 100 v°.

[26] Archives de Gênes, Materie politiche, mazzo n° 12. Rapport de M. Étienne Charavay, dans les Archives des missions scientifiques, t. VII, p. 439. Cf. La Faille, Annales de la ville de Toulouse, t. I, p. 213.

[27] Registres des délibérations de Châlons, vol. III, f. 1 v°. Extrait publié par M. Étienne Charavay, Lettres de Louis XI, t. I, p. 200.

[28] C'étaient Robert Ciboule et Jean d'Auxy. Huitième compte de Jean de Xaincoins, l. c., f. 104 v° ; neuvième compte, f. 116.

[29] Nous avons la réponse faite par la seigneurie de Venise, en date du 11 mars1446 (?), à la notification du Dauphin. Lettres de Louis XI, t. I, p. 203.

[30] Nous le rencontrons, un peu auparavant, au nombre des ambassadeurs envoyés par Charles VII aux princes allemands. Voir instructions données à la date du 24 février 1445. Tuetey, t. II, p. 134.

[31] Le traité en question se trouve en minute aux Archives de Turin (Trattati, paquet 9, n° 5) et en copie à la Bibliothèque nationale, dans le ms. lat. 17779, f. 53-56. Il a été publié par M. Bernard de Mandrot : Um projet de partage du Milanais en 1446, dans la Bibliothèque de l'École des chartes (1883), t. XLIV, p. 119 et suivantes (tirage à part, gr. in-8° de 13 p.). Dès 1847 il avait été signalé par Scarabelli, dans l'Archivio storice italiano, t. XIII : Dichlarzione de documenti di storia piemontese raccolte dal marchese Felice Carone di San Tommaso, p. 310-311.

[32] Voir le chapitre suivant.

[33] Ces documents, en minute, se trouvaient jadis au Cabinet des titres, parmi les pièces du dossier FRANCE, ils sont actuellement dans le ms. latin 17779, f. 47 et suivants.

[34] C'est ce qui résulte d'un document cité par M. de Mandrot. En 1463 Louis XI, au cours de ses négociations avec les Suisses, accusa Philippe de Savoie de lui avoir fait perdre son serviteur le vice-chancelier Bolomier, ce qui, ajouta-t-il, m'a porté grand dommage, car il estoit en traictié de me faire avoir Geynes, qui a esté tout rompu par son trepas. Bolomier avait été emprisonné au château de Chillon, le 1er juillet 1445 ; il fut noyé le 1er septembre 1446. Voir Di Cugliento Bolomier, vice-cancelliere di Savoia, dans les Memorie storiche du comte Louis Cibrario (Turin, 1868, in-12), p. 93-112.

[35] Lettres patentes de Louis Dauphin, constatant qu'il a conclu avec le duc de Savoie un traité contenant ces stipulations. Chinon, 3 avril 1446. — Lettres patentes du Dauphin, ordonnant à ses gens du Dauphiné de prendre possession en son nom desdits comtés. Chinon, 5 avril 1446. — Lettres patentes du Dauphin commettant Gabriel de Bernes pour recevoir la somme de 54.000 écus d'or due par le duc de Savoie. Chinon, 5 avril 1446. — Ratification du traité par Charles VII, Chinon, au mois d'avril 1446. — Confirmation du traité par le duc de Savoie. Genève, 1er mai 1446. Archives de Turin, Traités avec la France, paquet 9, n° 3, 4, 7 et 8 ; Bibl. nat., ms. Brienne, 80, f. 155. Cf. Charavay, Lettres de Louis Dauphin (t. I des Lettres de Louis XI), p. 204 et suivantes, et Guichenon, Preuves de l'histoire généalogique de la maison de Savoie, p. 359.

[36] E facendose movemento alcuno per li Francesi, come se parta, et come se rendiamo certi segguira se non adesso in tempo. Biblioth. nat., Ms. ital. 1583, f. 51.

[37] Messire Pierre de Brezé, chevalier et conseiller du Roy, seneschal de Poitou 504 l., pour bailler à un chevalier italien venu devers le Roy, et 61 l. pour bailler à un escuyer. Huitième compte de Xaincoins, l. c., f. 102.

[38] Messire Jehan le Silleur, chevalier, docteur ès lois, LXIII l. XV s., pour un voyage de Chinon à Milan, en l'ambaxade devers le duc, et IIIc XII l. X s. — Me Milles d'Illiers, conseiller au parlement, pour semblable cause, CXLI l. XV s. et IIc LXXV l. — Messire Jehan le Silleur, chevalier, IIIIe XII l. V s., pour un voyage et ambaxade fait à Milan par devers le duc de Milan. — Me Milles d'Illiers, conseiller du Roy, pour semblable cause, IIc LXXV l. Huitième compte de Xaincoins, l. c., f. 102, 105, 105 v°.

[39] Voir sur cet évènement des lettres de Jacques-Antoine Marcello au doge de Venise (28 septembre), et d'Ange Simonetta à François Sforza (30 septembre). Ms. italien 1583, n° 88 et suivants. Cf. 1612, mêmes numéros.

[40] Copie du temps à la Bibl. nat., Ms. ital. 1583, f. 96. Édité par MM. Angela Butti et Luigi Ferrario, dans leur édition de la Storia di Milano de Bern. Corio, t. II (1856), p. 759-761.

[41] Elle s'était rendue d'abord à la cour de Savoie, où des ouvertures faites au duc par Philippe-Marie n'avaient point été agréées (lettre du 31 décembre 1446, citée plus loin). La date de novembre est donnée par un compte qui se trouve dans Le Grand, VI, f. 379.

[42] Le texte est dans Du Puy, 160, f. 49.

[43] C'est ce qui résulte du document cité plus loin, que M. Osio a publié dans ses Documenti diplomatici, t. III, p. 454-457.

[44] Copie du dix-septième siècle, faite sur une copie collationnée du temps, dans Du Puy, 760, f. 49 et suivants.

[45] Sauf le cas où les sens d'armes de la république feraient guerre ou porteraient dommage au duc de Milan.

[46] Perchè de luy esso Duca ha più noticia che de nissuna persona de la parte de zà, e sempre serà bon mezo a tutte le cosse che serano, a fare tra il prefato Re et Duca di Milano.

[47] Per sua humanità e gratia.

[48] Copie du temps, Bibl. nat., Ms. ital. 1583, f. 97. Édité par Osio, Documenti diplomatici, t. III, p. 451-457, d'après une copie aux Archives de Milan. J'ai comparé le texte italien avec les articles rédigés en français qui se trouvent dans Du Puy.

[49] Neuvième compte de Xaincoins, l. c., f. 116.

[50] Neuvième compte de Xaincoins, l. c., f. 108 v° et 112. Par lettres du mois de février données après la conclusion définitive du traité, Charles VII, qui avait nommé Tibaldo son conseiller et chambellan, érigea en comté les seigneuries de Bra et de Cherasco en faveur de l'ambassadeur milanais. Archives nat., JJ 178, n° 133.

[51] Responciones illustrissimi domini fiende per Abram (Abraham Arlizzi) ad capitula misa per Thomam Boneniesem. Minute aux Archives de Milan. Édité par Osio, l. c., p. 464-466.

[52] Copie du temps. Osio, l. c., p. 466-467.

[53] Lettres sans date. Datum Cande ; Datum Razilliaci, Ms. latin 5414A, f. 72. On voit par le huitième compte de Xaincoins (f. 103 v°) que le Roi était à Candes (canton de Chinon, Indre-et-Loire) au mois d'août 1446.

[54] Lettre sans date (Datum Cande, III...) à la réception des lettres apportées par Simon Blanco ; autre lettre sans date à la réception de nouvelles lettres apportées par Simon de Nones de Blanco. Ms. lat. 5414A, f. 71 v° et 75.

[55] Analyse dans Le Grand, vol. VII, f. 37. Spinola demandait qu'il lui fût permis d'attaquer Janus et ses compagnons au nom de la ville de Gênes, qui s'était mise sous la protection du roi de France.

[56] Berry, p. 429.

[57] Spicilegium, t. III, p. 766.

[58] Rôle du 26 mai 1447, dans les Preuves de Mathieu d'Escouchy, p. 259 et 264 ; Berry, p. 429. C'est à tort que Tanguy du Chastel est qualifié par le chroniqueur de sénéchal de Provence.

[59] L'original de ce curieux traité, avec les souscriptions autographes, se trouve dans Du Puy, vol. 760, f. 63-64.

[60] Adrien de But dit dans sa Chronique (p. 281) : Concilio Pontificis præfati, pars sanior elegit pro duce regem Franciæ, qui multum gratanter dominium illud acceptavit.

[61] Voir Varese, Storia della repubblica di Genova, t. III, p. 306. Cf. Giustiniani, Annali, éd. Spoterne, t. II, p. 376.

[62] Cela résulte d'un compte qui se trouve dans le recueil de Le Grand, et qui mentionne le voyage d'un poursuivant envoyé de Nice au Dauphin par l'archevêque de Reims. Le Grand, VII, f. 162 ; Lettres de Louis XI, t. I, p. 218.

[63] Lettre sans date. Ms. fr. 5909, f. 217 v°.

[64] Berry, l. c.

[65] Plusieurs grosses naves, gallées, galliotes et autres fustes qui par long temps ont esté tenues, soudoyées, armées et avitaillées pour ledit fait ès pors de Provence... une grant galioche et une galiote sur lesquelles mesdiz seigneurs ont esté de par ledit seigneur et ambaxade en sa dite ville de Jennes. Rôle du 26 mai 1447, l. c., p. 252.

[66] Dans une lettre de la république de Florence à son ambassadeur à Venise, en date du 9 février 1447, on parle d'une lettre du roi de France, la quale conteneva lui avere animo alla recuperazione del suo dominio della città di Genova ; e questo era di consentimento della maggiore parte di quelli cittadini, e che sperava in brieve avere effetto li suoi voti e desiderii. Desjardins, Négociations diplomatiques avec la Toscane, t. I, p. 59.

[67] Ve advisamo come li Francesi cercano cum ogni via de havere Zenoa. Et siamo quasi certe che stando le cose come le stanno la gli capitara un in le mane. Lettre chiffrée du duc de Milan à Sforza, en date du 31 décembre 1446. Ms. italien 1583 n° 158 et 159.

[68] Cette date est donnée par Guistiniani, l. c.

[69] Le 5 février 1447, Janus écrivait à Sforza qu’à son retour dans sa patrie, ses concitoyens l’avaient élu doge ; il lui faisait en son nom et au nom de la république, des offres de services et l’assurait de son dévouement. Archivio Sforzesco : Ms. ital. 1584 f. 24 et 26.

[70] Berry, l. c.

[71] Voici comment le fait est relaté dans la chronique abrégée qui se trouve dans le recueil de Godefroy (p. 347) : Messire Janus de Chamfrigor se saisit de la cité de Gennes, contre l'esperance et le gré du Roy de France, que les Genevois demandoient à seigneur.

[72] Les ambassadeurs étaient alors dispersés. L'archevêque de Reims était resté à Nice avec Chambes et Castillon, mais Tanguy du Chastel et Saint-Vallier étaient à Marseille ; Jacques Cœur s'était rendu à Montpellier, pour présider une réunion d'États. Un serviteur de Saint-Vallier fut dépêché en toute hâte au Roi, pour lui communiquer la nouvelle, et creva son cheval dans le voyage de Tours. Neuvième compte de Jean de Xaincoins, l. c., f. 113 v°.

[73] Ces renseignements nous sont fournis par une relation de Thomas de Clion, serviteur du bâtard de Poitiers, envoyée au Dauphin. Ms. fr. 18442, f. 157.

[74] Le Dauphin était sans cesse tenu au courant par son conseiller et chambellan : Tout le demené de Jènes vous ay souvent escript. Au mois de février, l'archevêque de Reims envoya de Nice un message au Dauphin. Lettres de Louis XI, t. I, p. 218.

[75] Lettre datée de Marseille, le 16 février. Original, Fontanieu, 119-120.

[76] Cette curieuse lettre porte cette signature :  ; elle se trouve en original dans Fontanieu, portefeuille 119-120, et a été publiée par M. Vallet de Viriville, en 1856 dans le Cabinet historique (t. II, p. I, p. 194), d’après une mauvaise copie du recueil de Le Grand, vol. VII, f. 79.

[77] Lettre d'Andreas Squarza, février 1447. Original, Le Grand, vol. IV, f. 11.

[78] Lettre du 3 mars 1447. Original, Ms. fr. 20238, f. 419.

[79] L'archevêque de Reims reçut 275 livres, pour luy ayder à avoir abillemens pour lui, pour plus honnorablement aller en l'embaxade de Gennes. (Rôle du 26 mai 1447, dans les Preuves de Mathieu d'Escouchy, p. 264). — Le 8 juillet 1447 il donnait quittance de 500 livres à lui données pour l'aider à supporter les dépenses qu'il avait eues à faire au voyage de Gênes. Ms. fr. 20887, p. 69.

[80] Une somme de 34.375 livres fut comptée à Jacques Cœur, par ordre du Roi, sans qu'il fût tenu d'en rendre compte. Même rôle, p. 252.

[81] Extrait du procès de Mariette, dans les Preuves de Mathieu d'Escouchy, p. 323.

[82] Dit qu'il avoit sceu que ledit se. (Brezé) avait dit au Roy que mondit seigneur (le Dauphin) fut fort joyeulx du fet de Geynes, et que le Roy se gouvernait si mal qu'on ne pouvait pis. Procès de Mariette, l. c., p. 288.

[83] Lettre de Janus à Jacques Cœur, en date du 25 septembre 1447. Ms latin 5414A, f. 78, publiée par M. P. Clément, Jacques Cœur et Charles VII, t. I, p. 301.

[84] Lettre de Janus au Roi (mal datée de 1437). Ms. latin 5414A, f. 75 v° ;  Spicilegium, t. III, p. 763.

[85] Lettre de la république de Florence à son ambassadeur à Venise, en date du 9 février 1447. Fabroni, Magni Cosmi Medici Vita, Preuves, p. 178, et Desjardins, Négociations diplomatiques avec la Toscane, t. I, p. 59.

[86] On lit dans l'Oratio d'Æneas Sylvius (Mélanges de Baluze, publ. par Mansi, t. I, col. 342), écrite au printemps de 1447 : Fama erat Delphinum in Italiam venturum opemque Philippo laturum.

[87] C’était Scipion Carafa. — Voir la lettre du Roi au doge de Venise, remise à cet ambassadeur, annonçant l’envoi d’une ambassade (au château de Montils-les-Tours, sans date). Ms. latin 5414A, f. 73 v°.

[88] Messire Théodore de Vaulpergue, chevalier, conseiller et chambellan du Roy, seneschal de Lyon, VIIIc l. pour son voyage en décembre 1446 devers le duc de Milan, pour prendre au nom du Roy possession de la ville et comté d’Ast, que ledit duc avoit promis par ses ambaxadeurs mettre en la main du Roy. — Boniface de Vaulpergue, escuyer d’escurie du Roy, IIIIc l., pour semblable. Neuvième compte de Xaincoins, l. c., f. 116 et 116 v°. Cf. rôle du 26 mai 1447, dans Preuves de d’Escouchy, p. 258.

[89] Messire Baudoin, seigneur de Tucé, chevalier, conseiller et chambellan du Roy, VIIIc l., pour son voyage devers le duc de Milan et les communautez des villes de Venise et de Gennes. (Id., f. 116 v°.) — A Mgr de Tussé, la somme de IIc l. t., laquelle le Roy lui a donnée pour avoir robes et autres habillemens pour luy, au moys de janvier derrenier passé, pour plus honnorablement aller en ambaxade à Florence où ledit seigneur l’a envoyé. (Rôle du 26 mai 1447, dans Preuves de d’Escouchy, p. 258.) — Nous avons retrouvé le texte d’une partie des instructions (sans date) qui lui furent données. Il devait, au cas où le duc de Milan l’engagerait à user de rigueur à l’égard, soit des Florentins, soit des Vénitiens, s’en garder ; tâcher au contraire de gagner la confiance de Cosme de Médicis et de Angelo Acciajuoli, et leur dire que le Roi désirait s’employer à réconcilier les Florentins avec le duc de Milan ; il devait dire à Médicis que le Roi était favorablement disposé à l’égard de Sforza, duquel il voulait se aider et servir. Tucé avait aussi mission d’aller vers les habitants de Bologne, et de leur remettre des lettres du Roi. (Minute, dans le ms. fr. 10238, f. 201.)

[90] Cela résulte de la lettre de créance (sans date) donnée à Tucé et Castillon pour le doge de Venise. Ms. lat. 5414A, f. 73 v°.

[91] On lit dans le neuvième compte de Jean de Xaincoins (l. c., f. 114) : Jehan de Levis, escuyer, seigneur de Vauvert, XL l. t., pour soy défrayer à Tours et s’entretenir en la compaignie du Roy, ou voyage qu’il avoit intention de faire de Touraine en Lyonnois. — Me Miles de Bregy, phisicien, XXVII l. X s., pour avoir un cheval et aller en la compagnie du Roy ou voyage de Lyonnois.

[92] Voir le texte en copie moderne. Ms. ital. 1598, f. 8 et suivants.

[93] Lettre chiffrée de Marcolino Barbavara à Sforza, en date du 3 mars. Ms. ital. 1584 n° 55 et 56.

[94] El trovo benissimo disposto de darne bono e grosso soccorso.

[95] Lettre chiffrée en original, avec traduction du temps. Ms. ital. 1583, n° 158 et 159.

[96] Ma pur jo fo questa conclusione che la S. V. faccia per modo che non gli habia ad essore ne posser essere altro gallo ne gallina nel paese vestro che la V. S. Lettre du 2 février. Ms. ital. 1584, n° 21.

[97] Lettre chiffrée en original, avec traduction du temps. Ms. ital. 1584, n° 36 et 38.

[98] Lettre chiffrée du duc de Milan en date du 11 mars 1447. Original, Ms. ital. 1584, n° 83, avec déchiffrement du temps, n° 84.

[99] Acte publié par Osio, t. III, p. 528-330. ll y a, aux Archives de Milan, deux autres lettres de ratification du duc, en date des 6 et 14 avril (Voir p. 529, note).

[100] Jean de Lizac, huissier d'armes, LV l. pour son voyage en février à Tours avec les gens du Bailly de Sens jusques à Lyon. — Jehan de Liseac, huissier d'armes, XXVII l. X s., pour la parpaye d'un voyage fait en fevrier 46 (v. st.) de Tours à Lyon, conduire les gens d'armes que le Roy envoyoit en Italie. Neuvième compte de Xaincoins, l. c., f. 116 v° et 117.

[101] Raoulin Regnault, escuier, XIIIxx v l. t., pour un voyage de Bourges assembler les gens d'armes en Provence devers monseigneur le Roy de Secille et monseigneur le Dauphin, et en Savoye. Neuvième compte de Xaincoins, f. 117.

[102] Procès verbal publié par M. Maurice Faucon, le Mariage de Louis d'Orléans et de Valentine Visconti, etc., p. 30-32.

[103] Lettre du 14 mai, dans Osio, Documenti diplomatici, t. III, p. 558.

[104] Elles se trouvent en original dans le ms. ital 1584, n° 151, et portent la date du 20 mai.

[105] Voir instructions à Abraham Ardizzi, en date du 20 mai ; lettres à Ardizzi, en date des 18 et 26 juin. Ms. ital. 1584, n° 151 ; Osio, t. III, p. 571 ; Ms. ital. 1584, n° 192.

[106] Le 14 août, Antonio Guidoboni écrivait à Sforza : L’amicho e spazato cum alchuna ordinatione facta in modo de codecillo... E fece re d’Aragona erede del tuto, non facta mentione di M. B. (Madonna Blancha) ne de la mogliere, ne d’altri. Lettre citée par M. D. Gampietro dans l'Archivio storico lombardo, t. III, p. 646.

[107] Voici les termes du contrat de mariage de Valentine, en date du 17 janvier 1387 : Item est actum et in pactum solempni stipulatione vallatum expresse deductum, quod in casu quo prefatus dominus Johannes Galeas Vicecomes, comes Virtutum, dominus Mediolanensis, decedat sine filiis masculiis de suo proprio corpore et legitimo matrimonio procreatis, dicta domina Valentina, nata sua, succédât et succedere debeat in solidum in toto dominio suo presenti et futuro quocumque, absque eo quod per viam testamenti codicillorum, seu alicujus alteris ultimæ voluntatis aut donationis inter vivos, ipsa aliquid faciat seu facere patini in contrarium quovis modo. Archives nationales, J 409, n° 42.

[108] Lettre extraite du ms. 154 des Archives du canton de Genève, et communiquée par M. Fréd. Borel ; le texte a été donné, assez incorrectement par Gaullieur, Archiv. Schwrizerische Geschichte, t. VIII, p. 273.

[109] Neuvième compte de Xaincoins, l. c., f. 110 v° et 117.

[110] Lettres des capitaines et défenseurs de la liberté de Milan à Sforza, en date du 15 septembre. Ms. ital. 1584, n° 312.

[111] Simoneta (dans Muratori, t. XXI. col. 412) dit que le fait s'était accompli la veille même de la mort du duc. Cf. Corio, t. III, p. 101.

[112] Neuvième compte de Xaincoins, l. c., f. 117 v°.

[113] Sickel, Beiträge und Berichtigungen zur Geschichte der Erwerbung  Mailands durch Franz Sforza, dans Archiv für Kunde œsterreichische Geschichts-Quellen, t. XVIII, p. 193.

[114] Sismondi, Histoire des républiques italiennes, t. IX, p. 276 et suivantes.

[115] Et ben che cognosea non bis ognare a la S. V. li mieij consigli, non dimeno me pareria che subito mandasti dal Re de Franza o dal Dalfino, overo da chi altri ve parera meglio et piu expediente, et con loro praticare de fare per modo che dicti Milanesi se habbiano ad pentire de sua prava oppinione. Ms. ital. 1584, f. 342.

[116] Nam tanta erat apud vulgus Galliœ crudelitatis innatæ opinio, ut vix homines imperiti ac ex se pavidi et assiduo edam mulierum comploratu impulsi contineri possint, quin plerique concilia inirent, et magistratum suorum injussa ad sese gallis dedendum obviam progrederentur. Simoneta, l. c., col. 413.

[117] Simoneta, l. c., col. 413.

[118] Faucon, l. c., p. 23.

[119] Voir sur cet événement le récit circonstancié de Simoneta, l. c., col. 428-431 ; Marino Sanuto, dans Muratori, t. XXII, col. 1127 ; lettre de la république de Milan sur la victoire, dans Urkunden und Regesten zur Gesehichte des St-Gothardpasses, von Herm. von Liebenau : Archiv. für Schweizerische Geschichte, t. XVIII, p. 407-408 ; lettre de la république à Sforza, en date du 18 octobre. Ms. ital. 1584, f. 355. Il y a dans d'Argentré, Histoire de Bretagne, t. XII, ch. IV (p. 810-811), un récit de la bataille qui n'est point à négliger.

[120] Voir le rapport de M. Maurice Faucon, p. 23.