HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE III. — CHARLES VII DEPUIS LE TRAITÉ D'ARRAS JUSQU'À LA TRÊVE AVEC L'ANGLETERRE - 1435-1444.

 

CHAPITRE IX. — LE VOYAGE DE TARTAS ET LA CAMPAGNE DE GUYENNE.

 

 

La capitulation de Tartas ; situation de la Guyenne. — Le Roi, continuant son rôle de justicier, se rend dans les provinces de l'ouest : il force les capitaines qui ravageaient ces provinces à reconnaître son autorité. — Charles VII à Limoges ; le duc d'Orléans vient faire sa soumission — Charles VII à Toulouse ; il entre en campagne et va tenir la journée de Tartas. — Expédition en Guyenne : prise de Saint-Sever et de Dax. — Situation de Bordeaux ; terreur des Anglais. — Le Roi se dirige vers Bordeaux ; il soumet toute La contrée sur son passage. — Siège de la Réole ; prise de Dax ; Saint-Sever perdu et reconquis ; réaction en faveur des Anglais. — Charles VII quitte la Guyenne et va s'installer à Montauban. — Négociations entre l'Angleterre et le comte d'Armagnac pour le mariage d'une fille du comte avec Henri VI ; les succès de la cause royale viennent entraver et finalement faire échouer ces négociations. — Plan d'une nouvelle campagne en Guyenne, avec le concours de La Castille ; délivrance de la comtesse de Comminges ; le Roi impose sa loi aux grands seigneurs du midi. — Le roi René et sa femme viennent trouver le Roi et la Reine à Toulouse ; retour dans les provinces du centre.

 

En 1437, Charles VII avait, en personne, dirigé la campagne contre Rodrigue de Villandrando et fait le siège de Montereau. En 1440, il avait triomphé de la Praguerie. En 1441, il avait pacifié la Champagne, et, après un long siège, chassé les Anglais de Pontoise. L'année 1442 devait être signalée par une expédition en Guyenne qui, si elle ne porta point un coup mortel à la domination étrangère, ne laissa pas que de l'ébranler et prépara les voies à la conquête de 1451.

Le comte de Huntingdon, lieutenant général de Henri VI[1], était venu, à la fin d'août 1440[2], mettre le siège devant Tartas, qui appartenait à Charles, seigneur d'Albret. Après une longue et vaillante résistance, les défenseurs de la place avaient été forcés de capituler : par un traité passé entre les commissaires délégués par le sénéchal de Guyenne, Thomas Rampston, et le comte de Huntingdon, et les représentants du sire d'Albret, traité contenant des stipulations très préjudiciables aux intérêts de la France[3], Tartas avait été livré à l'ennemi. A la vérité, le pacte était conditionnel : une journée avait été assignée ; chacune des parties pouvait y paraître en armes ; si l'avantage restait aux Français ; la capitulation se trouvait annulée.

Il était d'une haute importance politique d'obtenir ce résultat. L'occupation définitive de Tartas aurait entraîné la perte de tout ce que les Français possédaient encore dans le sud de la Guyenne et placé les seigneurs du pays sous la dépendance de l'Angleterre. Par lettres signées de sa main, Charles VII fit savoir au sire d'Albret qu'il tiendrait en personne la journée de Tartas, à la tête de la plus nombreuse armée qu'il pourrait réunir[4]. Nous avons vu quelle ténacité le Roi apporta dans l'exécution de ce dessein, qu'aucune considération ne put lui faire abandonner.

La situation du midi exigeait, d'ailleurs, sa présence. La diplomatie des princes, toujours active et entreprenante, avait tendu ses fils de ce côté aussi bien que dans le nord : sur l'initiative des ducs de Bretagne, d'Orléans et d'Alençon[5], tous trois proches parents du comte d'Armagnac[6], des négociations étaient à la veille de s'ouvrir pour le mariage de Henri VI avec une fille de ce puissant seigneur. Nous avons un sauf-conduit, en date du 28 juin 1441, délivré par le roi d'Angleterre à des ambassadeurs du comte d'Armagnac, pour se rendre à sa Cour[7]. D'autre part, le 8 juillet de cette même année, un traité d'alliance était passé par le comte d'Armagnac avec le duc de Bourbon et le comte de Montpensier[8]. Charles VII n'ignorait point, sans doute, que, dès le mois de juillet 1437, des négociations avaient été entamées par le gouvernement anglais avec le comte d'Armagnac et le sire d'Albret[9] ; aux termes d'un projet de traité, rédigé à ce moment, ces deux seigneurs devaient s'engager à ne laisser commettre, de la part de leurs sujets, aucun acte d'hostilité contre le roi d'Angleterre, et à rappeler ceux de leurs vassaux qui servaient sous la bannière de Charles VII[10]. En ce qui concerne le sire d'Albret, l'affaire n'eut point de suite : l'attitude hostile des Anglais, les faveurs dont il ne cessa d'être l'objet de la part du Roi, le prouvent suffisamment[11]. Quant au comte d'Armagnac, il garda une attitude douteuse ; mais son fils, le vicomte de Lomagne, prit une part très active à la campagne de 1439 contre le comte de Huntingdon, et servit le Roi pendant la Praguerie.

Les Anglais furent plus heureux d'un autre côté. A la date du 8 août 1441, un traité fut passé par Thomas Rampston, sénéchal de Guyenne : il stipulait une trêve de quatre ans entre le roi d'Angleterre d'une part, et les comtes de Penthièvre et de Beaufort, d'autre part, pour toutes les possessions de ces seigneurs situées dans le voisinage de la Guyenne[12]. Ce traité avait pour résultat d'isoler les possessions anglaises au nord de la Guyenne et de former comme une zone neutre s'étendant sur toute la frontière du duché de Guyenne, depuis la Saintonge jusqu'à l'Auvergne.

Avant d'entreprendre le voyage de Tartas, Charles VII, continuant ce rôle de justicier qu'il n'avait cessé de remplir depuis son ordonnance de 1439, voulut mettre un terme aux excès qui se commettaient librement dans ses provinces de l'ouest. La mission donnée au Dauphin, en décembre 1439, n'avait point été remplie : le Roi résolut de prendre lui-même la chose en main. A peine remis des fatigues du siège de Pontoise, il se rendit à Saumur, où il arriva le 12 décembre 1441, en compagnie de la Reine, du Dauphin et du comte du Maine.

Le Roi avait fait connaître au duc de Bretagne la résolution où il était d'empêcher les pilleries commises par les gens de guerre bretons en Anjou, en Saintonge et en Poitou, où ils s'étaient fortifiés dans des châteaux, véritables repaires de brigands. Une ambassade du duc vint trouver le Roi ; des arrangements furent pris pour l'évacuation de ces châteaux, et le duc les fit remettre entre les bains du connétable[13]. Charles VII entendait supprimer les abus, de quelque côté qu'ils vinssent. Pendant son séjour à Saumur, il prit deux mesures importantes : par l'une il nommait deux généraux réformateurs des monnaies ; par l'autre il enlevait ses pouvoirs à Guillaume de Champeaux, évêque de Laon, dont l'administration financière en Languedoc avait été signalée par de graves malversations[14].

Après avoir célébré à Saumur la fête de l'Épiphanie, Charles VII se rendit à. Bressuire. Il s'agissait de dissoudre une véritable ligue dont La Trémoille était le chef. Le Roi envoya mettre en sa main Mareuil et Sainte-Hermine, occupées par les gens de La Trémoille ; les deux places furent évacuées, et les capitaines ne furent maintenus qu'après avoir prêté serment de ne plus molester les habitants de la contrée[15]. Pendant son séjour à Bressuire, le Roi donna des lettres (17 janvier), convoquant à Toulouse pour le 1er avril les nobles et les milices du midi[16] ; il envoya en même temps aux comtes d'Armagnac, de Foix et de Comminges, au vicomte de Lomagne et au sire d'Albert l'ordre de venir le trouver dans cette ville, à la tête de toutes les forces dont ils pourraient disposer[17].

De Bressuire, le Roi se rendit à Niort. Cette ville fut enlevée au duc d'Alençon, qui en avait la garde, et placée sous l'autorité royale. A la date du 24 janvier, Charles VII rendit un acte qui atteste l'ascendant de son pouvoir. Considérant que nul ne devait se mettre en armes ni tenir des gens de guerre sans son autorisation, sous peine de crime de lèse-majesté et d'être tenu pour rebelle et ennemi de la chose publique, il déclara Jacques, sire de Pons, Guiot dg la Roche, Maurice de Pluscallec et plusieurs autres, — lesquels, depuis longtemps, malgré les inhibitions et défenses à eux faites, n'avaient cessé d'avoir sous leurs ordres des gens de guerre en grand nombre et d'exercer les plus cruels ravages dans le Poitou, la Saintonge et les pays voisins, — destruiseurs et depopulateurs de pays et crimineulx de lèse magesté envers lui et la chose publique, les bannit du royaume et confisqua tous leurs biens. Dix jours leur étaient donnés pour se rendre à merci[18]. Voulant donner une prompte sanction à cette mesure, Charles VII s'avança jusqu'à Saint-Jean-d’Angély et Saintes. A l'arrivée du Roi, marchant à la tête de son armée, Jacques de Pons s'empressa de faire pleine et entière soumission ; il abandonna les places que lui et son père n'avaient cessé d'occuper, prétendant les tenir en gage de la Couronne[19]. Mais Maurice de Pluscallec, loin de suivre cet exemple, se retrancha avec ses frères dans la ville de Taillebourg et garnit de gens de guerre les autres forteresses de la châtellenie[20]. Un corps d'armée, envoyé pour les mettre à la raison, entra de vive force dans Taillebourg et les fit tous trois prisonniers. Maurice fut conduit à la Rochelle et déclaré coupable de lèse-majesté ; ses gens, en punition de leurs crimes, subirent la peine capitale[21].

Ayant pourvu de la sorte à la sécurité de la Saintonge, Charles VII reprit le chemin du Poitou. Le 2 mars il était à Lusignan. Par lettres données dans cette ville, le Roi prit des mesures pour assurer la bonne administration du royaume pendant son expédition dans le midi[22]. Charles VII se rendit ensuite à Ruffec, où il passa les fêtes de Pâques[23]. Un des capitaines désignés dans l'acte du 24 janvier n'avait pas encore fait sa soumission : c'était Guiot de la Roche ; un détachement fut envoyé devant Verteuil, que ce capitaine occupait avec deux cents hommes. Quand il vit approcher les bombardes et engins volants qui lui annonçaient une attaque en règle, Guiot de la Roche s'empressa d'ouvrir les portes, et prit l'engagement de ne jamais porter les armes contre le Roi. Par ordre royal, la place fut aussitôt démolie[24].

Pendant son séjour à Ruffec, Charles VII vit arriver le comte de Dunois. Cette fois, Dunois ne venait plus comme porteur de paroles des princes assemblés à Nevers ; il était chargé d'une mission spéciale de son frère : le duc d'Orléans faisait offrir au Roi de s'employer à la remise entre ses mains de la ville d'Angoulême, occupée par les gens de Guiot de la Roche. Le Roi accueillit favorablement cette proposition ; bientôt un traité, passé par Dunois, amena l'évacuation complète de l'Angoumois par les pillards[25].

Sur la demande des Anglais[26], la journée de Tartas avait été reculée du 1er mai au 24 juin. Le Roi, voulant empêcher les désordres qui pouvaient résulter de l'agglomération de ses troupes dans la sénéchaussée de Toulouse, ordonna de les disperser et leur assigna un autre rendez-vous[27].

Charles VII arriva le 1er mai à Limoges, et y séjourna jusqu'au 26. C'est dans cette ville, on l'a vu, qu'il donna audience aux ambassadeurs des princes. C'est là aussi qu'il reçut une visite assez inattendue, celle du duc d'Orléans. Le duc arriva vers le 18 mai, en grand appareil, en compagnie de sa femme, de plusieurs de ses conseillers et de deux envoyés du duc d'Alençon[28]. Il avait sans doute fait préparer les voies par Dunois, car, par lettres du 8 mai, Charles VII lui avait fait don de tous les deniers, provenant de la recette des aides, perçus dans ses domaines depuis son retour en France[29]. Le Roi accueillit son cousin avec empressement, et, à la date du 24 mai, lui accorda une aide de cent soixante-huit mille neuf cents écus d'or, pour l'aider au paiement de sa rançon[30] ; des mesures furent prises aussitôt pour la levée de cette imposition[31]. Par d'autres lettres en date du 28, le duc d'Orléans fut autorisé à pourvoir, dans tous ses domaines, aux offices des greniers à sel et gabelles[32]. Le Roi ne se contenta pas de donner au duc ces marques signalées de sa bienveillance ; il écrivit à toutes ses bonnes villes pour leur recommander les intérêts du duc et les inviter à lui prêter un concours financier[33]. Le jour de la Pentecôte (20 mai), le Roi tint haulte feste, ayant à ses côtés le Dauphin, le duc et la duchesse d'Orléans, le comte du Maine, le connétable de Richemont et le comte de la Marche[34].

Le 2 juin, le Roi traversait Figeac[35]. Le 8, il fit son entrée solennelle à Toulouse. Vêtu de noir, monté sur un cheval blanc, le Roi s'avança sous un dais porté par huit capitouls, et fut complimenté par les gens des Etats, alors réunis dans la capitale du Languedoc. Les comtes de Foix, d'Armagnac, de Comminges et d'Astarac s'étaient rendus à l'appel du Roi ; ils s'engagèrent à le servir en personne, à la tête de leurs gens, et à mettre leurs seigneuries sur le pied de guerre[36]. Le vicomte de Lomagne, fils du comte d'Armagnac, était en armes depuis le mois de janvier, et tenait la campagne sur les frontières de la Guyenne[37].

La réunion de l'armée eut lieu dans le voisinage de Toulouse. D'après le héraut Berry, on peut évaluer son effectif à trente-deux mille hommes[38]. Mais le Roi, informé à l'avance que les Anglais ne se présenteraient pas en force devant Tartas, n'en prit avec lui qu'une partie, afin que ses gens fussent mieux pourvus de vivres et que les populations eussent moins à souffrir de leur passage[39].

Charles VII quitta Toulouse le 11 juin. Il avait en sa compagnie le Dauphin, le comte du Maine, le connétable, les comtes d'Eu, de la Marche et de Foix, le vicomte de Lomagne, les comtes de Comminges, de Tancarville et d'Astarac, le sire d'Albret et son fils le vicomte de Tartas, le maréchal de Jalognes, le maréchal de Lohéac, l'amiral de Coëtivy, le seigneur de Montgascon, fils aîné du comte de Boulogne, Louis de Laval, seigneur de Chastillon, et environ cent cinquante barons ou chevaliers bannerets : et faisoit, dit le héraut Berry[40], fort bon veoir tous ces gens là en moult belle ordonnance, et en grans habillemens de chevaux et de harnois couverts de soye et d'orfevrerie. Sur son passage, plusieurs places lui refusèrent obéissance ; mais, sans s'arrêter à les réduire, il poursuivit sa route : le 23 juin, il prit position à Meilhan, petite ville fortifiée située dans les environs de Tartas[41].

Le lendemain 24, entre dix et onze heures du matin, Charles VII était en bataille sous les murs de Tartas, et il y resta toute la journée. Personne ne parut du côté des Anglais. Le seigneur de Cauna et Augerot de Saint-Per, qui avaient la garde de la ville, vinrent lui en apporter les clés et remettre les otages entre ses mains. Puis le Roi alla prendre son gîte au château de Cauna, dont le seigneur lui fit obéissance[42].

Un tel déploiement de forces ne devait point se borner à une simple parade ; il s'agissait d'une véritable campagne[43], et toutes les mesures avaient été prises pour en assurer le succès. Le Roi marcha aussitôt sur Saint-Sever, qui fut pris d'assaut (25 juin) ; Thomas Rampston, sénéchal de Guyenne, y fut fait prisonnier[44]. De là, il se porta sur Dax. Cette ville, située sur l'Adour, et très bien fortifiée, était le seul rempart que l'ennemi pût opposer sur la frontière méridionale de la Guyenne. Dax une fois pris, les communications par terre avec Bayonne se trouvaient interceptées, et, au nord, la route de Bordeaux était ouverte. Tandis que les énormes canons de Jean Bureau entamaient les murs et que l'on complétait le blocus, divers corps de troupes s'avançaient par l'Agenais, le Périgord et la Saintonge : Clairac, sur le Lot ; Royan, à l'embouchure de la Gironde, furent pris ; Sourzac, situé près de Mussidan., fut assiégé par le sire de Pons, un des lieutenants du Roi en Périgord[45].

Une véritable panique régnait à Bordeaux. Personne, parmi les Anglais, n'était en mesure de prendre le commandement en l'absence du sénéchal de Guyenne. Ce qui ajoutait aux alarmes de la situation, c'est qu'avec le sénéchal le sceau du duché était tombé aux mains des Français : on craignait qu'ils ne s'en servissent pour répandre des instructions mensongères. A la nouvelle de la marche de Charles VII sur la Guyenne, Édouard Hull avait été, en toute hâte, envoyé en Angleterre pour faire savoir que Bordeaux était menacé[46], et l'on attendait avec impatience le résultat de sa mission. Tout à coup arrivent des dépêches revêtues du sceau de l'aigle, c'est-à-dire du sceau privé de Henri VI[47]. Le messager qui en est porteur a débarqué à Castillon et est arrivé par terre à Bordeaux ; elles sont aussitôt communiquées au Conseil de Guyenne. Le bruit se répand qu'il ne faut attendre aucun secours, car, en Angleterre, on ne prend nul souci du sort de la contrée. Le peuple, se croyant abandonné, s'assemble tumultueusement : une sédition est imminente ; l'émotion se propage aux environs de la ville.

Sur ces entrefaites arrivent à Bordeaux (16 juillet), deux envoyés du roi d'Angleterre : Robert Roos, chevalier, écuyer tranchant de Henri VI, et Thomas Bekynton, son secrétaire ; ils sont accompagnés par Jean de Batute, conseiller du comte d'Armagnac. Les deux envoyés trouvent la ville pleine de rumeurs, le peuple en proie au plus violent désespoir : En huit jours, lit-on dans le rapport adressé par eux à leur maître[48], toute la contrée s'est soulevée, et les barons et gentilshommes ont fait comme les autres. La dépêche trace de la situation le tableau le plus alarmant.

L'archevêque de Bordeaux, Pey Berland, prit alors une initiative qui ranima les courages. Dans une grande assemblée tenue à l'église Saint-André (18 juillet), il donna lecture des lettres du roi d'Angleterre qu'on venait de recevoir, en les traduisant en langue vulgaire. Ces lettres annonçaient l'envoi d'un prompt secours et l'ouverture de négociations pour le mariage du roi avec une fille du comte d'Armagnac. L'archevêque, dans une chaleureuse allocution, insista sur la sollicitude du Roi pour la conservation de la ville, le salut des habitants, la protection de leurs intérêts, et exhorta vivement à employer tous les moyens pour la défense de la cité[49]. Les travaux furent repris comme par enchantement : l'activité déployée fut telle que, six jours après, les envoyés de Henri VI pouvaient écrire à leur maitre : La ville est désormais de toutes parts si bien munie et si puissante, que, à notre avis, les habitants sont dignes des plus grands éloges[50].

Les États décidèrent que Pey Berland se rendrait en Angleterre pour exposer au roi la situation critiqué du pays et presser l'envoi des secours. L'archevêque s'embarqua le 25 juillet, suivi jusqu'à son navire par le maire, les jurats et tous les notables de la ville.

Ce n'étaient là, toutefois, pour les Bordelais, que des espérances assez lointaines. Ce qui était prochain, c'était le péril de l'invasion : le Médoc et l'Entre-deux-mers étaient de plus en plus menacés ; Bordeaux pouvait, d'un montent à l'autre, être attaqué. Le 1er août, six gabares, montées par des Français, pénétrèrent dans le port et capturèrent deux navires chargés de vin et de blé[51]. Le 2 août, Dax fut pris d'assaut[52], et le château d'Orthe, au sud de cette place, ne tarda pas à être occupé. On s'attendait à voir Charles VII marcher sur Bayonne, et, à Bordeaux, l'on ne supposait pas que la ville pût tenir au-delà de huit jours[53].

Tel était évidemment l'objectif du Roi : il voulait isoler le comte d'Armagnac et se rendre maître de toute la Guyenne méridionale. Mais, soit que la crainte d'un siège long et difficile lui ait fait abandonner ce dessein, soit que la nouvelle du désarroi qui régnait à Bordeaux l'ait décidé à se porter aussitôt vers la capitale de la Guyenne, il prit tout à coup la direction du nord. S'avançant par Agen[54], Charles VII descendit la vallée de la Garonne, en faisant occuper toutes les places situées sur les rives de ce fleuve. Le 24 septembre, il vint s'établir à Marmande, où il reçut la soumission de plusieurs villes. Bon nombre de seigneurs gascons vinrent lui prêter serment. Peu à peu toute la contrée redevenait française. Continuant sa marche sur Bordeaux, l'armée royale vint le 3 octobre mettre le siège devant La Réole, qui, après plusieurs assauts, capitula le 7. Bientôt l'avant-garde parut à Saint-Loubès, à quatre lieues de Bordeaux.

Les Bordelais étaient terrifiés. Dans la ville, des divisions intestines paralysaient la défense : Robert Roos, nommé régent par les États, voyait le maire de Bordeaux méconnaître son autorité et refuser d'obéir à ses ordres[55]. Le doyen de Saint-André, vivement impressionné par la gravité de la situation, déclara en plein Conseil que si l'ennemi arrivait jusqu'à Bordeaux et qu'on restât avec un millier d'Anglais pour tout secours, il n'y avait plus qu'à se soumettre. On parlait d'une attaque dirigée sur Blaye[56], et il ne tint point à Charles VII que le siège ne fût mis devant cette place[57].

Cependant une réaction se faisait, sur certains points, au sein même de la population, étroitement unie à la domination anglaise par de longs souvenirs, et, il faut le dire aussi, par ses intérêts commerciaux. Dès le 24 août[58], les habitants de Bayonne avaient tenté un coup de main sur Dax, dont la garnison était insuffisante, et avaient réussi à reprendre cette ville. Saint-Sever était également retombé au pouvoir des Anglais ; mais le comte de Foix, envoyé par Charles VII, avait pu sans difficulté y rétablir l'autorité royale[59]. L'arrivée d'Édouard Hull, débarqué à Bordeaux le 22 octobre avec un petit corps de troupes, rendit courage aux Bordelais. Le 26, sous la conduite de Robert Roos, ils entreprirent une expédition sur Saint-Loubès la tentative, habilement dirigée, eut un plein succès. Peu à peu les Anglais reprirent l'offensive et recouvrèrent quelques places.

Charles VII était retenu devant La Réole, dont le château, défendu avec vigueur, résistait à tous les efforts ; Le Roi présidait en personne aux opérations militaires. Ce n'est que le 7 décembre, après cinquante-sept jours de siège, que le château capitula. Cette héroïque résistance avait sauvé Bordeaux. Au moment même où Charles VII en triomphait, Pey Berland revenait d'Angleterre, annonçant l'arrivée prochaine d'une armée commandée par le comte de Somerset[60]. De tontes parts lés habitants, soulevés contre les Français, prenaient les armes. Les femmes elles-mêmes se mêlaient à la résistance, et il n'était pas de jour qu'elles n'amenassent des prisonniers à Bordeaux[61]. Sur ces entrefaites le feu fut mis au logis du Roi à La Réole ; si les archers de la garde écossaise n'eussent ouvert un passage au Roi en minant la muraille, Charles VII eût péri au milieu des flammes : il s'échappa en chemise par la brèche ; son épée, dite l'épée de Saint-Louis, fut détruite dans l'incendie[62]. L'hiver était très rigoureux ; la Garonne gelée ; impossible de recevoir des vivres de Toulouse. La famine sévissait dans l'armée, qui perdit la plus grande partie de ses chevaux. Le Roi dut renoncer à poursuivre son entreprise. Laissant Olivier de Coëtivy à La Réole, avec une forte garnison, il donna le signal de la retraite, et alla s'établir à Montauban (28 décembre).

L'expédition de Charles VII en Guyenne n'eut Oint seulement pour résultat de mettre en péril la domination anglaise et d'infliger à l'ennemi de graves échecs ; elle porta un coup décisif aux négociations entamées par le comte d'Armagnac avec Henri VI et empêcha d'y donner suite.

Poussé par les princes qui, on l'a va, étaient alors en relations suivies avec les conseillers du roi d'Angleterre en France et ne craignaient pas de recourir à tous les moyens pour fortifier leur coalition contre la Couronne, le comte d'Armagnac avait fait proposer au jeune roi la main d'une de ses filles. L'ambassade envoyée dans ce but en Angleterre avait été accueillie avec empressement. Le 20 mai 1442, Henri VI donnait des pouvoirs pour traiter de son mariage[63] ; le 16 juillet ; deux ambassadeurs anglais, chargés de suivre la négociation, débarquaient à Bordeaux. Mais d'une part la situation critique faite aux Anglais par la marche victorieuse de Charles VII ; de l'autre les craintes que le voisinage de l'armée royale inspirait au comte d'Armagnac allaient bientôt changer la situation.

Jean de Batute, archidiacre de Saint-41ntonin de Rodez, chancelier du comte, était revenu d'Angleterre en compagnie de Roos et de Bekynton. De Lectoure, où il avait rejoint son martre, il s'empressa de faire savoir que le comte avait le plus vif désir de recevoir les deux ambassadeurs, qu'un sauf-conduit avait été demandé pour cela à Charles VII, et qu'on espérait l'obtenir. Jean IV lui-même prit la plume pour exprimer ses regrets du retard apporté par les événements à la venue des ambassadeurs et les assurer de la diligence qu'il mettrait à aplanir tous les obstacles[64]. Trois semaines après, le  comte et son chancelier renouvelèrent les mêmes déclarations, en manifestant la crainte que le sauf-conduit demandé ne fût point accordé, car le Roi n'ignorait pas le motif de la venue des ambassadeurs anglais ; mais Batute avait l'espoir que le Roi se séparerait un jour ou l'autre de ceux qui l'entouraient présentement, et que le comte trouverait encore, sur les bords de la Garonne, des amis au milieu desquels Roos et Bekynton pourraient passer sûrement. Il nous viendra, ajoutait-il, des nouvelles du nord. Sans doute nos amis vous mettront à même de poursuivre votre mission à votre honneur et au nôtre. Plaise à Dieu que Monseigneur puisse bientôt vous envoyer de telles nouvelles ![65] Il semble qu'il soit fait ici allusion à une attaque des Anglais dont on aurait attendu une heureuse diversion : c'était, en effet, le moment où Talbot, débarqué eu Normandie à la tête de deux mille hommes, venait de mettre le siège devant Couches.

Robert Roos répondit le 24 août au comte d'Armagnac et à son chancelier. Dans sa lettre à, Jean de Batute, il déclarait nettement que les changements survenus dans la situation étaient de nature à modifier profondément les relations entamées. D'abord lui-même venait d'être nommé régent par les États, et il était absorbé par les soins de la défense ; en second lieu, il était persuadé que le roi son maitre, une fois avisé du rôle actif que le vicomte de Lomagne, fils du comte d'Armagnac, prenait aux opérations militaires, ne se montrerait pas disposé à poursuivre les négociations ; enfin il ne doutait pas qu'à l'arrivée du renfort attendu d'Angleterre, la première attaque ne fût dirigée contre le comte, ce qui entraînerait probablement la ruine de son pays. Après tout ce qui a été fait et dit, ajoutait-il en substance, vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-mêmes de ce résultat. Si nous ne voyons point chez vous de meilleures dispositions et une conduite différente, nous renoncerons au rendez-vous projeté, et nous ne besognerons plus en cette matière ; car nous savons d'où vient le mal dont le pays a souffert ; ne pensez pas que nous commettions une si grande folie que de poursuivre notre mission dans de telles conditions. Nous profiterons du premier navire pour retourner auprès de notre souverain seigneur le roi, et nous lui exposerons ce qui s'est passé ; à moins pourtant que nous n'ayons à bref délai d'autres nouvelles de votre part[66].

A la lecture de cette terrible missive, Jean de Batute fut atterré. Dans une lettre datée du 18 septembre, il répondit que son maître et lui avaient ressenti, en recevant cette communication, une peine très vive, en même temps qu'un profond étonnement ; il s'efforça de justifier le comte des. injustes reproches qui lui étaient adressés, et de prouver qu'il ne pouvait être rendu responsable des événements survenus. Je déplore de tout mon cœur, disait-il en terminant, que, cédant aux suggestions de nos adversaires, vous renonciez à accomplir une telle alliance ; mais j'abandonne la matière à Dieu, qui connaît et sonde les cœurs, et je charge de mes malédictions ceux qui viendraient y apporter des entraves[67].

Sur ces entrefaites Robert Roos fut informé que la comtesse d'Armagnac et le vicomte de Lomagne, son fils, faisaient des démarches auprès d'une dame du pays afin qu'elle agit sur son mari et sur les autres seigneurs pour les détacher du parti anglais[68]. Ce fut pour lui un nouvel indice de la trahison du comte d'Armagnac.

Les communications entre le comte et les ambassadeurs anglais étaient devenues si difficiles que la réponse de Jean de Batute, en date du 15 septembre, mentionnée plus haut, ne parvint à Bordeaux que le 11 octobre. Dès le surlendemain, les ambassadeurs y répondirent. Leur lettre montre que le comte d'Armagnac avait affaire à de fins diplomates. Il était difficile de se railler plus agréablement d'un allié dont on met en doute la loyauté et dont on a reconnu l'impuissance. Pourtant la réponse officielle fut accompagnée d'une lettre fort amicale, où l'on manifestait encore l'intention de poursuivre les négociations, puisqu'on insistait sur l'envoi de portraits demandés par le roi d'Angleterre, et qu'on parlait des pleins pouvoirs que le comte devrait délivrer pour rendre la besogne plus efficace et permettre de procéder avec plus de maturité[69].

La correspondance se poursuivit ainsi jusqu'à la fin de l'année. Le comte d'Armagnac, afin de déterminer les ambassadeurs à se rendre près de lui, avait offert de se porter médiateur pour la paix avec la France[70]. Un peintre, venu de Londres, avait été envoyé à la cour du comte pour faire le portrait de sa fille, et les ambassadeurs s'étonnaient de ne point le voir revenir[71]. Batute, dans sa dernière lettre, explique la cause de ce retard : le peintre est arrêté par la rigueur du froid, qui paralyse son travail en l'empêchant de mêler ses douleurs[72]. Cette lettre, qu'accompagnait une lettre du comte contenant les plus amicales protestations, parvint le 14 à destination. A cette date les ambassadeurs déjà avaient renoncé à continuer les négociations : Bekynton était parti, et Roos se préparait à le suivre[73].

 

Charles VII passa les mois de janvier et de février à Montauban. Il.y retrouva la Reine, qui, pendant la campagne de Guyenne, avait visité plusieurs villes du midi. Elle venait de recevoir la nouvelle de la mort de sa mère, la reine Yolande, qui avait terminé sa carrière à Saumur, le 14 novembre, à l'âge de soixante-deux ans. Un des premiers actes du Roi, après son arrivée, fut d'accorder à sa femme, pour toute sa vie, le produit d'une imposition sur les denrées vendues à Beaucaire dont la feue reine avait eu la jouissance[74].

Deux objets importants fixèrent l'attention de Charles VII pendant son séjour à Montauban : la reprise des hostilités en Guyenne ; la délivrance de la comtesse de Comminges.

L'expédition contre les Anglais, si, brillamment conduite dans le cours de l'année 1442, ne pouvait aboutir à des résultats décisifs qu'avec le concours d'une flotte et d'une armée castillanes : c'est ce que comprit Charles VII. Des démarches furent faites à la Cour de Jean II ; le Roi était d'autant plus désireux de les voir aboutir que la retraite de son armée avait été suivie de la perte de plusieurs des places récemment conquises. Pourtant les renforts que devait amener le comte de Somerset tardaient à venir, et les Anglais redoutaient pour le printemps un retour offensif.

C'est dans ces circonstances qu'arriva près du Roi un chevalier castillan ; il venait combiner les arrangements à prendre en vue d'une double attaque : la première dirigée contre Calais, la seconde contre Bayonne et Bordeaux[75]. Le plan de campagne arrêté à Montauban pour la saison nouvelle, paraît avoir été le suivant : tandis qu'au nord, profitant de la diversion opérée par mer sur Calais, une armée envahirait la Basse Normandie[76], le siège serait mis simultanément devant Saint-Macaire, Rions et Auros en Bazadais, afin d'enserrer Bordeaux et de forcer cette ville à capituler. Au sud de la Guyenne, et avec le concours des Castillans, Bayonne, Dax, et tout le reste de la contrée seraient réduits[77]. Il n'est pas douteux, lit-on dans un document émané de la chancellerie anglaise (2 mars 1443), que l'adversaire du roi ne lâchera prise que quand il aura conquis Bordeaux, Bayonne et tout ce qui est en l'obéissance du roi ; aussi, malgré les instances de sa chevalerie qui le pressait de se rendre à Toulouse, est-il resté au château de Montauban, lequel est situé en Guyenne, et cela uniquement pour l'accomplissement de son dessein. Il est même retourné à Marmande afin de poursuivre sa conquête[78]. On lit encore dans des lettres de Henri VI à ses commissaires dans le Lincolnshire : Comme nous en sommes informés, ils (l'adversaire de France et son fils) sont, de toutes manières, décidés à faire tout ce qu'il leur sera possible d'entreprendre, avec toutes les forces dont ils disposent, soit par eux-mêmes, soit par leurs alliés d'Espagne et d'ailleurs, afin de procéder plus avant, dans cette prochaine saison, à notre grand dommage, dans le duché de Guyenne aussi bien que dans le duché de Normandie[79].

Le gouvernement anglais était donc, à juste titre, fort préoccupé de la partie qui allait se jouer. Malgré les difficultés de toute nature qui la rendaient inégale il n'épargnait rien pour parer aux coups réitérés qu'on lui portait. Il sollicitait des secours afin de les envoyer à Bordeaux et à Bayonne hommes, vivres, vaisseaux étaient mis en réquisition[80] ; il donnait au comte de Somerset, créé duc pour la circonstance, le commandement de l'expédition[81] ; il faisait saisir tous les navires qui se trouvaient dans les ports de l'Angleterre, pour former une flotte qui devait cingler vers Bordeaux[82] ; des prêts d'argent étaient sollicités à la fois des sujets du Roi, de son trésorier et de ses chambellans ; plusieurs joyaux de la couronne étaient mis en gage[83] ; enfin des messagers partaient en toute hâte dans diverses directions[84].

Les craintes conçues par les Anglais pour leurs possessions de Guyenne ne devaient point tarder à se dissiper. Soit que le concours du roi de Castille, toujours absorbé par des luttes intestines qui paralysaient son action, ait fait défaut à Charles VII ; soit que d'autres motifs, et en particulier l'indiscipline de son armée[85], aient apporté des entraves à l'exécution de ses desseins, il renonça bientôt à reprendre les hostilités en Guyenne : le 26 février, il quitta Montauban et prit le chemin de Toulouse.

Une affaire importante l'appelait d'ailleurs dans cette ville. A la date du 17 janvier, il avait désigné quatre commissaires pour aller sommer les comtes d'Armagnac, de Foix, de La Marche et de Comminges de remettre entre ses mains les places, appartenant à la comtesse de Comminges, confiées à la garde de ces princes. Depuis plusieurs années, le Roi en poursuivait la restitution. En vain, lors de son passage à Toulouse, en mai 1442, avait-il envoyé aux comtes de la Marche, de Foix et d'Armagnac un ajournement pour comparaître devant lui. Jusqu'ici, le comte d'Armagnac et le comte de Comminges avaient résisté à toutes les injonctions. Les quatre commissaires étaient chargés en outre de poursuivre la mise en liberté de la comtesse de Comminges, que son époux tenait étroitement enfermée, et de la conduire à Toulouse. En cas de refus, ils devaient employer la force[86].

Marguerite, comtesse de Comminges, avait, dès 1419, épousé en troisièmes noces[87] Mathieu de Foix, auquel elle avait, par contrat de mariage, apporté son comté en dot. Elle avait alors environ cinquante-six ans ; son mari n'en avait guère que trente-quatre. La mésintelligence ne tarda point à éclater dans ce ménage peu assorti. Maltraitée par Mathieu de Foix, qui n'avait eu en vue que son héritage, la comtesse fut enfermée dans le château de Saverdun ; tout le reste de sa longue vie s'écoula dans les murs d'une prison. Elle venait d'être transférée du Béarn dans une des tours du château de Foix.

Charles VII avait résolu de faire cesser un état de choses aussi révoltant. En même temps qu'il prenait des mesures pour faire respecter sa volonté, il convoqua à Toulouse, à la date du 15 février, l'assemblée des États de Comminges.

Cette affaire le préoccupait depuis plusieurs années. Se trouvant au Puy, en mai 1439, il avait reçu une députation des États de Comminges, le sollicitant de faire mettre la comtesse en liberté. Charles VII avait chargé le Dauphin, qui venait d'être investi des fonctions de gouverneur du Languedoc, de suivre cette affaire ; mais le brusque départ du jeune prince avait forcé d'ajourner la solution.

Le Roi n'était point encore arrivé à Toulouse quand les États s'assemblèrent ; il se fit représenter par des envoyés, munis de ses instructions. En vertu des ordres du Roi et d'une délibération des États, le comte d'Astarac se rendit à Muret, près du comte de Comminges (21 février). Celui-ci promit d'obéir, mais demanda un délai, afin de pouvoir se rendre près du Roi et d'obtenir de lui un arrangement. Charles VII était bien décidé à ne tolérer aucun atermoiement. Le 24 février, il donna ordre aux États de Comminges de rester assemblés. Le 26, à peine arrivé, il reçut la soumission du comte de Comminges. Le 9 mars, un traité mit fin à cette épineuse affaire : le comte s'engageait à remettre immédiatement la comtesse aux mains du Roi ou de ses représentants ; la jouissance des places du comté de Comminges était partagée entre la comtesse et son mari, leur vie durant, conformément aux stipulations énoncées dans l'acte ; le comté devait rester au survivant ; il serait ensuite réuni à la Couronne. ; enfin abolition générale était donnée pour tout ce qui avait eu lieu dans le passé[88].

L'exécution suivit de près : la comtesse de Comminges, alors dans un âge très avancé, fut amenée à. Toulouse, et conduite à Poitiers ; le 6 juin suivant, elle signait dans cette ville un acte par lequel elle déclarait renoncer à toutes appellations faites en son nom. La vieille Marguerite ne jouit pas longtemps de sa liberté : elle mourut dans le cours de cette même année.

Cette justice hardie donna beaucoup à penser à tous ces seigneurs du midi, jusque-là si indépendants[89]. Le jeune comte de Foix étant venu faire hommage au Roi, on lui demanda de quel droit il s'intitulait comte par la grâce de Dieu, et on lui fixa un délai pour produire ses titres[90]. Dès l'année précédente, défense avait été faite au comte d'Armagnac, par des commissaires royaux désignés à cet effet, de s'intituler de la sorte. Loin de se soumettre, Jean IV en avait appelé au Parlement[91]. Le moment n'était pas éloigné où l'attitude douteuse que, depuis longtemps, il gardait à l'égard de la Couronne allait se transformer en révolte ouverte.

Le comte d'Armagnac n'avait point obéi aux injonctions du Roi relativement à la remise des places de la comtesse de Comminges. A la nouvelle de la mort de Marguerite, il prétendit que celle-ci lui avait fait récemment une donation secrète, et se saisit de son comté.

Une telle conduite appelait un châtiment : ce châtiment ne se fit point attendre. Après avoir vainement fait sommer le comte de renoncer à ses prétentions et de rendre les places qu'il détenait injustement, Charles VII ordonna au Dauphin de marcher contre le rebelle. On a vu plus haut que cette expédition se termina par l'arrestation du comte et la confiscation de ses possessions[92].

Cet épisode est comme le dénouement de la journée de Tartas et de la campagne qui lui succéda. Si les Anglais ne furent pas cette fois définitivement vaincus, la haute féodalité du midi fut abattue sans retour. Désormais il ne pouvait plus y avoir de place pour ces intrigues que l'habile vigilance du gouvernement royal avait su déjouer.

Pendant le séjour du Roi, la ville de Toulouse fut témoin de fêtes brillantes. Tout d'abord on assista à l'entrée solennelle de la Reine. Elle était en croupe sur un cheval blanc monté par le Dauphin, et s'avança sous un magnifique dais aux armes de France et d'Anjou, porté par les capitouls. Son costume consistait en une robe bleue, doublée d'hermine, avec une coiffe de toile ou de gaze blanche, rehaussée de chaque côté et formant comme un croissant au-dessus de sa tête[93] ; elle reput pour sa joyeuse et noble entrée la somme de cinquante marcs d'argent[94]. Bientôt on vit arriver (vers le 19 mars) le roi René, débarqué en Provence au mois d'octobre, où il avait été rejoint par sa femme, Isabelle de Lorraine, cette valeureuse princesse à laquelle il s'empressa de rendre un public et touchant hommage pour l'admirable dévouement et le courage héroïque dont elle avait fait preuve, délaissant ses États, son pays natal, si doux pourtant, pour passer la mer et venir dans le royaume de Sicile combattre avec une force virile et un cœur magnanime[95]. Le roi et la reine de Sicile avaient une suite nombreuse et brillante. Ce fut le signal d'une série de fêtes, car, dit Bourdigné, René était un prince plain de deduyt et plaisir, qui n'avoit dans son train que gens d'esprit et passe temps[96].

Après cette longue absence, Charles VII avait hâte de regagner ses provinces du centre. Le 8 avril, il quitta Toulouse ; il s'arrêta à Tulle, où il fit ses Pâques et tint sa fête, admettant à sa table le comte de Penthièvre et l'évêque d'Avignon ; il traversa Limoges, Confolens et Lusignan. Le 25 mai, il était à Poitiers. De graves affaires, restées en suspens durant son séjour dans le midi, sollicitaient son attention. Mais, avant d'en entamer l'exposé, il nous faut revenir en arrière et voir quelle avait été la marche des événements depuis le départ du Roi.

 

 

 



[1] Il avait été nommé, par lettres du 27 mars 1439, lieutenant en Guyenne pour six ans. Bréquigny, 33, f. 99.

[2] La date est établie par un document qui se trouve dans Delpit (Recueil de documents, etc., p. 458-59) et qui doit être d'août ou de septembre 1441, car nous voyons les ambassadeurs qui y sont mentionnés rendus à leur destination, en Angleterre, au mois de novembre suivant (Proceedings and ordinances, t. V, p. 161). — M. Vallet se trompe (t. II, p. 437) en plaçant le siège ale Tartas en 1441. Cf. Monstrelet, t. VI, p. 24, et Chartier, t. II, p. 10.

[3] Le texte se trouve dans Doat, vol. 417, f. 104. Cf. traduction française, f. 113. Par ce traité, auquel Thomas Rampston donna son approbation à la date du 40 janvier 1441, il était stipulé, d'accord avec le vicomte de Lomagne, qui avait donné son assentiment, quo Charles, l'un des fils du sire d'Albret, serait mis sous la tutelle de six seigneurs appartenant au parti anglais, et qu'a son défaut le vicomte de Tartas, son fils ainé, serait livré en otage ; qu'une trêve de vingt ans règnerait entre le roi d'Angleterre et le sire d'Albret, et que, en garantie, plusieurs places seraient remises de part et d'autre ; enfin que le vicomte de Tartas donnerait son assentiment au traité et délivrerait son scellé.

[4] Monstrelet, t. VI, p. 25 ; Preuves de la Chronique de Math. d'Escouchy, p. 45.

[5] C'est ce qui ressort d'une lettre émanant du principal conseiller du comte d'Armagnac, qui fut adressée, à la date du 15 septembre 1442, aux envoyés de Henri VI, Ross et Bekynton. Voir Official Correspondence of Thomas Bekynton, t. II, appendix, p. 206.

[6] Le comte d'Armagnac avait épousé, en premières noces, Blanche de Bretagne, sœur du duc Jean IV ; sa sœur Bonne fut la seconde femme de Charles, duc d'Orléans ; sa fille Marie avait épousé en 1437 le duc d'Alençon.

[7] Bréquigny, 82, f. 135.

[8] Original, signé par le comte d'Armagnac. Archives, P 13591, cote 647.

[9] Ces deux seigneurs étaient beaux-frères : le sire d'Albret avait épousé en 1417 Anne d'Armagnac.

[10] Rymer, t. V, part. I, p. 42 ; Proceedings and ordinances, t. V, p. XCV et 44-45.

[11] On voit par les lettres du comte de Huntingdon en date du 15 décembre 1439 que le sire d'Albret était traité en ennemi (Rymer, t. V, part. I, p. 92). Le 7 juin 1440, Charles VII donnait au sire d'Albret la ville et le château de Saint-Sulpice, en dédommagement de la perte de la plupart de ses places, prises par les Anglais (D. Vaissète, t. IV, p. 495). Le même jour Henri VI donnait à Philippe Chetewynde la ville et vicomté de Tartas, now being in the handes and subjection of oure rebel and ennemy the Lord de Labrit (Proceedings, t. V, p. 121). Le 16 novembre 1441, par lettres où le Roi rendait hommage à la bonne loyauté et obeissance dont le sire d'Albret avait toujours tait preuve, et aux recommandables services par lui rendus dans les guerres, il était remis en possession du comté de Dreux (Doat, 248, f. 253). Le même jour, une assignation de 1.000 l. t. de rente sur la terre de Saint-Sulpice était faite par Charles VII en sa faveur (Archives, J 893, n° 19).

[12] Voir cet important traité, qui fut ratifié par Henri VI le 28 novembre suivant, dans Bréquigny, 85, f. 141-156 v°.

[13] Berry, p. 417.

[14] Ordonnances du 31 décembre 1441. — Nous reviendrons plus loin sur ces mesures.

[15] Berry, p. 417.

[16] D Vaissète, t. IV, p. 496. Il résulte de lettres portant la date du 11 août 1442 (Ms. fr. 23962, f. 2) que tous nobles et autres ayant coutume de s'armer et de suivre les guerres avaient été convoqués.

[17] D. Vaissète, l. c.

[18] Archives, X1a 23, f. 359 ; publié par Tuetey, Les écorcheurs en France, t. I, p. 127, note.

[19] Berry, p. 417 ; Promesse de Jacques de Pons d'être à l'avenir vrai, loyal et obéissant vassal du Roi. Archives, P 2531, f. 208 v°, et 2298, p. 1203. Jacques de Pons était neveu de La Trémoille ; sa soumission ne fut que momentanée ; il ne tarda pas à conspirer avec les Anglais ; il fut emprisonné, et alors commença un procès, pour crime de lèse-majesté, qui dura plusieurs années et se termina par une condamnation à mort.

[20] Lettres de Charles VII du 24 septembre 1442, citées par Massiou, Histoire de la Saintonge et de l'Aunis, t. III, p. 279, note, et 280, note. Le texte est aux Archives, P 2546, f. 241 v°, et P 2298, p. 1224.

[21] Berry, p. 418.

[22] Par lettres données le 2 mars, à Lusignan, des pouvoirs spéciaux étaient conférés à Simon Charles, président de la Chambre des Comptes, et à Guichard de Chissé, l'un des maîtres d'hôtel du Roi (Compte d'Antoine Raguier, dans Le Grand, vol. VI, f. 99 v° et 153 ; cf. Archives, PP 110, f. 254). Dans un document en minute de la main de Simon Charles, en date du mois d'août 1442, il s'intitule presidant en la Chambre des comptes et commis au gouvernement de toutes finances ès pays sur et deça les rivières de Seine et d'Yonne (Ms. fr. 26070, n° 4622). — Dunois et Brezé étaient chargés de la garde des frontières du pays Chartrain et du Maine (Monstrelet, t. VI, p. 58).

[23] Pendant ce séjour à Ruffec le Dauphin faillit périr. On lit dans des lettres de Louis XI en date du 30 avril 1483 : Savoir faisons à tous presens et à venir que nous, considerans comme sommes issus du lignage monseigneur saint Louis de Marseille, et que tonsjours, depuis ce jour de nostre nativité, qui fut le troisiesme jour de juillet l'an mil quatre cens vingt trois, jusqu'à present, nostre benoist Sauveur, par l'intercession de sa très glorieuse Mère Marie, Vierge immaculée, Reine des cieux, nous a tousjonrs preservé et gardé de tous perds et dangers corporels ; et mesmement, en allant jà pieça avec feu nostre très chier seigneur et pere (que Dieu absoille !) à la journée de Tartes, nous estans à Buffet le jour d'un saint vendredy que icelui nostre benoist Sauveur souffrit et endura mort et passion pour la redemption de l'humain lignage, faisant en l'honneur et revalue d'iceluy saint jour jeune et abstinence, et en estant aux champs audit lien de Buffet, trouvasmes feu nostre oncle Charles, en son vivant conte du Maine, avec lequel et Loys de Valory, seigneur de Tillay, nous meismes en une santine sur la riviere passant audit lieu de Buffet, et en allant le long d'icelle arrivasmes à un moulin, auquel, pour la force et inondation de l'eau qui là estoit roide et aspre, ladicte sautille tourna, et tous trois saillismes en ladicte eau, en laquelle ladicte sentine du tout se submergea et afondra, et de grande ardeur et haste de saillir l'eau d'iceluy moulin ;qui estoit arresté et ne mouloit point pour l'honneur dudit saint vendredy, nous jetta en bas la teste premiere, et lors, en ayant très singuliere remanbrance et reclamant très devotement l'aide et secours d'icelle Vierge intemerée, nous vouasme à Elle et à son eglise au lieu de Behuart, et incontinent nous tournasmes tout envers sur ladicte eau, les pieds premiers, laquelle, de sa force et impetuosité, nous jette sur le milieu d'une petite greve, et promptement, en devant la teste, vismes les gens qui à l'entour d'illec estoient... Mss. Le Grand, vol. VI, f. 96 v°.

[24] Berry, p. 418. — Il est fait allusion à cette démolition dans des lettres du mois de novembre 1446. Archives, JJ 178, n° 67.

[25] Berry, p. 418.

[26] C'est ce que nous apprend Monstrelet. Voir t. VI, p. 51.

[27] Lettres du 12 mars 1442, citées par D. Vaissète, t. IV, p. 496.

[28] C'étaient les sires de Saint-Père et d'Angerville ; le duc d'Orléans leur fit payer, le 25 mai, la somme de 80 écus d'or pour les défrayer de leurs dépenses. Lettres du 27 mai 1442, citées ci-dessous.

[29] Pièces originales, 2158, ORLÉANS, n° 552 et 553 ; Louis et Charles d'Orléans, par Aimé Champollion, t. II, p. 343.

[30] Archives, K 68, n° 11 et 11 bis.

[31] Lettres du 24 mai, portant commission à Henri Chardon pour recevoir en Saintonge la portion de l'aide. Pièces originales, 678 : CHARDON. — Le 25 mai le duc faisait payer 60 écus d'or aux secrétaires du Roi et à des clercs, pour avoir préparé cent vingt mandements obtenus du Roi touchant ledit aide. Étienne le Fuzelier et Jean Chardon eurent mission de suivre le Roi à Toulouse pour faire sceller et signer les mandements et apporter au duc environ trois cents lettres closes signées par le Roi. Lettres du duc d'Orléans données à Limoges le 27 mai. Ms. fr. 26069, n° 2545.

[32] Archives, K 549, n° 9.

[33] Nous avons la lettre adressée par Charles VII, le 24 mai, aux habitants de Reims. Nous la donnons aux Pièces justificatives. — On vient de voir que les lettres ainsi envoyées par le Roi furent au nombre d'environ trois cents.

[34] Berry, p. 418.

[35] Note sur la garde d'un ms. du XIIe siècle, provenant de la ville de Bergerac, et contenant le Summa de casibus de saint Raymond de Pennafort (communication faite en 1878 par M. Maurice Faucon, élève de l'École des Chartes).

[36] Berry, p. 419 ; Miguel del Verms, p. 596 ; D. Vaissète, l. c. — On lit dans un Extrait de l'Inventaire du Trésor de Foix et d'Armagnac : Item, l'an 1442, et au mois de juin, le Roy Charles de France, Louys, Dauphin de Vienne, son fils aisné, avec grand nombre de gens d'armes, vindrent à Tolose, où furent mandés les comtes de Foix et d'Armagnac pour venir à Tolose, où ils se rendirent et eurent conference secrette et particuliere ensemble. Le Grand, vol. VI, f. 202 v°.

[37] Dans le courant de 1441, il avait fait sur les Anglais le siège de Clermont-Soubiran. — M. Tamizey de Larroque a publié dans les Archives historiques de la Gironde (t. VII, p. 347) une lettre missive datée du 6 avril (sans indication d'année), adressée par le vicomte de Lomagne au seigneur de Séverac, laquelle se trouve dans le fonds Doat (vol. 198, f. 16) et mentionne la prise de la Réole. Il nous parait indubitable que ce document n'est point de 1442, comme le suppose le savant éditeur, mais qu'il appartient à l'année 1418, époque où le comte d'Armagnac, alors vicomte de Lomagne, remplissait en Guyenne les fonctions de capitaine général.

[38] Berry, p. 420. La plus grande armée qu'il eust oncques dressée en son temps, dit l'Abrégé chronologique publié par Godefroy dans son Recueil, p. 345. Cf. le calcul fait par M. Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, p. 439, note 2.

[39] Monstrelet, t. VI, p. 52.

[40] Berry. Ce passage, qui n'est pas dans l'édition Godefroy, est reproduit d'après l'édition de 1594 (in-4°), fol. 117 (publiée sous le nom d'Alain Chartier).

[41] Tous ces Gascons qui s'étaient crus loin du Roi, dans un autre monde, dit Michelet (t. V, p. 237), commençaient à sentir qu'il était partout.

[42] Berry, p. 420.

[43] Le but poursuivi est très nettement énoncé dans des lettres patentes du 5 mai 1442 : Comme, pour l'entretenement de l'armée que presentement menons en nostre païs de Guienne, pour tenir la journée entreprinse devant Tartes à l'encontre de nos anciens ennemis et adversaires les Anglois, et faire conqueste sur euh, au recouvrement de nostre seigneurie, et garder que par euh nostre dit pais ne soit plus ainsi opprimé ne foulé, comme le temps passé a esté, ne aussi celui de Languedoc, et pour faire cesser plusieurs pilleries, roberies, oppressions et autres maulx que chascun jour se font par plusieurs en nostre païs de Languedoc... Fontanieu, 117-118.

[44] Dans une lettre du 24 août, adressée à l'abbé de Saint-Edmundsbury, le roi d'Angleterre écrivait que quatre mille habitants ou environ avaient été tués à la prise de Saint-Sever. (Original lattera, publiées par sir Henry Ellis, Tbird series, t. I, p. 76 ; reproduit plus correctement par M. Stevenson, Letters and Papers, etc., t. II, p. 465.) Il en faut rabattre des quatre cinquièmes, d'après Monstrelet, qui parle de huit cents morts.

[45] Berry, p. 420 et suivantes ; Monstrelet, t. VI, p. 54 ; Miguel del Verms, p. 591 ; Journal de Bekynton, dans Official Correspondence, t. II, p. 187. Cf. Ribadieu, Histoire de la conquête de la Guyenne, p. 132.

[46] C'est ce qui ressort de la lettre de Henri VI à ses ambassadeurs Roos et Bekynton, en date du 23 juin 1442. Official Correspondence, t. II, p. 180.

[47] Voir sur ce sceau les notes de sir H. Nicolas, dans son édition du Journal de Bekynton, donnée en 1828, p. 113 et 129-130.

[48] Lettre du 24 juillet. Official Correspondence, t. II, p. 181.

[49] Official Correspondence, t. II, p. 188-189.

[50] Official Correspondence, t. II, p. 188-189.

[51] Journal, p. 195. — Ces navires furent repris, près, de Blaye, par des gens du pays.

[52] Un messager apporta à Nevers une lettre du chancelier annonçant que le jeudi deuxiesme d'aoust la ville de Asc fut prise d'assault du Roy nostre sire, entre cinq et six heures apres midi. (Archives de Nevers, CC 45.) Les documents anglais donnent la date du 3, qui doit être celle de la capitulation. (Bekynton, Official Correspondence, t. II, p. 196 et 246.) — Le comte de Foix se signala pendant ce siège et fut armé chevalier de la main du Roi. Le Grand, VI, f. 203 ; Miguel del Verms, p. 597.

[53] His son, called the Dolphin, with de Conestable and marochall de France forth with, have leyd siege unto your cite of Baion, which as they seith maketh theim sure to have hit within VIII dayes. Lettre des ambassadeurs à Henri VI, en date du 9 août. Journal, l. c., p. 196. Le 24 août, Henri VI annonçait à l'abbé de Saint-Edmunsbury que Bayonne était assiégé. Original letters, l. c.

[54] L'itinéraire de Charles VII se trouve dans un compte de Jean de Rosnivinen, conservé à la Bibliothèque du Louvre (F 1582 bis) ; ce compte a péri dans l'incendie allumé par les misérables qui, en mai 1871, avaient juré de détruire Paris. Nos notes nous fournissent les renseignements suivants : le 17, le Roi quitta Dax ; le 18, il était à Nogron ; le 19 à Saint-Sever ; le 20 à Casières ; le 21 à Nogaret ; du 24 au 27 à Condom ; le 29 à Agen.

[55] Journal, p. 204.

[56] Isto post meridiem decanus de sancte Andreæ publice dixit... in domo consilii, quod si adversarius regius adveniret Burdegaliam, et mille Anglici venerunt in adjuvamen dictæ civitatis Burdegaliæ, obediendum est fortiori. Journal, l. c., p. 205.

[57] Le siège de Blaye fut empêché par la trahison : le sire de Pons, que nous avons vu plus haut faire sa soumission au Roi, était en pourparlers avec les Anglais pour leur livrer toutes ses seigneuries ; il leur fit savoir l'entreprise projetée sur Blaye, laquelle échoua par suite. Voir lettres de Charles VII du 29 juin 1443, déclarant Jacques de Pons coupable du crime de lèse-majesté et ordonnant de l'ajourner à comparoir devant le Parlement. Pièces originales, 2328 : PONS.

[58] Cette date est donnée par un document qui se trouve à la suite du Journal, p. 246.

[59] Berry, p. 422 ; Le Grand, VI, f. 203 ; Miguel del Verms, p. 597.

[60] Official Correspondence, t. II, p. 228.

[61] Official Correspondence, t. II, p. 219 (26 octobre).

[62] Official Correspondence, t. II, p. 247.

[63] Rymer, t. V, part. I, p. 112. — A la date du 13 mai, un nouveau sauf-conduit avait été délivré aux ambassadeurs du comte d'Armagnac.

[64] Lettres de Jean de Batute du 29 juillet et du comte du 23. Official Correspondence, t. II, p. 193-194.

[65] Lettre du 20 août. Official Correspondence, t. II, p. 198-200.

[66] Official Correspondence, t. II, p. 200-201.

[67] Official Correspondence, t. II, p. 206-209.

[68] Official Correspondence, t. II, p. 201.

[69] Lettre du 13 octobre. Official Correspondence, t. II, p. 210-214.

[70] Lettre du 22 novembre. Official Correspondence, t. II, p. 229-230.

[71] Lettres du 22 et du 30 décembre. Official Correspondence, t. II, p. 232-234.

[72] Propter temporis frigiditatem et intemperiem, propter quas colores excutari seu affimari non potuerunt... Lettre du 3 janvier 1443. Official Correspondence, t. II, p. 242-43.

[73] Official Correspondence, t. II, p. 238 et 241.

[74] D. Vaissète, t. IV, p. 498.

[75] Ces détails se trouvent dans des instructions données par Henri VI à la date du 2 mars 1443. Proceedings and ordinances, t. V, p. 415. — Dès le mois d'août 1442, le gouvernement anglais, redoutant une intervention de la Castille, avait pris des mesures pour y mettre obstacle. Une ordonnance rendue alors déclarait que nul sauf-conduit ne serait accordé, pour retourner en Espagne, aux navires se trouvant dans les ports de Flandre. Voir Id., ibid., p. 194.

[76] Minutes du conseil privé, 9 mars et 5 avril 1443. Proceedings and ordinances, t. V, p. 240 et 260.

[77] Cum maximo posse inimicorum nostrorum de Ispania, et aliorum sibi adhærentium, tam per terram quam per mare. Lettres du 7 mars 1443. Rymer, t. V, part. I, p. 118.

[78] Proceedings and ordinances, t. V, p. 415-416.

[79] Proceedings and ordinances, t. V, p. 417.

[80] 2 et 5 mars 1443. Proceedings and ordinances, t. V, p. 416 et 234.

[81] 27 février 1443. Proceedings and ordinances, t. V, p. 226.

[82] 7 mars 1443. Rymer, t. V, part. I, p. 118. — La réunion de cette flotte devait s'opérer avant la fête de Saint-Georges. Proceedings, t. V, p. 237, 238, 241.

[83] 7 et 9 mars 1443. Proceedings, t. V, p. 237, 239.

[84] Wenlok est envoyé au duc d'Orléans ; Bidan va en Guyenne avec une mission près des villes de Bordeaux, Bayonne et Dax ; autre mission de Thomas Weil. Proceedings, t. V, p. 238 et 248-249.

[85] Des lettres de rémission, en date du mois de mai 1446, mentionnent les rasages commis par les routiers après l'expédition de Guyenne (Archives, JJ 177, n° 201). au mois de juillet précédent, des lettres données à Toulouse, le 26, à la relation du Conseil et adressées aux sénéchaux et viguiers de Toulouse, Carcassonne, Beaucaire, Quercy, Rouergue et Agenais, faisaient défense de livrer passage à plusieurs nobles et autres gens de guerre de la compagnie du Roi, du comte du Maine, du connétable, des comtes de la Marche et de Foix et du vicomte de Lomagne qui, après avoir suivi le Roi jusqu'à Tartas, avaient abandonné son ost et siège, sans permission, s'étaient débandés, et se répandaient dans le pays, où ils commettaient une foule da désordres (D. Vaissète, t. IV, p. 497). La même défense fut renouvelée par lettres du 11 août (Ms. fr. 13962, f. 2). Voir les plaintes formulées par les États de Languedoc (D. Vaissète, p. 499).

[86] Et si plenière obeissanœ ne nous est faicte audit pays de Comminges, disait le Roi dans les lettres de commission du 17 janvier 1443, nous manderons et ferons venir de nos gens d'armes pour y proceder par voie de fait et mettre en nostre main la dame, le pays et les forteresses d'icelui. D. Vaissette, t. IV, p. 499.

[87] Marguerite avait épousé : 1°, en 1378, Jean III, comte d'Armagnac ; 2° en 1385, Jean d'Armagnac, vicomte de Fezensaguet.

[88] Berry, p. 422-423 ; D. Vaissète, t. IV, p. 498-499, t. V, p. 3, et Preuves du t. IV, col. 463 ; Castillon, Histoire des populations pyrénéennes, t. II, p. 70 et 363.

[89] Michelet, Histoire de France, t. V, p. 237-238.

[90] D. Vaissète, t. IV, p. 500, et t. V, p. 4.

[91] Acte d'appellation du 19 mars 1442. Les commissaires royaux étaient l'évêque de Maguelone et le bailli de Soissons. Doat, 217, f. 145.

[92] Voir ch. I.

[93] Tableau décrit par La Faille, Annales de la ville de Toulouse, t. I, p. 200-201.

[94] La Faille, t. I, p. 201, et preuves, p. 109.

[95] Le roi René, par Lecoy de la Marche, t. I, p. 221.

[96] Hystoire agregative des annales et cronicques d'Anjou, par Jehan de Bourdigné. Ed. Quatrebarbes, t. II, p. 186.