HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE III. — CHARLES VII DEPUIS LE TRAITÉ D'ARRAS JUSQU'À LA TRÊVE AVEC L'ANGLETERRE - 1435-1444.

 

CHAPITRE V. — LA PRAGUERIE.

 

 

Le duc de Bourbon chef des mécontents ; ses intrigues ; il gagne le Dauphin. — Commencement de la Praguerie. — Énergie du Roi ; il se met en campagne, et réussit à éteindre l'insurrection dans son foyer. — Les princes se réfugient en Auvergne, où le Roi les poursuit avec vigueur. — Offres de soumission ; négociations de Clermont, bientôt suivies d'une rupture. — Reprise des hostilités ; nouveaux succès du Roi. — Les princes implorent le pardon ; Charles VII consent à les recevoir. — Réception qu'il leur fait ; il leur accorde des lettres d'abolition. — Charles VII accusé par un contemporain au moment même où il agit en Roi ; ce qu'il faut penser de ces accusations.

 

La vigueur déployée depuis quelque temps par Charles VII, l'énergique impulsion donnée aux affaires publiques étaient, pour certains princes et seigneurs, un sujet d'étonnement et de vif déplaisir.

A la tète des mécontents se trouvait le duc de Bourbon. Ce prince, que Georges Chastellain compare à Absalon et au troyen Pâris, et célèbre comme le plus agile corps de France et le plus spécieux (beau) en son temps[1], n'avait pas su garder la bonne renommée acquise dans sa jeunesse. Remuant et vaniteux, il se montrait oublieux des marques de faveur que le Roi n'avait cessé de lui donner et semblait ne s'inspirer que des tristes souvenirs de sa campagne de 1428. Une opposition persistante et mesquine, des intrigues déloyales, une connivence coupable avec les chefs de bande en révolte contre l'autorité royale, voilà par quels nouveaux exploits Charles de Bourbon se signalait[2]. Quand, au lendemain de l'occupation de Paris, Charles VII avait voulu mettre sa capitale à l'abri des routiers, il avait dû composer avec le duc de Bourbon, de qui dépendaient tous les capitaines des places voisines. Un traité en forme avait été passé, déterminant les conditions auxquelles ces places seraient remises au Roi[3]. Le duc avait demandé que la garde lui en fût confiée ; il fut très courroucé de se voir préférer le bâtard d'Orléans. A ce propos il eut avec le Roi une vive altercation, et de grosses paroles furent échangées[4].

Le duc de Bourbon n'en resta pas moins à la Cour, avec le rang dû à sa qualité de prince du sang et à son titre de grand chambrier. Il y comptait, nous l'avons vu, d'anciens et fidèles amis parmi les conseillers les plus influents[5]. Mais bientôt, condamné à un isolement qui blessait son orgueil et contrariait ses plans ambitieux, il se lança de plus en plus dans l'intrigue et ne craignit pas de désobéir aux ordres du Roi. Il entretint des relations avec le duc de Bretagne, toujours prêt à passer d'un parti à l'autre ; avec le duc d'Alençon, ruiné par la guerre et pressé de refaire sa fortune[6] ; avec le vieux comte de Vendôme qui, à de nobles qualités, mêlait, parait-il, un grain de folie[7] ; et même avec le bâtard d'Orléans, auquel il s'efforça de persuader que le Roi ne désirait pas la délivrance du duc Charles. Le duc avait en outre, au sein du Conseil, deux personnages entièrement à sa dévotion : le maréchal de la Fayette et Jacques de Chabannes[8].

Profitant du séjour du Roi à Paris et de la tenue des États Généraux à Orléans, le duc de Bourbon continua ses intrigues. Tout en figurant parmi ceux qui préparèrent la grande ordonnance sur l'armée, rendue à la date du 2 novembre 1439, il pratiquait sous main les capitaines et cherchait à les gagner. A Tours, où il accompagna le Roi, il se rencontra avec le Dauphin, arrivant du midi : aussitôt il se mit à souffler la division entre le jeune prince et son père.

De Tours, le Roi se rendit à Angers, pour s'occuper de la réorganisation de son armée et empêcher les gens de guerre de repasser la Loire[9]. A la nouvelle de l'échec subi devant Avranches[10], il s'empressa de faire partir Gaucourt et Saintrailles, munis d'argent et d'artillerie, avec ordre de reprendre l'offensive. Mais les troupes étaient déjà dispersées. Charles VII fit venir les capitaines, et, en présence du connétable, leur tint un langage sévère : Comment la chose est-elle advenue ? Pourquoi s'est-on si lâchement gouverné ? Les capitaines racontèrent ce qui s'était passé et la tactique dont les Anglais avaient usé. Le Conseil fut assemblé et des mesures énergiques furent prises. On régla la solde des capitaines et le lieu où chacun tiendrait garnison ; on leur paya un mois  de gages,.s'élevant à la somme de vingt-huit ou trente mille livres. Tous durent prêter serment d'observer les ordonnances royales[11].

L'un de ces capitaines n'était autre qu'Antoine de Chabannes, l'ancien lieutenant de Rodrigue de Villandrando, le futur grand-maître de la maison du Roi. On raconte que Charles VII, sachant qu'Antoine était très-gentil escuyer et renommé en armes, avait voulu, quelques mois auparavant, l'attacher à sa personne. Il l'avait fait venir dans ce dessein ; mais Jacques de Chabannes avait demandé au Roi de laisser son frère suivre quelque temps encore le mestier de la guerre. Charles VII avait consenti à lui laisser sa liberté jusqu'à l'année suivante, à la condition qu'il reviendrait le servir. Adieu, capitaine des escorcheurs ! lui avait dit le Roi au moment où il prenait congé. Et Antoine de Chabannes, qui ne prévoyait guère le rôle qu'il jouerait bientôt dans la Praguerie, avait répondu : Sire, je n'ay escorché que voz ennemys, et me semble que leurs peaux vous feront plus de prouffit que à moy[12].

Le duc de Bourbon avait suivi la Cour à Angers. Là se trouvaient, avec le Roi et le Dauphin, le duc d'Alençon, le comte de Vendôme et le comte de Dunois[13]. Le duc noua des intelligences avec le jeune Louis et avec ces princes. Profitant de la présence des capitaines qui avaient pris part au siège d'Avranches, il forma le dessein de s'emparer du château, où résidait le Roi, de se saisir de sa personne et de mettre à mort certains de ses conseillers[14]. Ce complot fut au moment d'aboutir ; mais, n'ayant pu le mettre à exécution, le duc changea de projets. Sous prétexte d'aller voir sa femme en Bourbonnais avant de se rendre aux États de Bourges, il vint prendre congé du Roi. Charles VII était en compagnie de l'amiral de Coëtivy et de Jacques de Chabannes. Le duc se répandit en paroles, en récriminations ; il exprima l'espoir qu'à Bourges le Roi lui donnerait satisfaction, et s'engagea à ne rien faire d'ici là qui fût à sa déplaisante. De son côté le Roi promit de le traiter plus favorablement que par le passé. Les dernières paroles du duc furent les suivantes : Monseigneur, de fait je ne feray chose à l'encontre de ce que je vous ay promis ; mais je passeray par beaucoup de gens qui ne sont pas trop contens de la Court ; s'il vous plaist, vous me donnerez congié de leur tenir compaignie d'en dire le pis que nous pourrons. — Beau cousin, répondit le Roi, vous direz ce que vous voudrez de mal de moy, mais quant à moy je n'en diray point de vous[15].

Peu de jours après le duc de Bourbon réunissait tous les mécontents au château. de Blois. Un conseil fut tenu, en présence du duc d'Alençon, du comte de Vendôme, du comte de Dunois[16], du sire de Chaumont, du sire de Prie[17], et de plusieurs capitaines qui, au lieu de se rendre dans leurs garnisons, suivant l'ordre du Roi, s'étaient arrêtés à Blois. La Trémoille, informé des menées des princes, leur avait fait dire secrètement qu'il voulait être de leur alliance, et les aiderait de sa personne et de ses biens[18]. Le duc d'Alençon fut envoyé vers le Dauphin, alors à Niort. Déjà Chaumont et sa femme s'étaient chargés de le sonder, et n'avaient pas eu de peine à le décider à entrer dans la conjuration[19].

En même temps le duc de Bourbon conclut un traité avec le duc de Bretagne, pour rafraichir et confirmer, au bien du Roi et de sa seigneurie, les anciennes amitiés et alliances qui de tout temps avaient existé entre leurs maisons. Le 18 janvier, le duc Jean V, considérant que toujours il avait désiré le bien, honneur et prospérité de Monseigneur le Roi et l'entretenement des amours et alliances entre lui et son beau cousin le duc de Bourbon, promettait de l'assister en tout ce qu'il entreprendrait concernant le proffit, bien et utilité, état et honneur du Roi et de sa seigneurie[20]. Ce qu'entendait par là le duc de Bretagne, on peut s'en rendre compte en lisant les instructions données par Henri VI, le 4 février suivant, à un de ses ambassadeurs : le roi d'Angleterre faisait remercier ce prince du très bon et loyal vouloir qu'il avait au bon bien et à l'entretenement de ses pays et de sa seigneurie, des bons advertissements que, par diverses fois, il lui avait donnés, et des diligences et offres qu'il lui avait faites de joindre ses troupes à celles d'Angleterre lors du siège d'Avranches par les Français[21].

Le jeune Louis était alors âgé de seize ans. On a vu de quelle sollicitude le Roi l'avait entouré, quelle confiance il lui avait témoignée en l'associant aux affaires de l'État[22]. Tout récemment il venait de lui donner une nouvelle marque de confiance : il l'avait chargé de se rendre dans le Poitou et la Saintonge pour mettre un terme aux désordres incessants des gens de guerre et agir contre tous ceux qui résisteraient aux ordonnances royales. Trois conseillers du Roi accompagnaient le Dauphin et devaient procéder juridiquement contre les coupables[23]. C'est dans le cours de cette mission[24] que Louis ne craignit pas de trahir la confiance de son père en se joignant aux princes révoltés[25].

A peine le duc d'Alençon fut-il arrivé à Niort que le Dauphin congédia son gouverneur, le comte de la Marche, disant qu'il ne voulait plus se soumettre à sa direction, que l'heure était venue pour lui de se mettre hors de page, et qu'il lui semblait qu'il feroit très bien le profit du royaume[26]. Tous les autres officiers de la maison du Dauphin qui ne consentirent point à entrer dans le complot furent chassés :

Cependant Charles VII avait quitté Angers avec le dessein de se rendre à Bourges. C'est dans cette ville qu'il avait convoqué, pour le 15 février, une nouvelle réunion plénière des États Généraux, où les plus graves questions devaient être agitées : l'extinction du schisme, la paix avec l'Angleterre, la délivrance du duc d'Orléans, enfin la réforme de l'armée[27].

En passant par Tours, le Roi apprit la réunion des princes à Blois. La gravité de la situation lui apparut du premier coup ; il s'agissait, en effet, de le mettre en tutelle, de substituer l'autorité du Dauphin à la sienne, et de faire passer la direction du gouvernement aux mains des princes[28].

Charles VII partit aussitôt pour Amboise. Là, il adressa une circulaire à ses bonnes villes pour les mettre en garde contre les agissements des princes et défendre qu'aucune assistance Mt prêtée aux rebelles[29]. Le connétable de Richemont, Gaucourt et Saintrailles se trouvaient alors à Blois, où ils vérifiaient les montres des gens de guerre : ils reçurent l'ordre d'aller trouver le duc de Bourbon et de le sommer de s'expliquer, en insistant sur le mal que, par sa révolte, il allait faire au Roi et au pauvre peuple du Royaume[30]. A cette ouverture, le duc ne répondit que par des récriminations et des injures, déclarant que rien ne l'empêcherait de passer outre[31]. D'Amboise, Charles VII se porta sur Loches, dont le sire de Chaumont lui refusa l'entrée, et tandis que le duc de Bourbon mettait garnison à Montrichard, il fit attaquer le petit Blanchefort qui, quatre jours après, fut fait prisonnier devant Loches, et détrousser Antoine de Chabannes, le grand Blanchefort et d'autres capitaines rebelles. Le duc de Bourbon faillit même être pris à Loches, en venant y mettre garnison.

Laissant devant cette place un corps de troupes qui se fortifia dans les faubourgs, le Roi s'avança vers le Poitou, en compagnie du connétable, qui s'était empressé de le rejoindre, de Charles d'Anjou, du comte de la Marche, du maréchal de Lohéac, de l'amiral de Culant, de Saintrailles et de Brezé. Souvenez-vous du roi Richard, lui avait dit le connétable ; prenez les champs, sans vous tenir enfermé dans vos places[32]. Pour bien montrer à tous que là seulement où il se trouvait était le siège de l'autorité royale, le Roi avait fait peindre sur ses bannières une couronne d'or[33]. Mis en demeure de remettre le Dauphin entre les mains du Roi, le duc d'Alençon s'y était refusé et poussait vivement la campagne. Déjà Melle était en son pouvoir ; La Roche avait reçu une garnison, et Saint-Maixent était menacé. Charles VII ne perdit pas un instant. Le 2 mars il occupa Mirebeau[34] ; de lai il alla droit à Melle, dont il s'empara[35], ainsi que de deux autres places, et somma Niort de lui ouvrir ses portes. En moins de cinq jours il avait réussi à atteindre l'insurrection dans son foyer et à lui porter un coup mortel[36]. Le duc d'Alençon, voulant gagner du temps, fit faire des ouvertures à ses oncles le connétable et le comte de la Marche ; ces négociations, agréées par le Roi, suspendirent un instant les hostilités. Mais le duc était si peu sincère qu'a ce moment même il ne craignait pas de faire appel aux Anglais : il ne tint point à lui que le comte de Huntingdon ne vînt prêter main forte aux rebelles[37].

Le Roi, voulant se rendre à Bourges pour la réunion des États Généraux, s'était arrêté à Poitiers ; il y célébra (27 mars) la fête de Pâques. Il attendait, d'ailleurs, des renforts qui devaient lui arriver du Midi[38]. Le dimanche de Quasimodo (3 avril), en sortant de la messe, Charles VII apprend tout à coup que le duc d'Alençon et Jean de la Roche se sont emparés de Saint-Maixent par trahison, mais que les religieux de l'abbaye et de courageux bourgeois tiennent encore, soit dans l'abbaye, soit dans la bastille de la porte de la Croix. Il dyne à la hâte, fait partir Coëtivy, Lohéac et Brezé, à la tête de quatre cents lances ; lui-même monte à cheval, et arrive à sept heures du soir avec le reste de ses gens[39]. La ville est occupée, et, durant la nuit, le duc d'Alençon prend la fuite. Le siège est mis devant le château, que l'artillerie force à capituler au bout de quelques jours. Justice est faite des rebelles, et la vie n'est accordée qu'à ceux qui ont mérité 'la clémence royale[40]. Les princes s'étaient rassemblés à Niort ; à l'approche du Roi ils évacuèrent cette ville, qui rentra dans l'obéissance. En même temps, Jamet de Tillay et Fouquet Guidas leur enlevaient Montrichard.

Le Roi croyait la révolte comprimée ; il revint à Poitiers dans l'intention d'aller à Bourges, où les députés attendaient sa venue. Mais bientôt il apprit que le duc d'Alençon avait emmené le Dauphin en Auvergne ; que là le jeune Louis et le duc de Bourbon avaient lancé un manifeste excitant à la révolte les villes d'Auvergne, du Dauphiné et de Champagne, leur promettant la suppression des aides, et convoquant leurs députés à une assemblée d'états qui devait se tenir à Lyon. En même temps les hostilités avaient recommencé : une double tentative avait été faite sur Montferrand et sur Clermont. Enfin les princes cherchaient à réunir les nobles d'Auvergne pour leur arracher une promesse d'assistance[41].

Le 24 avril, le Roi écrivit une nouvelle circulaire à ses bonnes villes. Il énonçait nettement le but poursuivi par les princes, qui avaient séduit le Dauphin en le voulant, disait-il, eslever, mectre sus et faire regenter à l'encontre de nous, de nostre anctorité et magesté royal, ou très grant dommage et prejudice de nostre seigneurie. Il ajoutait que les princes persévéraient dans leur entreprise, que récemment ils avaient fait partir le Dauphin de Niort et l'avaient emmené en Bourbonnais ou en Auvergne, en entencion de seduire et arctraire eulx, soubz umbre de lui, par son moyen et par faulx donner à entendre, lesdiz pais, et aussi nostre pais de Languedoc et autres de par delà, et iceulx brouiller et diviser et mectre contre nous. Le Roi annonçait que, pour y donner provision, il partait présentement pour tirer après, et s'approcher desdits pays Enfin il donnait de la façon la plus formelle l'ordre de ne point obéir aux princes, de ne leur prêter aucune assistance et de ne point répondre à leurs messages[42].

Au moment de quitter Poitiers, Charles VII vit arriver Bertrandon de la Broquière, porteur d'une lettre du duc de Bourgogne[43]. Le duc suivait d'un œil attentif les événements ; il s'était mis en relation avec le Roi et avec le Dauphin[44] ; son intervention avait pour but de pacifier la querelle : Bertrandon devait, d'une part, solliciter le Roi de pardonner aux princes, et, d'autre part, exhorter ceux-ci à rentrer dans le devoir. Cette ouverture fut favorablement accueillie : l'envoyé du duc de Bourgogne fut autorisé à se rendre près des princes[45].

Le Roi le suivit de près, à la tète de son armée : sans dégarnir ses frontières, sans avoir demandé aucun secours, il avait sous ses ordres huit cents hommes d'armes et deux mille hommes de trait. Il reçut sur son chemin la soumission du comte de Dunois, un moment compromis dans la révolte[46] ; s'avançant vers le Bourbonnais, il était à Guéret le 2 mai. Il y donna des lettres patentes portant défense d'obéir aux princes révoltés, ordre de publier à son de trompe que nul ne leur prêtât assistance sous peine d'être tenu pour rebelle, enfin convocation à tous nobles et autres portant les armes de se tenir prêts à venir le joindre au premier signal[47]. Puis il entra en campagne ; et délogea successivement les rebelles de Chambon, Évaux, Ébreuil, Aigueperse[48], Charrons, Escurolles, de vingt-cinq autres forteresses[49]. Déconcertés par, cette marche rapide, les princes chargèrent le comte d'Eu, qui se trouvait là comme par hasard[50], et Bertrandon de la Broquière, l'envoyé du duc de Bourgogne, de faire en leur nom des offres de soumission. Le Roi reçut cette ouverture au cours de sa marche triomphale : Sans interrompre les opérations, il répondit au comte d'Eu et à Bertrandon qu'il n'entendrait à aucune proposition avant que le sire. de Gaucourt, fait prisonnier par les rebelles en se rendant dans son gouvernement du Dauphiné[51], n'ait été mis en liberté. Au moment d'assiéger Saint-Pourcain, il vit revenir les deux négociateurs, en compagnie de Gaucourt. Les princes se déclaraient prêts à obéir au Roi et sollicitaient l'autorisation de venir, en un lieu qu'il désignerait, conférer avec le connétable et le comte de la Marche, afin de se remettre, ainsi que le Dauphin, en la bonne grâce royale[52].

Le Roi désigna le couvent des Cordeliers, à peu de distance de Montferrant : Après avoir mis garnison dans les places reconquises, il se rendit à Clermont. Les conférences se tinrent, d'abord au couvent des Cordeliers, puis aux Jacobins, hors les murs de Clermont, en présence des ducs de Bourbon et d'Alençon ; elles se prolongèrent pendant plusieurs jours.

Aux doléances présentées par les princes, le Roi opposa un long mémoire, où était résumée, de la façon la plus précise, la conduite du duc de Bourbon, soit avant, soit après la prise d'armes, et qui contenait l'énumération de tous les crimes, deshonneurs et déplaisirs dont s'étaient rendus coupables ce prince et ses complices. Puis, de part et d'autre, des propositions furent formulées.

Le Roi demandait aux princes : 1° de se soumettre et de reconnaître pleinement son autorité, en déposant les armes et en congédiant tous leurs gens de guerre ; 2° de remettre entre ses mains le Dauphin et de cesser de l'encourager dans sa révolte ; 3° de livrer tous ceux qui avaient été les instigateurs de la rébellion, savoir le sire de la Trémoille, les seigneurs de Chaumont, de Montejean et de Prie, Jacques de Chabannes, et tous les capitaines qui avaient violé leur serment afin que le Roi en fit justice, ou tout au moins, s'ils ne consentaient pas à les livrer, de les mettre hors de leur compagnie ; 4° de délivrer les prisonniers faits par eux au mépris de l'autorité royale ; 5° de restituer toutes les places dont ils s'étaient emparés, et aussi celles qu'ils détenaient indûment ; 60 de livrer en garantie au Roi telles places, terres et seigneuries qu'il lui plairait de désigner[53].

La réponse faite par les princes, soit en leur nom, soit au nom du Dauphin, faisait valoir des prétentions singulières de la part de rebelles auxquels une seule voie restait ouverte, celle de la soumission. Dans un mémoire spécial, le jeune Lo.uis demandait au Roi de le recevoir en sa bonne grâce, ainsi que tous les seigneurs qui l'avaient servi, conseillé et conforté, et nommait le duc de Bretagne, le duc de Bourbon, le duc d'Alençon, le comte de Montpensier, le comte de Vendôme et le sire de la Trémoille ; il réclamait la possession du Dauphiné, dont les dauphins de France jouissaient d'habitude, même dans un âge moindre que le sien ; il sollicitait pour la Dauphine, qui dorénavant devait séjourner plus habituellement en sa compagnie, une provision pour son état et sa dépense, avec assignation particulière ; il demandait le gouvernement du Languedoc ou de l'Île de France, promettant d'y servir au bien du Roi et à son honneur ; enfin il réclamait, en faveur de tous ceux qui lui avaient donné assistance — villes, places, seigneurs ou gens —, pleine amnistie et restitution de tous biens, états et offices, car, disait-il, pour rien ne les voudroit abandonner, attendu que ce qu'ils ont fait a esté par son ordonnance et commandement.

Dans sa réponse aux articles rédigés au nom du Roi, prévoyant le cas où les demandes faites en son nom et au nom de ses partisans ne seraient point agréées, le Dauphin requeroit et supplioit très humblement le Roi que, pour honneur et reverance de Nostre Seigneur, descharge de son povre peuple et éviter ceste presente division tant dangereuse, il lui plût de faire cesser toute voye de fait et envoyer tous ses gens de guerre à l'encontre de ses anciens ennemis, offrant d'y faire aller pareillement tous ceux qui étaient en son service et tenaient son parti. Il demandait en outre que, pour reparacion de toutes les entreprisses et choses mal faictes, tant au desplaisir du Roy comme au prejudice de son royaume et povre peuple, il lui plût de faire assembler les États généraux, se déclarant prêt à s'y rendre, ainsi que tous les seigneurs et autres de son parti, pour illec demonstrer et dire ses justificacions et les leurs, et de ce faire reparacion au bon plaisir du Roy, par le conseil desdiz trois Estas, pourvu que tous autres qui seront trouvez en coulpe de ce present trouble se soumettent et pareillement en facent reparacions. Et puisqu'il résultait des articles rédigés au nom du Roi qu'il était désireux de complaire au duc de Bourgogne, le Dauphin demandait, en toute humilité, qu'il plût au Roi de signifier à ce prince d'être en personne à l'assemblée des États, ou y faire estre de par luy notable ambassade, pour plus auctorisement reparer les malefices passez. Si le Roi le préférait, le Dauphin était disposé à s'en rapporter entièrement au duc de Bourgogne[54] et à tenir de ce prince son seul appoinctement[55].

Après examen contradictoire de toutes ces requêtes, le Roi, sentant bien qu'en présence de telles exigences une solution amiable était impossible, coupa court aux négociations. La déclaration suivante fut faite en son nom : Quant Monseigneur le Daulphin viendra devers le Roy en humilité qu'il doit, le Roy le traictera comme son seul filz et pourvoira à l'estat de luy et de Madame la Daulphine en manière qu'il en devra estre content. Et quant aux autres requestes qui touchent autres que mon dit seigneur le Daulphin, quant il sera devers le Roy, en fera tant, et si avant, que raisonnablement il en devra estre content[56].

Cependant les princes étaient fort inquiets de la tournure que prenaient les événements. Ils avaient compté sur les bonnes villes, et celles-ci, dociles aux ordres réitérés du Roi, repoussaient leurs ouvertures. Ils avaient compté sur les routiers du Midi, et le vicomte de Lomagne, capitaine général du Roi en Languedoc et Guyenne, avait réussi à les enrôler et s'avançait a la tête d'une armée où figuraient le bâtard de Béarn, Salazar et d'autres capitaines[57]. D'un autre côté, Jean de Langeac, sénéchal d'Auvergne, prêt à s'ébranler au premier signal, réunissait à Usson des gens de guerre et de l'artillerie[58]. Les milices du Languedoc, convoqués pour le 12 juillet, allaient se mettre en mouvement, ainsi que la noblesse du Velu et du Vivarais[59]. Enfin l'hésitation qui, au premier moment, s'était manifestée chez beaucoup de gens, restés spectateurs de la lutte[60], se dissipait en face des progrès décisifs de la cause royale. D'ailleurs, tandis que le Roi faisait pencher le plateau de la balance en y jetant son épée, de zélés serviteurs mettaient leur plume à son service : Bernard du Rosier, prévôt de l'église de Toulouse et conseiller du trône, composa un traité en forme pour faire ressortir, d'une part la gravité du crime dont se rendaient coupables ceux qui voulaient séparer le fils de son père ; de l'autre les devoirs de fidélité et d'assistance qui incombaient aux bons Français[61]. Le mouvement en faveur du Roi s'accentuait de jour en jour. Quand il était arrivé à Clermont, les États d'Auvergne s'étaient assemblés spontanément. Après avoir, entendu les communications faites en son nom, ils avaient déclaré qu'ils estoient siens de corps et biens, et vouloient obeir du tout à sa volonté[62]. Immédiatement une somme de vingt mille francs avait été votée, pour entretenir le fait de sa guerre et la conduite de ses grans affaires[63].

Pourtant le Dauphin ne voulait rien rabattre de ses exigences. En quittant Clermont ; les ducs de Bourbon et d'Alençon avaient promis de revenir la semaine suivante en sa compagnie : ils ne parurent point. Les hostilités recommencèrent vers le 7 juin. Le Roi alla assiéger Vichy, où il mit garnison. De là il marcha sur Cusset, et envoya son avant-garde assiéger Varennes[64] ; Pénétrant en Forez, il s'empara de Saint-Haon, qui, grâce à son intervention, échappa aux horreurs d'une prise d'assaut[65], et reçut la soumission de Roanne, Charlieu, Perreux et d'autres villes. A Roanne, Charles VII vit arriver le comte d'Eu. Ce prince venait le conjurer de se rendre à Cusset, promettant, sur sa vie, que le Dauphin et le duc de Bourbon viendraient trouver le Roi et implorer son pardon. Le Roi y consentit[66].

Les princes étaient à Moulins. Le duc d'Alençon n'attendit pas cette entrevue pour faire sa soumission. S'apercevant enfin que cette guerre était déraisonnable, déplaisante à Dieu et dommageable au peuple, il députa vers le Roi certains de ses serviteurs. Le traité fut promptement conclu. Le duc prit aussitôt congé du Dauphin et du duc de Bourbon, et s'embarqua sur l'Allier pour se rendre à Pouancé, dans son duché[67].

Ayant appris l'arrivée du Roi à Cusset[68], le duc de Bourbon et le Dauphin se mirent en route ; ils étaient accompagnés des seigneurs de la Trémoille, de Chaumont et de Prie. A une demi-lieue de la ville, un message les avertit qu'ils devaient venir sans suite. Alors apparut le caractère irascible du Dauphin : Beau compère, dit-il au duc, vous ne nous aviez talent de dire comment la chose estoit faite, et que le Roy n'eust point pardonné à ceulz de mon ostel. Et, avec un gros juron, il déclara qu'il n'irait pas trouver son père[69]. Mais le duc de Bourbon lui lit observer qu'il n'y avait plus à reculer, car l'avant-garde royale était siir son chemin. Les deux princes s'avancèrent donc seuls. Arrivés à l'hôtel du Roi, ils s'agenouillèrent par trois fois devant lui, et le supplièrent humblement qu'il luy pleust à eulx pardonner son indignacion. — Loys, dit le Roi, vous soyez le bien venu ! Vous avez longuement demouré. Alés vous huy mais reposer en votre hostel, et demain nous parlerons à vous. Puis, se tournant vers le duc de Bourbon : Beau cousin, il nous desplait de la faulte que maintenant et aultres fois avez faite contre nostre majesté par cinq fois (en rappelant les circonstances). Et se ne fust pour l'honneur et amour d'aulcuns, lesquelx nous ne voulons point nommer, nous vous eussions monstré le desplaisir que vous nous avez fait. Si vous gardés d'ore en avant de plus y rencheoir[70].

Le lendemain, après la messe du Roi, et en présence de tout son Conseil, les princes furent introduits, et sollicitèrent le pardon pour La Trémoille, Chaumont et Prie. Le Roi répondit qu'il ne leur pardonnerait pas, mais qu'il les autorisait à retourner en leurs maisons. A cette parole le Dauphin se récria : Monseigneur, donc faut-il que je m'en revoise, car ainsy leur ay-je promis[71]. — Loys, reprit gravement le Roi, les portes sont ouvertes, et se elles ne vous sont assez grandes, je vous en feray abatre seize ou vint toises du mur pour passer où mieulx vous semblera. Vous estes mon fils, et ne vous povés obligier à quelque, personne sans mon congié. Mais s'il vous plaist en aler, si vous en alés, car, au plaisir de Dieu, nous trouverons aulcuns de nostre sang qui nous aideront mieulx à maintenir nostre honneur et signourie que encore n'avés fait jusques à cy[72]. Le Roi se tourna ensuite vers le duc de Bourbon, et reçut son serment de fidélité[73].

Les lettres d'abolition données à ce prince portent la date du 15 juillet. Le Roi, considérant la proximité de lignage du duc, les grands et bons services rendus à la couronne par lui et ses ancêtres, et l'engagement qu'il prenait d'être à l'avenir bon et loyal et de se conformer aux conventions dernièrement faites à Clermont, déclarait le recevoir en sa bonne grâce et bienveillance, et lui pardonnait tous ses torts. Le duc était maintenu en possession de tous ses droits, seigneuries, honneurs et prérogatives. Enfin, pleine amnistie était accordée au comte de Montpensier, son frère ; à Guy, bâtard de Bourbon, à Jacques et Antoine de Chabannes, et aux autres seigneurs, capitaines, gens de guerre[74], et vassaux qui lui avaient prêté assistance[75].

Le surlendemain, 17 juillet, par lettres patentes adressées à. tous ses justiciers et officiers, le Roi déclarait que le Dauphin et le duc de Bourbon étaient venus vers lui en toute humilité et obéissance, et qu'ils avaient reçu son pardon. En conséquence, il ordonnait que toutes guerres et voies de fait cessassent désormais[76]. Le 18, écrivant aux habitants de Reims, le Roi leur annonçait l'événement, ajoutant que la soumission des princes s'était opérée à des conditions entièrement à son bien et à son honneur[77].

En rentrant en grâce, le Dauphin se vit privé de sa maison. Mais, par une marque singulière de l'indulgence paternelle, le Roi lui céda le Dauphiné et lui en confia l'administration, avec une pension de huit cents livres par mois[78] ; un peu plus tard il lui donna la châtellenie de Roquecezière[79]. Quant au duc de Bourbon, la seule obligation qu'on lui imposa fut de rendre toutes les places qu'il détenait indûment[80].

Cette audacieuse prise d'armes se terminait par la complète victoire de la royauté ; et ce triomphe, il est impossible de le nier, était dû à l'énergie et à l'habileté de Charles VII. Au milieu du désarroi universel occasionné par cette révolte, il avait, avec une rare promptitude, pris les mesures nécessitées par les événements ; après avoir comprimé l'insurrection dans son foyer au moment où elle allait être secondée par les Anglais, il' l'avait poursuivie partout où elle relevait la tête, et c'est en s'appuyant sur le sentiment public qu'il avait imposé sa loi aux rebelles.

 

Les faits que nous venons d'exposer m'us ont conduits à un moment décisif dans l'existence de Charles VII. Sismondi écrit à la date de 1439[81] : Nous sommes arrivés à l'époque où il s'opéra dans les habitudes de Charles un changement que les historiens du temps n'expliquent point, ne remarquent pas même, et qui restera toujours un phénomène étrange de l'esprit humain. On a vu pourtant que cette transformation ne fut ni si brusque ni si complète qu'on l'a prétendu[82]. Il y a dans la vie de Charles VII des énigmes, des contradictions que le joug d'un Louvet, d'un Richemont ou d'un La Trémoille ne suffit point à expliquer. Chose étrange ! dans cette période où, selon l'expression d'un historien moderne, Charles régnait avec une faiblesse dégoûtante[83], il n'avait point, aux yeux des contemporains, certains vices qui se développèrent plus tard[84]. L'évêque de Beauvais Jouvenel des Ursins, qu'on ne peut certes accuser d'indulgence — nous en aurons bientôt la preuve, — n'écrivait-il pas en 1433 : Il n'y a en luy aucun vice ?[85]

Ne voyons point Charles VII avec nos propres yeux, qui risqueraient fort de nous tromper ; voyous-le tel que les faits nous le montrent, tel qu'il apparaît, aux diverses époques de sa vie, dans les jugements des contemporains.

Au moment même où il semble que le Roi se lève enfin dans l'éclat de la puissance et de la gloire, nous allons entendre un grave personnage du temps formuler contre lui un véritable réquisitoire, et mettre en relief certaines petites chetifvetés qui, au dire de Georges Chastellain, ne se séparèrent jamais chez lui de beaucoup de belles vertus[86]. Écoutons l'évêque de Beauvais dans un écrit, sous forme de lettre au Roi, composé peu après la Praguerie[87] :

Naguères et l'année passée, vous aviez ordonné à tenir vos trois états en la ville capitale de votre royaume, pour le fait de la paix ; auquel lieu tous les gens de votre royaume étaient joyeux de venir. Mais tout à coup vous prîtes une autre resolution : il fut decidé qu'on irait à Orléans. Quand vos gens ont été à Orléans, c'est à peine s'ils ont profité de votre presence ; car à l'entrée seulement, pour faire la proposition, et à l'issue pour faire la réponse, à grand peine avez-vous montré votre face. S'ils entraient dans votre chambre pour vous faire aucunes requêtes, vous vous boutiez en un petit retrait, et on fermait la porte afin qu'on ne vous parlât point ; et Dieu sait si on le prenait en gré ! En outre vos gens furent à Orléans près d'un mois avant que vous leur fissiez exposer la cause pour laquelle on les avait mandés. Et ne dussiez vous pas avoir été présent à ouïr débattre la matière de cette paix, qui si grandement vous touche, et entendre les opinions ? Ainsi vous eussiez pu savoir l'état de votre royaume, pour éveiller votre entendement, qui semble être tout endormi : Quare obdormis Domine ?[88] Le roi Charles, votre aïeul, faisait-il ainsi ? Quand il tenait ses trois états, il voulait tout ouïr et savoir, et, quelque déplaisance qu'il dût avoir, il se montrait patient ; il s'enquérait des noms de ceux qui étaient venus, de la manière de les reconnaître ; il se les faisait montrer, les appelait par leur nom comme s'il les eût connus de tout temps, s'informait de leur état, de leur ville et de leur pays, et leur donnait toujours quelque confort effectuel, non point illusoire et dérisoire. Et pareillement le faisait le roi d'Angleterre Henri, dernier mort, votre adversaire ; et le peuple était enclin, en voyant tenir de telles manières, à aider de cœur, de corps et de biens. Mais vous faites tout le contraire, qui m'est chose très piteuse à réciter. Car vous voulez être muché et caché en châteaux, méchantes places et manières de petites chambrettes, sans vous montrer et ouïr les plaintes de votre peuple. Et quand vous êtes averti, vous donnez confort verbal, sans aucun effet, qui est très grand danger et péril pour le salut de votre âme.

Moi et les autres de ma condition sommes tenus de vous avertir, en vous dénonçant que, avec la mutation des lieux que vous faites souvent de aller et venir en plusieurs de vos villes, vous veuilliez pareillement muer vos déliberations et pensées. Et vous ne devez pas croire qu'il suffise de lire en votre retrait et de 'faire oraisons, ni que, par votre éloignement des frontières vous vous puissiez fortifier. Mais vous devez pourvoie et secourir aux nécessités de ceux qui souffrent et de votre pauvre peuple, triboulé, affligé en la forme et manière ci-dessus déclarée, en réputant souffrir vous même ce qu'il souffre, car, si vous n'avez cette imagination, en vain et pour néant tiendrez le nom de Roi[89].

Évidemment, c'est un mécontent qui parle[90]. L'évêque de Beauvais va jusqu'à reprocher au Roi l'appel adressé à ses sujets à l'occasion de la révolte du Dauphin : Quel pauvre confort a ce été à nous, vos pauvres brebis, qui sommes ici en frontière, d'une lettre qu'il vous a plu envoyer, faisant mention d'une assemblée que on dit avoir été faite de mon très redouté seigneur monseigneur le Dauphin, votre seul et unique fils, et autres vos parents, dont vous avez pris déplaisance ?[91] Il s'élève contre les princes qui dominent à. la Cour, et les flagelle, sous le voile d'une allégorie, comme mauvais rapporteurs et flatteurs vimeux[92]. Il regrette l'éloignement d'autres princes dont la présence suffirait pour mettre les ennemis eu fuite[93]. Il reproche au Roi de délaisser Paris[94]. Dans ses plaintes véhémentes, il n'a garde de s'oublier lui-même : il songe surtout aux frontières et, parmi les frontières, à la sienne, c'est-à-dire à Beauvais. A ceux qui lui reprocheraient la liberté de son langage, il répond :

Mais on pourrait dire que de dire telles choses, le Roi pourrait être très mal content, courroucé et déplaisant, et que je ne le dusse point de ceci blâmer ; et que c'est mal fait, et qu'il m'en pourrait venir inconvénient. A quoi je puis répondre que je pense dire vérité pour le bien de lui et de sa seigneurie. J'ai été son avocat, je suis son pair[95] ; je lui ai promis de lui révéler son dommage et faire son profit. Je crois en lui montrant ce que dit est m'acquitter loyalement. Ceux qui diraient le contraire ne sont ni bons ni loyaux envers lui ; et je leur réponds par la parole que Dieu dit aux Pharisiens : Si male locutus fuero, testimonium perhibe de malo ; si autem bene, cur me cœdis ?[96]

Et l'évêque poursuit son réquisitoire ;

Pourtant je sais bien que le Roi en est très déplaisant et qu'il voudrait que lesdites tyrannies cessassent et que justice se fit ; mais il n'est semblant qu'il fasse de l'exécuter. On fait bien des ordonnances ; mais il suffit de les écrire et publier, ce qui est grande moquerie, dérision et deshonneur pour le Roi. Et je me tairais ! Non ferai. Car il semble à. mon peuple que quand on l'aura remontré au Roi, il y pourvoira ; et me disent les paroles du Livre des Rois : Ne cesses clamare ad Dominum, ut salvet nos[97]. Et n'est homme de entendement qui ne dise que le Roi et ceux d'autour de lui ne missent bien remède à. tout cela, s'ils voulaient ; mais, quelque mal que l'on fasse, ceux qui le font sont très bien venus quand ils viennent : au lieu de les punir, on leur donnera chevaux, harnais et argent ; et pour cela je dis en effet que c'est la faute du Roi...

Nous avons, selon les docteurs, trois manières de consentements : Primus consensus negligentiœ ; secundus licentiœ ; tertius auctoritatis. Or regardons, Sire, si l'on peut dire que, par ces trois manières, vous et ceux qui sont autour de vous, et les princes, soyez consentants des maux que l'on fait. La première, négligence. Où est la diligence que on fait d'en faire justice ? Il n'en est nouvelles, et oncques si grande négligence ne fut  faite. La seconde, licence. Dieu sait s'il y en a qui donnent congé et licence de piller et rober, et pis encore. La troisième, autorité. Nous avons vu que, aussitôt qu'un pays était réduit en votre obéissance, on envoyait vivre audit pays telles manières de gens, sans ordonnance, chef, ni manière de forme de guerre ; et l'on savait bien la fin qui s'en devait suivre. Et pour Dieu, Sire, pardonnez-moi ; car, en- vérité, je puis bien dire que  vous y avez grande faute, et pour ce donc je puis bien dire qu'il faut que vous vous éveilliez, car nous n'en pouvons plus[98].

Nous avons cité longuement l'évêque de Beauvais, parce qu'il nous laisse entrevoir la vérité jusque dans l'exagération de la plainte ou du blâme. Mais il ne faut pas prendre à la lettre toutes les assertions du fougueux prélat, qui se posa toute sa vie en redresseur d'abus : les faits et les témoignages contemporains lui donnent, sur plus d'un point, un démenti :A l'entendre, Charles VII jouerait encore le rôle effacé et dérisoire qu'il avait au temps de La Trémoille. Nous savons qu'il n'en est rien. Georges Chastellain, qui était en France à cette époque et fréquentait la Cour[99], fait bien ressortir le changement survenu dans l'attitude du Roi. Par avant la pacification, dit ce chroniqueur, il n'estoit vertu en luy qui le pust essourdre ; mais, depuis icelle trouvée, n'en avoit nulle si petite aussi qui ne luy rendist fruit. Et il ajoute que, parmi les qualités qu'on voyait briller chez le Roi, les principales étaient diligence et propre sollicitude de ses affaires, là ou il mettoit cœur et entendement et y appliquoit toutes ses vertus[100].

A ces États généraux d'Orléans, où, selon Jouvenel des Ursins, la personnalité royale n'aurait point apparu, elle s'accusa au contraire nous l'avons montré plus haut[101] — d'une façon remarquable. Il en fut de même aux États de Montpellier en mars 1437, et aux États du Puy en avril 1439[102].

Il serait souverainement injuste de rendre Charles VII responsable de l'insubordination des gens de guerre. Assurément il avait fait tout ce qui était humainement possible pour combattre un fléau qu'on ne pouvait détruire du premier coup ; ce n'était pas d'ailleurs à un ami des princes révoltés qu'il appartenait de se plaindre d'un état de choses que la Praguerie avait puissamment contribué à aggraver ou tout au moins à prolonger. C'est ce que le Roi rappelait plus tard, avec une sobriété pleine de vigueur, en répondant à de semblables accusations formulées par les princes réunis à Nevers : Lesdites pilleries ont toujours déplu au Roi et déplaisent de tout son cœur, Et s'est essayé plusieurs fois de vider toutes gens faisant pilleries, et les loger sur frontières. Et lui étant dernièrement à Angers (décembre 1439), l'avait fait et ordonné, et les avait établis et soudoyés. Mais alors et depuis, on lui a levé lesdits gens d'armes, qui ont été cause de remettre les pilleries sur les pays. Et lui ont été faites plusieurs traverses, par quoi on n'a point pu excuser ni donner provision auxdites pilleries ainsi comme il s'était proposé et avait intention de le faire[103].

L'évêque-de Beauvais, dans l'entraînement de son argumentation, va jusqu'à faire un crime au Roi de cette générosité qui lui était habituelle, et de cette clémence qui fut un de ses titres d'honneur[104]. Quand Charles VII aidait Saintrailles, La Hire et d'autres de ses serviteurs à payer leur rançon[105], quand il se souvenait des services rendus autrefois au royaume par le connétable du Guesclin[106] ou par Barbazan[107], quand il récompensait ceux qui s'étaient distingués au siège de Montereau[108] ou donnait des gratifications à de vieux et fidèles conseillers comme Noé, Loré, Gaucourt[109], quand il rétribuait largement les services du bâtard d'Orléans[110], à coup sûr il remplissait dignement son devoir. Et cette clémence qu'on ne tolère chez lui que quand elle s'exerce envers set ennemis, n'en fit-il point preuve à l'égard de ses proches, de ses sujets rebelles, de son peuple tout entier ? Pouvait-on dire, que Charles VII n'avait aucune compassion du peuple, quand tous ses actes tendaient à alléger le plus lourd des fardeaux qui pesaient encore sur lui ? Il n'était jusqu'à la dévotion du Roi qui ne servît de thème à de véhéments reproches[111].

Ne nous exagérons donc pas la portée de ces critiques, mais prenons-en bonne note : elles ne donneront que plus de poids aux éloges que nous pourrons rencontrer sous la plume de l'évêque de Beauvais.

 

 

 



[1] Œuvres de Georges Chastellain, t. II, p. 164.

[2] Mémoire publié parmi les Preuves de notre édition de Mathieu d'Escouchy, p. 5-7. Ce mémoire, rédigé à Montferrant, en pleine Praguerie, et destiné à être placé sous les yeux des princes, est écrasant pour le duc de Bourbon.

[3] 1.500 écus pour la Bastille, qui devait être livrée le 1er janvier 1437 ; 6.500 écus pour Corbeil, le Bois-de-Vincennes, le Pont-de-Charenton, Brie-Comte-Robert et le Pont-de-Saint-Cloud qui devaient être évacués un an plus tard. Ces renseignements nous sont fournis par le Mémoire de Louvet, déjà cité, qui se trouve aux Archives de Turin.

[4] Même source.

[5] Voir plus haut, chapitre II.

[6] Deboutté par fortune de guerre de possession paternelle, dont après, venu à delivrance, lui convenoit vivre moins reluysant, le plus povre de France. Chastellain, t. II, p. 164.

[7] Aucun rain toutes voyes tenoit de folie, mais les aucuns endroits de grant et meur sens, qui vainquoit l'imparfait. Chastellain, t. II, p. 175.

[8] Mémoire cité, p. 7. — Le maréchal de la Fayette avait été investi le 3 mai 1439 de la charge de sénéchal de Beaucaire, et Jacques de Chabannes, sénéchal de Bourbonnais, était devenu sénéchal de Toulouse le 2 février précédent, avec dispense d'exercer son office en personne.

[9] Lettre du Roi aux habitants de Reims, en date du 24 février 1440, communiquée par M. Demaison, archiviste. Voir aux Pièces justificatives.

[10] Voir chap. premier.

[11] Berry, p. 406-407. Cf. Martial d'Auvergne, t. I, p. 169-170, et lettre du 24 février.

[12] La Cronique martinienne, f. CCLXXXV v°.

[13] C'est sous ce titre que le bâtard d'Orléans apparaît désormais dans l'histoire ; le comté de Dunois lui fut donné par lettres du duc d'Orléans en date du 21 juillet 1439.

[14] Et en continuant son propos, trouva moyen de faire venir tous les capitaines qui estoient venus du siège d'Avranches à Angiers ; par la venue desquels et d'aucuns d'eulx et d'autres, cuida prendre le chasteau d'Angiers, où estoit le Roy, deliberé de tuer les plus prochains et principaux serviteurs qui estoient entour luy.  Mémoire cité, p. 7-8.

[15] Mémoire cité, p. 10.

[16] Je suis ici le récit de Berry, qui nomme parmi les princes présents à Blois le dur d'Alençon et le comte de Danois. Le mémoire de la chancellerie royale dit que le premier avait aussitôt été envoyé à Niort ; il cherche à pallier les torts du second.

[17] Il était beau–frère de Pierre d'Amboise, sire de Chaumont, ayant épousé Madeleine d'Amboise.

[18] Berry, p. 407.

[19] Mémoire cité, p. 7. — La dame de Chaumont était Anne de Bueil.

[20] Lettres du duc de Bretagne. Original signé, Archives, P 13582, cote 595 ; éditées dans D. Morice, t. II, col. 1355.

[21] Voir le texte dans D. Morice, t. II, col. 1325-1327.

[22] On a des lettres du Dauphin en date du 16 octobre 1439 (Le Grand, vol. VI, f. 67) qui montrent bien la part qu'il avait aux affaires.

[23] Commission en date du 12 décembre 1439. Archives, K 65, n° 11 ; Thibaudeau, Histoire du Poitou, Nouv. édit. publiée par M. de Sainte-Hermine (1840). t. II, p. 468. Cf. lettres du 21 décembre, publiées par M. E. Charavay, Lettres de Louis XI, t. I, p. 178. Les trois conseillers étaient Jean de Montmorin, conseiller et malin des requêtes de l'hôtel du Roi, Pierre de Tullières et Jean Colas, conseillers au Parlement.

[24] Le Dauphin était le 17 décembre à Cholet ; il se rendit ensuite à Fontenay-le-Comte, où il resta jusque vers le 5 mars (Lettre du dauphin du 17 décembre ; Extraits de comptes, dans Lettres de Louis XI, t. I, p. 3 et 170). Le 19 janvier, de Pouzauges (Vendée), il envoya un message à son père à Angers (Lettres de ce jour : British Museum, Additional charters, tr 4427). Le 29 janvier, de Fontenay-le-Comte, il fit partir pour la même destination Amaury d'Estissac et Guillaume d'Avaugour (Pièces originales, 1080 : ESTISSAC ; Lettres de Louis XI, t. I, p. 180).

[25] Dès le milieu de janvier le Dauphin entretenait des relations avec le duc de Bretagne : le 19 janvier, à Pouzauges, il fit faire un paiement à un envoyé du duc venu pour certaines grosses besognes (Pièces originales, 2035 : MONTMORIN) ; le 25 janvier il envoya à ce prince son maitre d'hôtel Gabriel de Bernes luy porter lettres de creance pour besoignes touchans grandement Monseigneur et nous. (Pièces originales, 305 : BERNES ; Lettres de Louis XI, t. I, p. 183).

[26] Jean Chartier, t. I, p. 253-254. Cf. Thomas Basin, t. I, p. 136.

[27] Lettre du 24 février.

[28] Le Roy saichant veritablement que monseigneur le Daulphin avait entreprins d'avoir le gouvernement du royaulme de France, et mettre le Roy son père quasi en tutelle. (La Cronique martinienne, fol. CCLXXXV v°.) — Si estoit leur intencion que le dessusdit Daulphin aroit seul le gouvernement et povoir du royaume de France et que le Roy Charles son pere seroit mis comme en tutelle et gouverné par eulz. (Monstrelet, t. V, p. 410.) — Sous ombre de nostre fils le Daulphin, dit le Roi dans ses lettres du 2 mai, lequel, qui est encore en jeune aage, comme chascun sait, par enhortemens et seductions, ilz (les ducs de Bourbon et d'Alençon, le comte de Vendôme et autres) ont prins et fait joindre avec eulx, en le voulant eslever en gouvernement et regence par dessus nous et contre nostre autorité et majesté royale. (Duclos, Histoire de Louis XI, Preuves, p. 16.)

[29] Chartier, t. I, p. 254. — Nous avons le texte de la lettre missive, en date du 24 février, adressée aux habitants de Reims (voir aux Pièces justificatives). Mention d'une lettre semblable est faite dans les Comptes de Compiègne (extraits dans D. Grenier, 20 bis, 2e partie, f. 19). — En même temps le Roi fit rédiger des lettres patentes qui furent successivement envoyées à toutes ses bonnes villes. Elles se trouvent aux archives de Narbonne, AA 140, et ont été publiées par M. Mouynès, dans son Inventaire de Narbonne, série AA, annexes, p. 391.

[30] Mémoire cité, p. 11. Lettres du mois d'avril en faveur de Saint-Maixent, dans Richard, Recherches sur l'organisation communale de la ville de Saint-Maixent, p. 196.

[31] Lequel mon dit seigneur de Bourbon respondit plusieurs grandes, oultrageuses et deshonnestes paroles, qui bien seroient longues et deshonnestes pour luy à reciter, entre lesquelles il dut dire que pour le Roy ne fairoit rien et qu'il fairoit passer les gens d'armes. Mémoire cité, p. 11.

[32] Je suis dans mon récit la relation officielle insérée dans le mémoire, déjà cité, avec laquelle concorde le témoignage du héraut Berry. Je m'écarte par conséquent de la version de Gruel, l'écuyer du connétable, beaucoup moins sûre, bien qu'elle ait été adoptée. par la plupart des historiens. Il est constant que le connétable était à Blois au moment où le Roi fut informé de la révolte des princes, et qu'il fut même, comme le dit Gruel, fort attaqué par les princes, s qui songèrent un moment à mettre la main sur lui ; il est constant que, quand il revint à Amboise près du Roi, celui-ci, a non voulant que mondit seigneur de Bourbon et ses adherens fissent de luy comme les Anglois firent du Roy Richart, — cette allusion se trouve dans la relation officielle avant d'être placée par Gruel dans la bouche du connétable, — avait déjà pris les armes, s'était porté sur Loches, et avait fait détrousser le petit Blanchefort : Gruel constate lui-même le fait : il dit que l'échafaud était dressé, et que ce fut à la requête de son maître que le Roi fit grâce ; il est constant enfin qu'une première démonstration armée très énergique — et c'est là ce que nous révèle la relation inédite — fut faite dès le début et contribua à arrêter un mouvement qui sans cela aurait pu prendre des proportions beaucoup plus considérables. L'arrivée de Richemont à Amboise eut lieu entre le jour où le Roi parut devant Loches et celui où, quatre jours après, il se porta de nouveau devant cette ville, espérant y assiéger le duc de Bourbon. Or, il y a des actes du 24 février, donnés à Amboise : c'est donc vers cette date que le connétable opéra sa jonction avec le Roi.

[33] Nous soions mis sus en armes et porté et fait porter par enseigne, ès panons des lances de nostre compaignye, une couronne d'or. Lettres de Charles VII d'avril 1440, par lesquelles il donne à la ville de Saint-Maixent des armes où figure cette maronne d'or. Richard, l. c., p. 196.

[34] On a une lettre missive aux consuls et habitants de Narbonne, datée de Mirebeau le 2 mars ; le Roi leur envoyait ses lettres patentes du 24 février, en leur recommandant d'en accomplir le contenu de point en point, sans y faire aucune faulte, et de n'obéir ni à son fils ni aux princes ; il terminait en ordonnant d'envoyer des députés, si déjà on ne l'avait fait, à l'assemblée de Bourges, car son intention était d'icelle tenir et estre en brief. Original aux Archives de Narbonne, AA 142 ; Texte dans l'Inventaire de Narbonne, l. c., p. 392.

[35] Sur la réduction de Melle, due à Guillaume Perceval, écuyer d'écurie du Roi, voir des lettres du mois de mars 1446 (Archives, JJ 177, n° 170). — Le Roi étant à Saint-Maixent, le 10 mars, enleva au sire de Montenay, coupable de s'être joint aux princes révoltés, la châtellenie de Falavier (Archives de l'Isère, B 3224, f. 350).

[36] Sed præveniens rex, et cavens ne longius evagaretur initiatum incendium, eum viriliter et cum magna festinatione est prosecutus. Thomas Basin, t. I, p. 137.

[37] Envoyèrent (le duc et Jean de la Roche) requerir le comte de Honenton à leur secours, lequel ne voulut venir s'ilz ne luy bailloient places en Poitou, et ilz n'avoient que Niort et Bertueil. Mémoire cité, p. 13.

[38] Lettres du 10 mars, citées par D. Vaissète, t. IV, p. 494. — Le 28 mars, le Roi donna dans cette ville des lettres révoquant Jacques de Chabannes de la charge de sénéchal de Toulouse et le remplaçant par Galobie de Panassac (Original, Cabinet de l'auteur ; D. Vaissète, t. IV, preuves, col. 455). Le 1er avril, il révoqua Jean du Chastel, châtelain et capitaine de Revel, qui s'était joint aux rebelles (Archives de l'Isère, B 3224, f. 347).

[39] Mémoire cité, p. 13 ; Berry, p. 407 ; Chartier, t. I, p. 255 ; lettres du 16 avril 1440, Ms. fr. 20584, f. 41, éditées par Richard, l. c., p. 199. — C'est un bourgeois de Saint-Maixent, Pierre Deuil, qui, se jetant à la hâte sur son meilleur cheval, rayait crevé pour venir avertit le Roi. Charles VII, pour le récompenser et le dédommager de ce que les rebelles avaient tout pris et pillé chez lui pendant qu'il se rendait à Poitiers, lui donna une rente de 100 livres à toucher pendant dix ans. — Un autre bourgeois, Jean Sachier, qui avait pris l'initiative de la résistance, avec vingt-trois compagnons, fut nommé valet de chambre du Roi et eut l'administration de la vieille aumônerie de la ville. — Saint-Maixent reçut, par lettres données sur l'heure même, en reconnaissance et perpétuelle mémoire de sa grande et bonne loyaulté et vaillance, la faveur d'avoir pour armes, à perpétuité, un escu dont le champ soit de gueulles et une couronne d'or par dedens, avecques troys fleurs de lis d'or au chief dudit escu. Les habitants eurent le privilège d'avoir un corps de ville et d'élire eux-mêmes leurs deux magistrats. Les religieux furent également récompensés de leur fidélité. Voir Richard, l. c., p. 18 et suivantes.

[40] Le Roy tint le siège devant ledit chasteau huit ou dix jours, et le fit batre d'angins et de bombardes, tellement qu'il eut cents de dedans à sa volenté, et en fist trancher les testes et morir jusques à vingt-quatre ou vingt-cinq ; et à bien soixante, parce qu'ils l'avaient tousjours servy en ses frontières, donna la vie. Mémoire cité, p. 13.

[41] Mémoire cité, p. 7 et 14.

[42] Original aux Archives de Narbonne, AA 143. Ed. Mouynès, l. c., p. 392-393.

[43] Bertrandon de la Broquière partit le 27 mars pour remplir cette mission (Archives du Nord, B. 1975, f. 70). Chastellain prétend, dans son apologie de la politique du duc à l'égard de la France, intitulée : Exposition sur vérité mal prise (Œuvres, t. VI, p. 286), que le duc, au désespoir de voir le fils en révolte contre son père, varia longuement de monter à cheval, à privée mainie, et de aller devers le Roy en personne, pour obvier à cet esclandre.

[44] Dès le 4 décembre 1439 le duc avait envoyé au Roi son huissier d'armes Jean Viguier, pour aucunes choses secretes ; et le trouva à Angiers, et vacqua jusques au IXe jour de mars ensuivant. Archives du Nord, B 1669, f. 156 v°. Le 9 mars, Jean Viguier repartit de Saint-Omer pour aller vers le Dauphin et le duc de Bourbon et accompagner les ambassadeurs qui devaient se rendre aux États de Bourges. Id., f. 137.

[45] Mémoire cité, p. 14.

[46] Berry, p. 408 ; Gruel, p. 390. Dans le mémoire cité à diverses reprises, et qui est un guide si précieux, on cherche à atténuer les torts de Dunois : on dit (p. 3) qu'il ne savait pas les mauvaises intentions des rebelles, et que, quant il congneust au vray leur entencion, il les abandonna et vint devers le Roy, comme raison estoit. Dunois ne tarda pas à être envoyé à Saint-Omer, afin de poursuivre les négociations avec l'Angleterre.

[47] Ces lettres, qui se trouvent dans le Recueil de Le Grand (vol. VI, f. 70 et 114), ont été publiées par Duclos, Preuves, p. 56.

[48] Jacques de Chabannes était venu près d'Aigueperse donner sur l'artillerie du Roi et en avait pris une partie. Le Roy sent ces nouvelles ; si fut en personne, entre le point du jour et soleil levant au champ où ladicte destrousse avoit esté faicte, mais d'icelle heure estoient deja retraiz ledit messire Jaques de Chabannes et ses gens. Berry, P. 409.

[49] Mémoire cité, p. 13-15 ; Berry, p. 407-16 ; Chartier, t. I, p. 25458 ; Gruel, p. 390.

[50] Le comte avait été autorisé par le Roi à se rendre en Bourbonnais pourchasser aucunes assignacions que avoit au dit pays. Mémoire cité, p. 15.

[51] Sur l'arrestation de Gaucourt, opérée vers le 16 avril, voir Berry, p. 408, les lettres du 2 mai 1440 dans Duclos, l. c., et le Premier compte de Guillaume du Bec, dans Ms. fr. 20684, p. 578.

[52] Mémoire cité, p. 15-16. Cf. Berry, dont le récit n'a point la netteté de celui de la chancellerie royale.

[53] C'est ce que le Roy veut et demande entre fait par les seigneurs, etc. Preuves de la Chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 17-20

[54] Au cours des négociations (à la date du 15 mai), Philippe envoya au Dauphin le seigneur de Ternant, accompagné d'un de ses poursuivants d'armes ; cette mission se prolongea jusqu'au 2 septembre suivant. Archives du Nord, B 1969, f. 177, et 1975, f. 55 v°.

[55] Voir Response faicte par Meisseignenrs aux demandes faictes par le Roy ; — Requeste que Monseigneur le Dauphin fait au Roy ; — Articles derrenierement accordez aux Jacobins près Clermont par mesdiz seigneurs et les gens du Roy ; — Response que Monseigneur le Daulphin veut et ordonne estre faicte au Roy sur les articles que le Roy a dernierement baillez aux seigneurs. Preuves de la Chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 20-29. Tous ces documents sont extraits des Archives de Pau et se trouvent dans le fonds Doat, vol. 9, f. 240 v°-255.

[56] Preuves de la Chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 24.

[57] Voir Berry, p. 409, et D. Vaissète, t. IV, p. 494.

[58] Voir des lettres du 26 novembre 1446, parmi les documents du dossier LANGEAC : Pièces originales, 1639.

[59] D. Vaissète, t. IV, p. 494 ; Compte de la sénéchaussée de Beaucaire, dans Le Grand, vol. VI, f. 69 v°.

[60] On lit dans le traité de Bernard du Rosier, cité dans la note suivante : Que precepta complere quidam voluerunt ; alii vero regnicole quam plurimi differre et dissimulare maluerunt de divisione patris et filii se intromittere. Ms. lat. 6020, f. 67 v°.

[61] Ce traité est intitulé : Liber de attemptalo transportu persone Dalphini unigeniti et heredis cerone factum Karolo septimo hujus nominis Francorum regi illustri. Il fut communiqué le 12 juillet, à Billom, aux gens du vicomte de Lomagne, à la personne duquel Bernard était spécialement attaché. Ms. lat. 6020, f. 67-75 v°.

[62] Berry, p. 410. — Il résulte d'un document publié par M. A. Thomas (les États provinciaux de la Francs centrale sous Charles VII, t. I, p. 122 note) que les États essayèrent un instant de jouer le rôle de médiateurs entre le Dauphin et le Roi, et qu'ils envoyèrent plusieurs seigneurs vers le Dauphin et le duc de Bourbon à Riom et à Gannat, tint dans ce but que pour leur demander d'épargner l'Auvergne. — Faisons observer ici que la principale source sur cette réunion d'États n'est point Martial d'Auvergne, comme le pense M. Thomas, mais bien le héraut Berry.

[63] A la condition, il est vrai, que la somme ne serait pas livrée immédiatement. Thomas, l. c., p. 199.

[64] Là furent mis en liberté Gabriel de Bernes, premier maître d'hôtel du Dauphin, et Jean de Laval, détenus par les rebelles.

[65] Berry, p. 410-411.

[66] Berry, p. 410.

[67] Berry, p. 410.

[68] Le Roi était dans cette ville le 5 juillet.

[69] Monstrelet, t. V, p. 412-413. — Monstrelet place cette scène au 19 juillet, mais les documents du 17, que nous citons plus loin, prouvent qu'à cette date la soumission des princes était un fait accompli.

[70] Monstrelet, p. 413.

[71] La Trémoille avait pris à l'avance ses précautions : il s'était fait délivrer, à la date du 13 juillet, des lettres signées de la main du Dauphin et scellées de son scel de secret, par lesquelles le jeune Louis, considérant les grans, notables et honorables services faits à son père et à lui par son c très cher et amé cousins le sire de la Trémoille, promettait et jurait, sur la foi du serment, qu'il entretiendrait et tiendrait son dit cousin en la bienveillance et amour du Roi et dans la sienne, toute sa vie, qu'il le soutiendrait envers et contre tous, et lui ferait obtenir le paiement de ses assignations. D. Fonteneau, 26, n° 385 ; édité par M. Charavay, Lettres-de Louis XI, t. I, p. 181. — Ce document se trouve aussi reproduit dans la belle publication faite sous les auspices de M. le duc de la Trémoille : Chartrier de Thouars. Documents historiques et généalogiques (1877, in-fol., p. 20), d'après l'original faisant partie de ses archives.

[72] J'ai collationné cette fière réponse sur le texte du manuscrit fonds français 2682, f. 201. Il y a deux mots omis dans l'édition de M. Douët-d’Arcq, t. V, p. 414.

[73] Berry, p. 411 ; Monstrelet, t. V, p. 412-415.

[74] Étaient nommés : Pierre et Guinot de Brusac, le sire de Saint-Priest, Cagnon de la Molière, Louis de Valpergue, Galiays, Jean et François d'Apchier, Archambault La Roque-Pipon, le sire de Moy, Main Ferlin, le sire de Beauvoir, le sire de Cordebeuf, le sire de Lastic, et le sire d'Ulfé.

[75] Original aux Archives, P 13721, cote 2099.

[76] Original, portant la trace d'un sceau plaqué, aux Archives, P 14001, cote 862 ; Livre vert vieil second du Châtelet de Paris, aux Archives, Y 4, f. 45 : texte reproduit par M. Tuetey, dans son édition du Journal d'un bourgeois de Paris (p. 353, note). Cf. même texte dans Compayré, Études historiques et documents inédits sur l'Albigeois, etc. (Albi, 1841, in-4°), p. 48. Ce document est donné sous une forme abrégée par Monstrelet (t. V, p. 415), avec la date du 24 juillet.

[77] Des nouvelles de par deça : Nostre file le Daulphin et nostre cousin de Bourbon sont venuz par devers nous en toute humilité et obeissance, requerans pardon de la desobeissance par eulx envers nous faite ; lesquelz, pour ces causes, avons receux en nostre bonne grave et obeissance, moyennant plusieurs conditions et toutes à nostre bien et honneur. Lettre missive du 18 juillet 1440, aux archives de Reims.

[78] Savoir faisons que, comme nostre très cher et très amé filz Loys, Daulphin de Viennois, par la grace de Nostre Seigneur soit venu en sage suffisant pour avoir cognoissance et soy employer ès besongnes et affaires de nostre royaulme, et d'avoir estat et gouvernement, et aucunes terres et seignouries dont il se puisse aucunement aidier et soutenir son estai et despense... (Lettres en date du 28 juillet 1440, dans Duclos, Preuves, p. 20.) Toutefois le Dauphin ne pouvait changer les officiers en fonctions, et le sceau du Dauphiné restait aux mains du chancelier de France. Le roi avait, on l'a vu, dans le cours des négociations, pris une sorte d'engagement en répondant aux demandes du Dauphin relativement au Dauphiné et à son estat : Quant monseigneur le Daulphin viendra devers le Roy en humilité qu'il doit, le Roy le traictera comme son seul fila et pourvoira à l'estat de luy et de madame la Daulphine en manière qu'il en devra entre content. (Preuves de la Chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 24.)

[79] Savoir faisons que, pour aucunement ayder à nostre très cher et très amé filz le Daulphin de Viennois à supporter les grans charges et despens que faire et soustenir lui convient chascun jour, et à ce qu'il ait mieux et plus honorablement de quoy maintenir son estat... Lettres données à Chartres le 19 décembre 1440. Archives, P 2531, f° 180 v°.

[80] On voit par l'énumération donnée par Monstrelet (Cf. Journal d'un bourgeois de Paris, p. 352) que Corbeil et le Bois-de-Vincennes étaient encore aux mains du duc de Bourbon. Ce prince n'avait donc pas exécuté le traité dont il est parlé plus haut (p. 118).

[81] Sismondi, Histoire des Français, t. XIII, p. 344.

[82] Jusqu'alors Charles avait paru incapable d'attention, d'intérêt à ses propres affaires, d'activité, de sacrifice de ses aises ou de ses plaisirs : dès à présent, au contraire, nous le verrons montrer une ferme volonté de rétablir l'ordre dans son royaume, d'en chasser ses ennemis, de sacrifier son repos, ses plaisirs à son devoir, et une intelligence remarquable dans le choix des moyens pour arriver à son but. Sismondi, t. XIII, p. 344-345.

[83] Ce sont les propres expressions de Sismondi.

[84] Voici ce que dit le bourguignon Chastellain, à la date de 1430 (t. II, p. 179) : Neanmoins aucuns vices soustenoit.... lesquels se declareront ès lieux là où les matières d'elles-mêmes es donneront à cognoistre clerement les effets, et desquelles il n'est heure presentement d'en escrire en generaL Par quoy les vices encore n'ayant point de lieu, il loist bien de manifester les vertus, èsquelles, en clère œuvre de Dieu, il deviendra glorieux par dessus grant nombre de ses pères, quant de très povre et miserable commencement, il est parvenu à glorieuse fin...

[85] Épitre citée. Ms. fr. 2701, f. 4. — Chastellain dit aussi (t. I, p. 179) : Assez patient, mais corrigé, peut estre de la volonté de Dieu, d'aucuns ses délits.

[86] Avoit beaucoup de belles vertus, et de petites chetifvetés aussy assez dangereuses. Chastellain, t. II, p. 185.

[87] M. Vallet pense que les Épîtres de 1433 et de 1440 ne furent envoyées ni aux États, ni au Roi. Ce n'était là qu'une forme de rédaction dont se servait Fauteur pour exposer les idées qu'il voulait mettre en circulation et faire arriver à leur adresse. — Voir l'article URSINS (Jean II JOUVENEL ou JUVÉNAL. DES) dans la Nouvelle Biographie générale, t. XLV, col. 806. — Nous prévenons le lecteur que nous avons un peu modernisé le texte, afin d'en rendre la lecture plus facile.

[88] Toute la seconde partie de cette épître est le développement du texte Quare obdormis et oblivisceris inopiœ nostræ et tribulationis nostræ ? I. Il semble que le Roi dort ; II. Le Roi doit s'éveiller ; III. Le peuple n'en peut plus et le royaume est réduit à l'extrémité.

[89] Ms. fr. 5023, f. 54 v°.

[90] Et parleray, dit-il, en la tribulacion de mon esperit et en l'amaritude de mon arme (âme), ainsi que faisoit Job. Ms fr. 5022, f. 1.

[91] Ms. fr. fr. 5022, f. 9 v°. Plus loin, il dit : Nous aymissions mieulx que vous vous esveillissiez par autre manière, car il semble que ce ne soit que par envie que aucuns de voz pareras ont de estre emprez vous. — En lisant ces passages où l'évêque prenait si vivement la défense des princes révoltés, on ne peut s'empêcher de faire la remarque que, plus tard, il devait se faire le défenseur du duc d'Alençon, accusé d'un crime de haute trahison.

[92] Ms. fr. 5022, f. 1. L'évêque voit le remède dans le renvoi de tous les princes du sang, car entre eulx a très grans envies, dont viennent plusieurs inconveniens, et quant vous les aurès mis hors, tout cessera ; il rappelle que Charles V ne gardait nul de ses frères près de lui : Et quant ils le venoient veoir, il leur donnoit quelque mil escus pour eulx en retourner.

[93] Quelz seigneurs avez vous de vostre sang et lignage, comme messeigneurs de Bourgongne, de Bourbon, de Bretaigne, de la Marche, d'Armenach, de Fouez ! Il n'y a cellui qui ne soit puissant de confondre voz ennemis. Mettez les sus, et voz ennemis ne leur sera que ung desjeuner. Ms. fr. 5022, f. 18.

[94] Hélas ! Sire, pourquoy avertissez du milieu de vostre sang vostre main dextre, c'est assavoir de vostre ville de Paris, qui est le chief de vostre royaume ? Quant vous y venez, il semble que en vouldriez estre hors. Ms. fr. 5022, f. 14.

[95] L'évêque de Beauvais était pair de France.

[96] Ms. fr. 5022, f. 13 v°.

[97] Ce texte se trouve au l. I, ch. VII du Livre des Rois : Ne cesses pro nobis clamare ad Dominnm Deum nostrum, ut salvet nos de manu Philisthinorum.

[98] Ms fr. 5022, f. 13 v°-14.

[99] Voir Chastellain, t. I, p. XIV-XV ; t. II, p. 53.

[100] Chastellain, t. I, p. XIV-XV, t. II, p. 180.

[101] Voir ci-dessus, chapitre II.

[102] Voir ci-dessus, chapitre II.

[103] Monstrelet, t. VI, p. 37. — On retrouvera dans les remontrances des princes la plupart des griefs de l'évêque de Beauvais.

[104] Quelle clemence est ce dont je vous requiers ? Ce n'est pas de avoir clemence de vos ennemis ; c'est que vous ayez clemence de vostre povre peuple, qui sont vos enffans, en leur faisant ce que leur devez faire comme Roy. Ms. 5022, f. 15 v°.

[105] Lettres du 1er mai 1437, donnant à Poton de Saintrailles une somme de 4.200 livres pour l'aider au payement de sa rançon ; il avait reçu 1.000 livres le 22 avril précédent, et un peu avant, 4.000 écus d'or, en considération de son mariage (British Museum, Additional Charters, n° 380 ; Id., ibid., n° 4402 ; le P. Anselme, t. VII, p. 93). — Don de 1.000 livres à La Hire pour l'aider à payer sa rançon (ms. fr. 23202, à la date du 18 mars 1436). — Lettres du 4 mai 1437, portant don de 1.000 livres à Jean de Vendôme, vidame de Chartres (British Museum, ibid., n° 3805). — Lettres du 21 mars 1437, portant don de 140 écus à Jean Redolet, écuyer (Id., ibid., n° 425). — Lettres du 17 octobre 1438, portant don de 200 livres à Antoine de Cluys, écuyer d'écurie (Fontanieu, 117-118).

[106] Lettres du 27 février 1436 sollicitant le concile de Bâle d'appuyer la nomination de Guillaume Boutier, abbé de Sainte-Marie de Beaulieu, neveu de Bertrand du Guesclin, l'évêché de Saint-Malo. On y lit ce passage remarquable : Nam prædecessores et progenitors sui, signanter ille famosissimus strenuus miles Bertrandus Connestabulus tempore quo vivebat in humanis regni Franciæ, qui inimicos nostros extirpavit, et tanta bona in dicto regno nostro procuravit, quod perpetuis temporibus, ut ad memoriam redeant servitia sua ad recognitionem erga suos successores tenemus nos obligatos. Cujus Bertrandi dictus electus est proprius nepos.  D. Marlène, Amplissima collectio, t. VIII, col. 810.

[107] Lettres du 18 juillet 1435, portant don de la charge de sénéchal d'Agenais et de Gascogne à Beraud de Barbazan, en considération des services rendus par son oncle, le sire de Barbazan, et des siens propres. Histoire généalogique de la maison de Faudoaz, par de Fourny, p. 83.

[108] Voir lettres du 17 octobre 1437, en faveur des arbalétriers de Châlons (Histoire de Châlons sur Marne, par Ed. de Barthélemy, p. 65) ; lettres du 28 octobre en faveur de Hugues Arnault de Châteauverdun, seigneur de Sainte Canelle (Pièces originales, 700 : CHATEAUVERDUN) ; lettres du 12 décembre 1437, en faveur de Berengon d'Arpajon (Clairambault, 136, p. 2359) ; lettres du 2 janvier 1438, en faveur de Fouquet du Roure (Ms. fr. 6212, n° 308), etc.

[109] Hugues de Noé reçoit 400 moutons d'or d'une part, et 600 l. t. de l'autre par lettres des 7 juillet et 5 août 1435 ; il obtient, le 27 août 4436, la survivance de la capitainerie de Roquemaure pour son fils, et, le 16 janvier 1438, le Roi lui donne 1.000 livres à l'occasion du mariage d'une de ses filles (Pièces originales, 2130 : NOYER ; P. Anselme, t. VIII, p. 474 et 272). — Le 15 août 1436, Ambroise de Lord reçoit une maison à Paris ; le 24 novembre 1437, il obtient un don de 1,718 1. 15 s. t. en récompense de ses services (Pièces originales, 1746 : LORE) — Don de la châtellenie d'Oizens à Gaucourt, le 27 février 1435 (archives de l'Isère, B 3224, f. 232) ; autres dons par lettres des 16 mars 1436, 15 mai, 10 juin et 16 novembre 1438.

[110] 1435, 7 juillet : 4.000 écus d'or ; 8 septembre : 300 l. t. pour solde de 4.500 l. t. ; 25 octobre 250 l. t. ; 8 novembre : 3.000 l. — 1436, 26 janvier : 1.800 moutons d'or ; 12 mars : 3.000 l. t.  11 octobre : 4.000 l. t. par an, sa vie durant, etc. Ms. fr., 20382, f. 2 et 3 ; Clairambault, 1112, n° 52, 54, 55 ; Pièces originales, 2158 : ORLÉANS.

[111] Car faictes toutes les devocions que vouldrez, se vous mettez en negligence la charité que devez avoir à vostre peuple, comme ung homme qui dort, vous ne edifbez point, vous dormez. — L'en dit que vous estes devot et dictes vos heures et ouyés messes ; mais il semble que vous oubliés et mettez derrière vostre renommée, veu que vous ne faictes raison ne justice à vostre peuple. Ms. 5022, f. 6 et 15 v°.