HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE II. — LE ROI DE BOURGES - 1422-1435

 

CHAPITRE VII. — LA DIPLOMATIE DE CHARLES VII JUSQU'AU TRAITÉ D'ARRAS.

 

 

§ I. — DE 1422 À 1424.

Ambassade au roi de Castille : instructions données. — Relations avec la cour de Rome ; nouvelle intervention de Martin V en faveur de la paix. — Le duc de Savoie médiateur : il provoque une réunion des ambassadeurs de Charles VII et de ceux du duc de Bourgogne ; conférence de Bourg-en-Bresse ; préliminaires de paix. — Dispositions du duc de Bourgogne ; son Intimité avec le régent Bedford ; mariages projetés de Bedford et de Richemont avec deux sœurs du duc ; triple alliance d'Amiens entre les ducs de Bourgogne, de Bretagne et de Bedford ; adhésion du comte de Foix. — Le pape et le duc de Savoie échouent dans leur intervention. — Nouvelles démarches de Charles VII près de l'Écosse ; renouvellement des alliances ; promesse de secours ; rapprochement entre l'Angleterre et l'Écosse : le roi Jacques est mis en liberté et prend possession de son royaume. — Ambassade au duc de Milan ; traité d'Abbiate-Grasso. Relations entamées avec d'autres princes italiens. — Le Roi se décide à faire obédience à Martin V ; accueil empressé fait par le pape à ses ambassadeurs. Pourparlers entre l'empereur Sigismond et Charles VII : demande d'alliance adressée à l'empereur par le Roi ; discours d'Alain Chartier ; relations de Charles VII avec divers princes et seigneurs d'Allemagne. — État d'abaissement où se trouve la France au dehors ; elle commence à se relever.

 

Un des premiers soins de Charles VII, une fois parvenu au trône, fut de faire part de son avènement à ses anciens et fidèles alliés, et de renouveler les alliances contractées pendant sa régence. Nous avons des pouvoirs donnés ; au château de Mehun-sur-Yèvre, le 25 novembre 1422, à quatre ambassadeurs qui devaient se rendre à la cour de Castille[1]. Des instructions détaillées, signées de la main du Roi, furent délivrées le 28 novembre à trois d'entre eux[2].

Les ambassadeurs, après avoir remis les lettres de leur maître à Jean II et aux infants, et leur avoir notifié la mort de Charles VI, avaient mission de déclarer que le Roi, connaissant la bonne amour et les anciennes alliances qui avaient toujours existé entre les rois de France et de Castille, et les grandes aides que le roi dé Castille lui avait prêtées durant sa régence, lui offrait son royaume et sa seigneurie pour les employer à ce qui pourrait servir au bien du royaume et de la seigneurie du roi, et qu'il était prêt à renouveler les anciennes alliances existant entre les deux royaumes[3].

Lei ambassadeurs devaient faire connaître à Jean II l'intention où était le Roi, en la saison nouvelle, de se mettre sur les champs, à toute puissance, pour le recouvrement de ses terres et seigneuries occupées par les Anglais, communs adversaires et anciens ennemis de France et de Castille, et, pour cela, de faire appel à tous ses alliés, entre lesquels le roi de Castille était le premier et principal.

Ils avaient charge spécialement de solliciter un secours armé de dix galères, fretées et soudoyées pour toute la saison nouvelle, du mois d'août au mois de septembre, sous le commandement d'un notable chevalier rompu dans la pratique de la guerre, lequel recevrait commandement exprès de faire tout ce que le Roi lui ordonnerait. Des garanties seraient données pour le remboursement des dépenses occasionnées par l'armement des galères.

Les ambassadeurs devaient solliciter le roi de Castille d'écrire à certains seigneurs qu'ils lui désigneraient[4], pour leur faire savoir que les alliances ayant existé de tout temps entre les rois de France et de Castille étaient renouvelées, à son très grand plaisir, et que, en reconnaissance des services autrefois rendus à ses prédécesseurs par la France, son intention était d'aider le Roi, de tout son pouvoir, à chasser les Anglais du royaume ; que, par conséquent, il les priait de s'employer également de tout leur pouvoir, en acquittant la loyauté qu'ils devaient au Roi et à la couronne de France, à servir le Roi contre les Anglais, en leur notifiant que, s'ils se montrent amis, serviteurs ou bienveillants à son égard, lui, roi de Castille, les aimera, aidera et soutiendra, tandis que s'ils se déclarent hostiles, il les réputera pour ennemis et leur fera la guerre. Ces lettres devraient être remises par des hérauts savants hommes, lesquels rapporteraient réponse, et cette réponse serait transmise au Roi.

Les ambassadeurs avaient encore mission de sonder les conseillers du roi de Castille pour savoir si l'on serait disposé à tenter une attaque contre la Guyenne, attaque facile et dont le succès n'était pas douteux. On donnerait des garanties pour les premières dépenses de l'expédition, et au besoin on s'engagerait à abandonner au roi de Castille une partie de la conquête, à la condition qu'il la tînt du Roi ; enfin, pour aplanir toute difficulté, on irait jusqu'à offrir la totalité de la conquête, sous la même réserve.

Les ambassadeurs devaient exprimer au roi de Castille les regrets du Roi, relativement aux divisions qui s'étaient produites dans son royaume et parmi les princes du sang ; ils devaient s'employer, au besoin, à la délivrance de l'infant don Henri, et agir, soit près de l'infant don Jean, soit près de l'infant don Henri, après sa libération, afin de les rendre favorables à l'expédition projetée en Guyenne. Dans le cas où l'infant don Henri serait disposé à en prendre le commandement, ils devaient demander qu'on envoyât, en sa compagnie, mille ou tout au moins cinq ou six cents hommes d'armes, et deux mille hommes de trait.

Enfin, si l'on ne pouvait obtenir, à aucun titre, le concours demandé, on devait chercher à se procurer un contingent de troupes soldées, soit par le roi de Castille à l'égard duquel on prendrait des engagements pour la garantie du paiement, soit par le Roi, en promettant aux troupes auxiliaires une solde régulière pendant toute la durée de leur service, et ensuite de larges récompenses[5].

Quel fut le résultat de cette mission diplomatique ? Nous n'en apercevons aucun. Il y a même lieu de penser que les ambassadeurs de Charles VII ne se rendirent pas à la cour de Castille : nous possédons, en effet, d'autres instructions, en date du 28 mars 1426, où le Roi se fait excuser de n'avoir point envoyé vers le roi de Castille depuis la mort de son père[6]. Peut-être la situation embrouillée des affaires d'Espagne[7], qui mettait Jean II dans l'impuissance de venir au secours de la France, fit-elle renoncer à la démarche projetée ; peut-être la pénurie des finances empêcha-t-elle de s'imposer la dépense, toujours élevée, d'une ambassade aussi lointaine, à un moment où — nous le verrons tout-à-l'heure — on était dans l'obligation d'envoyer une solennelle ambassade en Savoie.

Les relations avec la Castille ne furent point pourtant complètement interrompues. En mars 1424, à la prière de Jean II, qui lui avait envoyé Sancho Esquerra, écuyer et garde du corps, Charles VII confirmait les privilèges des marchands castillans[8]. Au mois de juin suivant, l'archevêque de Tolède, don Juan Martinez de Contreras, ambassadeur de Jean II, était au château de Mehun-sur-Yèvre. Nous avons la minute d'une lettre que, par son intermédiaire, Charles VII adressa au roi de Castille (20 juin) ; il est question dans cette lettre, en même temps que de certaines matières exposées par l'archevêque et qui ne sont point énoncées, du fait de l'Église universelle et du saint concile général (alors assemblé à Pise), et des affaires du duc d'Anjou, roi de Sicile[9]. C'est sans doute à ce moment que furent rédigés des pouvoirs qui se trouvent dans plusieurs formulaires du temps, en vue d'une alliance entre le jeune Dauphin et la fille aînée du roi de Castille[10]. On ne parait pas avoir fait usage de ces pouvoirs.

 

Charles VII s'empressa de notifier au pape Martin V la nouvelle de la mort de son père. Si nous n'avons pas la lettre qu'il lui adressa à cette occasion, nous possédons la réponse du Souverain Pontife. Le Pape a été très affligé de la nouvelle ; il priera pour l'âme du Roi défunt ; il exhorte le Roi à montrer autant de piété à l'égard de son royaume qu'à l'égard de la mémoire de son père ; il l'engage à suivre les exemples de celui-ci, en témoignant à ses sujets la même bonté et la même humanité ; il lui exprime le désir de voir la paix se rétablir, et termine en lui recommandant la crainte de Dieu, le respect de son Église, enfin le maintien des libertés ecclésiastiques, si bien protégées par ses ancêtres[11]. Le Pape gardait, on le voit, une extrême réserve ; il laissait même percer un sentiment de défiance. Non qu'il fût disposé à favoriser le gouvernement de Henri VI, dont il avait alors à se plaindre[12] ; mais un incident, survenu récemment, lui avait causé un vif mécontentement : on avait fait publier sur le pont du Rhône, près d'Avignon, et en d'autres lieux, les ordonnances rendues en mars-avril 1418, avec injonction d'y obéir sous certaines pénalités[13]. C'était réveiller chez le Pape de fâcheux souvenirs : car on lui avait fait espérer la révocation prochaine de.ces édits attentatoires à la liberté de l'Église, et il avait d'autant plus lieu de se plaindre que, dès le mois de septembre 1418, le gouvernement de Charles VI, dirigé par le duc de Bourgogne, s'était empressé d'abroger les deux ordonnances[14].

Nous avons une lettre qui parait avoir été écrite au mois de septembre 1422, et dans laquelle Martin V adresse, à cet égard, au Dauphin les reproches les plus vifs : il ne peut croire à une telle désobéissance, à une semblable rébellion envers l'Église ; le fait est sans doute imputable à la malice de certaines gens qui ont vu repousser des demandes indûment présentées par eux à la Chambre apostolique ; mais le Dauphin n'en est pas moins responsable, et il est sans excuse. Le Pape l'exhorte donc à lui donner prompte satisfaction : il lui envoie dans ce but Nicolas de Mercatello, clerc de la chambre apostolique[15].

Dans une autre lettre, datée du X des Calendes de novembre (23 octobre), le Pape revient à la charge : il insiste vivement pour la révocation d'un édit indigne du caractère et de l'honneur du prince ; il l'invite à suivre les traces des rois très chrétiens ses ancêtres, de façon à ne point se montrer le premier oppresseur des libertés ecclésiastiques, mais à être au contraire leur conservateur et leur défenseur ; il charge Jean Trocon, doyen de Beauvais et procureur du Dauphin en cour de Rome, de l'entretenir à ce sujet[16].

Sur ces entrefaites, le Pape avait reçu du Dauphin une lettre où il exprimait son étonnement de ce que, malgré ses instances, un de ses conseillers, Denis du Moulin, élu au siège de Toulouse, n'eût point encore obtenu sa nomination. Martin V avait aussitôt repris la plume pour faire savoir au Dauphin qu'il était au moment de donner une solution à cette affaire quand il avait appris la publication faite au pont d'Avignon, et, à ce que l'on-disait, d'après le conseil de Denis du Moulin ; qu'il avait alors différé la nomination, et qu'il entendait laisser la chose en suspens jusqu'à plus ample information[17].

Le Pape écrivit également, à ce sujet, aux conseillers du Dauphin[18] et à l'évêque de Bologne[19], et cet incident ne fut peut-être pas étranger à l'envoi d'un nouveau légat, chargé officiellement de travailler à la pacification du royaume.

Martin V n'avait pas abandonné ses desseins de conciliation. Dans une lettre au Conseil d'Angleterre, écrite à l'occasion de la mort de Henri V, il n'avait pas manqué d'exhorter vivement le Conseil à conclure la paix avec le Dauphin[20]. Il avait écrit en même temps au duc de Bedford, pour le rendre favorable à la mission de l'évêque de Bologne[21], et au duc de Savoie, pour le presser de nouveau de s'employer, de concert avec le légat, à une pacification qui était l'un des plus ardents désirs de son cœur, et dont la mort du roi d'Angleterre lui semblait devoir faciliter la conclusion[22]. Mais l'évêque de Bologne n'ayant obtenu jusque là aucun résultat, le Pape jugea qu'une situation nouvelle réclamait le concours d'un homme nouveau. Sans rappeler expressément et immédiatement Nicolas Albergati, il désigna, comme légat en France, Louis, évêque de Porto[23], lequel n'était autre que le duc de Bar, cardinal du titre des douze apôtres. Le zèle du Souverain Pontife était si grand qu'il écrivit de nouveau au duc de Savoie. Dans une lettré où il le comblait d'éloges, il l'exhortait à s'employer activement aux négociations, et à les poursuivre jusqu'à ce qu'elles vinssent à une heureuse conclusion. Si, ajoutait-il, il avait envoyé dans ce but en France l'évêque de Porto, ce n'était ni pour entraver ses efforts, ni pour lui enlever la gloire du succès, mais seulement pour lui offrir un solide point d'appui[24].

Le Pape écrivit aussi à Charles VII pour lui faire part de la mission donnée à l'évêque de Porto, et des motifs du rappel de l'évêque de Bologne[25]. On a plusieurs lettres de Martin V à celui-ci, pour l'informer de la fin de sa mission et de la nomination d'un nouveau légat. La première[26] a le caractère d'une révocation ; mais, dans les suivantes, le Pape autorise Nicolas Albergati à rester en France, et lui enjoint d'associer ses efforts à ceux de l'évêque de Porto[27]. Les pouvoirs donnés au cardinal portent la date du VII des Calendes de décembre (25 novembre)[28]. Le Pape écrivit aussi, en faveur de la paix, au duc de Bourgogne[29], et un peu plus tard au duc de Bretagne[30].

Le cardinal de Bar, nous l'avons dit, n'avait pas seulement mission de travailler à la pacification générale ; il devait aussi s'efforcer d'assurer la liberté de l'Église, à laquelle les ordonnances de 1418 avaient porté atteinte[31].

Cette question préoccupait vivement le Pape qui, au moment où le nouveau légat allait partir, écrivit de nouveau à Charles VII. Dans cette lettre, assez développée, et dont les termes sont plus mesurés, le. Pape déclarait que, de tout temps, et conformément à ce que lui avaient encore affirmé, au nom du Prince, ses ambassadeurs l'évêque de Léon et Nicolas Gehe, archidiacre de Bayeux, il avait cru à son dévouement envers le Saint-Siège et à son obéissance filiale, en même temps qu'à son intention bien arrêtée de révoquer les édits qui étaient en opposition avec ces sentiments. Le Roi lui-même ne l'avait-il pas expressément déclaré dans une lettre, écrite de sa propre main, où il affirmait que le Pape ne devait point douter de ses sentiments de filiale obéissance ? Il s'étonnait donc de voir apporter un si long délai à rendre à l'Église romaine ses' droits et sa liberté dans le royaume, et il priait instamment le Roi de prouver enfin sa bonne volonté par des actes, en abolissant toutes les ordonnances portant atteinte aux libertés ecclésiastiques[32].

En même temps qu'au Roi, Martin V écrivit à plusieurs de ses conseillers : à Jean d'Harcourt, comte d'Aumale[33], au duc d'Alençon[34], à Tanguy du Chastel[35], et enfin à un conseiller de la reine de Sicile[36], pour les faire entrer dans ses vues et requérir leur intervention. Il engagea aussi l'évêque de Bologne à faire une démarche auprès du Roi[37]. Ayant reçu par Louis de Maurinis, son envoyé à la cour de France, l'assurance des dispositions favorables du Roi et de son dévouement filial envers le Souverain Pontife et l'Église romaine, il renvoya le même messager, porteur d'une lettre où il déclarait s'en remettre au Roi pour l'heureuse solution de l'affaire en litige[38]. Sur ces entrefaites, l'évêque de Bologne ayant transmis des renseignements favorables sur Denis du Moulin, le Pape lui donna l'investiture canonique par mie bulle du XIV des calendes d'avril (19 mars 1423), et en avisa aussitôt l'évêque de Bologne[39] et le chancelier Martin Gouge[40]. Il ne négligea pas, cependant, de poursuivre avec persévérance la solution désirée, s'adressant pour cela tour à tour à la reine de Sicile, qu'il félicitait en même temps de son installation à la Cour[41], à la Reine[42], au chancelier[43], au confesseur du Roi, Gérard Machet[44], et jusqu'à son médecin, Jean Cadart[45]. La naissance du Dauphin, au sujet de laquelle il envoya au Roi ses félicitations[46], lui fournit encore l'occasion de revenir à la charge, dans une lettre à la reine de Sicile[47].

Nous verrons plus loin quel fut le résultat de ces efforts du Pape relativement aux libertés ecclésiastiques. Il faut en ce moment concentrer notre attention sur l'intervention d'Amédée VIII en faveur de la paix, avec l'appui de Nicolas Albergati et du nouveau légat[48].

Nul, mieux que le duc de Savoie, n'était préparé à remplir cette tâche. Il appartenait à une maison alliée depuis longtemps à la Couronne, et le duc de Bourgogne était son propre neveu[49]. Nous l'avons vu, en mai 1418, mêlé aux négociations du monastère de La Tombe, entre la Cour et Jean sans peur[50] ; et au commencement de 1422, pour répondre à un secret désir du roi d'Angleterre, il avait, d'accord avec le duc de Bourgogne, envoyé des ambassadeurs en France pour offrir sa médiation[51]. Mais il avait bien vite reconnu que les exigences de Henri V rendaient cette tentative illusoire[52]. Persuadé, comme le Pape, que la mort du roi d'Angleterre et l'avènement de Charles VII offraient une occasion favorable pour reprendre l'œuvre de pacification, Amédée ne perdit pas un moment pour agir. Des messages furent envoyés à Charles VII et au duc de Bourgogne, pour les inviter à se faire représenter à une conférence que le duc de Savoie se proposait de tenir à Bourg-en-Bresse[53].

Dès qu'il eut reçu les ouvertures du duc de Savoie, Charles VII s'occupa de l'envoi d'une notable ambassade. Nous savons par des documents du temps que le chancelier Martin Gouge partit de Bourges le 29 novembre 1422 pour remplir cette mission[54]. Il était accompagné de Hugues de Chalon, comte de Tonnerre, de Guy de Pesteil, conseiller et chambellan, de Jean Tudert, de Gérard Blanchet, de Jean de Montmorin, de Denis du Moulin, de Jean, abbé de Montieramey, et de Henri Loppier, ces six derniers conseillers et maîtres des requêtes de l'hôtel[55].

Le duc de Bourgogne ne montra pas autant d'empressement : les ambassadeurs français durent attendre longtemps à Lyon la venue de ses envoyés[56]. Nicolas Rolin, chancelier du duc, chef de l'ambassade, avait, en compagnie d'Amé Macet, ambassadeur du duc de Savoie, visité sur son passage les villes de Laon, Reims, Châlons et Troyes, partout fêté par les habitants. De Troyes, il avait écrit au seigneur de Saint-Georges et à Jacques de Courtiamble, désignés pour l'accompagner, de venir le trouver à Dijon, et il s'avançait tranquillement, quand un chevaucheur du duc de Savoie, dépêché en toute hâte, le joignit à Châtillon-sur-Seine. Le duc lui faisait dire qu'il était bien émerveillé de sa longue demeure. Le chancelier et ses deux compagnons ne se hâtèrent pas pour cela : on les voit passer par Montbard, où ils rendent visite à leurs femmes[57], et séjourner à Dijon. Enfin, deux jours après son arrivée dans cette ville, Nicolas Rolin dépêcha au duc trois ambassadeurs, qui arrivèrent à Bourg le 23 décembre 1422[58].

Les trois ambassadeurs s'excusèrent d'abord, au nom de leur maître, du long délai qu'il avait mis à répondre à la requête présentée par l'envoyé du duc de Savoie[59]. Ils déclarèrent avoir mission d'entendre ce qu'il plairait au duc de leur dire, afin de le rapporter à leur maitre. Plein de confiance envers son oncle, auquel il était toujours désireux de complaire ; persuadé que le duc de Savoie sauvegarderait son honneur, contre lequel il ne voulait rien faire, pour chose qui lui pût advenir, le duc de Bourgogne avait autorisé ses ambassadeurs à communiquer les copies des traités, promesses et serments faits, soit entre le roi d'Angleterre et le duc de Bourgogne, soit entre le roi de France, le roi d'Angleterre et le duc, afin d'aviser-à ce que, son honneur étant sauf, Amédée VIII pouvait faire en cette matière. Les ambassadeurs firent ensuite allusion à l'événement de Montereau, et à certaine submission du duc, qui devait être tenue secrète[60]. Enfin, ils demandèrent que le, duc de Savoie intervint pour faire cesser la guerre dans les pays de Mâconnais, Charolais et Bourgogne, et aussi dans le Nivernais et le Donziois.

Le duc de Savoie, ayant pris connaissance des traités, dit aux ambassadeurs bourguignons que les matières étaient grandes ; que les gens du Dauphin, qu'il avait fait venir, étaient à Lyon depuis cinq semaines, attendant leur arrivée, et que son premier devoir était de les entendre. Il exprima le désir que le chancelier Rolin et les autres fondés de pouvoir du duc se rendissent près de lui le dimanche 3 janvier[61].

Les ambassadeurs bourguignons, au nombre de six, ayant le chancelier à leur tête, arrivèrent à Bourg, non le 3, mais le 7 janvier[62]. Les ambassadeurs français y étaient depuis la veille. La conférence devait se prolonger jusqu'au 22 janvier.

Le duc de Savoie, en recevant les ambassadeurs du duc Philippe, leur lit connaître les intentions pacifiques de Charles VII. Le Dauphin voulait et requerrait paix avec le duc de Bourgogne, et il était prêt à s'en tenir à ce que le duc de Savoie voudrait ordonner[63].

A cette déclaration, les ambassadeurs opposèrent aussitôt, en guise de fin de non recevoir, les considérations déjà présentées : la volonté de leur maître de maintenir son honneur intact ; les traités qui le liaient à l'égard des Anglais. C'était au duc de Savoie à aviser aux voies et moyens d'entamer les négociations en gardant l'honneur du duc, et sans qu'on pût dire qu'il ait enfreint ses serments et ses promesses, car pour rien il ne le voudrait faire.

Le duc de Savoie prit quelques jours de réflexion. Il consulta son conseil à plusieurs reprises ; puis il convoqua de nouveau les ambassadeurs bourguignons. Il me semble, leur dit-il, que, pour sauvegarder l'honneur du duc de Bourgogne et pour le bien de toute chrétienté, on doit tendre à une paix générale, tant avec les Anglais qu'avec le duc de Bourgogne.  Le Dauphin doit s'y prêter et faire des offres raisonnables à toutes les parties. Par cette manière, la chose sera très raisonnable et honorable à entamer, et elle se conduira très bien. Et le duc ajouta : J'en ai entretenu le chancelier et les autres gens du Dauphin, auxquels cette voie a semblé bonne. Mais ils n'ont pas charge de l'accepter sans en référer à leur maître ; ils se font fort, d'ailleurs, d'obtenir son assentiment.

Les ambassadeurs bourguignons répondirent au duc de Savoie que cette voie leur semblait bonne, pourvu qu'elle plût à leur maître et aux autres intéressés ; qu'ils feraient, à ce sujet, leur rapport au duc ; qu'il leur semblait en outre que, continuant ce qu'il avait commencé du vivant du feu roi d'Angleterre, le duc de Savoie ferait bien d'envoyer une notable ambassade au duc de Bedford.

Le duc de Savoie répondit qu'il était bien décidé à ne point envoyer une pareille ambassade ; se souvenant de la réponse qu'il avait reçue du feu roi ; que, d'ailleurs, cela entraînerait de longs délais ; mais que le duc de Bourgogne pouvait, si bon lui semblait, mettre le duc de Bedford au courant des négociations[64].

Abordant la question particulière au duc de Bourgogne, Amédée pressa les ambassadeurs de lui déclarer quelles seraient, à l'égard du Dauphin, les exigences du duc relativement à la mort de son père.

Les ambassadeurs répondirent qu'ils n'avaient aucuns pouvoirs à ce sujet ; que les choses n'étaient point assez avancées pour que l'on pût ni dût présentement faire de semblables déclarations ; que, d'ailleurs, quand on y viendrait, c'était à la partie adverse qu'il appartenait de faire des offres raisonnables et dont leur maître pût être content. Ils ajoutèrent, d'une façon péremptoire, qu'ils ne procéderaient pas plus avant sans en référer au duc.

Le duc de Savoie se montra très indigné et courroucé de cette réponse : Je sais bien, dit-il, que mon neveu a confiance en moi. Je veux garder son honneur, et vous pouvez vous en rapporter à moi. Je sais et je reconnais que, pour le moment, on ne peut arriver à une conclusion ; mais je tiens au moins à ouvrir et arguer la matière, en ce qui concerne mon neveu et la partie adverse, et à connaître les dispositions de chacun, le plus avant que je pourrai, afin d'y mettre plus aisément bonne conclusion en temps et lieu.

Les ambassadeurs répétèrent qu'ils n'avaient point d'instructions à cet égard ; qu'ils étaient assurés que leur maitre ne voudrait entendre à aucun traité ni souscrire à aucune déclaration, sinon quand il pourrait le faire conformément à l'honneur, en gardant son serment et ses promesses ; que, d'ailleurs, en présence de la proposition faite par le duc de tendre à une paix générale, il convenait d'attendre l'assemblée où toutes les parties seraient représentées et où chacun ferait connaître son sentiment.

Mais le duc de Savoie n'admit pas cette fin de non-recevoir. Il insista pour avoir sur ce point l'avis personnel des ambassadeurs : il voulait savoir ce qu'ils en pensaient et prendre leurs conseils, car ils en savaient plus long que ses propres conseillers ; il serait plus à même, après les avoir entendus, de sonder les dispositions de la partie adverse, en agissant comme de lui-même et sans dire que les propositions eussent été formulées par eux.

Poussés ainsi dans leurs derniers retranchements, les ambassadeurs se concertèrent, et finalement, pour complaire au duc, et tout en répétant qu'ils n'avaient sur cette matière aucunes instructions, ils se décidèrent à exposer, sous toutes réserves et en leur propre nom, ce qu'il leur semblait, de prime abord, que le Dauphin devait offrir au duc de Bourgogne, relativement à la mort de son père, quand on en viendrait à traiter de la paix générale. Ici nous citons textuellement, car nous avons là en quelque sorte la clé des négociations qui devaient se poursuivre pendant plus de douze années.

I. C'est assavoir premièrement que le Daulphin die ou face dire à Madame la mère de Monseigneur, à Monseigneur et à Madame et demoiselles ses seurs, paroles telles que avisées seront par mon dit seigneur de Savoye, touchant le dit cas, soit de crier mercy, de demander pardon ou autres.

II. Item, qu'il mette hors de son service et de tous estaz et honnours, à tousjours, et baille et delivre es mains de Monseigneur tous les faiseurs, consenteurs et coulpables du dit cas qui sont et seront le temps advenir en sa puissance, pour en faire raison et justice, etc.

III. Item, que icellui Daulphin s'oblige et jure de faire tout son povoir et devoir de faire prendre tous les diz coulpables, quelque part qu'ilz pourront estre trouvez, pour les bailler à Monseigneur, comme dessus, et que ceulx qui ne pourront estre apprehendez soient banniz du Royaume et Daulphiné.

IV. Item, et que tous les diz coulpables soient hors de tous traictiez, sans y estre en riens comprins, et sans ce que jamais aucune grace leur puisse estre faicte du dit cas par le dit Daulphin ne autre.

V. Item, et que le dit Daulphin ne souffre aucun des diz coulpables estre recepiez ne favorisez en aucun lieu de son obeissance et puissance, ainçois procedera contre ceulx qui les vouldroient recepter ou favoriser tout ainsi comme contre les coulpables.

VI. Item, et que au lieu de Monstereau soient faictes par le dit Daulphin et à ses despens fondacions perpetuelles d'eglises, etc., pour l'ame de feu Monseigneur, dont Monseigneur et ses successeurs seront patrons et collateurs, etc.

VII. Item, et que pour les dictes fondacions faire, soit baillée la ville et chastel de Monstereau et toute la chastellenie, ensemble toutes les revenues, et. le surplus soit prins au plus près, jusques à telle somme de rente par an qu'il sera avisé, et que, pour ediffier les dictes eglises et les garnir, etc., le dit Daulphin mette en depost realment et de fait, es mains de mon dit seigneur de Savoye, telle, somme d'or et d'argent qui sera avisé.

VIII. Item, et que le dit Daulphin fonde perpetuellement en chascune des eglises cathedrales de ce royaume, un obit et anniversaire pour rame de feu Monseigneur.

IX. Item, qu'il rende et restitue à Monseigneur tous les biens meubles, c'est assavoir joyaulx, vaisselle d'or et d'argent, robes, chevaulx et autres choses que feu Monseigneur avoit fait porter à Monstereau et qui y furent prins et perdus, en l'extimacion de IIe mil escuz d'or.

X. Item, et qu'il rende aussi et restitue à tous ceulx qui estoient en la compaignie de feu Monseigneur au dit lieu de Monstereau, qui ont tenu et tiennent son party, les biens qu'ils y perdirent.

XI. Item, et qu'il face recompenser tous les prisonniers qui furent prins au dit lieu de Monstereau, le jour de la mort de feu Monseigneur, de leurs raençons, pertes et dommaiges, etc.

XII. Item, qu'il mette à plaine delivrance, franchement et quictement, messire Charles de Lens, que l'on dit estre vivant.

XIII. Item, qu'il restitue pleinement à Monseigneur ses pontez d'Estampes et de Giem.

XIV. Item, qu'il face asseoir à Madame de Guienne son douaire et l'en face joyr, et lui rende la moitié des biens meubles de feu Monseigneur de Guienne.

XV. Item, et que, pour les grans fraiz et despens faiz par Monseigneur ou fait de la guerre et autrement à l'occasion du dit cas, et pour amende prouffitable, soient baillées à mon dit seigneur, par le dit Daulphin, terres et seigneuries à perpetuité, pour lui et ses successeurs, contigues à ses pays, et autres amendes et reparacions jusques à telles sommes [si] avant qu'il sera avisé.

XVI. Item, et que Monseigneur et ses successeurs et tous ses subjez soient et demeurent exemps et non subgez du dit Daulphin et de la couronne de France, en cas qu'il y parvendra par traictié ou autrement, tant au regart de leurs personnes comme de leurs terres et biens durant la vie du dit Daulphin, sans ce qu'ilz soient tenuz d'en fere au dit Daulphin, ne à autre de par lui, sa vie durant, aucun hommaige ou service, ne estre de rien ses subgets en ressort, souveraineté ne autrement.

XVII. Item, doit l'en avoir regart à l'interest de Madame la mère de Monseigneur, Item à l'interest de Madame et Mesdemoiselles ses filles, et semble que pour leur interest le dit Daulphin devroit bailler grans sommes d'or pour leur mariage.

XVIII. Item, et aussi à l'interest des parens et amis de feu Monseigneur de Novailles, et que fondacions soient faictes pour son ame, etc.

XIX. Item, et au surplus, abolicion generale, excepté au regard des diz coulpables, etc, en y comprenant les bonnes villes, les nobles, et tous ceux qui ont tenu le party de Monseigneur, et qu'ils aient leurs diz heritages tant au Royaume que au Daulphiné.

XX. Item et que, pour la seurté de la chose, mon dit seigneur de Savoye preigne le gouvernement de la personne du dit Daulphin, et que de la part du dit Daulphin soient baillez hostaiges, si mestier est, et toutes autres seurtez qui seront avisées, etc.[65].

 

Le duc de Savoie eut, relativement à toutes ces propositions, qu'il présenta comme venant de lui, de longs pourparlers avec le chancelier de France et avec les autres ambassadeurs de Charles VII[66]. De ces pourparlers résulta pour lui la conviction, dont il fit part aux envoyés du duc de Bourgogne, que les points en question ne soulèveraient pas de sérieuses difficultés, et que, sur toutes choses, on s'en rapporterait à son ordonnance[67].

Justement satisfait de cet important résultat, le duc de Savoie ne crut pas opportun de pousser plus loin les choses[68]. Il se contenta, par un acte portant la date du 20 janvier, de fixer le point de départ des négociations futures. Voici l'analyse de ce document, qui débute de la sorte :

En la matière de la paix qui se fera à l'aide de Nostre Seigneur, laquelle très hault et très puissant prince monseigneur le duc de Savoye a de pieça poursuie... a esté aujourd'huy, XXe jour du mois de janvier, l'an de la nativité Nostre-Seigneur courant M CCCC XXIII, advisié et ordonné par mon dit seigneur le duc de Savoye en la manière qui s'ensuit.

I. Les parties principales, en propres personnes, se trouveront l'une à Lyon, l'autre à Chalon-sur-Saône, le 12 avril 1423, accompagnées chacune de prélats, barons et autres gens notables du Conseil, en nombre suffisant pour traiter de la paix. Le duc de Bedford, auquel le duc de Savoie en écrira, se rendra à Chalon, s'il lui plaît, avec le duc de Bourgogne, ou s'y fera représenter.

II. Pour favoriser les négociations, le duc de Savoie a ordonné et ordonne que toute guerre et voies de faits cesseront, dans le duché de Bourgogne, les comtés de Bourgogne et de Charolais, à Mâcon et dans le Mâconnais, et à Charlieu, depuis le dimanche suivant (24 janvier) jusqu'au 15 février, et de là jusqu'à quinze jours entiers après la journée ordonnée. Aucune offense ne sera faite par les gens de guerre de l'un ou de l'autre parti aux villes occupées par chacun, telles que Tournus, d'un côté, et Mâcon, de l'autre. Le duc sera chargé de la réparation des attentats à la trêve.

III. Les garnisons établies à Mâcon, Charlieu et Tournus évacueront ces places avant le 15 février ; le duc de Savoie les fera occuper par ses gens comme bon lui semblera, et les habitants prêteront serment d'obéir à lui et à ses représentants pendant le temps sus-indiqué. Les garnisons du Mâconnais se retireront également, ne laissant que le contingent nécessaire pour la garde des places.

IV. Le duc de Savoie sera tenu, si la paix ne se fait pas dans le temps fixé, de se démettre aussitôt du gouvernement des villes de Mâcon, Charlieu et Tournus, et ces villes rentreront sous l'obéissance de leur seigneur actuel ; si la paix se fait, elles reviendront à celui à qui elles doivent appartenir.

V. Les terres de Nivernais, de Donziois, et autres appartenant à la comtesse de Nevers et à ses enfants, seront comprises dans la trêve, et les gens de la comtesse ne donneront, durant la trêve, aucun empêchement au pays de Berry et aux autres sujets de la partie adverse.

VI. Chacune des parties ordonnera à ses gens de guerre d'observer la trêve sans fraude, barat ou mal engin[69].

On a pu remarquer le mot partie adverse. C'est le seul qui soit employé dans l'acte pour désigner Charles VII et son gouvernement. Le duc de Savoie n'osait point, en face des ambassadeurs bourguignons, reconnaître pour Roi celui que le traité de Troyes avait exclu de la couronne, et que les envoyés du duc Philippe appelaient toujours le Dauphin. Ceci indique à quel point le prince médiateur poussait les ménagements, et combien il craignait de blesser les susceptibilités de son neveu.

Les ambassadeurs bourguignons ne crurent pas cependant pouvoir accepter, dans tous ses termes, la convention préliminaire du 20 janvier. Ils dirent au duc qu'ils n'avaient point d'instructions à ce sujet, et qu'ils ne pensaient pas que, à cause de ses occupations et de l'état de sa santé, leur maitre prit se rendre en personne au rendez-vous assigné. Sur l'observation d'Amédée VIII qu'il était pourtant nécessaire que le duc de Bourgogne s'y trouvât en personne, ils se contentèrent, pour lui complaire, de promettre qu'ils s'emploieraient, à leur loyal pouvoir et devoir, à l'y décider. Le duc consentit, sur leur demande, à proroger du 12 avril au 1er mai le terme fixé, si le duc de Bourgogne le désirait, moyennant qu'on l'en avisât avant le 15 mars. La stipulation relative à la suspension des hostilités ne souleva pas de difficultés ; mais les ambassadeurs déclarèrent qu'ils voulaient avoir affaire au duc seul, et non point à Charles VII, avec lequel ils n'entendaient prendre quelque convenance que ce fût. Ils continuèrent d'ailleurs à tenir soigneusement les envoyés du Roi à distance, malgré toutes les avances que ceux-ci purent faire pour entrer avec eux en relations personnelles[70].

Nous sommes partis bien contents de lui et lui de nous, écrivait le chancelier Rolin à son maître en prenant congé du duc de Savoie[71]. Mais si les ambassadeurs bourguignons avaient lieu d'être satisfaits du résultat des conférences de Bourg, il n'en fut pas de même pour Amédée VIII. Ce prince ne tarda pas à s'apercevoir qu'il avait travaillé en pure perte. Les sacrifices imposés aux ambassadeurs de Charles VII, et auxquels ceux-ci s'étaient résignés dans leur sincère et patriotique désir de paix, ne devaient point toucher l'aine froide et intéressée du duc de Bourgogne : malgré le pas considérable qu'Amédée avait fait faire à la question, en ce qui concernait le Roi, il ne devait obtenir de son neveu aucune satisfaction.

Ce n'est point que le chancelier et les autres ambassadeurs bourguignons ne fussent acquis aux idées conciliatrices du duc, et qu'ils ne sollicitassent leur maître de répondre à ses avances[72]. Mais Philippe était trop avant dans l'intimité de Bedford, trop inféodé à la politique anglaise pour prêter l'oreille aux avis de ses meilleurs conseillers.

 

En quittant la vie, dans l'ivresse d'une conquête inespérée, Henri V avait laissé l'héritage du pouvoir et la poursuite de ses desseins à son frère le duc de Bedford. Jehan, beau frère, avait-il dit sur son lit de mort, je vous prie sur toute la loyauté que vous avez eu à moy, que vous soyez tousjours bon et loyal à beau filz Henry vostre nepveu, et vous charge, sur tant que vous pouvez mesprendre, que, tant que vous vivrez, ne souffrirez à faire traicté avec nostre adversaire Charles de Valois, ne autre, pour chose qui vous advienne, que la Normandie ne nous demeure, franchement. Et en cas que beau frère de Bourgogne voudra emprendre le gouverment de ce royaume, je vous conseille que vous lui baillez ; mais, s'il le refuse, si l'entreprenez[73]. Le troisième des frères du feu roi d'Angleterre[74] était âgé de trente-deux ans[75]. Il avait fait de bonne heure son apprentissage comme gouverneur de Berwick et garde des marches d'Écosse ; à plusieurs reprises, et du vivant même du duc de Clarence (1415, 1417, 1421), il avait été désigné par le Roi comme lieutenant pendant son absence. Il s'était révélé à la fois comme habile capitaine, comme bon administrateur, surtout comme diplomate plein de finesse. Héritier du tempérament des Lancastre, il marchait à son but sans se soucier des obstacles, conciliant quand il le jugeait utile à ses vues, inflexible jusqu'à la cruauté quand la nécessité l'y poussait. Sans être plus scrupuleux que son frère, il était moins violent, et s'il n'avait pas sa grâce chevaleresque, il rachetait par l'habileté ce qui lui manquait en prestige. Il était donc merveilleusement doué pour tirer parti de la conquête que lui léguait Henri, et se montra dès le premier jour à la hauteur de la situation[76].

Le feu roi d'Angleterre savait de quel prix était pour lui l'amitié du duc de Bourgogne. Si c'était grâce à la connivence de Jean sans peur que les Anglais avaient pu s'établir en France, c'était par une entente cordiale avec Philippe qu'ils pouvaient s'y maintenir. Je vous prie tant comme je puis à tous, avait dit encore Henri V avant de mourir, que vous gardez, sur tant que vous pouvez mesprendre, que vous n'ayez quelque dissention avec beau frère de Bourgogne, et ce defendez expressement à beau frère Humfroy ; car s'il advevoitque Dieu ne veuille !qu'il eust entre vous aucune malveillance, les besognes de ce royaume, qui sont moult avancées de nostre partie, en pourroient grandement empirer[77]. Puis, appelant Hugues de Lannoy, l'ambassadeur du duc Philippe : Lannoy, dit-il, je recommande à beau frère de Bourgogne le fait du royaume de France et de mon fils, comme à celuy du monde qui plus lui peut porter avancement ou grief[78].

Aussitôt après la mort du roi d'Angleterre (31 août 1422), le duc de Bourgogne, qui venait lui-même de perdre sa femme, Michelle de France, sœur de Charles VII[79], vint trouver Bedford au château de Vincennes. Celui-ci lui offrit le gouvernement du royaume, et ce n'est que sur le refus réitéré de Philippe que Bedford prit la régence[80]. Les deux princes résolurent de resserrer les liens qui les unissaient, et de rattacher étroitement le duc de Bretagne à leur cause. On ouvrit les négociations en vue d'un double mariage : celui du duc de Bedford avec Anne de Bourgogne, sœur de Philippe ; celui d'Arthur de Bretagne, comte de Richemont, avec une autre de ses sœurs, Marguerite, veuve du duc de Guyenne. Les ambassadeurs bretons envoyés par Jean VI à Henri V, et qui étaient restés à Paris, jurèrent, le 8 octobre, au nom de leur maître, d'observer. le traité de Troyes[81]. Dans ce même mois, une ambassade bourguignonne, à la tête de laquelle était Hugues de Lannoy, quitta Lille pour se rendre près de Bedford[82]. Comme il avait représenté son maître au lit de mort de Henri V, Lannoy le représenta aux obsèques de Charles VI, accomplies le 10 novembre. Les Parisiens furent indignés de l'absence du premier prince du sang, et l'accusèrent d'avoir abandonné le Roi après sa mort comme il l'avait abandonné pendant qu'il était en vie[83]. Le comte de Richemont secondait activement le régent anglais auprès du duc son frère, qui était vivement sollicité de se rendre à Paris pour y jurer en personne le traité de Troyes. Les négociations se poursuivaient, d'ailleurs[84], et une déclaration des États de Bretagne en faveur de l'alliance bourguignonne vint singulièrement faciliter la tâche des négociateurs[85]. En même temps, les arrangements relatifs au mariage du duc de Bedford avec Anne de Bourgogne furent rendus définitifs par la signature du régent anglais, donnée à Vernon le 12 décembre[86].

Telle était la situation au moment où les ambassadeurs du duc de Bourgogne s'acheminaient, avec une lenteur calculée, vers la cour de Savoie. Le rapport qu'ils adressèrent à leur maître ne le trouva pas disposé à accueillir les ouvertures d'Amédée VIII. Loin de songer à se rapprocher de Charles VII, le duc venait d'envoyer une circulaire à toutes les villes tenant le parti bourguignon (14 janvier 1423), pour les mettre en garde contre les agissements du Dauphin, et leur annoncer qu'il allait se rendre près du duc de Bedford, afin de travailler, de concert avec lui, à pacifier le royaume et à repousser les ennemis[87]. Au lieu de se montrer, favorable à la réunion projetée de Chalon, le duc se préparait à tenir une conférence, à la même époque, à Amiens, et les princes qui devaient y prendre part étaient précisément les plus mortels adversaires de Charles VII. Le 25 février 1423, la chancellerie bourguignonne délivrait un sauf-conduit au duc de Bretagne[88]. Déjà ce prince avait reçu d'autres lettres du même genre données par le régent Bedford, à la date du 12[89], et il venait d'envoyer au Parlement de Paris des ambassadeurs pour leur faire connaître ses intentions favorables à l'alliance anglaise[90]. C'était entre le duc Philippe et Bedford, un perpétuel échange d'ambassades[91] ; à la date du 18 mars, le régent anglais, alors à Rouen, donna pouvoir de s'engager en son nom à prendre Anne de Bourgogne pour femme[92]. Craignant que le duc de Bretagne ne se fit attendre, Philippe lui dépêcha le 6 avril un de ses écuyers[93]. Lui-même quitta Arras le 11 pour se rendre à Amiens[94], où trois jours après fut signé le contrat de mariage du comte de Richemont et de madame de Guyenne[95]. Le 17 avril, un traité d'alliance et de confédération était conclu entre les ducs de Bourgogne, de Bretagne et de Bedford[96]. Au traité d'Amiens, il faut joindre une alliance particulière entre Jean VI et Bedford[97], et un acte secret du 18 avril par lequel Philippe et Jean VI déclaraient que, si l'un ou l'autre se réconciliait avec Charles, dauphin de Viennois, et traitait avec lui, ils n'entendaient point pour cela déroger aux alliances et confédérations stipulées entre eux[98]. C'était là la seule porte que le duc de Bourgogne laissât ouverte, dans l'avenir, du côté de la France.

La triple alliance d'Amiens ne se bornait pas aux trois ducs : elle s'étendait à un puissant seigneur du midi qui, à l'exemple du duc de Bretagne, avait successivement passé d'un parti à l'autre. Le comte de Foix s'était fait représenter à Amiens. Dès l'année précédente (3 mars 1422) ses ambassadeurs avaient juré en son nom, à Paris, l'observation du traité de Troyes, et promis d'entretenir quinze cents payes d'hommes d'armes pour faire là guerre à celui qui se dit Delphin et à ses adherans[99]. En retour, on avait attribué au comte le gouvernement du Languedoc, avec d'importants avantages, mais à la condition qu'il remplirait l'engagement pris par ses ambassadeurs de se mettre en armes à la date du 1er juin et de prêter un serment personnel[100]. Bien qu'il eût été payé, pour ainsi dire, argent comptant[101], le comte de Foix avait hésité à s'engager définitivement : de nouvelles propositions, faites par lui, à la date du 22 juillet[102], attendaient leur ratification quand la mort de Henri V, puis celle de Charles VI, vinrent arrêter les négociations. Mais Bedford, peu après qu'il eut pris en main le pouvoir, fit ratifier toutes les offres du comte par lettres de Henri VI, données à Westminster (6 mars 1423)[103] ; et, le 18 avril, il fit délivrer par la chancellerie anglaise de nouvelles lettres en sa faveur : Gaston de Foix, comte de Longueville, fut chargé d'aller recevoir le serment du comte qui, comme gouverneur du Languedoc et du comté de Bigorre, eut mandat de recevoir le serment de fidélité des habitants au roi d'Angleterre[104]. Ces lettres étaient données à la relation du grant conseil tenu par Monseigneur le repent le royaume de France et duc de Bedfort, et contresignées par les ducs de Bourgogne, de Bretagne et de Touraine (c'est le comte de Richemont qu'on désignait ainsi). Peu après les princes se séparèrent, et Jean VI reprit le chemin de la Bretagne, emportant le prix du marché qu'il venait de conclure[105].

En présence d'une telle situation, il est facile de comprendre que ni l'intervention du duc de Savoie, ni la mission donnée par le pape à l'évêque de Porto n'eussent la moindre chance de succès. Aussi le nouveau légat ne paraît pas avoir fait un long séjour en France. Quant à Nicolas Albergati, il partit dans le courant de 1423 : nous le trouvons de retour à Bologne le 8 août[106]. Mais il faut constater que, si Amédée VIII échoua du côté de la Bourgogne[107], il trouva du côté de la France le concours le plus empressé et le plus loyal. Nous avons une lettre de Charles VII, en date du 7 février 1423, dans laquelle, parlant du rapport que lui avait fait son chancelier sur la conférence de Bourg, il annonce la ferme intention d'observer l'appointement conclu par le duc de Savoie, et recommande la stricte observation de la trêve : Car pas ne voudrions, disait-il, que icelles trêves qui, pour esperance d'un si grand bien comme de traité et paix finale, ont été prises et accordées, fussent de notre part enfreintes ni violées, et que par ce nous fût imputé charge de la rupture du dit traité[108]. Le 10 février, le Roi ratifiait la trêve conclue par Amédée VIII pour les états de la comtesse de Nevers et de ses enfants, et nommait des conservateurs pour en assurer l'observation[109]. Quand il fut constaté que l'appointement de Bourg ne devait être suivi d'aucun effet, il s'occupa de faire rentrer en son pouvoir les villes abandonnées engage au duc de Savoie, et envoya à ce prince une nouvelle ambassade[110].

L'insuccès de la négociation entamée sous les auspices du duc de Savoie, la nécessité de poursuivre la guerre avec vigueur, amenèrent Charles VII à se retourner vers l'Écosse, son ancienne et fidèle alliée, et à faire de nouvelles ouvertures au due de Milan.

Depuis longtemps on comptait sur l'arrivée d'un nouveau secours d'Écosse[111]. Au mois d'août 1422, le Dauphin avait fait partir une ambassade, chargée de ramener un contingent de huit mille hommes. On l'avait munie des sommes nécessaires au transport et au ravitaillement des troupes[112] ; mais le navire sur lequel se trouvaient les ambassadeurs fut capturé, et ceux-ci demeurèrent prisonniers[113]. Il fallut renoncer au voyage pour cette année. On ne perdit pas de vue, cependant, la nouvelle armée d'Écosse, et l'on s'occupa des moyens d'assurer son transport[114]. Il était d'autant plus nécessaire d'arriver à une prompte solution, que le gouvernement anglais ne cessait de travailler à détacher l'Écosse de l'alliance française. On n'avait pas oublié le mot plein d'amertume prononcé par Henri V sur son lit de mort, quand ses médecins, interpellés par lui, avaient répondu qu'il était atteint du mal saint Fiacre : Où que j'aille, avait-il dit, j'aurai donc toujours devant moi des Écossais, morts ou vifs ![115] Il fallait à tout prix renverser cet obstacle qui avait paralysé l'exécution des desseins du feu roi.

Charles VII, qui ne cessait de donner aux chefs de l'armée d'Écosse des témoignages de sa gratitude[116] et avait en eux pleine confiance, chargea le connétable de Buchan de se rendre en Écosse[117]. Il désigna pour l'accompagner François Talleyrand, seigneur de Grignols, conseiller et chambellan ; Guillaume de Quiefdeville, conseiller et maître des requêtes ; Guillaume Le Boucher, écuyer d'écurie, et Nicolas de Voisines, l'un de ses secrétaires[118]. Les ambassadeurs partirent vers la fin de mai 1423[119]. L'entreprise n'était pas sans difficultés, car les Anglais, instruits de ce voyage, faisaient bonne garde sur mer. On eut soin, cette fois, de n'emporter qu'une partie de la somme nécessaire, afin, comme le dit le Roi dans des lettres du 17 mai, de ne point mettre en si grande aventure une si grosse finance comme celle à quoy pourroit monter la dicte armée. L'objet de la mission fut pleinement atteint. Par lettres du 6 octobre 1423, Walter Stuart, fils allié du duc d'Albany[120], jurait d'observer les anciennes alliances avec la France, et promettait, si des troupes françaises débarquaient à Dumbarton, de les accueillir et de leur prêter main-forte[121]. D'un autre côté, Archibald, comte de Douglas[122], fit le même serment par lettres du 26 octobre, et s'engagea à passer en France, en compagnie du comte de Buchan, avant le 6 décembre suivant, pour s'y employer au service du Roi[123]. Le même jour, les ambassadeurs français traitèrent à Glascow avec le castillan Perruche de la Sau, maître du baleinier Sainte-Marie, pour le transport de l'armée[124]. Les auxiliaires d'Écosse débarquèrent sur deux points à la fois. Une partie aborda sur les côtes de Bretagne, l'autre à la Rochelle[125]. Un auteur écossais indique la date de Carême-prenant, c'est-à-dire le 16 février[126].

Le Roi avait obtenu satisfaction à ses demandes ; mais l'alliance écossaise n'en était pas moins sérieusement menacée. Pendant le séjour même des ambassadeurs, les négociations entre l'Angleterre et l'Écosse avaient été activement poursuivies[127]. Le régent Murdac avait été contraint de céder au mouvement qui se produisait au sein de la noblesse écossaise : un traité, signé à York le 10 septembre 1423, posa les conditions de la mise en liberté du roi d'Écosse, et stipula qu'il épouserait une princesse anglaise[128]. Par un second traité, conclu à Londres le 4 décembre suivant, il fut décidé que le roi d'Écosse serait mis en liberté, à partir du 31 mars 1424, moyennant le paiement de quarante mille livres sterling, et qu'il épouserait Jeanne Beaufort, nièce du cardinal de Westminster[129]. Jeanne était fort belle et avait inspiré au jeune Roi une violente passion. Le mariage se fit à Southwark, au mois de février 1424[130], et les époux ne tardèrent pas à faire en Écosse leur entrée triomphale[131]. Jacques Ier fut couronné le 31 mai, dans l'abbaye de Scone[132]. Dès le 26 mars 1424, un traité secret avait stipulé qu'une trêve de sept années, commençant à partir du 1er mai, régnerait entre l'Angleterre et l'Écosse[133].

Une nouvelle politique, peu favorable à la France, allait donc être inaugurée en Écosse. Les troupes écossaises envoyées au secours de Charles VII restèrent dans ses armées, sous la responsabilité de leurs chefs. Ceux-ci, voyant leur parti menacé et bientôt devenu l'objet de mesures de rigueur, ne demandèrent pas mieux que de se fixer en France. Le Roi, pour les dédommager et les attacher plus étroitement à sa cause, se montra très libéral à leur égard[134].

Ce n'était donc pas sans motif que Charles VII cherchait à s'assurer de nouveaux alliés et qu'il songeait à tirer parti de l'alliance conclue autrefois par la France avec le duc de Milan. Cette alliance avait été négligée dans les dernières années du règne de Charles VI ; mais les anciennes relations amicales et le souvenir du mariage de Louis d'Orléans avec Valentine Visconti, la rendaient facile à renouer. Le comté d'Asti, situé dans le duché de Milan, était resté en la possession du duc d'Orléans. Le Conseil général de cette ville venait justement de demander au duc Philippe-Marie, par une lettre en date du 6 septembre 1422, de prendre en main la régence pendant la captivité de leur seigneur[135]. Il y avait donc des intérêts français à soutenir au delà des Alpes, et Charles VII faisait acte de bonne politique en s'efforçant de faire entrer le duc de Milan dans le concert des puissances unies à la France par des traités.

Le Roi, voulant continuer les ligues, confédérations et amitiés entretenues par les ducs de Milan avec ses prédécesseurs, désigna, par lettres données à Mehun-sur-Yèvre le 16 septembre 1423, pour se rendre près de Philippe-Marie, un de ses conseillers, Artaud de Grandval, abbé de Saint-Antoine-de-Viennois, auquel fut adjoint, mais d'une manière facultative, un autre de ses conseillers, Pierre Sauvage. En vertu de ce pouvoir, un traité fut passé à Abbiate-Grasso le 17 février 1424. Le Roi et le duc de Milan se liaient mutuellement par un traité d'alliance et de confédération[136] ; ils prenaient l'engagement de se porter au besoin une assistance armée. Du côté du Roi figurent dans l'acte, comme alliés, les rois de Castille et d'Écosse, et les princes du sang demeurés fidèles[137] ; du côté du duc, figurent la reine Jeanne II[138], le duc de Savoie, le marquis de Montferrat, le doge de Venise, le marquis d'Este et le seigneur de Mantoue[139]. Par d'autres lettres, d'une date un peu postérieure (29 juin 1424), le duc de Milan s'engagea, dans le cas où l'empereur Sigismond attaquerait le Roi, à prêter à celui-ci son appui dans un délai de quatre mois[140].

Philippe-Marie n'avait pas, d'ailleurs, attendu le traité d'Abbiate-Grasso pour donner à Charles VII une assistance armée. Indépendamment des troupes que Charles avait levées en Lombardie à la fin de sa régence, trois capitaines lombards prirent place en 1423 dans les rangs de l'armée, à la tète d'un important contingent[141], et, après le traité, un nouveau secours fut obtenu[142].

Mais en Italie comme en Castille, Charles VII devait rencontrer des obstacles résultant de la situation intérieure de cette contrée, livrée bientôt à des luttes intestines, à des rivalités qui se prolongèrent pendant plusieurs années.

Outre le puissant duc de Milan, Charles VII chercha à s'attacher d'autres princes qui, mêlés aux intrigues qui s'agitaient dans le nord de l'Italie, pouvaient être utiles à la France. Nous avons la preuve que, dans le courant de 1424, André della Chiesa, l'ami et l'intime confident du marquis de Saluces, vint comme ambassadeur à la cour de France, et qu'après un assez long séjour, il revint, comblé d'honneur, et investi par le Roi d'une mission de confiance[143].

Nous ne quitterons pas l'Italie sans revenir au Souverain Pontife. Par l'autorité de son caractère, par sa situation de famille, par ses alliances au dehors[144], Martin V avait bien vite conquis un grand ascendant. Tous les rois de l'Europe avaient reconnu son pouvoir, à l'exception du roi d'Aragon, et le régent Bedford s'était empressé de lui envoyer une ambassade pour faire la déclaration d'obédience au nom de son neveu[145]. Le roi de France n'avait pas encore rempli ce devoir. Le conflit dont nous avons parlé au début de ce chapitre, n'était point apaisé. Charles VII se regardait comme engagé, par le serment qu'il avait prêté étant dauphin, à ne point se départir de sa ligne de conduite, et il avait même, par une ordonnance en date du 8 février 1423, prescrit la stricte observation des lois édictées en mars-avril 1418. L'énergique persistance de Martin V eut pourtant raison de son opposition et de ses scrupules. Au lendemain même du traité qu'il venait de conclure avec le duc de Milan, Charles VII se décida à envoyer au Souverain Pontife une ambassade solennelle, avec mission de lui faire obédience et de lui donner satisfaction sur les points en litige. Cette ambassade se composait de Philippe de Coëtquis, évêque de Léon, de Jean, abbé de Saint-Pierre de Vienne, de Guillaume de Hotot, abbé de Cormery, de Jean Girard, docteur ès-loix, et de Jean de Montmorin. Elle devait, aux termes des instructions royales, solliciter une dispense pour le serment prêté par le Dauphin à Paris, devant le Parlement, de maintenir inviolablement les ordonnances relatives à l'Église gallicane, et demander que, selon la concession autrefois faite à ses prédécesseurs, il eût le privilège de nommer cinq cents personnes aux bénéfices dans son royaume. On devait en même temps réclamer pour le confesseur du Roi des pouvoirs exceptionnels, durant trois ou quatre années : Car, disent les instructions, s'il fallait aller en cour de Rome pour des crimes ou excès tels qu'incendie de lieux sacrés, violation d'églises ou d'immunités et autres méfaits innombrables, la plus grande partie du royaume devrait s'y rendre[146].

L'ambassade, aussi nombreuse que solennelle — on n'y comptait pas moins de deux cents chevaux[147] — arriva à Rome pour les fêtes de Pâques (8 avril), et reçut du pape l'accueil le plus gracieux[148]. Elle remit une lettre, écrite entièrement de la main de Charles VII, dans laquelle il donnait au Souverain Pontife l'assurance de son attachement le plus filial et de son absolu dévouement[149]. Le pape, touché de cette démonstration, répondit en termes très affectueux, et félicita le Roi de se montrer le défenseur de l'Église et le conservateur des libertés ecclésiastiques. L'exercice de soit pouvoir royal était rendu difficile par les circonstances : il lui fallait des armées, il devait compter sur l'assistance et le dévouement d'un grand nombre de personnes, toutes choses qu'on n'obtenait pas sans peine ; mais quant à ce pieux devoir que lui imposaient la dignité et l'excellence de sa couronne, il n'était besoin que d'un mot sorti de sa bouche pour corriger par son zèle les maux causés par la faute d'autrui. C'est pourquoi, très cher fils, disait le pape, tenu que vous êtes à ce devoir et si bien à même de le remplir, après nous avoir donné, écrit de votre propre main, un témoignage si agréable de votre dévouement inébranlable et de votre foi, veuillez le confirmer aujourd'hui sans plus tarder par votre autorité royale, en annulant et cassant tous les édits contraires à la liberté de l'Église. Par là il sera manifeste à tous, qu'en vrai Roi et en Roi de cette maison de France, la plus chrétienne de toutes, vous vénérez l'Église de Dieu, et vous voulez pénétrer plus avant dans le sein de notre charité, qui ne cessera de prier Dieu et d'intercéder auprès des hommes pour votre conservation, et pour la paix de votre royaume[150].

Une autre ambassade, composée de l'abbé de Saint-Antoine, de Guillaume Saignet, d'Alain Chartier et de Thomas de Narducio fut envoyée au Pape au commencement de 1425. Nous avons le texte de la lettre de créance remise par le Roi à ses ambassadeurs[151]. Elle exprime le désir de voir le Souverain Pontife intervenir de nouveau en faveur de la paix[152]. L'ambassade eut aussi pour mission de déposer aux pieds du Pape l'édit, en date du 10 février 1425, par lequel, revenant sur les ordonnances de 1418 et de 1423, le Roi lui donnait pleine satisfaction[153]. Martin V, par un bref en date du 1er mai où il fait tout l'historique de la question, félicita Charles VII de la révocation de ses ordonnances, et le releva du serment qu'il avait fait étant dauphin[154].

 

Avant de se rendre près de Martin V, Alain Chartier avait fait partie d'une autre ambassade, envoyée en Allemagne, et qui avait pour but d'opérer un rapprochement avec l'empereur.

On se rappelle l'attitude hostile à la France que Sigismond avait prise en 1416[155]. Absorbé par ses luttes contre les Hussites, il n'avait pourtant pas donné suite à ses menaces, et c'est en vain qu'en 1422 le roi d'Angleterre avait réclamé de lui un concours effectif contre la France[156]. Pourtant l'empereur restait l'adversaire de Charles VII. Il y a lieu de croire qu'une intervention de Martin V vint modifier ces dispositions et préparer les voies à des ouvertures du gouvernement royal. Ce qui est certain, c'est que, dans le courant de l'année 1424, Charles VII écrivit à Sigismond pour lui faire connaître l'état de son royaume et lui exprimer le désir d'entrer avec lui en relations personnelles. L'empereur se montra sensible à cette démarche : Thomas de Narducio fut chargé d'aller trouver le Roi de sa part et de l'assurer de l'intérêt qu'il portait, non seulement à la cause de la catholicité tout entière, mais en particulier au royaume de France, dont il désirait la restauration et le maintien dans son intégrité. Durant cet intervalle, Charles VII avait écrit à l'empereur une nouvelle lettre ; mais par la négligence du courrier qui en était porteur, cette lettre n'était pas parvenue à destination. Dès qu'il fut informé de cette omission, le Roi s'empressa de la réparer par l'envoi d'une lettre encore plus explicite. Nous nous réjouissons, écrivait-il, des victoires que Dieu a accordées à Votre Sérénité et au Saint Empire ; nous espérons que cet état prospère de vos affaires profitera à notre maison, car c'est la loi de l'amitié de rendre communs les succès comme les revers. Ni la fortune, ni les paroles hostiles, ni le cours des années n'ont pu altérer votre amour pour nous et pour la maison de France. Par la volonté de Dieu, nous supportons toutes les difficultés qui sont venues assaillir notre royaume, et, avec la grâce divine, nous espérons les surmonter. Nous faisons la guerre, non pour accroître notre domaine, mais pour le défendre contre une injuste usurpation, et Dieu sait que nous n'y avons provoqué personne. Le Roi remerciait l'empereur des magnifiques présents que Thomas de Narducio lui avait apportés de sa part ; il déclarait que ses conseils lui serviraient de règle et que tout serait commun entre eux, soit la paix, soit la guerre. Ce ne sera pas pour vous, ajoutait-il, une faible gloire que d'avoir relevé la très chrétienne maison de France, bienfait qui sera commun à nous et à toute la chrétienté. Dieu a remis entre vos mains la paix de son Église, et les victoires qu'il vous accorde sont pour tous un motif d'espérance. Nous supplions donc Votre Sérénité de nous donner conseil et protection : elle acquerra ainsi une gloire éternelle devant les hommes et de grands mérites devant Dieu[157]. Thomas partit de la cour de France porteur d'une lettre de créance pour l'empereur[158].

Les choses étant ainsi disposées, Charles VII résolut d'envoyer des ambassadeurs à Sigismond. La lettre de créance qu'il leur remit est datée du château d'Espally, 31 décembre 1424. Le Roi n'avait cessé d'être persuadé des sentiments d'affection et des loyales intentions de l'empereur, et il avait toujours désiré lui offrir sa puissance et son bon vouloir ; mais maintenant qu'il avait reçu les assurances de la constante dilection de l'empereur et du souci que celui-ci témoignait de défendre son honneur et ses intérêts, il n'hésitait plus. Il lui rendait grâces et mettait à sa disposition, non seulement comme chose offerte, mais comme chose due, tout ce qui dépendait de la puissance royale ; il députait vers lui Artaud de Grandval, abbé de Saint-Antoine de Viennois, son conseiller, et Alain Chartier, son secrétaire, en le priant de les accueillir avec bienveillance, de les écouter avec confiance, et de les renvoyer après avoir donné satisfaction à leurs requêtes. Pour lui, il s'estimerait heureux d'accomplir tout ce qu'il plairait à l'empereur de lui demander[159].

Charles VII donna en même temps à ses ambassadeurs des lettres de créance pour Nicolas de Gara, comte palatin de Hongrie, que nous avons vu mêlé aux négociations de 1416, et qui était en grand crédit à la cour impériale[160].

A l'abbé de Saint-Antoine et à Alain Chartier fut adjoint un troisième ambassadeur, qui n'était autre que Guillaume Saignet, ce conseiller au parlement que l'empereur, durant son séjour à Paris, avait si bénévolement armé chevalier[161]. C'est au fond de la Hongrie que les ambassadeurs joignirent Sigismond[162]. Alain Chartier porta la parole, et son discours nous a été conservé. Dans un langage où l'éloquence disparaît trop souvent sous le pédantisme et l'emphase, où l'exposé de la mission est noyé dans une profusion de souvenirs classiques et de citations de l'Écriture, l'orateur développa longuement ces trois points : le Roi honore la majesté impériale et en connaît toute la grandeur ; le Roi aime et chérit l'empereur ; le Roi place en l'empereur toute sa confiance et toutes ses espérances. Il fit un pompeux éloge de Sigismond, rappelant l'Église pacifiée, le schisme anéanti, les hérésies victorieusement combattues ; il offrit au nom du Roi, sa personne, son royaume et ses sujets ; il sollicita pour la très chrétienne maison de France, pour le représentant des rois choisis de Dieu, oints de la sainte Ampoule, qui toujours avaient soutenu l'Église, la protection de l'empereur. Châtiée aujourd'hui par Dieu, cette glorieuse maison n'en était pas moins l'objet de la miséricorde divine. L'orateur rappela les antiques alliances entre l'Empire et la France. L'amitié que le Roi avait pour l'empereur était fondée sur la nature et sur le sang ; obscurcie un instant, cette alliance était un héritage qu'il devait transmettre à ses descendants. La maison de France n'était pas réduite au désespoir. A un roi inexpérimenté ou affaibli par la maladie, avait succédé un prince d'un caractère grave, que la nature avait orné dès l'enfance de tous les dons de la grâce et île la beauté ; il restait au royaume ses forces, son antique courage, des provinces nombreuses, des villes florissantes, des forteresses. La France était abattue, non écrasée ; les ennemis, en massacrant ses défenseurs, s'étaient épuisés eux-mêmes. L'antique alliance avec l'Empire, gravée dans les cœurs, inscrite dans les archives, confirmée par des serments, l'empereur l'avait renouvelée à son avènement pour lui et ses successeurs. C'est par cette alliance que pouvait se relever l'héritier du royaume, abaissé par ses ennemis, livré aux séditions par la faiblesse de princes, trop confiants ou trop indulgents, qui ont soutenu de leur autorité les crimes populaires. C'est sa propre cause que l'empereur défendra en prenant en main les intérêts de la France et en empêchant qu'elle ne tombe aux mains de l'iniquité. L'empereur a dit au Roi qu'il serait le médiateur de la paix et qu'il combattrait ceux qui voudraient s'y opposer. Bien que, grâce à des mariages et à de récentes réconciliations[163], on puisse espérer que cette paix ne tardera pas, le Roi demande à l'empereur le secours de sa puissance, et l'accepte comme guide et comme médiateur[164].

Dans un second discours, Alain Chartier insista sur la nécessité qui incombait à l'empereur de soutenir l'héritier légitime du trône et de lui venir en aide, dans son infortune, par une assistance qu'il devait à la fois au sang, à l'amitié et à la justice[165].

On a une troisième harangue, prononcée à Prague, pour ramener les habitants à l'obéissance envers leur souverain. L'empereur fort sensible, parait-il, au charme oratoire de l'ambassadeur, la lui lit répéter en sa présence[166].

Ce qui vaudrait mieux pour l'histoire que les compendieux discours d'Alain Chartier, ce serait un rapport précis sur le résultat de la mission des trois ambassadeurs. Mais, à cet égard, nous en sommes réduit à des conjectures. Il n'est pas douteux, toutefois, que l'empereur se borna à leur donner de bonnes paroles. Nous en avons pour preuve des lettres sans date, contenues dans un formulaire du temps, par lesquelles Charles VII donnait pouvoir à Louis, duc de Bavière, — c'était son propre oncle, frère de sa mère Isabeau — à l'abbé de Saint-Antoine et à Odart Morchesne, un de ses secrétaires, pour conclure un traité d'alliance avec l'empereur[167]. Mais le moment n'était pas venu où Sigismond devait signer un traité avec la France. Il fallait se contenter d'avoir obtenu d'amicales assurances et une promesse éventuelle d'intervention en faveur de la paix.

Cette mission diplomatique en Allemagne n'en eut pas moins d'heureux résultats, car Charles VII en profita pour entamer des relations avec divers princes, dans l'Empire, et jusqu'aux frontières de l'empire Ottoman. Nous apprenons par une lettre d'Étienne Brankowich, despote de Rascie et seigneur de Servie, en date du 12 mai 1425, qu'il avait reçu des lettres du Roi, transmises par les ambassadeurs envoyés au roi des Romains. Dans sa réponse, ce prince, très flatté de l'honneur qui lui est fait, se déclare prêt à répondre à tous les désirs du Roi[168]. D'un autre côté, dès le mois de septembre 1424, le seigneur de Ribeaupierre et d'autres seigneurs allemands avaient député un messager au Roi, porteur de lettres closes[169].

La France reprenait son rang en Europe. Malgré la situation toujours précaire que lui faisait l'invasion anglaise, elle commençait à sortir de ce long sommeil auquel l'avait condamnée l'anarchie du règne de Charles VI, et dont l'Europe chrétienne ressentait les fâcheux effets. Vers le temps où nous sommes parvenus, le sultan d'Égypte, rompant sans motif une longue paix, avait attaqué le royaume de Chypre et le menaçait d'une destruction complète. Un saint homme de Damas, que le sultan tenait en haute estime, réussit à le ramener à des idées de modération : le fils du saint homme fut envoyé au roi de Chypre pour traiter de la paix. Le sultan a fait une grande folie, dirent les conseillers du roi à l'ambassadeur, de commencer la guerre contre le roi de Chypre, et non point seulement contre lui, mais, en sa personne, contre toute la chrestienté. — Le sultan, répondit l'ambassadeur, est bien averti du gouvernement de la chrestienté ; il sait que le Roi de France, qui toujours a été le chien au grand collier, dort pour le temps, et il craint peu ou point les chrétiens[170].

Mais, pour relever la France au dehors et lui rendre son antique prestige, il était indispensable de la pacifier au dedans. Or cet important résultat ne pouvait être obtenu qu'au moyen d'un rapprochement avec le duc de Bourgogne. Voilà le but qu'allait poursuivre le gouvernement de Charles VII, à travers bien des difficultés et au prix de laborieux efforts.

 

 

 



[1] C'étaient Jacques Gelu, archevêque de Tours ; Guillaume Bataille, Conseiller et chambellan du Roi ; Guillaume de Quiefdeville, conseiller et maître des requêtes de l'hôtel, et Jean de Castel, secrétaire du Roi. Le pouvoir est en copie contemporaine dans le ms. latin 6024, f. 15 v°. — Il y a un autre pouvoir du même jour pour demander un secours tant sur terre que sur mer.

[2] Jacques Gelu n'est point nommé dans cette pièce.

[3] Les ambassadeurs n'ayant pu se mettre en possession ni des originaux ni des copies des anciens traités, devaient en demander communication en Castille.

[4] Il s'agissait spécialement du comte de Foix, qui venait de se rallier à l'Angleterre.

[5] Ms. latin 6024, n° 13.

[6] Ms. latin 6024, n° 18.

[7] Voir Ferreras, t. VI, p. 277 et s.

[8] Ordonnances, t. XIII, p. 44.

[9] Ms. latin 6024, n° 17.

[10] Voir mss. fr. 5053, f. 146 v°, 5024, f. 153 v°, et 6022, f. 87 v°. Quod per contractum matrimonii inter precarissimum primogenitum nostrum Ludovicum Dalphinum Viennensis, et carissimam consanguineam nostram primogenitam serenissimi atque amantissimi fratris nostri Johanni, Dei gratias Regis Castellæ et Legionis. — Comme les seules filles que Jean II eut de sa femme Marie d'Aragon furent Catherine, née le 5 octobre 1422, et Éléonore, née le 10 septembre 1423, et que la première mourut le 10 août 1424, la pièce en question ne peut être postérieure à l'année 1424.

[11] Raynaldi, ann. 1422, § 33 ; Douët-d’Arcq, Choix de pièces inédites, t. I, p. 447. Nous n'avons pas l'original de cette lettre, qui se trouve (sans date, comme la plupart des autres lettres) dans le Regeste de Martin V, provenant des Archives du Vatican, et conservé aux Archives nationales, sous la cote LL 4a, fol. 79. On la trouve également dans les mss. fr. 15505 et lat. 9869, p. 17.

[12] Voir Regeste, f. 115 v°.

[13] Regeste, f. 16 v°.

[14] Voir Ordonnances, t. X, p. 471.

[15] Ad Carolum Dalfinum Viennensis. Datum Romæ. Regeste, f. 16 v°.

[16] Dilecto filio nobili viro Carolo Dalfino Viennensis. Datum Romæ, apud Sanctam Mariam Majorem, x Kal. nov. anno quinto. Regeste, f. 3 et 118 v° (ici sans date).

[17] Même suscription. Datum Romæ. Allusion à la mission de Jean Trocon, Regeste, f. 6.

[18] Regeste, f. 25 v°.

[19] Regeste, f. 28. Dans cette lettre, Charles est nommé : Carolum Francorum regem illustrem.

[20] Raynaldi, ann. 1422, § 29.

[21] Regeste, f. 89 v°.

[22] Quamvis non dubitemus generositatem tuam summis desideriis exoptare compositionem et pacem Francia ; atque Angliae principum et regnorum, et pro ea pie et sollicite laborasse et indefessis studiis laborare ; tamen, quia hujusmodi pacis desiderium super omnia insidet ourdi nostro cum nulla res in universa Christianitate sanctior et utilior fleri possit, nobilitati tuæ ad hoc dignum opus intentæ libenter preces et hortationes nostras adjicimus ; prœsertim cum partibus diuturni belli labore et tædio affectis, et secuta morte regis Angliæ, nobis major spes et opportunitas consequendi optatam pacem oblata esse videatur. Raynaldi, ann. 1422, § 30.

[23] Regeste, f. 85.

[24] Raynaldi, ann. 1452, § 32. La lettre est dans le Regeste cité, f. 21 et 94 v°.

[25] Il y a deux lettres dans le Regeste, f. 30 v° et 17 (double, f. 91).

[26] Regeste, f. 27.

[27] Regeste, f. 82, 27 v° et 89 v°.

[28] Raynaldi, ann. 1422, § 31.

[29] Regeste, f. 16.

[30] Regeste, f. 44 et 89.

[31] Voir lettres au cardinal de Bar et à un évêque de France, dans le Regeste, f. 85 et 55.

[32] Regeste, f. 16 (deuxième lettre). Cf. f. 17 v° (double, f. 119 v°).

[33] Regeste, f. 43 v°.

[34] Regeste, f. 40 v°.

[35] Regeste, f. 83.

[36] Regeste, f. 41.

[37] Regeste, f. 28. — Le Cinquième compte de Guillaume Charrier nous apprend que, pendant son séjour en France, l'évêque de Bologne reçut une mule en présent du Roi. Cabinet des titres, 685.

[38] Regeste, f. 17 v°.

[39] Regeste, f. 28 (deuxième lettre).

[40] Regeste, f. 46.

[41] Regeste, f. 15. Cf. autre lettre, f. 15 v° (deuxième lettre ; double, f. 77 v°).

[42] Regeste, f. 18 (double, f. 47).

[43] Regeste, f. 37 v°.

[44] Regeste, f. 82.

[45] Regeste, f. 52 v°.

[46] Regeste, f. 5.

[47] Regeste, f. 15 v° (première lettre). — Ces deux lettres furent apportées au Roi et à la reine de Sicile par Jean Rafanel, frère mineur, confesseur du roi de Sicile.

[48] Louis de Maurinis, nommé plus haut, était porteur d'une nouvelle lettre à l'évêque de Bologne, le confirmant dans sa mission (Regeste, f. 55). Le Pape écrivit aussi par le même envoyé au duc de Bretagne, pour lui faire part de la mission donnée à l'évêque de Porto et le presser de s'employer en faveur de la paix (Regeste, f. 44 ; double, f. 89).

[49] On se rappelle qu'Amédée VIII avait épousé Marie de Bourgogne, sœur de Jean sans peur.

[50] Voir t. I, chapitre IX.

[51] Voir t. I, chapitre X.

[52] C'est ce qui ressort du document qui va être cité ci-dessous. — Les deux dues n'avaient cessé pourtant de correspondre à ce sujet. Le 23 août 1422, Antoine de Toulongeon et Philibert Andrenet partaient de Châtillon-sur-Seine, où se trouvait Philippe, pour se rendre à la cour de Savoie ; ils revinrent ensuite à Dijon rendre compte au Conseil de leur mission, retournèrent en Savoie, et allèrent en Flandre faire leur rapport au duc. En outre, Guillaume de Neuville, dit le Moine, partit de Paris le 19 septembre, pour aller en Bourgogne voir la duchesse de Bourgogne, madame de Guyenne et monseigneur de Savoie. Archives de la Côte-d'Or, B 1623, f. 114 v°, 115 et 116.

[53] Aucun historien n'a attribué à la conférence de Bourg l'importance qu'elle eut réellement. Certains ont commis une grave erreur en suivant le continuateur de l'Histoire de Bourgogne de Dom Plancher, qui, s'en s'apercevoir que l'acte du 20 janvier, par lequel le duc de Savoie posait les bases des négociations ultérieures, était daté du 20 janvier de l'an de la Nativité 1423, a placé le fait un an plus tard. Grâce à une relation du chancelier Rolin qui se trouve en minute dans la Collection de Bourgogne (vol. 70, f. 4), nous pouvons mettre en pleine lumière cette curieuse négociation, qui est le point de départ de toutes celles qui vont suivre, jusqu'au traité d'Arras. Ajoutons que Dom Salazard, auteur de cette partie de l'Histoire de Bourgogne, s'est complètement mépris sur l'attitude des ambassadeurs du Roi dans cette conférence, et que ses erreurs ont été reproduites par M. de Barante, lequel, dans son Histoire des ducs de Bourgogne, le suit toujours fidèlement.

[54] Cinquième compte de Guillaume Charrier. Cabinet des titres, 685 ; Archives de Tours, Registre des délibérations, vol. II, f. 10-10 v°.

[55] Lettres de Charles VII du 22 novembre 1422, portant allocations de paiements à ces ambassadeurs, dans le compte cité. Cf. Didier Neuville, le Parlement royal à Poitiers, dans la Revue historique, t. VI, p. 281 et 286 ; Thomas, les États provinciaux de la France centrale sous Charles VII, t. I, p. 287.

[56] Le chancelier était encore à Lyon le 31 décembre. Archives de Lyon, Registres des délibérations, BB I, f. 169.

[57] Item, comment, en alant à Dijon, nous passames par Monthar, et alasmes veoir noz demoiselles, lesquelles estoient et sont en bon point, et se recommandent très humblement à Monseigneur.

[58] C'étaient Antoine de Toulongeon, seigneur de Traves ; Jacques de Courtiamble, seigneur de Commarieu, et Philibert Andrenet.

[59] Ils firent valoir, au nom du duc, l'empeschement de sa maladie, et les occupations qu'il avoit eues, à cause de la venue par devers lui de messeigneurs de Brabant et de Saint-Pol, l'evesque de Liège, les ambazeurs de France (c'est-à-dire de Henri VI) et autres.

[60] Et en oultre parlèrent à mon dit seigneur de Savoye de la submission, etc., au regart de la querelle et interest de Monseigneur touchant la mort de feu Monseigneur son père, seulement pourveu toutes voyes que la dicte submission il tenist secrète, et que, par vertu d'icelle, il ne procedast jusques à ce qu'il veist qu'il le peust raisonnablement faire, et par honneur, en gardant l'honneur de Monseigneur, tant au regart des dis traictiez, promesses et seremens par lui faix comme autrement, et que de ce il baillast ses lettres à Monseigneur.

[61] Les ambassadeurs bourguignons craignaient de trop s'avancer et hésitaient à se rencontrer avec les ambassadeurs de Charles VII : Et au contraire lui fu dit et remonstré par lesdiz, ambaxeurs que mon alée (c'est Nicolas Rolin qui parle) devers lui seroit de trop grant esclandre et en seroient tantost grans paroles, et que, consideré qu'ils avoient declairé tout ce qui leur estoit chargé, il se devoit deporter de moy et eulx faire plus aler ne retourner devers lui. Il fallut que le duc insistât pour que Rolin et ses collègues fussent présents : Macé, dit le duc, m'a rapporté de par mon neveu qu'il m'envoyoit son chancelier pour cette cause generalement. — Notons que cette observation du duc a été introduite en surcharge dans la minute.

[62] L'ambassade bourguignonne se composait donc, avec Nicolas Rolin, de Toulongeon, Courtiamble et Andrenet ; de Guillaume de Vienne, seigneur de Saint-Georges, et de Jean de Noident. Relation de Nicolas Rolin ; Septième compte de Jean Fraignot, aux archives de la Côte-d'Or, B 1623, f. 111 et 111 v°. — On donne ici à l'arrivée la date du jeudi 6 ; mais, en 1423, le 6 était un mercredi.

[63] Sans aucunement declairer quoy ne commant, ajoute Nicolas Rolin dans sa Relation.

[64] Tout ce que les ambassadeurs bourguignons purent obtenir, en insistant, c'est que le duc de Savoie écrirait à Bedford pour lui faire savoir ce qu'il se proposait de faire, avecques la conclusion et appoinctement qu'il avoit intention de prendre en ceste matière.

[65] Il faut rapprocher de ce document des Advis pour le bien de la paix, contenant seulement douze articles, qui se trouvent aux archives de Turin, Trattati, pièce 25.

[66] On voit que, malgré le récit fantaisiste du continuateur de D. Plancher (Histoire de Bourgogne, t. IV, p. 85), les ambassadeurs français et bourguignons ne communiquèrent jusqu'à la fin que par l'intermédiaire du duc de Savoie.

[67] Le duc entra même dans le détail, comme on le voit par la relation de Nicolas Rotin : Et finablement nous a dit que de tout ilz se rapportoient à son ordonnance. Et toutes voyes, en particulier, touchant les coulpables, etc., il y a avisé certaine manière, etc. Quant à la fondacion, il a senty d'eulx qu'ilz se condescendoient assez, pourvu que elle soit faicte ailleurs que à Monstereau. Et sont bien d'accort que Monstereau demeure à Monseigneur. Quant à la fondacion des obis pareillement. Quant à la restitucion des biens et joyaulx de Monseigneur, ilz sont d'accort de le faire, et semblablement de restituer les contés d'Estampes et Giem et asseoir le douaire de madame de Guienne et composer et traictier de sa part des meubles. Et aussi de recompenser les prisonniers de leurs raencons, etc. ; et de bailler à Monseigneur, pour ses fraiz et despens, terres et seigneuries, etc. ; et de l'abolicion generale, etc. Et tout à l'ordonnance de mon dit seigneur de Savoye.

[68] D'ailleurs, il n'y fut point encouragé par les ambassadeurs bourguignons qui, affectant une parfaite indifférence, répondirent aux confidences du duc qu'ils n'avaient à ce sujet aucune charge, comme ils l'avaient dit plusieurs fois, et que néanmoins ils en feraient part à leur maitre, afin qu'il y eust son advis.

[69] Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. XXXIV. — Nous avons trouvé une version un peu plus correcte de ce document aux Archives de Turin, Categoria Trattati, paquet VIII (copie du temps).

[70] Item dira comment le chancellier et autres ambaxeurs du Daulphin ont requis et quis plusieurs moyens de parler à nous, mais nous n'avons point volu parler à eulx, etc.

[71] C'est Philibert Andrenet qui fut chargé de présenter au duc le rapport de ses ambassadeurs. Il partit, avec le sire de Toulongeon, le 24 janvier, pour aller trouver le duc en Flandre, et le voyage dura jusqu'au 18 avril. Archives de la Côte-d'Or, B 1623, f. 115 v°.

[72] On lit ceci en surcharge dans la minute : Et lui dira que nous tous le prions, pour son bien, et aussi pour acquitter noz promesses dessus dictes, qu'il vueille venir par deça à la dicte journée. Ils conseillaient au duc, s'il ne venait pas, d'envoyer au moins des ambassadeurs au duc de Savoie, et lui désignaient éventuellement le prince d'Orange. — La dernière ligne de la relation est encore une surcharge ; elle porte : Item, dira à Monseigneur qu'il semble expedient qu'il escripve tantost aux bonnes villes, etc.

[73] Monstrelet, t. IV, p. 110 ; Chastellain, t. I, p. 328.

[74] Le second, Thomas, duc de Clarence, avait été tué à Baugé en 1421.

[75] On place la naissance de Henri V en 1388. Jean dut naître au plus tôt en 1390, et non en 1389, comme le dit M. Vallet dans la Nouvelle Biographie générale, au mot BEDFORD.

[76] Il y a, dans la préface de M. Stevenson aux Letters and papers illustrative of the reign of king Henry the sixth (t. I, p. XXX-XXXI), un portrait de Bedford très remarquablement tracé.

[77] Monstrelet, t. IV, p. 110 ; Chastellain, t. I, p. 329.

[78] Chastellain, t. I, p. 329.

[79] Elle était née le 11 janvier 1395, et mourut à Gand le 8 juillet 1422. Le bruit courut qu'elle avait été empoisonnée. Voir Chastellain, t. I, p. 341 et s.

[80] Chastellain, t. I, p. 331-32. — Des lettres de Henri VI, en date du 5 décembre 1422, déclarèrent le duc de Bedford protecteur et défenseur du royaume d'Angleterre et de l'Église anglicane, et principal conseiller du roi. Rymer, t. IV, part. IV, p. 83.

[81] Par lettres du 26 juin, le duc de Bretagne avait nommé des ambassadeurs pour traiter avec le roi d'Angleterre (Original, Archives, J, 244, n° 94 ; Rymer, t. IV, part. II, p. 62, 68. Cf. D. Lobineau, t. II, col. 983, et D. Morice, t. I, col. 487). Ces ambassadeurs arrivèrent à Paris en août ; mais la maladie et bientôt la mort de Henri V empêcha la conclusion des négociations (Titus Livius, dans Hollingshead, p. 382 ; D. Félibien, t. IV, p. 587) Les ambassadeurs bretons restèrent cependant à Paris, où ils se trouvaient encore au moment de la mort de Charles VI (Comptes royaux, Archives, KK 33, et dans le t. III de Jean Chartier, p. 292). Par lettres du 8 octobre, les ambassadeurs juraient le traité (Original, Archives, d, 2444, n° 96 ; copie, Ms. fr. 2715, f. 47 v°). Le même jour, Charles VI s'engageait à ne faire aucun accord avec le Dauphin, sans que le duc de Bretagne y fût compris, et promettait d'assigner au duc, près de son domaine, des terres et seigneuries jusqu'à concurrence de 15.000 l. t. de rente (Fontanieu, 111-112 ; D. Lobineau, t. II, p. 989).

[82] Archives du Nord, B 1935, f. 42 v°-43.

[83] Jouvenel des Ursins, p. 396.

[84] A la date du 2 décembre, le Parlement de Paris envois une députation au duc pour le presser de venir (Archives, X1a, 1480). — Le 13 décembre, le régent Bedford délivra des lettres de sauf-conduit au duc de Bretagne (Archives de la Loire-Inférieure, E 121 ; copie dans les Mss. fr. 2714, f. 90, et 2715, f. 66). — Le 17 décembre, il ordonnança un paiement de 200 livres à Beraud de Montferrant, pour les frais qu'il aurait à faire en avant en Bretaigne, où nous l'envoyons presentement devers nostre très chier et très amé frère le duc de Bretaigne. Bedford prend dans l'acte, avec le titre de Régent le Royaume, celui de duc de Normandie (Pièces originales, 2019 : MONTFERRANT).

[85] Par cet acte, les États se déclaraient ouvertement pour le mariage du comte de Richemont avec madame de Guyenne et pour l'alliance bourguignonne ; ils s'engageaient à pourvoir à la sûreté du duché dans le cas où le duc serait dans la nécessité d'aller en personne conclure un traité (Texte dans D. Plancher, Histoire de Bourgogne, t. III, preuves, p. CCCXIX). Ceci rend fort douteuse l'assertion de Guillaume Gruel, prétendant que, trois mois plus tard, les États s'opposèrent au voyage du duc à Amiens.

[86] Ms. fr. 4628, f. 529 ; D. Plancher, t. III, preuves, p. CCCXVII. Le duc de Bourgogne s'engageait, entre autres clauses, à payer 50.000 écus d'or à Bedford, dont 10.000 avant les noces. — Ses lettres de ratification furent données le 30 décembre 1422. Ms. fr. 4628, f. 533 ; cf. Stevenson, t. I, p. XXXIV, note 3.

[87] ..... Nous avons entendu que, par divers moyens, les ennemis de Monseigneur le Roy et les nostres s'efforcent de vous faire croire le contraire et moult de choses contre la verité, à la charge de nous et de nos bienvueillans, tandans affin de seduction, pour vous malicieusement attraire à leur dampnable parti. Moreau, 248, f. 58.

[88] Archives de la Loire-Inférieure ; copie dans Fontanieu, 113-114.

[89] Mêmes sources. — Ce document a été publié par M. Stevenson dans son recueil, t. II, p. 1. Cf. Proceedings and ordinances of Privy Council, t. III, p. 76-77.

[90] Extraits des Registres du Parlement, dans Félibien, t. IV, p. 589.

[91] Ambassade de Hugues de Lannoy à Paris et Pontoise (février) ; ambassade de Lannoy et de Georges d'Ostende à Rouen (18 mars) ; ambassade de Philippe de Croix et de Palys, roi d'armes de Flandre, à Rouen (31 mars). Quatrième compte de Guy Guilbaut. Collection de Bourgogne, 65, f. 141.

[92] Ms. fr. 4628, f. 513, et Colbert, Flandre, vol. 5, f. 78 v°.

[93] Bertrand de Remeneuil part d'Arras pour aller au-devant du duc. Collection de Bourgogne, l. c.

[94] Collection de Bourgogne, l. c.

[95] Archives du Nord, B 1465 ; Cf. Stevenson, t. I, p. XXXIV, note 3.

[96] Original, aux archives du Nord, B 1465. Voir Monstrelet, t. IV, p. 147 ; Rymer, t. IV, part. IV, p. 91 ; Du Mont, Corps diplomatique, t. II, part. II, p. 113, etc. Le même jour, le duc de Bretagne prêta serment dans la cathédrale d'Amiens. C'est ce qui ressort d'une pièce publiée par M. Stevenson, t. II, p. [530].

[97] Par ce traité, en date du 17 avril, les deux princes promettaient de se secourir mutuellement jusqu'à concurrence de 500 hommes d'armes et de trait, qui devaient être soldés à partir du 1er mai. Original aux archives de la Loire-Inférieure, publié par D. Morice, t. II, col. 1135.

[98] Cet acte important se trouve dans l'Histoire de Bourgogne, t. IV, p. XXVII ; il est en original aux archives du Nord, B 1465.

[99] D. Vaissète, t. IV, p. 458.

[100] Actes des 3 et 4 mars 1422, analysés par D. Vaissète. Les textes dans Rymer, t. IV, part. IV, p. 51 et s. ; et Besse, Recueil de pièces pour servir à l'Histoire de Charles VI, p. 332.

[101] Il avait reçu, par lettres du 22 avril 1422, 6.954 nobles d'or sur le trésor d'Angleterre. Rymer, t. IV, p. IV, p. 62.

[102] D. Vaissète, t. IV, p. 459 et 481.

[103] Proceedings and ordinances, L III, p. 54. Cf. Rymer, I. IV, part. IV, p. 87-90.

[104] Brienne, 302, f. 141, 151 et 159 ; Stevenson, t. I, p. 1 et 6.

[105] On a l'original du reçu de 5.300 l. t. délivré par le duc de Bretagne, en date du 20 avril, pour partie des frais et mises que nous avons fais oudit voiage pour venir parler et communiquer avecques nostre dit beau frère et nostre très chier et très ansé frère le duc de Bourgoingne, touchas les faix et affaires dudit royaume et d'eulx et nous. Ms. fr. 20405, f. 18. — Monstrelet dit (t. IV, p. 150) que le duc reçut 6.000 écus pour les despens de son voyage.

[106] Sigonius, dans les Bollandistes, vol. II de mai, p. 482.

[107] Le bruit courut pourtant qu'un traité était conclu entre le duc et le Dauphin ; mais Philippe prit soin d'écrire aux villes de son parti pour démentir ce bruit. On reçut le 10 mai à Reims la lettre du duc. Varin, Archives législatives de la ville de Reims, t. II, part. I, p. 632 — On a la trace de lettres closes envoyées de Bruges, par le duc, au duc de Savoie, à la date du 27 juin 1423. Archives de la Côte d'Or, B 1622, f. 191.

[108] Voir aux Pièces justificatives.

[109] Le texte des lettres est dans l'Inventaire des titres de Nevers, publié par M. de Soultrait, col. 628. Les conservateurs étaient le maréchal de la Fayette et Pierre de Montmorin, bailli de Saint-Pierre-le-Moutier. Les lettres de ratification de la comtesse de Nevers sont du 15 février (Id., col. 570). Cf. Guichenon, Histoire générale de la Savoie, t. I, p. 460-61.

[110] Voir aux Pièces justificatives une lettre du 24 avril, adressée au maréchal de Séverac. Le 7 juin 1423, le duc de Savoie déclarait à des ambassadeurs de Chartes VII qu'il remettrait Trévoux, qu'il avait reçu en dépôt, à l'expiration de la trêve entre le Roi et le duc de Bourgogne (Archives de Turin, Trattati, n° 4 ; voir Bianchi, le Materie politiche, etc., p. 95 et 164). Ces ambassadeurs étaient le chancelier Gouge, Jean Somme, seigneur de Chasteauneuf, et Odart Morchesne (Cinquième compte de Guillaume Charrier. Cabinet des titres, 685). Ils partirent le 23 mai, et vaquèrent à ce voyage pendant quatre-vingt-seize jours.

[111] On voit par des lettres du 31 mars 1422 que le Dauphin comptait sur l'envoi d'une armée. Ordonnances, t. XI, p. 159.

[112] L'ambassade se composait de Jean de Contes, dit Mainguet, conseiller du Dauphin, de Perceval de Boulainvilliers, son chambellan, et de Bertrand Campion, son maître d'hôtel.

[113] C'est ce qui résulte des lettres du Dauphin des 16 septembre et 20 octobre 1422, conservées en original aux Archives (J 475, n° 98) et publiées en 1873 dans les Archives historiques du Poitou (t. II, p. 291-97). L'argent destiné au transport fut heureusement sauvé, ainsi qu'un fleuron de la couronne qu'on avait emporté et qui devait être mis en gage.

[114] Des lettres du 4 juillet 1423 prouvent que, dès le mois de janvier de cette année, on s'occupait de recueillir l'argent nécessaire pour le transport des troupes. Fontanieu, 113-114.

[115] Quocumque perrexero, tam vivos Scotos quam defunctos in barbam meam reperio ! Saint-Fiacre était un saint écossais dont le Roi, dans sa campagne de Brie, et malgré les représentations qu'on lui fit, avait violé les immunités. Voir Scotichronicon de J. de Fordun, t. II, p. 462.

[116] Voir les lettres du 26 mars 1423, où sont énumérés les services rendus par Jean Stuart et en récompense desquels le Roi lui donna la seigneurie d'Aubigny-sur-Nerre Le P. Anselme, t. V, p. 921. Cf. lettres du 18 novembre 1422 lui attribuant 500 l. t. par mois pour l'état de sa personne, et 500 I. t. pour l'entretien de ses capitaines ; déjà il avait reçu, par lettres du 23 avril 1421, la terre de Concressaut en Berry. Le sire de Derneley fut fait prisonnier à Gravant pendant l'ambassade du comte de Buchan.

[117] Avant son départ, il reçut du Roi un bacinet du prix de 50 écus. Compte de Guillaume Charrier. Cabinet des titres, 685.

[118] Le pouvoir, en date du 17 mai 1423, a été publié en 1875, dans la Revue des Sociétés savantes (6e série, t. II, p. 161), d'après une communication de M. Marchegay, qui avait trouvé ce document, avec un autre mentionné plus loin, dans le Cartulaire d'Orbestier, aux archives de la Vendée. Il a été reproduit dans les Archives historiques du Poitou, t. VI, p. 431. Cf., sur les noms des ambassadeurs, les lettres du 24 juillet 1424 dans Fontanieu, 113-114, éditées par M. Stevenson, t. II, p. 15. — C'est par erreur que Cousinot de Montreuil nomme (p. 221) l'archevêque de Reims parmi les ambassadeurs ; il y eut bien un prélat, mais ce fut un prélat écossais qui s'adjoignit aux ambassadeurs : Jean de Cranach, élu conferme (évêque nommé) de Caitbness. Cousinot a confondu avec l'ambassade de mai 1421, où figure en effet Regnault de Chartres.

[119] Malgré la pénurie de ses finances, et grâce à un prêt de Guillaume d'Avaugour, le Roi put mettre 5.000 écus à la disposition du connétable pour le voyage d'Écosse. Extraits du 13e compte de Hamon Raguier, dans D. Morice, t. II, col. 1124. En mai, Tanguy du Chastel se rendit à La Rochelle, pour le fait et avancement du navire que le Roy avoit ordonné estre envoyé en la compagnie de Mgr le connestable d'Escosse pour la nouvelle armée qui devoit lors venir. Compte de Guillaume Charrier. Cabinet des titres, 685.

[120] Et par conséquent neveu du connétable de Buchan.

[121] Original, Archives, J 677, n° 20.

[122] Il était beau-frère du roi Jacques, ayant épousé Marguerite, fille de Robert III.

[123] Original, Archives, J 680, n° 71.

[124] Lettres du 26 octobre, contenant le pouvoir de Charles VII, en date du 17 mai, dans la Revue des Sociétés savantes, l. c., p. 160-63. — On voit par un acte sans date qui se trouve dans un formulaire du temps (Fr. 5271, f. 134 v°), que Buchan avait fait marché à La Rochelle, pour le transport des troupes, avec un marchand de l'Écluse, lequel s'en alla avec les 500 écus et les 2.000 fr. qui lui avaient été versés. Le Roi donne l'ordre d'en poursuivre le remboursement.

[125] C'est ce que nous apprend le Liber Pluscardiensis, publié dans le tome VII des Historians of Scotland (1877). — Ce Liber Pluscardiensis, ou Book of Pluscarden, n'est autre chose que la compilation dont M. Quicherat a donné un fragment fort curieux, sous le nom du Religieux de Dumferling. D'après une dissertation de M. W. Fr Skene, citée par l'éditeur (M. Felix J. H. Skene) dans sa préface, l'auteur serait Maurice Buchanan, maitre ès-arts, parent de Jean Stuart de Derneley, qui, après l'avoir accompagné en France, devint trésorier de la Dauphine. Comparer avec l'introduction du second volume, t. X des Historians, publié en 1880, p. XXV-XXVI.

[126] Ad festum carnis brevii. Liber Pluscardiensis, p. 359 ; cf. traduction, au t. X des Historians of Scotland, p. 270. — Berry dit (p. 370) que le comte de Douglas aborda en Bretagne, et Cousinot (p. 195) désigne le port sous ce nom : Saint Mahé de Fine Porterne. C'est le Conquet.

[127] En février 1453, le Conseil d'Angleterre donnait des instructions aux ambassadeurs chargés de traiter avec le roi d'Écosse de sa délivrance (British Museum, Vesp. F VII). Le 12 mai 1423, la chancellerie anglaise délivrait des lettres de sauf-conduit à une notable ambassade du Roi d'Écosse (Rymer, t. IV, p. IV, p. 93). Le 6 juillet, des instructions étaient données par le Conseil pour traiter avec les ambassadeurs d'Écosse, et dans ces instructions, il était dit que, durant les trêves proposées, ipsi de Scotia non prestent nec cursum, per terrant vel per mare, Armaniacis adversariis nostris ne aliquibus aliis partem adversariorum domini nostri Regi tenentibus (p. 96). Le 10 juillet, le roi d'Angleterre donnait pouvoir pour traiter de paix finale ou de trêves à long terme (p. 97).

[128] Rymer, t. IV, part. IV, p. 98.

[129] Rymer, t. IV, part. IV, p. 99. Cf. Tytler, History of Scotland, t. III, p. 195-96.

[130] Voir Rymer, t. IV, part. IV, p. 107.

[131] Tytler, p. 196-201.

[132] Voir Rymer, t. IV, part. IV, p. 109-111.

[133] Rymer, t. IV, part. IV, p. 109-111. — Les lettres de ratification du roi d'Écosse sont du 5 avril 1425.

[134] C'est ainsi qu'Archibald, comte de Douglas, constitué lieutenant général sur le fait de la guerre dans tout le royaume, reçut pour lui et ses hoirs males le duché de Touraine' Voir lettres du 17 avril 1424 et serment prêté à Bourges par le comte, en date du 19 (Archives, J 680, n° 70 ; Ms. latin, 10187, f. 2), en présence du Roi, et de plusieurs de son sang, prelas, barons et autres de son Brant conseil, par lequel il s'engageait, entre autres choses, à ne faire quelzconques aliances ou confederacions à seigneurs ne autres personnes quelz qu'ilz soient, tant de ce royaume que d'ailleurs, sans le bon plaisir, congé et exprès consentement du Roi. — Le comte de Douglas ayant été tué à Verneuil, sa veuve fit valoir des droits sur le tiers du duché et obtint du roi d'Écosse l'envoi de son chancelier, le sire de Crichton, pour soutenir ses prétentions. Voir la lettre de la comtesse, en date du 14 mai 1428 et la réponse du conseil aux articles remis par le chancelier, Ms. lat. 10187, f. 4 et 5 ; Cf. Stevenson, t. I, p. 20.

[135] Bianchi, Le Materie politche, etc., p. 163.

[136] ..... Bonam, veram, firmam, realem, solidam et perfectam ligam, confœderationem, unionem et compositionem, et quidquid melius dici, esse et censeri potest, invicem et inter se duraturam et incorruptè bonA fide et sine fraude per et inter eosdem dominos Regem et Ducem his modis et nominibus quibus supra colligatos servandam bine ad annos centum proximè futuros...

[137] Les princes français nommés dans le traité sont : le roi Louis (duc d'Anjou), le duc d'Orléans, le comte d'Angoulême, le duc de Bourbon et son fils, le duc d'Alençon, René, duc de Bar, Charles d'Anjou, frère du roi Louis, le comte d'Armagnac, Richard de Bretagne, comte d'Étampes, et le seigneur d'Albret.

[138] Jeanne avait rompu avec Alphonse V, roi d'Aragon, et par un acte du 14 septembre 1423 elle avait adopté Louis III. Lecoy de la Marche, t. II, p. 213.

[139] Le duc de Milan désigne en outre le roi Louis de Sicile, le duc d'Orléans et le comte d'Angoulême parmi ses alliés.

[140] Original, Archives, J 505, Ir 5, éd. par Leibniz, Codex Diplomaticus, p. 338, par Du Mont, Corps Diplomatique, t. II, part. u, p. 175, et par Lunig, Codex Italiæ diplomaticæ, t. I, sect. II. Cl. I, p. 439 et s. Le pouvoir du duc est en date du même jour (d 505, n° 6). Il donna le 1er juillet 1424 des lettres de ratification (id., n° 7).

[141] L'an precedent (1423) estoient arrivez en France, qui en ce temps allerent devers le Roy, messire Theaulde de Valpergue, messire Borne Caqueran et messire Luquin Rus, lesquels luy ammenerent de par le duc de Milan six cent lances et mille hommes de pied. Berry, p. 370.

[142] Voir Raoulet, dans Chartier, t. III, p. 183-84.

[143] On lit dans la préface de la Cronaca di Saluzzo de Gioffredo della Chiera (Monumenta Historiæ Patriæ : Scriptores, t. III, col. 844-1074) : Di Andrea della Chiesa, fratello di Gioffredo, parlano con aurore le nostre Storie. Egli tu l'intimo confidente, anzi l'amico del suo signore, che lo riguardava, etc. — Nel correre dell' anno 1424 il marchese Lodovico I il mando in Francia ambasciatore al re Carlo VII, dal quale venne creato cavaliere aureato e suo consigliere per gli affari d'Italia. Al ritorno di lui in patria, nel 1425, venne nominato vicario generale del marchesato.

[144] Il était allié à la maison de Brandebourg qui, d'après une ancienne tradition rapportée par le pape lui-même, dans une lettre à Ladislas, roi de Pologne, avait une commune origine avec les Colonna. Voir Lenfant, Histoire du Concile de Constance, t. II, p 539.

[145] Voir Rymer, t. IV, part. IV, p. 87.

[146] Instructions à l'évêque de Léon et aux autres ambassadeurs envoyés au Pape. Document publié par D. Marlène, Thesaurus novus anecdotorum, t. I, col. 1759, et mal daté (circa 1422). Les pouvoirs donnés en même temps se trouvent (sans date) dans des Formulaires du temps : Mss. fr. 5024, f. 151 v° ; 5058, f. 142 v° ; 6022, f. 85 v° ; 14311, f. 76 v°.

[147] Aux Pasques, l'an 1425 (lisez 1424), entrèrent à Romme les ambassadeurs du Daulphin, à deux cens chevaulx, pour rendre au pappe Martin toutte obeyssance. Saint-Remy, t. II, p. 114.

[148] Il les receut liement. Monstrelet, t. IV, p. 231.

[149] Voir la lettre du pape, citée ci-dessous. — Nous avons le texte d'une lettre du Roi au pape, en faveur de Guillaume, abbé de Cormery, qui faisait partie de cette ambassade. Ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 19 v°.

[150] Raynaldi, ann. 1424, § 20.

[151] Ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 20.

[152] Le Pape, répondant à cette requête, écrivit aux ducs de Bourgogne et de Bedford, comme on le verra au chapitre suivant.

[153] Voir Preuves des libellez de l'église gallicane, t. II, part. I, p. 34.

[154] Lettre datée des calendes de mai (1er mai). Raynaldi, ann. 1425, § 8.

[155] Voir t. I, chapitre VIII.

[156] Voir t. I, chapitre IX.

[157] Ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 14.

[158] Ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 18.

[159] Ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 17 v°.

[160] Ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 19.

[161] Voir t. I, chapitre VIII.

[162] Voir le tableau dressé par Aschbach, Geschichte Kaiser Sigmund's, à la fin de chaque volume, des séjours de l'Empereur.

[163] On remarquera cette allusion à l'entrevue d'Angers et au rapprochement opéré avec le duc de Bretagne sur les bases d'une alliance matrimoniale entre les maisons de Bretagne et d'Anjou ; au mariage récent du duc de Bourgogne avec Bonne d'Artois ; et aux négociations entamées par le duc de Savoie et le comte de Richemont qui vont être exposées dans le chapitre suivant. Voici le passage : Quanquam enim et mansuescentibus animis et matrimonium aliarumque reconciliationum fide, jam inter regnum pacem credimus affuturam, auxilium tamen vestrarum virium semper cupimus, petimus et speramus, etc.

[164] Ce discours, qui se trouve dans les mss. latins 8757, f. 15 v°, et 5961, f. 1, a été publié en 1875 par M. Delaunay, à la suite de son Étude sur Alain Chartier, p. 218-227.

[165] Mss. latins 8757, f. 13 v°, et 5961, f. 55 ; Delaunay, l. c., p. 238-242.

[166] Mss. latins 8757, f. 37, et 5961, f. 52 ; Delaunay, l. c., p. 243-251.

[167] Mss. fr. 5024, f. 152 ; 5053, f. 143 ; 6022, f. 86, et 14371, f. 76 v°.

[168] Ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 17. — Il mourut peu après. Voir Zinkeisen, Geschichte des osmanischen Reiches in Europa, t. I, p. 537.

[169] Archives de Tours. Registres des délibérations, II, partie III, au 14 septembre, et partie IV, au 17 septembre 1424 ; Registres des comptes, XXI, f. 96. — Il s'agit du seigneur de Rapolstein, en Haute-Alsace.

[170] Saint-Remy, t. II, p. 152.