HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE I. — LE COMTE DE PONTHIEU, LE DAUPHIN ET LE RÉGENT - 1403-1422

 

CHAPITRE IX. — LA DIPLOMATIE DU DAUPHIN.

 

 

§ II. — NÉGOCIATIONS AVEC LES DIVERSES PUISSANCES DE 1418 A 1422.

Situation faite à la France, en Europe, par la simultanéité de deux gouvernements rivaux. — Relations avec la Castille et avec l'Écosse ; le Dauphin fait échouer les efforts de la politique bourguignonne près de ces deux puissances et obtient d'elles une assistance armée. — Attitude du duc de Savoie. — Influence politique de la reine Yolande : le maison d'Anjou en Lorraine et à Naples. — Continuation des relations avec la Castille et l'Écosse, et ouvertures faites à l'Aragon. — Le meurtre de Montereau consomme l'alliance anglo-bourguignonne : traités d'Arras et de Rouen, bientôt suivis du traité de Troyes. — Accueil que ce traité reçoit en Europe. — Relations du Dauphin avec la cour de Rome : dispositions plus favorables du Pape, qui intervient en faveur de la paix et envoie un légat en France. — Nouveau secours d'Écosse en 1421. — Efforts du roi d'Angleterre pour contrebalancer l'action de la France ; il cherche des auxiliaires en Allemagne et s'allie à la République de Gènes. — Ambassade du Dauphin en Castille. — Ouvertures faites au duc de Milan, qui autorise la levée d'un corps de troupes.

 

La situation faite à la France, depuis le 29 mai 1418, par la simultanéité de deux gouvernements, l'un, celui du Roi, siégeant à Paris, représenté par la Reine et le duc de Bourgogne ; l'autre, celui du Dauphin, installé dans les provinces du centre, soulevait un problème délicat au point de vue des relations internationales : avec lequel de ces gouvernements les puissances étrangères unies à la France par d'anciens traités, telles que la Castille et l'Écosse, allaient-elles entretenir des rapports ? Cette question semble avoir, dès le début, préoccupé le duc de Bourgogne ; car, aussitôt que l'autorité du nom d'Isabeau fut venue couvrir sa rébellion et donner à ses actes une apparence de légalité, il fit — de Troyes où il résidait — des ouvertures au roi de Castille.

Le trône de Castille était alors occupé par un enfant, Jean II, né le 6 mars 1405, dont la sœur avait épousé en 1415 le roi d'Aragon, Alphonse V. D'antiques alliances unissaient la Castille à la France : des traités successifs, conclus en 1274, 1294, 1346, avaient été renouvelés entre Charles V et Henri de Transtamarre, quand l'épée victorieuse de Du Guesclin eut assuré à ce prince la possession du trône (20 novembre 1368)[1]. Au début du règne de Jean II, le traité de Valladolid, dirigé principalement contre l'Angleterre, était venu (décembre 1408) sceller l'alliance intime de la Castille et de la France, et devait, pendant de longues années, demeurer la charte réglant les rapports des deux États[2].

Henri IV, roi d'Angleterre, dont la sœur, Catherine de Lancastre, avait épousé Henri III de Castille, père de Jean II, et exerçait la régence pendant la minorité de celui-ci, avait voulu profiter de ces rapports de familles pour renouer avec la Castille des relations interrompues depuis de longues années[3]. Il en entretenait, et d'assez étroites, avec la Cour d'Aragon qui, bien qu'unie à la France par des liens très anciens[4], les avait laissés se relâcher depuis le milieu du quatorzième siècle, et qui, tandis que la Castille demeurait française, était devenue favorable à l'Angleterre. Peu après son avènement, Henri V signa (28 janvier 1414) un traité avec Jean II, stipulant une trêve générale d'un an[5], laquelle fut ensuite prolongée pour une égale durée[6]. Après la prise d'Harfleur et la victoire d'Azincourt, il avait, nous l'avons vu, envoyé une ambassade en Castille pour solliciter une alliance[7]. En janvier 1417, il fit partir de nouveaux ambassadeurs, avec mission de rappeler l'alliance conclue autrefois, et de la renouveler si c'était possible ; en cas d'échec, on invoquerait le traité récemment signé entre la Castille et le Portugal[8], afin de faire comprendre l'Angleterre dans la trêve, comme alliée du roi de Portugal ; en outre, on devait tout tenter pour rompre l'alliance française[9]. Henri V semble avoir échoué dans cette négociation, mais il resta pourtant en relation avec la Castille[10].

La France fut plus heureuse en Aragon que l'Angleterre ne l'avait été en Castille. Toutes les contestations soulevées dans ce pays par la succession de Jean Ier (mort en 1395) avaient enfin cessé par la renonciation de Yolande d'Aragon, duchesse d'Anjou, et la reconnaissance d'Alphonse V qui, le 2 avril 1416, avait succédé à son père Ferdinand IV, monté sur le trône le 28 juin 1412. Du vivant de celui-ci, et au milieu de ces compétitions, la politique française et la politique anglaise s'étaient rencontrées en Aragon. Charles VI entretint des relations avec don Ferdinand, et même avec son prédécesseur don Martin ; il envoya une ambassade chargée de renouveler les alliances avec la France[11]. En 1413, l'Angleterre laissa le duc de Clarence signer un traité d'alliance avec le comte d'Urgel et prêter à celui-ci un concours armé dans sa lutte contre Ferdinand IV[12]. En 1415, Henri V, ayant sollicité la main de doña Maria, fille ainée de Ferdinand IV, qu'on destinait au roi de Castille, vit ses avances repoussées[13]. En novembre 1416, Charles VI, rappelant la trêve de trente ans conclue avec l'Aragon (1406), faisait délivrer des lettres patentes pour en enjoindre la stricte observation[14]. Enfin l'intervention de la reine Yolande amena entre les deux Cours le rétablissement des rapports diplomatiques : un traité, signé à Barcelone le 4 octobre 1417, entre le roi d'Aragon, d'une part, et le roi Louis de Sicile et le Dauphin, de l'autre, renouvelait les anciennes alliances et confédérations[15].

Tel était, en 1418, l'état des choses en Espagne. La Castille demeurait notre alliée fidèle ; l'Aragon, tout en conservant ses anciennes relations d'amitié avec l'Angleterre, était rentré en rapports avec la France. Ajoutons que le Portugal, où régnait Jean Ier, marié à une sœur d'Henri IV d'Angleterre, était acquis à l'influence anglaise, et que le roi de Navarre Charles III, de la maison d'Évreux, tout en étant fort éloigné de la détestable politique de son père, avait ses relations dans le camp opposé au Dauphin.

Nous avons dit que le duc de Bourgogne avait fait, à la fin de 1417, des ouvertures à la Cour de Castille[16]. Elles ne furent point repoussées, car, dans les derniers jours de janvier 1418, des ambassadeurs de Jean II se trouvaient à Troyes[17]. Une ambassade de Portugal vint aussi, dans le même temps, vers le duc[18]. Le 15 mars, Jean sans Peur fit partir Thibaut, seigneur de Neufchastel, pour l'Espagne, avec mission de traiter d'alliances et de secours armés avec les rois de Castille et d'Aragon[19]. Un peu plus tard, quand, maître de la personne de Charles VI, le duc se fut installé dans la capitale, il envoya un nouvel ambassadeur aux mêmes rois[20]. Au mois de septembre, deux familiers du roi de Castille se trouvaient à la Cour de France[21].

Il était une autre puissance, alliée de temps immémorial à la France[22], que le duc de Bourgogne ne pouvait oublier : nous voulons parler de l'Écosse. Ce pays se trouvait, il est vrai, dans une situation précaire : son roi ayant été, depuis 1405, retenu prisonnier en Angleterre, au mépris de toutes les lois[23], il était sous la régence de Robert Stuart, duc d'Albany, frère de Robert III (mort en 1406). Pourtant l'alliance écossaise n'était point à négliger. La trêve entre l'Angleterre et l'Ecosse expirait à Pâques 1418[24], et l'on pouvait, en invoquant les anciens traités et les vieilles sympathies écossaises, compter sur une assistance armée en France[25]. Jean sans Peur fit à l'Écosse des ouvertures[26], comme il en avait fait à la Castille, et il réussit dans cette négociation, car, dans les premiers jours de juillet 1418, l'évêque de Ross et Jean de Lethe, ambassadeurs du duc d'Albany, étaient près de lui pour traiter de l'envoi d'un secours contre les Anglais[27]. Le duc, pour se rendre les Écossais favorables, avait sans doute invoqué l'appui du comte de Douglas, venu en France en avril 1412, et avec lequel il avait conclu alors un traité d'alliance et de confédération[28]. Une convention semble avoir été faite[29]. Pour en presser l'exécution, le duc envoya en Écosse, au mois d'octobre 1418, un maitre des requêtes de l'hôtel du Roi ; il fit partir en même temps un maitre de navire, chargé du transport des troupes[30].

Au moment où le Dauphin organisait son gouvernement, il se voyait donc, tout à la fois, entouré d'ennemis au dedans et menacé au dehors de perdre les alliés sur lesquels il aurait pu compter. La diplomatie du duc de Bourgogne, comme celle du roi d'Angleterre, faisait le vide autour de lui, et semblait devoir le réduire à une complète impuissance. Nous avons vu plus haut comment, à l'intérieur, il lutta contre la fortune adverse ; examinons ce qu'il fit pour conjurer le nouveau péril dont il était menacé.

Une des premières préoccupations de Charles, après sa fuite de Paris, fut de se mettre en rapport avec les puissances étrangères. Nous avons la preuve qu'il envoya aussitôt un ambassadeur au duc de Savoie[31]. Tandis que, s'efforçant d'arrêter les progrès de l'invasion, il entrait en pourparlers avec le roi d'Angleterre, il s'adressa à l'Écosse[32] et à la Castille, ces anciennes et fidèles alliées de la France, dont, dans sa détresse, il espérait avoir l'assistance. Durant les derniers mois de 1418, des ambassadeurs furent envoyés au régent Albany et à Jean II[33]. On manque de détails sur cette double négociation, mais on sait que Charles demandait au premier un secours armé, au second une flotte pour le transport des troupes d'Écosse. Au commencement de 1419, une ambassade écossaise vint trouver le Dauphin et lui promettre l'appui du régent. Nous voyons à cette époque deux chevaliers écossais, qui sans doute avaient accompagné les ambassadeurs, prendre place dans les rangs de l'armée dauphinoise[34]. Avec la Castille, les choses ne marchèrent pas aussi rapidement : la reine-mère venait de mourir[35] ; le jeune roi avait été proclamé, bien qu'il ne fût âgé que de treize ans ; les conseillers du trône hésitaient à se prononcer. Ils étaient d'ailleurs sollicités des deux côtés à la fois : le duc de Bourgogne avait, nous l'ayons dit, envoyé, vers la fin d'août, deux ambassadeurs en Castille. On a la mention d'une réponse dilatoire faite par le Conseil, et s'adressant sans doute à. ces ambassadeurs[36]. L'amiral de Braquemont, qui connaissait à fond la Castille, où il était apparenté aux plus grandes maisons, et qui avait été l'un des négociateurs du traité de Valladolid en 1408[37], fut envoyé pour aplanir les difficultés[38]. A la fin d'avril 1419, Charles fit encore partir Bertrand Campion, un de ses maîtres d'hôtel, pour presser la conclusion des négociations et prendre les arrangements relatifs à l'envoi des navires. C'était le moment où Jean II venait de faire aux Cortès (7 mars 1419) la déclaration qu'il entendait désormais gouverner par lui-même, et où l'archevêque de Tolède, don Sanche de Royas, avait pris la direction des affaires. Des subsides paraissent avoir été votés par les Cortès dans cette réunion[39]. La nouvelle de la prise de Rouen par le roi d'Angleterre causa une vive impression à la Cour de Castille, et, le 3 avril, on emmena le jeûne roi à Ségovie, pour presser l'équipement de la flotte[40].

Tandis qu'on obtenait ce résultat en Castille, le Dauphin reçut une nouvelle ambassade d'Écosse. Le régent Albany, qui semble n'avoir eu pour mobile que la satisfaction de son ambition personnelle[41], voulait-il imiter Henri V dans son double jeu ? Toujours est-il que, le 24 mars 1419, le duc de Bourgogne faisait partir pour l'Écosse trois écuyers de ce pays[42], et que, les 11 avril 1419 et jours, suivants, à Provins, où résidait alors la Cour, il avait à sa table un évêque et deux seigneurs écossais[43]. Le même jour (11 avril), on recevait avis à Tours du passage de l'ambassade qui se rendait près du Dauphin, et qui traversa la ville le lendemain[44]. C'est probablement pendant le séjour de cette ambassade que Charles, par lettres du 17 mai, retint Guillaume Douglas, chevalier, pour le servir avec cent cinquante hommes d'armes et trois cents archers[45]. Nous avons la preuve que, dès le mois d'avril 1419, il avait auprès de lui, pour sa garde, une compagnie d'hommes d'armes et d'archers écossais[46]. Aussitôt après la conclusion du traité de Pouilly (11 juillet), nous voyons Jean sans Peur charger Jean de Becour, serviteur du Roy Jacques, d'aller porter à son maître la nouvelle de la réconciliation opérée entre le Dauphin et le duc[47].

Le 28 juin, fut signée à Ségovie une convention réglant les conditions du secours naval fourni par la Castille : quarante navires armés devaient être mis pour trois mois à la disposition de la France ; le Dauphin s'engageait à payer les frais, évalués à la somme de 119.400 francs d'or[48]. Une ambassade de Castille ne tarda pas à se rendre en France[49]. L'Angleterre était sérieusement menacée : non seulement la Castille facilitait le transport des troupes d'Écosse, mais il était question d'opérer une descente en Guyenne. Dans une lettre en date du 22 juillet, le maire et les jurats de Bayonne faisaient part au roi d'Angleterre de l'arrestation d'un clerc castillan, sur lequel avaient été saisis des papiers établissant qu'outre l'envoi des quarante navires destinés à prendre à Belle-Isle les gens du Dauphin pour aller chercher l'armée d'Écosse, on se proposait à la cour de Castille de diriger une expédition contre la Guyenne et de mettre le siège devant Bayonne[50].

Le conseil anglais prit aussitôt des mesures pour empêcher le passage des navires castillans[51]. Mais il ne tarda pas à recevoir des nouvelles encore plus alarmantes : le 23 juillet, un agent anglais à la cour d'Aragon faisait savoir que quatre galères provençales, bien armées, venaient de passer librement, sans qu'il ait pu les faire arrêter, et qu'elles faisaient voile vers les côtes d'Angleterre[52] ; le 5 septembre, on écrivait de Bayonne que les Espagnols étaient entrés à grande puissance dans la terre de Labour, et s'étaient avancés jusque sous les murs de Bayonne, pillant et brillant tout sur leur passage[53] ; qu'il n'était pas douteux que le comte don Fadrique[54], au nom du roi, avec toute la puissance de Castille, et l'infant d'Aragon, avec toute la puissance d'Aragon, allaient assiéger Bayonne et prêter assistance au Dauphin[55]. Qui pouvait prévoir les conséquences d'une campagne entamée simultanément, en Normandie par l'armée dauphinoise, grossie des auxiliaires d'Écosse, et en Guyenne par les troupes de Castille ? C'était là un véritable coup de partie. Henri V, qui venait justement de voir le duc de Bourgogne se rapprocher du Dauphin, dut craindre un brusque revers de fortune[56].

Mais au moment où l'alliance de Jean II permettait d'opérer, dans le sud de la France, une si utile diversion ; alors que l'amiral de Braquemont, prenant le commandement de la flotte castillane, remportait (janvier 1420) une grande victoire, près de La Rochelle, sur les navires anglais croisant dans ces parages[57], un déplorable conflit éclata à la Cour de Castille. Après la mort de leur père Ferdinand IV, les trois infants d'Aragon, don Jean, don Henri et don Pedro, étaient venus s'établir à la Cour de Jean II, où leur sœur doña Maria fut fiancée au jeune roi le 20 octobre 1419. Des luttes d'influence ne tardèrent pas à se produire, et l'infant don Henri finit par lever l'étendard de la révolte (14 juillet 1420)[58]. Il en résulta une période de troubles et d'anarchie qui se prolongea pendant plusieurs années, au grand détriment de la France, ainsi privée des avantages que l'habile politique du Dauphin avait su conquérir.

Si Charles avait réussi du côté de l'Écosse et de la Castille, il ne fut pas aussi heureux en Savoie. Amédée VIII avait épousé une sœur de Jean sans Peur[59] : tout en se maintenant dans une sorte de neutralité, évitant de se rendre aux instances du gouvernement royal qui réclamait de lui une assistance armée[60], il n'en resta pas moins entièrement dévoué aux intérêts du duc de Bourgogne[61]. Le Dauphin s'était, dès le début, mis en rapport avec lui (juin 1418) ; le duc avait, à son tour, envoyé des ambassadeurs, et ces relations n'avaient point été vues sans ombrage par le parti adverse[62]. Elles se poursuivirent pendant quelque temps : vers le mois de mars 1419, l'évêque de Saint-Papoul et Jean Girard allèrent, de la part du Dauphin, trouver le duc pour traiter diverses affaires, parmi lesquelles était comprise la prolongation d'une trêve entre la reine Yolande et Amédée VIII, relativement à la Provence[63]. Yolande envoya elle-même une ambassade, chargée de poursuivre la revendication de ses intérêts et de régler certaines questions en litige[64]. A ce moment Amédée, toujours prêt à intervenir comme pacificateur, était en relations assidues avec le duc de Bourgogne, et surtout avec la duchesse qui, chargée de la direction politique en Bourgogne, ne résidait pas loin de son beau-frère[65]. Le duc de Savoie avait des ambassadeurs à la Cour de France[66], et ne fut point sans doute étranger au rapprochement opéré au mois de juillet 1419 entre le duc de Bourgogne et le Dauphin. Après le meurtre de Montereau, cédant peut-être à des sollicitations de Charles[67], il tenta de ramener le duc Philippe à des sentiments de conciliation, et lui envoya un de ses chevaliers pour l'engager à traiter avec le Dauphin[68]. Mais il se refusa à faire le voyage de Lyon, où celui-ci, se rendant en Languedoc, l'avait mandé par la lettre suivante, qui donnera une idée des relations établies entre l'héritier du trône et le chef d'une maison qui se trouvait encore, à l'égard de la Couronne, dans une sorte de dépendance.

A nostre très chier et très cané cousin le duc de Savoye.

DE PAR LE REGENT, ETC.

Très chier et très aillé cousin, pour le desir que savons vous avoir de oir de nos nouvelles et estai, et pour le plaisir que aussy prenons de oir des vostres, escrivons de present par devers vous, en vous signifiant, très chier et très amé cousin, que grace à Dieu, nous sommes sain et en bon point de nostre personne, qui ce tout temps vous octroit. Et, en entretenant nostre voyage vers le pays de Lyonnois dont autrefois vous avons escript, sommes nagaires partis de nostre ville de Bourges, et venuz jusqu'en ce pays de Bourbonnois ; et pour ce que, au plaisir de Dieu, entendons estre en la ville de Lyon dedans le XVe jour de janvier prouchain venant, et que à ce jour mandons ilec venir par devers nous tels et tels[69], et autres seigneurs de sang et lignage de Monseigneur et nostre, pour avoir conseil et avis sur les grans affaires de ce Royaume, et mesmement sur ce qui est à faire pour la conservacion de ceste seigneurie et le reboutement des Anglois anciens ennemis d'icelle, en quoy sommes du tout deliberé d'exposer nostre propre personne en la saison nouvelle, soit par bataille à journées arrestées ou autrement, ainsy que serons conseillez de faire, nous qui, en ce et en toutes autres choses qui si avant toucheroient le bien de mon dit seigneur et de nous, vouldrions user de vostre bon conseil et advis et aide, et que de vous, entre tous autres si prouchains de mon dit seigneur comme vous estes, avons tousjours eu et avons très parfaicte et speciale confiance, vous prions, très chier et très amé cousin, sur tout le plaisir et service que jamais faire nous desirez, et sur tant que vous aimez le bien et conservacion de ceste seigneurie, que incontinent ces lettres voues, vous vous vueilhez disposer et appareiller pour venir devers nous et estre au dit lieu de Lyon dedans ledit terme ou le plus tost après, et au moins ile delay que bonnement pourrez, car, pour le grant charge de gens que nous menons, n'y pourrions pas longuement arrester ne sejourner. Et en ce faisant, de quoy ne creons pas que à tel besoing nous doyez faillir, nous ferez ung très agreable plaisir. Et par ce message que pour ce envoyons en haste devers vous, vous veuilliez sur ce rescrire vostre entencion et voulenté, ensemble de vostre dit estat, et autres nouvelles, car d'en oir en bien nous sera moult grant plaisir.

Très chier et très amé cousin, Nostre Seigneur vous ayt en sa sainte garde.

Escript à Moulins, le XXVIIIe jour de decembre[70].

Le duc de Savoie n'intervint plus durant la régence de Charles[71]. Tout en restant en relation avec lui[72], il se rangea sans hésitation du côté de ses adversaires, et continua à permettre aux seigneurs savoisiens de soutenir les armes à la main la cause bourguignonne[73].

Nous avons vu l'influence de la reine Yolande se faire sentir dans les négociations avec l'Angleterre et dans les relations avec l'Aragon ; elle s'exerça encore en Lorraine et en Italie, avec des chances diverses, et, nous ajouterons, avec des visées qui ne furent point toujours à l'avantage de la France.

Le duc de Lorraine était, comme Jean sans Peur, uni à une princesse de Bavière. Après le meurtre du connétable d'Armagnac, le duc de Bourgogne lui avait offert l'épée de connétable ; mais Charles Ier, bien que dévoué au parti bourguignon, avait décliné cet honneur. Il avait pour héritière sa fille aînée, que la reine Isabeau avait voulu faire épouser à son neveu Louis de Bavière, dit le Bossu[74], et dont Henri V avait aussi demandé la main pour son frère le duc de Bedford. L'habile politique de Yolande réussit à faire rompre cette double négociation, et à assurer à la maison d'Anjou la succession de Lorraine : par un traité signé le 20 mars 1419, au château de Foug, près Toul, entre le duc Charles II et le cardinal de Bar[75], les duchés de Lorraine et de Bar devaient être réunis, après la mort des titulaires, au moyen du mariage de René d'Anjou, comte de Guise, petit-neveu du cardinal-duc de Bar qui l'instituait son héritier, avec Isabelle, fille aînée et héritière du duc de Lorraine. Le 24 juin, la reine Yolande, tant en son nom qu'au nom de son fils Louis III, donnait son agrément à ce traité, et le mariage de René et d'Isabelle fut célébré à Nancy le 24 octobre 1420[76].

Si, par l'alliance de son second fils avec l'héritière du duc de Lorraine, Yolande servait les intérêts de la France, il n'en fut pas de même pour l'aîné, qu'elle lança, tout jeune et sans expérience, à la poursuite d'un trône lointain, legs de son père et de son grand-père.

Jeanne, reine de Naples, de Sicile et de Jérusalem, fille de Charles, duc de Calabre, et de Marie de Valois, était morte de mort violente, en 1382, sans laisser de postérité de ses quatre maris[77]. Par un acte du 29 juin 1380, elle avait adopté Louis, duc d'Anjou, frère de Charles V, qui devait recueillir, pour lui et ses descendants, le royaume de Naples avec les comtés de Provence, de Forcalquier et de Piémont[78]. La couronne transmise à la maison d'Anjou devait être lourde à porter. Louis Ier, s'étant embarqué pour l'Italie en juin 1382, y perdit la vie (21 septembre 1384), sans assurer à son fils la possession du trône. Couronné à Avignon, le ter novembre1389, à l'âge de douze ans, par le pape Clément VII, Louis II passa à son tour, à trois reprises, en Italie, et ajouta, du chef de sa femme Yolande, la revendication du trône d'Aragon à celle du trône de Sicile ; mais il mourut, lui aussi-, prématurément, après un complet insuccès. Enfin, au milieu de l'année 1420 et dans un moment où son concours aurait été fort utile au Dauphin, Louis III, âgé de moins de dix-sept ans[79], partit pour le royaume de Naples, à la tête d'une brillante chevalerie.

Une seconde Jeanne, nièce de la précédente[80], et célèbre dans l'histoire par sa légèreté de mœurs[81] était alors sur le trône. Elle avait succédé en 1414 à son frère Ladislas, et venait (2 octobre 1419) d'être couronnée par le cardinal Colonna, frère du pape[82]. Sollicitée de divers côtés, elle n'avait point encore désigné d'héritier[83]. Le pape Martin V trancha la question : par un acte daté de Florence, le 4 décembre 1419, il donna à Louis III d'Anjou et à sa postérité l'investiture du royaume de Naples après la mort de Jeanne[84]. Fort de l'appui du pape, ayant obtenu le concours de l'ancien grand connétable de la Heine, le fameux Sforza Attendolo, le jeune Louis fut proclamé roi, et s'établit à Castellamare, tandis que Sforza occupait Averso. Mais il allait se trouver aux prises avec les plus graves difficultés : la politique napolitaine lui suscita un rival en la personne d'Alphonse V, roi d'Aragon, que la reine Jeanne constitua bientôt son fils adoptif et son héritier, et qui vint p rendre possession du royaume[85].

Le roi d'Aragon était un des rares souverains qui reconnaissaient encore Benoit XIII pour pape. L'intervention de ce prince devait avoir pour résultat de rattacher plus étroitement Martin V à la maison d'Anjou. Elle se produisit au mois de septembre 1420, alors qu'Alphonse venait de quitter son royaume pour passer en Sardaigne. Avant son départ, il avait reçu de nouvelles ouvertures du Dauphin[86]. Au mois de janvier 1420, une grande ambassade[87], dont Jacques Gelu, archevêque de Tours, était le chef, fut envoyée vers les rois de Castille et d'Aragon, avec mission de renouveler les alliances entre la France et ces deux puissances. Tandis que Laurent d'Aredia allait trouver Alphonse V[88], l'archevêque de Tours se rendait à la Cour de Castille. Nous n'av6ns pas de renseignements sur les résultats de l'ambassade en Aragon, mais ils ne purent être efficaces, car le 7 mai 1420 le roi s'embarquait pour la Sardaigne ; de là, il devait passer en Corse, où il fit pendant neuf mois le siège de Bonifazio ; puis à Naples, où il débarqua le 6 septembre 1421, et resta jusqu'au mois d'octobre 1423. Quant à la Castille, nous savons que le Dauphin obtint la promesse d'un nouveau secours de vingt galères armées et de soixante gros vaisseaux[89]. Don Juan Enriquez, fils de l'Amirante de Castille, devait prendre le commandement de cette flotte ; mais c'est précisément à cette époque qu'éclata (14 juillet 1420) la révolution dont il a été parlé plus haut : l'infant don Henri s'empara de la personne de Jean II, et le tint pendant plusieurs mois sous sa domination. L'expédition n'eut pas lieu[90]. Désormais, nous l'avons dit, la France ne pouvait plus compter sur l'appui de la Castille.

Charles fut plus heureux du côté de l'Écosse, où il trouva un concours effectif. Une ambassade, à la tête de laquelle était Jean de Cranach, conseiller et maître des requêtes de l'hôtel du Dauphin[91], avait été envoyée au duc d'Albany. Longtemps retardée par les hésitations du régent, qui voulait éviter une rupture avec l'Angleterre, et par les lenteurs apportées à la préparation de la flotte, le départ de l'armée auxiliaire fut en-fi a décidé. Le Parlement avait émis un vote favorable ; des marchands de La Rochelle avaient joint leurs navires à ceux des mariniers castillane vers les derniers jours de septembre n19, six mille hommes, l'élite de la chevalerie et de l'armée écossaise, s'embarquèrent, sous les ordres de Jean Stuart, comte de Buchan, second fils du duc d'Albany, d'Archibald Douglas, comte de Wigton, et de Jean Stuart de Derneley[92]. Trompant la vigilance du gouvernement anglais, qui avait tout fait pour lui barrer le passage[93], l'armée d'Écosse traversa la mer sans encombre, et débarqua à La Rochelle. A peine arrivés, les chefs se rendirent à Bourges près du Dauphin[94], qui leur fit une brillante réception et leur donna de Fiches présents[95]. En partant pour son voyage de Languedoc, Charles emmenait sa garde écossaise et une partie du contingent étranger[96], tandis que l'autre partie — la plus considérable — restait sous les ordres de ses chefs pour prendre part aux opérations militaires dans le nord de la France[97].

Henri V n'avait cessé de compter sur l'alliance bourguignonne : c'est grâce à elle qu'il avait opéré librement sa conquête, et, malgré la réconciliation du duc de Bourgogne et du Dauphin, le roi d'Angleterre continuait à être en rapports assidus avec Jean sans Peur. Le meurtre de celui-ci amena dans ses dispositions un revirement subit : il y vit une occasion, non plus de s'approprier, avec la connivence avouée ou occulte du duc de Bourgogne, une portion du territoire, mais de s'emparer de la couronne elle-même, et il n'eut garde de la laisser échapper. L'histoire de ses négociations avec le nouveau duc, depuis le lendemain de l'événement de Montereau jusqu'à la conclusion du traité d'Arras (2 décembre 1419) ne serait pas sans intérêt ; mais elle n'appartient point à notre sujet, et nous devons nous borner à indiquer rapidement les étapes de la route qui conduisit au fatal traité de Troyes, dernier terme d'une politique qui, à travers des phases diverses, devait inévitablement aboutir à la ruine de la France, sacrifiée par des ambitions et des rancunes personnelles au triomphe des intérêts anglais.

A peine les conférences de Meulan avaient-elles pris fin, que le roi d'Angleterre essayait de reprendre les négociations avec Jean sans Peur. Celui-ci, comme si le traité de Pouilly n'eût été qu'un jeu destiné à masquer ses intrigues déloyales, accueillit les ouvertures d'Henri V, et, au mépris de sa parole, entretint avec lui des intelligences. Mais, avant de rien conclure, il lui fallait atteindre le but qu'il s'était proposé en prêtant une oreille favorable aux propositions du Dauphin et en signant le traité de Pouilly : faire revenir le jeune prince à la Cour, afin de l'avoir à sa discrétion. Les démonstrations apparentes contre les Anglais, le manifeste du 5 septembre où le duc avait placé sa signature à côté de celle du Dauphin, tout ce bruit d'armes, vain cliquetis rappelant la levée de boucliers pour la délivrance de Rouen, ne doivent pas nous donner le change. Il serait puéril de croire à la sincérité du duc : Jean sans Peur continua à jouer son double jeu jusqu'au moment où il expia sur le pont de Montereau une vie de fourberies et de crimes.

Mais, le duc mort, sa politique lui survécut, et, nous l'avons vu, à la tête du parti qui allait livrer la France au roi d'Angleterre, se trouvait la propre mère du prince déshérité. C'est aux pieds même du trône occupé par un Roi en démence que l'impulsion fut donnée : la reine Isabeau était initiée à la politique tortueuse de Jean sans Peur ; à elle revient le triste honneur de l'avoir fait triompher. Le jeune Philippe l'eût-il voulu, il eût pu difficilement empêcher la faction dominante de l'emporter ; mais il ne parait avoir opposé qu'une bien faible résistance[98]. Après un rapide voyage en Flandre, le nouveau duc se rendit à Arras, où, dans une assemblée solennelle, tenue le 18 octobre, l'alliance avec le roi d'Angleterre fut décidée [99]. Le 2 décembre fut signé, à Arras, le traité qui livrait la France à Henri V[100]. Il fut suivi d'un second traité, signé à Rouen le 25 décembre, et visant spécialement le Dauphin[101].

Restait à conclure le pacte qui donnait à Henri V la main, de Catherine de France et devait faire du roi d'Angleterre l'héritier de Charles VI. Les 24 septembre et 24 octobre, des pouvoirs avaient été délivrés par Henri à ses ambassadeurs. Les conférences s'ouvrirent à Mantes le 26 octobre. Après des trêves partielles, conclues le 20 novembre, une trêve générale fut stipulée (24 décembre)[102]. Puis le duc de Bourgogne se rendit à Troyes, où il arriva le 21 mars 1420, en compagnie des comtes de Warwick et de Kent, et des autres ambassadeurs anglais. Dès le 23, les bases du traité étaient arrêtées ; le 9 avril, une convention préliminaire était faite[103]. Le roi d'Angleterre, longtemps attendu, arriva le 20 mai. Le lendemain 21 était signé le traité de Troyes[104].

Par ce traité, le Dauphin était déclaré déchu du trône et déshérité. Considerez, — faisait-on dire au Roi, — les horribles et énormes crimes et deliz perpetrez au royaume de France par Charles, soy disant Daulphin de Viennoiz, il est accordé que nous, ne nostre dit filz le Roy Henry, ne aussi nostre très chier fils Philippe, duc de Bourgongne, ne traicterons aucunement de paix ou de concorde avecques ledit Charles, ne ferons traictier, se non du conseil et assentement de tous et chascun de nous trois, et des trois estai des deux royaumes dessus diz. Le roi d'Angleterre, qui devenait l'époux de Catherine et l'héritier de France, laissait au Roi l'usufruit de son trône ; mais, après le trépas de Charles VI, la couronne et le royaume de France, avecques tous leurs drois et appartenances, devaient, au préjudice du Dauphin[105], passer, à titre perpétuel, aux mains du roi d'Angleterre et de ses héritiers. En outre, comme le Roi était tenu et empesché le plus du temps, et ne pouvait en personne entendre ou vacquer à la disposition des besoignes du royaume, la faculté et exercice de gouverner et ordonner la chose publique était donnée, sa vie durant, au roi d'Angleterre, avec le conseil des nobles et sages dudit royaume. Le titre seul restait donc à l'infortuné Charles VI ; toute l'autorité passait aux mains de Henri V qui, sous le nom de Régent, était le véritable roi[106].

Comment le traité de Troyes allait-il être accueilli en Europe ? Grave sujet de préoccupation pour le gouvernement dont le roi d'Angleterre devenait le chef. Il avait été stipulé que les alliés des deux rois qui, dans le délai de huit mois après la notification faite, voudraient adhérer au traité, y seraient compris. Des lettres furent envoyées à tous les souverains pour le porter à leur connaissance, et solliciter leur adhésion. En Allemagne, où le roi d'Angleterre était en relations intimes avec l'empereur et avec les princes électeurs, la chose ne pouvait souffrir de difficulté[107] : Sigismond donna son approbation par lettres du 31 juillet 1420[108] ; le comte palatin du Rhin, qu'on appelait le duc rouge, s'empressa également de donner son adhésion ; il parut même, avec cinq cents combattants, dans les rangs de l'armée anglaise, au siège de Melun, d'où il envoya un défi au Dauphin[109]. Martin V, malgré les sympathies pour l'Angleterre dont il avait fait preuve jusque-là[110], refusa sa sanction[111]. En Savoie, le duc était gagné par avance[112]. En Espagne, si l'on pouvait espérer un accueil favorable de la part de l'Aragon et de la Navarre, on devait rencontrer une résistance invincible du côté de notre fidèle alliée la Castille : les ouvertures faites, tant de la part du Roi que de Henri V et du duc de Bourgogne[113], furent repoussées, et l'on ne voulut pas entendre parler de la conclusion d'une trêve avec l'Angleterre[114] ; le roi de Navarre, quelque fût sa sympathie, mit pour condition à son adhésion la restitution des comtés de Champagne et de Brie : on le sollicitait à la fois de donner à la France un concours armé, et d'agir en Castille contre le Dauphin, auquel cette puissance se préparait à donner un nouveau secours ; le roi se borna à envoyer des ambassadeurs à la Cour de Jean II[115]. D'autres princes de moindre importance se tinrent sur la réserve, comme le duc de Lorraine, ou se prononcèrent dans un sens opposé, comme le prince d'Orange[116].

En résumé, la situation diplomatique du gouvernement anglo-bourguignon était loin d'être améliorée par ce traité, qui devait, au contraire, lui susciter plus d'un embarras : ce n'était pas trop de l'habileté de Henri V pour en faire accepter les résultats par les différentes cours.

La diplomatie du Dauphin ne restait point d'ailleurs inactive : elle profitait soigneusement des avantages acquis, et ne laissait échapper aucune occasion d'en obtenir de nouveaux. Après l'événement de Montereau, une ambassade française, composée de l'évêque de Léon et de Guillaume de Meulhon, se rendit à Florence, où résidait encore Martin V, pour exposer les faits au pape et rétablir la vérité altérée par les envoyés bourguignons. Cette ambassade, à laquelle se joignit un représentant de la reine Yolande, accrédité près du pape[117], fut entendue dans un consistoire secret tenu le 4 décembre 1419[118]. Elle rappela l'envoi fait par Martin V, alors qu'il était encore à Constance, de deux cardinaux légats qui avaient été le principe de la paix et l'occasion d'éviter beaucoup de maux ; le traité juré entre les mains de l'évêque de Léon, qui était venu en France avec le titre de légat, et exposa tout ce qui s'en était ensuivi. Le pape s'était montré jusque-là aussi favorable au parti bourguignon qu'au roi d'Angleterre. Il avait trouvé de ce côté, relativement aux libertés de l'Église, un grand empressement à se rendre à ses désirs[119], et il était en relations assidues avec la Cour de Bourgogne[120]. Il accueillit d'abord assez froidement l'ouverture des ambassadeurs du Dauphin, et se borna à les charger de dire de sa part à leur maître qu'il l'exhortait à marcher davantage sur les traces de ses ancêtres[121]. Les envoyés du duc de Bourgogne, qui avaient l'oreille du pape, s'étaient efforcé de lui persuader que le Dauphin était en rapport avec Pierre de Luna (l'antipape Benoît XIII), et qu'il voulait lui refuser obéissance[122]. Mais bientôt la lumière se fit, et Martin V cessa d'envisager l'attitude du Dauphin à la seule lumière des récits bourguignons.

Une ambassade anglaise se trouvait alors à Florence, et elle avait obtenu une audience du pape. Martin V consentit à entendre à leur tour les ambassadeurs du Dauphin. Nous avons à cet égard un curieux document, qui nous initie aux dispositions du Souverain-Pontife, et nous révèle le changement opéré dans son esprit : c'est une lettre écrite au Dauphin par le cardinal de Saint-Marc, Guillaume Fillastre, le même que nous avons vu, en mai 1418, activement mêlé aux conférences de La Tombe.

A très hault et puissant prince et mon très redoublé seigneur monseigneur le Regent le Royaume, Dauphin de Vienne.

Très haut et très puissant prince et mon très redoublé seigneur, je me recommande à vous tant humblement que je puis, et vous plaise savoir que vos ambaxadeurs, après leur principale ambaxade expediée, comme nagaires vous ay escript, sont demouré pour respondre aux ambaxadeurs d'Engleterre, desquels je vous ay envoyé en effect la proposicion, et aussy aucuns memoires que j'avoye fait, en Brant ferveur et voulenté de garder l'onneur du Roy et de vous. Mais pour ce que lesdiz Anglois proposèrent assez honnestement, nous autres estant par de ça avons avisé de respondre sans offense tant que faire se povoit, et n'a esté faicte aucune expresse mention du duc de Bourgogne trespassé. Si ont vos dis ambassadeurs, ce mercredy xxvno joue de decembre, en audience pareille qu'avoient eu les Anglois. Et l'evesque de Leon a très solennellement et honorablement, et sans offense, proposé, en monstrant le non droit des A nglois en.France ne en Normandie. et les causes des traictiez non parfais ; et tellement que nostre saint Père et les oyans en ont esté bien contens. Si ont les Anglois repliqué, quant aux convenances rompues, ung pou aigrement, car ils sont de aigre nature. Et l'evesque leur a tiercement respondu. Mais, quant au non droit au Royaume, les Anglois n'ont aucunement respondu. Et quant à Normandie, laquelle les Anglois dient tousjours avoir eue, je ay dit que mais les ducs de Normandie ont eue Angleterre, et l'ont acquise, et estoit honneur au Roy de France avoir le Roy d'Angleterre et le duc de Normandie son vassal, comme les autres vassaulx de son Royaume. Finablement les deux piroposans ont dit que plus m ceste matière ne vouloient parler, et ainsi fut. Si vueilliez, mon très redoublé seigneur, prendre en gré, a :u moins en patience, ce qui a esté fait. Vray est, mon très redoubté seigneur, que il me semble, par la manière des Anglois et par ce que je puis entendre d'ailleurs de ceux qui scevent de leur entencion, que ils tendent à traictié, et par le moyen de Nostre saint Père, et croy que ad ce sont venus, car ils se sentent de present appetissez de gens et de finance, et craignent les Escoz.

Mon très redoubté seigneur, nostre dit saint Père, pour l'onneur de vous, a donné à messire Guillaume de Meulhon, à ceste feste de Noël, l'espée de la chapelle royale, et fait lire la leçon, laquelle chose est accoustumée estre donnée au plus noble estant en Cour.

Mon très redoubté seigneur, Nostre Seigneur vous doint bonne vie et longue prosperité en vos affaires.

Escript à Florence, le XXIXe jour de decembre CCCC XIX.

Vostre humble serviteur

G. CARDINAL DE SAINT-MARC[123].

Tandis que ses ambassadeurs étaient près du Pape, le Dauphin se dirigeait vers le Midi. A son passage à Lyon, il eut une conférence avec Pierre d'Ailly, cardinal de Cambrai, légat du Saint-Siège à Avignon, venu tout exprès pour l'entretenir[124]. Il était à Vienne quand il fut rejoint par l'évêque de Léon et Guillaume de Meulhon, qui lui rendirent compte de leur mission[125] : le pape, malgré les instances de Robert de Saulx, ambassadeur du duc de Bourgogne, avait refusé de déclarer le Dauphin coupable de violation du traité de Pouilly[126]. On a vu par la lettre du cardinal de Saint-Marc l'insigne honneur accordé au représentant du Dauphin.

Le traité de Troyes, loin de favoriser les dispositions de Martin V à l'égard du parti bourguignon, contribua, au contraire, à l'en éloigner, et fut pour lui une occasion de manifester hautement sa désapprobation[127]. Le Dauphin, voulant mettre à profit les sympathies du pape, lui envoya en 1421 un de ses plus notables conseillers, Jacques Gelu, archevêque de Tours. Parti le 29 septembre[128], le vénérable prélat resta en Italie jusqu'au mois d'avril 1422 ; il y fut rejoint par Artaud de Grandval, abbé de Saint-Antoine de Viennois, qui, en se rendant à Rome, avait visité sur sa route les princes du nord de l'Italie[129]. Dans un bref du 2 avril 1422, le pape, répondant à une lettre du Dauphin, apportée par Artaud, exprime son étonnement de ce que Charles se plaignait d'empiétements 1'814 sur ses droits : le pape a toujours poursuivi la pacification ; il a pour le Dauphin une tendre affection ; il n'a jamais fait ce qu'on lui reproche et ne le fera jamais ; loin de nuire au Dauphin, il veut lui venir en aide, avec l'assistance divine, et le regardera toujours comme son fils très aimé[130]. Cette lettre, remise à l'archevêque de Tours, qui retournait en France, fut faite en double expédition : le pape, prévoyant le cas ou Jacques Gelu serait retenu en route, avait chargé l'abbé de Saint-Antoine de porter le même texte au Dauphin.

Martin V avait fait davantage : reprenant ses desseins interrompus de 1418, il avait, au mois de novembre 1421, investi le pieux évêque de Bologne, Nicolas Albergati, de la mission d'aller en France pour tenter d'opérer un rapprochement entre Henri V et le Dauphin[131]. Le pape s'adressa tour à tour à ces deux princes et au duc de Bourgogne, les exhortant à la paix et à la concorde, et insistant sur l'état de l'Europe, les progrès de l'hérésie et les maux de la guerre[132]. L'évêque de Bologne partit le 26 mars 1422[133] ; il était au mois de juillet à Senlis, où se trouvait alors Charles VI[134], et en septembre à Paris[135]. Mais la mort du roi d'Angleterre, survenue sur ces entrefaites (31 août), vint entraver l'accomplissement de sa mission.

Ni les triomphes militaires, ni les succès diplomatiques de Henri V n'avaient pu ébranler l'antique fidélité de l'Écosse à la France. A peine une armée écossaise était-elle débarquée qu'une autre armée était prête à partir, sous les ordres du comte de Mar, amiral d'Ecosse[136]. Déjà le Dauphin faisait ses préparatifs pour le transport des troupes composant ce précieux renfort[137], quand il apprit qu'il fallait y renoncer : des circonstances fortuites retenaient le comte de Mar en Écosse. Charles décida aussitôt l'envoi d'une ambassade. Nous avons deux lettres, écrites par lui au moment où il se dirigeait vers le Midi, qui jettent quelque lumière sur ces relations avec l'Écosse, restées jusqu'à présent dans une ombre presque complète.

CHARLES, FILS DU ROY DE FRANCE, REGENT LE ROYAUME, DAUPHIN DE VIENNOIS, DUC DE BERRY ET DE TOURAINE, ET CONTE DE POITOU, A NOS TRÈS CHERS ET TRÈS AMEZ COUSINS ET ALIEZ LES CONTES DE BUCHAN ET DE VIGTON, SALUT ET ENTIÈRE DILECTION.

Très chers et très amez cousins et alliez, nous avons ordonné aucuns de nos gens pour aller de par nous par devers biaulx cousins d'Albanie et de Douglaz, vos pères, et aussy par devers aucuns autres seigneurs et nobles du pais d'Escoce, pour leur faire certaines requestes de nostre part, teles que saurés par nos diz gens. Et pour ce que nous scavons bien que vos lettres et prières pourront en ce moult proufiter, et que ceste chose touche si avant le reliefvement de ceste seigneurie et requiert si grant celerité comme bien le scavez, nous vous prions et requerrons, très chers et très amez cousins et alliez, que à nostre faveur et pour l'amour de nous, vueilliez sur ce escrire semblablement et transmettre de vostre part aucuns des vostres, c est à scavoir chascun de vous une personne notable avecques nos diz gens, par devers nos diz cousins vos pères, et autres vos parens et amis du dit pays d'Escoce, en leur cordialement exhortant à obtemperer à nostre prière, et venir par deça à nostre aide et secours, comme nous y avons entière et parfaite fiance, et vous nous ferez très singulier plaisir. Et nous vueilliez aussy souventes foiz escrire de vostre estat, ensemble de vos nouvelles.

Très chers et très amez cousins et alliez, Nostre Seigneur vous ait en sa sainte garde.

Escrit à Soinvegné (Souvigny) en Bourbonnois, le XXVIIe jour de decembre CCCC XIX[138].

CHARLES, FILS DU ROY DE FRANCE, ETC. A HAULT ET PUISSANT PRINCE NOSTRE TRÈS CHER ET TRÈS AMÉ COUSIN ET ALIÉ LE CONTE DE MARRE ET DE GARMACH, ADMIRAL D'ESCOSSE, SALUT ET ENTIÈRE DILECTION.

Hault et Puissant Prince nostre très cher et amé cousin et allié, nous avons bien sceu par nostre amé et feal conseiller et maistre des requestes de nostre hostel maistre Jehan de Cranach, et autres nos ambaxadeurs dernièrement envoyez par delà, la bonne voulente et entière affection qu'avez eu et avez à Monseigneur et à nous et à la conservacion de ceste seigneurie, et, comment, en demonstrant par effect vostre bon vouloir, vous estiez apprestez et mis sus, à grant et, belle compaignie, pour venir en ce Royaume à l'aide et secours de mon dit seigneur et de nous contre les Anglois, anciens et communs ennemis des deux Royaumes, et de vous y employer de corps et de chevance, selon ce que promis l'avez ; dont nous vous mercions très affectueusement, et sommes bien contens de vous. Mais, de l'empeschement que avez eu, qui n'est pas par vostre coulpe, comme nous sommes bien informez, avons esté et sommes très desplaisans, car pour la grant fiance que avons en vous, tant pour vostre grant sens et prouesse, comme pour la bonne fortune que avez en guerre, avions entencion, à l'aide des bons parens, vassaulx et subgez de mon dit seigneur et nostres, de vous et des vostres, s'il eust pleu à Dieu que feussiez venu par deça et aussy des autres seigneurs du pays d'Escosse, de livrer en personne bataille aux diz ennemis. Et ce neantmoins, hault et puissant prince nostre très cher et amé cousin et alié, nous sommes fermes en ce propos, et avons toute nostre confiance que, au plaisir de Dieu, lesdiz ennemis seront reboutez à leur confusion. Pourquoy nous vous prions si affectueusement que povons que, en continuant vostre bonne affection et voulenté, vous veuilliez venir par deça le plus test et hastivement et à tout plus grant nombre de gens que presentement pourrez finer, et de ce ne vueillez faillir, saichant de certain que le plaisir et service que en ce feiez à mon dit seigneur et à nous, sommes bien en voulenté de recognoistre vers vous si avant qu'en serez contens.

Hault et puissant prince nostre très cher et amé cousin et alié, Nostre Seigneur soit garde de vous.

Escript à Souvigny en Bourbonnois, le XXIXe de decembre CCCC XIX[139].

Quel que fût le désir du Dauphin de faire partir sans retard son ambassade, la saison était trop avancée pour qu'elle pût prendre la mer. Il fallait des raisons d'une haute gravité pour qu'on se décidât à laisser repartir pour l'Écosse les comtes de Buchan et de Wigton[140], et pour qu'on leur adjoignît un diplomate de l'importance de l'archevêque de Reims, Regnault de Chartres[141]. L'ambassade parait avoir mis à la voile à la fin d'avril 1420[142] ; elle devait faire un long séjour en Écosse.

Le roi d'Angleterre, pour parer le coup qui lui était porté par l'intervention d'une armée écossaise, imagina de transporter son prisonnier en France, avec l'espoir que les Écossais, voyant leur roi dans le camp anglais, n'oseraient marcher contre lui. Jacques Ier était à Troyes lors de la signature du traité du 21 mai ; il parait avoir suivi le Toi d'Angleterre dans la plupart de ses expéditions[143]. Tandis que Henri V agissait en France auprès du roi d'Écosse pour qu'il empêchât ses sujets de prêter leur appui au Dauphin[144], le conseil d'Angleterre entamait des négociations avec le régent Albany pour la conclusion d'une trêve qui devait être renouvelée de deux mois en deux mois[145].

Sur ces entrefaites on apprit la mort du vieux duc d'Albany[146], qui fut remplacé comme régent par son fils Murdac. Autant le père était violent et ambitieux, autant le fils était mou et nonchalant. Le gouvernement anglais s'empressa de tirer parti de cet événement et agit à la fois auprès du roi d'Écosse prisonnier, du nouveau régent et des seigneurs écossais.

Ce n'est qu'au mois de janvier 1421 que les comtes de Buchan et de Wigton et l'archevêque de Reims, ayant enfin réussi dans leur mission, reprirent la mer pour retourner en France. Ils débarquèrent à La Rochelle avec une armée de quatre à cinq mille hommes[147]. Le Dauphin, qui s'était avancé à la rencontre des Écossais, les accueillit avec empressement et leur fit à Poitiers une brillante réception[148]. C'est grâce au concours de cette armée que fut remportée la victoire de Baugé (22 mars 1421). Henri V venait de passer en Angleterre. Furieux de l'échec que ses armes avaient subi et de la mort de son frère, le duc de Clarence, il mit tout en œuvre pour détacher l'Écosse de la France ; il fit si bien qu'une trêve fut conclue entre l'Angleterre et l'Écosse[149], et que le comte de Douglas (père du comte de Wigton, l'un des chefs de l'armée auxiliaire) prit l'engagement de passer en France pour servir sous ses ordres[150]. Le roi d'Écosse, qui eut la promesse d'être mis en liberté, consentit à épouser Jeanne Beaufort, nièce du cardinal de Westminster, et donna l'ordre à ses sujets de quitter le service du Dauphin. Mais le comte de Buchan répondit fièrement qu'il ne se croyait pas tenu d'obéir à son roi tant qu'il serait captif et à la merci d'un souverain étranger[151]. Pourtant les négociations entamées par le gouvernement du Dauphin pour obtenir un nouveau contingent de troupes, négociations qui furent poussées assez loin[152], paraissent être restées sans résultat : Charles dut se contenter des auxiliaires que lui avaient amenés Buchan et Wigton.

Henri V n'ayant pu rompre ni l'alliance castillane, ni l'alliance écossaise, fit appel à l'Allemagne. Dans des instructions données en juillet 1420 à des ambassadeurs près du roi de Navarre, il s'était hautement vanté d'avoir l'appui du Saint-Empire[153]. Il sollicita de l'empereur et des princes électeurs une assistance armée[154]. Mais Sigismond était alors absorbé par sa lutte contre les Hussites, pour laquelle toutes les forces allemandes étaient nécessaires[155]. Nous ne voyons pas que la grande ambassade envoyée (janvier 1422) à l'empereur, au comte palatin du Rhin, au duc Henri de Bavière, aux archevêques de Trèves, de Cologne et de Mayence[156], ait produit les résultats que souhaitait le roi d'Angleterre[157]. Henri V frappait d'ailleurs à toutes les portes, car il sollicitait un secours du Portugal[158], et il s'efforçait d'arracher la Navarre à l'influence de la Castille[159].

Il étendit même son action jusqu'en Italie, où il aurait voulu avoir Gènes à sa discrétion. Après avoir vécu, de 1396 à 1409, sous la domination française, la République était retombée dans l'anarchie ; elle avait pour doge, depuis le mois de juillet 1415, un homme de grande valeur, Thomas de Campo Fregoso, qui était parvenu à lui assurer une situation moins précaire. Le roi d'Angleterre se mit en rapports avec le doge, et conclut avec lui un traité au mois d'octobre 1417[160]. Depuis lors les rapports de l'Angleterre et de la République de Gènes avaient été constants[161]. Malgré les efforts que paraît avoir faits le Dauphin[162], il n'y avait donc plus à compter pour la France sur les vaisseaux de la République, qui lui avaient été si utiles dans ses luttes navales contre l'Angleterre. Mais, fidèles au bon souvenir laissé par le gouvernement de Boucicaut, un certain nombre de seigneurs génois étaient restés en France : nous en trouvons dans les rangs de l'armée dauphinoise, au mois de. novembre 1418, et jusqu'en 1421[163]. Enfin un nouveau traité, en date du 29 mai 1421, vint inféoder complètement la République à la cause de l'Angleterre[164]. Celle-ci ne devait pas profiter longtemps du traité : dans le cours de l'année, deux armées milanaises envahirent le territoire de Gènes. Campo Fregoso, se sentant hors d'état de soutenir la lutte, résigna le pouvoir, et s'embarqua (27 septembre) pour les côtes orientales. La seigneurie de Gênes passa aux mains du duc de Milan, dans les conditions qui autrefois avaient été stipulées avec la France.

La ténacité avec laquelle le Dauphin résistait aux assauts de l'Angleterre, l'impossibilité de jouir pleinement des conséquences du traité de Troyes causaient à Henri V un violent déplaisir, dont on trouve la trace dans les documents émanés de sa chancellerie[165]. La victoire de Bauge l'avait rempli de fureur, et ce n'était pas sans indignation qu'il avait vu les côtes anglaises menacées par une flotte espagnole[166]. Ainsi, malgré la situation précaire de l'Écosse, malgré les divisions régnant en Espagne, où se poursuivait une guerre civile à laquelle l'influence anglaise n'était peut-être pas étrangère, le roi d'Angleterre se voyait plus que jamais entravé dans l'exécution de ses desseins ! Saisi d'une pensée de découragement, il se demanda s'il devait pousser plus loin sa conquête. Nous en avons la preuve dans un document postérieur, qui nous révèle les dispositions secrètes de Henri V à cette époque[167]. Reconnaissant que la voie des hostilités était longue, périlleuse, hérissée de difficultés, il confia au duc de Bourgogne et à un petit nombre de conseillers de ce prince qu'il desiroit bien trouver voye et manière convenable de traittier avecques la partie adverse, tellement que ladicte guerre cessast du tout, et formula la demande que, sans sa requeste, mais par l'intermédiaire de Philippe, le duc de Savoie intervînt en faveur de la paix. Il y eut dans ce but, au mois de mars 1422[168], une entrevue entre les deux ducs, à Genève, où Philippe se rendit sous prétexte de visiter son oncle et sa tante. Amédée VIII consentit à envoyer en France des ambassadeurs pour entamer les négociations[169].

Le Dauphin n'avait garde de se priver des avantages diplomatiques qu'il avait su conquérir : il ne cessait d'entretenir d'intimes relations avec la Castille, et la tenait soigneusement au courant de ses progrès. Regnault de Chartres, à peine revenu d'Écosse, fut envoyé en Espagne, avec Guillaume de Quiefdeville, pour annoncer à Jean II la victoire de Baugé. En septembre suivant, Bertrand de Goulard et Quiefdeville reprirent le chemin de l'Espagne. Le texte de leurs instructions nous a été conservé. Ils avaient charge de remercier le roi du bon vouloir qu'il avait toujours témoigné au Dauphin ;  de lui faire connaître les événements favorables à sa cause qui étaient survenus : l'alliance avec le duc de Bretagne, qui avait envoyé son frère Richard au service du Dauphin avec bon nombre de chevaliers et écuyers ; l'espérance que faisait concevoir la venue du nouveau secours d'Écosse ; l'échec de la campagne entreprise par le roi d'Angleterre à son retour en France ; la destrousse du duc de Bourgogne par les troupes campées au delà de la Seine. Ils devaient ensuite requérir l'envoi par terre d'une armée commandée par les cousins du roi, les infants d'Aragon, ou tout au moins par un duc ou un comte, dont les ambassadeurs avaient mission d'assurer le meilleur choix[170]. Ils devaient insister près des infants, et, rappelant les services rendus par la France à la Castille, solliciter l'avance de la première mise de fonds, en offrant à cet égard toutes les garanties désirables. Ils devaient enfin demander au roi de faire signifier à tous ses sujets, alliés et voisins, sa détermination d'aider et servir le Dauphin contre tous, et spécialement contre le commun adversaire de France et de Castille, ses aidans et favorisans, et de manifester son intention que tous lui fissent guerre et s'employassent de toutes manières au recouvrement de son frère et allié le Roy de France, detenu par ledit commun adversaire. S'il était question du retour des galées, il était recommandé aux ambassadeurs de ne point irriter les chevaliers et, écuyers qui se trouvaient sur ces navires, mais d'exprimer le regret que le Dauphin avait éprouvé de ce retour, parce qu'au moment où il avait été effectué, ces galées pouvaient lui rendre de très grands services, en se portant sur les côtes de Normandie, de Picardie ou d'Angleterre[171].

Cet intéressant document, qui nous initie si bien aux relations existant entre les deux puissances, fait d'autant plus regretter la pénurie d'informations de ce genre pour cette période. C'est à grand peine que nous avons pu rassembler les renseignements permettant de suivre le mouvement diplomatique pendant la régence du Dauphin. Il est permis toutefois de constater que, sur le terrain des négociations comme sur le terrain de la lutte armée, une activité féconde avait été déployée, et qu'on avait obtenu d'importants résultats.

Le tableau des efforts tentés sous ce rapport serait incomplet si nous ne nous arrêtions un instant à l'Italie, où le Dauphin, voyant la Castille aux prises avec ses divisions intestines[172], ne tarda pas à chercher des auxiliaires.

Le 2 novembre 1421, Gênes, dont — nous l'avons vu — le roi d'Angleterre avait recherché l'alliance, se donnait au duc de Milan. C'est sur ce prince que le Dauphin jeta les yeux comme pouvant lui offrir un utile concours. Philippe-Marie Visconti, monté sur le trône en 1412, était le frère de l'infortunée Valentine, unie à Louis, duc d'Orléans. Son père, Jean Galeas, dont l'empereur Venceslas avait érigé la seigneurie en duché (11 mai 1395), s'était uni à Charles VI par un traité d'alliance, signé le 31 août 1395[173]. Succédant à Jean-Marie, son frère, qui, après s'être souillé par tous les crimes, avait été massacré, en haine de sa tyrannie, par des gentilshommes milanais, il était parvenu à un degré de puissance qu'aucun prince italien n'avait atteint depuis longtemps. L'empereur Sigismond, qui voulait soumettre les villes de Lombardie à la juridiction de l'Empire, dut y renoncer. Aidé par un habile général, Carmagnola, le duc de Milan avait conquis tout le pays situé entre l'Adda, le Tessin et les Alpes, et imposé sa loi à tous les petits tyrans qui s'étaient partagé les États de son père. Avant que Gènes s'offrit à lui, Parme, Brescia et Cremone avaient passé successivement sous sa domination[174]. Pourtant Philippe-Marie n'avait point les qualités qui font les grands princes craintif, astucieux, indécis parfois, poussé tout ensemble par des aspirations généreuses et par des instincts où se retrouvaient la bassesse et la férocité de son frère, c'était bien le type du souverain italien à l'époque de décadence où se trouvait alors l'Europe[175].

L'histoire ne nous fournit aucun détail sur des négociations entamées par le Dauphin avec le duc de Milan. Nous savons seulement qu'au mois de novembre 1421, Charles engageait les terres de son domaine jusqu'à concurrence de six mille écus d'or, pour faire face à la solde des gens d'armes lombards qu'il se proposait d'envoyer chercher[176]. Au mois de février 1422, Artaud de Grandval, abbé de Saint-Antoine de Viennois, en se rendant en ambassade vers le Pape, visita au passage le duc de Savoie, le duc de Milan et d'autres princes italiens[177]. Artaud était accompagné de Bertrand de Saint-Avit et de Philippe de Grimault, qui avaient mission de ramener le corps de troupes dont il s'agissait[178]. Le duc de Milan se prêta de fort bonne grâce à ce qu'on lui demandait : des auxiliaires lombards ne tardèrent point à passer en France, où nous les trouvons aussitôt dans les rangs de l'armée du Dauphin[179]. Ce fut là le point de départ de relations qui devaient se poursuivre, et aboutir, comme nous le verrons, à la conclusion d'un traité d'alliance.

Ainsi, le gouvernement du Dauphin, pendant ces quatre années de régence, si difficiles, si laborieuses, où il avait eu à lutter contre de nombreux et puissants ennemis, avait réussi à conserver à la France l'amitié et à obtenir le secours effectif de l'Écosse et de la Castille ; il avait désarmé l'hostilité du pape Martin V, entretenu de bons rapports avec le duc de Savoie, et tandis qu'au sud de l'Italie le duc d'Anjou s'aidait du prestige du nom français pour s'assurer la possession du royaume de Naples, le nord de la péninsule s'ouvrait à notre action, et le plus considérable des princes italiens s'apprêtait à devenir notre allié.

 

 

 



[1] Voir Du Mont, Corps Diplomatique, t. II, part. I, p. 68. Ce traité fut confirmé en 1387 et 1390. Archives, J 915, n° 9. Sur les relations de la France avec la Castille, voir une note très érudite, dans l'excellente édition du Victorial, donnée en 1867 par le comte Albert de Circourt et le comte de Puymaigre, p. 556-559.

[2] Voir ce traité dans Du Mont, t. III, p. I, p. 510, et dans Rymer, t. IV, part. I, p. 144.

[3] Il est fait allusion à une alliance entre Henri III et Alphonse X, dans des instructions données par Henri V, le 5 décembre 1416 (Rymer, t. IV, part. I, p. 187) ; elle fut conclue entre 1252 et 1272. Édouard III s'était allié, dans le siècle suivant (janvier 1363) avec Pierre le Cruel ; mais cette alliance avait été éphémère, et l'avènement d'Henri de Transtamarre avait rattaché étroitement la Castille à la France.

[4] Traités de 1290, 1293, 1298 et 1352. Archives, J 915.

[5] Rymer, t. IV, part. II, p. 67-69.

[6] Voir Rymer, t. IV, part. II, p. 93 et 104.

[7] Pouvoir donné, en date du 13 janvier 1416, à Jean Tiptoft, sénéchal d'Aquitaine, et à d'autres, pour traiter avec le roi de Castille. Rymer, t. IV, part. II, p. 152.

[8] Ce traité est de 1411. Il se trouve dans Leibniz, Codex diplomaticus, p. 290-305.

[9] Instructions à John Seynt-John et autres, en date du 15 décembre 1416 (Rymer, t. IV, part. II, p. 187). Leurs pouvoirs sont du 26 janvier 1417 (p. 191).

[10] Sauf-conduit du 17 novembre 1417 à Gaya Gareya, venant en la compagnie de Jean de Saint-Pierre (Léchaudé d'Anisy, Rôles normands, p. 235). John Hull resta en Castille pendant toute cette année (Voir Proceedings and ordinances, t. II, p. 239). Une lettre du d'Angleterre, datée de son ost devant Falaise le 10 février (1418), parle du long séjour fait Castille par John Hull, et ordonne de lui donner une gratification proportionnelle au temps qu'il y a passé (sir H. Ellis, Original letters, 3d series, t. I, p. 64).

[11] Çurita, Anales de la Corona de Aragon, t. III, f. 9 v° et f. 91-92. Voir sur une autre ambassade, envoyée en 1410-1411, après la mort de Martin, le Recueil de Besse, p. 81 et s., et les documents publiés dans la Colleccion de documentos ineditos del Archive general de la Corona di Aragon, t. I, p. 252 et s. Cf. t. X, p. 350 et s., Hist. des Comtes d'Urgel.

[12] Ferreras, Hist. générale d'Espagne, t. VI, p. 190. — On vit aussi, dans l'armée du comte d'Urgel, des capitaines du parti d'Orléans, tels que Remonnet de la Guerre, Bernard de Coaraze et Aimery de Comminges. Histoire des Comtes d'Urgel, dans la Coleccion citée, t. X, p. 494, 505, etc. ; Ferreras, l. c., p. 193.

[13] Çurita, t. III, f. 120.

[14] Recueil de Besse, p. 112.

[15] Çurita, t. III, f. 128 v°. Voir un acte relatif à cette négociation dans le Recueil de Besse, p. 116 ; cf. Discours préliminaire.

[16] Depuis longtemps Jean sans Peur cherchait à entrer en relations avec la Castille : dès le mois d'octobre 1406, il faisait des ouvertures au roi Henri III. Voir le Victorial, p. 347, note 3.

[17] Par lettres de la reine Isabeau, en date du 25 janvier 1418, la somme de 40 l. t. était comptée à Marcos Jehan de Peigne, Alphons et Alvero, serviteurs du comte Damp Frederic, du royamme d'Espaigne, en considération de ce qu'ils avaient apporté à la Reine et au duc des lettres closes, et offert à Isabeau deux mules, un coursier et trois alans (chiens) d'Espaigne. Archives de la Côte-d'Or, B 1593, Compte de Pierre Corremota, f. 164 v°. — Par lettres du 10 février, le duc ordonna le paiement de douze hanaps et une aiguière en argent doré, donnés aux ambassadeurs d'Espagne prenant congé de lui. Mêmes archives, B 1601, Compte de Jean de Noident, f. 177.

[18] Le 27 mars, l'archevêque de Sens donne à dîner aux ambassadeurs de Portugal. Gachard, Archives de Dijon, p. 238. — Le 13 avril, mandat de paiement de la reine Isabeau pour présents faits aux ambassadeurs de Portugal, naguère venus à Troyes vers la Reine et le duc. Compte de Pierre Gorremont, f. 130.

[19] Par lettres de la reine Isabeau, en date du 1er mars, le seigneur de Neufchastel reçut 1.300 l. t., pour l'aider à aler lors à bonne compagnie ès parties et royammes d'Aragon et d'Espaigne par devers les Roys, princes et grans seigneurs desdiz royammes pour faire avecques eulx teles confederacions que bon sera, afin d'avoir d'eulx aide et secours de gens d'armes et de trait à venir en ce royaume en la saison prouchaine d'esté. L'ambassadeur partit le 15 mars, et son voyage dura trois mois ; il était accompagné de Jacques d'Oliveira, dit Diago, chevalier portugais établi à la cour du duc en qualité de conseiller et chambellan. Compte de Pierre Gorremont, f. 226 v° et 232. Cf. La Barre, t. II, p. 130, note a.

[20] Paiement de 2.300 l. t., ordonné par lettres de Charles VI du 20 août 1418, pour don à Diego d'Oliveira, chambellan du duc de Bourgogne, et sur les hais du voyage qu'il devait faire, par ordre du Roi, de la Reine et du duc, par devers les Roys de Castille et d'Aragon, et ailleurs ès parties d'Espaigne, pour aucunes choses touchans grandement le Roy et l'honneur de son Royaume. Compte de Pierre Gorremont, f. 184 et 184 v°, et dans La Barre, t. II, p. 130, note a. — Le 29 décembre, Diago donnait quittance de 200 l. t. que le duc, par mandement daté de Beauvais le 7 janvier 1419, ordonna d'allouer aux comptes de son receveur général. B 11935 ; cf. 1601, f. 119.

[21] Le 17 novembre 1418, Charles VI ordonnait de payer 200 l. t., pour don de vaisselle d'argent fait à Alphonse Conserve et à Ponce Ruys, ambassadeurs venus vers lui de la part du roi de Castille et de Léon. Compte de Pierre Gorremont, f. 112 v°.

[22] Traités de 1326, 1359, 4371, 1390, 1407, dans Brienne, vol. 54.

[23] Robert III, voulant sans doute autant soustraire l'héritier du trône, alors âgé de treize ans, aux embûches de son frère, que lui faire donner une éducation française, l'avait envoyé en France. Il avait été pris sur les côtes de Norfolk par les Anglais, et Henri IV ne s'était tait aucun scrupule de le retenir prisonnier. Lord Brougham écrit à ce sujet : The detention of James may be regarded as one of the darkest passages in the English history. History of England and France, etc., p. 370.

[24] Voir l'acte du 17 mai 1412, dans Rymer, t. IV, part. II, p. 12. Le 7 juin 1417, le roi d'Angleterre donna, pour prolonger la trêve (p. 202), des pouvoirs qui titrent renouvelés le 8 mars 1418 (t. IV, part. III, p. 39). Le roi d'Écosse est ici nommé adversario nostro Scotiæ.

[25] En 1416, après Azincourt, il est question de secours d'Écosse (Ordonnances, t. I, p. 362), et dès le premier appel adressé par le Dauphin, en juin 1418, nous voyons des Écossais figurer dans des montres passées à Bourges (Clairambault, 56, p 4186).

[26] A Patrix Legat, escuier du pays d'Escoce, le IIIe jour dudit mois (janvier 1418), pour le recompenser de ses frais venant dudit pays d'Escoce à Troyes par devers ladicte dame (la reine Isabeau) exposer certaines choses à lui enchargées touchant le bien Roy nostre sire et de son royamme, et pour son retour, XX l. t. Compte de Pierre Gorremont, l. c., f. 235 v°.

[27] Dès le 21 avril 1418, le duc faisait des présents à un évêque d'Écosse qui accompagnait en France, dans leur mission en faveur de la paix, au nom du pape, les cardinaux de Saint-Marc et des Ursins (Collection de Bourgogne, 21, f. 50). Cet évêque était l'évêque de Ross. Les deux cardinaux le laissèrent à Troyes, pour aucunes causes, et on le décida à se rendre en Écosse vers le régent Albany, au nom de la Reine et du duc (Compte de Pierre Gorremont, f. 175, 178 v°, 236 et 239). Mais il ne parait pas avoir entrepris lui-même ce voyage, et il demeura à Troyes, attendant le résultat des négociations entamées. Ce résultat ne tarda pas, car nous lisons dans le Compte de Pierre Gorremont (f. 178) : A R. P. en Dieu Mgr Greffin, evesque de Roz au royaume d'Escosse, et Jehan de Lethe, escuier, ambassadeurs ès parties de France de par le due d'Albanie, gouverneur dudit royaume, C l. t., c'est assavoir à chascun d'eux L l., que la Royne, par ses lettres patentes données le Ve jour de juillet se ecce xviit, leur a donnée de sa grue pour eux aidier à deffrayer des despens qu'ilz ont supporté à Troyes en attendant leur expedicion sur le fait de leur dicte ambassade, et aussi pour avoir et faire envoyer de par ladicte dame et Mgr de Bourgogne certaines lettres adrecans audit seigneur d'Albanie et autres seigneurs d'Escosse touchans le fait de la guerre contre les Anglois. Le 12 août, Charles VI ordonnait de payer à maitre Andry de Habilly, premier secrétaire de Jean de Lethe, conseiller du duc d'Albany, mille l. t., en deducion et rabat de ta somme de XXX mil l. t. que ledit seigneur devoit à icellui duc d'Albanie (f. 132 v°).

[28] Original aux Archives de la Côte-d'Or, B 11937. Voir D. Plancher, Histoire de Bourgogne, t. III, p. 373. Le comte s'était engagé à venir au secours du duc, dès ma en serait requis, avec quatre mille hommes. Jean sans Peur avait aussi été en relations avec le duc d'Albany, auquel il avait fait présent d'une chambre de tapisserie. Laborde, Les ducs de Bourgogne, t. I, p. 96.

[29] Par lettres du 29 septembre 1418, Charles VI ordonna de payer à Patry Legat, écuyer du royaume d'Écosse, la somme de cent livres tournois pour les frais de son voyage en Écosse, pour illec besongner et faire finance de certain nombre de gens d'armes et de trait, et iceulx faire venir et admener par deça pour servir ledit seigneur en sa guerre. Compte de Pierre Gorremont, f. 241 v°.

[30] A maistre Jehan de Queux, conseiller et maistre des requestes de l'hostel du Roy, IIIe l. t. que le Roy nostre dit seigneur, par ses lettres patentes données le XXVII octobre M CCC XVIII, lui a fait bailler et delivrer comptant pour son voyage ouquel ledit seigneur l'envoyoit lors ès parties du royaume d'Escosse par devers le duc d'Albanie et autres seigneurs dudit royaume, pour les prier, requerir et sommer de par ledit seigneur sur aucunes choses touchant ledit fait et aide. Le même jour le Roi fait payer 300 l. t. à Jean Peris, maistre et gouverneur de certain navire, chargé d'amener certaines gens d'armes et de trait que ledit seigneur envoyoit lors querir ès parties d'Escoce pour le servir et lui aidier à l'encontre de Henry de Lencastre, son adversaire d'Angleterre. Même compte, f. 942 v°. — Les relations se poursuivirent d'une façon très active : l'Écossais Petrix Legat, qui avait été attaché par le duc à sa personne en qualité d'échanson, recevait 50 l. t. le 5 novembre, pour aler hastivement ou pays d'Escoce querir des archers (id., f. 264). Le 23 novembre, le duc faisait compter à Jean de la Chambre et Thomas Blanc, du païs d'Escoce, la somme de 30 fr. pour faire certain voyage de par mondit seigneur dont il ne veult estre faicte autre mencion. Le 4 décembre, un de ses valets servants, Philippe Caudebech, accompagnait certaines personnes du pays d'Escoce que le duc envoyait de Pontoise à Bruges. Archives de la Côte-d'Or, B 1601, f. 115 et 118.

[31] Lettre de Jean Caille du 15 juin. Voir aux Pièces justificatives.

[32] Dès 1417, avant l'invasion anglaise ; le duc d'Orléans était en intelligence avec le régent d'Écosse : on a une lettre de Henri V à ce propos, et l'ordre, en date du 1er juin, de transférer le duc à Pontefract. Sir Henri Ellis, Orig. Letters, 1824, t. I, p. 1-2 ; Rymer, t. IV, part. II, p. 201.

[33] Les lettres du Dauphin du 22 mars 1419 nous apprennent qu'à cette date une ambassade écossaise était venue annoncer au Dauphin qu'un secours lui serait donné, et que cette ambassade avait été précédée de l'envoi d'ambassadeurs français en Écosse ; — que, d'un autre côté, Jean d'Angennes et Guillaume de Quiefdeville avaient été envoyés en Castille, où le Dauphin renvoya, à la tin de mars 1419, Bertrand Campion, son conseiller et maitre d'hôtel, lequel rejoignit les deux ambassadeurs et l'amiral de Braquemont qui se trouvaient encore en Castille. Ms. fr. 20977 (Gaignières, 472), f. 257.

[34] En ce temps vinrent deux chevaliers d'Escosse pour servir monseigneur le Daulphin, l'un nommé messire Thomas Quilsarry et l'autre messire Guillaume de Glas. Jouvenel, p. 358. — Le R. P. William Forbes Leith, qui prépare un travail sur les Écossais au service de la France, et qui a bien voulu nous communiquer le résultat de ses recherches, estime qu'un envoi assez considérable de troupes précéda l'arrivée de l'armée envoyée dans l'automne de 1419.

[35] Catherine de Lancastre fut trouvée morte dans son lit le 1er juin 1418, et l'on dit que sa passion pour le vin ne fut point étrangère à cette fin. Voir Ferreras, t. VI, p. 225.

[36] En esto tiempo venieron enbaxadores de Rey de Francia, los quales demandaban ayuda al Rey de naos é galeas contra el Rey de Inglatierra por las alianzas é amistades que entre estos Reges de Francia é de Castilla, habia ; à los quales fué respondido que ya veian como la Reyna era fallecida y el Rey no era de edad, y este negocio era grande é convenia para ello Hamar à Cortes, é para esto debian haber alguna paciencia ; que todos trabajarian como lo mas presto que ser pudiese fuesen respondidos con obra como era razon, segun los debdos é alianzas que entre estos seilores Reges de Francia é Castilla habia. Cronica del señor Rey don Juan segundo, etc., par Fernand Perez de Guzman, p. 155-56. Cette chronique a été réimprimée en 1877 dans la Biblioteca de autores españoles de Rivadeneyra : Cronicas de los reges de Castilla, t. II (gr. in-8°) ; voir p. 375. — Le duc de Bretagne agissait aussi en Espagne : le 6 décembre 1418, il envoyait le sire de Juch et Pierre Hoynart en Navarre et en Espagne (Clairambault, 60, p. 4575). En avril 1419, ses ambassadeurs étaient à la Cour de Castille (Perez de Guzman, nouv. éd., p. 379). Dans des lettres du Dauphin du 16 mars 1420, il est accusé d'avoir detourbé l'armée castillane qui, l'année précédente, devait passer en France. Doat, 161, f. 53.

[37] Il avait rempli dès 1393 une importante mission (Godefroy, Annotations aux historiens de Charles VI, p. 685). Il était connu sous le nom d'Amiral de Castille, et avait pris femme à deux reprises en Castille. Voir la notice que MM. de Circourt et de Puymaigre lui ont consacrée, dans leur savante édition du Victorial, p. 425 note.

[38] Elles ne paraissent pas, d'ailleurs, avoir été sérieuses, car il résulte d'une bulle de Martin V du 8 des ides d'octobre (8 octobre) 1420, que dès 1418, des sommes d'argent avaient été fournies par la Castille au Dauphin. Spicilegium, t. IX, p. 301 ; éd. in-folio, t. III, p. 301.

[39] Dès le 5 mars, Henri V était avisé de ce qui se préparait en Castille et prenait des mesures pour s'opposer au passage de la flotte. Rymer, t. IV, part. III, p. 97. En même temps il faisait construire à Bayonne force navires. Lettre de John Alcetre du 25 avril : Sir Henry Ellis, Original letters, 2d series, t. I, p. 69.

[40] Cronica, p. 161.

[41] Malgré les ambassades envoyées, à diverses reprises, en Angleterre, pour négocier la mise en liberté du roi Jacques, ou prétend que le duc d'Albany n'avait aucun désir de lui voir reprendre possession de son trône, et l'on dit que s'il laissa Henri V opérer tranquillement sa conquête de France, c'est que, pour conserver le pouvoir, il avait fait na honteux compromis avec lui. Voir Rapin Thoyras, Histoire d'Angleterre, t. III, p. 417.

[42] Lettres du duc du 24 mars 1419 ; quittance de Jean le Brun, Alexandre de Remorgny et Patris Legat du 23. Archives de la Côte-d'Or, B 11926. Le mandat de paiement est visé dans le registre B 1601, f. 118 : les trois écuyers sont envoyés en Écosse, en ambassade par devers certaines personnes dont mon dit seigneur ne veult autre declaracion estre faicte.

[43] Et ce jour Monseigneur donna à disner à ung evesque et deuz escuiers ambassadeurs d'Escoce... Ils séjournèrent plusieurs jours, à Provins (Contrôle de la dépense de l'hôtel du duc, Archives de la Côte-d'Or, B 324. Communication de M. Garnier). Ces ambassadeurs étaient Guillaume, évêque d'Orkney, Jean Salberch, chevalier, et Richard de Langlandis, secrétaire du comte de Mar. Les comptes mentionnent en outre maître Robert Gredin et Robert Forest : mandements du duc en date du 28 avril 1419. L'évêque d'Orkney séjourna durant seize jours à Provins (B 1601, f. 53 v° ; 1602, f. 180). En outre, le 11 mai 1419 le duc faisait payer 200 fr. à Laurent de Baton, a escuier du pays d'Escoce, nagaires venu de par le duc d'Albanye (B 1601, f. 47). v A ce moment on comptait si bien à la Cour de Charles VI sur no secours d'Écosse que, le 11 avril 1419, des envoyés du duc de Bourgogne, venus à Tournai réclamer le paiement de la rente de 6000 livres due par la ville, déclarèrent que le produit devait être affecté à payer les Écossais qui s'offrent a venir servir le Roi. — Extraits analytiques des Registres des Consaux, t. I, p. 176.

[44] Archives de Tours, Registres des Délibérations, vol. I, part. III (non paginée), au 12 avril 1419, et part. IV, f. 52 v°. Cette ambassade était conduite par Bertrand Campin, qui partit ensuite pour la Castille.

[45] Compte des gens d'armes et de trait employés par le Dauphin, ms. fr. 7858, f. 361. Cf. Clairambault, 65, p. 5021, et Pièces originales, 266 : BEL.

[46] Quittances de Guillaume Bel, écuyer du pays d'Écosse, et de Thomas de Ston (Seton) écuyer du pays d'Écosse, capitaines d'hommes d'armes et d'archers à cheval du pays d'Écosse, employés à la garde de la personne du Dauphin. Dom Villevieille, Titres originaux, vol. 3, n° 118 ; Clairambault, vol. 40, p. 3003.

[47] Archives de la Côte-d'Or, B 1598, f. 236 v°. Cf. La Barre, t. I, p. 214.

[48] Voici quel était le contingent militaire fourni par la Castille : Cum quatuor milibus marinariis et balistariis, ac ducentis armigeris et capitanis, triginta novem militibus patronis. Le capitaine était tenu de prêter serment au Roi de France et de se trouver avec toutes ses forces, dans l'espace de dix jours, à l'ile de Belle-Isle. Le paiement des 119.400 fr. devait s'effectuer dans un délai de quatre ans. Ms. fr. 20977, p. 257.

[49] Ferreras nous apprend que don Diego de Anaya, archevêque de Séville, et don Rodrigo Pimentel furent envoyés en France (t. VI, p. 231).

[50] Hun nostre balener arme a pris hun clerc et escrivein du Roy de Castele et de sa armee qui a empris à fere contre vous et contre tous les vostres. Ovecque lequel clerc avons troube le ordenance de le dicte armee, c'est assavoir que ledit Roy de Castele arme XL nefs et a mande az geans d'icelles que à my tout (mi-août) debot à Bele Ysle, et illuecques demourent diz jours, et recevent dedanz lez geans qui (sic) vostre adversaire de France et le Daufin leur remetra, e de illuecque encore fassent guerre morfal ; et s'en aient en Escosse et illuecques recevent dedens leurs nefs tous lez geans d'armes qui dedans voudront entrer et aient en France contre vous... Et en otre fumez avisez et enfermes plenement que le dit Roy de Castele est en prepons de metre le siege en ceste vostre citee. Lettre du 22 juillet, dans Rymer, t. IV, part. III, p. 128. Il est à remarquer que, dans les instructions dont le clerc était porteur, et qui furent saisies, il était stipulé qu'ils ne fassent guerre ni dommage à la terre du duc de Bourgoigne, pour mandement que vostre adversaire ni le Daufin leur fassent.

[51] Lettres du régent Bedford, au nom du roi, en date des 12 et 24 août 1419. Rymer, l. c., p. 131.

[52] Sir Henry Ellis, Original Letters, 2d series, t. I, p. 71. Cet agent faisait savoir en même temps que le roi d'Angleterre pouvait compter sur dix ou douze vaisseaux catalans armés, s'il le désirait.

[53] Et fait tant grant dommage, écrivaient le maire et la commune, que ne se reperaroit pour cent mile libres d'exterlinx. Rymer, p. 132.

[54] Don Fadrique, comte de Transtamarre. Voir Çurita, t. III, f. 144 v°, et le Victorial, p. 491.

[55] Lettre du 5 septembre. Rymer, p. 132.

[56] La duchesse de Bourgogne ne s'en alarmait pas moins : le 29 novembre 1419, elle écrivait à la dame de Champdivers, pour la prier de lui faire part des nouvelles que son fils Henri lui avait mandées sur l'action des Espaignols contre les Anglois. Collection de Bourgogne, 57, f. 162.

[57] Voir Jouvenel, p. 374-75, et Religieux, t. VI, p. 398. C'est à tort que M. Valet (Histoire de Charles VII, t. I, p. 214-16) rattache cet événement à l'ambassade de Jacques Gelu, dont il sera parlé plus loin, car il est antérieur : l'archevêque quitta Tours le 19 janvier ; or le 24, le Dauphin, étant à Lyon, donnait une récompense au messager qui lui apportait la nouvelle de la victoire. Chartes royales, XIV, n° 5.

[58] Voir Ferreras, t. VI, p. 233 et s. Le Victorial contient (p. 479 et s.) d'intéressants détails sur cette révolution de palais.

[59] Il avait épousé Marie de Bourgogne en mai 1401.

[60] On voit par le Deuxième Compte de Jean Fraignot que le duc envoya à Amédée VIII les évêques de Langres et de Bayeux, avec mission de le requérir de se mettre en armes pour le service du Roi contre les Anglais. Extraits dans Collection de Bourgogne, vol. 63, f. 119 v°.

[61] Des seigneurs savoisiens servaient en Bourgogne sous les ordres des lieutenants du duc. Voir Collection de Bourgogne, 57, f. 129 et 308.

[62] Nous voyons la duchesse de Bourgogne s'informer près du duc de Savoie, à la fin d'octobre, si les ambassadeurs envoyés par lui au Dauphin étaient de retour, et quel avait été le résultat de leur ambassade, afin d'en informer son mari. Collection, de Bourgogne, 57, f. 307. — En février 1419, Guy de Bar et Jacques de Courtiambles furent envoyés de Provins par Jean sans Peur au duc et à la duchesse de Savoie. Archives de la Côte-d'Or, B 1598, f. 188 v°.

[63] Cette ambassade est mentionnée dans le document cité dans la note suivante. — L'évêque de Saint-Papoul repassa par Lyon le 7 juin. Registres des délibérations, BB I, f. 79 v°.

[64] Instructions de la Reine de Sicile à messire Louis de Montjoye, messire Antoine Vezon, messire Jehan Podaire et maitre Pierre Franchome, envoyés au duc de Savoie, 14 mars 1419 (Archives, J 291, n° 15). Il y a plusieurs autres pièces relatives à cette négociation particulière, qui se termina par un accord ratifié par Yolande et son fils à Aix, le 26 octobre 1419 (id., ibid., n° 16-21).

[65] Le 25 mars 1419, le duc de Savoie avait auprès de lui Jacques de Courtiambles, seigneur de Commarieu, et Guy de Bar, qui revinrent à plusieurs reprises à sa Cour. Collection de Bourgogne, 57, f. 309 ; Archives de la Côte-d'Or, B 1602, f. 181 v° et 191 v°. — Le 3 novembre, Jean d'Occors, dit Mocorsquin, et Le Moine de Neuville, l'un et l'autre chambellans du duc de Bourgogne, recevaient 140 fr. pour avoir été en ambassade près d'Amédée (Archives de la Diana ; communication du comte de Poncins, président de la Diana). La duchesse de Bourgogne était sans cesse en correspondance avec le duc et la duchesse de Savoie (Collection de Bourgogne, 57, f. 127, 131, 209, etc., et D. Plancher, t. III, p. 509).

[66] Ces ambassadeurs séjournèrent à Provins du 30 avril au 8 mai. D. Plancher, Histoire de Bourgogne, t. III, p. 509.

[67] L'évêque de Saint-Papoul fut renvoyé à ce moment à la Cour de Savoie. Il partit de France le 30 septembre, et était encore près du duc dans les premiers jours de novembre. Archives de Lyon, AA 22, f. 16 ; BB I, f. 90.

[68] Le duc reçut à Châlons-sur-Marne, entre le 10 et le 21 mars 1420, Philibert Andrenet, ambassadeur d'Amédée VIII, venu dans ce but. La Barre, t. I, p. 234.

[69] Sic, dans la copie sur laquelle nous faisons cette transcription.

[70] Copie moderne, ms. fr. nouv. acq. 1001, f. 12. — La pièce, qui était évidemment signée, ne porte point de signature dans cette copie.

[71] Nous voyons le duc de Savoie conclure avec le duc de Bourgogne un traité, signé à Paris le 14 décembre 1420, relativement aux entreprises de gens de guerre des deux pays. Bianchi, Le materie politiche relative all' estero degli archivi di stato Piemontesi, p. 95.

[72] En se rendant auprès de Martin V, au commencement de 1422, l'abbé de Saint-Antoine, ambassadeur du Dauphin, passa par la Cour de Savoie. En mai suivant, des ambassadeurs d'Amédée traversèrent Lyon, se rendant près du Dauphin. Archives de Lyon, Registres des délibérations, BD I, f. 156 v°.

[73] Du 29 mars au 4 avril 1422, le duc reçut à Genève la visite du duc Philippe. Chastellain, t. I, p. 293. Voir, sur l'intervention armée des seigneurs savoisiens, Guichenon, t. I, p. 460, et Histoire de Bourgogne, t. IV, p. 49-51.

[74] Vallet, Histoire de Charles VII, t. I, p. 81, note 3, d'après Archives royales de Munich.

[75] Voir Lecoy de la Marche, René d'Anjou, t. I, p. 53-56.

[76] Lecoy de la Marche, René d'Anjou, t. I, p. 57-59.

[77] Elle avait épousé successivement : 1° André de Hongrie, qu'elle étrangla en 1345 ; 2° Louis de Tarente, mort en 1362 ; 3° Jacques d'Aragon, mort en 1375 ; 4° Othon, duc de Brunswick.

[78] Voir Lecoy de la Marche, René d'Anjou, t. I, p. 13-14.

[79] Il était né le 25 septembre 1403, et était par conséquent un peu plus jeune que le Dauphin Charles.

[80] Dernière représentante de la maison française de Sicile, elle était petite-nièce de la première Jeanne par sa mère Marguerite de Duras, dont la mère, Marie de Sicile, était sieur de Jeanne. Par son père, elle était cousine de Jeanne, mais à un degré un peu plus éloigné.

[81] Mariée à trente-quatre ans avec Guillaume, duc d'Autriche, puis une seconde fois, à quarante-six ans, avec Jacques de Bourbon, comte de la Marche (10 août 1415), elle tenait son mari emprisonné, et vivait avec ses favoris.

[82] Elle avait fait remettre à Martin V toutes les possessions du Saint-Siège, usurpées par Ladislas. Sismondi, Hist. des républiques italiennes, t. VIII, p. 289, d'après Giornali napoletani, dans Muratori, t. XXI, col. 1083.

[83] Il avait été question de l'adoption du duc de Bedford, frère de Henri V, comme on le voit par un acte du 12 mars 1419, dans Rymer, t. IV, part. III, p. 98. En mars 1420, Jeanne était encore en relation avec Bedford (p. 159).

[84] Cet acte est publié en partie par M. Lecoy de la Marche, René d'Anjou, t. II, p. 211-13.

[85] Voir Sismondi, Histoire des républiques italiennes, t. VIII, p. 296 et s.

[86] Nous avons trouvé, dans un manuscrit récemment entré à la Bibliothèque nationale (Fr., nouv. acq., 1001, f. 4), et qui nous a déjà fourni de curieux documents, la lettre suivante :

A TRÈS HAULT ET PUISSANT PRINCE LE ROY D'ARRAGON, MON TRÈS CHER ET TRÈS AMÉ COUSIN, CHARLES, FILS, ETC., RÉGENT, ETC., SALUT ET ENTIÈRE DILECTION. — Très hault et puissant prince, le grant et continuel desir que j'ay de scavoir au vray de vostre estat et santé me fait escrire devers vous. Si vous prie et requierre bien chièrement que vostre plaisir soit de m'en acertener par vos gracieuses lettres le plus souvent que vous sera opportunité, car d'en oir en bien me sera singulier esjouissement et plaisir, et se de moy vous plaist oir, je suis, la grace de Dieu, sain et en bon point, comme ce et autres nouvelles de par deça pourrez plus à plain scavoir par mes amez et feaulx chambellans messires François et Jehan de Villenove, vos chevaliers, qui presentement se trayent devers vous, lesquels en faveur des grans et bons services qu'ils m'ont fait par de ça vous recommande tant que je puis. Très grant et très puissant prince, je prie Nostre Seigneur qu'il vous doint bonne vie et longue. Escript, etc.

[87] Elle se composait de l'archevêque de Tours, de Robert Dauphin, évêque de Chartres, de Pierre de Chantelle, confesseur du Roi, du sire de Pesteil, de Guillaume Bataille et de Laurent de Redya (lettres du Dauphin des 15, 18 et 25 janvier), et avait pour objet, disent les lettres, d'entretenir et, se mestier est, de renouveler les aliances que mondit seigneur le Roy et mondit seigneur le Regent ont avecques lesdis Roys de Castelle et d'Aragon. Clairambault, vol. 3, p. 51 ; 8, p. 407, et 40, p. 2983.

[88] Lettres du 15 janvier 1420.

[89] Voici en quels termes Jacques Gelu rend compte de cette mission dans son autobiographie : A. D. Millesimo quadringentesimo decimo none, in januario, recessi a Turonia et ivi in Hispaniam pro petendo succursum a serenissimo rege Castelle prestandum domino meo illustrissimo regenti Dalphino ; quod obtinui. Promisit enim juvare de viginti galeis amatis et LX grossis navibus munies omnibus ; quibus seu quorum hominibus solvil rex prefatus stipendia de suis pecuniis pro tribus mensis et panem pro quatuor. Fuitque constitutus capitaneus ilote seu annate prœdicte admiraldus Hispanie. Ivi per mare et redivi per terrant, sains et incolumis, pestante eo qui mari et terrai dominatur, cujus dictis subserviunt universa, applicuique Turoniam sexta junii, A. M. quadringentesimo vigesimo, prestante Altissimo, cui sit taus et honor in sæculorum secula. Amen. — Vita Jacobi Gelu, apud Marlène, Thesaurus novus anecdotorum, t. III, col. 1950.

[90] En este tiempo el amirante Don Alfonso Enriquez vino alli de Santander donde habia estado por despachar la flota quel Rey embiaba en ayuda al Rey de Francia (c'est-à-dire le Dauphin), en la quai embié por capitan general à Juan Enriquez, su hijo bastardo, é no fué code bien aposentado é aposentése en San Francisco é no estuvo ende mas dè tres dies poque el Infante no consentia que ningun grande alli estuviese salvo los que conoscidamente vran de su parcialidad. Perez de Guzman, p. 174 ; nouv. édit., p. 389. Cf. Ferreras, t. IV, p. 236-241. Il est question de l'envoi de cette flotte dans les Registres du Parlement de Poitiers, à la date du mois de juin 1434. X1A 9200, f. 240 v°.

[91] C'est ce qui résulte d'une lettre du Dauphin au comte de Mar, reproduite plus loin.

[92] Les chefs de l'armée d'Écosse n'étaient point encore partis le 21 septembre (Voir Stuart, Genealogical History, p. 115 ; cf. Rymer, t. IV, part. III, p. 131). La date de leur arrivée est établie par le Compte de l'écurie (KK 53, f. 5), qui nous montre le comte rie Wigton et les autres seigneurs écossais à la Cour, à la fin d'octobre ; le nombre des Écossais est fixé d'une manière précise par des lettres du Dauphin en date du 20 décembre 1419, ordonnant le paiement à deux marchands rochelais des frais supplémentaires occasionnés par le long séjour des 'haires envoyés en Écosse et par la nourriture des 6.300 Écossais pendant quinze jours (Chartes royales, XIV, n. 3). — Les historiens écossais n'ont que des notions incomplètes et inexactes sur ce secours. Ils parlent de l'envoi en Écosse du duc de Vendôme (lisez comte), lequel était alors prisonnier en Angleterre. Voir Patrick Fraser Tyller, t. III, p. 190. Tout ce qu'on a dit, d'ailleurs, à ce sujet, repose sur ce passage d'un chroniqueur contemporain : Scripsit etiam rex Franciæ D. Rob. duci Albaniæ, gubernatori Scotiæ, pro subsidio virorum armatorum virtute confæderationis regnorum contra regem Henricum quintum Angliæ regnum Franciæ tunc inquietantem. Qui, consilio trium statuum convocato, niisit Francim secundo genitum suum inclitum militera Juliannem Stewart, comitem de Buchain et carnerarum Scotiœ, cum ingenti multitudine militum et armigerorum ad numerum 7000. Qui quam gloriose pro tempore quo illic stetit, se habuit, Francorum laudabiles fassiones eumdem ad plenum prœconizant... Johannis de Fordun, Scotichronici continuallo e Waltero Bowero, t. IV, p. 1207, de l'édition de Th. Hearne. C'est Hector Boece (Scotorum Historia a prima gestis origine) qui, le premier, a parlé du comte de Vendôme comme ayant été l'ambassadeur envoyé (éd. de 1574, in-fol., f. 343) ; il a été suivi par Lesley (De Origine, moribus et rebus gestis Schotorum, 1578, p. 269), et par Buchanam (Rerum scoticarum Historia, 1582, f. 107).

[93] Voir lettres des 12 et 24 août 1419, dans Rymer, t. IV, part. III, p. 131.

[94] Le Compte de l'écurie établit que le Dauphin était à Bourges du 24 au 28 octobre, et fournit la preuve que c'est à cette date qu'eut lieu la réception.

[95] On a deux lettres du Dauphin, en date du 13 février 1420, ordonnant de payer à Jean Louvet et à Guillaume d'Avaugour une somme de six cents livres à chacun, pour icelle sonune employer et convertir en achat de vaisselle d'argent par lui fait et en recompensacion de celle que naguières, lorsque nos très chiers et amez cousins les comtes de Bouquin et de Vington et autres seigneurs en leur compaignie, tous du pais d'Escoce, vindrent par devers nous en nostre ville de Bourges, nous feismes prendre de lui pour icelle donner et departir de par nous à nos dia cousins et aus diz gentilshommes de leur compaignie. Pièces originales, vol. 152 et 1763 : AVAUGOUR et LOUVET. — Par mandement du 29 octobre 1419, le Dauphin ordonnançait le paiement d'un cheval donné au comte de Wigton (KK 53, f. 2 v° et 5). Un cheval fut également donné au comte de Buchan avant le départ du prince pour le Languedoc (quittance du 27 mai ; id., ibid., f. 8 v°). Au retour du Midi, nouveau présent du même genre aux comtes de Buchan et de Wigton, et au connétable d'Écosse, Jean Stuart de Derneley (quittance du 12 août, f. 10).

[96] Sy y alla accompagné... aussi des Écossais, qui estoient nouvellement venus en France. Berry, p. 439 ; cf. Raoulet dans Chartier, t. III, p. 171. En février, le prince donna un cheval du prix de mille l. t. (faible monnaie) à Thomas Seton, Écossais, capitaine de gens d'armes. KK 53, f. 6. — Monstrelet (t. III, p. 387) mentionne l'arrivée des Écossais en 1419.

[97] En février-mars 1420, Tanguy du Chastel et Louis d'Escorailles se rendirent en Touraine, où se trouvait l'armée d'Écosse, pour la diriger vers la Picardie. Clairambault, 29, p. 2185 ; 43, p. 3219 ; 35, p. 2595. — L'armée passa par Orléans le 17 mars. Lottin, Recherches sur Orléans, t. I, p. 199.

[98] Dès la fin de septembre, Philippe, qui avait envoyé à Henri V, son secrétaire Georges d'Ostende pour lui annoncer la mort de son père, chargea des ambassadeurs de se rendre près du roi d'Angleterre et de solliciter une trêve. Le 9 octobre Henri V délivrait un sauf-conduit à ses envoyés (l'évêque d'Arras, Lannoy, Champdivers, Chauffeur et Georges d'Ostende). Collect. de Bourgogne, 25, f. 38 v° ; Rymer, t. IV, part. III, p. 134-135. Cf. Monstrelet, t. III, p. 360 ; Chastellain, t. I, p. 70-71. — La trêve ne fut conclue que le 20 novembre.

[99] Voir Monstrelet, t. III, p. 360 et s. ; Chastellain, t. I, p. 77 et s. ; Chron. anon., t. VI, p. 282. Il y a dans la collection Moreau, vol. 1425, de curieux documents relatifs aux décisions prises à Arras. Ils ont été analysés par M. Kervyn de Lettenhove dans les notes de son édition de Chastellain.

[100] Rymer, t. IV, part. III, p. 140. — Il y a dans la collection Moreau, vol. 802, f. 39 une pièce (en copie moderne), qui est une protestation contre ce damnable traité, pour l'honneur des fleurs de liz et de la couronne de France. Cette protestation est précédée du texte du traité, traduit en français ; elle dut être répandue par les soins des partisans du Dauphin.

[101] Rymer, t. IV, part. III, p. 144. Voir les lettres de ratification du duc, en date du 5 janvier 1420, Rymer, l. c., p. 149, et La Barre, t. I, p. 322.

[102] Rymer, t. IV, part. III, p. 141 ; cf. Religieux, t. VI, p. 386 ; Abrégé français, p. 233, et Monstrelet, t. III, p. 373.

[103] Rymer, t. IV, part. III, p. 164.

[104] Ordonnances, t. XI, p. 86 et s.

[105] Lequel, dit l'abrégé français du Religieux de Saint-Denis, ils privoyent du tout de sa succession paternelle à la couronne et royaume de France, sans autres causes ne occasions, fors pour l'apetit et subornation du duc de Bourgogne. Édition de J. Chartier, t. III, p. 241.

[106] Indépendamment du traité, il y a deux actes du même jour, l'un par lequel Charles VI promulgue la formule du serment à prêter au Roi d'Angleterre, en qualité de Régent da Royaume et d'héritier de la couronne (Ordonnances, t. XII, p. 284) ; l'autre déclarant criminels de lèse-majesté tous ceux qui enfreindront le traité ou qui tiendront à son sujet des propos hostiles (Religieux de Saint-Denis, t. VI, p. 438). Le traité de Troyes fut revêtu, le 6 décembre 1420, de l'approbation d'une prétendue réunion d'États, tenue à Paris, et, le 2 mai 1421, de l'approbation des trois États d'Angleterre (Rymer, t. IV, part. III, p. 192-93, et part. IV, p. 25).

[107] Un chevalier flamand, Heretong van Clux, était accrédité près de l'empereur par Henri V. On a une lettre du jour de saint Vital (28 avril) qui est certainement de cette année et dans laquelle l'ambassadeur rend compte à son maure des dispositions et des faits et gestes de Sigismond (Original letters, publ. by Sir Henri Ellis, 2d series, t. I, p. 78-82). Après le traité de Troyes, Her George et John Stokes furent envoyés en Allemagne par Henri V. Dans une lettre en date du 17 juin, ils rendent compte du début de leur mission. Ils ont présenté les lettres du roi au duc son frère (Louis III le Barbu, comte palatin) et lui ont exposé la paix conclue : the qwych pes as I declarede is mygthy and vertuows, it is fair and graciows and it is mode and amorows. — Le comte est enchanté de la paix ; il va se rendre à Paris avec 4 ou 500 hommes. — Les lettres aux archevêques de Mayence, Trèves et Cologne ont été envoyées. — Ce dernier est prêt à servir le roi à ses propres dépens. — Ils ne savent rien relativement à la venue ni au concours de l'empereur, qui doit être à Prague. Original letters, 3d series, t. I, p. 66-70.

[108] Rymer, t. IV, part. III, p. 186.

[109] Rymer, t. IV, part. III, p. 187. — Sur la présence de ce prince à Melun et son défi, voir Jouvenel, p. 379 ; Berry, p. 439-410 ; Monstrelet, t. III, p. 410, et t. IV, p. 23, et Raoulet, p. 168.

[110] Le Pape est bien accointé et très especialement au Roy d'Angleterre, lit-on dans un document bourguignon relatif aux négociations avec les Anglais. Kervyn, éd. de Chastellain, t. I, p. 84, note (d'après ms. fr. 1278).

[111] C'est ce qui ressort d'un document du temps de Louis XI, publié par Leibniz, Codex juris gentium mantissa, p. 76.

[112] Voir la lettre tout amicale qu'il écrivait le 28 avril 1120 à Henri V. Rymer, t. IV, part. III, p. 169.

[113] Dès le 6 mars 1421, Philippe avait envoyé en bastille Hue de Lannoy. Deuxième compte de Guy Guillebaut, dans la Collect. de Bourgogne, vol. 65, f. 139, et La Barre, t. II, p. 207, note.

[114] Créance des ambassadeurs de France, exposée au roi de Castille au nom du roi d'Angleterre (Du Puy, 223, f. 205) ; Sommations et requêtes faites au roi de Castille par les ambassadeurs du roi de France, considérées les réponses moins suffisantes faites par le roi de Castille aux requêtes des ambassadeurs (id., p. 206) ; Créance des rois de France et d'Angleterre à noble prince Dom Jehan, infant d'Aragon, qui a épousé la fille ainée du roi de Navarre (id., f. 207) ; Créance des ambassadeurs du duc de Bourgogne au roi de Castille, semblable à celle des ambassadeurs du roi (id., f. 207 v°).

[115] Charles VI avait, par lettre missive du 26 avril 1420, invité le duc de Lorraine à se rendre à Troyes, en invoquant le motif suivant : le Roi, disait-il, devait se rendre le 20 à une convention où l'on ne pouvait espérer avoir grand nombre de seigneurs du sang, tandis que le roi d'Angleterre y viendrait sans doute grandement et honorablement accompagnié (Original signé, Collection de Lorraine, vol VI, n° 155). Après la signature du traité, Henri V envoya au duc un de ses conseillers, porteur d'une copie de rade, avec prière de se rendre près de lui. Le duc éluda cette proposition par une lettre en date du 28 mai (Rymer, t. IV, part. III, p. 176) — Henri V écrivit de nouveau au duc de Lorraine le 4 juin 1420, au moment d'aller faire le siège de Sens, pour lui exprimer le regret qu'il ne fat pas venu à Troyes vers beau père, lui demandant instamment de venir le trouver à Villeneuve-le-Roi (Original, Collect. de Lorraine, VI, n° 152). — Nous avons en minute la réponse du duc : Très redoublé et souverain seigneur, écrivait-il de Nancy le 8 juin suivant, plaise vous savoir que tantost après le departement de mes conseillers pour aller vers vous, je chu conseil et advis de la guerre que de present ay de faire mon mandement pour tirer sur mez ennemis et gesir aux champs ; lequel mandement et autres ordonnances ay fait et suis prest ; et ne le puis bonnement laissier ne m'en deporter, car de present est saison et n'y porroie recouvrer. Pour laquelle chose ne puis pour present, en manière que soit, aller vers vous. Si vous plaise de vostre grace m'avoir pour excusé pour ceste fois (id., ibid., n.153). — Le 12 janvier 1421, en réponse à une sommation de venir vers le roi d'Angleterre le 1er mars, ou au plus tard le 15 mars, le duc répondait encore : Très redoublé et souverain seigneur, très voluntiers je feusse allé vers vous audit jour, mais je suis tellement oppressé de maladie que je ne l'oseroie, en manière que suit entrepainé (id., ibid., n° 154).

[116] Le prince d'Orange était venu au siège de Melun, et fut sollicité de prêter serment d'observer le traité ; il répondit qu'il estoit prest de servir le duc de Bourgongne, mais qu'il fist le serment de mettre le royaume ès mains de l'ennemy ancien et capital du Royaume de France, jamais ne le ferait. Et il s'en retourna en son pays. Jouvenel p. 382. Cf. Berry, p. 440.

[117] Il se nommait Nicolas Perrigaud, et était chanoine d'Angers.

[118] On remarquera que c'est le jour même où le pape donnait l'investiture du Royaume de Sicile à Louis d'Anjou.

[119] Voir l'ordonnance, en date du 9 septembre 1418, par laquelle Charles VI révoque l'édit du mois de mars précédent ; et les lettres des 22 mars et 16 mai 1419 pour la publication et l'exécution de celte ordonnance. Ordonnances, t. X, p. 471 et 511 ; t. XI, p. 3.

[120] En avril 1419, le duc de Bourgogne envoyait au pape Carlo de Busca et Jérôme de Ballard (Collection de Bourgogne, 65, f. 120). Le 29 novembre 1419, la duchesse de Bourgogne faisait partir un messager pour porter au pape des lettres closes dans lesquelles elle le remerciait de certaines choses dont le Saint-Père l'avait informée depuis peu par Jean Cobert, archidiacre de Langres, et le priait de continuer ses bontés à elle et à son fils (Collection de Bourgogne, 57, f. 163).

[121] Voir Lettres des Rois, etc., t. II, p. 355-59.

[122] Id., ibid., p. 353-59. Cf. lettres du 9 septembre 1418.

[123] Ms. fr. nouv acq., 1001, f. 9 v°.

[124] Lettres du Dauphin du 25 janvier, portant don de 500 l. t. au cardinal de Cambrai, pour le récompenser de ses services et en dédommagement des frais de son voyage. Fr. 10881 (Gaignières, 151), f. 25.

[125] Lettres du 8 février portant don de 400 l. t. à Guillaume de Meulhon, en sus des 800 l. reçues par lui. Clairambault, 74, p. 5793 ; lettres du 9 février portant don de 400 l. t. à l'évêque de Léon. Fr. 20883 (Gaignières, 154), f. 73.

[126] Mémoire de Prosper Bauyn, dans La Barre, t. I, p. 234. A cette nouvelle, le duc de Bourgogne demanda la révocation du cardinal protecteur de France auprès du Saint-Siège (probablement Guillaume Fillastre), qui s'était montré favorable au Dauphin. Guillaume de Saulx avait été envoyé à Florence le 24 septembre 1419 (id., t. II, p. 109, note e).

[127] Kervyn, éd. de Chastellain, t. I, p. 84, note (d'après le ms. fr. 1278).

[128] La date est donnée dans l'autobiographie de Jacques Gelu, Thesaurus novus anecdot., t. III, col. 1947.

[129] Acte constatant les mesures prises pour le paiement de cet ambassadeur : 28 janvier 1422. Archives de Grenoble, B 2846. Cf. Gallia Christiana, t. XVI, col. 199.

[130] Lettres du V des Calendes d'avril (25 mars) et du IV des Nones d'avril (2 avril). Originaux, Archives, J 188, n° 82 et 81. Cf. Regeste de Merlin V, LL4a, f. 6 et 44.

[131] On a une lettre (sans date) écrite à ce moment par le pape à l'évêque de Bologne. Regeste, f. 27 v. (3e lettre), et une autre lettre datée du VI des Ides de février : Bollandistes, vol. II de mai, p. 181 ; Vita B. Nic. Albergati, p. 81 ; Raynaldi, ann. 1421, § XXI.

[132] Voir les lettres dans Raynaldi, année 1422, §§ 20 et 21. Cf. Regeste, f. 1.

[133] VII des Calendes d'avril. Sigonius, dans Bollandistes, l. c., p. 182. Nous voyons par les Registres des délibérations de Lyon qu'il passa par cette ville le 17 mai. Archives de Lyon, BBI, f. 156 v°.

[134] Archives, KK 33, f. 61 et 64 v°.

[135] Nous voyons par un acte du 7 février 1429 qu'au mois de juin 1422 Henri V avait envoyé un ambassadeur au Pape. Cf. ms. fr. 4491, f. 13 et 25.

[136] C'est ainsi, croyons-nous, qu'il faut interpréter la lettre du Dauphin au comte de Mar, reproduite plus loin, en la comparant avec le document cité dans la note suivante.

[137] Nous avons trouvé aux Archives nationales, dans les cartons des Accords (X1e 119), des lettres de Charles VII, en date du 21 octobre 1419, portant commission à Guillaume de Lucé, Jean de Contes, dit Minguet, et Jean Merichon, de préparer la flotte nécessaire au transport de la nouvelle armée d'Écosse.

[138] Copie moderne. Ms. fr. nouv. acq., 1001, f. 11 v°.

[139] Ms. fr nouv. acq., 1001, f. 13 v°.

[140] John Stuart de Derneley resta le seul commandant de l'armée d'Écosse. Des lettres du 22 août 1420 mentionnent trois capitaines écossais auxquels est fait un don de 500 livres à chacun ; ce sont Guillaume de Douglas, Thomas Corpatrick, maréchal de l'armée d'Écosse, et Guillaume Duglas. Clairambault, 41, p. 3093.

[141] Sur la mission diplomatique de l'archevêque de Reims, en compagnie des comtes de Buchan et de Wigton, on a des lettres du Dauphin données à Bourges le 20 mars 1420 (à la relation du conseil) et une quittance de l'archevêque, en date du 21 mars. Ms. fr. 20887 (Gaignières, 158), p. 60. On lit dans la Chronique de Raoulet : Et envoya sire Regnault de Chartres... en Escoce, pour avoir encore sescours et souldoyers. Raoulet, p. 172. Cf. Jouvenel, p. 388.

[142] L'archevêque n'était pas encore parti le 20 avril. On a la preuve que, ce jour-là, il se rendait de Blois à Bourges. Ms. fr. 6211, n° 201 et 202.

[143] Berry, p. 439 ; Jouvenel, p. 378 ; Wavrin, t. I, p. 209 ; Douët-d’Arcq, Choix de pièces inédites, t. I, p. 410.

[144] On a un sauf-conduit donné par Henri V à William Douglas de Drumlanrig pour venir trouver son maitre à Corbeil : 30 août 1420. Le même reçut le 7 septembre un sauf-conduit, pour aller vers les parties de Normandie près du roi d'Écosse, et revenir trouver le roi d'Angleterre. Rymer, t. III, part. III, p. 188. — Le cruel Henri V ne craignit pas, pour intimider les Écossais, de faire exécuter vingt soldats de ce pays, faits prisonniers à Melun, sous prétexte qu'ils étaient traîtres et rebelles à leur roi. Scotichronicon, t. II, p. 462.

[145] Pouvoirs donnés le 11 juin à Westminster par le régent Glocester. Rymer, t. IV, part. III, p. 178.

[146] Les historiens écossais ne sont pas d'accord sur la date de la mort du régent Albany. Crawfurd (The lives of the officers of the Coron and State in Scotland, 1726, in-fol., t. I, p. 306) dit que le régent mourut à Stirling le 3 septembre 1419, et il est suivi par Tyller III, p. 191). Le R. P. W. Forbes, si versé dans la connaissance de l'histoire d'Écosse à cette époque, nous a transmis ce fragment d'épitaphe de l'église de Dumferline :

EXCIDIT ROBERTUS . . . . . . . . . .

ANNO MILLENO QUATER C. X. QUE NOVENO.

Nous lisons dans W. Bower (continuateur de Fordun) : Anno Domini 1419, obüt Robertus dux Albaniæ, octogenarius et ultra.

D'un autre côté, Buchanan donne (f. 107 v°) la date du 3 des ides de septembre 1420. Le problème vient d'être résolu par la publication toute récente du tome IV des Rotuli Scaccarii Regum Scotorum, où l'on trouve (p. 310 et s.) le dernier compte du duc d'Albany : Scaccarium... domini Roberti ducis Albanie, comitis de Fyf et de Menteth, ac regni Scocie gubernatoris tenture apud Perth decimo quinto menais Juni cum continuacione dierum, aune Domini millesimo quadringentesimo vicesimo ac gubernacionis sue quinto decimo. On voit, en outre, dans la préface (p. XXXIX), que le duc d'Albany donna une charte à Falkland le 4 août 1420. On est donc en droit de conclure, avec l'éditeur, M. Georges Burnett, que la véritable date de la mort du régent est celle du 3 septembre 1420.

[147] Jouvenel, p. 388.

[148] Archives, KK 53, f. 2 v° et 13.

[149] Monstrelet, t. IV, p. 26.

[150] Voir les lettres de sauf-conduit données (Hovedun, 11 avril) à Archibald, comte de Douglas, et au comte d'Athol ; l'endenture passée à Londres le 30 mai avec Douglas, et le traité de Westminster du 31 mai, stipulant le retour du roi en Écosse dans le délai de trois mois après que les deux princes seraient revenus de leur campagne de France, moyennant la remise de certains otages. Rymer, t. IV, part. IV, p. 24, 30 et 31.

[151] The History of Scotland from the year 1423 until the year 1542, by William Drummond (1655, in-fol.), préface ; History of Scotland, by Tyller, t. III, p. 193. Cf. Boece, f. 344.

[152] Nous apprenons par des lettres du Dauphin, en date du 27 avril 1421 (Archives, J 183, n° 136), qu'à ce moment il était question de faire venir une nouvelle armée d'Écosse, et que des mesures avaient été prises dans ce but. Dans les lettres du 8 mai 1421, rendues en faveur de Louvet, le Dauphin dit, en propres termes, qu'il a fait appoinctier avec nos très eiders et tres amez cousins et alliez les contes de Douglas et de Mar, du pays et royaume d'Escosse, de venir à puissance, ceste presente saison, à nostre aide et secours par deça, à l'encontre desdiz ennemis, moyennant certaine grosse finance qu'il nous convient pour ce baillier et paier, tant pour l'abillement d'iceulx et leurs gens, qui doivent estre en nombre de VI à VIIIm combattus, que aussi pour freter et mettre sus et leur transmettre le navire afferent et convenable pour leur dicte venue (Archives de Grenoble, B 3044, f. 102). Enfin nous voyons, le 17 juin suivant, Guillaume de La Lande, charpentier de vaisseau et bourgeois de La Rochelle, faire son testament en partant pour l'Écosse, où il allait lever des troupes en faveur du Dauphin (communication de M. de Richemond, archiviste de la Charente-Inférieure, au Comité des travaux historiques, juillet 1876 ; Revue des Sociétés savantes, 6e série, t. IV, p. 161).

[153] Les ambassadeurs avaient mission de faire ressortir la grande puissance des rois de France et d'Angleterre, maintenant jointe ensemble, et qui chaque jour, augmente, grâce à leurs alliés, comme l'empereur, le duc de Bavière, qui a épousé la sœur du roi d'Angleterre, le duc d'Autriche, le duc de Brabant, le duc de Lorraine, la Hollande, la Zélande, le Hainaut et les grands seigneurs d'Allemagne. Du Puy, 223, f. 220.

[154] Voir les instructions données par lui, à la date du 17 décembre, en son ost à Saint-Pharon devant Meaux. On y trouve de curieux détails sur les secours que le Dauphin recevait de Castille et d'Écosse : It may aswel be said and ought not to be unknawen, that thay of Castelle as thay of Scotland come in grete nombre into the service of him that clepeth him Dauphine, the kings adversaire, and serve him aswell by water as by land, and be not payed of ber wayes past XX or XXIV francs of feble money for the month, the which money is fable that it passath not a gond english noble a month ; wherefore the king trasleth that now in bis nede the forsaid Elizours, which bene bis friends aud allies, wolde not talle him, alfa lest at bis resonnable costs, no more than strangers men doo to theim that been his adversaires. Rymer, t. IV, part. IV, p. 45.

[155] Voir Monstrelet, t. IV, p. 86, et p. 23-24. — Cf. Aschbach, t. III, passim.

[156] Pouvoirs, en date du 14 janvier 1422, dans Rymer, l. c., p. 48-49. Cf. Proceedings and ordinances, t. III, p. 29.

[157] Il faut noter que deux de ces princes (le comte palatin du Rhin et l'archevêque de Cologne), étaient vassaux et hommes liges du roi. Voir instruction, p. 45. — Sur l'attitude de l'empereur, voir les lettres de Heretong van Clux, dans Rymer, p. 63.

[158] Pouvoirs du 24 janvier. Rymer, l. c., p. 47.

[159] On voit dans un Mémoire pour le Roy de Navarre que, pendant le siège de Meaux, le roi d'Angleterre reprit les négociations entamées après le traité de Troyes, et discuta avec l'aumônier du roi de Navarre les conditions du marché. Du Puy, 223, f. 223 v°-25.

[160] Rymer, t. IV, part. II, p. 193 ; Proceedings and ordinances, t. II, p. 236.

[161] Les 28 novembre 1418 et 27 mai 1419 des sauf-conduits étaient délivrés à des ambassadeurs génois (Rymer, t. IV, part. III, p. 77 et 118) : Le 26 février 1419 un pouvoir était donné à des ambassadeurs pour traiter avec le duc et la République (id., ibid., p. 96). En 1420, le 4 août, nouveau sauf-conduit à des ambassadeurs de la République pour se rendre en France près de Henri V (id., ibid., p. 187) ; enfin un sauf-conduit fut encore délivré le 30 mars 1421 à une ambassade qui vint en Angleterre (id., t. IV, part. IV, p. 18).

[162] Nous avons rencontré dans le ms. fr. nouv. acq., 1001 (f. 8) la pièce suivante, attestant les relations du Dauphin avec la seigneurie de Gênes :

THOMÆ DE CAMPO FREGOSO, DUCIS JANUENSIS, AD CAROLUS DELPHINUM. Illustrissime princeps et excellentissime domine, venit ad Dominationis vestriæ præsentiam spectabilis miles talis. Itaque eamdem oramus quatenus placeat relatibus dieti talis certam adhibere fidei plenitudinem, tamquam nobis, paratis si quidem toto cordis affectu in quolibet augmentum et decus Excellentiæ vestræ fidentia. Data Januæ, a. M CCCC XX, die IIII januari. THOMAS DE CAMPO FREGOSO, DEI GRATIA JANUENSIUM DUX. — Illustrissime principi et excellentissime domino domino duci Aquitaniæ, Dalphino Viennensi.

[163] Philippe de Grimaldi reçoit 200 l. t. le 17 novembre 1418 (Clairambault, 55, p. 4209) ; en décembre 1418, Casan de Aurea, Génois, est prisonnier des Anglais (Rymer, t. IV, part. III, p. 80) ; en 1421, le marquis du Garet, Génois (sans doute des marquis de Caretto), commande à Rougemont, et est pendu lors de la prise de cette place par Henri V (Berry, p. 142).

[164] Pouvoir de Henri V du 1er mai ; pouvoir de Campo Fregoso du 7 février précédent, dans le traité du 29 mai 1421. La ratification du roi est du 26 octobre. Rymer, t. IV, part. IV, p. 28-30 et 42 ; Du Mont, Corps diplomatique, t. II, part. II, p. 155.

[165] Procurante tamen antiquo humanæ inimico naturæ, sunt nonnulli, in profondo malitiæ positi, ut Karolus, Dolphynus Vienniæ se nominans, et sui complices, dicte pacis rupturam totis viribus hanelantes et rebellionis calcaneum, in Dei offensam, ac patris nostri et nostri contumeliam, erigere non verentes, pacis antedictæ gratissima fœdera confringere ac subditus patris nostri et nostros, non sine magna strage Christianorunque sanguinis effusione, invadere in diesque deprædari non desinunt... Pouvoir pour traiter avec le roi de Portugal, l. c., p. 47.

[166] Lettre de Henri V au connétable de l'île de Wight, en date du 19 mars (Proceed. and ord., t. II, p. 362) : Pour ce que nous sumes creablement enformez que nos ennemys espaignolx sont à present en grant nombre sur la meer armez pour la guerre, purpossatz de faire invasion à nostre royalme et en especial en nostre isle de Wyght, etc.

[167] Ce sont des instructions données par Philippe le Bon à ses ambassadeurs envoyés en Angleterre, avant l'ouverture du congrès d'Arras, en avril 1435. Collection de Bourgogne, 99, p. 142.

[168] Il arriva à Genève le 29 mars, et en repartit le 4 avril. D. Plancher, Histoire de Bourgogne, t. IV, p. 49 ; Guichenon, Histoire généalogique de la maison de Savoie, t. I, p 160. — Le 16 mars on savait à Lyon que le duc de Bourgogne devait être prochainement à Genève. Registres des délibérations, BB I, f. 146 v°. Sur ce voyage, voir Chastellain, t. I, p. 293-94.

[169] Ces ambassadeurs passèrent par Lyon le 17 mai. BD I, f. 156 v°.

[170] Voir à ce sujet un pouvoir qui se trouve dans le ms. f. 5024, f. 151.

[171] Ms. lat. 6025, f. 18.

[172] Vers le mois de juin 1121, le roi se décida à prendre les armes pour dompter l'infant don Henri ; celui-ci fut arrêté le 14 juin 1422. Ferreras, t. VI, p. 270-71. Cf. Le Victorial, p. 493-95, notes.

[173] Le texte est dans Leibniz, Codex Diplomaticus, p.259. Leibniz donne aussi (p. 277) un traité par lequel Gabriel-Marie, seigneur de Pise, frère du duc, se déclare vassal de la France (15 avril 1404). Voir, sur les événements qui amenèrent ce traité, le Religieux de Saint-Denis, t. IV, p. 256 et s.

[174] Voir Sismondi, Histoire des Républiques italiennes, t. VIII, p. 305-32.

[175] Vita Philippi Mariæ, auct. Petro Candido Decembrio, dans Muratori, t. XX, col. 1001 et s.

[176] Lettres du 26 novembre 1421. Ordonnances, t. XI, p. 141-42.

[177] La date est fixée par la pièce du 28 janvier 1422, citée plus haut. Archives de Grenoble, B 2846.

[178] Même source. Pour cette mission, l'abbé reçut 4.000 l., Saint-Avit 2.000 l., et Grimault 1.000 l. Ces deux derniers devaient pourchacier et souldoyer gens d'armes et de trait oudit pays (en Italie), pour aler à la nouvelle saison en France ou service de mon dit seigneur. Saint-Avit et Grimault sont désignés dans l'ordonnance du 26 novembre 1421 comme devant aller chercher, ou pays de Lombardie, certaines gens d'armes et targons. On trouve dans le Registre B 3045 plusieurs documents relatifs aux sommes versées pour le paiement de ces troupes (f. 169-171). Le 28 février, Regnier de Bouligny, se trouvant à Romans au cours d'une mission qui lui avait été confiée, recommandait, avant de partir pour le Languedoc, que les 5.000 écus d'or nécessaires au paiement des gens d'armes que devaient amener l'abbé de Saint-Antoine et Bertrand de Saint-Avit, des parties d'Italie, fussent prêts et remis au trésorier du Dauphiné pour être portés à Avignon. B 2825, f. 140.

[179] Le 6 juin 1422, les troupes de Lombardie sont en Dauphiné, prêtes à entrer dans le royaume. Archives de Lyon, BD I, f. 158 v°, et lettre de Groslée, AA 82. Mais déjà des capitaines lombards se trouvaient au service du Dauphin : Borno Cacaran, capitaine lombard, faisait montre à La Charité-sur-Loire le 26 juin 1422 ; il était depuis longtemps en France, car la montre passée à Aubigny le 4 mai, (et non le 14) parait être de 1421, et non de 1422 comme l'indique M. Vallet (t. I, p. 322, note 1), d'après D. Morice. Dès 1421, il avait la qualité de conseiller et chambellan, et le 24 novembre de cette année le Dauphin lui donnait la chatellenie de Cayras en Dauphiné (Archives de Grenoble, B 3044, f. 169).