VIE DE JEANNE D’ARC

Tome II

CHAPITRE X. — BEAUREVOIR. - ARRAS. - ROUES. - LA CAUSE DE LAPSE.

 

 

Au mois de septembre, deux habitants de Tournai, le grand doyen Bietremieu Carlier et le conseiller maître Henri Romain, revenant des bords de la Loire, où leur ville les avait députés auprès du roi de France, s’arrêtèrent à Beaurevoir. Bien que ce lieu se trouvât sur leur route directe et leur offrit un gîte entre deux étapes, on ne peut s’empêcher de supposer un lien entre leur mission auprès de Charles de Valois et leur passage dans la seigneurie du sire de Luxembourg, surtout lorsqu’on songe à l’attachement de leurs concitoyens aux fleurs de lis et si l’on sait les relations déjà nouées à cette époque entre ces deux ambassadeurs et la Pucelle[1].

Fidèle, nous le savons, au roi de France, qui lui avait accordé franchises et privilèges, la prévôté de Tournai lui envoyait messages sur messages, ordonnait en sa faveur de belles processions, prête à tout lui accorder tant qu’il ne lui demandait ni un homme ni un sol. S’étant rendus précédemment tous deux en ambassadeurs dans la ville de Reines pour assister au sacre et couronnement du roi Charles, le doyen Carlier et le conseiller Romain y avaient vu la Pucelle dans sa gloire, et, sans doute, l’avaient tenue alors pour une très grande sainte. C’était le temps où leur ville, attentive aux progrès des armées royales, correspondait assidûment avec la béguine guerrière et avec son confesseur, frère Richard, ou, plus probablement, frère Pasquerel. Aujourd’hui ils se rendaient au château où elle était renfermée, aux mains de ses cruels ennemis. Nous ne savons ce qu’ils venaient dire au. sire de Luxembourg, ni même s’ils furent reçus par lui ; sans doute, il ne refusa pas de les entendre, s’il pensa qu’ils venaient apporter les offres secrètes du roi Charles pour le rachat de celle qui avait été à ses batailles. Nous ne cavons pas l’avantage s’ils purent voir la prisonnière. Il est très possible qu’ils pénétrèrent auprès d’elle, car, le plus souvent alors, l’accès des captifs était facile et tout loisir donné aux passants d’accomplir, en les visitant, une des sept œuvres de la miséricorde.

Ce qui est certain, c’est qu’en quittant Beaurevoir, ils emportaient une lettre que Jeanne leur avait confiée, les chargeant de la remettre aux magistrats de leur ville. Par cette lettre, elle demandait qu’en la faveur du roi son seigneur et des bons services qu’elle lui avait faits, les habitants de Tournai voulussent bien lui envoyer de vingt à trente écus d’or pour employer à ses nécessités[2].

C’est ainsi qu’on voyait alors les prisonniers mendier leur nourriture.

La demoiselle de Luxembourg, qui venait de faire son testament et n’avait plus que quelques jours à vivre[3], pria, dit-on, son noble neveu de ne pas livrer la Pucelle aux Anglais[4]. Mais que pouvait la bonne dame contre le roi d’Angleterre avec l’or de la Normandie et la sainte Église avec ses foudres ? Car si monseigneur Jean n’avait pas livré cette fille soupçonnée de sortilèges, idolâtries, invocations de diables et autres crimes contre la foi, il était excommunié. La vénérable Université de Paris avait pris soin de l’avertir qu’un refus l’exposait aux peines de droit, qui étaient grandes[5].

Cependant le sire de Luxembourg n’était pas tranquille : il craignait qu’en ce lieu de Beaurevoir une prisonnière valant dix mille livres d’or ne fût pas suffisamment à l’abri d’un coup de main des Français ou des Anglais, ou des Bourguignons, et de toutes gens qui, sans souci de Bourgogne, d’Angleterre ni de France, eussent idée de l’enlever pour la mettre en fosse et à rançon, selon l’usage des coitreaux d’alors[6].

Vers la fin de septembre, il fit demander à son seigneur, le duc de Bourgogne, qui possédait belles villes et cités très fortes, de vouloir bien lui garder sa prisonnière. Monseigneur Philippe y consentit, et, sur son ordre, Jeanne fut conduite à Arras, dont les murailles étaient hautes et qui avait deux châteaux dont l’un, la Cour-le-Comte, s’élevait au milieu de la ville. C’est probablement dans les prisons de la Cour-le-Comte qu’elle fut renfermée, sous la garde de monseigneur David de Brimeu, seigneur de Ligny, chevalier de la Toison d’or, gouverneur d’Arras.

Ce n’était guère l’usage, en ce temps-là, de tenir les prisonniers cachés[7]. Jeanne, à Arras, reçut des visiteurs et, entre autres, un Écossais qui lui fit voir un portrait où elle était figurée en armes, un genou en terre, et présentant une lettre à son roi[8]. Cette lettre pouvait être du sire de Baudricourt ou de tout autre, qui, clerc ou capitaine, avait, dans la pensée du peintre, envoyé la jeune fille au dauphin ; ce pouvait être une lettre annonçant au roi la délivrance d’Orléans ou la victoire de Patay.

Ce portrait fut le seul que Jeanne vit jamais fait à sa ressemblance, et, pour sa part, elle n’en fit faire aucun ; mais, au temps si bref de sa puissance, le peuple des villes françaises mettait ses images peintes et taillées dans les chapelles des saints, et portait des médailles de plomb qui la représentaient, observant de la sorte, à son égard, l’usage établi en l’honneur des saints canonisés par l’Église[9].

Plusieurs seigneurs bourguignons et parmi eux un chevalier nommé Jean de Pressy, conseiller, chambellan du duc Philippe, gouverneur général des finances de Bourgogne, lui offrirent un habit de femme, comme avaient fait les dames de Luxembourg, pour son bien, et afin d’éviter un grand scandale ; niais pour rien au monde Jeanne n’eût quitté l’habit qu’elle avait pris par révélation.

Elle reçut aussi dans sa prison d’Arras un clerc de Tournai, du nom de Jean Naviel, chargé par les magistrats de sa ville de lui remettre la somme de vingt-deux couronnes d’or. Cet ecclésiastique possédait la confiance de ses compatriotes qui l’employaient aux affaires les plus importantes de la ville. Envoyé, au mois de mai de la présente année 1430, vers messire Regnault de Chartres, chancelier du roi Charles, il avait été pris par les Bourguignons en même temps que Jeanne et mis à rançon ; mais il s’était tiré d’affaire très rite et à bon compte.

Il s’acquitta exactement de sa mission[10] auprès de la Pucelle et ne redut point, à ce qu’il semble, d’argent pour sa peine, sans doute parce qu’il voulait que le pris de cette œuvre de miséricorde lui fût compté dans le ciel[11].

Ni la prise de la Pucelle, ni la retraite des gens d’armes qu’elle avait amenés ne brisa la défense de Compiègne. Guillaume de Flavy et ses deux frères Charles et Louis, le capitaine Baretta avec ses Italiens et les cinq cents hommes de la garnison[12] se montrèrent énergiques, habiles, infatigables. Les Bourguignons conduisirent le siège de la même manière que les Anglais avaient conduit celui d’Orléans : mines, tranchées, taudis, boulevards, canonnades et ces mannequins gigantesques et ridicules, bons seulement à flamber, les bastilles. Guillaume de Flavy fit raser les faubourgs qui gênaient son tir et couler des bateaux pour barrer la rivière. Il répondit aux bombardes et gros couillards des Bourguignons avec son artillerie, et notamment par de petites couleuvrines de cuivre qui furent d’un bon usage[13].

Si le joyeux canonnier d’Orléans et de Jargeau, Maître Jean de Montesclère, n’était pas là, on avait un cordelier de Valenciennes, artilleur, nommé Noirouffle, grand, noir, affreux à voir, terrible à entendre[14]. Ceux de la ville, à l’exemple des Orléanais, faisaient des sorties malheureuses. Un jour, Louis de Flavy, frère du capitaine de la ville, fut tué d’un boulet bourguignon. Guillaume n’en fit pas moins jouer les ménestrels, ce jour-là, comme de coutume, pour tenir en joie les gens d’armes[15].

Au mois de juin, le boulevard qui défendait le pont sur l’Oise, de mène que les Tourelles d’Orléans défendaient le Pont sur la Loire, fut enlevé par l’ennemi, sans amener la reddition de la place. Pareillement la prise des Tourelles n’avait pas fait tomber la ville du duc Charles[16].

Quant aux bastilles, elles valaient sur l’Oise tout juste ce qu’elles avaient valu sur la Loire : elles laissaient tout passer. Les Bourguignons ne purent investir Compiègne, vu que le tour en était trop grand[17]. Ils manquaient d’argent ; leurs gens d’armes, faute de paye et n’ayant rien à manger, désertaient avec cette tranquillité du bon droit qu’avaient alors, en pareille circonstance, les soudoyers de la croix rouge et de la croix blanche[18]. Le duc Philippe, pour comble de disgrâce, se trouva obligé d’envoyer une partie des troupes du siège contre les Liégeois révoltés[19]. Le 24 octobre, une armée de secours, commandée par le comte de Vendôme et le maréchal de Boussac, s’approcha de Compiègne. Les Anglais et les Bourguignons s’étant portés à sa rencontre, la garnison, les habitants, les femmes leur tombèrent sur le dos et les mirent en déroute[20]. L’armée entra dans la ville. Il fit beau voir flamber les bastilles. Le duc de Bourgogne perdit toute son artillerie[21]. Le sire de Luxembourg, qui s’en était venu à Beaurevoir où il avait reçu l’évêque comte de Beauvais, retourna devant Compiègne à propos pour prendre sa part du désastre[22]. Les mêmes causes qui avaient contraint les Anglais à se partir, comme on disait, d’Orléans, obligèrent les Bourguignons à quitter Compiègne. Mais puisque à cette époque il fallait trouver aux événements les mieux explicables une cause surnaturelle, on attribua la délivrance de la ville au vœu du comte de Vendôme qui avait promis, dans la cathédrale de Senlis, à Notre-Dame-de-la-Pierre, un service annuel si la place était recouvrée[23].

Le lord trésorier de Normandie levait des aides de quatre-vingt mille livres tournois, dont dix mille devaient être affectés à l’achat de Jeanne. L’évêque comte de Beauvais, qui prenait cette affaire à cœur, pressait le sire de Luxembourg de conclure, mêlait les menaces aux caresses, lui faisait briller l’or levé sur les États normands. Il semblait craindre, et cette crainte était partagée par les maîtres et docteurs, que le roi Charles ne fît aussi des offres, qu’il n’enchérît sur les dix mille francs d’or du roi Henri, que les Armagnacs enfin ne finissent par l’emporter à force de présents et ne reprissent leur porte-bonheur[24]. Le bruit courait que le roi Charles, à la nouvelle que les Anglais auraient Jeanne pour de l’argent, manda au duc de Bourgogne, par ambassade, de ne consentir à aucun prix à la conclusion d’une telle affaire, et qu’autrement les Bourguignons, qui étaient aux mains du roi de France, répondraient de la Pucelle[25]. Fausse rumeur, sans doute : toutefois les craintes du seigneur évêque et des maîtres de Paris n’étaient pas tout à fait vaines et il est certain que, sur les bords de la Loire, on suivait très attentivement les négociations, et qu’on cherchait un joint pour intervenir.

D’ailleurs on pouvait toujours craindre un coup de main heureux des Français. Le capitaine La Hire battait la Normandie, le chevalier Barbazan la Champagne, le maréchal de Boussac faisait des courses entre la Seine, la Marne et la Somme[26].

Enfin, le sire de Luxembourg consentit le marché vers la mi-novembre ; les Anglais prirent livraison de Jeanne. On décida de l’amener à Rouen par le Ponthieu, la côte de l’Océan, et le nord de la Normandie, où l’on risquait le moins de rencontrer les batteurs d’estrade des divers partis.

D’Arras elle fut conduite au château de Drugy, oit l’on dit que les religieux de Saint-Riquier la visitèrent en sa prison[27]. Elle fut amenée ensuite au Crotoy, dont le château était baigné de tous côtés par la mer. Le duc d’Alençon, qu’elle appelait son beau duc, y avait été enfermé après la bataille de Verneuil[28]. Quand elle y passa, maître Nicolas Gueuville, chancelier de l’Église cathédrale de Notre-Dame d’Amiens, y était prisonnier des Anglais. Il la confessa et lui donna la communion[29] Et dans cette baie de Somme, morne et grise, au ciel bas, traversé du long vol des oiseaux de mer, Jeanne vit venir à elle le visiteur des premiers jours, monseigneur saint Michel archange ; et elle fut consolée. On a dit que les demoiselles et les bourgeois d’Abbeville l’allèrent voir dans le château où on la tenait renfermée[30]. Ces bourgeois, lors du sacre, songeaient à se tourner français ; ils l’eussent fait, si le roi Charles était venu chez eux ; il ne vint pas, et les habitants d’Abbeville visitèrent peut-être Jeanne par charité chrétienne, mais ceux d’entre eux qui pensaient du bien d’elle n’en dirent pas, de peur de sentir la persinée comme elle[31].

Les docteurs et maîtres de l’Université la poursuivaient avec un acharnement à peine croyable ; avertis au mois de novembre que le marché était conclu entre Jean de Luxembourg et les Anglais, ils écrivirent, par l’organe du recteur, au seigneur évêque de Beauvais pour lui reprocher ses retardements dans l’affaire de cette femme et l’exhorter à plus de diligence.

Il ne vous importe pas médiocrement, disait cette lettre, que, tandis que vous gérez dans l’Église du Dieu saint un célèbre présulat, les scandales commis contre la religion chrétienne soient extirpés, surtout quand il est, par bonheur, advenu que le jugement s’en trouve départi à votre juridiction[32].

Ces clercs, pleins de foi et de zèle pour venger, comme ils disaient, l’honneur de Dieu, se tenaient toujours prêts à brûler des sorcières ; ils craignaient le diable ; mais, sans peut-être se l’avouer, ils le craignaient vingt fois plus quand il était Armagnac.

On fit sortir Jeanne du Crotoy à marée haute et on la conduisit en barque à Saint-Valery, puis à Dieppe, à ce qu’on suppose, et enfin à Rouen[33].

Elle fut menée dans le vieux château, construit sous Philippe-Auguste, au penchant de la colline de Bouvreuil[34]. Le roi Henri VI, débarqué en France pour son couronnement, y était établi depuis la fin du mois d’août. C’était un enfant triste et pieux, que le comte de Warwick, gouverneur du château, traitait durement[35]

Ce château avait sept tours, y compris le donjon, et il était très fort[36]. Jeanne fut enfermée dans une tour qui donnait sur les champs[37]. On la mit en la chambre du milieu, qui se trouvait entre le souterrain et la chambre haute. On y montait par huit marches[38] ; elle occupait tout un étage de la tour qui avait quarante-trois pieds de diamètre en comprenant les murs[39]. Un escalier de pierre y grimpait obliquement. Une partie des ouvertures avant été bouchée, l’on n’y voyait plus très clair[40]. Les Anglais avaient commandé à un serrurier de Rouen, nommé Étienne Castille, une cage de fer où l’on ne pouvait, disait-on, se tenir que debout. Jeanne, à son arrivée, si l’on en croit des propos tenus par des greffiers ecclésiastiques, fut attachée dedans par le cou, les pieds et les plains[41], et on l’y laissa jusqu’à l’ouverture du procès. Un apprenti maçon vit peser la cage chez Jean Salvart, à l’Écu de France, devant la cour de l’official[42]. Mais jamais, dans la prison, personne n’y trouva Jeanne enfermée. Ce traitement, si toutefois il lui fut infligé, ne fut pas imaginé pour elle : lorsque le capitaine La Hire, au mois de février de cette même année 1430, prit Château-Gaillard, près Rouen, il trouva le bon chevalier Barbazan dans une cage de fer dont il ne roulait pas sortir, alléguant qu’il était prisonnier sur parole[43]. Jeanne, au contraire, s’était gardée de rien promettre, ou plutôt avait promis de s’échapper dès qu’elle le pourrait[44]. Aussi les Anglais, qui la croyaient capable de sortilèges, étaient-ils en grande méfiance[45]. Poursuivie par des juges d’Église, elle devait être placée dans les prisons de l’officialité[46], mais les Godons ne laissaient à personne le soin de la garder. Quelqu’un d’entre eut disait qu’elle leur était chère, car ils l’avaient chèrement payée. Ils lui mettaient les fers aux pieds, et lui passaient autour de la taille une draine cadenassée à une poutre de cinq à six pieds. La nuit, cette chaîne, traversant le pied du lit, s’allait tendre à la grosse poutre[47]. De même Jean Hus, en 1415, remis à l’évêque de Constance et transféré à la forteresse de Gottlieben, demeura enchaîné nuit et jour, jusqu’à ce qu’il fût conduit au bûcher.

Cinq hommes d’armes anglais[48], de l’espèce qu’on nommait houspilleurs, gardaient la prisonnière[49] ; ce n’était pas la fleur de la chevalerie. Ils la tournaient en dérision, et elle le leur reprochait ; ce dont ils devaient être trop contents. La nuit, deux d’entre eux se tenaient derrière la porte. Il en restait trois près d’elle, qui la troublaient en lui disant tantôt qu’elle allait mourir et tantôt qu’elle serait délivrée. Personne ne pouvait lui parler sans leur agrément[50].

Au reste, on entrait dans cette prison comme au moulin ; des gens de tout état y allaient voir Jeanne à leur plaisir. Ainsi firent maître Laurent Guesdon, lieutenant du bailli de Rouen[51] et maître Pierre Manuel, avocat du roi d’Angleterre, qui y fut en compagnie de maître Pierre Daron, procureur de la ville de Rouen. Ils la trouvèrent ferrée aux pieds et gardée par des soldats[52].

Maître Pierre Manuel crut convenable de lui dire qu’à coup sûr elle ne serait point venue là si on ne l’y eût amenée. Les gens de bon sens étaient toujours surpris de voir les sorcières et les devineresses tomber dans quelque piège, comme de simples chrétiennes. Sans doute que l’avocat du roi était un homme de bon sens, car il fit à Jeanne des questions qui laissaient voir son ébahissement ; il lui demanda :

— Saviez-vous que vous deviez être prise ?

— Je m’en doutais bien, répondit-elle.

— Pourquoi alors, demanda derechef maître Pierre, si vous vous en doutiez, n’avez-vous pas su vous garder le jour où vous fûtes prise ?

Elle répondit :

— Je ne savais ni le jour ni l’heure où je serais prise, ni quand cela m’arriverait[53].

Un jeune compagnon, nommé Pierre Cusquel, qui travaillait chez Jean Salvart, dit Jeanson, maître maçon du château, put, à la faveur de son patron, s’introduire aussi dans la tour. Il trouva Jeanne attachée par une longue chaîne fixée à une poutre, et les fers aux pieds. Il prétendit, beaucoup plus tard, l’avoir avertie de parler avec prudence et qu’il y allait de sa vie. Il est vrai qu’elle parlait abondamment à ses gardes et que tout ce qu’elle disait était rapporté aux juges. Et il se peut que le petit compagnon Pierre, dont le maître était à la dévotion des Anglais, ait voulu, ait su même la conseiller. On peut le soupçonner aussi de s’être vanté, comme tant d’autres[54].

Le sire Jean de Luxembourg, vint à Rouen et se rendit à la tour de la Pucelle avec son frère, le seigneur évêque de Thérouanne, chancelier d’Angleterre ; sir Humfrey, comte de Stafford, connétable de France pour le roi Henri ; le comte de Warwick, gouverneur du château de Rouen et le jeune seigneur de Macv, qui tenait Jeanne pour très chaste depuis qu’elle l’avait empêché de lui prendre les seins. Et voici le propos que le sire de Luxembourg tint à la prisonnière :

— Jeanne, je suis venu pour vous racheter, si toutefois vous voulez promettre que vous ne volis armerez jamais contre nous.

Ces paroles ne s’expliquent pas suffisamment par ce que nous savons des négociations relatives à la vente de la Pucelle ; elles semblent indiquer qu’à ce moment même le marché n’était pas entièrement conclu ou que du moins le vendeur croyait pouvoir le rompre à sa volonté. Mais ce qu’il y a de plus remarquable dans le propos du sire de Luxembourg, c’est la condition qu’il met au rachat de la Pucelle. Il lui demande de s’engager à ne plus combattre l’Angleterre et la Bourgogne. Il semblerait, à considérer cette clause, qu’il pense maintenant la vendre au roi de France ou à quelque personne agissant pour lui[55].

Cependant l’on ne voit pas que ce langage ait beaucoup inquiété les Anglais. Jeanne n’y ajouta nulle foi.

— En nom Dieu, lui répondit-elle, vous vous moquez de moi. Car je sais bien que vous n’avez ni le pouvoir ni le vouloir.

On affirme que, comme il persistait dans son dire, elle reprit :

— Je sais bien que ces Anglais me feront mourir, croyant, après ma mort, gagner le royaume de France.

Il semble fort douteux qu’elle ait dit que les Anglais la feraient mourir, car elle ne le croyait pas. Tant que dura le procès, elle s’attendit, sur la foi de ses Voix, à être délivrée. Elle ne savait ni quand ni comment la délivrance s’accomplirait, mais elle en était aussi assurée que de la présence de Notre-Seigneur dans le saint-sacrement. Peut-être dit-elle au sire de Luxembourg : Je sais bien que ces Anglais voudront me faire mourir. Puis elle répéta, très courageusement, ce qu’elle avait déjà dit mille fois :

— Mais quand ils seraient cent mille Godons de plus qu’ils ne sont de présent, ils n’auront pas le royaume.

En entendant ces paroles, sir Humfrey dégaina et c’est le comte de Warwick qui lui retint le bras[56]. On refuserait de croire que le connétable d’Angleterre leva son épée sur une femme chargée de fers, si l’on ne savait d’ailleurs que sir Humfrey, ayant, en ce même temps, ouï quelqu’un dire du bien de Jeanne, le voulut transpercer[57].

Pour que l’évêque et vidame de Beauvais pût exercer la juridiction à Rouen, il fallait qu’il y eût à son profit concession de territoire. Le siège archiépiscopal de Rouen était vacant[58]. L’évêque de Beauvais demanda cette concession au chapitre avec lequel il avait eu des démêlés[59]. Les chanoines de Rouen ne manquaient ni de fermeté ni d’indépendance ; il y avait parmi eux plus d’hommes honnêtes que de malhonnêtes ; il y avait des hommes instruits, pleins de lettres, et même de bonnes rîmes. Ils ne nourrissaient ni les uns ni les autres aucunes mauvaises intentions contre les Anglais. Le régent Bedford était chanoine de Rouen, comme le roi Charles VII était chanoine du Puy[60]. Le 20 octobre de cette même année 1430, il avait revêtu le surplis et l’aumusse et distribué le pain et le vin capitulaires[61]. Les chanoines de Rouen n’étaient pas prévenus en faveur de la Pucelle des Armagnacs ; ils accueillirent la demande de l’évêque de Beauvais et lui firent concession de territoire[62].

Le 3 janvier 1431, le roi Henri ordonna par lettres royales de remettre la Pucelle à l’évêque et comte de Beauvais, se réservant de la reprendre par devers lui, au cas où elle serait mise hors de cause par la justice ecclésiastique[63].

Toutefois, elle ne fut pas placée en chartre d’Église, au fond de quelqu’une de ces fosses où, contre le portail des Libraires, dans l’ombre de la prodigieuse cathédrale, pourrissaient les malheureux qui pensaient mal sur la foi[64]. Elle v aurait retrouvé accrus et affinés les supplices et les épouvantes de sa tour guerrière. Le Grand Conseil, en ne la confiant pas à l’officialité de Rouen, faisait moins de tort à l’accusée que de honte à ses juges.

Mis de la sorte en état d’agir, l’évêque de Beauvais procéda avec sa fougue de vieux cabochien, mais non sans art mondain ni science canonique[65]. Pour promoteur de la cause, c’est-à-dire comme magistrat chargé de soutenir l’accusation, il choisit Jean d’Estivet, dit Bénédicité, chanoine de Bayeux et de Beauvais, promoteur général du diocèse de Beauvais. Ami du seigneur évêque, chassé en même temps que lui par les Français, Jean d’Estivet était suspect d’animosité contre la Pucelle[66]. Le seigneur évêque institua Jean de la Fontaine, maître ès arts, licencié en droit canon, comme conseiller commissaire au procès[67]. Il choisit l’un des greffiers de l’officialité de Rouen, Guillaume Manchon, prêtre, pour faire office de premier greffier.

En l’avisant de ce qu’il attendait de lui, le seigneur évêque dit à messire Guillaume :

— Il vous faut bien servir le roi. Nous avons l’intention de faire un beau procès contre cette Jeanne[68].

Pour ce qui était de servir le roi, le seigneur évêque ne l’entendait pas aux dépens de la justice ; il avait un orgueil de prêtre et n’était point homme à faire étendard de sa propre infamie. S’il parlait de la sorte, c’est qu’en France, depuis cent ans au moins, la juridiction inquisitoriale était considérée comme une juridiction royale[69]. Et quant à dire qu’on voulait un beau procès, c’était dire qu’il fallait observer soigneusement les formes et prendre garde à ce que rien de vicieux ne se glissât dans une cause intéressant les docteurs et maîtres du royaume de France et de la chrétienté tout entière. Messire Guillaume Manchon, qui connaissait les termes de pratique, ne pouvait s’y tromper. Un beau procès, dans la langue du droit, c’était un procès régulier. On disait, par exemple : N... et N... ont, par beau procès juridique, trouvé un tel coupable[70].

Chargé par l’évêque de choisir un autre greffier, pour l’assister, Guillaume Manchon désigna Guillaume Colles, surnommé Boisguillaume, comme lui notaire d’Église, qui lui fut adjoint[71].

Jean Massieu, prêtre, doyen de la chrétienté de Rouen, fut institué comme huissier exécuteur[72].

Dans ces sortes de procès, si fréquenta alors, il n’y avait proprement que deux juges, l’ordinaire et l’inquisiteur. Mais il était d’usage que l’évêque appelât, comme conseillers et comme assesseurs, des personnes expertes en l’un et l’autre droit. Le nombre et la qualité de ces conseillers variait beaucoup d’une cause à l’autre. Et il est clair que l’opiniâtre fauteur d’une hérésie très pestilente devait être examiné plus curieusement et jugé d’une manière plus solennelle qu’une vieille âme vendue à quelque petit diable qui ne pouvait grêler que des choux. Pour le commun des sorciers, pour la foule de ces femelles ou muliercules, comme disait certain inquisiteur qui se félicitait d’en avoir fait brûler beaucoup, les juges se contentaient de trois ou quatre avocats d’Église et d’autant de chanoines[73]. Quand il s’agissait d’une personne notable, avant donné un exemple très pernicieux, d’un avocat du roi, par exemple, comme maître Jean Segueut, qui, cette même année, dans cette province de Normandie, avait parlé contre l’autorité temporelle de l’Église, on convoquait une nombreuse assemblée de docteurs et de prélats tant anglais que français et l’on demandait des consultations écrites aux docteurs et maîtres de l’Université de Paris[74]. Or, il convenait de juger la Pucelle des Armagnacs plus amplement et plus solennellement encore, avec un plus grand concours de docteurs et de pontifes. C’est ce que fit le seigneur évêque de Beauvais : il appela comme conseillers et comme assesseurs les chanoines de Rouen, en aussi grand nombre qu’il lui fut possible, et parmi ceux qui se rendirent à son appel on remarque Raoul Roussel, trésorier du chapitre, Gilles Deschamps, qui avait été aumônier glu feu roi Charles VI, en l’an 1117 ; Pierre Maurice, docteur en théologie, recteur de l’Université de Paris, en 1428 ; Jean Alespée, un des seize qui, lors du siège de 1418, étaient allés, vêtus de noir et en belle contenance, mettre aux pieds du roi Henri V la vie et l’honneur de la cité ; Pasquier de Faux, notaire apostolique au concile de Constance, président de la Chambre des comptes de Normandie ; Nicolas de Venderès, qu’un parti puissant portait alors au siège vacant de Rouen ; enfin, Nicolas Loiseleur. Le seigneur évêque appela au même titre les abbés des grandes abbayes normandes, le Mont Saint-Michel-au-péril-de-la-mer, Fécamp, Jumièges, Préaux, Mortemer, Saint-Georges de Boscherville, la Trinité-du-mont-Sainte-Catherine, Saint-Ouen, le Bec, Cormeilles, les prieurs de Saint-Lô, de Rouen, de Sigy, de Longueville, et l’abbé de Saint-Corneille de Compiègne. Il appela douze avocats en cour d’Église ; il appela d’insignes docteurs et maîtres de l’Université de Paris, Jean Beaupère, recteur en 1412 ; Thomas Fiefvé, recteur en 1427 ; Guillaume Erart, Nicolas Midi[75] et ce jeune docteur, plein de science et de modestie, le plus clair rayon du soleil de la chrétienté, Thomas de Courcelles[76]. Le seigneur évêque veut donner au tribunal qui jugera Jeanne l’autorité d’un synode, et, vraiment, c’est un concile provincial devant lequel elle est citée. Aussi bien va-t-on juger en même temps que cette fille, Charles de Valois qui se dit roi de France et légitime successeur de Charles le sixième. Voilà pourquoi s’assemblent tant d’abbés crossés et mitrés, tant d’insignes docteurs et maîtres.

Et pourtant, l’évêque de Beauvais ne s’entoura pas de toutes les lumières qu’il aurait pu. Il consulta les deux évêques de Coutances et de Lisieux il ne consulta pas le doyen des évêques de Normandie, l’évêque d’Avranches, messire Jean de Saint-Avit, que, durant la vacance du siège de Rouen, le chapitre de la cathédrale avait chargé de la célébration des ordres dans le diocèse. Mais messire Jean de Saint-Avit passait, avec raison, pour favorable au roi Charles[77]. Par contre, les docteurs et maîtres de l’Angleterre, résidant à Rouen, qui avaient été consultés dans le procès de Segueut, ne le furent point dans le procès de Jeanne[78]. Les docteurs et maîtres de l’Université de Paris, les abbés de Normandie, le chapitre de Rouen, s’en tenaient très résolument au traité de Troyes ; ils étaient aussi prévenus que les clercs anglais contre la Pucelle du dauphin Charles, et ils étaient moins suspects , c’était tout avantage[79].

Le mardi 9 de janvier, monseigneur de Beauvais convoqua dans sa maison huit conseillers, les abbés de Fécamp et de Jumièges, le prieur de Longueville, les chanoines Roussel, Venderès, Barbier, Coppequesne et Loiseleur.

— Avant d’intenter procès à cette femme, leur dit-il, nous avons jugé bon de mûrement et amplement délibérer arec des hommes doctes et habiles en droit humain et, divin, dont le nombre, grâce à Dieu, est grand dans cette cité de Rouen.

L’avis des docteurs et maîtres fut qu’il fallait qu’il y eût des informations sur les faits et dits publiquement imputés à cette femme.

Le seigneur évêque leur apprit que déjà quelques informations avaient été faites par son ordre et qu’il était décidé à en ordonner d’autres, desquelles il serait ultérieurement rendu compte en présence du Conseil[80].

Il est certain qu’un tabellion d’Andelot, en Champagne, Nicolas Bailly requis par messire Jean de Torcenay, bailli de Chaumont pour le roi Henri, se transporta à Domremy et procéda avec Gérard Petit, prévôt d’Andelot et quelques moines mendiants, à une enquête sur la vie et la réputation de Jeanne. Les interrogateurs entendirent douze ou quinze témoins et entre autres Jean Hannequin[81] de Greux et Jean Bégot chez qui ils logèrent[82]. Nous tenons de Nicolas Bailly, lui-même, qu’ils ne recueillirent aucun fait à la charge de Jeanne. Et, si l’on en croit Jean Moreau, bourgeois de Rouen, maître Nicolas, ayant apporté à monseigneur de Beauvais le résultat de ses recherches, fut traité de mauvais homme et de traître et n’obtint point la récompense de ses dépenses et labeurs[83]. C’est possible, encore qu’étrange. Mais qu’on n’ait recueilli ni à Vaucouleurs ni à Domremy ni dans les villages voisins aucun fait à la charge de Jeanne, voilà qui n’est nullement vrai. Bien au contraire on y ramassa un grand nombre d’accusations contre les habitants en général qui usaient de maléfices et contre Jeanne qui hantait les fées[84], portait dans son sein une mandragore et désobéissait à ses père et mère[85].

Des informations copieuses furent faites non seulement en Lorraine et à Paris, mais dans des pays obéissant au roi Charles, à Lagny, à Beauvais, à Reims et jusque dans la Touraine et le Berry[86], qui fournirent assez pour brûler dix hérétiques et vingt sorcières. On y releva notamment des diableries horribles aux : yeux des clercs, telles que tasse et gants perdus et retrouvés, prêtre concubinaire dévoilé, l’épée de sainte Catherine, l’enfant ressuscité. On en rapporta une lettre téméraire sur le pape et bien d’autres indices de sorcellerie, magie, hérésie et erreurs sur la foi[87]. Ces informations ne furent point insérées au procès[88]. C’était l’usage constant de la sacrée inquisition de tenir secrets et les témoignages et les noms des témoins[89]. En l’espèce, l’évêque de Beauvais pouvait alléguer l’intérêt des déposants qu’il eût trop peu ménagé en publiant les informations recueillies dans les provinces soumises au dauphin Charles. Car, à défaut de leurs noms, leurs dépositions seules pouvaient les faire reconnaître. Au reste, les propos que tenait Jeanne dans sa prison formaient la source la plus abondante d’informations : elle parlait beaucoup et sans prudence.

Un peintre, dont on ne sait pas le nom, vint la voir en sa tour, et lui demanda tout haut, devant les gardes, quelles armes elle portait, comme s’il eût voulu la représenter avec son écu. Dans ce temps-là, on ne faisait guère de peintures sur le vif, si ce n’était de personnes de très haut rang, et le plus souvent dans l’attitude de la prière, agenouillées et les mains jointes. Et si l’on pouvait voir dans les Flandres et dans la Bourgogne des portraits oit ne paraissaient nuls signes de dévotion, c’était en bien petit nombre. Quand on parlait d’un portrait, on songeait naturellement à une personne priant Dieu, la Sainte Vierge ou quelque saint. C’est pourquoi l’intention de faire le portrait de la Pucelle eût été, sans doute, fort mal vue par les juges d’Église. D’autant plus qu’ils pouvaient craindre que le peintre ne figurait cette femme excommuniée sous l’apparence d’une sainte canonisée par l’Église, ainsi que faisaient les armagnacs. En y songeant, on est tenté de croire que cet homme était un faut peintre et un espion véritable. Jeanne lui dit les armes que le roi avait données à ses frères, un écu d’azur et tale épée entre deux fleurs de lis d’or. Et ce qui confirme les soupçons, c’est qu’au procès, il lui fut reproché, comme faste et vanité, d’avoir fait peindre ses armes[90].

Plusieurs clercs introduits dans sa prison lui faisaient croire qu’ils étaient des gens d’armes du parti de Charles de Valois[91]. Le promoteur lui-même, maître Jean d’Estivet, prit, pour la tromper, l’habit d’un pauvre prisonnier[92]. Un des chanoines de Rouen appelés au procès, maître Nicolas Loiseleur, fut particulièrement fertile en ruses, ce semble, pour découvrir les hérésies de Jeanne. Natif de Chartres, il n’était que maître ès arts, mais il avait un grand renom d’habileté ; en 1427 et 1428, il s’acquitta de négociations difficiles qui le retinrent de longs mois à Paris ; en 1430, il fut de ceux que le Chapitre députa vers le cardinal de Winchester afin d’obtenir une audience du roi Henri, à l’effet de lui recommander l’église de Rouen. Maître Nicolas Loiseleur était donc personne agréable au Grand Conseil[93].

S’étant concerté avec l’évêque de Beauvais et le comte de Warwick, il entra dans la prison de Jeanne en habit court, à la mode des laïques ; les gardes avertis se retirèrent et maître Nicolas, resté seul avec la prisonnière, lui confia qu’il était natif, comme elle, des Marches de Lorraine, cordonnier de son état, qu’il tenait le parti des Français, et qu’il avait été pris par les Anglais. Il lui apporta du roi Charles des nouvelles qu’il imaginait à sa fantaisie. Jeanne n’avait rien de plus cher que son roi. Se l’étant ainsi gagnée, le feint cordonnier lui fit diverses questions sur les anges et les saintes qu’elle voyait. Elle lui répondait avec confiance, comme payse à pays et amie à ami. Il lui donnait des conseils, il lui recommandait de ne pas croire tous ces gens d’Église, de ne pas faire ce qu’ils lui demandaient

— Car, lui disait-il, si tu leur donnes, créance, tu seras détruite.

Maintes fois, à ce qu’on assure, maître Nicolas Loiseleur fit le cordonnier lorrain. Il dictait ensuite aux greffiers tout ce que Jeanne lui avait dit et c’était là un supplément précieux d’informations dont on faisait mémoire en vue des interrogatoires. Il parait même que durant certaines de ces visites on apostait les greffiers .dans une chambre voisine, près d’un judas[94]. S’il faut en croire les bruits de la ville, maître Nicolas faisait aussi sainte Catherine et, par ce moyen, amenait Jeanne à dire tout ce qu’il roulait.

Peut-être ne se vantait-il point de tant d’artifice[95] assurément il ne s’en cachait pas. Plusieurs maîtres insignes l’approuvaient ; d’autres le blâmaient[96]. L’ange de l’école, maître Thomas de Courcelles, qu’il instruisit de ses déguisements, lui conseilla de les cesser. Les greffiers prétendirent par la suite avoir mis une extrême répugnance à prendre en cachette des paroles ainsi surprises par ruse. Il fallait que l’âge d’or de la justice inquisitoriale fut bien passé pour qu’un docteur aussi rigide que maître Thomas mollit sur les fortes les plus solennelles de cette justice ; il fallait que la procédure inquisitoriale fût profondément corrompue pour que deux notaires d’Église songeassent à en éluder les prescriptions les plus constantes. Ces clercs, en contrefaisant les gens d’armes, ce promoteur en se donnant l’apparence d’un pauvre prisonnier, accomplissaient les fonctions les plus régulières de la justice instituée par Innocent III. En faisant le cordonnier et sainte Catherine, si toutefois il recherchait le salut et non la perte de la pécheresse, et si, contrairement à la rumeur publique, loin de l’inciter à la révolte, il l’induisait à l’obéissance, s’il ne la trompait enfin que pour son bien temporel et spirituel, maître Nicolas Loiseleur procédait conformément aux règles établies. Il est dit dans le Traciatus de hœresi : Que nul n’approche l’hérétique, si ce n’est de temps à autre deux personnes fidèles et adroites qui l’avertissent avec précaution et comme si elles avaient compassion de lui, de se garantir de la mort en confessant ses erreurs, et qui lui promettent que, s’il le fait, il pourra échapper au supplice du feu ; car la crainte de la mort et l’espoir de la vie amollissent quelquefois un cœur qu’on n’aurait pu attendrir autrement[97].

Le devoir des greffiers était tracé en ces termes : Les choses seront ainsi ordonnées, que certaines personnes seront apostées dans un lieu convenable pour surprendre les confidences des hérétiques et recueillir leurs paroles[98].

Et quant à l’évêque de Beauvais, qui avait ordonné ou permis ces procédures, il découvrait sa justification et sa louange dans cette parole de l’apôtre saint Paul aux Corinthiens : Je ne vous ai point fait de tort, mais j’ai usé de finesse pour vous surprendre : Ego vos non gravavi ; sed cum essem astutus, dolo vos cepi. (II Corinth., ch. XII, v. 16)[99].

Cependant, quand elle vit le promoteur Jean d’Estivet revêtu du camail, Jeanne ne le reconnut pas. Maître Nicolas Loiseleur se rendait souvent près d’elle en robe longue. Sous ces dehors il lui inspirait une grande confiance ; elle se confessait à lui dévotement, et n’avait point d’autre confesseur[100]. Elle le voyait tantôt en cordonnier, tantôt en chanoine sans s’apercevoir que ce fût la même personne. C’est donc qu’elle était, à certains égards d’une incroyable simplicité. Ces grands théologiens devaient s’apercevoir qu’il n’était pas difficile de la prendre.

C’était un fait connu de tous les hommes versés dans les sciences divines et humaines, que l’Ennemi des hommes ne faisait point de pacte avec une fille, sans lui prendre d’abord son pucelage[101]. A Poitiers, déjà les clercs de France y avaient songé et lorsque la reine Yolande leur eut assuré que Jeanne était vierge, ils ne craignirent plus qu’elle ne vint du diable[102]. Le seigneur évêque de Beauvais attendait un semblable examen dans une contraire espérance. Madame la duchesse de Bedford elle-même y procéda à la prison, assistée de lady Anna Bavon et d’une autre matrone. On a dit que, pendant ce temps, le Régent, caché dans une pièce voisine, regardait par un trou du plancher[103]. Ce n’est pas sûr, niais ce n’est pas impossible : il était encore à Rouen quinze jours après que Jeanne y eut été amenée[104]. Imaginaire ou véritable, cette curiosité lui fut sévèrement reprochée. Si beaucoup d’autres l’eussent eue à sa place, chacun en jugera à part soi ; mais il ne faut pas oublier que monseigneur de Bedford croyait que Jeanne était sorcière et que ce n’était pas l’habitude, en ce temps-là, d’étendre aux sorcières le respect dû aux dames. On doit songer aussi que ce point intéressait puissamment la vieille Angleterre que le Régent aimait de tout son cœur et de toutes ses forces.

A l’expertise de la duchesse de Bedford comme à celle de la reine de Sicile, Jeanne fut trouvée vierge. Les matrones connaissaient plusieurs signes de virginité ; mais, pour nous, un signe plus certain c’est la parole de Jeanne qui, lorsqu’on lui demandait pourquoi on l’appelait la Pucelle et si elle l’était en effet, répondait : Je peux bien dire que je suis telle[105]. Les juges ne firent pas état, qu’on sache, de ces conclusions favorables. Croyaient-ils, avec le sage roi Salomon, que toute recherche à cet égard est vaine ; repoussèrent-ils les conclusions des matrones en vertu de l’adage : Virginitatis probatio non minus difficilis quam custodia ? Non, ils croyaient bien qu’elle était vierge. Ils le laissaient suffisamment entendre, en ne disant pas le contraire[106]. Et, puisqu’ils persistaient à la poursuivre comme sorcière, c’était donc qu’ils pensaient qu’elle pouvait, par exception, s’être donnée à des diables qui l’avaient laissée comme ils l’avaient prise. Les mœurs des démons étaient pleines de ces contrariétés qui déconcertaient les plus savants docteurs ; on en découvrait tous les jours.

Le samedi 13 janvier, le seigneur abbé de Fécamp, les docteurs et maîtres Nicolas de Venderès, Guillaume Haiton, Nicolas Coppequesne, Jean de la Fontaine et Nicolas Loiseleur, se réunirent dans la maison du seigneur évêque et lecture leur fut donnée des informations recueillies en Lorraine et ailleurs sur la Pucelle. Et il fut décidé que, d’après ces informations, un certain nombre d’articles seraient rédigés en bonne forme ; ce qui fut fait[107]

Le mardi 23 janvier, les docteurs et maîtres susnommés prirent connaissance des articles et, les tenant pour bons, estimèrent qu’ils devaient servir de matière aux interrogatoires, puis ils décidèrent que l’évêque de Beauvais devait ordonner l’enquête préparatoire sur les faits et dits de Jeanne[108].

Le mardi 13 février, Jean d’Estivet, dit Bénédicité, promoteur, Jean de la Fontaine, commissaire, Bois-guillaume et Manchon, greffiers, et Jean Massieu, huissier, prêtèrent serment d’exécuter fidèlement leur office. Aussitôt, maitre Jean de la Fontaine, assisté de deux greffiers, procéda à l’enquête préparatoire[109].

Le lundi 19 février, à huit heures du matin, les docteurs et maîtres réunis, au nombre d’onze, dans la maison de l’évêque de Beauvais, ayant ouï lecture des articles et de l’information préparatoire, donnèrent leur avis et l’évêque décida, conformément à cet avis, qu’il y avait matière suffisante pour que la femme nommée la Pucelle dût être citée et appelée en cause de foi[110].

Mais une nouvelle difficulté apparaissait. Il fallait, dans une telle cause, que l’accusée comparut en même temps devant l’ordinaire et devant l’inquisiteur. Les deux juges étaient également nécessaires à la bonté du procès. Or, le Grand Inquisiteur pour le royaume de France, frère Jean Graverent, se trouvait alors retenu à Saint-Lô, où il poursuivait en matière de foi un bourgeois de la ville, nommé Jean Le Couvreur[111]. En l’absence du frère Jean Graverent, l’évêque de Beauvais avait invité le vice-inquisiteur pour le diocèse de Rouen à procéder conjointement avec lui contre Jeanne. Cependant le vice-inquisiteur semblait ne rien entendre, ne soufflait motet laissait l’évêque dans l’embarras avec son procès. C’était frère Jean Lemaistre, prieur des frères prêcheurs de Rouen, bachelier en théologie, religieux plein de prudence et de scrupules[112]. Enfin, sur sommation par huissier, il se rendit chez l’évêque de Beauvais, ce 19 février, à quatre heures du soir, et se déclara prêt à intervenir, s’il en avait le droit, ce dont toutefois il doutait[113]. Il donna la raison de son incertitude : il était l’inquisiteur de Rouen ; l’évêque de Beauvais exerçait la’ juridiction épiscopale de Beauvais sur un territoire emprunté : dès lors était-ce à l’inquisiteur de Rouen ? n’était-ce pas plutôt à l’inquisiteur de Beauvais qu’il appartenait de siéger au côté de l’évêque de Beauvais ? Il annonça, qu’il demanderait au Grand Inquisiteur du royaume de France un mandat qui s’étendit sur le diocèse de Beauvais, et qu’en attendant ces pouvoirs, il consentait à siéger, pour l’acquit de sa conscience et pour empêcher que toute la procédure ne devint caduque, ce qui eût été le cas, au sentiment de tous, si la cause avait été instruite sans le concours de la Très Sainte Inquisition[114]. Toutes les difficultés étaient levées. La Pucelle fut citée à comparaître le mercredi 21 février[115].

Ce jour, à huit heures du matin, l’évêque de Beauvais, le vicaire de l’inquisiteur et quarante et un conseillers et assesseurs dont quinze docteurs en théologie, cinq docteurs en l’un et l’autre droit, six bacheliers en théologie, onze bacheliers en droit canon, quatre licenciés en droit civil, se réunirent dans la chapelle du château. L’évêque siégea seul comme juge. A ses côtés les conseillers et assesseurs, revêtus du camail des chanoines ou de la bure des mendiants, exprimaient ou la douceur évangélique ou la gravité sacerdotale. Il y avait des regards de flamme et des yeux baissés. Frère Jean Lemaistre, vice-inquisiteur de la foi, se tenait parmi eus, silencieux, dans la livrée noire et blanche de l’obéissance et de la pauvreté[116].

Aérant d’introduire l’accusée, l’huissier rendit compte à l’évêque que Jeanne, touchée par la citation, avait répondu que volontiers elle comparaîtrait, que toutefois elle demandait que des hommes d’Église du parti de la France fussent adjoints en nombre égal à ceux du parti de l’Angleterre. Elle demandait aussi qu’il lui fût permis d’entendre la messe[117]. L’évêque rejeta ces deux requêtes[118] et Jeanne fut introduite, en habit d’homme, les fers aux pieds. On la fit asseoir près de la table où se tenaient les greffiers.

Ce qui éclata tout de suite entre ces théologiens et cette jeune fille, ce fut la haine et l’horreur réciproques. Contrairement aux usages de son sexe, que les ribaudes elles-mêmes n’osaient enfreindre, elle montrait ses cheveux, des cheveux bruns taillés sur l’oreille. C’étaient peut-être les premiers cheveux de femme que voyait tel de ces jeunes religieux, tel de ces jeunes maîtres assis derrière leurs anciens. Elle portait des chausses comme un garçon. Ils trouvaient son habit impudique, abominable[119]. Elle les irritait et les indignait. Si l’évêque de Beauvais l’avait forcée à comparaître en robe et en chaperon, ils l’eussent regardée sans doute avec moins de colère. Cet habit d’homme leur rendait présentes les œuvres accomplies par la Pucelle, avec le secours des démons, dans le camp du dauphin Charles, se disant roi. En ôtant comme avec la main, par niable, toute force aux gens d’armes anglais, elle avait nui grandement à la plupart de ces hommes d’Église qui la jugeaient. Les uns songeaient aux bénéfices dont elle les avait dépouillés ; d’autres, docteurs et maîtres de l’Université, se rappelaient qu’elle avait failli mettre Paris à feu et à sang[120] ; d’autres, abbés et chanoines, lui en roulaient peut-être plus encore de les avoir fait trembler jusqu’en Normandie. Et le tort ainsi causé à une notable partie de l’Église de France, pouvaient-ils le lui pardonner quand ils savaient qu’elle l’avait fait par sorcellerie, divination, et invocation des diables ? Il faut être bien ignorant, disait Sprenger, pour nier la réalité de la magie. Comme ils étaient très savants, ils voyaient des magiciens et des sorciers où d’autres n’en auraient pas soupçonné ; ils estimaient que le doute touchant le pouvoir des dénions sur les hommes et sur les choses était non seulement hérésie et impiété, mais encore subversion de toute société naturelle et politique. Ces docteurs assis là, dans la chapelle du château, avaient fait brûler chacun dix, vingt, cinquante sorcières, et toutes avaient confessé leur crime. N’eût-ce pas été folie que de douter après cela qu’il fait des sorcières ?

On pouvait s’étonner que des créatures capables de faire tomber la prèle, et de jeter des sorts sur les animaux et les hommes, se laissassent prendre, juger, torturer et brûler sans défense, mais c’était un fait constant ; tous les juges ecclésiastiques avaient pu l’observer. Et les hommes très doctes en rendaient, compte : ils expliquaient que les sorciers et les sorcières perdaient leur pouvoir dès qu’ils étaient aux mains des gens d’Église. On tenait cette explication pour satisfaisante. La pauvre Pucelle avait comme les autres, perdu son pouvoir ; ils ne la craignaient plus.

Jeanne les haïssait pour le moins autant qu’ils la haïssaient. Cette antipathie que les saintes ignorantes, les belles inspirées, d’esprit libre, capricieux, ardent, éprouvaient naturellement pour les docteurs enflés de leur science et tout raidis de scolastique, elle l’avait ressentie naguère à l’égard des clercs de Poitiers, qui cependant étaient du parti de France, ne lui voulaient pas de mal et ne l’avaient pas beaucoup tourmentée. On peut juger par là de la répulsion que lui inspiraient les clercs de Rouen. Elle savait qu’ils cherchaient à la faire mourir. Mais. elle ne les craignait pas ; elle attendait avec confiance que les anges et les saintes, accomplissant leur promesse, vinssent la délivrer. Elle ne savait ni quand ni comment arriverait le salut ; elle ne doutait pas qu’il n’arrivât. En douter eût été douter de saint Michel, de sainte Catherine et de Notre-Seigneur ; t’eût été croire que ses Voix étaient mauvaises. Ses Voit lui avaient dit de ne rien craindre et elle ne craignait rien[121]. Intrépide simplicité ; d’où lui venait cette confiance en ses Voix, sinon de son cœur

L’évêque la requit de jurer en la forme prescrite, les deux mains sur les saints Évangiles, qu’elle répondrait la vérité sur tout ce qui lui serait demandé.

Elle ne pouvait. Ses Voix lui défendaient de rien confier à personne des révélations dont elles la gratifiaient abondamment.

Elle répondit :

— Je ne sais sur quoi vous voulez m’interroger. Vous pourriez nie demander telles choses que je ne vous dirai pas.

Et comme l’évêque insistait pour qu’elle jurât de dire toute la vérité :

— De mon père et de nia mère, dit-elle, et de ce que j’ai fait après ma venue en France, je jurerai volontiers. Mais des révélations de la part de Dieu, oncques n’en ai dit ni révélé à personne, hors à Charles, mon roi. Et je n’en révélerai rien, me dût-on couper la tête.

Et, soit qu’elle voulût gagner du temps, soit qu’elle comptât avoir bientôt sur ce point un nouvel avis de son Conseil, elle ajouta qu’avant huit jours elle saurait bien si elle devait révéler ces choses.

Enfin elle jura selon les formes, a genoux, les deux mains sur le missel[122]. Puis elle répondit sur son nom, son pays, ses parents, son baptême, ses parrains et marraines. Elle dit qu’elle avait à peu près dix-neuf ans, à ce qu’il lui semblait[123].

Interrogée sur ce qu’elle avait appris :

— J’ai appris de ma mère Notre Père, Je vous salue, Marie et Je crois en Dieu.

Mais quand on lui demanda de dire Notre Père, elle s’y refusa, ne voulant le dire qu’en confession. C’était pour que l’évêque l’entendit au tribunal de la pénitence[124].

La séance était très agitée ; chacun parlait à la fois. Jeanne, de sa noix douce, avait scandalisé les docteurs.

L’évêque lui fit défense de sortir de prison, sous peine d’être convaincue du crime d’Hérésie.

Elle n’accepta point cette défense :

— Si je m’évadais, dit-elle, nul ne pourrait nie reprocher d’avoir rompu ma foi, car oncques ne donnai ma foi à personne.

Elle se plaignit ensuite d’être aux fers.

L’évêque lui représenta que c’était parce qu’elle avait tenté de s’évader.

Elle en convint :

— C’est vrai, j’ai voulu m’évader, et je le voudrais encore comme c’est perlais à tout prisonnier[125].

Aveu d’une grande hardiesse, si elle avait bien entendu ces paroles du juge, qu’en sortant de prison, elle encourait les peines dues aux hérétiques. C’était, un crime contre l’Église que de s’échapper des prisons de l’Église, c’était un crime et une folie. ; car les prisons de l’Eglise sont des séjours de pénitence, et il est aussi criminel qu’insensé, le pécheur qui se refuse à la pénitence salutaire ; il est semblable au malade qui ne veut point être guéri. Mais Jeanne n’était pas proprement dans une prison ecclésiastique ; elle était dans le château de Rouen, prisonnière de guerre, aux mains des Anglais. Pouvait-on dire qu’en s’évadant, elle encourait l’excommunication et les peines spirituelles et temporelles dues aux ennemis de la foi ? Il y avait là une difficulté. Le seigneur évêque la leva incontinent par une belle fiction juridique. Trois hommes d’armes d’Angleterre, John Gris, écuyer, John Bervox et William Talbot étaient commis par le roi à la garde de Jeanne. L’évêque, agissant comme juge ecclésiastique, les commit lui-même à cette garde et leur fit jurer sur les saints Évangiles de lier et enfermer cette fille[126]. De ce fait la Pucelle était prisonnière de notre sainte Mère l’Église et elle ne pouvait rompre ses fers sans tomber dans l’hérésie.

La deuxième audience fut fixée au lendemain 22 février[127].

 

 

 



[1] H. Vandenbrœck, Extraits des anciens registres des consaux de la ville de Tournai..., t. II (1422-1430) et Morosini, t. III, pp. 185-186.

[2] H. Vandenbrœck, Extraits analytiques des anciens registres des consaux de la ville de Tournai, t. II, pp. 338, 371-373. — Chanoine H. Debout, Jeanne d’Arc et les villes d’Arras et de Tournai, Paris, s. d. p. 24.

[3] Le P. Anselme, Histoire généalogique de la maison de France, t. III, pp. 723-724. — Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, pp. 175-176. — Morosini, t. IV, annexe XIX.

[4] Procès, t. I, pp. 95, 231.

[5] Ibid., t. I, pp. 13-11.

[6] Les miracles de madame Sainte Katerine, éd. Bourassé, passim.

[7] Se faisoit servir en la prinson comme une dame, rapporte le Journal d’un bourgeois de Paris, p. 279, au sujet de la prison de Rouen.

[8] Procès, t. I, p. 100.

[9] Procès, t. I, pp. 101, 206, 291 ; t. III, p. 87 ; t. V, pp. 104, 305. — Chastellain, éd. Hervyn de Lettenhove, t. II, p. 46. — P. Lanéry d’Arc, Le culte de Jeanne d’Arc au XVe siècle, Orléans, 1887, in-8°. — Noël Valois, Un nouveau témoignage sur Jeanne d’Arc, pp. 8, 13, 18.

[10] Procès, t. I, pp. 95, 96, 231. — Chanoine Henri Debout, Jeanne d’Arc prisonnière à Arras, Arras, 1894, in-16 ; Jeanne d’Arc et les villes d’Arras et de Tournai, Paris, 1904, in-8° ; Jeanne d’Arc, t. II, pp. 394 et suiv.

[11] Le 7 novembre 1430, un messager de la ville d’Arras recevait 40 s. pour avoir porté au duc de Bourgogne deux lettres closes, l’une de Jean de Luxembourg, l’autre de David de Brimeu, gouverneur du bailliage d’Arras : nous ignorons la teneur de ces lettres pour le fait de la Pucelle. P. Champion, Notes sur Jeanne d’Arc, II : Jeanne d’Arc à Arras, dans le Moyen Age, juillet-août 1901, pp. 200-201.

[12] H. de Lépinois, Notes extraites des archives communales de Compiègne, dans Bibliothèque de l’École des Chartes, 1863, t. XXIV, p. 486. — A. Sorel, Prise de Jeanne d’Arc, p. 268. — P. Champion, Guillaume de Flavy, pp. 38, 48 et suiv.

[13] Chronique des cordeliers, fol. 500 v°.

[14] Chastellain, t. II, p. 53.

[15] Monstrelet, t. IV, p. 390.

[16] Ibid., t. IV, pp. 390-391. — Lefèvre de Saint-Rémy, t. II, p. 180. — Morosini, t. III, pp. 306-301. — Chastellain, t. II, pp. 51-54. — A. Sorel, La prise de Jeanne d’Arc, pp. 233 et suiv. — P. Champion, Guillaume de Flavy, p. 50.

[17] Le Jouvencel, t. I, pp. 49 et suiv.

[18] Chronique des cordeliers, fol. 502 v°. — P. Champion, Guillaume de Flavy, pièces justificatives XLI, XLII, XLIII.

[19] Livre des trahisons, p. 202.

[20] Monstrelet, t. III, pp. 410-415. — Lefèvre de Saint-Rémy, t. II, p. 185. — Livre des trahisons, p. 202. — A. Sorel, La prise de Jeanne d’Arc, pièce justif. XIII, p. 341. — P. Champion, loc. cit., p. 176.

[21] Monstrelet, t. IV, p. 418. — De La Fons-Mélicocq, Documents inédits sur le siège de Compiègne, dans La Picardie, t. III, 1857, pp. 22-23. — Stevenson, Letters and papers, vol. II, part. I, p. 156.

[22] Monstrelet, t. IV, p. 419. — P. Champion, Guillaume de Flavy, p. 57.

[23] Sorel, La prise de Jeanne d’Arc, pièces justificatives, p. 343.

[24] Procès, t. I, p. 9. — Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, p. 175.

[25] Morosini, t. III, p. 236.— U. Chevalier, L’abjuration de Jeanne d’Arc, p. 18, note.

[26] Morosini, t. III, p. 276, note.

[27] Chronique de Jean de la Chapelle, dans Procès, t. V, pp. 358-360. — Lefils, Histoire de la ville du Crotoy et de son château, pp. 111-118. — G. Lefèvre-Pontalis, La panique anglaise, p. 8, n° 5. — L’abbé Bouthors, Histoire de Saint-Riquier, Abbeville, 1901, pp. 185, 215, 220.

[28] Perceval de Cagny, pp. 22, 137.

[29] Procès, t. III, p. 121. — A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie, pp. 63 et suiv. — Lanéry d’Arc, Livre d’or, p. 521.

[30] Procès, t. I, p. 89 ; t. III, 121. — Le P. Ignace de Jésus Maria, Histoire généalogique des comtes de Ponthieu et maïeurs d’Abbeville, Paris, 1657, p. 490. — Procès, t. V, p. 361.

[31] Monstrelet, t. IV, pp. 353-354. — Procès, t. V, p. 143.

[32] Procès, t. I, pp. 15-16. — M. Fournier, La faculté de décret et l’Université de Paris, t. I, pp. 353.

[33] Procès, t. I, p. 21. — Le P. Ignace de Jésus Maria, dans Procès, t. V, p. 363. — F. Poulaine, Jeanne d’Arc à Rouen, Paris, 1899, in-16. — Ch. Lemire, Jeanne à Arc en Picardie et en Normandie, Paris 1903, pp. 10 et passim. — Lanéry d’Arc, Livre d’or, pp. 524, 549.

[34] A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie au XVe siècle, Rouen, 18961 in-4°, chap. V.

[35] Procès, t. III, pp. 136-137. — Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, p. 198.

[36] L. de Duranville, Le château de Bouvreuil, dans la Revue de Rouen, 1852, p. 387. — A. Deville, La tour de la Pucelle du château de Rouen, dans Précis des travaux de l’Académie de Rouen, 1865-1866, pp. 236-268. — Bouquet, Notice sur le donjon du château de Philippe-Auguste, Rouen, 1877, pp. 7 et suiv.

[37] Procès, t. II, pp. 317, 345 ; t. III, p. 121.

[38] Ibid., t. III, p. 151. — A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie, p. 190, note 1. — L. Delisle, dans Revue des Sociétés savantes, 1867, 4e série, t. V, p. 440. — F. Bouquet, Jeanne d’Arc au donjon de Rouen, dans Revue de Normandie, 1867, t. VI, pp. 873-83. — L. Delisle, dans Revue des Sociétés savantes, t. V (1867). — Lanéry d’Arc, pp. 528-33.

[39] Ballin, Renseignements sur le Vieux-Château de Rouen, dans Revue de Rouen, 1842, p. 35. — A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie, p. 188.

[40] Procès, t. II, p. 7.

[41] Procès, t. III, p. 155.

[42] Ibid., t. II, p. 36. — A. Sarrazin, pp. 191-192.

[43] Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, pp. 240-241.

[44] Procès, t. I, p. 47.

[45] Ibid., t. II, p. 322.

[46] Ibid., t. II, pp. 216, 217. — J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p. 112.

[47] Procès, t. II, p. 18.

[48] Lea, Histoire de l’inquisition au moyen âge, traduct. S. Reinach, t. II, p. 76.

[49] Procès, t. III, p. 154.

[50] Ibid., t. II, pp. 318-319 ; t. III, pp. 131, 140, 148, 161. — A. Sarrazin, P. Cauchon, p. 100.

[51] Procès, t. III, pp. 186-187.

[52] Procès, t. III, pp. 199-200.

[53] Ibid., t. III, p. 200.

[54] Procès, t. III, p. 179.

[55] Morosini, t. III, p. 236.

[56] Procès, t. III, pp. 121, 123.

[57] Ibid., t. III, p. 140.

[58] C. de Beaurepaire, Recherches sur le procès de condamnation de Jeanne d’Arc, dans Précis des travaux de l’Académie de Rouen, 1867-1868, pp. 470-9. — U. Chevalier, L’abjuration de Jeanne d’Arc, p. 29.

[59] De Beaurepaire, Notes sur les juges, p. 17.

[60] Gallia Christiana, t. II, p. 732. — Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, pp. 213-214. — S. Luce, Jeanne d’Arc à Domremy, p. XXXCV.

[61] C. de Beaurepaire, Recherches sur le procès de condamnation de Jeanne d’arc, loc. cit. — A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie, pp. 168, 171.

[62] 28 décembre 1430. — Procès, t. I, pp. 20, 23. — De Beaurepaire, Notes sur les juges, p. 46.

[63] Procès, t. I, pp. 18, 19.

[64] A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie, pp. 1771-78.

[65] J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p. 147. — De Beaurepaire, Notes sur les juges, p. 9.

[66] Procès, t. I, p. 24 ; t. III, p. 162. — De Beaurepaire, Notes sur les juges, p. 26. — A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie, p. 220.

[67] Procès, t. I, p. 25.

[68] Ibid., t. I, p. 25 ; t. III, p. 137. — A. Sarrazin, loc. cit., pp. 221-222.

[69] L. Tanon, Histoire des tribunaux de l’inquisition en France, pp. 550-551.

[70] De Beaurepaire, Recherches sur le procès de condamnation, p. 320.

[71] Procès, t. I, p. 23 ; t. III, p. 137. — De Beaurepaire, Recherches..., p. 103. — A. Sarrazin, loc. cit., pp. 222-223.

[72] Procès, t. I, p. 26. — De Beaurepaire, Recherches..., p. 115. — A. Sarrazin, loc. cit., pp. 223-224.

[73] Emeric, Directorium Inquisitorium, quest. 85. — J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p. 109. — De Beaurepaire, Notes sur les juges, p. 9.

[74] De Beaurepaire, Recherches..., pp. 321 et suiv.

[75] De Beaurepaire, Notes sur les juges, pp. 27-114. — J. Quicherat, Aperçus nouveaux, pp. 103-104. — Boucher de Molandon, Guillaume Erard l’un des juges de la Pucelle, dans Bulletin du Comité hist. et phil., 1892, pp. 3-10.

[76] Procès, t. I, p. 39, note. — Du Boulay, Historia Universitatis, Paris., t. V, pp. 912, 920. — J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p. 105. — De Beaurepaire, Notes..., pp. 30, 31. — A. Sarrazin, loc. cit., pp. 226-227.

[77] Procès, t. II, pp. 5, 6. — De Beaurepaire, Notes.... pp. 121-125. — A. Sarrazin, loc. cit., pp. 305-310.

[78] De Beaurepaire, Recherches, pp. 321 et suiv.

[79] J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p. 101.

[80] Procès, t. I, pp. 5-8.

[81] Ibid., t. II, p. 463.

[82] Procès, t. II, p. 453.

[83] Ibid., t. III, pp. 192-193.

[84] Ibid., t. I, pp. 105, 146, 234.

[85] Ibid., t. I, pp. 208-209, 213.

[86] J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p. 117.

[87] Procès, t. I, pp. 245-246.

[88] Ibid., t. II, p. 200.

[89] De Beaurepaire, Recherches, loc. cit. — J. Quicherat, Aperçus nouveaux, pp. 122-124. — L. Tanon, Histoire des tribunaux de l’inquisition, pp. 389-395.

[90] Procès, t. I, pp. 117, 300.

[91] Ibid., t. II, p. 362.

[92] Ibid., t. III, p. 63.

[93] De Beaurepaire, Notes sur les juges, pp. 72-82. — A. Sorel, loc. cit., pp. 243 247.

[94] Procès, t. II, pp. 10, 342, t. III, pp. 140, 141, 156,160 et suiv.

[95] Ibid., t. III, p. 181.

[96] Ibid., t. III, p. 141.

[97] Tractatus de hœresi pauperum de Lugduno, apud Martene, Thesaurus anecd., t. V. col. 1787. — J. Quicherat, Aperçus nouveaux, pp. 131-132.

[98] Eymeric, Directorium, part. III : Cautelœ inquisitorum contra hœreticorunt cavilationes et fraudes.

[99] L. Tanon, Histoire des tribunaux de l’inquisition en France, p. 394.

[100] Procès, t. II, pp. 10, 342.

[101] Vallet de Viriville, Nouvelles recherches sur Agnès Sorel, pp. 33 et suiv. — Du Cange, Glossaire, au mot : Matrinionium.

[102] Procès, t. III, pp. 102, 209.

[103] Procès, t. III, pp. 155, 163.

[104] A. Sarrazin, Jeanne d’Arc et la Normandie, p. 40.

[105] Procès, t. III, p. 175.

[106] Procès, t. II, pp. 217-218.

[107] Ibid., t. I, pp. 27-28.

[108] Procès, t. I, pp. 28-29.

[109] Ibid., t. I, pp. 29-31.

[110] Ibid., t. I, pp. 31-33.

[111] Ibid., t. I, p. 32. — J. Quicherat, Aperçus nouveaux, p.102. — De Beaurepaire, Notes sur les juges, pp. 24-27. — Le P. Chapotin, La guerre de cent ans, Jeanne d’Arc et les dominicains, pp. 141-143. — A. Sarrazin, P. Cauchon, p. 124.

[112] Procès, t. I, p. 33.

[113] Ibid., t. I, p. 35. — De Beaurepaire, Notes sur les juges, p. 394. — Doinel, dans Mémoire de la Société archéologique-historique de l’Orléanais, 1892, t. XXIV, p. 403. — Le P. Chapotin, La guerre de cent ans, Jeanne d’Arc et les dominicains, p. 141. — U. Chevalier, L’abjuration de Jeanne d’Arc, p. 32.

[114] Procès, t. I, p. 35.

[115] Ibid., t. I, pp. 40-42.

[116] Ibid., t. I, pp. 38-39.

[117] Procès, t. I, pp. 42-43.

[118] Ibid., t. I, p. 43.

[119] Ibid., p. 43.

[120] Le P. Denifle et Chatelain, Le procès de Jeanne d’Arc et l’Université de Paris.

[121] Procès, t. I, pp. 88, 94, 131, 155 et passim.

[122] Procès, t. I, p. 45.

[123] Ibid., t. I, p. 46.

[124] Procès, t. I, pp. 46-47

[125] Ibid., t. I, p. 47.

[126] Procès, t. I, pp. 47, 48.

[127] Ibid., t. I, p. 48.