LES DUCS DE GUISE ET LEUR ÉPOQUE

 

Étude historique sur le seizième siècle

TOME SECOND

CHAPITRE XVIII. — PREMIÈRES RIVALITÉS DES DEUX HENRI.

 

 

1568-1570.

 

Coligny avait pris part, contre son gré, aux deux premières guerres civiles ; il aurait préféré, surtout depuis la mort du duc de Guise, se tenir à la cour, faire tourner au profit de son parti les heureuses dispositions du jeune Roi, et essayer l'influence que pourrait avoir sur lui, à côté de Catherine, l'exemple des mœurs pures et de la sincérité dans les engagements. Mais Catherine n'était plus d'humeur à tolérer auprès d'elle ni triumvirs, ni grands vassaux. — Je ne me laisserai gouverner par personne, écrivait-elle à sa fille[1] ; et elle ajoutait que si Coligny se présentait à la cour, il y sera comme s'il estoit mort. Cependant, la paix livrait les huguenots à toutes les vengeances privées et aux persécutions locales : Ils ont plus perdu par les édits en temps de paix, que par la force en temps de guerre[2].

Entre une paix qui n'était pas tenable et une prise d'armes qui ruinait la France, Coligny cherchait un moyen d'assurer la sécurité de son parti. Il songea d'abord à faire passer quelques familles en Amérique, et dirigea des explorateurs sur la Floride ; il rêvait un asile lointain pour les opprimés de son pays ; mais les Espagnols surprirent et mirent à mort tous les Français qui faisaient partie de cette expédition. Aux puritains d'Angleterre était réservé l'honneur de transporter la foi protestante et la civilisation en Amérique. G'est alors que Coligny imagina un autre projet qui est demeuré assez mystérieux. Il envoya à Constantinople son fils adoptif Téligny et le baron de Villeconin. Le grand sultan Soliman, l'un des grands personnages et capitaines qui régna dessus les Ottomans, l'envoya rechercher d'amitié ; ils avoient quelque intelligence pour faire quelque haute entreprise que je n'ai jamais pu tirer ni savoir de M. de Téligny, mon grand amy[3]. Malheureusement, Soliman venait de mourir quand débarquèrent les capitaines huguenots ; on ne voulut pas écouter ces étrangers, on les obligea à reprendre la mer. Villeconin mourut dans la traversée, Téligny a conservé le secret ; Coligny a seulement déclaré au Roi que son intervention dans cette affaire n'avait rien que de légitime[4] ; mais, à travers ces réticences, il n'est pas difficile de reconnaître que Coligny suivait sa première pensée d'émigration, et qu'au voyage coûteux, effrayant par les dangers d'une traversée de plusieurs mois et à un débarquement incertain sur les côtes désertes de la Floride, il voulait substituer une colonisation de lu Terre sainte parles nouveaux enfants d'Israël qui subissaient la persécution en France. S'il avait pu obtenir des Ottomans les concessions de terre, les places de sûreté, les garanties contre les agressions, il aurait excité un immense enthousiasme parmi ses coreligionnaires en leur proposant cette fuite d'Egypte ; dans leur manie de ressemblance avec le peuple de Dieu, les huguenots auraient été glorieux de passer la mer Rouge, de franchir le désert, de fonder à nouveau Sion. Ils auraient porté la langue, l'activité et les puissances industrielles de la France dans tout l'Orient ; ils nous auraient assuré l'empire de la Méditerranée, avec des débouchés pour notre commerce et l'essor dans les idées que donne toute expansion d'une nation. Faire de Jérusalem la capitale d'une république protestante était une pensée grandiose dont la réalisation aurait moins épuisé la France que les trente années de guerres, de ravages et de massacres. Les desseins des Guises étaient moins vastes et moins désintéressés. Ils ne visaient plus qu'à se tenir sous la tutelle du roi d'Espagne et à y enfermer avec eux Catherine de Médicis : N'y a famille en ce royaume qui soit plus prompte et dédiée au service de Vostre Majesté que la nostre, écrivait le cardinal de Lorraine à Philippe II[5]. Quand le duc d'Alva faisait défiler sur les frontières de France et de Lorraine ses vétérans espagnols qui devaient réduire les Pays-Bas à l'obéissance, il était accompagné par un secrétaire du cardinal de Lorraine qui lui peignait les catholiques de France comme saisis d'une joie extraordinaire à la vue de cette armée, gage de leur rédemption. — La maison de Guise tout entière, ajoutait-il, va agir à la cour dès que les forces de Philippe II occuperont les Flandres[6]. Le duc d'Alva s'empressa de transmettre a son Roi ces paroles dans lesquelles il ne voyait encore que l'intention naïve de profiter du prestige qu'allait procurer à Philippe II la vigueur de la répression dans les Pays-Bas ; mais le cardinal ne se gêna pas pour écrire directement au roi d'Espagne, d'un style humble, prolixe, monotone. Nos archives et celles de l'Espagne sont remplies de ces preuves d'une trahison de tous les instants. A la même époque, le cardinal feignit de se rapprocher du prince de Condé, et de lui offrir une sorte d'alliance. — Oublions le passé, lui écrivait-il le 28 mai 1568, rappelons-nous uniquement que nous sommes proches parents[7] !

Il puisait le courage nécessaire pour tant de perfidies dans la pensée qu'il travaillait à la fortune de son neveu, et qu'il formait son jugement par des exemples instructifs. Il s'était improvisé comme le tuteur du jeune duc, et croyait devoir occuper par des manœuvres criminelles cet interrègne entre le second et le troisième duc de Guise. Il ne tarda pas à reconnaître que la véritable puissance passait peu à peu entre les mains de Henri de Valois ; il se fit le conseiller de ce prince[8], et se soumit à ses caprices avec cette patience qu'il avait déjà montrée dans sa jeunesse auprès de Diane de Poitiers.

Catherine commettait une imprudence en laissant pénétrer ainsi près de son fils un conseiller aussi dangereux que le cardinal, mais elle avait toujours ressenti une secrète admiration pour la dépravation de cet homme ; elle espéra qu'il pourrait offrir à Henri de Valois quelques avis précieux et des leçons qui lui feraient acquérir de bonne heure l'expérience de la politique. Enfin, elle était déjà tellement aveuglée par sa tendresse, faisant de son fils son idole, le voulant contenter en tout ce qu'il désiroit d'elle[9], qu'elle ne sut ou n'osa lutter contre le penchant qui rapprochait ces âmes également avides de corruption.

Depuis la mort du duc de Guise, la pensée de Catherine avait pu se développer à l'aise pendant cinq années ; la régente posait bien les fortes bases de la politique de Henri IV et de Richelieu : soumettre tous ses sujets, huguenots ou princes ; ne plus tolérer ni des menaces, ni le moyen de prononcer des menaces ; devenir maître chez soi ; ensuite, empêcher l'agrandissement de ses voisins ; contrecarrer sans relâche les desseins de l'Espagne et de la maison d'Autriche. Mais elle ne sut qu'indiquer les idées, à travers les vacillations et les défaillances. Ses complaisances pour son fils Henri, le peu d'honnêteté des moyens qu'elle employait souvent, sa facilité d'embrasser, comme tous les parvenus, un trop grand nombre de projets à la fois, de n'en abandonner, mais de n'en achever aucun, et, par-dessus tout, ses faussetés pusillanimes entre les Bourbons et les Guises, ont fini par lui laisser peu d'action sur les événements de son temps. Elle est, de tout le seizième siècle, le personnage qui a eu le plus d'influence sur les hommes, et qui a le moins changé le cours des choses. Après avoir tenu durant ces cinq années les Guises dans une sorte de disgrâce, elle est assez imprudente pour leur laisser reprendre de l'influence. Elle veut les avoir pour alliés dans la misérable lutte qu'engage son fils Henri de Valois contre le prince de Condé. Aveugle pour son fils, elle ne voit pas qu'elle introduit près de lui ses ennemis les plus redoutables ; elle croit Condé seul dangereux, et les Guises abattus ; elle les suppose si accablés qu'elle Fait donner six mille livres au duc de Guise, et autant au duc d'Aumale[10], cadeau humiliant pour ceux dont les pères avaient tant de fois vidé le trésor royal. Elle s'attarde dans son système de bascule.

En cela elle procède un peu par routine, beaucoup aussi par amour de l'art et par plaisir de manier à son gré ceux qui avaient été ses protecteurs ou ses rivaux ; mais elle cède surtout aux caprices de son fils qui se laissait gagner à une haine étroite contre Condé. Lui qui voulait être seul admiré dans le monde des filles d'honneur, il était envieux du rire facile et de la vivacité pétulante de Condé : aux yeux de ces jeunes filles, un autre que Henri de Valois savait plaire, premier obstacle devant l'enfant gâté, colères naissantes que la mère partageait involontairement. Condé prétendait à une autre rivalité ; il désirait l'épée de connétable ; il fut brusquement accosté un soir par le petit Henri de Valois qui lui fit défense de songer à cette dignité et lui déclara se la réserver à lui-même. La mère eut la faiblesse de s'associer à ces puériles rancunes, et crut les servir en recherchant l'appui des Guises. Ceux-ci acceptèrent les dons et continuèrent leur correspondance avec le roi d'Espagne.

Non que Henri de Guise fût enclin à se livrer à l'Espagne ; il était trop Italien pour aimer à se sentir enlacé d'avance. Au fond, il se défiait de Philippe II, comprenait que leurs intérêts étaient contraires, et n'avait qu'une médiocre estime, lui le brillant cavalier, pour cet homme de bureau qui ne quittait pas sa chaise, au fond de son palais. Mais il était surtout dominé par le désir de venger la mort de son père ; il avait voué sa vie à cette pensée, et il comptait trouver un appui ou un asile près du roi d'Espagne. On peut croire, du reste, que Catherine elle-même toléra ces relations ; elle se sentait gagner par la haine des réformés qu'elle regardait comme les ennemis dont la défaite devait procurer à son fils Henri une réputation de général. De plus, elle voyait avec un dépit mal dissimulé Charles IX témoigner de la confiance à Coligny et à Condé.

Ce jeune Roi était le plus heureusement doué de tous les Valois ; il avait le cœur délicat et tendre, le tact sûr ; il n'était ni faux, ni cruel ; il savait se faire aimer, il n'avait que défiance pour l'esprit dominateur de Catherine, et mépris pour l'âme basse de Henri de Valois. Sentant des trahisons autour de lui, vaguement soupçonneux, il était en réalité si complètement délaissé par sa mère, que le cardinal de Lorraine osait écrire au roi d'Espagne que l'on pouvait se fier en Catherine, et qu'il était le plus content du monde d'elle[11], et ensuite : La Roine faict tout le debvoir que l'on sçauroit désirer[12]. Le cardinal s'avança davantage encore. Sentant Catherine se fier à lui pour la première fois, il comprit qu'il pouvait la trahir ; il la vit suffisamment aveuglée par la passion de créer un parti au profit de Henri de Valois. Il n'osa pas s'adresser directement à Philippe II et se servit de l'intermédiaire du duc d'Alva. Dans quels termes ce frère du grand Balafré proposait-il de livrer la France à l'Espagne ? On possède seulement la lettre du duc d'Alva annonçant à Philippe II que le cardinal de Lorraine offre de foire remettre nos places frontières entre les mains du roi d'Espagne, dans le cas où Charles IX et ses frères mourraient sans héritiers, et de reconnaître Philippe II comme roi de France, en vertu des droits de sa femme Elisabeth de Valois. Le duc d'Alva ajoute que la loi salique ne saurait être une objection sérieuse, puisqu'elle est une coutume surannée d'une peuplade païenne, et Philippe II, de sa main, donne son approbation à ce plan par une note qu'il a écrite en marge de la lettre[13].

Tandis qu'il convoitait ainsi la succession d'une famille jeune, nombreuse et en apparence vivace, Philippe II vieilli semblait perdre pour lui-même l'espoir d'un héritier. Son fils don Carlos était mourant dans cette même année 1568. C'était un prince qui avait annoncé les plus heureuses qualités dans les premiers temps de sa vie. À quinze ans, il descendit une nuit un escalier pour se rendre secrètement, selon le récit de M. de Guibert, l'ambassadeur de France, près de la fille d'un portier du château ; son pied glissa, il roula sur plusieurs marches, et sa tête vint heurter contre une porte en chêne[14] ; les os du crâne furent atteints, les pansements furent mal faits, l'érésipèle envahit la tête, les yeux se fermèrent. Un miracle seul pouvait sauver la vie du prince chéri de tous les Espagnols. Au monastère Jesu-Maria reposait le corps de Fray Diego, religieux franciscain, mort depuis plus de cent ans en odeur de sainteté ; ce cadavre fut exhumé, tiré de sa bière, déposé dans le lit de Carlos ; sous le capuchon pourri du mort, on introduisit la tête du jeune prince contre celle du cadavre ; on l'y laissa une nuit entière. Le lendemain on transporta dans la chambre une image miraculeuse de Notre-Dame d'Atocha. Don Carlos fut guéri ; les croyants attribuèrent la guérison à la Vierge d'Atocha, les moines à Fray Diego. Mais à partir de cette époque, l'enfant devint sujet à des accès de démence qui rendaient son approche dangereuse ; le duc d'Alva dut le désarmer de force pour n'être pas poignardé par lui ; le cardinal Espinosa, laissé seul un jour avec lui, ne put s'échapper qu'après les plus humbles supplications et les ruses les plus savantes ; don Juan d'Autriche, qui avait toujours été son ami préféré et son confident, faillit aussi devenir victime d'une de ses crises mentales, et dut tirer l'épée pour se défendre. Tous les officiers de la maison du jeune prince avaient été forcés de fuir loin de ses attaques ; on fut obligé de l'enfermer et de le garder à vue ; sa maladie s'aggrava, il mourut après une année de séquestration[15].

Ce n'était pas la seule douleur qu'éprouvât Philippe II. Il avait à la même époque (1566-1570) l'humiliation de soutenir une lutte acharnée, au cœur de l'Espagne, contre des sujets rebelles, et d'y voir périr ses meilleurs vétérans des guerres d'Italie. Les Morisques[16] étaient la population la plus industrieuse, la plus active de l'Espagne ; leurs barrages et leurs canaux donnent encore aujourd'hui, après quatre siècles, la richesse à des vallées entières ; leurs manufactures étaient les seules de la Péninsule. Poussés à la révolte par une série de vexations qui les atteignaient dans leur foi et leurs préjugés de musulmans, telles que l'interdiction de jamais se baigner, ils se soulevèrent et soutinrent la lutte durant quatre ans. La répression fut cruelle : les habitants de villes entières, comme ceux de Galera, furent mis à mort sans qu'il échappât un seul être vivant ; ceux d'autres villes furent menés en troupeaux sur le marché de Grenade, où ils furent vendus aux enchères comme esclaves ; dans le trajet, les soldats d'escorte en échangèrent quelques-uns contre du grain avec leurs fournisseurs. Les oliviers furent coupés. L'Espagne sortit de cette révolte aussi épuisée que la France après ses trente ans de guerre. Dans sa main, Philippe II ne possédait, pour soutenir la partie qu'il jouait contre toute l'Europe, que des pays déchirés par la guerre civile, des finances ruinées par une série de banqueroutes, des armées occupées à assiéger ses propres villes en Andalousie comme en Flandre. Dans ce jeu effréné, il n'avait autour de lui que des femmes, Elisabeth en Angleterre, Catherine de Médicis en France, Jeanne d'Albret en Béarn, sa tante Catherine en Portugal, Marguerite de Parme aux Pays-Bas. Associées dociles ou adversaires versatiles, elles semblaient se prêter par leur soumission aussi bien que par leurs fautes au succès de ses projets. Mais sa plus précieuse force était la complicité de la maison de Guise. Sans les Guises il était impuissant, ruiné, moqué. Aussi, tandis que chez lui défaillaient ses forces, il semblait encore menaçant à l'étranger ; il était mieux obéi et plus craint à Paris qu'à Grenade et à Bruxelles.

Paris, il était le maître des exécuteurs de la justice ; le prévôt du Roi et ceux des maréchaux étaient à ses ordres : pour lui, ils arrêtèrent et étranglèrent sans formalité un pilote portugais qui s'était réfugié à Paris sous la protection de Catherine de Médicis, après avoir dirigé sur Madère les vaisseaux qu'elle envoyait afin de s'emparer de ces lies pour son propre compte. Chez elle, elle ne put le sauver de la vengeance de Philippe II. De même, un courrier que le prince d'Orange lui envoyait de Flandre fut annoncé aux prévôts par le roi d'Espagne, saisi par eux à son entrée à Paris, et immédiatement pendu tout botté[17].

Mais Catherine Songeait moins à tirer vengeance de ces affronts qu'à s'assurer l'appui de Philippe II pour la troisième guerre civile qu'elle préparait en France.

Tant qu'elle avait été la seule dépositaire du pouvoir royal, elle avait défendu avec intelligence les droits de la couronne : mais Charles IX avançait en âge, il parlait d'user de son autorité. Bientôt, il se marierait ; de nouvelles influences allaient naître, et Catherine voyait approcher le moment où elle serait reléguée sans crédit au fond d'inutiles honneurs. A tout prix elle voulait conserver la force, et si elle était contrainte de la résigner légalement comme régente, elle se préparait à la recouvrer comme chef de parti. Elle résolut de grandir Henri de Valois à côté du Roi, et de se maintenir au-dessus des deux frères, en faisant naître leur rivalité.

Un tel revirement de politique ne pouvait être ni servi, ni compris par le chancelier de l'Hôspital, ce fidèle conseiller des jours dangereux, le compagnon du voyage en France, qui avait consacré tout son talent à restaurer la suprématie royale. Catherine voulut se débarrasser de ce censeur importun, de ce Français qui ne comprenait pas les raffinements de sa politique. Elle profita du mouvement d'opinion qui suivit en France la nouvelle de l'exécution à Bruxelles des comtes d'Egmont et de Horn. En voyant, au mois de juin 1568, cette vigueur de répression avec laquelle Philippe II usait du prétexte de l'hérésie pour accabler les résistances nationales, les catholiques de France demandèrent qu'un concert fût établi avec lui pour punir les fauteurs de la seconde guerre civile. Catherine leur sacrifia tout d'abord le chancelier qui, en sa qualité de modéré, était suspect aux deux partis : elle remarqua, d'ailleurs, que cette seconde guerre civile n'avait pas grandi Henri de Valois, et elle se décida à en provoquer une troisième, dans laquelle il serait savamment secondé. Pour commencer, elle complota avec le cardinal de Lorraine l'enlèvement en pleine paix des deux chefs réformés, Condé et Coligny.

Ceste entreprise mal dressée de quenouille et de plume, de la Royne et du cardinal de Lorraine[18], échoua : les deux chefs purent échapper au guet-apens, traversèrent la France au galop, à peu près seuls traqués dans le trajet, atteignirent enfin la Rochelle[19]. Jeanne d'Albret vint les rejoindre avec son fils et les contingents de Béarn : la troisième guerre civile commençait.

Le duc de Guise accourut l'un des premiers à Orléans, près de M. de Sansac qui assembloit l'armée, et qui lui donna imprudemment dix-huit compagnies de gens d'armes, sans attendre les ordres du Roi ni de son frère[20]. Ce commandement considérable, enlevé de la sorte par surprise, fut un embarras pour Henri de Valois pendant toute la campagne, et la cause des premières inimitiés entre les deux jeunes gens. Henri de Guise s'était par son élan, son audace, son ardeur, fait reconnaître comme le chef d'une jeunesse qui méprisait les vieux généraux, ne rêvait que les prouesses des romans de chevalerie, dédaignait l'infanterie, l'ordre de bataille et même l'autorité du bel Henri de Valois, regardé comme trop docile aux conseils de Biron et de Tavannes. M. de Tavannes vouloit tout régenter et que tout passât par son advis et son œil[21]. A ce vieux chef qui veut tout prévoir, le duc de Guise est préféré : avec Guise les hardies chevauchées, les résolutions imprévues, les heureux coups de main : Ce que je ne résoudrai en un quart d'heure, disait-il, je ne le résoudrai de tout le reste de ma vie. Il avait dix-huit ans, était sans peur, se pensait prédestiné à de grandes actions au milieu de ses compagnons, les fils des défenseurs de Metz, qui voulaient dépasser les exploits de leurs pères. De ces téméraires, le plus fou était le fils du maréchal de Brissac. Timoléon de Cossé-Brissac voulait devenir connétable ; il portait à la guerre une sorte de frénésie : il aimoit à tuer, jusque-là qu'avec sa dague, il se plaisoit à s'acharner sur une personne, à lui en porter des coups, jusqu'à ce que le sang lui en rejaillissoit sur le visage[22]. Il se fit tuer inutilement dès les premiers mois de la guerre, ainsi que son ami Martigues, et que la plupart de ces ambitieux trop braves, les premiers compagnons de Henri de Guise et les auteurs véritables de ses premières fautes.

Cette campagne, favorable sur presque tous les points aux catholiques, n'offrit cependant que des revers au duc de Guise[23]. Il faut toutefois remarquer que, si l'on cesse de considérer les événements dans leurs traits principaux, et si l'on veut pénétrer dans les épisodes des combats de cavalerie, des surprises de châteaux, des expéditions audacieuses, on tombe dans une complète incertitude, et l'on est entouré de contradictions. Par exemple, le maréchal de Tavannes était le vrai chef de l'armée catholique, et comme le tuteur de Henri de Valois : avec ses notes, ses deux fils, Gaspard et Guillaume de Saulx-Tavannes, ont raconté chacun les détails de cette campagne, et cependant leurs Mémoires sont quelquefois en contradiction. Gaspard de Tavannes rapporte que La Rivière, capitaine de chevau-légers, vaillant et inconsidéré, se laisse investir dans la tour de Jarnac avec cinquante des signalés volontaires de l'armée. C'est la fleur de ses compagnons, le duc de Guise veut les délivrer : Henri de Valois s'y oppose, puis cède à ses instances et lui accorde trois mille chevaux, puis révoque cet ordre. Enfin, Henri de Guise part avec sa seule compagnie d'ordonnance et les volontaires qui ne craignent pas de désobéir au prince ; suivi de deux cents chevaux seulement, il n'hésite pas à se hasarder, pour délivrer M. de La Rivière, au milieu de l'armée calviniste ; il trouve devant lui toute la cavalerie de l'amiral en bataille, qui le chassa et le poursuivit proche l'armée. Cette leçon, qui châtiait le jeune homme de son imprudence, est racontée autrement par Guillaume de Tavannes. Guise insiste toujours près de Henri de Valois afin d'obtenir la cavalerie, et de se porter en avant, mais ce n'est pas pour délivrer La Rivière qui n'est pas encore assiégé. Quelques jours après seulement, La Rivière délibéra de s'aller saisir de la maison de Jarnac qui estoit pleine de meubles, à quatre lieues de Cognac où estoit le camp des ennemis : il y demeura deux jours, accompagné d'environ cinquante ou soixante chevaux ; au troisième, il fut assiégé sans qu'il en avertist l'armée, et ne le sceut-on que quinze jours après. Le duc de Guise attaqua la cavalerie de l'amiral, non pour la traverser et délivrer La Rivière, mais uniquement pour faire montre de témérité. M. de Guise et le sieur de Brissac montèrent à cheval avec cinq ou six cents chevaux ; ils furent ramenés en déroute sur le champ catholique.

De semblables imprudences amenèrent plusieurs fois les mêmes défaites. Du commencement de septembre au mois de décembre 1568, les deux armées manœuvraient à quelques lieues de distance l'une de l'autre, et semblaient alternativement offrir ou éviter une bataille. Le 16 novembre, l'armée calviniste se trouva si rapprochée de celle de Henri de Valois, à Jazeneuil, qu'elle dut rétrograder. Elle se replia en bon ordre dans les vignes, et présenta un front menaçant. Contrairement aux ordres de Henri de Valois, Henri de Guise entraîna sa cavalerie au milieu des vignes, sans même remarquer un fosse qui avait été creusé à la hâte par les huguenots entre les deux armées. Ses cavaliers furent culbutés ou arrêtés brusquement sous le feu des mousquetaires ennemis ; quatre pièces de canon complétèrent leur déroute. Henri de Guise, mêlé aux fuyards, fut chargé vigoureusement par Condé ; il fallut que l'armée catholique s'ébranlât tout entière pour le dégager. Sans les sages mesures de Biron, toute la cavalerie du duc de Guise aurait été perdue par sa faute.

L'hiver suspendit momentanément les hostilités ; mais dès le mois de février de l'année suivante, Henri de Valois reprit l'offensive, tandis que Condé se rapprochait des montagnes du Rouergue pour y rallier les sept vicomtes qui promettaient toujours leur arrivée, comme au temps de la première guerre civile. Par une marche habilement dirigée, Tavannes et Biron réussirent à lui barrer le chemin ; les deux années se retrouvèrent de nouveau face à face, le 13 mars 1569, près de Jarnac, et se livrèrent bataille.

Le début de la journée semblait favorable aux huguenots, à cause d'une nouvelle faute du duc de Guise : M. de Guise et quelques autres se hastèrent tant, qu'ils arrivèrent où estoient les ennemis[24]. Cette troupe étourdie fut repoussée, Guise tomba de cheval[25], mais l'armée catholique survint assez tôt pour le dégager. Condé eut le bras casse dans une charge, et fut fait prisonnier. La déroute des huguenots fut complète ; à plus de huit lieues du champ de bataille, devant Saintes, ils laissèrent prendre, dans leur fuite, la cornette de l'amiral.

Pendant la poursuite des vaincus, les vengeances privées cherchaient les prisonniers. Le capitaine des gardes de Henri de Valois, un brave et vaillant gentilhomme[26], parle à ce prince, le quitte, découvre Condé prisonnier et blessé au pied d'un arbre, et descharge son pistolet dans sa teste. C'était le début du jeune général de l'armée victorieuse : il faisait disparaître son ennemi Condé. Sa carrière commençait par le meurtre du chef des huguenots, elle se terminera par l'assassinat du chef des catholiques. Un des gentilshommes attachés à la maison de Montmorency vit amener devant Henri de Valois Robert Stuart, celui qui avait tué le connétable à la bataille de Saint-Denis : il parla aussi de sa vengeance, reçut la permission qu'il demandait, et poignarda le prisonnier en achevant de parler à Monsieur, qui en ouït les coups[27]. Un autre prisonnier, Chastelier-Portal, qui avait tué Charry, fut également déchiré le soir à coups de poignard[28]. Chascun est là pour son escot, mais de tels coups se doibvent faire sur la chaude-colle, et non de sang-froid[29].

Les basses rancunes trouvent toujours leur satisfaction dans les discordes intestines ; elles savent mettre à leur service le prétexte des proscriptions ou celui des hasards d'une bataille. La mort de Condé ne sembla pas suffisante pour satisfaire Henri de Valois : il voulut voir le corps de celui qu'il avait détesté, jeté ignominieusement sur une ânesse, d'après une vieille coutume des combats judiciaires.

Mais il recueillit peu d'honneur de cette grande victoire. Le cardinal de Lorraine comprit que s'il laissait établir cette nouvelle réputation, il verrait ses nepveux exclus du commandement[30], et il s'appuya de l'opinion de la cour de Rome, pour faire croire que le succès de la journée était dû à la promptitude de décision montrée par Henri de Guise. Le Pape écrivit au jeune duc de Guise qu'en l'honneur de son triomphe il auroit fort souhaité luy envoyer un présent, mais estant fort pressé d'argent, il pouvoit compter en récompense sur la faveur des biens célestes avec lesquels tous les biens de la terre ne pouvoient entrer en comparaison[31].

Ainsi, Henri de Valois voyait surgir un nouveau rival qui commençait par lui arracher sa gloire, à l'heure même où U se débarrassait de son ennemi. Cet allié, qu'il avait pris plaisir à appeler et à fortifier, devenait le véritable adversaire.

Les discussions entre les deux Henri arrêtèrent les progrès de l'armée victorieuse, et l'empêchèrent d'enfermer Coligny dans Saintes, et de l'y assiéger. Henri de Valois ne sut pas retenir ses généraux autour de lui, et laissa le comte du Lude emmener une partie de l'armée pour assiéger Niort.

Dans les murs de Niort, la brèche fut promptement praticable ; la comtesse du Lude, présente à l'assaut, entre autres butins, promettoit les belles filles à discrétion[32]. Mais les filles de Niort furent vaillamment protégées. Les catholiques, repoussés dans leur attaque, durent lever le siège. Pendant ce temps, l'armée vaincue se réorganisait. Jeanne d'Albret faisait prêter serment de fidélité à son fils Henri de Navarre, et à Henri de Condé, fils du prince tué à Jarnac : ils avaient, l'un dix-sept, l'autre seize ans. Les réformés, qui les avaient surnommés les pages de l'amiral, eu les voyant écouter docilement les avis du vieil homme de guerre, furent fiers d'avoir dans leurs rangs deux princes du sang, et se laissèrent conduire par Coligny au-devant des renforts qui arrivaient d'Allemagne ; ils perdirent encore deux de leurs principaux généraux : d'Andelot le 27 mai, et, le 11 juin, le duc des Deux-Ponts, chef des auxiliaires allemands. Mais une nouvelle campagne commença comme si la bataille de Jarnac n'avait pas eu lieu, et les réformés se trouvèrent les plus forts à leur tour.

Dès le 23 juin, les deux armées furent en présence près de Saint-Yrieix ; un ruisseau les séparait : MM. de Guise et de Martigues firent la plus grande faute ; sans commandement, passent le ruisseau avec deux cents chevaux, ]a plupart volontaires, donnent chaleur à toute l'infanterie qu'il n'y eut plus moyen de retenir, et poursuivent plus de quinze cents pas, par delà le ruisseau, les ennemis[33] ; mais tandis que cette masse d'infanterie se répand sans ordre, les huguenots rassemblent leurs forces ; quatre mille chevaux paroissent, leur tombent dessus, suivis de toute l'armée huguenote : aussitost M. de Guise avec ses deux cents chevaux tourne, abandonne l'infanterie, qui est à peu près détruite : les capitaines se font tous tuer, il en reste quarante sur le terrain. — Je disois bien vray que ces jeunes gens gasteroient tout, s'écrie le maréchal de Tavannes ; puis, quand il voit rentrer le duc de Guise lassé et confus, il lui lance ces paroles cruelles : Monsieur, avant qu'entreprendre il faut penser ; il vous fust esté plus louable de vous perdre et mourir, que faire ce que vous avez fait[34].

La nécessité de rester à la tête des plus aventureux, et le désir d'être regardé comme le plus hardi, poussaient Henri de Guise aux entreprises les plus insensées. Bientôt il eut une occasion de prendre sa revanche. Apprenant que Coligny profitait de ce succès et de l'affaiblissement de l'armée royale pour mettre le siège devant Poitiers[35], il résolut de délivrer cette place et demanda à se porter en avant avec toute la cavalerie. Henri de Valois lui objecta que son armée serait réduite à l'impuissance s'il laissait partir une force aussi considérable. Henri de Guise répliqua fièrement : Le Roy m'a donné la charge de colonel général des chevau-légers, et il faut que je sois indigne de ma charge si je ne la fais ! Henri de Valois, quoyqu'à son grand regret, luy accorda son congé pour aller à la guerre entre le camp des ennemis et le nostre seulement. Et toutesfois, la première nouvelle qu'il en eut, fut qu'il s'estoit allé jeter dans Poitiers avec ce qu'il avoit emmené[36].

Cette entreprise était plus sensée que les précédentes. Au lieu d'une ivresse de quelques instants dans un tourbillon de chevaux et d'épées, le duc de Guise revenait à l'école des longues veillées, de l'attention continuellement soutenue, de l'opiniâtreté dans le courage, des ressources que tout instant force à improviser, de l'habitude du commandement sérieux et des ordres précis. Il cessait de se faire le prince d'une jeunesse fougueuse, indisciplinée, et qui s'attirait sans cesse des leçons et des revers, pour rentrer dans la légende de sa famille : il cherchait, par la défense de Poitiers, à rappeler la défense de Metz.

Poitiers était aussi mal fortifiée que Metz autrefois : la ville était dominée de tous côtés, et les assiégés pouvaient être tués dans les rues[37] ; les murailles étaient délabrées et mal flanquées ; somme, c'est une méchante place et digne d'honorer un défendeur[38]. En même temps, l'ardeur des huguenots se trouvait excitée par l'appât de la riche proie que le succès promettait de placer entre leurs mains ; toute la noblesse catholique du Poitou était enfermée dans la ville avec le duc de Guise et son frère le marquis, plus tard duc de Mayenne : c'étaient d'énormes rançons et de précieux otages, un gage presque certain d'une paix avec les garanties nécessaires.

De son côté, le duc de Guise sut animer le courage de la garnison et profiter du secours des douze cents cavaliers introduits avec lui dans la place pour retarder l'investissement et prolonger la défense des faubourgs[39]. Le 24 juillet, une colonne de huguenots enleva le fort Saint-Ladre ; Piles, le chef de cette colonne, poussa jusqu'aux remparts, mais il fut arrêté par le canon de la place et par une sortie de six cents cavaliers français et italiens que le duc de Guise dirigea en personne pour reprendre le faubourg. Guise ne put, toutefois, occuper que les maisons les plus voisines de la porte de Poitiers ; il les fit raser à la hâte, pendant que les huguenots crénelaient les autres. Au bout de quatre jours, les faubourgs furent pris, et les assiégés se trouvèrent resserrés dans l'enceinte. L'artillerie commença bientôt à battre les remparts. Pour pouvoir approcher des brèches qu'elle ouvrait, il fallait traverser un bras de rivière. Avec des tonneaux, Coligny improvisa un pont en une nuit ; mais la nuit suivante Guise réussit à détruire ce pont de tonneaux. Coligny en fit deux autres, et parvint à s'emparer d'une brèche contre une vieille tourelle ; ses soldats s'y logèrent, s'y maintinrent : aussitôt Guise fit barrer la rivière par des pieux que reliaient des ballots de laine. L'eau reflua dans les prairies, les inonda, emporta les ponts, isola les soldats qui s'étaient attachés à la tourelle en ruine. Coligny fit tracer des fossés pour écouler les eaux et assécher les prairies ; mais pendant ce temps Guise avait fait réparer les brèches. C'était une lutte savante entre les deux ennemis : toutes les ressources étaient successivement employées et combattues. La canonnade durait depuis un mois[40] : Coligny voyait ses Allemands épuisés par ce soleil de juillet et d'août et ce séjour dans des prés. Pour remonter leur moral, il voulut tenter un coup de main sur Nantes, sans arrêter l'attaque de Poitiers ; cette nouvelle entreprise fut empêchée par une singulière superstition, qui fait comprendre l'état d'exaltation dans lequel poussaient tant d'aventures héroïques et romanesques. L'expédition était dirigée par Téligny, fils adoptif de l'amiral : elle comprenait douze cents cavaliers. Il y eut de notable que aïant trouvé au matin une bague qui avoit perdu son esmeraude, Téligny renvoïa les exécuteurs, et n'y eut moïen de lui redonner espérance perdue avec le vert de son esmeraude[41].

Pour ôter également l'espérance aux assiégés, Coligny avait fait détruire leurs moulins, de sorte que la farine ne tarda pas à manquer et que le pain fut distribué bien chichement[42]. Mais la disette de pondre vint bientôt tourmenter à leur tour les huguenots : leur armée n'était pas organisée pour un siège d'aussi longue durée : ils n'avaient ni gi'0S8e artillerie, ni munitions, ni pionniers, et quand ils avaient ouvert une brèche, ils ne pouvoient poursuivre vivement la batterie ni les autres ouvrages, et puis après il falloit recommencer autre part batteries nouvelles[43]. Coligny donna enfin le signal de l'assaut. La nombreuse cavalerie de Guise rendait cette opération dangereuse ; car, en cas d'insuccès, elle débouchait sur les assaillants et pouvait s'avancer jusque dans leur camp : devant les deux brèches ouvertes vers la fin d'août se tenaient à cheval le duc de Guise à l'une, le comte du Lude à l'autre, toute la noblesse eschauffée à bien faire par la vue d'une notable haie de cavalerie, c'estoient soixante et quinze dames montées sur bons chevaux, tous bien empanachés, qui prirent leur place de bataille assez près du combat pour estre fidèles et dangereux témoins des valeurs et laschetés[44]. Parmi elles se trouvait, entourée des dames de Ruffec, de Bois-Séguin et des Arpentis, la comtesse du Lude, qui avait à se faire protéger contre le sort promis par elle quelques semaines auparavant aux jeunes filles de Niort.

Le brave Piles s'élança à l'assaut avec les réformés gascons ; mais les Allemands qui devaient le soutenir prirent peur en voyant la belle contenance des assiégés, et rentrèrent silencieusement dans leurs quartiers[45]. Piles, ainsi abandonné sur la brèche au milieu de l'assaut, fut renversé d'une arquebusade dans la cuisse et repousse avec ses Français.

On était au commencement de septembre, le siège durait depuis la fin de juillet ; l'amiral voyait le découragement de son armée, il attendait un prétexte honorable pour lever le siège. Henri de Valois ne tarda pas à le lui offrir, et l'armée catholique fit beaucoup d'honneur aux huguenots quand elle vint attaquer Châtellerault, car ce leur fut une légitime occasion de lever le siège, qu'aussi bien eussent-ils levé. M. de Guise et son frère acquirent grand renom d'avoir gardé une si mauvaise place, estant encore si jeunes comme ils estoient, et aucuns ne prisoient moins cest acte que celui de Metz[46].

Le parti sut vanter bruyamment cet exploit. Henri de Guise fut comparé à son père. Il reçut droit de séance dans le conseil du Roi. Il se vit accueilli par les acclamations de l'armée catholique, lorsqu'il la rejoignit à la tête de sa brave cavalerie de Poitiers. Ses anciennes étourderies étaient rachetées, il n'avait plus à craindre des remontrances comme celles qu'il avait dû essuyer de Tavannes.

Juste un mois après le dernier assaut de Poitiers, le 3 octobre 1569, les deux armées étaient de nouveau en présence, dans les plaines de Montcontour. Tandis que Tavannes et Biron rangeaient les catholiques en bataille, l'amiral de Coligny perdait sa matinée à discuter avec les Allemands, pour les décider à prendre position, obtenait tardivement, par ses instances et par les exhortations des ministres, qu'ils consentissent à combattre, mais ne réussissait à les y déterminer qu'au moment où les collines qu'il voulait leur faire occuper étaient déjà aux mains des catholiques. Avant même que la bataille eut commencé, Coligny était déjà affaibli par cette indiscipline. Cette infériorité faillit toutefois être compensée par une nouvelle faute du duc de Guise. Follement, et contre toute disposition stratégique, Henri de Guise se jeta en avant et fut suivi de la cavalerie ; Henri de Valois lui-même, envieux de la popularité que donnaient ces charges risquées, galopa sur les huguenots comme un simple volontaire. Ce tourbillon eut bientôt balayé les reîtres qui disparurent du champ de bataille, mais il se brisa sur trois régiments de gens de pied français[47] qui firent face aux chevaux ; en même temps, l'artillerie des huguenots lançait des boulets dans cette masse de cavalerie ; Henri de Valois eut son cheval tué, le duc de Guise y fut fort blessé d'une grande pistolletade au bas de la jambe, et en grand danger de la mort[48]. Il fut trois mois sur son lit et ne prit plus part aux autres événements de la guerre. Sa faute, comme à Dreux celle du connétable, semblait donner la victoire aux huguenots, lorsque, pour la réparer, Tavannes et Biron firent avancer au pas de course les Suisses et les vieilles bandes françaises. Cette attaque de l'infanterie décida en quelques minutes du succès de la journée : les huguenots furent mis en déroule, leurs lansquenets furent surpris par les Susses, leurs anciens ennemis, si bien qu'à peine de quatre mille, s'en sauva-t-il cinq cents[49]. Leurs gens de pied français furent sauvés d'un pareil massacre par le dévouement d'un vieillard héroïque : Saint-Cyr Puygreffier, ayant rallié trois cornettes, recogneut que par une charge il pouvait sauver la vie à mille hommes :A gens de bien courte harangue, dit le bonhomme ; frères et compaignons, voicy comment il faut faire ! — Et il poussa en avant : les cavaliers suivaient silencieusement à vingt pas ce chef étrange, aagé de quatre-vingt-cinq ans, couvert d'armes argentées jusqu'aux grèves et sollerets, le visage découvert avec une barbe blanche comme neige ; ils reprirent pour quelques instants l'offensive, se firent tuer, et ainsi le bonhomme sauva plusieurs vies par sa mort[50]. Depuis la bataille de Jarnac, les prisonniers n'étaient plus épargnés ; pendant que les catholiques faisaient passer le pas[51] à ceux qu'ils avaient enlevés parmi les huguenots, les rares prisonniers catholiques étaient assassinés, entre les mains des cavaliers français qui les emmenaient, par les reîtres irrités de n'avoir ni paye, ni butin[52].

Pendant ce temps, Coligny, qui avait reçu un coup de pistolet dans la bouche, était emporté, les dents brisées, la joue déchirée, le sang dans la gorge, se voyant sur la teste le blasme des accidents, le silence de ses mérites, un reste d'armée qui mesme avant le désastre désespéroit déjà, enduroit ces pointures plus cuisantes que sa fascheuse plaie. Comme on le portoit en une litière, Lestrange, cheminant en mesme équipage et blessé, fit avancer sa litière au front de l'autre, et puis, passant la teste à la portière, regarde fixement son chef ; ils se séparent la larme à l'œil, avec ces paroles :Si est-ce que Dieu est très-doux, — sans pouvoir en dire davantage[53].

Henri de Valois ne sut pas plus profiter de cette victoire que de celle de Jarnac ; il épuisa inutilement son armée au siège de Saint-Jean d'Angély, bronchant à la mesme pierre que Coligny à Poitiers[54]. Le brave Piles, à peine remis de sa blessure de Poitiers, avait pris le commandement de Saint-Jean d'Angély ; il s'y défendit sept semaines, et fit périr trois mille assiégeants[55]. Charles IX, un peu inquiet de l'ascendant que donnaient à son frère deux batailles gagnées en une seule année y était venu prendre en personne le commandement de l'armée ; c'était contre son roi que Piles avait le dangereux honneur de se défendre ; ce fut le Roi qui lui accorda la capitulation, et signa le sauf-conduit qui le laissait libre avec sa garnison. La signature royale ne les garantit toutefois de l'outrage qui fut rendu, contre l'intention de Sa Majesté, à beaucoup, par l'insolence et la liberté des soldats, qui s'émancipèrent de dévaliser ceux qui estoient mieux accomodez[56].

A partir de ce moment, l'indiscipline des troupes, la dispersion des efforts, l'épuisement du pays, donnent à cette guerre un caractère de barbarie, nouveau même pour l'époque[57]. Chaque province, chaque ville a sa guerre locale. Les massacres de septembre 1792 et ceux de la glacière d'Avignon ont leur modèle dans les prisons d'Orléans en 1569 ; les huguenots d'Orléans avaient reçu Tordre du prévôt que pour leur seureté et celle de la ville, ils se logeassent dans les prisons ; ils s'y réfugièrent en effet. Le peuple, esmeu par les prèscheurs, fit mourir tout ce qui estoit dedans, sans distinction de sexe ni d'âge ; dans l'une de ces prisons, celle de la Tour des Quatre-Coins, il ne put forcer les portes, il mit le feu où tout le voisinage porta grande quantité de bois. Deux cent quatre-vingts personnes y furent étouffées ou consumées. C'était même ce peuple d'Orléans qui, sept ans avant, avait acclamé Condé et d'Andelot quand ils semblaient les plus forts. A la nouvelle de ces meurtres, les huguenots des villages voisins prirent la fuite : ils formaient une bande misérable de quatre cent soixante paysans, femmes, enfants, qui se traînaient sur les bords de la Loire, poursuivis par des cavaliers partis d'Orléans. Bientôt les exécuteurs approchèrent ; les paysans quittèrent la berge, et se cachèrent au milieu des saules et des broussailles dans le lit du fleuve. À l'horizon apparut une nouvelle troupe d'hommes à cheval ; ils se crurent cernés, s'agenouillèrent sur le sable et se préparèrent à la mort en chantant leurs psaumes. La nouvelle troupe était celle du capitaine Teil, un chef huguenot qui accourait à leur secours et qui mît en fuite les soldats d'Orléans[58]. A Montpellier, le peuple se mutina, força la maison de Fargues, la pilla pendant toute la nuit. Les meubles et épiceries valoient plus de dix mille livres. Le lendemain samedi, le peuple alla assiéger la maison de ville, força le juge-mage et les consuls à condamna à mort Fargues, et le mena sur le champ à sa maison, où il le fit pendre aux plus hautes fenêtres, où il demeura tout le lendemain dimanche. Sa boutique étoit pleine des meilleures odeurs, et le Roy, en passant à Montpellier, avoit bien daigné y entrer et y prendre la collation[59].

Dans le Béarn, en dirigeant l'assaut de Rabastens, Blaise de Montluc eut la joue fracassée d'un coup d'arquebuse qui lui laissa une cicatrice asses profonde pour l'obliger à porter par la suite un masque sur le visage : il se crut frappé à mort ; il étouffait dans son sang et râlait quand on vint lui annoncer que la ville était prise ; en ce moment, il n'eut qu'une pensée ; pouvant à peine parler : — Monstrez-moi, dit-il, l'amitié que vous m'avez portée, et gardez qu'il n'en échappe un seul qui ne soit tué. — L'on voulut sauver le ministre et le capitaine de là dedans pour les faire pendre devant mon logis, mais les soldats les ostèrent à ceux qui les tenoient, et les mirent en mille pièces ; ils en firent sauter cinquante ou soixante du haut de la grand'tour dans le fossé, lesquels se noyèrent. li se trouve que l'on en sauva deux qui s'estoient cachés, et la plupart des femmes furent tuées[60].

Ce n'était plus la passion religieuse, c'était la rage de ne pas réussir à terminer la lutte, et cette frénésie qui survient si promptement dans les guerres entre compatriotes ; car, au plus fort du carnage, Montluc apprit que M. de Gramont estoit tout auprès de là, bien à son ayse, qui voyoit le tout, et parce qu'il est de ceste belle religion nouvelle, encore qu'il n'aye porte les armes contre le Roy, il craignoit se mesler parmi nous autres. Il envoya près de Gramont un gentilhomme pour lui faire savoir qu'il n'avoit point d'inimitié contre M. de Gramont, et quand il viendroit, il cognoistroit qu'il avoit autant d'amis dans nostre camp qu'à celuy de leur religion. Ce huguenot venait d'arriver et se tenait près de Montluc quand survint M. de Goas, tout couvert de sang, qui s'écria : — Asseurez-vous que nous vous avons bien vengé, car il n'y est demeuré une seule personne en vie. — Alors ils recognent M. de Gramont et s'embrassèrent. M. de Gramont le pria de l'amener au chasteau, ce qu'il fist.

Ces luttes atroces se prolongèrent tout l'hiver et le commencement de l'été suivant : Coligny était dans le désespoir ; pas de malheur qui ne lui parût préférable à la prolongation d'horreurs semblables. Ce fut le 8 août 1570 seulement que la paix put être conclue. Mais telle était encore la surexcitation des passions, et telle l'habitude de la cruauté, que, dans la marche en pleine paix de l'armée royale vers Paris, Strozzi, qui avait hâte de se retrouver à la cour, donna de sang-froid un ordre qui fait frémir ; il remarqua que les ponts de Cé, près d'Angers, étaient encombrés par les bagages et les femmes des soldats ; sa colonne était retardée ; il fit saisir les femmes et les fit jeter dans la Loire, pour dégager le passage sur les ponts. Il noya de la sorte huit cents de ces créatures en quelques minutes[61] ; elles criaient pyteusement à l'ayde. Cette inutile brutalité ne fut jamais trouvée belle des nobles cœurs et mesme des dames de la cour qui l'en abhorrèrent étrangement ; car possible aucunes se fussent converties et eussent servy Dieu, comme il s'en est veu[62]. En tout cas, c'était s'aviser bien tard et par un procédé étrange de rétablir la discipline.

Cette paix du 8 août 1570, signée à Saint-Germain, autorisait le libre exercice du culte réformé, au grand dépit des soldats catholiques : Nous gaignions par les armes, mais ils gaignoient par ces diables d'escritures[63]. Henri de Valois commençait à voir que Henri de Guise avait grandi plus que lui durant la guerre ; ce rival s'était révélé subitement sous ses ordres, au moment où il croyait le mieux s'assurer la prépondérance. Peu à peu u s'était irrité de ses désobéissances flagrantes et continuelles à ses ordres, et de ces airs de prince de la jeunesse que se permettait le duc de Guise. Ce n'était pas la peine d'avoir détroit, au risque de son honneur, un rival compromis par sa foi religieuse, comme Condé, pour voir surgir tout à coup un autre compétiteur, l'idole du parti catholique, le modèle de la nouvelle chevalerie, le fils du glorieux Balafré. L'esprit militaire était tel à cette époque, qu'un général ne perdait rien de sa réputation quand il avait éprouvé les revers les plus humiliants, comme le connétable de Montmorency ou Henri de Guise, pourvu qu'il eût fait preuve de bravoure et su diriger avec éclat une charge de cavalerie. Un homme, au contraire, qui avait, comme Henri de Valois, gagné des batailles sans faire parade de vigueur personnelle, ne pouvait acquérir la confiance d'une armée. On aimait mieux risqué un désastre avec un chef qui donnait ses ordres le cul sur la selle, armé de toutes pièces aveques l'espée au poing, menant les mains, que se confier à la prévoyance d'un général qui comme le Nestor des Grégeois estoit un vieux penard qui ne bougeoit de sa tente et donnoit ses advis et conseils en la mode d'un morneux président[64].

Les fautes du duc de Guise avaient donc plutôt agrandi que diminué son influence sur la jeune noblesse. L'envie qu'en ressentit Henri de Valois ne fut pas étrangère à la conclusion de la paix. Le fils de Catherine eut bientôt un moyen d'humilier ce prétendant au titre de héros catholique.

Le duc de Guise, glorieux de sa défense de Poitiers, osa avouer ses prétentions à la main de la sœur du Roi, Marguerite de Valois. Il connaissait cette jeune fille depuis son enfance : jusqu'à quel point ils s'étaient unis dans leurs jeux, dans les tendres épanchements d'une première intimité, Marguerite cherche à le cacher dans ses mémoires ; les récits qui s'en faisaient pendant les fêtes de la cour et les plaisirs de cette fin de saison insistaient malicieusement sur les motifs qui rendaient probable cette union. Henri de Valois fut blessé dans son orgueil de prince par ces prétentions d'un sujet sur une fille de France. Il ne voulait pas rapprocher de lui par un mariage le seul homme qui put lui disputer le titre de général des catholiques. Il était poussé par d'autres sentiments encore. Pour sa sœur, il nourrissait une amitié morbide et bizarre, comme la plupart de ses sentiments, amitié qui comportait les fureurs jalouses et qui devait finir, ainsi qu'un amour déçu, par une haine violente. Pendant qu'avec Catherine sa mère, il cherchait à exciter l'orgueil de Charles IX, pour empêcher le mariage, il apprit que le cardinal de Lorraine, toujours insolent et fanfaron quand il voyait poindre les occasions de la fortune, rappelait l'union du jeune duc de Lorraine avec Claude de France, une autre des filles de Henri II, et, confondant la race des Lorrains et celle des Valois, disait : L'aîné a eu l'aînée, le cadet aura la cadette !

Ce propos fut répété à Charles IX. Catherine sut avec habileté soulever dans l'âme du jeune roi une de ses colères qui le jetaient pour quelques jours hors de sa raison, et faisaient fuir son approche ; une de ses crises semblait imminente depuis le siège de Saint-Jean d'Angély. Il était mécontent de la dernière guerre, inquiet de l'importance que prenaient son frère et le duc de Guise. Henri de Valois sut joindre ses insistances à celles de sa mère, fit tenir par du Guast, un de ses gentilshommes, des propos sur les relations de Marguerite et du duc de Guise. Le Roi prit feu, déclara qu'il fallait poignarder le duc de Guise, et, s'emparant de deux couteaux de chasse, dit à son frère bâtard, Henri duc d'Angoulême : — Demain, il y en aura un qui te percera, si tu ne tues pas Henri de Guise avec l'autre.

C'était le 3 octobre 1570. Le duc d'Angoulême fit prévenir le duc de Guise que sa mort était assurée. Guise essaya de garder bonne contenance, et se présenta le soir même au Louvre, vêtu de satin, couvert de pierreries, fier et souriant. Il apprit immédiatement à connaître les fureurs de Charles IX : — Je n'ai nul besoin de vous ici, — lui crie le Roi avec un regard féroce, dès qu'il le voit entrer. Le duc sort, court à l'hôtel de Nemours, fait demander sa mère, la duchesse de Nemours, et sa grand'mère, Antoinette de Bourbon, leur apprend que sa mort est décidée, tient conseil avec ces deux femmes. Il ne peut plus penser à la main de la sœur du Roi ; mais même en renonçant à ce rêve, sera-t-il en sûreté ? Le croira-t-on sincère s'il abandonne ses projets de séduction, et ne doit-il pas, pour rentrer en grâce, donner une preuve éclatante de sa soumission à la volonté royale ? Le danger est pressant, le duc d'Angoulême doit le lendemain lui chercher querelle et le faire tuer, les femmes s'inquiètent ; un seul moyen est laissé pour échapper : c'est de prouver par un mariage immédiat qu'il renonce à Marguerite, et de faire croire ainsi au Roi qu'il n'a jamais songé à elle. Antoinette rappelle alors qu'elle a parmi ses femmes une jeune veuve, Catherine de Clèves, qu'elle peut faire venir.

Catherine, fille de François de Clèves, duc de Nevers, et de Marguerite de Bourbon, était l'une des plus belles, honnestes, sages, vertueuses et riches filles de France : madame la doüairière de Guise la nourrissoit par la prière que feu M. de Nevers, son père, luy avoit faicte de la tenir en sa compaignie[65]. Sa sœur aînée, Henriette, avait épousé Louis de Gonzague, fils du duc de Mantoue ; elle-même avait été mariée à Antoine de Croy, grince de Portien, de la religion réformée. Ennemi des Guises, le prince de Portien était l'un des cavaliers qui accompagnaient le maréchal de Montmorency, lorsqu'il mit en déroute l'escorte du cardinal de Lorraine et du jeune Guise, à l'époque de leur entrée maladroite dans Paris. Il était mort quelques mois plus tard : la jeune veuve avait aussitôt abjuré la religion réformée, et était venue se replacer sous les ordres d'Antoinette.

Réveillée dans la nuit, elle arrive à l'hôtel de Nemours, l'instant même, elle se voit demandée en mariage par le duc de Guise. Elle avait été élevée dans l'admiration de ce petit-fils de sa vieille maîtresse : on lui offre de devenir l'égale de cette maîtresse, la véritable duchesse de Guise, l'épouse du nouveau héros. Elle accepte. On la prie de ne pas sortir que le mariage ne soit célébré : la nuit même elle est mariée dans la chapelle de l'hôtel de Nemours. Moins de six heures après le mot du Roi, le mariage était consommé.

Marguerite de Valois resta enfermée avec la fièvre. Quand les nouveaux époux furent reçus à Saint-Germain, le Roi parut oublier sa colère, et ne songea bientôt plus qu'à son propre mariage. Il épousa, le 26 novembre suivant, Elisabeth d'Autriche, fille de l'empereur Maximilien. C'était une fille timide et craintive qui ne connaissait pas un mot de français. — Cette allemande-là ne me fera pas mal à la teste, avait dit d'elle la spirituelle Marie Touchet, qui aimait Charles IX. Cette Allemande, après la mort de Charles IX, parut heureuse de se retirer dans son couvent en Autriche, et abandonna en France, avec peu de sensibilité, sa fille, qui mourut loin d'elle peu d'années après.

 

 

 



[1] Arch. nat., Simancas, carton B, lettre publiée par BOUILLÉ.

[2] PASQUIER, Lettres, liv. V, lettre III.

[3] BRANTÔME, Hommes illustres.

[4] Sir Henry Norris to Cecil, 6th april 1567.

[5] Le 19 novembre 1568. Arch. nat., papiers de Simancas, B. 23, pièce 69.

[6] NAVARETTE, Documentos ineditos, t. VI, p. 371 : Es increible el contentamiente con que estan los catolicos de Francia de ver pasar estas fuerzas de V. M. en Flandres, que les paresce ser esta su redempcion ; y asi me dijoun secretario del card. de Lorena. Toda la casa de Guisa estavan resueltos como las fuerzas de V. M. estuviesen en Flandres irse allos a la corte ; seran vistos diferetemente de como lo ban sido hasta aqui.

[7] Henri D'ORLÉANS, duc d'Aumale, t. III, p. 360 : Norreys to Elisabeth, 4th june 1568. — The cardinal wrote the 28 of maye unto him, wherein he requirid the prince to treade all things paste ander fote, and to remember that they were nyghe allyed together.

[8] Henri D'ORLÉANS, duc d'Aumale, t. III, p. 360: All things are ruled by mons. de Anjou who hathe his prevy counselers, the cardinal of Lorreine beinge the cheffest.

[9] Marguerite DE VALOIS, p. 43.

[10] Mars 1568. Voir BOUILLÉ, t. II, p. 397 et 406.

[11] Simancas, B. 22, p. 58.

[12] Simancas, B. 23, p. 74.

[13] PRESCOTT, History of the reign of Philipp the second, t. II, p. 114.

[14] PRESCOTT, History of the reign of Philipp the second, t. II, p. 276.

[15] Don Carlos était fils de Marie de Portugal, première femme du Roi. La seconde, Marie Tudor, et la troisième, Elisabeth de Valois, ne lui laissèrent pas de fils. Il se remaria pour la quatrième fois en 1570.

[16] DE CIRCOURT, Histoire des Arabes d'Espagne ; PRESCOTT, t. III, p. 145.

[17] Renseignements transmis au prince de Condé dans une dépêche qui fut trouvée dans son gant après sa mort. Cette dépêche qui existe encore est publiée par Henri D'ORLÉANS, duc d'Aumale, t. II, p. 389.

[18] TAVANNES, p. 304.

[19] Septembre 1568.

[20] TAVANNES, p. 304.

[21] BRANTÔME, t. I, p. 520.

[22] BRANTÔME, Vie de Timoléon de Cossé-Brissac.

[23] Surpris dans une maladroite sécurité au Paupre par Montgomery, le jeune duc n'eut pas le temps de mettre ses éperons et dut s'enfuir en sautant sur le cheval d'un de ses gentilshommes ; il laissa ainsi aux mains des huguenots ses estrières et espérons et trente-six pièces de sa vaisselle d'argent. LA MOTHE-FÉNELON, Correspondance, t. I, p. 148.

[24] Guillaume DE TAVANNES, p. 459.

[25] TAVANNES, p. 305.

[26] BRANTÔME, disc. LXXX.

[27] D'AUBIGNÉ, p. 280.

[28] D'AUBIGNÉ, p. 280.

[29] BRANTÔME, M. le Connétable, p. 326.

[30] TAVANNES, p. 339.

[31] Archives de la maison d'Orléans, ancien inventaire de Joinville, II, 414, publié par BOUILLÉ, t. II, p. 425.

[32] D'AUBIGNÉ, p. 290.

[33] TAVANNES, p. 323.

[34] TAVANNES. Cette affaire s'est appelée le combat de Roche-Abeille.

[35] Juillet 1569.

[36] Guillaume DE SAULX-TAVANNES, p. 464.

[37] VARILLAS, p. 233.

[38] LA NOUE, p. 634.

[39] D'AUBIGNÉ, p. 208.

[40] CASTELNAU.

[41] D'AUBIGNÉ, p. 301.

[42] D'AUBIGNÉ, p. 301.

[43] LA NOUE.

[44] D'AUBIGNÉ, p. 300.

[45] VARILLAS, p. 234.

[46] LA NOUE.

[47] CASTELNAU, p. 547.

[48] BRANTÔME, t. I, p. 419.

[49] CASTELNAU, p. 548.

[50] D'AUBIGNÉ, p. 808.

[51] LA NOUE, p. 637.

[52] MERGEY.

[53] D'AUBIGNÉ, p. 309.

[54] LA NOUE.

[55] CASTELNAU, p. 550.

[56] CASTELNAU, p. 550.

[57] La campagne de 1569 peut se résumer dans les dates suivantes :

13 mars, bataille de Jarnac ;

23 juin, combat de Saint-Yrieix (dit de Roche-Abeille) ;

22 juillet, entrée du duc de Guise à Poitiers ;

7 septembre, Coligny lève le siège de Poitiers ;

3 octobre, bataille de Montcontour.

La campagne de 1570 se prolonge sans fait saillant jusqu'au 8 août.

[58] D'AUBIGNÉ, p. 293.

[59] PHILIPPI, Mémoires, coll. Didier, t. VIII, p. 634.

[60] MONTLUC, p. 353.

[61] LE PIPRE, Abrégé chronologique de la maison du Roi.

[62] BRANTÔME, Vie de Timoléon de Cossé-Brissac, t. I, p. 666 : La troisième paix faite, M. de Strozii voyant ses compaignies embarrassées par trop de garces et... des soldats, et ayant fait faire plusieurs bandons pour les chasser, et voyant qu'ils n'en faisoient rien, ainsi qu'on les passoit sur les ponts de Cé, il en fit jeter pour un coup du haut en bas plus de huict cents.

[63] MONTLUC.

[64] BRANTÔME, M. le Connétable, t. I, p. 328.

[65] BRANTÔME, les Duels, p. 321.