Athènes (de 480 à 336 av. J.-C.)

 

CHAPITRE VI

 

 

DE 445 A 429 Av. J.-C. - Périclès. - L’Athènes impériale. - Révolte de Samos et de Byzance. - Colonies. - Aspasie. - Les nouveaux Athéniens : Marins, Ouvriers, Campagnards. - Les Grands et les Petits. - La foule. - Dénonciateurs et suspects. - L’influence de la parole. - Monarchie, Oligarchie, République.

 

SIMPLE stratège, mais très populaire, Périclès gouvernait les Athéniens. La ville de Pallas, maîtresse d’Égine et de l’Eubée, qui étaient comme des forteresses en mer défendant l’Attique, surveillant la Thrace par Thasos, la Macédoine par Eion, la Chersonèse et le nord de la mer Égée par des colons attentifs, l’Asie enfin par Naxos, Athènes se vantait des mille cités tenues sous sa gloire, de ses alliés nombreux, de ses colonies prospères.

Cette sorte de suzeraineté substituée à l’alliance, à la confédération qu’Aristide avait préparée, résultait de l’offre faite par Cimon aux villes alliées, et accepté par elles, de fournir en argent la valeur des troupes qu’elles devaient envoyer. Cette innovation avait détruit la force de la Ligue, en diminuant le nombre des guerriers entretenus, en humiliant les villes assujetties, en habituant les Athéniens à recevoir des tributs en argent, comme les rois d’Asie.

Les temps magnifiques, et simples, où par des sacrifices solennels, par le jet symbolique d’une boule de fer dans les flots bleus de la mer vaste, les Hellènes engageaient leur amitié secourable, étaient passés ; Athènes, maintenant, supputait les bénéfices de ses triomphes et, ville marchande, vendait de la sécurité ; elle regardait, non sans complaisance, voguer çà et là les flottes phéniciennes, ennemies, mais dont la menace permanente assurait la rentrée des tributs.

Les villes alliées, d’ailleurs, presque toutes en grand trafic, supportant volontiers cette vassalité protégée, donnaient aux Athéniens une confiance trompeuse. Samos, très importante, proposa de transporter à Athènes le trésor commun dont Aristide avait confié la garde aux prêtres du temple de Délos (460). Et ce fut Samos pourtant, la première, qui s’impatienta. Probablement excités par des envoyés d’Artaxerxés, les Samiens livrèrent aux Mèdes leur garnison athénienne. Ce coup d’audace avait été prémédité, puisque les guerriers d’Athènes, aussitôt envoyés, ne trouvèrent plus à Lemnos les otages qui y répondaient de la fidélité des Simiens. Byzance fit comme Samos. Des hérauts annonçaient partout la révolte contre la suprématie des Athéniens.

Athènes arma 60 navires et nomma dix généraux, — parmi lesquels Périclès et Sophocle, — qui furent chargés de châtier Byzance et Samos, en surveillant la flotte phénicienne favorable aux Samiens, sans doute aux ordres du Grand-Roi.

Le siège de Samos dura neuf mois. Périclès y grandit comme ingénieur, imaginant des machines pour battre et renverser les murs. La famine seule eut raison des assiégés. La haine la plus violente animait les adversaires ; dans les deux camps, on marquait au fer rouge les prisonniers. Ni le Grand-Roi, ni les Péloponnésiens ne vinrent au secours des révoltés. Cette double trahison eût pu ramener les Samiens dans la confédération, si les atrocités commises de part et d’autre, pendant la lutte, n’avaient définitivement séparés les alliés. Samos tombée, Byzance se soumit.

Périclès, tout glorieux de ce succès qu’il s’appropria, manqua de mesure : il fatigua la mer des promenades de ses vaisseaux victorieux et fut impitoyable dans la répression. Il voulait partout des colonies trafiquantes et militaires, rêvait d’une sorte d’empire organisé. De Byzance à Thurium, Orée, Chalcis, Naxos, Andros, Amphipolis, Sinope, Amisos, etc., devaient être, dans son projet, des points stratégiques, impériaux. L’Attique ne pouvant pas nourrir ses habitants, Périclès érigea en système la distribution des terres aux colons. L’île d’Égine fut ainsi donnée tout entière. Mais ces colonies athéniennes, dès le premier jour, se troublèrent d’éléments divers, étrangers, et la fidélité des colons ne se mesura bientôt qu’à l’ampleur des services de la métropole.

Périclès, qui ne fut même pas archonte, ne dominait que par l’autorité de son génie. Il voyait admirablement tout ce qu’il était possible de réaliser avec le Peuple athénien à ce moment, et il voulait accomplir cette merveille. Très calme, très prudent, très réfléchi, d’une indomptable ténacité quant à l’exécution de sa pensée générale, il ne songea pas, semble-t-il, à l’énorme dépense qu’il allait faire, trop tôt, d’énergies latentes, d’intelligences réservées, de forces jeunes, à l’épuisement des hommes et des choses qu’il préparait. L’orgueil d’Athènes augmentait son propre orgueil ; il allait bouleverser la Grèce, — Aristophane l’a dit, — épuiser le trésor des siècles. Sa parole vigoureuse, nette dans ses affirmations, était pleine de grâce lorsqu’il discutait, subjuguant l’adversaire et enflammant l’ami à la fois. Eupolis dit que les arguments de Périclès laissaient un aiguillon dans l’âme. Son maître, Zénon, lui avait donné l’art de lancer la foudre comme un Jupiter, de draper d’éloquence la fécondité prestigieuse de son esprit.

L’éloquence de Périclès eut une influence considérable. La langue hellénique n’avait qu’un mot, — logos, — pour exprimer la pensée, le raisonnement et la parole. Mais lorsqu’il fut constaté que la parole était une puissance, l’art oratoire naquit, et des orateurs vinrent, notamment de Sicile, qui rompirent le lien unissant la parole à la pensée, se servirent de l’éloquence comme d’un instrument ou d’une arme.

Tranquille, affectant une vie modeste et bien réglée, dédaigneux des plaisirs bruyants, tout à son œuvre, indifférent, — d’apparence au moins, — aux injures comme aux flatteries, Périclès suivait sa voie, faisant la gloire d’Athènes, ayant à ses côtés, on dirait volontiers pour disciples, Phidias, Euripide, Sophocle, Protagoras, Zénon, Anaxagore, Socrate, et près de lui, comme un ami, sa seconde femme, l’ionienne Aspasie, de Milet, amante parfaite.

Dans la conception magnifique de Périclès, le monde, entier se concentre en Hellénie et l’Hellénie se résume en Athènes, sorte de musée et de séminaire où tout ce qu’il y avait de grand et de beau devait aboutir et s’apprendre. Euripide exprime ce rêve réalisé : La ville tout entière est l’école de la Grèce ! Sous Périclès, Athènes c’est toute la ville, et non plus seulement l’acropole, la citadelle de Pallas.

L’antique Cité très égyptienne, la vieille Terre de Cécrops, au fond pélasgique, ouverte à tous, favorable aux voyageurs et par l’active curiosité des Athéniens, et par la bienveillance aryenne inépuisable, incorrigible, se contusionnait de races diverses. La Pallas venue de Libye y conservait son costume, avec l’égide, mais subissait l’influence phénicienne. De Nauplie, dans le golfe d’Argos, et de Kranœ, en Laconie, les marchands de Tyr, — accourus jadis pour s’approvisionner des coquillages donnant la pourpre, — passés en nombre au Pirée, puis à Athènes, y avaient répandu l’esprit de la Phoiniké, déplorable.

Les modifications étaient sensibles. Les Athéniens ne se considéraient plus comme des Aryens. Hérodote déclare que les Pélasges de la Cité de Pallas sont devenus des Hellènes et que les Ioniens évitent de prendre cette dénomination. Les Communes aryennes de l’Attique, indépendantes, célèbres sous Cécrops et les premiers rois, jusqu’à Thésée, n’existent plus. Les bannis et les proscrits de toutes cités, reçus presque comme des concitoyens, venaient avec leurs turbulences ; les hommes de pays divers, admis à la vie publique, en contact permanent, mais sans se confondre, empêchaient l’union ; tandis que de vrais Grecs, misérables, affamés, s’expatriaient. De là cette civilisation mobile des Athéniens, après les guerres médiques.

L’incertitude ethnographique ne déplaisait pas aux ambitieux. Thucydide fera cette remarque juste, que si la population des villes est nombreuse et mélangée, les changements de gouvernements et l’adjonction de nouveaux citoyens y rencontrent peu de difficultés. La fondation du Pirée, cette Athènes maritime, avait introduit dans la vie athénienne la violence des gens de mer, de l’armée des Marins, hommes sans frein, dit Euripide, prompts au mal, mais au bien aussi quand ils le veulent, ce qui exigeait une surveillance. Les Ouvriers, — ces maçons d’Aristophane, allant par la ville, leur truelle derrière le dos comme on porte les enfants, — devenus difficiles et importants, devaient être ménagés. Les Campagnards, illustrés à Marathon, qui n’avaient pas abandonné leurs champs, mais tenant à l’exercice de leurs droits, intervenaient l’esprit plein de pensées maladroites, — inquiets, soupçonneux, avares, regrettant parfois d’avoir combattu les Mèdes qui leur auraient peut-être donné la sécurité, — étaient à craindre. Et puis, les récits que l’on colportait des tortures infligées aux vaincus en Asie, du sort épouvantable qui y était réservé aux jeunes garçons les plus beaux, faits eunuques pour le service des satrapes, aux vierges les plus belles livrées au Roi-des-rois, épouvantaient, rompaient les courages.

Dans la cité, l’origine, le sang, n’était plus une garantie : J’ai vu, dit l’Oreste d’Euripide, le fils d’un homme bien né n’être qu’un homme de rien, et des enfants excellents naître de pervers. Les Démocrates et les Aristocrates se valaient. Les classes avaient le droit de se disputer l’autorité. L’esprit de mercantilisme, avec son goût exclusif des bénéfices, sa passion du gain, aveuglait : Prie et sacrifie, avait écrit Hésiode, parlant comme un rabi d’Israël, prie et sacrifie afin que, sans vendre ton héritage, tu puisses au contraire acheter celui d’autrui ; et c’était là, pour beaucoup, l’unique religion. Plutus, qui va par toute la terre et sur le dos de la large mer, était un dieu. Les gains iniques, jadis condamnés, devenaient excusables parce que les richesses donnaient la faveur populaire indispensable pour gouverner.

Par les Citoyens, la Ville fut une personnalité vivante, agissante. Le peuple tout entier, — Argos innova ce fait, — était responsable de l’acte accompli par la cité. Le roi Pélasgos ne délibérait-il pas en présence de tous les citoyens réunis ? Au temps des monarques, est-ce que les fautes des rois ne furent pas toujours expiées par les peuples ? La suppression de la royauté résultait de cette réflexion simple. Venant à l’Agora, à l’appel des conques, — à l’Agora où les hommes deviennent illustres, dit Homère, — et levant les mains pour sanctionner les décrets, le Peuple ne devait pas tarder à réclamer le droit d’exécuter ses propres votes par la délégation libre de sa volonté. La foule tendait à la royauté.

Aveugle, capricieuse, trop sensible, malveillante souvent, terrible parfois, la foule effrayait. La multitude est une calamité, dit Euripide : Encourir son blâme, c’était se perdre ; lui livrer un ennemi, c’était assurer une vengeance atroce. Rien de plus menaçant que la suspicion. Jadis, il y avait un fonds de bonté dans la masse populaire, parce que le Peuple c’était la Cité, mais la véritable et la seule cité, et toute la cité : Nous craignons la rumeur des hommes et des femmes, lit-on dans l’Odyssée. Jusqu’au désastre d’Égine, — où ce furent les femmes qui vengèrent la patrie outragée, en faisant mourir sous les piqûres de leurs agrafes le seul guerrier qui avait osé survivre à cette honte, — les mères et les épouses participèrent à la vie publique ; après, elles cessèrent d’intervenir, et ce fut la dernière lueur d’aryanisme disparaissant. La renommée dépendit des hommes exclusivement, brutalement.

L’arme nouvelle était d’autant plus dangereuse, que des milliers de mains en disposaient. Les inimitiés personnelles et les intérêts égoïstes dictèrent les accusations, les poursuites. Aux assassins succédèrent les dénonciateurs, bien plus redoutables. Des dettes se réglaient par une calomnie livrant le créancier à la mort. Des esclaves, aptes à tous les services, démoralisaient leurs maîtres. Les accusations de vénalité devenues générales, et si faciles ! et si commodes ! rongeaient les réputations. Thucydide put écrire, avec une effroyable simplicité d’expression : Quand on émet l’accusation d’improbité, le citoyen devient suspect, même s’il gagne sa cause, et s’il la perd, il passe tout à la fois pour malhabile et malhonnête.

La République était la proie des calomniateurs, parce que le Peuple était soupçonneux. Plus rien ne se faisait en vue de la chose publique sans que l’on cherchât l’intérêt que pouvait y avoir un puissant. C’eût été un désordre moral irrémédiable, si le vieil honneur aryen, pour qui tout est acceptable sauf la honte, qui supporte tout sauf la risée, n’avait réagi, dans cette confusion, contre le mercantilisme éhonté des Phéniciens, la sauvagerie affinée des Asiatiques, la brutalité des Doriens. La crainte de la moquerie, de la risée, plus cruelle que la mort, retenait les Athéniens ; elle leur tenait lieu de pudeur. La réputation de la cité divinement bâtie était un frein : Je connais leur esprit et leur nature, dit l’Iolaos d’Euripide, ils voudraient plutôt mourir, car l’honneur est tenu à plus haut prix que la vie parmi les hommes de bien.

Esclaves ou jouets de leurs impressions vives, les Athéniens devaient subir l’influence des orateurs. Aimant à parler, discoureurs présomptueux, dit Hérodote, tous les Hellènes se crurent aptes au gouvernement. Et on discourait ! Les vieillards, devenus irritables, conseillaient mal ; les discussions se terminaient en joutes d’éloquence ; les luttes de paroles faisaient injurier les grands hommes ; on évoquait les morts pour critiquer et battre les vivants. Nul ne pouvant rester indifférent, les jouteurs avaient chacun son parti ; tout Athénien, en effet, étranger aux affaires était considéré comme un être inutile, et méprisé. La Langue devenait l’arme principale : les orateurs lançaient les mots comme des traits. La Parole vient à bout de tout, dit Euripide, aussi bien que le fer des ennemis.

Ces plaies incurables, profondes, disparaissaient dans la manifestation du génie grec. La réputation d’Athènes grandissait et s’étendait. On admirait, on enviait les Athéniens délivrés de la tyrannie, devenus libres, dont le caractère, l’esprit vif, impressionnable, également ami de l’utile et du beau, savait avec une promptitude étonnante, une adresse incomparable, un goût parfait, une merveilleuse intelligence des choses, conformer ses actes aux nécessités des situations.

L’Athènes que voulait Périclès, — école de la Grèce, centre du monde hellénique, — Thucydide l’a admirablement décrite, idéalisée : Notre ville est ouverte à tous ; aucune loi n’en écarte les étrangers, ni leur interdit soit l’étude, soit les spectacles. Nous ne craignons pas que, rien n’étant caché, l’ennemi ne profite de ce qu’il pourra avoir vu ; car nous comptons bien moins sur les préparatifs, sur les ruses longuement concertées, que sur notre propre courage dans l’action. Et ensuite : Dans nos institutions politiques, nous ne cherchons pas à copier les lois des autres peuples ; nous servons de modèle au lieu d’imiter autrui. Le nom de notre gouvernement est Démocratie, parce que le pouvoir relève non du petit nombre, mais de la multitude. Dans les différends entre les particuliers, il y a pour tous égalité devant la loi ; quant à la considération, elle s’attache au talent dans chaque genre, et c’est bien moins le rang qui décide de l’élection aux emplois publics que les mérites personnels ; la pauvreté, une condition obscure, ne sont pas un empêchement du moment où l’on peut rendre quelque service à l’État.

Les clairvoyants, les patriotes, ne subissaient pas l’influence de cette rhétorique ; ils savaient le défaut d’union et de constance des Ioniens, qu’ils considéraient comme incapables de se diriger, ni dans la paix ni dans la guerre, et redoutaient à un égal degré le gouvernement des Doriens subordonnant tout à l’État et le gouvernement du Peuple sacrifiant l’État à l’individu ; et c’est pourquoi ils essayaient, à Athènes, de concilier le despotisme royal de Lacédémone et la licence sociale des Éoliens. L’extrême mobilité des Athéniens justifiait ces tentatives.

Au nom d’Athènes, dont il est à la fois le despote et le représentant démocratique, Périclès a pris possession des territoires fertiles qui suppléeront à la stérilité de l’Attique ; il a ranimé et créé des colonies qui favoriseront les trafics ; il a constitué le trésor public ; il substituera à la foi périssante, — la vigueur de la terre s’épuise, dit Sophocle, la foi périt, la perfidie croît et la remplace ! — la religion de l’Art, le culte du Beau.

L’Hellénie qui, depuis trois générations, souffrait de tous les maux possibles, tant de la part des Perses que de celle des hommes éminents se disputant la souveraineté, frémissait de joie à l’idée qu’il était possible de se délivrer des tyrans. Les Spartiates, voyant le danger, et alors possesseurs des oracles, s’appliquèrent à fortifier les gouvernements aristocratiques dans les cités. De toutes parts, en conséquence, les Grands menacés dans leur puissance se tournaient vers Lacédémone, tandis qu’Artaxerxés, régnant à Suse, ouvrait ses trésors aux ennemis du peuple athénien.

La grande affaire hellénique, passionnante, redoutable, était le choix du meilleur gouvernement : monarchique, oligarchique ou républicain ? Hérodote exposait les données du problème avec une impartialité plus que prudente, sans conclure, sans choisir : Comment la monarchie pourrait-elle être un État bien gouverné, dit Otanès, puisqu’elle permet à un homme qui n’a pas de contradicteur de faire ce qu’il veut ? je vote pour que nous abolissions la monarchie et que nous élevions la multitude au pouvoir, car tout réside dans le grand nombre. — Rien, répond Mégabyze, rien plus qu’une vaine foule n’est irréfléchi et insolent, et il n’est vraiment pas tolérable que des hommes qui veulent se soustraire à l’arrogance d’un monarque retombent sous l’insolence d’un peuple désordonné ! Élisons une assemblée d’hommes les meilleurs et donnons-lui la souveraineté. — De ces trois formes supposées excellentes, dit à son tour Darius, d’un peuple excellent, d’une oligarchie, d’une monarchie, je soutiens que la dernière est de beaucoup la meilleure. Car rien n’est préférable à un seul homme excellent. Il se conduit avec assez de prudence pour administrer d’une manière irréprochable ; et surtout il sait garder le secret concernant ses résolutions contre ses ennemis extérieurs.

Périclès, semble-t-il, rêvait d’être ce monarque, administrateur prudent et stratège mystérieux, que le Darius d’Hérodote avait défini, en laissant aux Athéniens l’apparence et le jeu d’une organisation républicaine. Que lui importait le titre de roi, s’il jouissait de tous les pouvoirs de la royauté. Penses-tu, dit Sophocle en son Œdipe, qu’on puisse aimer mieux commander au milieu des terreurs que dormir tranquille en possédant la même puissance ? Pour moi, certes, j’aime mieux faire ce que font les rois qu’être roi.