HISTOIRE DE LA DÉMOCRATIE ATHÉNIENNE

 

CHAPITRE XII.

 

 

Alcibiade allié des Spartiates et des Perses. - Complot de Pisandre. - Abolition du gouvernement démocratique.

 

Quand on avait annoncé à Alcibiade que les Athéniens l'avaient condamné à mort : Je leur ferai bien voir, dit-il, que je suis encore en vie. En partant de Thurium, il avait pris la route du Péloponnèse, et il s'était réfugié à Argos. Mais, ne se croyant pas en sûreté dans cette ville, il envoya demander un asile aux Spartiates ; il leur donna sa parole qu'une fois devenu leur ami, il leur rendrait plus de services qu'il ne leur avait causé de dommage tant qu'il avait été leur ennemi. Les Lacédémoniens le reçurent à bras ouverts. Ce fut lui qui leur persuada de secourir Syracuse, et par là il prépara la ruine des compagnons d'armes qu'il venait de quitter.

Plutarque raconte qu'Alcibiade avait joué la comédie à Sparte. Grâce à cette souplesse merveilleuse qui faisait le fond de son caractère, il avait surpassé les plus austères par la rudesse affectée de ses manières, prenant des bains froids dans l'Eurotas, et, s'accommodant à merveille du brouet noir. A le voir, on l'aurait pris pour l'élève de Lycurgue ; mais au fond il était toujours le même. Il séduisit la femme d'Agis, qui accoucha d'un fils, que le roi ne voulut point reconnaître, et dont Alcibiade était regardé comme le père. La reine elle-même ne le niait point, et Alcibiade disait en plaisantant que s'il avait gagné les bonnes grâces de cette princesse, ce n'était point pour faire affront au roi, ni pour satisfaire sa passion, mais pour donner aux Lacédémoniens un roi de sa race[1].

Tandis qu'Alcibiade se conduisait ainsi à Sparte, les Athéniens succombaient en Sicile. L'arrivée soudaine de Gylippe, à la tête de la flotte péloponnésienne, avait changé la fortune de la guerre. En vain Athènes envoya deux nouveaux généraux, Eurymédon et Démosthène, avec soixante-quatorze galères ; Nicias et ses collègues furent vaincus, et périrent avec la plupart de leurs soldats (413). Triste destinée que celle de Nicias ! Après avoir usé sa fortune et le peu d'énergie que la nature lui avait donné au service d'un parti vaincu, il est venu mourir en Sicile, victime d'une expédition qu'il n'avait jamais approuvée. Et Alcibiade, qui avait conseillé la guerre, n'avait travaillé qu'à la faire échouer, et il triomphait à Sparte du malheur des Athéniens, Grâce à ses conseils, les Lacédémoniens n'étaient pas restés oisifs : non-seulement ils avaient secouru Syracuse, mais ils avaient envahi l'Attique ; ils avaient fortifié Décélie, sur les frontières de la Béotie, à cent vingt stades d'Athènes. De là ils tenaient toute l'Attique en échec[2].

L'avenir d'Athènes était bien sombre, depuis les désastres de Sicile. Thucydide a retracé cette déplorable situation au commencement de son huitième livre : La république pleurait cette multitude de cavaliers et d'hoplites, cette florissante jeunesse que la guerre venait de moissonner. Il n'y avait plus, dans les chantiers, de vaisseaux en état de tenir la mer, plus de matelots pour la flotte, plus d'argent dans le trésor. Le peuple était devenu sage : on était dégoûté des orateurs ; on parlait de consulter les vieillards, de supprimer les dépenses inutiles, et de rétablir l'ordre dans toutes les parties du gouvernement[3].

Les alliés d'Athènes étaient tout prêts à profiter de ces circonstances pour secouer un joug qui leur pesait depuis longtemps. Les peuples de l'Eubée furent les premiers à traiter avec Agis, pour se détacher des Athéniens. Les îles de Lesbos et de Chio, la ville d'Érythres en Ionie s'allièrent aussi aux Spartiates. Alcibiade quitta Sparte, pour venir soulever Milet, au nom des Lacédémoniens. Les alliés qu'Athènes avait autrefois dans les Cyclades et sur les côtes de la Thrace, n'étaient pas mieux disposés que ceux de l'Asie Mineure. Sparte voyait donc, à chaque instant, grossir le nombre de ses auxiliaires. Syracuse, qu'elle venait de sauver, s'était engagée à lui fournir des hommes et des vaisseaux. Aussi Thucydide dit-il que les Athéniens croyaient toujours voir une flotte syracusaine entrer dans le Pirée.

Au milieu de ces désastres, on eut recours aux dernières ressources. Il restait mille talents, mis en réserve par Périclès, auxquels il était défendu de toucher : on les employa à équiper une nouvelle flotte. On maintint Samos dans l'alliance athénienne, en poussant aux derniers excès le parti démocratique. Soutenu par trois vaisseaux athéniens qui s'étaient montrés dans le port, le peuple se jeta sur les riches ; il en fit mourir deux cents, et en condamna quatre cents à l'exil ; il se partagea les maisons et les terres des proscrits, et un décret des Athéniens lui accorda l'autonomie en récompense de sa fidélité[4]. Athènes parvint à réprimer la révolte de Lesbos, et à se venger de celle de Chio ; mais elle échoua contre Milet, et l'île de Rhodes embrassa le parti de Lacédémone.

Pour mieux écraser leurs rivaux, les Spartiates firent alliance avec les Perses. Dans l'espoir de devenir les maîtres de la Grèce, ils se firent les condottieri du grand roi. Le satrape Tissapherne, qui commandait en Asie Mineure pour Darius Nothus, prit à sa solde l'armée péloponnésienne. Les Lacédémoniens et leurs alliés reconnurent comme possession du roi de Perse toutes les contrées, toutes les villes qui lui appartenaient ou qui avaient appartenu à ses ancêtres. Ainsi, toutes ces cités grecques que les victoires des Athéniens avaient affranchies, retombaient clans la servitude. A ce prix seulement, le roi s'était engagé à soutenir contre Athènes la suprématie lacédémonienne[5].

Mais la mobilité d'Alcibiade tourna au salut de sa patrie. Il venait de soulever l'Asie Mineure, et il avait affecté un grand zèle pour les intérêts de Sparte ; en réalité, il ne voulait que se faire un parti parmi les alliés, pour traiter avec Athènes à de meilleures conditions. C'est ce que comprirent les Lacédémoniens. Le roi Agis avait déjà contre lui des ressentiments personnels. Les principaux Spartiates étaient jaloux de son influence, et se défiaient de sa bonne foi. On expédia en Ionie l'ordre de le faire mourir ; mais Alcibiade savait toujours échapper à temps. Il se réfugia auprès de Tissapherne, dent il gagna bientôt l'amitié. Par son conseil, le satrape réduisit la solde des Péloponnésiens d'une drachme à trois oboles par tête, ce qui, ajoute Thucydide, était la solde des marins athéniens. Alcibiade engageait Tissapherne à ne pas trop favoriser les Lacédémoniens par son alliance, mais plutôt à tenir la balance entre les deux républiques rivales, Sparte et Athènes, et à les contenir l'une par l'autre. S'il fallait opter, disait-il, Athènes, par sa marine, rendrait aux Perses de plus grands services.

En même temps, Alcibiade négociait pour son propre compte avec l'armée athénienne, qui occupait Samos, et où il comptait un grand nombre de partisans. Il faisait dire aux triérarques et aux chefs militaires que, s'il désirait rentrer dans son pays, ce n'était pas pour y soutenir les mauvais citoyens et le pouvoir de ce peuple qui l'avait chassé ; qu'il voulait, au contraire, s'allier aux honnêtes gens, à ceux qu'on appelait à Athènes les beaux et bons[6], partager avec eux le fardeau des affaires, et leur concilier l'amitié de Tissapherne. Quelques-uns vinrent de Samos conférer avec Alcibiade, et, à leur retour, ils formèrent dans l'armée un complot dont le but était de détruire à Athènes le gouvernement démocratique. Les plus riches montraient beaucoup d'ardeur, parce qu'ils espéraient ressaisir le pouvoir. La multitude, dit Thucydide[7], ne voyait pas sans chagrin ce qui se passait ; mais elle resta tranquille, dans l'espérance que le roi lui payerait un subside. Cette phrase nous montre à quel degré d'abaissement les Grecs étaient tombés : non contents de se battre entre eux, ils se disputaient l'or de l'étranger.

Il y avait, dans l'armée, un général nommé Phrynicus, à qui tous ces projets déplaisaient, et qui les combattait ouvertement. Il disait qu'il ne fallait se fier ni à Alcibiade, ni au grand roi ; il croyait, et c'était la vérité, qu'Alcibiade ne se souciait pas plus de l'oligarchie que de la démocratie, et que, en changeant la constitution de l'État, il n'avait d'autre but que de rentrer dans Athènes et d'y rétablir sa dorai. nation. Les conjurés ne tinrent aucun compte des avertissements de Phrynicus : ils envoyèrent à Athènes Pisandre et quelques autres députés pour y traiter avec le peuple.

Pisandre et ses collègues parlèrent dans l'Assemblée ; ils insistèrent sur la nécessité de rappeler Alcibiade et de renoncer au gouvernement populaire, pour enlever aux Péloponnésiens l'alliance du roi de Perse. Bien des voix, dit Thucydide, s'élevèrent en faveur de la démocratie. Les ennemis d'Alcibiade s'écriaient qu'il serait odieux de voir rentrer dans la ville celui qui avait violé les lois. Deux familles sacerdotales, les Eumolpides et les Céryces, attestaient les mystères profanés, et invoquaient la religion pour s'opposer au retour de l'exilé[8]. Pisandre insista, et fit décréter que dix citoyens partiraient avec lui pour traiter avec Alcibiade et Tissapherne. Avant son départ, il fit destituer Phrynicus, qui avait dénoncé aux Spartiates les projets d'Alcibiade. Il visita tous les corps assermentés qui étaient chargés de l'administration et de la justice, et il les engagea à se concerter pour préparer l'abolition de la démocratie.

Quand la députation fut arrivée auprès de Tissapherne, elle ne put s'entendre avec le satrape. Celui-ci n'était pas prêt à se prononcer pour Athènes : il préférait suivre la politique qu'Alcibiade lui-même lui : avait conseillée, c'est-à-dire maintenir l'équilibre entre les peuples grecs et les affaiblir les uns par les autres. Alcibiade contribua à faire échouer la conférence, par les demandes exagérées qu'il fit au nom de Tissapherne. Peut-être hésitait-il au moment d'agir, et ne jugeait-il pas prudent de se fier au parti aristocratique.

Tout était rompu avec Alcibiade et avec Tissapherne ; mais Pisandre et ses collègues n'avaient pas renoncé à leur complot contre le gouvernement démocratique. En quittant l'Asie, ils se dirigèrent vers Samos, et ils s'assurèrent que l'armée était prête à les soutenir. Ils préludèrent à la révolution qu'ils voulaient faire à Athènes, en favorisant dans Samos même une restauration oligarchique. Ils détruisirent aussi la démocratie dans l'île de Thasos et dans plusieurs villes alliées ; et, quand ils arrivèrent à Athènes, ils trouvèrent que leurs amis avaient déjà bien avancé les affaires. En effet, quelques jeunes gens avaient tué secrètement l'orateur Androclès, le principal chef du parti populaire, un de ceux qui avaient le plus contribué à faire condamner Alcibiade. Ils avaient fait encore d'autres victimes dans le parti qu'ils voulaient abattre. Enfin ils déclarèrent ouvertement, dans un discours préparé d'avance, qu'il ne fallait salarier que les gens de guerre, et qu'on ne devait accorder de droits politiques qu'à cinq mille citoyens, gens toujours prêts à servir l'État de leur fortune et de leur personne[9].

Athènes était alors dans une étrange situation. Le sénat et le peuple se réunissaient encore ; mais ce n'était que pour la forme on ne décrétait que ce qui avait été décidé par les conjurés. II y avait un pouvoir invisible qui choisissait les orateurs, et qui examinait tous les discours avant qu'ils ne fussent prononcés. La démocratie avait fait tant de mal à Athènes depuis plusieurs années, que le complot aristocratique recrutait tous les jours de nouveaux adhérents. Personne n'osait élever la voix pour résister. Si quelque citoyen avait cette audace, il disparaissait soudain, sans qu'on sût comment, et le pouvoir officiel n'osait ordonner aucune recherche contre les meurtriers. Le petit peuple même, quoique attaché à la forme démocratique, n'osait faire un mouvement. Les membres du parti populaire se regardaient entre eux d'un œil défiant ; car il y avait dans le complot bon nombre d'hommes qu'on avait vus jadis parmi les plus effrénés démagogues.

Telle était la situation d'Athènes, quand Pisandre arriva avec ses collègues. fi assembla le peuple, et fit nommer une commission de dix membres, avec pleins pouvoirs pour rédiger des lois nouvelles. Les décemvirs devaient, à un jour marqué, présenter leur travail au peuple, et proposer la constitution qui leur semblerait la meilleure. Ce jour arrivé, ils convoquèrent l'assemblée à Colone : c'était un endroit consacré à Neptune, situé à environ dix stades de la ville. Là il fut décidé qu'aucune magistrature ne s'exercerait plus suivant la forme accoutumée, et qu'il n'y aurait plus de salaire pour les fonctions publiques. On devait élire cinq proèdres ou présidents, qui eux-mêmes éliraient cent citoyens. Chacun de ces cents devait s'en adjoindre trois autres. Ces quatre cents, ainsi constitués en conseil, devaient gouverner comme ils l'entendraient : c'était en eux que résidait la souveraineté. Cependant ils devaient consulter, quand ils le jugeraient à propos, oing mille citoyens choisis. L'Assemblée du peuple était donc diminuée des deux tiers et dépouillée de sa toute-puissance[10].

C'était Pisandre qui avait proposé ces décrets, et qui était parvenu à les faire passer ; mais celui qui avait tout préparé de longue main, et qui était comme l'âme de cette entreprise, c'était Antiphon, homme qui, selon Thucydide ne le cédait ni en vertu, ni en talent, à aucun de ses contemporains. Il n'aimait à paraître ni dans l'Agora, ni dans aucune de ces assemblées où se livraient des combats d'opinions. Sa réputation d'éloquence le rendait suspect à la multitude ; mais ceux qui avaient des procès étaient fort heureux d'avoir recours à ses conseils. Frappé des malheurs où l'excès de la démocratie avait précipité son pays, il avait contribué, plus que personne, à préparer la révolution oligarchique que Pisandre venait d'accomplir.

Thucydide nous a raconté comment les quatre cents entrèrent en possession du pouvoir. Depuis que les Spartiates avaient occupé Décélie, les Athéniens étaient toujours en armes, les uns veillant sur les remparts les autres formant des corps de réserve. Ce jour-là, on laissa partir, comme à l'ordinaire, ceux qui n'étaient pas du complot ; mais on avait averti en secret les conjurés de ne pas se rendre aux différents postes, et de se tenir prêts à se réunir en armes au premier signal. C'étaient des hommes d'Andros et de Tenos, trois cents Carystiens, et de ces gens qu'Athènes avait envoyés à Égine pour y fonder une colonie. Les quatre cents se mirent en route, chacun armé d'un poignard qu'il tenait caché. Ils étaient accompagnés de cent vingt jeunes gens, bien résolus, s'il était nécessaire, à tenter un coup de main. Les sénateurs de la fève, comme les appelle Thucydide[11], étaient encore en séance, attendant l'événement ; on leur signifia l'ordre de sortir ; on leur paya leur traitement pour le temps qu'ils avaient encore à rester en fonctions : chaque sénateur prit son argent, et partit sans mot dire.

Le reste du peuple restant tranquille et ne donnant aucun signe d'opposition, les quatre cents entrèrent dans le conseil ; ils désignèrent entre eux des prytanes par la voie du sort, et inaugurèrent leur magistrature avec les prières et les cérémonies d'usage. Ils firent ensuite de grands changements au régime populaire, mais sans rappeler les exilés, parce qu'ils ne craignaient rien tant que le retour d'Alcibiade. Ils firent mourir, sans scrupule, les citoyens dont ils croyaient avoir besoin de se débarrasser ; ils en mirent d'autres en prison ; ils en envoyèrent plusieurs en exil. Ils se hâtèrent aussi d'entrer en négociation avec Agis, roi de Sparte, qui était à Décélie. Ils ne demandaient, disaient-ils, qu'à se réconcilier avec les Lacédémoniens, et ils espéraient bien qu'on ne refuserait pas de traiter avec eux, sans les confondre avec cette populace qu'ils venaient de renverser.

Agis reçut assez mal les députés des quatre cents ; il croyait le peuple mécontent, les partis aux prises, et il voulait profiter des circonstances. Il avait mandé du Péloponnèse des renforts considérables. Quand ces troupes furent arrivées, il y joignit la garnison de Décélie, et il s'avança vers la ville, qu'il comptait surprendre ; mais les Athéniens se défendirent avec vigueur. Agis renvoya ses auxiliaires, et se tint désormais tranquille à Décélie. Les quatre cents recommencèrent à négocier avec lui ; il fit alors un meilleur accueil à leurs députés, et ce fut d'après ses conseils qu'ils expédièrent à Sparte des ambassadeurs chargés de conclure un traité de paix[12]. Mais cette oligarchie, qu'un moment de surprise avait rendue maîtresse, avant de traiter avec Lacédémone, devait avoir à compter avec le peuple athénien. Ce n'était point une entreprise facile d'abolir la liberté dans un État qui en jouissait depuis si longtemps. Au moment où Pisandre s'emparait du gouvernement, il y avait quatre-vingt dix-huit ans qu'Hippias avait été chassé. Et même au temps des Pisistratides, c'était la tyrannie qui était chose nouvelle à Athènes ; la liberté avait déjà d'antiques traditions. Plus tard, cette démocratie s'était couverte de gloire, en sauvant la Grèce et en lui commandant. Il n'était pas possible que la patrie de Miltiade et de Périclès courbât longtemps la tête devant quelques oligarques. Chaque pays a ses besoins et ses traditions, dont son organisation politique doit être l'expression fidèle. Ce qu'il fallait à Athènes, ce n'était point un gouvernement aristocratique, c'était une démocratie bien réglée.

 

 

 



[1] Plutarque, Alcibiade.

[2] Thucydide, VII, 19.

[3] Thucydide, VIII, 1.

[4] Thucydide, VIII, 21.

[5] Thucydide, VIII, 18.

[6] Οί καλοί κάγαθοί.

[7] Thucydide, VIII, 48.

[8] Thucydide, VIII, 53.

[9] Thucydide, VIII, 64 et 65.

[10] Thucydide, VIII, 67.

[11] Thucydide, VIII, 69.

[12] Thucydide, VIII, 70 et 71.