HUGUES CAPET ET LA TROISIÈME RACE

 

TOME PREMIER

CHAPITRE VI. — LE ROI ROBERT.

 

 

Éducation du roi Robert. — Les écoles de sciences. — Roi des clercs. — Élévation de Robert. — Gouvernement commun. — Révolte. — Caractère et sacre de Robert. — Son mariage. — Adélaïs. — Berthe. — Interdit. — Séparation. — Mariage avec Constance. — La race d'Aquitaine.

970—996.

 

Robert, fils de Hugues Capet et d'Adélaïs, naquit au Petit-Palais en l'Île, à Pâques fleuries de 970[1], avant que Hugues prît le titre de roi des Français ; il reçut le nom de Robert, car c'était un prénom de race parmi les ducs de France et comtes de Paris : un des ancêtres était ce Robert le Fort, de grande mémoire, le Macchabée du règne de Charles le Chauve. Robert fut baptisé en l'église Saint-Barthélemy, pieuse fondation du duc son père. On remarqua que les pleurs et les cris de l'enfant accompagnaient le plain-chant des litanies, d'où l'on conclut que ce serait un fils fort en clergie ; aussi, tout en le dotant des leçons d'armes, dons de courage et de bataille, Hugues son père l'envoya aux écoles des clercs, en la cathédrale de Reims, sous l'archidiacre Gerbert, cet esprit si éminent qui s'éleva haut dans l'époque féodale[2]. Le Xe siècle, dominé par l'esprit sauvage de la guerre des fiefs, n'avait pas cependant oublié toutes les traditions de sciences : ces traditions se conservaient dans les monastères et les cathédrales. A chaque archevêché était attachée une école pour l'enseignement ; on ouvrait aux élèves les calculs mathématiques et d'astronomie, si mélangés de superstitions et de sortilèges ; on lisait en frissonnant tous les prodiges du monde immatériel ; l'histoire des morts qui remuaient les suaires, les chroniques des vieilles tours. Une double épopée s'ouvrait à l'imagination solitaire : les miracles des saints et les sombres tentations du démon. Les translations de reliques toutes remplies de merveilles révèlent le brillant trésor d'un monde fantastique où tout se mouvait dans des conditions indépendantes de la matière ; les écoles enseignaient également les souvenirs des belles-lettres de la Grèce et de Rome[3]. Les rares manuscrits sauvés de la destruction des IVe et Ve siècles, restaient déposés dans quelques abbayes où l'enseignement s'était conservé. On perpétuait aussi les traditions des hymnes et du plain-chant, admirable mélodie qui exprime les déchirements de l'âme malade en face des douleurs de la vie. Au fond de la cathédrale, en face du baptistère, était l'orgue solennel ; et quand les mille sons bruyants exaltaient les tristesses solitaires[4], les écoliers de l'abbaye chantaient l'hymne grave. Toutes les dignités de la cathédrale se rattachaient à la science ; et si le chantre avait pour mission d'enseigner l'hymne des fêtes, le scolaire était appliqué aux enseignements des lettres saintes ou profanes.

Au sein de la cathédrale de Reims, Robert enfant fut élevé ; il y prit un goût de science et d'église, il aimait à se revêtir de l'aube et du camail des chanoines ; ce droit appartenait à sa race ; la dignité de clerc n'était pas à dédaigner pour un prince ; il fallait sans doute qu'il pût manier la lance et l'épée ; mais comme la pensée morale d'une résistance à la féodalité armée venait des clercs, il était habile à un roi de se revêtir de l'étole et de la chasuble ; il manifestait par là son désir de civilisation, il sortait de la société brute et féodale, pour se placer dans l'esprit et les conditions de la clergie et de ces sciences qui devaient corriger les mœurs et les idées de la vieille société. Robert, récitant les hymnes ou les litanies au chœur, ramenait les coutumes vers l'Église, c'est-à-dire vers la seule puissance qui pouvait alors dompter les passions brutes ; le roi des clercs devait comprimer la société militaire, et ceci explique la puissance civilisatrice de la papauté. Robert enfant eut pour maître Gerbert, l'intelligence la plus avancée, l'esprit le plus souple, le plus habile entre les clercs, celui qui inventait l'orgue hydraulique et le cadran qui marque l'heure. La solitude si puissante sur les âmes les pousse vers les créations[5]. Le prince Robert avait dix-huit ans à peine lorsque Hugues son père, qui venait de poser la couronne sur sa tête, l'associa, comme on l'a vu, dans le parlement des comtes, à tout son pouvoir de la royauté ; c'était une manière de faire reconnaître et saluer le jeune prince de son vivant. Le sceptre n'était point sûr aux mains de Hugues Capet ; que ferait-on après sa mort ? les comtes francs reconnaîtraient-ils le roi Robert ? voudraient-ils baisser le iront devant sa main gantée ? Cela était douteux : la race carlovingienne n'était pas sans avoir laissé quelques souvenirs ; qui pouvait répondre de la foi lige des barons ? ils avaient obéi à Hugues parce qu'il était brave et fort ; mais le roi des Francs mort, qu'était-il besoin de couronner son héritier quand lui serait dans la tombe ? Au moyen de l'association, tous ces murmures s'apaisaient ; Robert ne marchait-il pas aux batailles à côté de Hugues son père ? leudes, barons, comtes, hommes libres et serfs eux-mêmes ne s'accoutumaient-ils pas à mêler son nom à celui du roi Hugues ? L'association préparait le paisible commandement de Robert, il évitait toute transition longue et agitée après la mort du père[6]. Aussi l'association, ainsi qu'on le dit, fut absolue et complète, toutes les Chartres sont scellées d'un même scel et rédigées sous une commune volonté ; faut-il faire la guerre à un comte, protéger un monastère ou une église ? Hugues et Robert interviennent simultanément ; faut-il accorder quelques fondations pieuses aux monastères, le droit de pêcher ou de chasser à un abbé ? le scel est encore commun[7]. Les deux rois règnent de concert, il n'y a pas de différence entre leur autorité ; les Chartres portent les deux noms en tête, comme les scels pendants en cire jaune ; on voulait éviter que toute transition d'un règne à un autre fût remarquée. Tout devait se faire sous une même administration : le caractère de Robert le portait vers les clercs ; celui de Hugues vers les hommes d'armes, les comtes féodaux, les batailleurs de cette société ; il était bon de les voir tous deux assis sur un trône ; l'association était politique pour maintenir toutes les forces dans l'obéissance envers leur suzerain.

Dès l'adolescence on avait songé à marier Robert ; quoique dévoué à la science, il avait les passions vives, et Hugues son père lui chercha une femme parmi les nobles dames, riches héritières dans la féodalité[8]. Il y songea longtemps ; l'alliance de famille formait un lien de défense mutuelle, et quand on avait pour femme une dame de bonne lignée, c'était autant de vassaux qu'on acquérait ; les serfs suivaient les conditions de leurs terres, ils formaient acquêt de mariage. Robert épousa d'abord Adélaïs, veuve d'Arnould, comte de Flandre, suzeraine d'un grand nombre de fiefs avec juridiction haute et basse sur de nombreuses terres riches en moulins et fours banaux. Le mariage ne fut point long ; Adélaïs mourut en devenant mère ; Robert la pleura quelque temps ; mais, d'après le conseil de ses comtes, il épousa Berthe, fille de Conrad, roi de Bourgogne, de race germanique : Berthe n'était point une jeune fille naïve et simple de cœur et d'amour ; elle était veuve comme Adélaïs ; son premier mari avait nom Eudes, dit le Fort, comte de Chartres et de Blois. La Champagne était alors à la convenance des rois des Francs et ils cherchaient à l'obtenir comme une bonne terre du domaine ; Flandre et Champagne, nobles fiefs de la couronne, faisaient envie aux rois : qui pouvait le disputer en riches cités et en corporations travailleuses à la Flandre, aux villes de Lille, Cambrai, Arras et Saint-Omer ! et les riantes villes de Champagne, sous ses comtes, rivalisaient noblement avec les plus merveilleux pays de l'Île-de-France.

Adélaïs et Berthe étaient les deux prénoms des femmes dans la famille du moyen âge ; la reine Berthe fut le symbole de la résignation et de la souffrance dans la vie ; elle avait aimé Robert bien avant son mariage ; un peu sa parente de lignage, Berthe avait tenu avec lui sur les fonts du baptême le premier de ses enfants mâles. Alors les prohibitions de mariage pour cause de parenté étaient multipliées ; à une époque de force et de violence, il fallait d'énergiques freins pour empêcher le débordement delà passion ; quand les barons avaient le feu d'amour au cœur ou la chaleur brûlante à la tête, auraient-ils respecté la fille, la sœur de leurs proches parents ? il y aurait eu des incestes outrageants, un mélange de sang et de race, comme cela se voit parmi les nations sauvages ; c'est pour les éviter que la grande police papale avait décrété les prohibitions à plusieurs degrés. Quand la vie était si rapprochée dans le foyer domestique, il fallait empêcher l'inceste et les unions de chair et de sang entre les membres d'une même famille[9]. Indépendamment de la parenté naturelle, le catholicisme avait introduit la parenté spirituelle, l'union de l'âme sans le corps : avait-on tenu ensemble un enfant au baptême ? des liens intimes et mystérieux se formaient entre vous ; de même qu'il y avait de chastes épouses du Christ dans le monastère, de même il y avait des frères et des sœurs dans le Christ en face du saint baptême ; l'enfant couvert de la robe d'innocence que l'on présentait ensemble aux fonts baptismaux créait entre vous une fraternité mystérieuse ; vous étiez parents par l'esprit, par l'expression d'une commune vie ; les vieux mots de compère et de commère signifiaient la paternité et la maternité morales dans les lois de l'Église ; ce lien prohibait le mariage entre les affiliés chrétiens ; il fallait que des exemples de chasteté et de pureté vinssent ainsi des parents selon la foi[10].

Les conciles avaient discipliné la famille avec une rigidité morale qui luttait contre les instincts bruts d'une société toute d'armes et de batailles ; on soumettait le toit domestique à des règles spirituelles infiniment étroites ; hélas ! le roi Robert ne s'y était point arrêté ; il avait épousé Barthe, sa parente d'esprit et de chair ; Berthe et Robert étaient cousins d'abord, puis ils avaient tenu ensemble un enfant du comte Eudes. Archambault de Sully, archevêque de Tours, célébra ce mariage ; il fut appuyé de ses évoques suffragants ; toutes les formes furent exactement observées ; il y eut solennités, joutes, tournois. Le suzerain célébrait ses noces avec pompe dans le plaid des barons, aux plaines verdoyantes de Saint-Denis[11].

L'union de Berthe et de Robert précéda d'une année la mort de Hugues Capet ; tout était préparé pour la tradition d'un règne à un autre ; on avait vu si souvent le roi Robert assis à o6té de son père ou marcher avec lui aux batailles ! n'était-ce pas un commun chancelier qui scellait leurs Chartres ? Quand donc le roi Hugues fut au lit de mort, il y eut une réunion de barons et de comtes francs pour sacrer son successeur ; l'avènement fut une reconnaissance simple de ce qui déjà avait été proclamé au plaid royal de l'association ; il n'y avait pas de succession réelle ; le nouveau roi des Francs n'était-il pas le prince qui avait marché dans les batailles à coté de Hugues son père ? l'association était une royauté véritable, et nul ne pouvait réclamer la couronne. Si déjà les descendants des Carlovingiens n'avaient pu lutter dans les premiers jours 4e Hugues, comment se représenteraient-ils quand le temps s'était avancé pour consacrer le pouvoir des Capets ? Charles de Lorraine était encore captif ; on l'avait transporté à Dourdans, château fort aux grilles de fer ; comtes, barons, vicomtes, gardes des marches et frontières, avaient besoin de consacrer leur propre usurpation. Tout n'avait-il pas été le résultat de la violence depuis un siècle ? les fiefs de Bourgogne, de Normandie, de Flandre, n'avaient-ils pas été la proie de la conquête et d'une possession militaire ? L'hérédité dans l'usurpation de la couronne était nécessaire pour consacrer l'hérédité dans la possession des fiefs ; avec Robert, roi des Français, fils de Hugues, petit-fils des ducs de France, aucun reproche ne pouvait être adressé aux comtes, aux féodaux qui campaient sur le territoire. En Normandie, c'étaient les descendants des Scandinaves qui s'étaient partagé les terres sous un chef venu du Jutland et de la nation danoise, conquérants et usurpateurs s'il en fut jamais, nul ne pouvait justifier les titres des comtes de Champagne les tricheurs, ou des ducs de Bourgogne de la race de Hugues de France. Quand tout était usurpation, n'était-il pas nécessaire d'avoir sur le trône un roi nouveau qui fût pour la couronne ce que les féodaux étaient pour la terre ? Il y a un instinct dans les sociétés pour se placer sous le principe qui leur convient ; dans une époque de violence, il fallait un prince que la violence avait fait roi ! Lorsque toutes les terres et tous les fiefs étaient usurpés, il fallait que la couronné fût également une sorte d'usurpation.

A l'âge de vingt-cinq ans, Robert avait la taille élevée, la chevelure lisse et flottante ; ses épaules étaient hautes, signe de force ; sa barbe longue et assez fournie ; les yeux fins et bons ; la bouche gracieuse à tous, et, comme disent les chroniques, toujours prête à donner le baiser de paix[12]. Le roi Robert était d'une force prodigieuse, expert en tous les arts de la guerre ; il chevauchait un cheval à la course et brisait de ses poings des éperons de fer. Son esprit était pourtant débonnaire ; on citait sa libéralité prodigue y qui ne s'arrêtait devant rien ; il donnait sans cesse aux comtes, aux clercs, à tous les hommes qui tendaient la main pour obtenir honneurs ou récompenses. Cette indulgence, il la poussait si loin qu'il se laissait voler ; si bien qu'un jour un de ses comtes lui prit des chandeliers d'or en sa face, sans que le roi fît la moindre plainte ; on célébrait sa piété, et les chroniques racontent les magnificences de cet excellent roi qui fondait les moutiers et donnait de précieux ornements à toutes les châsses bénites : des scels pendant aux chartres restent encore du roi Robert, où on le voit avec son sceptre en main, la couronne au front et sa barbe crépue[13]. Le roi passait donc sa vie de prince en ses châteaux d'Étampes, de Saint-Denis ou de Poissy, avec sa chaste épouse Berthe qu'il aimait tendrement, lorsque éclata sur le royaume la triste affaire du divorce. Il y avait un an déjà que le mariage de Robert et de Berthe était célébré, l'archevêque de Tours avait béni l'hymen au nom des saintes lois de l'Église ; mais le pape n'était pas intervenu ; la loi des canons avait-elle été observée ? ici se présentait une des plus graves questions du droit catholique. Au Xe siècle, l'unité religieuse, d'où la force morale devait résulter, n'était point établie encore ; chaque évêque avait sa juridiction territoriale tellement mélangée au système féodal que l'épiscopat en avait emprunté les violences et les passions ; on disputait alors un évêché comme une pièce de terre, on voyait un évêque combattre le casque en tête comme un brave et digne comte[14] ; plusieurs portaient aussi fièrement la cuirasse et le brassard que le plus fort et le plus redoutable féodal. Quand vous entriez dans les cathédrales de Sens, de Tours, de Cologne et de Metz, il n'était pas rare de voir révoque cuirassé convoquer ses hommes d'armes, ou bien, l'épieu en main, faire retentir l'église fortifiée du son bruyant du cornet, pour courir à la chasse au sanglier dans les Ardennes, dans les bois épais de Flandre ou de Bretagne, impénétrables retraites célébrées par les légendes. Plus d'une fois les aboiements des chiens de l'abbé, le hennissement de ses chevaux, se mêlaient aux sons de l'orgue dans les abbayes[15].

Il était résulté de cette empreinte féodale une certaine indépendance des évêques chacun dans son diocèse ; Rome n'avait point encore l'habitude de ses légats a latere, puissance immense et morale qui ramena l'ordre et l'unité au milieu de l'anarchie du XIe siècle. Les légats furent le grand moyen d'énergie pour les sociétés agitées ; ils avaient les pouvoirs extraordinaires qui sont indispensables à toutes les époques de crise et de fortes actions. Il faut à une société travaillée par des dangers menaçants ces hommes qui agissent et commandent en vertu de leur droit extraordinaire ; le proconsulat se transforme, mais il ne s'abolit pas. Le pape qui portait la tiare était alors Grégoire V, de la famille d'Othon III[16] ; il n'avait pas été paisible sur son trône pontifical. Rome devenait le foyer d'une insurrection bruyante ; le peuple, sous le tribun Crescentius, tête d'énergie, avait expulsé Grégoire, le représentant de la race germanique[17] ; Crescentius, héros populaire, avait saisi la dictature comme dans la vieille Rome, et au nom du peuple italien il avait secoué le joug du blond Germain qui foulait aux pieds de ses chevaux le Capitole, le Cirque et le Campo-Vaccino. Le peuple romain avait élu son pape dans le Forum, comme aux vieux temps il élisait ses consuls et ses tribuns. Le nouveau pontife prit le nom de Jean XVII ; il s'établit dans la basilique de Latran, tandis que le tribun Crescentius, rassemblant les légions des fils efféminés de Romulus, réveillait les ombres éteintes des vieux sénateurs. Cette puissance ne dura qu'un moment ; bientôt l'on vit descendre des Alpes et des Apennins les soldats allemands, durs comme le fer. Rome vit autour de ses murailles les vassaux d'Othon ; la race germanique l'entoura comme d'une ceinture d'acier : la ville éternelle fut prise : l'antipape Jean, homme faible et sans énergie, eut les yeux crevés, la langue et les oreilles coupées[18] : sur le lieu même où coulaient les flots jaunis du Tibre, Jean fut promené sur un âne, la face tournée vers la queue, en signe de mépris : le tribun Crescentius fut précipité des hautes tours de Rome, et les Germains lui disaient en moquerie : Roi de Rome, essaie de la roche Tarpéienne ! Grégoire fut rétabli sur le siège papal[19]. Le pontife était ainsi de race germanique, fort comme elle, inflexible dans les prescriptions de l'Église et la suzeraineté pontificale ; peut-être même se mêlait-il à toutes ces négociations un ressentiment de race. Tant il y a que Grégoire se montra fort irrité de ce que les évoques avaient célébré l'union de Robert sans solliciter les dispenses de Rome. Que devenait l'unité de l'Église ? on avait méconnu l'autorité du saint-siège et les lois canoniques sur les dispenses ; le mariage était nul, et on ne pouvait en invoquer la force et la durée[20]. Il y avait encore d'autres motifs d'irritation contre Robert et la reine Berthe : le pape, qui avait triomphé à Rome avec Othon, était tout entier dans les intérêts germaniques ; n'était-ce pas l'armée impériale qui avait forcé les portes du château Saint-Ange et précipité Crescentius de la haute tour dans le Tibre ? Grégoire V, élu au trône pontifical sous le pallium et les pompes allemandes, était le représentant des peuples du Rhin et de la Meuse, si haineux contre les Français et leurs rois ; l'union de Berthe et de Robert n'était-elle pas une menace contre les intérêts d'Othon ? Berthe avait des droits sur le royaume de Provence, dépendant de la couronne impériale ; les Français allaient donc hériter de ces terres si riches sous le soleil du midi ! Le ressentiment de la nation germanique, la réaction de la race carlovingienne contre les Capétiens, se révèlent par deux poursuites solennelles de cette époque : premièrement, la réhabilitation d'Arnould sur le siège métropolitain de Reims ; secondement, le divorce de Robert et de Berthe[21].

On se rappelle toutes les solennités qui avaient accompagné la déposition d'Arnould sous le règne de Hugues Capet ; Hugues avait humilié tant qu'il l'avait pu le bâtard de la race carlovingienne, en le forçant à s'agenouiller la face contre terre devant le trône de son ennemi : Abaisse ton cou, cria le seigneur roi ; abaisse, abaisse encore ! Cette déposition avait eu un grand retentissement dans le monde catholique ; Grégoire V s'en était vivement inquiété : n'était-ce pas un attentat contre la sainte Église ? Arnould, d'ailleurs, était le descendant de la vieille race de Charles le Grand, qui avait ses palais et son tombeau à Aix-la-Chapelle ; les Germains l'aimaient et le protégeaient. Dès que la papauté fut restaurée dans Rome, Grégoire V écrivit de longues épîtres à Robert pour qu'il eût à restituer le siège épiscopal à Arnould ; des légats furent envoyés en France avec des pleins pouvoirs ; on devait défendre les droits de l'épiscopat, tandis qu'Abbon, abbé de Fleury, était député par Robert auprès de : Grégoire V, afin de traiter du rétablissement d'Arnould et du divorce de Robert et de Berthe[22] ?

Cette douce et sainte union était l'objet des ardentes remontrances du pape ; Robert et Berthe vivaient dans une communauté intime ; Berthe élevait ses fils, grands d'âge déjà, l'un comte de Blois, l'autre comte de Chartres. Robert passait sa vie dans son château de Dourdans avec la reine, composant des hymnes d'église[23] ; le roi s'appliquait au rythme du plain-chant : sa voix si grave savait donner une mélancolique expression aux psaumes sublimes, à ces cris du cœur qui souffre, il disait dans la langue sainte, aux bruissements de l'orgue, le vide, le désenchantement que laissent après eux les plaisirs du monde dans la vie épuisée. Robert chantait sur la vielle, tandis que Berthe traçait sur des miniatures de grandes figures de saints et de prophètes, telles qu'on les voit encore reproduites avec leurs yeux fixes, leurs traits roides et fortement dessinés sur les portes des cathédrales. Cette union intime, le légat avait mission de la briser ; il fallait déchirer cette vie commune, et la voix solennelle du pape avait déclaré incestueuse et nulle la mystique tendresse de deux corps qui vivaient d'une même existence[24]. La voix du légat avait retenti, et le pape n'avait point trouvé obéissance ; Robert et Berthe restaient dans le même palais ; manants et serfs, clercs et bourgeoisies rencontraient sur un commun palefroi dans les promenades lointaines, sous les arbres épais de la forêt séculaire : il semblait que plus leur union était persécutée par les droits de l'Église et les ordres du pontife, plus l'attachement grandissait entre Berthe et Robert ; il y avait une douce sympathie qui se retrempait dans les larmes : ainsi marchait leur tendre et fidèle amour. Pendant ce temps, le cardinal légat multipliait les remontrances : l'inceste cesserait-il de se manifester honteusement à la face du monde chrétien ? Berthe et Robert voulaient-ils donner ce grand scandale à l'Église ? qu'allaient dire les sujets en présence d'une violation aussi manifeste des saints droits ? Anathème ! anathème sur ces têtes couronnées qui méprisaient les commandements de l'Église. Grégoire V avait lancé l'excommunication ; déjà ses foudres avaient atteint Robert et Berthe comme vivant dans un concubinage incestueux ; ils n'étaient plus l'époux et l'épouse pour l'Église ; que les portes du temple leur fussent fermées, alors même qu'ils s'agenouilleraient profondément le front contre terre ; avec eux devaient être excommuniés tous les évoques qui avaient célébré ce mariage concubinaire, proscrit par le souverain pontife[25].

L'excommunication était la peine foudroyante au moyen âge ; l'excommunié était le lépreux dans Tordre moral ; tous devaient le fuir comme le chrétien rejeté hors des portes de la Cité sainte. L'interdit était une peine plus solennelle encore ; ce n'était pas un homme, mais une société entière frappée de proscription. L'interdit lancé, tout ce qui pouvait émouvoir l'âme apparaissait aux yeux de la société catholique[26] : cette église dont le parvis était naguère inondé de peuple, la voyez-vous ? elle est fermée ; ses portes de fer ont crié pour la dernière fois sur leurs gonds ; le Christ de pierre qui en décore le faite , le saint baptistère qui est au-devant du parvis, les figures de vierges et de martyrs qui en ornaient le péristyle, sont couverts de serge violette, de noires tapisseries en signe de deuil ; les cloches ne sonnent plus le carillon de fête et même le glas de la mort; la nature semble voilée avec le Christ. Naguère un enfant venait-il à naître dans la famille ? on le portait au baptistère orné de fleurs ; le mariage avait sis pompes , et la mort elle-même avait ses prières, ses hymnes, ses plains-chants lugubres, tandis que le corps reposait en terre sainte au milieu des ancêtres, dans ce campo santo bénit où s'abîment les générations. Que vouliez-vous que devint la société catholique privée de ses émotions, de ses anniversaires, de ses fêtes de martyrs et de saints ? Aussi l'empreinte la plus fatale accompagnait l'interdit ; il n'y avait plus de joie, plus de fête, plus d'enthousiasme solennel; la société s'enveloppait d'un suaire !

Que trouver d'étonnant dès lors dans le terrible récit de l'interdit, tel que le rapporte le cardinal Damien, légat du saint-siège ? Il rappelle à la mémoire des chrétiens quels furent les tristes résultats de l'excommunication de Robert et de Berthe ; roi et reine couronnés, on les fuyait néanmoins comme des lépreux à la figure hideuse ; tous leurs serviteurs, tous les fidèles, les avaient abandonnés. En vain faisaient-ils retentir le palais de leurs cris! personne n'allait à eux ; on considérait leurs mets comme infectés de léprerie[27] ; quelle solitude était autour de Robert et de Berthe ! plus d'échanson pour verser le vin d'Orléans dans la coupe dorée ; plus de sénéchal, plus de connétable pour caparaçonner le destrier ; tous avaient fui. Mille légendes lamentables circulaient parmi les vassaux : ici on avait entendu des voix étranges qui frappaient l'air de leurs cris douloureux ; les ancêtres agitaient leurs armures aux vieilles tours; des chevaliers tout armés se montraient à l'horizon, combattant dans des nuées sanguinolentes ; enfin on dit dans le peuple que la reine Berthe était accouchée d'un enfant beau de corps, bien fait de membres, mais qui avait la tête d'une oie ! Quel monstre! répétait-on partout ; comme la vengeance de Dieu flétrit les excommuniés ! Cette tradition[28] de l'enfant de Berthe à la tête d'oie se maintint longtemps parmi le peuple, et le titre de la mère l'oie devint par la suite une sorte d'injure, de sorcellerie et d'excommunication.

L'état d'exaltation des esprits ne permettait pas au roi Robert une plus longue résistance ; la révolte n'était-elle pas à craindre ? qui pouvait obéir plus longtemps à un excommunié livré à une légion de diables, tiraillé par l'adultère et l'inceste? n'était-il pas horrible à voir? Il y aurait eu une sédition de peuple dans le domaine du roi. Robert se sépara douloureusement de sa femme ; il vint en pèlerinage à Rome, tout en pleurant et gémissant ; il fut absous de sa grande faute, et s'en retourna à travers les Alpes au milieu de ses sujets, qui le reconnurent pour roi quand il fut ainsi réconcilié avec l'Église[29]. Dans la société du moyen âge, un roi excommunié n'était plus roi du peuple ; Église et royauté se tenaient fermement dans un lien commun contre l'anarchie féodale. Les chroniques nous disent combien fut douloureuse la séparation de Robert et de Berthe ; mais la répugnance des chrétiens pour l'excommunié était alors si profonde, que ce fut une grande joie quand on vit le prince admis de nouveau dans l'intime communion des fidèles ; l'église était parfumée d'encens ; les clercs remplissaient le parvis de Saint-Barthélemy en la Cité ; Robert agenouillé fut lavé de son excommunication, et il récita les hymnes qu'il avait composées pour la cathédrale d'Orléans.

Ce roi aux passions vives prit une troisième femme ; le pape Grégoire V l'y avait engagé, car Berthe était morte pour lui et le monde : n'était-il pas à craindre aussi que Robert, poussé par des souvenirs d'amour pour celle qui avait partagé sa vie, ne revînt à sa tendresse ? Des messagers furent envoyés dans tous les fiefs pour quérir une épouse au sire des Français : c'était un beau lot que la couronne, et il y eut plus d'une jeune fille qui s'émut dans les listels : le roi choisit entre elles Constance, de la race méridionale. Quelle était son origine ? les uns disent qu'elle avait pour père Gui, comte d'Arles, et pour mère Blanche, sœur du comte d'Anjou ; les autres la font naître de Guillaume Taillefer, comte de Toulouse ; tant il y a que Constance était de la race méridionale, belle de corps, légère d'esprit. Elle avait une si grande réputation de beauté, que Robert tit un pèlerinage à la tête d'une forte bataille de lances, seulement pour la voir[30]. Constance vient au-devant du roi dans une noble parure ; elle fit en lui un effet si profond, que Robert n'eut pas de repos qu'il ne la prit pour femme dans les cours plénières ; le mariage fut célébré à Blois : six mois  à peine s'étaient écoulés depuis le divorce. Constance, comme toutes les filles du Midi, apporta dans la cour de Robert de France les mœurs légères, les habitudes joyeuses du beau soleil de Toulouse et de Montpellier ; belle, coquette, la reine mena dans sa suite une multitude de troubadours à la science gaie, dos femmes aux habitudes rieuses. Les Francs, austères comme leur ciel brumeux, les barons à la barbe longue, aux cheveux pendants, aux noires armures, furent fort scandalisés de voir ces peuples méridionaux tous rasés, aux vêtements courts, se moquant delà gravité des clercs dans les sombres villes du Nord : il faut entendre les lamentations des vieux chroniqueurs contre cette apparition de la race méridionale dans la cour plénière du roi Robert ; ils déclament tous contre Constance, ses riches parures et ses mœurs dissolues[31]. Quand Constance paraissait sur sa baquenée aux poils blancs et lissés pour faire ressortir ses cheveux noirs qui tombaient en tresses jusque sur la croupe de son noble coursier ; quand elle se montrait avec ses robes écourtées, la jambe presque nue ; quand elle se faisait suivre de jongleurs, troubadours, esprits fous de gaieté, il y avait un long murmure parmi les Francs inquiets. Quelle était cette folle femme ? que voulaient donc ces baladins ? venaient-ils imposer leurs mauvaises mœurs à la nation de France ?

Constance, à travers cette écorce brillante et ses habitudes de coquetterie, avait un caractère ferme, tenace, emporté ; la reine conquit sur Robert tout le prestige d'une grande passion. La pauvre Berthe fut oubliée ; Constance aimait la musique, l'art des jongleurs et des ménestrels ; auprès d'elle Robert se prit encore à composer des hymnes d'une musique douce et harmonieuse ; le pieux monarque mêla l'amour et Dieu dans une commune pensée. A la chapelle de Dourdans, il faisait vibrer l'orgue pour chaque prose de l'année, et le nom de Constance se trouva plus d'une fois dans ses prières à Dieu. La reine fut une femme de tête et de cœur ; Constance heurta hautement les féodaux, et voilà pourquoi les chroniques la dépeignent sous des couleurs altières et dissolues ; elle était implacable dans ses ressentiments ; quand elle avait résolu un acte de sa volonté, rien ne pouvait la contraindre ; malheur à celui qui se déclarait son ennemi ! Constance demeurait inflexible dans ses desseins ; elle poursuivait tout ce qui s'y opposait, tout ce qui était hostile à sa puissance. Robert subit l'absolue domination de la reine[32] ; de là les clameurs des vieux féodaux de la rare franque ; les Aquitains, les Provençaux devenaient maîtres de la cour plénière, ils se partageaient les fiefs et les domaines royaux ; n'y avait-il pas parmi les Francs mille causes de plaintes et de révoltes armées ? le sang devait bouillonner au cœur des hommes d'armes !

 

 

 



[1] Il y a une vie de Robert écrite par Helgaud, moine de Fleury ; elle est contemporaine ; mais le pieux solitaire ne s'occupe que des prodigalités du roi et des bienfaits dont il accabla les monastères. Duchesne, tom. IV, et dom Bouquet, tom. X et XI.

[2] Raoul Glaber, tom. II, chap. II. Gerbert résume la science du Xe siècle ; j'en parle plus loin avec détail.

[3] Les Bénédictins ont consacré le VIe volume de l'Histoire littéraire de France à l'étude de cette époque de la littérature ; ils donnent beaucoup de détails sur les écoles de sciences dans les cathédrales ; mais il y a peu d'aperçus et de critique élevée ; tome VI (préface).

[4] Voyez les Bénédictins et le savant abbé Lebœuf, Recueil de divers écrits pour servir à l'Histoire ecclésiastique de Paris, Paris, ann. 1739.

[5] La vie de Gerbert est une des plus curieuses et des plus agitées du moyen âge ; elle se trouve dans Baronius (Annal.), ad ann. 987-1030. Gerbert fut depuis le pape Silvestre II. J'ai dû consacrer, je le répète, tout un chapitre à Gerbert, parce qu'il résume la science du Xe siècle.

[6] Helgaud, Vita Roberti, ad ann. 997, cap. IV.

[7] Bréquigny, Recueil de Chartres, tom. I. — Mabillon, Diplomatica, tom. I. — Art de vérifier les Dates (article Hugues Capet).

[8] Il résulte d'une chartre rapportée dans la correspondance de Gerbert, que Hugues Capet s'était personnellement adressé à Basile et à son fils Constantin, pour leur demander en mariage une de leurs filles, toutes les princesses d'Allemagne et de France étant ses parentes. Voici comment est l'intitulé de cette chartre : Basilio et Constantino imperatoribus orthodoccis, Hugo gratia Domini rex Francorum. Apud Gerbert. Epist. 3.

[9] Les prohibitions de mariage étaient dans le droit catholique deux fois plus étendues que dans le droit romain. Comparez le code Théodosien, liv. IV, et les décrétales de Matrimomis. En morale, la loi civile peut se montrer plus indulgente que la loi religieuse. Voyez Pothier, Pandectes, liv. V.

[10] Helgaud, Vita Roberti. — Duchesne, tom. IV, p. 64. Comparez avec l'abbé de Camps (Cartulaire) ; le savant abbé a fait une dissertation spéciale sur le divorce de Robert et de Berthe. Mss. Biblioth. du roi, tom. IV, in-folio.

[11] Dubois, Hist. ecclés. de Paris, p. 612.

[12] Helgaud, Vita Roberti, lib. I. On peut lire sur Helgaud et sur Robert une dissertation de Sainte-Palaye, dans les Mémoires de l'Académie des inscriptions, tom. X, p. 553 à 562.

[13] Mabillon, Diplomatie, tom. I. Montfaucon donne deux ou trois monuments du règne du roi Robert, tom. I.

[14] Voyez Labbe, Concil. Gallia, tom. I. Les canons prohibent en vain ces habitudes belliqueuses, dom Bouquet, tom. X.

[15] Labbe, Collect. Concil. Gallia christiana, tom. II, et à la table des matières, v° Cleric. et Abb.

[16] Voyez Baronius, Annal., ann. 985-997.

[17] Comparez Ditmar, p. 354, apud Schmidt, Histoire des Allemands, tom. III, p. 439, et le Panthéon de Godefroy de Viterbe dans Muratori, Scriptor. ital., tom. VII, p. 436, 437.

[18] Baronius, Annal., ann. 995-997.

[19] Ditmar, Annal., ann. 995-997.

[20] Dubois (Histoire ecclésiastique de Paris) entre dans de grands détails sur le divorce. Voyez aussi dom Bouquet, Collect. des Historiens de France, tom. X.

[21] Bénédictins, Art de vérifier les Dates, tom. II, in-4°.

[22] Chronique de Frodoard, ad ann. 995-997. La correspondance du pape a été publiée par Pagy, ad ann. 997.

[23] L'hymne de la Pentecôte est l'œuvre du roi Robert. Voyez le Mémoire de l'abbé Lebœuf sur la musique l'église, p. 86 et 87, et les Bénédictins, Hist, littér. de France, tom. V.

[24] Pagy, Annal. ad ann. 997. — Dom Bouquet, Hist. de France, tom. X.

[25] Dom Bouquet, Collect. Hist. de France, tom. X et XI, et la savante préface. Helgaud se borne à dire : Cujus sancti viri increpatio tandem perstitit, donec rex mitissimus reatum suum agnosceret, et quam male sibi copulaverat, mulierem prorsus derelinqueret, et peccati maculam, grata Deo satisfactione, dilueret. (Vita Robert. reg., cap. XVI.)

[26] Voyez les canons de l'Église sur l'interdiction. Collect. Concil. : table des matières, v° Excommunicat., Interdict.

[27] Le récit du légat Damien a été discuté comme une invention puérile : il ne faut pas connaître l'esprit du temps pour mettre en question sa vérité. Voyez la lettre originale de Damien. (Dom Bouquet, Hist. de France, tom. X.)

[28] Les chroniques parlent de cette tradition aux yeux du peuple, un excommunié n'était plus dans la société humaine, il ne pouvait donner naissance qu'à des monstres dans l'ordre moral comme dans l'ordre physique. Au reste, voyez tom. X, Hist. de France, dom Bouquet, et l'abbé de Camps, Cartulaire, Mss., tom. IV.

[29] Dom Bouquet, Collect. des Hist. de Francs, tom. X.

[30] Helgaud, Vita Roberti, cap. XXIV. — Frodoard, Chronique, et Raoul Glaber. — Dom Bouquet, Historiens de France, tom. X.

[31] Cæperunt confluere, gratia ejusdem reginœ, in Franciam atque Bur grandiam ab Arvernia, et Aquitania, homines omni levitate ranissimi, moribus et veste distorti, armis et equorum phaleris incompositi, a medio capitis vomis nudati, histrionum more barbis rasi, caligis et ocreis turpissimi, fidei et pacis fœdere vacui, quorum itaque nefanda exemplaria, heul proh dolor ! tota gens Francorum nuper omnium honestissima et Burgundionum sitibunda rapuit, donec omnis foret nequitiœ et turpitudinis illorum conformis. (Rodulph. Glaber., Hist., lib. III.)

[32] Le moine Glaber, qui soutient sans cesse l'honneur de la race du nord, s'élève vivement contre la reine Constance ; c'est une haine profonde. Voyez chap. XVII, XXI, XXIV.