FRANÇOIS Ier ET LA RENAISSANCE. 1515-1547

TOME TROISIÈME

CHAPITRE III. — L'EUROPE DURANT LA CAPTIVITÉ DE MADRID.

 

 

Progrès des Turcs en Hongrie. — Affaiblissement de l’unité catholique. — Disparition du moyen âge. — Morcellement des souverainetés. — Le protestantisme. — Lutte en Allemagne. — Dissolution du vieux droit public. — Influence en France. — Esprit parlementaire. — Universitaire. — Les finances. — Procès de Samblançay. — Noblesse. — Bourgeoisie. — La famille de François Ier pendant sa captivité. — Situation de Paris. — Les châteaux royaux. — La chevalerie. — Composition de l'armée. — Esprit nouveau. — Les chroniques. — Histoire. — La poésie. — Passe-temps et jeux. — Aspect de Paris au retour de François Ier. — Les arts. — Les sciences. — Confusion. — Costume sous lequel se montre la renaissance.

1522-1524.

 

Quand le roi François Ier, de bonne mémoire, gémissait en la captivité de Madrid, quelle était la situation de l'Europe ? Le moyen âge (et j'entends ici la période du VIIe au XVe siècle) divisait le monde en deux vastes idées, profondément séparées : le catholicisme et le mahométisme. En vertu de cette division, la chrétienté s'était levée dans les Croisades, la plus sincère expression du moyen âge. Aussi la meilleure preuve que la vieille société allait disparaître, c'est que rois et peuples restaient presque indifférents à la face du débordement immense des Turcs sur l'Europe. Nul progrès n'était comparable à ceux de Soliman II ; il venait de conquérir Rhodes, d'expulser les valeureux chevaliers, alors mendiant un coin de terre en Italie et en Allemagne. De là d'innombrables armées s'étaient répandues en Hongrie, et 500.000 Turcs, aux cimeterres ensanglantés, gagnaient la bataille de Mohatz[1] contre Louis, roi de Hongrie, et s'avançaient vers Bude ; cette cité une fois conquise[2], la Hongrie succombait. Quelques années encore et Vienne verrait ses murs assiégés par les Barbares.

Cette invasion sauvage, en d'autres temps, eût soulevé la chrétienté tout entière, comme un seul homme ; et maintenant dans ce conflit d'intérêts, dans ce heurtement d'opinions et de principes, elle excitait à peine la sollicitude des princes chrétiens. Deux puissances semblaient seules s'en occuper avec une sollicitude patriotique ; le pape et les ordres religieux. Dans l'oubli et l'indifférence de tous les princes chrétiens pour l'intérêt commun, le souverain pontife et de pauvres moines mendiants voulaient que l'Europe s'armât pour arrêter ce débordement de barbares qui brûlaient les bibliothèques comme Omar, et dispersaient les femmes et les enfants dans les sérails et parmi les janissaires. Et précisément alors il se trouvait que ces deux puissances si patriotiques, si nationales, étaient violemment attaquées par le protestantisme, prêché hautement par Luther en Allemagne. Ce qui brisa le lien commun des souverainetés chrétiennes, le principe moral de toute unité civilisatrice, ce fut la réforme, ébranlant d'abord les liens fédératifs et nationaux de l'Allemagne, pour se répandre ensuite sur l'Europe en discordes sanglantes. Le pape, les ordres religieux auraient sauvé la nationalité grecque du joug des infidèles, s'il n'y avait pas eu schisme et réforme. Le projet des cordeliers pour un armement de l'Europe aurait suffi pour préserver de l'esclavage Rhodes, Chypre, la Grèce entière et l'Orient si plein de chrétiens.

Mais alors Luther désorganisait tout aussi bien les idées de souveraineté dans les gouvernements, et d'obéissance parmi les peuples, que celle de propriété entre les suzerains, les vassaux et les monastères ; aux uns il disait : Pillez les biens de l'Église, aux autres, secouez l'unité du mariage ; plus de vœux, plus de soumission. Dans ce chaos qui aurait pu retrouver encore une idée d'unité et de force pour repousser les Turcs ? Le catholicisme aurait donc sauvé la Grèce, comme la pensée du moyen âge avait préservé les arts, si l'unité de la foi s'était maintenue ; les schismes déchirèrent les nationalités jusque dans leurs entrailles. Depuis la réforme, les intérêts étaient si morcelés, les souverainetés si antipathiques les unes aux autres, qu'on vit François Ier essayer des négociations avec Soliman, et solliciter même un traité ; sous prétexte d'intérêts commerciaux, le roi voulait assurer aux Français une sécurité politique en Grèce et en Syrie aux dépens de la noble cause de la liberté. En Allemagne, le luthéranisme divisait, fracassait le vieil écusson de la nationalité germanique. La prédication de Luther favorisait un retour à la barbarie scolastique, et cette influence se faisait sentir sur la France elle-même. Quand un principe est jeté au monde, il ne faut pas croire qu'il s'arrête dans certaines limites, il marche à son dernier terme : le moyen âge offrait une hiérarchie, et, comme souverain guide de toute pensée sociale, la papauté apparaissait pour récompenser ou pour punir, et avec elle un système de peines et de récompenses futures ; les solennelles armes de l'excommunication et de l'interdit étaient les seules forces capables d'arrêter les princes barbares et les générations féodales.

Depuis le XIVe siècle, l'aspect social n'était plus le même ; des classes inconnues étaient nées, et un esprit nouveau s'était manifesté au milieu des peuples. Le servage une fois aboli ou modifié, il s'était formé une bourgeoisie disputeuse, sorte de juiverie intéressée au milieu de la liberté féodale, parce qu'elle prêtait et qu'elle gagnait tout ce que la chevalerie dépensait avec sa largesse ordinaire ; elle acquit si bons deniers-, si belles maisons, si opulents hôtels, qu'à la fin la bourgeoisie put dominer les gentilshommes, et dans les états, souvent, les vilains eurent la prédominance. De cette classe de bourgeois riche et parcimonieuse étaient sortis les gens de judicature, vieux comme les Établissements de saint Louis, lorsqu'il y eut lois et coutumes écrites, lorsqu'il s'agit de préciser exactement les cas particuliers, les points de droite, il se forma tout naturellement une profession de basoche et de magistrature avec la coutume d'enregistrer les édits pour les publier ensuite. D'où vint la faculté de remontrances, et la magistrature put s'associer à la direction même du gouvernement. Dès ce moment les parlementaires siègent au conseil ; fort instruits dans la législation, le droit romain et coutumes, ils font remontrances dans les affaires, souvent comme un moyen suspensif, et qui sert très-bien les idées du pouvoir. Lorsque surtout le roi a besoin de résister, de prouver qu'il n'est pas le maître de tenir sa parole, alors il fait intervenir les parlementaires, indépendants de sa volonté, et le poussant à ne point accomplir même la foi jurée.

Cette intervention de basoche corrompit la pensée de loyauté naïve, le noble caractère de la chevalerie, qui avait détrôné la violence féodale. Mettez à la face d'un beau roman du moyen âge, théâtre d'honneur et de courtoisie, les commentaires de Cujas et de Bartole, leurs subtilités sur le droit, sur les actions mêmes les plus incontestées ; et vous verrez un changement immense dans les mœurs de la société. Déjà même dans François Ier se révèle deux hommes : l'un l'expression de la loyauté et de la force chevaleresques, le héros des romans et des chansons de geste ; l'autre le roi de la judicature, le prince dominé par le parlement et alors faisant chicane ; ce qui ne convenait pas à un gentilhomme. Avec les études de basoche se révèle aussi l'esprit de commentaire, de science et d'érudition, honoré, payé par le roi, et qui exerçait sur lui une véritable domination. Avant ce règne, la science se renfermait exclusivement dans les monastères, sous les voûtes des abbayes et pendant ces longues journées et ces nuits austèrement passées. Les bibliothèques monastiques étaient les seules richesses scientifiques jetées à profusion. Mais au XVIe siècle se répandirent de grandes renommées que l'Europe se disputait comme un trésor ; non point qu'elles fussent capables de répandre les lumières en abondance : les savants s'occupaient exclusivement de l'étude des langues, de la ponctuation des textes hébraïques, des commentaires de législation, travaux en dehors du vulgaire ; et ces savants, attirés à toutes les cours souveraines, étaient fêtés, entourés comme des princes. Les juristes et les érudits furent les grands démolisseurs du moyen âge.

Le développement considérable de l'imprimerie depuis cinquante années aidait cette action des esprits. Lorsqu'on parcourt les riches galeries de la Bibliothèque du Roi et les dépôts aussi curieux de Vienne ; de Munich et de Berlin, on doit reconnaître qu'une très-grande masse de livres fut jetée en circulation à la première moitié du XVIe siècle. Les caractères se présentent avec une régularité qui tient à l'époque des copistes de manuscrits, si parfaits au moyen âge : à Venise, à Rome, à Paris, à Lyon, il s'imprime des textes grecs, hébreux, d'une netteté, d'une précision qu'aujourd'hui on égale à peine. Et ce qui rendait cette exécution plus difficile, c'est le technique des abréviations, le maintien absolu de tous les signes, de tous les caractères par lesquels les hellénistes du Bas-Empire indiquaient les ellipses de lettres, de voyelles ou de syllabes, et même la ponctuation hébraïque. Ce désir du calque va si loin que, dans les livres français, on conserve les abréviations comme aux manuscrits des XIVe et XVe siècles. Rien n'égale la fécondité, la profusion des romans de chevalerie imprimés à ce temps : Lancelot du Lac, les Quatre fils Aymon, sont reproduits en format in-folio ou bien en petits volumes à l'usage du peuple, et presque toujours avec des figures gravées sur bois, comme en Allemagne, ou bien sur cuivre, comme la méthode déjà s'en introduisait. Les annales des Aides, les catalogues des bibliothèques, constatent l'immense quantité de volumes qui furent imprimés dans le format in-folio, jusqu'au petit bréviaire in-24, travaillé avec un si grand soin, et que les Elzevirs portèrent plus tard à une perfection splendide. L'imprimeur n'était pas seulement l'homme mécanique qui faisait travailler et agir des bras pour la confection d'un volume : c'était un érudit fort sérieux qui passait ses veilles à corriger, à revoir les textes, à les comparer incessamment. Érasme, prote d'imprimerie, s'était consacré à la plus belle mission de la science. Aussi tout ce qui tenait à l'art de l'imprimerie rentrait dans le domaine de l'Université ; on comprenait parmi ses suppôts les imprimeurs, les parcheminiers, les enlumineurs, qui tous demeuroient es rues de la montagne Sainte-Geneviève, et là, travaillant nuit et jour, ils faisoient leur état pour le bien et l'avancement de la fille aînée des rois. Autour d'eux étoient messieurs les escoliers et étudiants, aussi nombreux que les gens de judicature, avocats, procureurs et sergents, tous corporés sous leur bannière, faisant feu de joie pour la Saint-Jean et les fêtes publiques, de manière à mettre en esbahissement la bonne ville de Paris. Entre eux souvent s'élevaient querelles, batailles, mais les bourgeois tenaient à leur Université aussi bien qu'au carillon de l'hôtel de ville, à l'horloge municipale et à leurs fêtes. Toutes ces classes sorties de la bourgeoisie se liaient avec elle par mariage, compérage ; union fort puissante alors, car le baptême créait un beau lien entre le baptisé et le parrain ; sorte de paternité morale, aussi énergique que les rapports de la filiation légale.

De cette bourgeoisie sortaient encore les gens de finances et d'argent, maîtres des rôles et des recettes, si utiles au trésor royal et toujours fort odieux au peuple qui les voyait élever et pendre avec bon plaisir à Montfaucon. Et il surgit alors une circonstance où le roi satisfit en quelque sorte la haine publique en élevant aux fourches et patibules le contrôleur Samblançay, à la suite d'un des procès les plus solennels. Jacques de Beaune, baron de Samblançay, sortait de race d'argentier et par conséquent de bourgeoisie. Presque toujours les rois choisissaient des changeurs de monnaie, moitié juifs et catholiques, faisant commerce étendu, pour leur confier le trésor et charges de l'État. Le baron de Samblançay était fils de Jean de Beaune, bourgeois de Tours, argentier de Louis XI et de Charles VIII ; Louis XI, toujours si fin matois, avait pris tous ses officiers dans la ville de Tours, parmi les marchands, parce qu'il avait plus de foi en eux que dans les gentilshommes. Messire de la Beaune avait donc acquis d'immenses richesses, et cela fut un titre pour conserver les finances du roi. François Ier prit le fils, comme ses prédécesseurs avaient choisi le père. C'était un homme fort avare et très-mal en rapport avec l'esprit aventureux de François Ier ; pour un prince aux chevaleresques aventures, il fallait un ministre qui pût un peu seconder la hardiesse de son esprit, et Samblançay n'avait rien de cela ; il visait toujours à l'espargne[3], et c'est ce qu'il ne fallait pas quand il s'agissait de conquête et de paye des gens d'armes sans quartier aucun lorsque les écus ne venaient pas. Cet esprit de parcimonie avait nui considérablement aux expéditions du roi en Italie ; au lieu d'envoyer de l'argent, Samblançay mettait de côté, et il avait été ainsi une des causes des grandes défaites au Milanais. Si les Suisses s'étaient débandés, s'ils avaient poussé haut leurs murmures, à qui fallait-il s'en prendre, si ce n'est à la parcimonie de Samblançay, à ce manquement de parole qui avait fait que Lautrec avait vu son armée dissoute comme une nichée d'oiseaux de proie qui essaient leurs ailes ?

Cette disposition si parcimonieuse de l'escarcelle du roi avait créé bien des ennemis à Samblançay, et particulièrement la duchesse d'Angoulême, la mère régente placée à la tête du gouvernement, et qui en voulait diriger le ressort avec liberté. Il est vrai que Samblançay l'accusait d'avoir retenu l'argent destiné à la paye des gendarmes, et cette assertion, rien moins que prouvée, avait fait naître une grande défiance contre l'argentier du roi, qui chaque année acquérait terres plantureuses au beau pays de Touraine ou mettait escus sur escus. Le roi voulait-il de l'argent, c'était toujours les mêmes difficultés, les mêmes embarras : avant de partir pour Pavie, il avait requis de Samblançay de fournir la paye des gens d'armes et le prix d'achat des Suisses, et l'argentier l'avait refusé, ainsi toujours en opposition aux royales vues de François Ier. On ne sait pas tout ce qu'il y a de malheurs publics dans cette opposition sourde, clandestine, de l'homme qui tient les cordons de la bourse, contre la tête politique qui dirige les grandes affaires ; quand cette opposition est poussée trop loin, elle tue les ressorts mêmes du gouvernement et les empêche de se déployer dans leur fermeté. François Ier prêt à partir pour le Milanais, blessé de ses refus, retira donc à Samblançay l'administration des finances, et l'argentier vint s'abriter dans une de ses terres aux bords du Cher ; plus riche que les gentilshommes, que les barons, que les gouverneurs et comtes de provinces, c'était pourtant lui qui avait refusé 300.000 livres au roi, quand son escarcelle était pleine d'écus ; et cette parcimonie, Samblançay la poussa si loin qu'il réclama même au seigneur roi une certaine dette ancienne pour avance. Une telle exigence d'un avare cousu d'or blessait le roi, prêt à partir pour l'Italie. Néanmoins, joyeux compagnon, il ne voulut pas attrister ses batailles par un procès au parlement. Quand les malheurs de la guerre eurent réduit le roi à la captivité, et qu'il fallut recueillir partout escus pour faire rançon, qui l'aurait dit hélas ! et tant l'avarice aveugle ! Samblançay ne renonça pas à ses réclamations, et alors l'opinion publique s'éleva contre lui : toujours les financiers, les argentiers, comme les juifs du moyen âge, n'étaient-ils pas en exécration à la multitude ? et celui-ci plus qu'aucun autre, car il avait au soleil plus de 300.000 livres de revenu. La reine mère, qui jamais ne lui avait pardonné, profita de quelques plaintes secrètes sur la gestion de Samblançay, sur ses rapines, ses ladreries, pour le faire arrêter et mettre à la Bastille[4]. Le chancelier Duprat, si dévoué au roi, nomma une commission au sein du parlement pour juger le riche avare ; des témoins furent entendus, des pièces examinées, et il en résulta que suivant les lois romaines du code, ledit Samblançay fut convaincu de péculat, condamné à être pendu à Montfaucon, et ses biens confisqués au profit du trésor[5]. L'arrêt fut exécuté sans pitié, quoique Samblançay, vieillard aux cheveux blancs rares et parsemés, pût inspirer merci. L'argentier avait des amis. Il y eut quelques larmes versées, quand on le vit si cassé monter la longue butte ; on fit complainte sur lui,' et, comme si c'était le sort des surintendants d'être pleures par les poètes, Clément Marot fit des vers sur la déconfiture du malheureux Samblançay, et sur ce Maillard, juge d'enfer, qui l'envoya aux oiseaux de proie. Dans une épigramme qui restera à la postérité, Clément Marot se demandait : s'il n'étoit pas mieux que Samblançay menât pendre Maillard que Maillard Samblançay. Au reste, les annales de ce procès furent soigneusement conservées, et le châtiment dut servir d'exemple[6].

Ce procès était à peine accompli que François Ier, libre enfin de sa captivité y reprenait ses habitudes de cour, de légèreté et de fantaisie. La reine Claude, la fille de Louis XII, était morte à vingt-cinq ans ; disgraciée de la nature, aux traits amaigris, elle n'avait jamais eu l'amour du roi ; et peut-être sa physionomie enlaidie avait-elle contribué à jeter François Ier, dans ses distractions de maîtresses qui occupaient sa vie à la chasse dans les vastes forêts de Fontainebleau ou de Compiègne[7]. Claude de France laissait plusieurs enfants : l'aîné François, alors à neuf ans, le puîné Henri, et le dernier Charles, duc d'Orléans, le plus gracieux de tous, et à côté de ces trois beaux garçons, deux filles, Madeleine et Marguerite[8] (deux autres, Louise et Charlotte, étaient mortes avant leur mère). Nulles funérailles ne furent comparables à celles de madame Claude de France, célébrées à Blois, à Paris, et dont les gravures contemporaines nous ont retracé les splendides cérémonies. Quand on veut connaître l'art populaire, il faut suivre attentivement ces gravures qui ne disent pas le type parfait d'une époque ; mais le goût général d'un temps, les pensées d'une génération. On voit d'abord madame Claude de France sur son lit de parade, la face découverte, à la manière des religieuses ; autour d'elle se trouvent ses dames, vêtues de noir aussi, et un flambeau à la main ; les moines entourent le cercueil et psalmodient ; puis des fleurs de lis parsemées par milliers comme sur les écussons de France, car les trois fleurs de lis n'étaient point encore le blason immuable de la couronne, ainsi que cela se fit sous les Bourbons.

La cour non-seulement était veuve de madame Claude, mais deux pauvres petits enfants de France étaient partis pour servir d'otages à leur père, pensée dure et inflexible que d'échanger ainsi le père contre les fils ! Il semblait que Charles-Quint avait pressenti qu'il fallait rattacher les liens du traité par le sang[9]. Deux des filles du roi étaient déjà fiancées, la première, Madeleine, à Jacques V, roi d'Ecosse, l'allié de la France, la seconde, Marguerite, au duc de Savoie que François Ier voulait faire entrer dans ses desseins sur l'Italie. La cour était donc en veuvage, et si à Madrid il y avait fiançailles entre le roi et la sœur de Charles-Quint, douairière de Portugal, le mariage n'était ni accompli, ni consommé. Éléonore n'avait point suivi le roi ; les noces ne devaient se faire qu'après le traité accompli, au jour où la dot serait comptée ; de sorte qu'il n'y avait dans les palais royaux de femme souveraine, impérative, que la mère de François Ier, madame d'Angoulême. Cette autorité morale qu'elle exerçait partout, il ne faut point la blâmer, car elle avait sauvé son fils de bien des embûches et fortement conduit la monarchie en son absence ; laissant la partie chevaleresque à son fils, madame de Savoie gardait pour elle la politique et le gouvernement. Ce n'était pas la faiblesse du roi qui faisait le crédit de la mère, mais l'instinct profond que, dans cette mère, il y avait une force d'autorité qu'en vain lui-même aurait essayée. Ce fut par l'action de cette reine qu'on vit une cour permanente pour la première fois en France : au temps féodal, le suzerain réunissait, dans les joutes et tournois, fêtes et pompes publiques, les seigneurs, vassaux, chevaliers, à l'occasion de quelques solennités ; mais, une fois la solennité passée, tous se dispersaient. En consultant, au contraire, les registres de François Ier, les dépenses de l'hôtel, on trouve l'incontestable fait d'une cour fixe avec des pompes inaccoutumées, un luxe de sénéchaux, bouteillers, varlets ; et pour la reine, de dames d'atour, d'honneur, demoiselles de compagnie[10], ainsi qu'on les voit aux enluminures des cartes et tarots. Les poètes et chanteurs, les artistes, les savants et les maîtresses tiennent leur rôle à cette cour. Brantôme, la scandaleuse expression des mœurs du temps, révèle cette existence d'une compagnie rieuse autour de la reine. Les amours de François Ier sont devenus comme une tradition que la peinture a reproduite, même avec vulgarité. L'âme chevaleresque du roi s'était jetée dans cette ardente passion des femmes, qui le faisait tant se plaire aux bois, aux forêts, aux châteaux 9 partout où se mêlaient les simulacres de guerre, de tournois : vieil esprit qui s'en allait et que le roi cherchait en vain à retenir.

Il s'opérait à côté de lui une révolution qui explique la froide supériorité de Charles-Quint et la faiblesse relative de François Ier. Qu'était devenue la chevalerie avec ses faux semblants de vie et d'existence ? Travail impossible que de faire renaître ce qui est mort ! La chevalerie, c'était le moyen âge avec ses prouesses, et dans cette époque de renaissance, que pouvait-elle opposer à l'artillerie et à la mousquetade ? On avait beau se barder de fer de la tête aux pieds, caparaçonner les chevaux jusqu'aux dents ; le canon emportait des rangs entiers de chevaliers et d'écuyers valeureux. Au courage individuel succédait la force des masses ; de cette noble chevalerie il ne restait plus que les romans traduits en prose, imprimés en profusion, et qui laissaient aux mœurs une empreinte de désintéressement, de loyauté, que la politique italienne allait bientôt détrôner. Or, ces changements devaient, de toute nécessité, anéantir la supériorité de François Ier parce qu'il était, lui, la chevalerie incarnée. Les Espagnols la raillaient déjà comme une chose morte, que le roman de Cervantès plus tard acheva d'un cruel coup de massue. Le Roman de la Rose était la lecture favorite de François Ier, qui promenait ainsi son imagination dans une brillante poétique, et le Don Quichotte détrôna cet admirable verger d'honneur. En Espagne, il ne resta plus debout que la fierté castillane, et Charles-Quint y mêla un peu d'astuce et de finesse italienne qu'il tenait de son origine de Bourgogne et de son long séjour avec les Sforza et les Médicis. La composition de l'armée devait aussi sensiblement modifier les forces des batailles ; les bandes étrangères formaient les masses les plus rudes d'infanterie ; composées d'Italiens, d'Allemands, de Suisses, elles ne pouvaient conserver cet esprit de patriotisme et de loyauté nationale, inhérent au cœur de la gentilhommerie.

Si, sous le rapport militaire et politique, François Ier ne suivait pas les tendances de son siècle, il n'en était pas ainsi du mouvement intellectuel qu'il dominait de sa noble impulsion. Comment un prince aussi préoccupé d'expéditions et de batailles put-il s'absorber non-seulement dans les belles chroniques, l'histoire et la poésie, mais encore dans l'étude des langues de l'antiquité ? Qu'un roi protège l'histoire, il peut y avoir là cet égoïsme qui lui fait désirer de voir ses actions de grandeur conservées pour la postérité. Qu'il aime à lire les chroniques, c'est un passe-temps sur les choses anciennes que lui enseigne le sens mystique des choses nouvelles ; qu'il aime aussi la poésie, elle distrait et console. Mais François Ier protège surtout les érudits et les savants ; s'il fonde des chaires, ce n'est ni de poésie, ni d'histoire, mais d'hébreu, de grec ; les livres qu'il encourage et fait imprimer à ses frais, ce sont des commentaires et des scoliastes. Clément Marot n'obtint pas de chaire pour débiter les vers ; valet de chambre du roi, il le suit et l'amuse ; et le prince le protège comme un maître le doit à son serviteur, lorsque Marot est accusé de nouvelles opinions, c'est à François Ier captif à Madrid, qu'il s'adresse pour obtenir sa liberté, lui, le poète détenu dans un puant cachot. Ce grand charme des vers de Clément Marot, François Ier l'apprécia surtout parce qu'il gardait l'empreinte du moyen âge.

En Espagne, dans sa triste captivité, ce qui avait consolé le roi, c'était la chasse, qu'enfant il aimait déjà avec passion. son retour, le roi visita d'abord ses forêts chéries, Fontainebleau, Amboise, Compiègne ; les constructions de maisons royales, suspendues quelque temps par les malheurs de la guerre, il les fit continuer avec ardeur ; ordonnant de reproduire comme un souvenir mélancolique le petit palais qu'il occupait à Madrid, un rendez-vous de chasse de chétive apparence, élevé dans le bois de Boulogne, dut prendre le nom de Madrid en mémoire de sa captivité ; comme ces chevaliers longtemps esclaves des infidèles qui gardaient leurs chaînes, pieuses reliques, pour rappeler leur lamentable exil ; il l'embellit d'ornements comme les maisons mauresques. A cette époque on voit lutter les façons d'art d'Italie et d'Espagne : Milan et Tolède, Valence et ses Alcazars ; Vérone et les souvenirs romains ; Burgos et sa cathédrale reviennent à l'esprit du roi et s'y confondent ; il s'y fait un mélange fort curieux qu'on doit signaler comme la seconde manière du siècle de François Ier.

Ce goût si prononcé pour les courses lointaines, faisait préférer au roi la vie des champs à celle des villes ; il est rare de voir une ordonnance du roi datée de Paris ; c'est toujours d'Amboise, de Blois, de Chambord, de Gien-sur-Loire, de Fontainebleau, d'Étampes, de Saint-Germain-en-Laye, de la Muette, que sont émanés les édits portant réforme politique ou judiciaire. Dans ces châteaux se trouvaient à la fois la solitude et la distraction f les cours plénières et les forêts, les tournois et les meutes ; tout ce qui faisait la vie des chevaliers et du suzerain : le monarque n'était-il pas le vieux châtelain du royaume ? Là se traitaient les affaires les plus sérieuses, et sous l'action du chancelier Duprat ; les ordonnances se multipliaient. Un édit ratifie la promesse des échevins de Paris, de payer une partie de la rançon du roi[11] ; désormais le prévôt doit commettre un lieutenant pour visiter les cabarets, lieux publics, et y saisir les vagabonds, pour les conduire au châtelet de Paris[12] ; le prévôt peut juger même les privilèges des universités[13]. Le roi signe à Amboise une ordonnance qui veut qu'un avocat général soit entendu toujours, sans excepter les causes où il ne s'agit que d'intérêts privés[14]. A Chambord le roi fixe le prix des monnaies[15] ; à Saint-Germain-en-Laye, il donne un édit sur les maîtres rôtisseurs, qui seuls peuvent préparer et vendre les poulailles et viandes rôties ou prêtes à mettre à la broche[16] ; à Compiègne, sont signées les lettres de provision du grand chambrier de France[17]. Le roi s'arrête peu à Paris, au Louvre ou dans la maison abandonnée de Charles VII, le palais des Tournelles, si entourée de beaux taillis et de cerisaie, au milieu des marais, sous le canon de la Bastille.

Paris pourtant à cette époque commence à s'embellir. Le roi se souvenait des belles pompes de son entrée par la porte Saint-Bernard ; et des fontaines de vin qui coulaient, et des arcs de triomphe, feux de joie et danses éclatantes qui saluèrent son avènement. En prenant Paris de l'extrémité de la porte Saint-Honoré, on trouvait d'abord les terrains achetés par le roi, pour y bâtir une maison de résidence avec jardins (les Tuileries), presque attenant les cours du Louvre, avec des herses et des tourelles. En face, sur la rive gauche de la Seine, le Pré-aux-Clercs, très-verdoyant, l'Université avec ses bâtiments, jusqu'à la ruelle du Bac, limite de la juridiction de l'église Saint-Germain-des-Prés. Auprès de la rivière, la triste tour de Nesle, où battaient constamment les flots ; le bel hôtel du même nom à grande apparence. Sur la rive droite après le Louvre, l'abbaye de Saint-Germain-l'Auxerrois avec ses murailles, ses juridictions, ses tours qui formaient comme une défense et une protection fort antiques, puisque les chroniques de Saint-Denis racontaient que le plus valeureux défenseur de Paris contre les Normands, était le moine Abon, de l'abbaye. Le Louvre voyait de notables embellissements, et les premières pierres des Tuileries étaient posées sur le sable. Si l'on pénétrait jusqu'aux quartiers des marchands, après la Pointe-Saint-Eustache, on trouvait le cimetière des Innocents, quartier des halles, avec leurs vieux bâtiments à piliers larges et solides.

Depuis le retour d'Italie, les constructions de châteaux et de maisons changent un peu d'aspect ; au XIVe siècle, elles sont le plus souvent toutes de bois, en forme de grange avec de larges toits, sans grâce, et si l'ogive des castels, le feuilleté des créneaux, la grâce des petites tourelles, et par-dessus tout, la magnificence des cathédrales, ne jetaient pas un peu de variété dans la construction des édifices, rien ne serait plus monotone que les monuments que nous reproduisent les manuscrits du XIIIe et XIVe siècle.

Mais une fois que l'Italie a été visitée, quand les troupes du roi ont salué Rome, Parme, Milan, Venise, il se fait, dans les constructions d'édifices, des changements essentiels. Les maisons paraissent moins grandes et plus ornées ; des pignons s'avancent sur les rues, et présentent des figures grotesques, des serpents ailés qui versent l'eau des gouttières. Il y a beaucoup de balcons ornés de statues incrustées même dans les murs : partout des arabesques et des petites fontaines comme à Milan ; des cariatides qui soutiennent les pans de mur, avec une variété incessante d'ornements : de sorte que les rues ne présentent pas cette uniformité un peu monotone des cités aux temps modernes, avec leurs rues larges, les places symétriquement arrangées. Une ville, au XVIe siècle, est un composé de cathédrales, de maisons aux formes différentes : ici un monastère avec ses vastes jardins ; là le palais du roi, puis une rue tortueuse de marchands ; le cimetière, la halle, où se presse et se rue la multitude aux vêtements variés. Cette cavalcade chevauchant dans la rue des Tournelles, est celle du seigneur de Nesle, du comte d'Alençon, ou du maréchal de Montmorency, avec ses pages montés sur des destriers qui caracolent gracieusement pour aller visiter notre seigneur le roi au Louvre. A côté, les folâtres étudiants plantent le mai pour faire le feu de joie de la Saint-Jean. Sont-ils rieurs et folâtres ces jeunes hommes ! Nul ne leur dispute le passage ; car ils dégaineront en vertu des privilèges d'université. Tous sont vêtus brillamment ; la toque en tête et le panache de mille couleurs. Plus loin ce sont des moines aux robes blanches ou noires, dominicains ou cisterciens, au front large et tonsuré ; à leurs côtés des bourgeois causant affaires, s'inquiètent, curieux de boutiques, de ce qui s'est passé dans leur quartier, du mariage du voisin ou des morts si rapides dans la paroisse. Ils n'ont pas encore quitté leurs vêtements longs comme les gentilshommes, pour complaire à François Ier : êtes-vous un noble courtisan ? il faut raser vos cheveux longs, laisser venir votre barbe pointue, comme le roi notre seigneur ; il faut se revêtir de velours, porter un justaucorps serré, tout glorieux si vous avez pendant au col le collier de Tordre. A quelques pas une troupe de bohémiens accroupis, qui vous offrent à deviner votre bonne fortune ; cette longue file d'hommes, revêtus de chaperons, le bourdon à la main, la panetière au côté, montent en pèlerinage vers la montagne Sainte-Geneviève ; d'où viennent-ils ? de bien loin sans doute : les uns ont baisé les pierres des martyrs à Rome ; les autres ont salué le saint sépulcre à Jérusalem, et redisent en cantiques les horreurs lamentables commises par les mécréants. Ils psalmodient, tandis qu'à leurs côtés des nobles dames et des varlets, montés sur des haquenées, folâtrent et devisent d'amour. Quelle variété de costumes ! quelle richesse d'ornements ! Les miniatures du XVe siècle nous en conservent l'idée. Les débris mêmes noircis par le temps, tout déchiquetés par les âges, nous disent que si cette société n'avait pas toutes ses aises, elle avait au moins des émotions vives et répétées. Toujours de grandes rues avec le vent qui fouette, le soleil qui rayonne et vous plombe ; les mêmes vêtements, les mêmes habitudes dans la vie comme dans la mort, n'est-ce pas le type des sociétés modernes ?

La renaissance n'a donc pas encore de caractère précis dans la littérature, dans la philosophie, dans les sciences, ni dans les arts : elle reste confuse comme à l'origine de toute révolution. La réforme de Luther n'est point un véritable système en philosophie : apporte-t-elle d'autre contingent que l'instrument terrible de l'examen dans la marche des sociétés ? En histoire, l'Italie présente Machiavel et Guichardin, et la France n'a rien pour remplacer Froissard ; le scandaleux Brantôme qui va paraître n'effacera pas l'éclat des belles et grandes chroniques. En poésie, quelle distinction précise peut-on établir entre Clément Marot et Charles d'Orléans ? A qui donner la préférence ? Le moyen âge, qui se clôt par le Roman de la Rose, n'offre-t-il pas des titres de comparaison avec les meilleures productions du XVIe siècle ?

Dans les arts, il n'y a pas de système dominant. On trouve à la fois les colifichets du dôme de Milan, le plaqué vénitien, l'ogive du XVe siècle, la tourelle féodale, les pavillons carrés de Florence et des Médicis ; et, par-dessus tout, la surcharge d'ornements corrigés par les grands maîtres que François Ier appelle incessamment autour de lui. Deux monuments de sculpture doivent être comparés, je le répète, parce qu'ils montrent la tendance de cette époque : c'est le tombeau de Louis XII et d'Anne de Bretagne, placé sur un côté de la basilique de Saint-Denis ; et celui de l'empereur Maximilien à Insprück, avec ses magnifiques bas-reliefs. Ils révèlent déjà la grande renaissance et l’union mystique des arts en Italie et en France.

 

 

 



[1] L'an 932, le 24 de dzoulcaada (29 août 1526 de J-C). Le roi de Hongrie y fut tué.

[2] Bude capitula le 3 de dzouledgé (10 septembre 1526.)

[3] Dans les Mes. de Béthune, n° 8503, on trouve une lettre de Samblançay à François Ier datée du 15 octobre 1521 ; il fait au roi de fortes représentations sur sa dépense, augmentée, dit-il, de 150.000 livres par mois ; il craint de ne pouvoir suffire aux frais extraordinaires de la guerre, le fardeau du gouvernement des finances devient plus pesant de jour en jour. Si je demeure en chemin, j'aimerois mieux desloger d'avance sans retour pour moi.

[4] Lettre de M. de Samblançay au roi, 1527. — Bibl. du Roi, Mss. de Béthune, n° 8506, fol. 68 (écrite à la Bastille).

Sire à la fin de ma vie j'ay esté enquis si des deniers de vos tailles et des creües qui ont esté levées de mon temps étant en votre service, combien je n'ay receu sire, je vous advertiz que jamais je n'ay receu ne manyé deniers et ont été vos receveurs généraulx qui en tiennent compte.

Sire, j'ay esté enquis de l'argent comptant que je puis avoir receu, ai respondu et pour vérité que depuis l'année 4523, je ne me suis point veu deux mil escus ensemble, après avoir forny les cent mil escus de Mons. d'Albanye et 70.000 pour Bayonne et a présent je ne scaiche or et argent la valeur de trois à quatre cens pièces d'or de toutes sortes ; je vous supply, sire, ayez cette créance, que vous avoir veu en tant d'affaires que vous avez été depuis, j'en eusse esté si malheureux que je ne vous eusse secouru et de tout ce que j'eusse faire, et vous supplye sire, entendre que depuis deux ans j’ay été aux emprunts pour vivre.

Sire j'ay dit le surplus pour vous dire au curé de St.-Nicolas, mon père spirituel et à madame. Je vous supplye le croire et qu'il vous plaise en l'honneur de la sainte passion de notre Seigneur me pardonner si je ne vous ay si bien servy comme je suis tenu et qui vous plaise avoir ma femme et enfants en votre bonne grâce et avoyr pitié d'eux et que y vous plaise me faire acquitter pour ce que j'ay emprunté pour votre service et prie notre Seigneur vous donner très bonne santé. De votre Bastille ce vendredi. Votre très humble, etc. J. de Beaune.

[5] Extrait de l'arrêt du 29 août 1527.

Déclarent ledit Jacques de Beaune être atteint et convaincu de larcins, faussetés, abus, malversation et maie administration des finances du roi, mentionnés au dit procès. £t pour réparation des dits crimes et délits, l'ont déclaré et déclarent être privé et le privent de tous honneurs et estats. Et outre ont icelui condamné et condamnent à être pendu et étranglé à Montfaucon et tous ses biens, meubles et héritages confisquez sur lesquels biens et confiscation sera prinse la somme de trois cent mille livres parisis, tant pour restitution des sommes par ses faussetez mal prises par le d. Jacques de Beaune, sur lés dites finances du roy, qu'autres dommages et intérêts par lui faicts et donnés en icelles laquelle somme les dits juges ont adjugée au roi, pour la dite restitution, et ce sans préjudice de la dette, prétendue par ma dite dame, mère du roi.

[6] Sur le lieutenant criminel et Samblançay (Marot).

Lorsque Maillard, juge d'enfer menoit

A Montfaucon Semblançai l'ame rendre,

A votre advis, lequel des deux tenoit

Meilleur maintien ? Pour le vous faire entendre,

Maillard sembloit homme que mort va prendre,

Et Semblançai fut le ferme vieillard,

Que l’on cuidoit pour vrai qu'il menât pendre,

A Montfaucon le lieutenant Maillard.

[7] La reine Claude mourut à Blois, le 20 juillet 1524.

[8] Marguerite était née à Saint-Germain-en-Laye, le 5 juin 1548. Louise et Charlotte, les deux filles aînées du roi, étaient mortes encore enfants.

[9] J'ai trouvé une lettre de madame Louise de Savoie à ses petits enfants, le Dauphin et le duc d'Orléans, otages en Espagne, 1528. — Bibl. du Roy. Cabinet de Gagnière, Mss., in-f°, sans n., p. 60 :

Puisque vous mes petits amys avez byen cogneu Babon je ne faictz plus de doubte que vous ne cognoyssyez ceux qui sont du roy votre père, mesmement ce porteur qui est la personne de ce monde en qui le d. seigneur et moy avons plus de fyance, pour ceste cause le croirés et prendrez toutes choses qu'il vous dira comme si elles venoient de la bouche du d. sgr ou de celle de votre bonne mère. Loyse.

[10] Voyez : Estat à Pierre Rousseau commis à tenir le compte et faire les payements de l'escuirie, argenterie, chambre aux deniers, gaiges des gentilshommes, dames damoiselles, femmes de chambre, officiers. — T. Mss. de Béthune, vol. cot. 8535, f° 122. Bibl. du Roi.

[11] Saint-Just-sur-Lyon, 1er février 1525-6. Reg. du parl., vol. L, f° 69.

[12] Cognac, 7 mai 1526. — Reg. du parl., vol. L, f° 85.

[13] Cognac, mai 1526. — Reg. du parl., vol. L, f° 304.

[14] Amboise, juillet 1526. — Ord. L, 87.

[15] Chambord, 28 septembre 1526. — Reg. de la cour des mon., vol. cot. G, f° 115.

[16] Saint-Germain-en-Laye, mars 1526-27. — Traité de la police, liv. V, titre 23, p. 1433.

[17] Compiègne, 26 septembre 1527. — Reg. du parl., vol. L, f° 97, et de la ch. des comptes DD.