FRANÇOIS Ier ET LA RENAISSANCE. 1515-1547

TOME PREMIER

CHAPITRE VI. — FRANÇOIS Ier EN ITALIE. BATAILLE DE MARIGNANO.

 

 

Étonnement des Suisses sur la marche des Français. — Levée de leur camp de Suse. — Divisions entre les chefs. — Négociations. — Convention de Galera. — Attaque soudaine à Marignano. — Ordre de bataille. — Le connétable de Bourbon. — Hésitation des lansquenets. — Charge de la chevalerie. — L'artillerie. — La nuit. — Le réveil. — Intrépidité des Suisses. — Deuxième journée. — Arrivée des Vénitiens. — Retraite des Suisses. — Le roi, armé chevalier par Bavard. — Lettre à Louise de Savoie. — Entrée à Milan.

AOÛT-OCTOBRE 1515.

 

Les Suisses rustres, montagnards, s'étaient entêtés à attendre, les yeux fixés sur les pics des Alpes, l'arrivée des Français par le val de Suse. Inquiets, turbulents sous leur capitaine, un seul mobile les faisait agir pour une cause : c'était l'argent ; ils en manquaient un peu depuis deux mois ; Sforza leur en avait bien donné, mais à la fin toute escarcelle s'épuise, même celle du pape, et il avait un arriéré d'écus ; cela les mettait de mauvaise humeur. Quand ils apprirent donc que les Français avaient envahi par tous les côtés le Milanais, ils manifestèrent tout haut leur colère : quelques-uns s'arrachaient la barbe et accusaient leurs chefs de trahison. Les écus ne vendent pas ; ils s'étoient loués pour une solde, et ils n'avoient pas reçu la paye à la dernière montre. Ces montagnards, sous leur jaquette de bure, n'étaient déterminés par aucun sentiment d'honneur et de délicatesse chevaleresques, et quand ils étaient un peu pris de vin nouveau ils exhalaient leurs plaintes et murmures ; le capitaine Albert de La Pierre, qui commandait les Suisses de Berne, quitta l'armée avec tous ses soldats, parce qu'on ne lui donnait pas un millier d'écus arriérés. Quant aux autres Suisses, par belles et grandes promesses, on les entraîna vers Milan ; ces braves compères, dirigés par Sforza et le cardinal de Sion[1], Suisse comme eux d'origine, et que la politique de Jules II avait placé au milieu de ses compatriotes, gagnèrent les plaines en pressant leurs lances ; ils récitaient, en langue du pays, quelques chants fort méprisants pour les Français et sur la défaite de Novare, ils fuirent ouïs par Bayard, qui les suivait pas à pas pour les surveiller et en instruire le connétable de Bourbon, le chef Véritable de l'armée de France.

Depuis l'arrivée de François Ier dans le Milanais[2], les grandes affaires s'étaient développées par les négociations ; le roi alors, à son avènement, ne voulait pas se heurter à la fois contre le pape, l'empereur, le roi d'Espagne et les Médicis de Florence ; les Suisses eux-mêmes n'étaient-ils pas à ménager et c'était à regret qu'on avait été forcé de les combattre à Novare. Profitant de sa marche merveilleuse et de l'étonnement qu'elle avait jeté en Italie, le roi désirait arriver à son but par les négociations, c'est-à-dire se faire proclamer duc de Gênes et de Milan, sans combattre. Pour cela il fallait apaiser les Suisses, en leur donnant quelques centaines de marcs d'argent, reconquérir l'amitié du pape par un traité spécial ; enfin assurer une indemnité à Sforza que l'on dépouillait du Milanais. François Ier espérait obtenir tout cela par d'habiles démarches. Ses officiers, pleins d'un grand dévouement, offraient des sacrifices d'argent ; en France plus d'un digne bourgeois donna sa vaisselle plate pour en finir avec les Suisses. Tout paraissait convenu ; les montagnards avaient envoyé des députés à Galera pour stipuler définitivement les subsides : il était dur sans doute de leur payer 60.000 écus au soleil, mais enfin ils l'exigeaient[3]. Pendant toute une journée on chargea des mulets d'argent, car les bons compères attendaient tous réunis à Bufalora les sacs que le roi leur avait promis. Le bâtard de Savoie, le maréchal de Lautrec et une bonne troupe de lances devaient escorter ces cinquante mulets portant de royaux écus ; ils étaient en marche déjà, et les grelots se faisaient entendre, lorsqu'un message vint en toute hâte prévenir le bâtard de Savoie de ne pas pousser plus loin. A quelques lieues de là, un terrible choc s'engageait entre les armées.

Le roi avait placé ses tentes de guerre dans la grande plaine de Marignano, bonne position militaire qui commandait à la fois Milan, Pavie et Gênes ; à lui devaient se joindre les troupes vénitiennes que l'Alviane lui amenait et qui étaient groupées alors à Lodi, sous les bannières de la république. Marignano n'était pas d'abord un champ de bataille choisi par le roi, mais une simple position pour surveiller les mouvements de l'armée ; le connétable, si bon capitaine, avait prévu la possibilité d'une attaque soudaine, et il avait tracé son ordre de combats l'artillerie au centre, ensuite les rangs pressés des lansquenets, troupes sorties de l'Allemagne ; sur deux ailes, comme pour envelopper l'ennemi, la cavalerie qui avait à se venger des mauvais propos des Suisses sur la journée de Novare. Si ces rustres attaquaient les lansquenets, les chevaux de France se déploieraient sur leurs flancs en deux grandes envergures de fer. Tel était l'ordre du connétable. Le roi attendait les bonnes nouvelles de la paix, le merveilleux effet sur les Suisses ides mulets chargés d'argent ; et, certes, qui aurait pu croire à quelque noire trahison, à une rupture subite du traité ?

C'était le 13 septembre, par une belle journée d'automne, quand le vent des Alpes ne souffle point encore avec les pluies qui inondent la plaine. François Ier avait convié sous sa tente l'Alviane, le vieux général des troupes vénitiennes, venu en toute bâte de Lodi, où se trouvait son armée ; il lui expliquait le sens de la convention de Galera, lorsque des flots de poussière, s'élevant au loin, annoncèrent l'approche d'une grande armée. Le roi crut d'abord que c'était le corps de lances du chevalier Bayard ; mais l'œil exercé de l'Alviane distingua bientôt, à cette marche lourde et sûre, que c'étaient les Suisses des cantons allemands, dont on reconnut bientôt les bannières flottantes.

Que s'était-il donc passé parmi les confédérés pour les déterminer à surprendre l'armée de France en rompant la convention ? Quoi ! on avait traité à Galera, une trêve était convenue, et voilà qu'au mépris de tous ces engagements, les Suisses se précipitaient sur le champ de bataille, en se raillant de ce qui était promis. On savait bien les montagnards colères y rudes, mal appris, mais on leur croyait un peu de foi : ici les capitaines en avaient tout à fait manqué. Savez-vous quel était leur projet ? Parfaitement instruits du départ des mulets chargés d'argent, ils comptaient d'abord s'en emparer et surprendre ensuite le camp des Français en pleine sécurité à Marignane. Heureusement le bâtard de Savoie et Lautrec, instruits à temps, avaient donné contre-ordre pour le départ du convoi à Bufalora. Le connétable de Bourbon, toujours actif et éveillé, avait parfaitement prévu la possibilité d'une surprise des Suisses et l'ordre de bataille était donné. Quand on vit la poussière s'élever au loin, l'Alviane partit au galop de son cheval pour ramener l'armée de Venise sur le champ du combat ; la trompette se fit entendre sous la tente ; il y eut une sorte de joie dans toute cette chevalerie de France. Peu satisfaite du traité de Galera, depuis la défaite de Novare, elle avait bien des injures à laver, et une défaite humiliante pesait sur les blasons. Gomment n'aurait-elle pas saisi une si favorable circonstance ? Il était deux heures environ ; le soleil dardait en plein sur la vaste plaine ; il n'était pas possible de cacher un seul mouvement, et Ton vit aussitôt le projet des Suisses. Bonne infanterie, ils ne craignaient qu'une chose, le canon ; ils savaient que maître Genouillac, fort expert, avait au moins soixante-quatorze bonnes pièces[4] ; leur plan était donc de se jeter sur l'artillerie, d'enclouer rapidement les pièces ou de les tourner contre la chevalerie de France. Cette méthode de guerre qui se rattachait un peu aux souvenirs des insurrections montagnardes, dans les guerres des ducs de Bourgogne, leur avait toujours parfaitement réussi ; et ils comptaient bien sur un nouveau succès ; mais devant eux était le connétable, vigilant capitaine, instruit de cette manière trop souvent employée pour qu'on n'en gardât pas mémoire. Voilà pourquoi le connétable avait confié la protection de l'artillerie aux lansquenets, troupes allemandes au moins aussi solides que les montagnards ; presque tous recrutés dans le Gueldres, en Lorraine, en Wurtemberg, ces lansquenets étaient les soldats du sire de La Marck et de la maison de Lorraine : on les appelait les sangliers des Ardennes, et certes ils le méritaient bien ; nul n'avait de meilleures défenses. Les lansquenets, ennemis jurés des Suisses, jaloux de leur renommée, les recevraient dignement à la pointe de leurs piques ; et les rustres, une fois ainsi engagés, la chevalerie tombant sur eux les étoufferait sous le poitrail de ses chevaux. Tel était le plan de M. le connétable, fruit d'une longue expérience de guerre : au premier son de trompe chacun fut à son poste de bataille, à la face de cette troupe de Suisses s'avançant au grand pas de course, les lances pressées, les arquebuses au vent.

Le premier choc fut terrible ; la chevalerie, immobile sur les ailes, avait reçu l'ordre exprès du connétable de se contenir : n'était-ce pas toujours son impatience qui l'avait perdue ? Les lansquenets seuls reçurent et rendirent les coups. Ce choc fut si violent que les Allemands, irrésistiblement entraînés, découvrirent quelques pièces d'artillerie ; Genouillac, le grand maître, fut obligé de faire prendre les piques aux maîtres et ouvriers des canons. La reculade des lansquenets était, non-seulement la conséquence de l'intrépide ardeur des Suisses, mais encore la suite d'un faux bruit. On disait, parmi tous ces paysans, que les chevaliers étaient aises de les voir s'entr'égorger Suisses et Allemands, parce que le nombre des lansquenets en serait plus petit sous la tente. Le connétable vit donc la nécessité d'une grande charge de chevalerie, pour empêcher les Suisses d'enclouer les canons : il fallait les voir déjà, ces montagnards à cheval sur les affûts, le marteau en main pour fermer les bassinets et luminons. A un signal donné, les bandes noires qui entouraient le roi, soldats d'élite que Claude de Guise menait aux batailles, s'élancent à la défense des pièces pour faire honte aux lansquenets. En un clin d'œil ces pièces sont dégagées, et les lansquenets, en rangs pressés, reviennent à leur poste. Leur rage est telle, qu'ils enclouent sur les affûts ceux qui voulaient enclouer les pièces ; et à ce moment décisif la chevalerie elle-même se précipite dans la mêlée, la lance baissée comme dans un de ces grands combats de géants de l'époque carlovingienne.

Les Suisses, la meilleure infanterie de cette époque, sont à peine entamés, et pourtant les coups sont forts : savez-vous qu'il y a là parmi les gens d'armes le capitaine Bayard, Louis de la Trémoille, le prince de Talmont son jeune fils, et les vieux capitaines Chabannes, Ymbercourt, Teligny, Créquy. Quels rudes coups d'épée ne donnent-ils pas ? et cependant les Suisses immobiles les reçoivent à la pointe de leurs piques. Alors Genouillac conseille au roi de faire jouer la grosse artillerie ; les longues coulevrines s'agitent comme des serpents de bronze ; les charges de chevalerie se succèdent sur les carrés des Suisses, qui s'ouvrent et se referment avec une étonnante vivacité : on dirait de monstrueuses machines composées de mille bras et de mille têtes qu'un seul ressort fait mouvoir. Quand le canon tonne et retentit, le roi se bat comme un simple chevalier ; la nuit survient et l'on ne distingue plus amis ou ennemis sur le champ de bataille couvert d'ombre. On se heurte, on se rencontre ; le seul cri de reconnaissance pour les troupes du roi, c'est France ! Noble nationalité qui inspire de si glorieux exploits.

Nulle confusion ne peut se comparer à celle du champ de bataille ; la lune seule l'éclairait ; il y eut aux rayons de ce disque argenté une nouvelle prise d'armes ; il s'y fit des prodiges, et bien des chevaliers ne revirent jamais le jour. Enfin, comme dans l'Orlando de l'Arioste, un nuage obscurcit le disque scintillant de la lune ; on se reposa sous les armes sans que nul ne quittât son poste, comme s'il devait vivre et mourir là. Belle nuit d'armée, où l'on s'était tellement mêlé qu'on ne pouvait distinguer sa nation et son rang ! un groupe de gens d'armes se trouvait ici à côté d'une bande suisse ; de braves soldats montagnards campaient au milieu de cavaliers tellement bardés de fer, hommes et chevaux, qu'on aurait dit la muraille d'une forteresse. La place où se trouvait le roi, éclairée d'un seul flambeau qui jetait une couleur sinistre, était des plus périlleuses. A cinquante pas se trouvait la troupe d'élite des Suisses, et l'on voyait les piques briller comme des langues de feu. François Ier s'était fièrement comporté dans la journée ; depuis trois heures jusqu'à minuit, debout au fort de la mêlée, il avait brisé trois lances en éclats : chevaliers, écuyers, pages, tous étaient harassés ; le soir il demanda instamment à boire, et on lui porta une eau bourbeuse teinte de sang. A peine l'eut-il portée à ses lèvres brûlantes qu'il la rejeta avec horreur. On était si près des Suisses que le grand maître de Boisy fit éteindre le flambeau de poix qui, se reflétant sur le visage du roi, pouvait le faire reconnaître. François Ier, accablé de sommeil, se coucha tout armé sur l'affût d'une coulevrine, et l'on se groupa autour de lui pour attendre le jour[5].

Cette nouvelle journée de bataille fut terrible. A cinq heures, l'aurore poignait à peine que tous cherchèrent à se débrouiller dans cette confusion extrême ; chacun reprit son rang de combat ; on se reconnut, et le roi que nul n'avait aperçu depuis le soir, et qu'on croyait foulé aux pieds des chevaux, se montra aux acclamations de ses nobles compagnons d'armes. Les montagnards tenaces venaient alors de recommencer leur attaque furieuse contre l'artillerie ; les lansquenets surpris reculaient une fois encore devant une impétuosité si soudaine ; le roi ordonne aux bandes noires de M. de Guise d'appuyer les lansquenets ; les Suisses paraissent si terribles, si fièrement engagés, que cette brave cavalerie recule aussi. On fait donner le corps de réserve des dix mille Gascons et Navarrais ; seuls ils viennent enfin à bout d'épuiser l'ardeur des Suis, ses. Alors, profitant d'un peu d'hésitation, le grand maître de l'artillerie Genouillac ordonne de redoubler le feu et de placer les grosses coulevrines de manière à prendre par enfilade les rangs pressés de l'ennemi. On voyoit tomber ces hommes pesants sous les boulets comme les quilles dans un grand jeu, dit le roi en récitant cette bataille ; ces grosses masses de chair semblaient à peine s'en émouvoir. Dans ce carnage affreux les Suisses tentèrent un mouvement habile ; tandis que les corps des batailles soutenaient tout le choc de l'artillerie et de la chevalerie, dix mille des plus braves se détachèrent pour se porter sur l'arrière-garde des Français.

Le connétable de Bourbon avait tout prévu : Maugiron et Cossé, deux noms qui devaient se trouver en face dans la Ligue, attendaient bravement les Suisses, à la tête de leur compagnie d'arbalétriers à cheval[6] ; ils les chargèrent sur les flancs avec intrépidité jusqu'à ce que l'artillerie fît dans leur rang une large et profonde trouée. Ce dernier et glorieux effort finit la bataille. On vit alors, spectacle magnifique ! ces montagnards se regrouper en ordre comme s'il n'y avait pas eu de combat et sonner le clairon de retraite en quittant le champ de carnage, car à ce moment arrivaient les Vénitiens conduits par leur vieux général l'Alviane. Dalmates et Esclavons avaient fait dix lieues depuis la veille ; campés à Lodi, ils s'étaient précipités au pas de course pour courir à Marignane à temps encore ; l'Alviane, qui avait assisté au premier déploiement des compagnies suisses, arrivait pour voir s'accomplir leur entière défaite[7]. Dans sa route, inquiet sur les destinées de François Ier, il avait rencontré bien des fuyards annonçant la victoire des Suisses et la ruine entière des Français ; dissimulant ses craintes, il avait raillé ces poltrons pour ne pas décourager ses soldats, et il vint assez à temps pour attaquer impétueusement l'arrière-garde des Suisses, qui accueillirent les Italiens, les Dalmates, les Esclavons de la république avec leur fermeté habituelle. Le brave l'Alviane s'était tant fatigué dans cette marche rapide, lui vieillard de soixante-dix ans, qu'il s'alita et mourut presque le jour de la victoire, fier d'avoir contribué à ce succès du roi de France.

La journée de Marignano fut une belle représaille de chevalerie contre l'infanterie suisse qui l'avait vaincue à Novare ; il fallait rétablir la réputation des gens d'armes et ôter aux montagnards l'orgueil insensé de se proclamer invincibles. Nul ne pouvait nier le courage des gentilshommes de France ni leur noble dévouement ; mais plus d'une fois l'absence complète de discipline et leur courage désordonné nuisirent à la victoire, comme on l'avait vu à Poitiers, à Azincourt. En Italie, leur défaite récente, à Novare, tenait encore à cette impétuosité ; à ce glorieux pêle-mêle, même sous les Bayard, la Trémoille et la Palice, si nobles paladins. En commençant une nouvelle expédition à travers les Alpes, le connétable de Bourbon, la haute tête militaire, réfléchit sur les causes qui avaient amené les malheurs de la dernière guerre. Les armées de France n'avaient pas jusqu'alors de bonne infanterie ; les rois, accoutumés à soudoyer les Suisses depuis Louis XI, les avaient constitués la force de leur corps de bataille. De sorte que, lorsque ces bons compères vinrent à leur manquer, leur absence fit un immense vide dans les armées ; on dut les remplacer, et nul gentilhomme ne voulait servir à pied (leur vie se liait à celle de leur cheval, noble compagnon de leurs prouesses). Il fallut donc négocier en Allemagne, payer des reîtres et des lansquenets, forte infanterie de corps de bataille : pouvait-on compter comme telle quelques paysans mal armés du Poitou, Saintonge ou Normandie ? Rarement ils témoignaient cette haute fierté du cœur qui sait affronter un danger ; ils fuyaient à toutes jambes, abandonnant leur rang quand la bataille devenait un peu chaude. Le premier soin de François Ier, en commençant cette campagne, fut donc de négocier avec le comte de La Marck, le duc de Gueldres, pour recruter cette ferme infanterie de Germanie, haineuse et jalouse contre les Suisses ; il y joignit les archers de Gascogne que le roi de Navarre amena en Italie, et parmi eux existaient des traditions de victoire ; ils disaient que grâce à eux seulement, et non aux Anglais, le Prince Noir avait gagné ses meilleures batailles. D'après le conseil de l'Alviane et des Vénitiens, le roi augmenta considérablement son artillerie tant redoutée des Suisses ; la chevalerie, comme tout corps pénétré de sa valeur personnelle, méprisait profondément ce moyen mécanique d'obtenir la victoire presque sans péril ; l'Arioste, l'expression des dernières grandeurs de la chevalerie et des sentiments du moyen âge, avait jeté ses imprécations contre larme meurtrière qui brisait les vieilles armures et les plus héroïques poitrines, sans que la valeur pût témoigner de son héroïsme : noble préjugé, cause de bien des fautes et des ruines, plus encore que des fautes ! Dans cette nouvelle campagne les chevaliers durent céder quelque chose de leur répugnance ; les grosses coulevrines parurent dans leurs rangs par masse, et maître Genouillac, à la bataille de Marignane, fut toujours à ses soixante-quatorze pièces longues et effilées qui jetaient tourtes des boulets de pierre à plus de mille toises.

Ce feu formidable de l'artillerie n'empêcha pas néanmoins les actes de valeur personnelle et inhérente à l'honneur de la chevalerie ; le roi François Ier, y montra un impétueux courage ; son cheval reçut deux coups de pique, et la pauvre bête, fière de porter le roi, n'en baissa pas le col. François Ier durant la bataille, était revêtu d'une de ces armures impénétrables, et magnifique de ciselure, telle que l'art les avait perfectionnées au XVe siècle, comme on les voit aux miniatures des tournois du roi René ; la lance, la pique, la dague, venaient s'émousser sur ces écailles d'acier, et, depuis l'invention de la poudre, on avait placé entre les bandes de fer des peaux épaisses destinées à amortir les coups de balle. Sur la tête, le roi portait un casque brillant surmonté d'un beau panache qui tombait jusqu'aux épaules ; la face était couverte d'un treillage de fer épais et doublé au-dessous même de la visière ; la poitrine préservée par la cuirasse brillait éclatante, et les artistes y ciselaient mille figures bizarres et le blason même du chevalier ; ses bras étaient préservés par des brassards, ses cuisses par des cuissards de fer à ressorts, laissant la liberté des mouvements, et ses pieds portaient de longs éperons armés encore pour le combat. Ces impénétrables armures donnaient peu de prise aux coups, et il fallait désarçonner un chevalier pour lui faire rendre l'épée. Dans la journée de Marignane y le roi reçut de fortes contusions ; mais sa bonne armure (le luxe, la gloire du chevalier) ne put être percée. François Ier n'avait point déguisé son blason pour détourner les coups de sa tête ; son écuyer portait à ses côtés le gonfanon de France, et lui avait semé sa cotte d'armes d'azur, de fleurs de lis d'or, et un magnifique rond d'escarboucles en forme de salamandre rayonnait sur son casque. A plusieurs reprises, il se précipita avec une sorte de coquetterie glorieuse sur les compagnies les plus épaisses et les plus hardies. Si bien qu'après la bataille gagnée, le roi manda les prud'hommes et les plus anciens parmi ses gens d'armes, requérant à tous de lui dire s'il avait mérité l'ordène (l'ordre) de chevalerie. Toute cette génération, alors dans la ferveur des idées chevaleresques, maintenait la foi du moyen âge, et la chevalerie, sa plus rayonnante expression, avait survécu comme le dernier reflet de cette époque de croyance. Au temps des tournois, des passés d'armes, décrits et dessinés par le roi René en son beau livre, nul ne pouvait briller aux nobles cours des dames s'il n'avait sur son front l'empreinte des grandes lois de la chevalerie. Or, le roi, avant de créer des chevaliers, appela messire Bayard, si lui dit : Bayard, mon ami, je veux que aujourd'hui soiye fâict chevalier par vos mains pour ce que le chevalier qui a combattu à pied et à cheval en plusieurs batailles entre tous autres est tenu et réputé le plus digne chevalier. Or est ainsi de vous que avez eu plusieurs batailles et conquêtes vertueusement combattu contre plusieurs nations. Aux paroles du roy, respond Bayard : Sire, celui qui est roy d'un si noble royaume est chevalier sur tous autres chevaliers. — Si, dit le roy, Bayard, dépêchez-vous, il ne faut ici alléguer ne loix ne canons, soyent d'acier, cuivre ou de fer. Faite mon vouloir et commandement, si vous voulez estre du nombre de mes bons serviteurs et subjets. — Certes, répond Bayard, sire, si ce n'est assez d'une fois, puisqu'il vous plaist, je le ferai sans nombre, pour accomplir, moi indigne, votre vouloir et commandement. Alors preinct son épée, Bayard, et dict : Sire, autant vaille que si c'étoit Roland ou Olivier, Godefroy ou Baudouin son frère. Certes, vous êtes le premier prince que onques feis chevalier ; Dieu veuille que en guerre ne preniez la fuite. Et puis après, par manière de jeu, cria hautement l'espée en la main dextre : Tu es bien heureuse d'avoir aujourd'hui à un si vertueux et puissant roi donné Tordre de chevalerie. Certes, ma bonne espée, vous serez moult bien comme reliques gardée et sur toutes autres honorée. Et ne vous porteray jamais si ce n'est contre Turcs, Sarrazins ou Maures ; et puis feit deux saults, et après remet au fourreau son espée[8]. Beau récit, noble image des mœurs de ce temps ; magnifique témoignage de la valeur et d'une modestie mutuelle ! Le chevalier devait faire beaucoup et parler peu ; on faisait fi des hâbleurs y et Bayard était le modèle de cette noble école de chevalerie.

Encore haletant sur ce champ de victoire, François Ier se souvient de sa mère qu'il aime tant et qui l'a si hautement élevé ; à elle il rapporte toutes ses glorieuses actions ; il s'empresse de lui écrire le soir même du village de Marignano, et un page porta sa lettre à cette mère, inquiète alors, au château d'Amboise. Le roi, récitant d'abord à sa mère comment, attaqué par les Suisses à l'improviste, il a organisé les corps d'armée pour se défendre, dit tous les détails de la bataille, et on aime à les retrouver dans sa bouche même. J'étois à un trait d'arc en deux troupes de ma gendarmerie, et à mon dos mon frère d'Alençon avec le demeurant de son arrière-garde, et notre artillerie sur les avenues. Et au regard des Suisses, ils étoient en trois troupes, la première de dix mille, la seconde de huit mille hommes, et la tierce de dix mille hommes ; vous assurant qu'ils venoient pour châtier un prince s'il n'eût été bien accompagné ; car d'entrée de table qu'ils sentirent notre artillerie tirer, ils prendrent le pays couvert, ainsi que le soleil se commençoit à coucher ; de sorte que nous ne leur fîmes pas grand mal pour l'heure de notre artillerie, et vous assure qu'il n'est pas possible de venir en plus grande fureur ni plus ardemment : ils trouvèrent les gens de cheval de l'avant-garde par le côté ; et combien que lesdits hommes d'armes chargeassent bien et gaillardement, le connétable, le maréchal de Chabannes, Ymbercourt, Telligny, Pont de Remy et autres qui étoient là, si furent-ils reboutez sur leurs gens de pied, de sorte avec grande poussière, que l'on ne se pouvoit voir, aussi bien que la nuit venoit, il y eut quelque peu de désordre ; mais Dieu me fit la grâce de venir sur le côté de ceux qui les chassoient un peu chaudement, me sembla bon de les charger, et le furent de sorte, et vous promets ; Madame ; si bien accompagnés et quelque gentils galants qu'ils soient, deux cents hommes d'armes que nous étions, en défismes bien quatre mille Suisses, et les repoussâmes assez rudement, leur faisant jeter leurs piques et crier : France !

Ce nom de France était ainsi le cri de la nationalité, se déployant magnifique sous l'épée du roi. Bientôt la bataille recommence ; le roi raconte comment, aux premières ténèbres de la nuit, il se trompa sur le costume et les armes de ses adversaires, à ce point de prendre les Suisses pour les lansquenets. Toutefois, quand ce vint à crier France, je vous assure qu'ils nous jetèrent cinq à six cents piques au nez, nous montrant qu'ils n'étoient point nos amis. Nonobstant cela, si furent-ils chargés et remis au dedans de leurs tentes... La nuit nous départit, et même la paille pour recommencer au matin, et croyez. Madame, que nous avons été vingt-huit heures à cheval, l'armet à la tête, sans boire ni manger. Au moment où la bataille se décide, le roi seulement alors commence à se railler des Suisses. Messieurs les Suisses se sont jetés en leurs ordres, et délibérés d'essayer encore la fortune du combat, et comme ils marchoient hors de leur logis, leur fis dresser une douzaine de coups de canon qui prindrent au pied, de sorte que le grand trot retournèrent en leur logis y se mirent en deux bandes, et pour ce que leur logis étoit fort et que ne les pouvions chasser, ils me laissèrent à mon nez huit mille hommes, et toute leur artillerie, et les autres deux bandes les envoyèrent aux deux coins du camp, l'une à mon frère le connétable, et l'autre à mon frère d'Alençon. Avec sa modestie ordinaire, le roi avoue que l'arrivée des Vénitiens sous leur vieux chef l'Alviane a déterminé la victoire. Et à cette heure-là arriva Barthélemy Delvian avec la bande des Vénitiens, gens de cheval qui tous ensemble les taillèrent en pièces, et moi étois vis-à-vis les lansquenets de la grosse troupe qui bombardions l'un et l'autre, et étoit à qui se délogeroit, et avons tenu buté huit heures à toute l'artillerie des Suisses, que je vous assure qu'elle a fait baisser beaucoup de têtes[9].

Il faut maintenant rassurer une mère tremblante, lui dire quels sont les glorieux compagnons qu'il a perdus à ses côtés, et les nobles exploits qui ont signalé la grande journée. Et Dieu merci, tout fait bonne chère, je commencerai par moi et par mon frère le connétable, par M. de Vendôme, par M. de Saint-Pol, M. de Guise, le maréchal de Chabannes, le grand-maître, M. de Longueville. Il n'est mort de gens de renom qu'Ymbercourt et Bussy qui est à l'extrémité, et est grand dommage de ces deux personnages. Il est mort quelques gentilshommes de ma maison que vous saurez bien sans que vous le récrive. Le prince de Talmont est fort blessé, et vous veux encore assurer que mon frère le connétable et M. de Saint-Pol ont aussi bien rompu bois que gentilshommes de la compagnie quels qu'ils soient, et de ce j'en parle comme celui qui Ta vu, car ils ne s'épargnoient non plus que sangliers échauffés. Au demeurant, Madame, faites bien remercier Dieu par tout le royaume de la victoire qu'il lui a plu nous donner[10]. Madame, vous vous moquerez de Messieurs de Lautrec et de Lescun qui ne se sont pas trouvés à la bataille, et se sont amusés à l'appointement des Suisses qui se sont moqués d'eux ; nous faisons ici grand doute du comte do Sancerre, pour ce que ne le trouvons point.

Dans la grande histoire des rois et des peuples il n'existe pas un bulletin aussi modestement naïf sur une belle journée militaire ; c'est le roi qui récrit de sa main ; il l'adresse à une mère qui tremble pour son fils, et à peine le roi parle-t-il de lui-même, de ses nobles exploits dans la journée de Marignano, qui lui donne pourtant le Milanais et Gènes. Il y avait longtemps que les Français et les Suisses voulaient se donner une bonne estocade ; ils en cherchaient un prétexte, et les montagnards l'avaient fourni par leur avidité à gagner les écus chargés sur les mulets. Marignano fut pour eux une sévère leçon, et ils respectèrent davantage le gonfanon de France !

Cette journée, si on l'étudié avec quelque connaissance de l'art militaire, ressemble considérablement à une autre grande bataille qui, trois siècles plus tard, se donna presque sur le même champ d'honneur. La campagne de 1515, comme celle de i 800 qui se couronne à Marengo, commence par un admirable passage des Alpes à travers les rochers, les gorges et les précipices. L'artillerie est portée à dos de mulet ; la cavalerie mène ses chevaux par la bride, et l'on descend tout à coup dans la plaine, semblable à un torrent débordé. Un corps d'armée est à Gênes, comme en 1800 celui de Masséna ; et il s'agit de faire sa jonction pour le délivrer. Tout à coup les Autrichiens apparaissent et surprennent Bonaparte à Marengo, comme les Suisses François Ier à Marignane. Le premier choc est terrible, la bataille est douteuse jusqu'à l'arrivée de Desaix qui, ainsi que l'Alviane, accourt pour achever la défaite. Ainsi, dans la marche du temps, les choses ressemblent à elles-mêmes, le cours des âges ne les change pas. Il ne faut pas être trop orgueilleux de son temps, mais de la France entière et de son histoire. Il y a dans tous les siècles un merveilleux enchaînement de gloire qui ne tient pas à une seule époque, mais à toutes. La bataille de Marignano donna le Milanais à François Ier ; les Suisses vaincus, il n'y avait plus de puissance forte et redoutable. Le roi fit son entrée solennelle à Milan[11], comme Louis XII, revêtu de son manteau ducal ; le château qui résistait encore s'abaissa devant le gonfanon de France.

Quand la victoire vient à une armée, il est rare qu'elle ne trouve pas des alliés. Avant la bataille de Marignano, quand les Suisses marchaient en bon ordre contre François Ier, toute l'Italie était douteuse. Les armées de Maximilien étaient prêtes à s'ébranler, et les bandes espagnoles se déployaient jusqu'à Parme. Les Médicis de Florence, le pape Léon X, manifestaient hautement leur méfiance contre l'expédition des Français dans le Milanais ; au cas même d'une défaite, ils se seraient déclarés leurs ennemis. Tout change après Marignane ; le succès a grandi la popularité de François Ier en Italie ; on ne défend plus Maximilien Sforza ; vaincu, il a mérité son sort ; c'est la fatalité du malheur. François Ier, brillant, généreux à Milan, visita la Monza, la vieille basilique de Saint-Ambroise, et il vida son trésor pour contribuer à l'œuvre si nationale du dôme avec ses marbres et ses statues. Populaire dans le Milanais, le roi hâta vivement un traité ou concordat avec Léon X, la haute tête de la politique italienne.

 

 

 



[1] Mathieu Schinner, né en Suisse en 1470, connu sous le nom de cardinal de Sion, fut élevé à l'épiscopat en 1500, et créé cardinal par le pape Jules II, avec le titre de légat et lieutenant général dans la Lombardie.

[2] Lettre de la main de François Ier à madame d'Angoulême, — Bib. du roy. Mss. de Béthune, n° 8546, fol. 2.

Madame, sans qui me gardera de vous faire plus longue lettre, sera que je monte aseteure a cheval pour la grant trete qu'avouns à faire pour par fere le demourant de la journée, vous aseurant que nous sommes dedans le plus estrange peys ou james feut homme de sele coupagnye ; mes demayn espère d'estre an la plene de Pyemont avesques la bande que je mené qu'y nous sera grant plesyr, car il nous fâche fort de porter les armes parmy ses montaygnes pour se que la plus part du tanps nous fout estre à pyé et mener nos chevox par la bryde, de quoy le grant mestre est bien mary, et croy quy yeu sans que voyons seroyt impossible de croyre de mener gens de seval et grosse artillerye come fesons et croyez madame que se n'est sans pêne, car sy ne feuse aryvé noustre artillerye grouse feust demeurée ; mes Dieu mercy, je l'ammene aveque moy ou byen toust après je ne vous mande ryen de la fete qu'a fete le maréchal de Chabanes et de la pryse de Prospère Goulonae ny osy du lievement du syege de Silles, remettant tout seur le grant mestre vous avysant que fesons bon guet, quar ne sommes quasynz ou sy lyeus petytes des souyses et seur se poynt vous va dire bonsoyr.

Votre très humble et très obeysant filz, Françoys.

[3] La convention de Galera fut conclue le 8 septembre 1515. — Guicciard., lib. XII. Belcar., lib. XV, n° 13. Voyez sur la bataille de Marignan, outre ces deux historiens, Paul Jove, liv. XV, et du Bellay, liv. Ier.

[4] Mais vous pouvez croire que l'artillerie du roy qui estoit de soixante-et-quatorze grosses pièces leur faisoit ung merveilleux déplaisir. V° Fleuranges. Cy devise de la journée faite à Sainte, Brigide, près de Marignan, laquelle les Français gagnèrent contre les Suisses, par un jour de Sainte-Croix, en septembre.

[5] Voyez le récit du jeune Adventureux sur cette bataille où lui-même joue un grand rôle. Mém. de Fleuranges.

[6] L'arc, l'arbalète et les flèches étaient encore en usage ; ces deux compagnies d'arbalétriers firent des merveilles ; c'étaient tous des Gascons, et Brantôme parle encore de ces arbalétriers gascons à cheval de son temps.

[7] Mém. de Fleuranges. C'est un dernier trait de ressemblance avec la bataille de Marengo.

[8] Symphorien Champier, Vie du capitaine Bayard, gentilhomme du Dauphiné, Paris, 1525, in-4° ; 1526, in-8° et Lyon, 1528, in-4°, goth.

[9] Cette lettre de François Ier est dans la précieuse collection des Mss. de Béthune, Bibl. Royale.

[10] Louise de Savoie est tout heureuse de cette bonne nouvelle de la bataille de Marignano. En voici une preuve (autographe).

Lettre de Louise d'Angoulême à M. de Lafayette. — (Bibl. du roi, Mss. de Béthune, n° 8470.

Monsieur de la Fayette, j'envoye par ceste poste ung pacquet de lettres à monsieur le président Bapaume, ambassadeur du roy en Angleterre qui est pour les affaires dud. seigneur, je vous prit que incontinent vous le luy envoyez par ung de vos gens en la meilleure dilligence que vous pourrez et au regard de la dépense que il fera led. voyage et semblablement pour les autres que aves faits en semblable par mon ordonnance, je vous en ferais rembourser sans point de faulte.

Au demeurant, touchant les nouvelles de delà les Monts, les affaires du roy ne peuvent mieux porter qu'elles font, il a depuis en ses mains et obéissance les chasteaux de Millan, de Cremonne, et autres places du duché, ensemble la personne de Maximilien Sforce qu'il envoyé en France ; et a fait le d. seigneur son entrée en armes en la ville de Millan. Il n'y a antre pour le présent sinon que je prie Dieu qu'il vous donne ce que vous desirez. Escript à Amboise le XVe jour d'octobre. Loyse.

[11] Comment, après que le chasteau de Milan feust rendu, et que le More feust en France, le roy fist son entrée à Milan tout en armes, la plus belle que feust jamais, et des belles joustes et tournois qui y furent faictes, Ve. Chroniq. du jeune Adventureux. Fleuranges a confondu ici le More (Ludovic Sforza), mort en 1510 prisonnier de Louis XII avec son fils Maximilien, qui avait recouvré le Milanais en 1512. Par la capitulation du château de Milan (5 octobre 1515), Maximilien céda ce duché à François Ier en échange d'une pension de 30.000 ducats d'or. Conduit en France, il y mourut quinze ans après.