HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

LIVRE QUATORZIÈME

 

CHAPITRE V. — INSURRECTION DE LA FAIM

 

 

Le peuple des faubourgs en mouvement. — Altitude des montagnards. — Invasion de l'Assemblée. — Aspect de l'Assemblée envahie. — Politique artificieuse des Comités. — Le cri des femmes. — Comment Féraud fut tué. — La tête de Féraud présentée à Boissy-d'Anglas. — Ce que réclame le peuple. — Essai pour organiser le mouvement. — Décrets votés dans le tumulte. — Répugnance des Parisiens à se désheurer. — La foule s'écoule insensiblement. — Les bataillons des sections occupent l'enceinte de l'Assemblée. — L'inaction des Montagnards, cause de leur perte. — Déchainement de la majorité. — Séance du 2 prairial ; les proscripteurs et les proscrits. — Décrets du 2 prairial. — Proclamation de la Convention. — Essai infructueux pour organiser la Commune. — Licenciement de la gendarmerie. — L'insurrection recommence. — Aspect de Paris le 2 prairial. — Les insurgés sur la place du Carrousel. — Négociations astucieuses. — Le peuple des faubourgs, trompé ; se retire. — Paris le 3 prairial. — Delmas, Gillet et Aubry nommés directeurs de la force armée. — Joachim Murat. — Tinel arraché à l'exécuteur. — La jeunesse dorée s'engage dans le faubourg Saint-Antoine ; le peuple lui fait grâce. — Invasion du faubourg Saint-Antoine par les troupes. — Barras et Tallien parlent de bombarder le faubourg. — Le général Menou. — Capitulation du faubourg Saint-Antoine. — Arrestation de Delorme.

 

Le 1er prairial (20 mai)[1], une grande agitation se manifesta, de bonne heure, dans les faubourgs. Les rumeurs de la ville s'étaient changées en menaces. Des groupes se formaient çà et là. Femmes et enfants, des clochettes à la main, couraient de porte en porte, invitant les citoyens à se réunir[2]. On parlait d'aller à la Convention, de lui demander du pain ; on se répandait en murmures sur ce que les ennemis de Robespierre ne l'avaient tué que pour affamer le peuple[3] ; on se passait de main en main le dernier numéro du journal de Babœuf[4] ; le tocsin, sonné dans les faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marceau, y éveillait mille échos lugubres ; quelques hommes audacieux se rassemblaient à l'Hôtel de Ville, brusquement envahi, et y constituaient un Comité insurrectionnel[5]. Bientôt on lut sur tous les murs de la capitale un manifeste portant pour exergue ces mots :

RESPECT AUX PROPRIÉTÉS ![6]

C'était un résumé énergique de tous les griefs du peuple contre les Thermidoriens et comme le programme de l'insurrection. En voici le texte :

INSURRECTION DU PEUPLE POUR OBTENIR DU PAIN ET RECONQUÉRIR SES DROITS[7].

Le Peuple, considérant que le Gouvernement le fait mourir inhumainement de faim ; que les promesses qu'il ne cesse de répéter sont trompeuses et mensongères ;

Considérant que chaque citoyen se trouve réduit à envier le sort infortuné de ceux que la famine entasse journellement dans les tombeaux ;

Considérant que le Peuple se rend coupable envers lui-même, envers la génération future, s'il ne se hâte d'assurer sa subsistance et de ressaisir ses droits ;

Considérant que le Gouvernement est usurpateur, injuste et tyrannique, quand il fait arrêter arbitrairement, transférer de cachots en cachots, de communes en communes, et massacrer dans les prisons ceux qui ont assez de courage et de vertu pour réclamer du pain et les droits communs ;

Considérant qu'un Gouvernement usurpateur et tyrannique ne fonde ses espérances criminelles et sa force que sur la faiblesse, l'ignorance et la misère du Peuple ;

Considérant qu'un Gouvernement aussi atroce ne peut subsister qu'autant qu'on a la faiblesse de le craindre et de lui obéir ;

Considérant que la cavalerie que le Gouvernement a tirée de nos armées, pour les affaiblir, n'a pas voulu prêter serment de fidélité à la tyrannie, mais au Peuple, qu'elle a juré de défendre ;

Considérant que les républicains des départements et des armées ont les yeux fixés sur Paris, qui deviendrait devant eux responsable de tout retard ;

Considérant que l'insurrection est pour tout un peuple et pour chaque portion d'un peuple opprimé le plus sacré des droits, le plus indispensable des devoirs, un besoin de première nécessité ;

Considérant qu'il appartient à la portion du peuple la plus voisine des oppresseurs de les rappeler à leurs devoirs, en ce que par sa position elle connaît mieux la source du mal ;

Le Peuple arrête ce qui suit :

ARTICLE PREMIER. Aujourd'hui, sans plus tarder, les citoyens et les citoyennes de Paris se porteront en masse à la Convention nationale pour lui demander :

1° Du pain ;

2° L'abolition du gouvernement révolutionnaire, dont chaque faction abusa tour à tour pour ruiner, pour affamer et pour asservir le Peuple ;

3° Pour demander à la Convention nationale la proclamation et l'établissement, sur-le-champ, de la Constitution démocratique de 1793.

4° La destitution du Gouvernement actuel, son remplacement instantané par d'autres membres pris dans le sein de la Convention nationale, et l'arrestation de chacun des membres qui composent les Comités actuels du Gouvernement, comme coupables de crime de lèse-nation et de tyrannie envers le Peuple ;

5° La mise en liberté à l'instant des citoyens détenus pour avoir demandé du pain et émis leur opinion avec franchise ;

6° La convocation des Assemblées primaires au 25 prairial prochain, pour le renouvellement de toutes les autorités, qui, jusqu'à cette époque, seront tenues de se comporter et d'agir constitutionnellement ;

7° La convocation de l'Assemblée nationale législative, qui remplacera la Convention, pour le 25 messidor prochain.

ART. 2. Pour l'exécution du précédent article et des suivants, il sera conservé, envers la représentation nationale, le respect dû à la majesté du Peuple français. Il sera pris les mesures nécessaires pour que la malveillance ne puisse enlever, outrager, ni engager dans de fausses démarches les représentants du Peuple. En conséquence, les barrières seront à l'instant fermées à cet effet.

Les personnes et les propriétés sont mises sous la sauvegarde du Peuple.

ART. 3. Ceux des représentants qui se trouveraient entraînés hors de leur poste, soit en costume, ou de toute autre manière, seront sur-le-champ remis au sein de l'Assemblée, et mis sous la sauvegarde du Peuple.

ART. 4. Le Peuple s'emparera des barrières, de la rivière, du télégraphe, du canon d'alarme, des cloches destinées pour le tocsin et des tambours de la garde nationale, afin qu'il n'en puisse être fait aucun usage.

Des citoyens chargés de l'approvisionnement de Paris auront seuls la permission de sortir de Paris et d'y entrer tant que durera l'insurrection. Les certificats leur seront délivrés par un Comité formé d'un commissaire, nommé par chaque section. Ce Comité sera responsable des certificats qu'il expédiera.

Tout approvisionnement externe se fera reconnaître aux barrières, en entrant et en sortant.

Les courriers entreront, mais ils ne sortiront point jusqu'à nouvel ordre.

ART. 5. Les canonniers, la gendarmerie, les troupes à pied et à cheval qui sont dans Paris et aux environs, sont invités de se ranger sous les drapeaux du Peuple, et à s'unir avec lui par les liens de la fraternité, pour reconquérir les droits communs.

ART. 6. Tout agent du Gouvernement, tout fonctionnaire civil ou militaire, tout particulier qui tenteraient de s'opposer aux mesures indiquées dans le présent arrêté, seront regardés comme ennemis du Peuple et punis comme tels.

Tout pouvoir non émané du Peuple est suspendu. Tout agent ou fonctionnaire du Gouvernement qui n'abdiquera pas sur-le-champ ses fonctions sera considéré comme participant à la tyrannie, et puni comme tyran.

ART. 7. Quiconque proposerait de marcher contre le Peuple, de l'outrager d'une manière quelconque, soit en masse, soit dans un seul de ses membres, sera regardé comme ennemi de la liberté, et traité comme tel.

ART. 8. Les citoyens et les citoyennes de toutes les sections indistinctement partiront de tout point dans un désordre fraternel, et sans attendre le mouvement des sections voisines, qu'elles feront marcher avec elles, afin que le Gouvernement astucieux et perfide ne puisse plus emmuseler le Peuple comme à son ordinaire, et le faire conduire, comme un troupeau, par des chefs qui lui sont vendus, et qui nous trompent.

ART. 9. Le Peuple ne se rassoira point qu'il n'ait assuré la subsistance, le bonheur, le repos et la liberté de tous les Français.

ART. 10. Le mot de ralliement du Peuple est : Du pain et la Constitution démocratique de 1793.

Quiconque, durant l'insurrection, ne portera point ce mot de ralliement écrit à la craie sur son chapeau, sera regardé comme affameur public, et comme ennemi de la liberté.

Tout drapeau, guidon ou enseigne qui paraîtra, devra porter également le même mot de ralliement.

Tout autre signe ou point de ralliement est absolument défendu et proscrit.

ART. 11. Il sera fait une adresse à nos frères des départements et des armées, pour les instruire des motifs et du succès de la révolution, ainsi que des moyens pris pour assurer le bonheur national.

NOTA. On ne doute point que le Gouvernement n'essaye d'empêcher l'effet des mesures ci-dessus ; mais il ne le pourra pas. Il ne viendra point à bout d'arrêter l'indignation du Peuple et son juste châtiment, quand même il ferait sortir de ses magasins les subsistances qu'il y tient renfermées, et qu'il réserve pour ses infâmes projets.

 

Il était onze heures lorsque la Convention entra en séance. Les forces destinées à la protéger n'étaient pas encore réunies, quoique le Comité de sûreté générale eût fait battre le rappel dès huit heures du matin[8]. Ysabeau, très-ému, paraît à la Tribune et y lit le plan d'insurrection.

Cette lecture est accueillie, dans les tribunes, par des applaudissements passionnés. L'Assemblée garde un profond silence. La Convention saura mourir à son poste ! s'écrie un membre en se levant ; ses collègues l'imitent, et répètent le même serment, la main étendue. Au milieu des applaudissements, contraires aux premiers, que cette scène provoque, Clauzel, découvrant sa poitrine, apostrophe en ces termes le peuple des tribunes : Ceux qui nous remplaceront en marchant sur nos cadavres ne travailleront pas avec plus de zèle au salut du peuple ; et, par une contradiction qui révèle le trouble de son cœur, il ajoute : Les chefs du mouvement seront punis, et le soleil ne se couchera pas sur leurs forfaits 2[9]. Les paroles incohérentes se croisent. Rovère assure que le mouvement a été organisé dans la Convention même. Bourdon (de l'Oise) l'attribue à la rage des royalistes[10]. André Dumont exprime le vœu que le riche secoure le pauvre, que le pauvre défende le riche ; l'union alors régnera ; et l'on applaudit[11] à ces effusions banales d'une sensibilité suspecte. Un décret par lequel la Convention met les chefs d'attroupement hors la loi et se déclare en permanence est adopté sur la proposition de Laporte, au bruit des rires ironiques qui partent des tribunes[12].

En ce moment, une députation de la section de Bon-Conseil est admise à la barre, et présente à l'Assemblée un tableau déchirant des maux qui accablent le peuple. Pour toute réponse, Mathieu propose et la Convention adopte une proclamation où l'on recommande le calme à la souffrance et la résignation à la faim[13].

Des coups redoublés, annonçant que la porte de la salle allait être enfoncée, vinrent avertir l'Assemblée que les affamés étaient là. Les ais crient, la maçonnerie tombe, les tribunes poussent des exclamations de triomphe, et la salle retentit de cet appel lugubre des femmes : Du pain ! du pain ! du pain !

Au dehors, la multitude s'entassait en grondant. André Dumont, qui a remplacé Vernier au fauteuil, aperçoit à la barre un général de brigade ; il le nomme aussitôt commandant provisoire de la force armée, et lui enjoint de faire respecter la Convention. Accompagné de quatre fusiliers et de deux jeunes gens armés de fouets de poste, le général monte précipitamment dans la grande tribune de gauche, d'où il fait sortir les femmes qui la remplissent. Mais, au même instant, la porte de la salle du côté du salon de la Liberté cède au flot des envahisseurs, vole en éclats ; et, tandis que les députés se retirent sur les hauts bancs ; tandis que, pour les défendre, la gendarmerie se forme en hâte dans le bas de la salle, le parquet se couvre d'une foule d'hommes armés de mauvais fusils, de couteaux, de sabres rouillés, se ruant pêle-mêle dans l'enceinte avec des milliers de femmes en guenilles, au visage pâle, à l'œil hagard[14]...

Et toujours le cri fatidique, le terrible cri, le cri de germinal : Du pain ! du pain ! du pain ![15]

On apercevait à leur poste, calmes et silencieux, les quelques hommes qui, dans l'Assemblée, représentaient encore l'ancienne Montagne[16]. Qu'ils eussent la main dans ce mouvement populaire, c'est ce que rien ne prouve, ou même n'indique, au moins en ce qui concerne Romme, Duquesnoy, Duroy et Soubrany, qui cependant allaient périr dans la défaite du peuple soulevé. Mais que ces hommes, dont le cœur était vraiment républicain et dont la mort fut sublime, sympathisassent avec les douleurs dont le 1er prairial fut l'explosion spontanée ; mais que leur âme embrassât comme une dernière espérance l'idée de voir, à la suite de ces désordres déplorables, la Révolution sortir de ses ruines, c'est ce que la logique de leur situation rend vraisemblable : situation terrible, qui ne les laissait libres de prendre aucun parti décisif, et les condamnait à une hésitation poignante, poignante surtout pour des natures aussi fortement trempées !

Des citoyens armés, appartenant à la section de la Fontaine, étaient entrés par la barre, presque immédiatement après l'invasion de la salle par la multitude : ils courent la repousser ; une mêlée s'engage, très-vive quoique non sanglante ; les femmes s'enfuient, les hommes se retirent, et l'avantage reste un moment aux défenseurs de la Convention. Mais leurs adversaires ne tardent pas à se faire jour de nouveau dans l'enceinte, par la porte qu'ils ont brisée ; les conventionnels cèdent à leur tour ; puis, ramenés par le député Auguis, qui s'est mis à leur tête le sabre à la main, ils sont une seconde fois vainqueurs. Le président s'était couvert. Après un effroyable tumulte, il y eut un intervalle de silence presque plus émouvant que le tumulte même.

Quelques-uns des envahisseurs avaient été arrêtés. Un d'eux, qui s'était fait saisir des premiers et qui était évidemment un espion des Comités[17], fut fouillé aussitôt, et se trouva avoir à point nommé un morceau de pain dans sa poche. Et les Thermidoriens de se prévaloir de cet indigne artifice pour répandre que la disette n'était pas la cause du mouvement, puisque le peuple avait du pain dans ses poches, et que tout le mal venait des manœuvres de l'Angleterre[18] !

Il était deux heures, lorsqu'un homme parut, qui semblait chercher refuge dans l'Assemblée. C'était le député Féraud. Il était pâle ; ses vêtements étaient en lambeaux ; il tomba évanoui. On entendait le bruit de la générale et du pas de charges[19]. Pendant que l'Assemblée confiait à Delmas la direction de la force armée, et que Dussaulx signalait à la reconnaissance de la. Convention l'attitude décidée des ambassadeurs étrangers, dont aucun n'avait quitté sa place, les cris : Aux armes ! aux armes ! retentirent dans le salon de la Liberté. Un fort détachement de la garde traverse la salle pour se rendre au lieu du tumulte. Nouvelle mêlée. Des coups de fusil sont tirés, mais n'atteignent personne. Un homme portait écrits sur son chapeau avec de la craie ces mots : Du pain et la Constitution de 93 ! Dubois-Crancé l'arrête, et on l'entraîne hors de la salle. Mais la foule, qui grossit de minute en minute, force l'entrée une fois encore, et passe sur le corps à Féraud, qui, revenu de son évanouissement, s'est jeté en travers de la porte, dans un élan d'intrépide désespoir. La salle est alors complètement envahie. Du pain et la Constitution de 1793 ! telle est l'inscription qu'on lit sur les chapeaux d'un grand nombre. Un jeune homme, nommé Mailly, pour avoir voulu arracher son chapeau à un des envahisseurs, courut risque de la vie : on lui tire un coup de fusil, et il tombe sur les marches de la Tribune. Près de lui, Féraud se frappait la tête et s'arrachait les cheveux[20].

C'est en ce moment qu'eut lieu l'affreuse tragédie qui devait déteindre à jamais sur les souvenirs de cette journée. Beaulieu, qui était présent, la raconte ainsi : Les factieux couchent en joue le président Boissy-d'Anglas, qui reste immobile et montre la plus imperturbable fermeté. Féraud veut escalader la Tribune, et le couvrir de son corps ; un officier l'aide à monter, un des factieux le retient par son habit, est repoussé par un officier qui lui assène un coup de poing, et riposte par un coup de pistolet qui atteint le malheureux Féraud[21].

Cette version, conforme d'ailleurs à celle du Moniteur, montre assez combien fut accidentelle la circonstance qui amena la mort de Féraud. Mais ce qui n'eut rien d'accidentel et dénotait un parti pris de férocité de la part de quelques misérables, c'est que, le corps sanglant ayant été traîné dans un couloir voisin, on coupa la tête, qui ne tarda pas à être promenée au bout d'une pique. Il paraît certain que l'acharnement barbare déployé contre Féraud eut sa source dans une erreur de nom- : Féraud fut pris pour Fréron, l'inspirateur odieux des excès de la Jeunesse dorée, celui qui avait fait de son journal, autrefois consacré à la propagande du Terrorisme, une espèce de cor sauvage qui, chaque matin, sonnait la chasse au peuple. Cette explication, au surplus, n'ôte rien à l'horreur d'un pareil épisode. Mais autorisait-il les Thermidoriens à prétendre, comme ils le firent, que les insurgés n'étaient qu'un ramas d'assassins ? Thibaudeau, dans son récit du 1er prairial, parle des hommes ivres de vin, ivres de fureur, et des femmes altérées de sang, qui parcouraient la salle[22]. Et lui-même, deux pages plus loin, il écrit : C'est une chose remarquable que, dans ce tumulte du 1er prairial, qui dura douze heures, il n'y eut de sacrifié que l'infortuné Féraud[23].

Cependant le tocsin sonnait au pavillon de l'Unité. Au dehors, la cour et le jardin du Palais-National étaient remplis de gardes nationales, encombrés de pièces de canon. Au dedans, tout n'était que clameurs confuses, rires amers, menaces, roulements de tambour. Un canonnier, placé à la Tribune et entouré de fusiliers, avait commencé la lecture du plan d'insurrection, au milieu d'un bruit effroyable. Vainement Rühl, monté sur son banc, essaye-t-il sur cette foule en délire le pouvoir de sa parole ; vainement Duroy, vainement Romme, demandent-ils avec instance à être écoutés ; le tumulte continue, dominé d'intervalle en intervalle par un seul cri, le cri perçant que poussent les femmes : Du pain ! du pain ! du pain ![24]

Un adjudant général, nommé Fox, qui était de service à la Convention, vint annoncer à Boissy-d'Anglas que les attroupements au dehors grossissaient de la manière la plus alarmante. Il attendait des ordres. Boissy-d'Anglas les lui donna par écrit : ils portaient qu'il fallait repousser la force par la force. Un homme parut, qui tenait au bout d'une pique la tête de Féraud ; il s'avance vers le président, et lui présente cette tête livide, qu'on disait être celle de Fréron. Lui, crut qu'on venait de nommer Fox. Pensant alors qu'on allait trouver sur cet officier l'ordre d'employer la force, il se crut perdu, et, résigné à son sort, salua religieusement la sanglante image[25].

Du pain ; — la permanence des sections ; — des visites domiciliaires pour les subsistances ; — l'arrestation de tous les émigrés ; — la liberté de tous les patriotes ; — la mise en activité de la Constitution de 1795 ; — une municipalité à Paris ; — la rentrée des députés patriotes ; — l'arrestation des députés qui n'étaient pas à leur poste ; — l'arrestation des coquins et des lâches ; — voilà les propositions qui, coup sur coup, sont lancées dans le bruit, pendant qu'une femme, les bras nus, s'agite violemment à la Tribune, et que la multitude s'arrache, pour les lire, des écrits rédigés à la hâte sur le Bureau par des inconnus[26].

Il était neuf heures du soir, lorsque Boissy-d'Anglas, épuisé par tant d'épreuves cruelles, céda le fauteuil à Vernier, que son âge et la faiblesse de son caractère livraient à la merci de l'orage[27]. Le désordre, du reste, avait déjà commencé à s'organiser en quelque sorte. De la partie supérieure de la salle, on avait fait descendre les députés sur les banquettes inférieures, pour qu'ils votassent les décrets à rendre : il fut convenu que les députés voteraient en levant leurs chapeaux, le peuple restant couvert[28].

Vinrent les motions. Romme demande que les patriotes soient mis en liberté ; que les procédures commencées contre eux soient suspendues ; que les sections soient déclarées en permanence ; qu'il n'y ait plus qu'une seule espèce de pain ; qu'il soit fait à l'instant des visites domiciliaires pour rechercher les farines. Goujon propose de faire appel aux patriotes opprimés ; d'exposer à la France par une proclamation les causes du mouvement du 1er prairial ; de nommer une commission extraordinaire qui veille à l'exécution des nouveaux décrets ; de rappeler des départements où ils ont été envoyés tous les représentants du peuple, et de renouveler les comités de gouvernement. Bourbotte opine pour l'arrestation des folliculaires qui ont empoisonné l'esprit public, et Duquesnoy, pour le remplacement immédiat du Comité de sûreté générale[29].

Toutes ces mesures sont décrétées selon le mode convenu et au milieu des applaudissements. La Commission extraordinaire par laquelle Duquesnoy veut. qu'on remplace le Comité de sûreté générale est sur-le-champ nommée, et on la compose de quatre membres : Duquesnoy, Prieur (de la Marne), Duroy et Bourbotte[30].

Boissy-d'Anglas a repris le fauteuil. Legendre et Delecloy essayent de se faire entendre et sont chassés de l'enceinte par les huées[31]. Soubrany, qui avait été officier dans le régiment de Royal-Dragons, est, sur la motion de Romme, son ami, désigné comme commandant de la force armée[32]. Il était alors minuit.

Or, tandis que les Montagnards passaient ainsi leur temps à rendre des décrets, les Comités de gouvernement, revenus de leur première surprise, rassemblaient des forces. Déjà les bataillons des sections Lepelletier, la Butte-des-Moulins, Fontaine-Grenelle, occupaient le Carrousel et les avenues de l'Assemblée nationale. D'un autre côté, à mesure que la nuit avançait, la plupart des insurgés répandus dans la cour et le jardin des Tuileries s'étaient insensiblement retirés, par la raison que les Parisiens, selon le mot du cardinal de Retz, rappelé par Thibaudeau[33], ne savent pas se désheurer. Seuls, les plus acharnés occupaient encore la salle et les tribunes. Les sections conduites par Auguis, Bergœing, Kervélégan, Legendre, chargent, aux environs de la salle, tout ce qu'elles rencontrent, s'ouvrent un passage, pénètrent dans l'enceinte.

C'était au moment où Duquesnoy, Prieur (de la Marne), Duroy et Bourbotte, en sortaient pour aller remplir les fonctions de membres de la Commission extraordinaire, Avez-vous ordre du président d'entrer ici ? demande Prieur à Raffet, qui commandait le bataillon de la Butte-des-Moulins. Je ne te dois aucun compte, répond celui-ci. Suivant le Moniteur, Prieur (de la Marne) se serait aussitôt tourné du côté de la foule, en criant : A moi, sans-culottes ! Mais cette circonstance, qui figure dans le compte rendu officiel de la séance du 1er prairial, ne fut révélée que dans celle du 2, et l'on y puisa le texte d'une accusation terrible contre Prieur, sans autre fondement que l'assertion du député Quénet, qui déclara n'avoir pas vu son collègue, mais avoir reconnu sa voix[34].

Quoi qu'il en soit, la partie avait cessé d'être égale. Contre des bataillons bien dirigés, compactes, s'avançant au pas de charge, la baïonnette au bout du fusil, que pouvait une cohue d'hommes mal armés ou sans armes que personne ne commandait ? C'est à peine s'il y eut un simulacre de résistance. Les uns se précipitent aux portes, les autres s'échappent par les fenêtres ; en un clin d'œil, la solitude se fait dans les tribunes, et la majorité de la Convention, assemblée républicaine, est triomphalement réinstallée sur ses bancs parles sections les plus royalistes de la capitale[35].

Qu'on annulât, sans plus tarder, tout ce qui venait de s'accomplir et qu'on donnât à brûler en pleine séance les minutes des décrets qui venaient d'être rendus, il était naturel de s'y attendre ; mais là n'était point, pour ceux de la droite, le point important : ce qui les tourmentait, c'était une sombre impatience de disperser les derniers débris de la Montagne. Alors, en effet, se reproduisirent avec une exactitude odieuse les scènes de germinal. On entendit Defermon, Pierret, Thibaudeau, invoquer tour à tour la Némésis qui préside aux délibérations des majorités victorieuses ; on entendit des législateurs en cheveux blancs proférer des imprécations d'une violence juvénile et de faibles poitrines tousser d'implacables arrêts. Une commune ardeur de vengeance rapprochant des hommes qui devaient, plus tard, s'entre-déchirer, Bourdon (de l'Oise), put, sans s'exposer à être interrompu, mettre au rang des crimes de Peyssard et de Soubrany celui d'être nés l'un et l'autre dans la classe des nobles ! Defermon, pour mieux accabler Prieur (de la Marne) dans le présent, l'attaqua dans son passé. Ce n'est point assez d'arrêter quelques hommes, s'écria Tallien, il faut d'autres mesures… Quelles mesures ? Il ajouta, de peur sans doute que sa pensée ne fût pas bien saisie : car il ne faut pas que le soleil se lève, et que ces scélérats existent encore[36]. C'était son mot de thermidor : la même soif de sang lui inspirait les mêmes images.

Rien de comparable aux emportements d'une assemblée en fureur, parce qu'elle se sent rassurée par le nombre contre toute responsabilité matérielle, et par la communauté des opinions contre toute responsabilité morale. Il n'est pas d'iniquité si flagrante, pas d'acte de tyrannie si lâche, dont une assemblée ne soit capable, lorsqu'elle s'abandonne à la force de ces passions électriques qui, à de certains moments, s'emparent des hommes réunis. Pour que Bourbotte, Soubrany, Romme, Duquesnoy, Duroy, Goujon, Peyssard, Rühl, Prieur (de la Marne), fussent frappés, il suffisait que quelqu'un les nommât ! On les nomma ; et, traînés à la barre après avoir été livrés aux gendarmes, ils eurent à y subir, pour que rien ne manquât à leur malheur, les insultes sans dignité et sans courage de Tallien. Malgré les proscriptions, malgré les assassinats que vous aviez organisés, misérables, la République vivra ![37] Comme si les républicains de la trempe de Romme, de Soubrany, de Goujon, avaient conspiré la mort de la République ! Et ce discours, Tallien, chose remarquable, le terminait par celte adjuration qui dut transporter de joie les royalistes : Mettons tous la main à l'œuvre, et terminons promptement la Révolution[38]... Grâce à lui et à ses pareils, cette conclusion ne pouvait tarder ; et même le vœu qui la pressait se réalisa bien plus tôt qu'ils n'avaient intérêt à le vouloir !

Les vulgaires Sylla du côté droit étaient si affamés de proscriptions, que Lehardy demanda l'arrestation de Charlier, pour les opinions qu'il avait coutume d'exprimer, et celle de Robert-Lindet, parce que ce monstre avait fait, deux mois auparavant, l'éloge de l'ancien Comité[39]. Par bonheur, cette rage rétrospective menaçait trop de têtes pour qu'on ne la jugeât pas dangereuse : Lehardy manqua sa proie.

Une circonstance curieuse, c'est qu'au plus fort de ce débordement de haines, l'Assemblée décréta, sur la proposition de Bourdon (de l'Oise), qu'il n'y aurait plus deux sortes de pain, et que les traiteurs, les pâtissiers, seraient tenus de verser dans les magasins de la République, et de céder, au prix coûtant, pour qu'on en fît du pain à distribuer sans retard au peuple, toutes les farines qu'ils possédaient[40] ! C'était précisément ce qu'avait proposé Romme, qui, à cause de cela, allait être justiciable du bourreau !

A trois heures trois quarts, Auguis étant venu annoncer que le calme paraissait régner dans la ville, la séance fut suspendue[41].

Mais, le 2 prairial, Paris s'éveilla, une fois encore, au bruit du tocsin. A neuf heures, la Convention était à son poste : à dix heures la séance était reprise[42], et fut consacrée par les vainqueurs à compléter leur victoire, après l'avoir exaltée. Boissy-d'Anglas, dès qu'il parut, se vit couvert d'applaudissements. Le président pressa sur son cœur le jeune Mailly, qui, en s'opposant aux envahisseurs, avait reçu deux coups de feu. Gouly ayant raconté que Féraud avait dit aux femmes, lorsqu'elles cherchaient à forcer la porte de la salle : Vous ne passerez que sur mon corps, il fut décrété qu'une lettre de consolation serait écrite, au nom de la Convention, à la famille de Féraud[43].

Pendant ce temps, la haine se donnait carrière. Rouyer se plaignit de ce que l'on n'exécutait pas le décret qui avait condamné à la déportation Billaud-Varenne, Barère et Collot-d'Herbois. Ce décret, d'ailleurs, lui semblait trop doux ; il s'écria, ce représentant du parti des modérés : Avez-vous le droit de souiller une autre terre d'un sang aussi impur ? De son côté, Lehardy invoqua contre eux la mort, et émit l'idée qu'en expiation des mitraillades de Lyon, l'on tuât Collot-d'Herbois en tirant sur lui à mitraille. Thibaudeau, qui, de concert avec La Réveillère-Lépeaux, fit prévaloir l'ordre du jour sur ces motions atroces, qualifie en ces termes, dans ses Mémoires, la conduite de ceux de son parti dans ces heures horriblement mémorables : Ainsi entraînés par la passion et aveuglés par l'esprit de parti, de vrais républicains, de très-honnêtes gens, victimes de la Terreur, se faisaient à leur tour terroristes, et, au besoin, si on ne les avait retenus, se seraient faits bourreaux[44].

Dans cette même séance, la Convention décréta :

Que tous les bons citoyens seraient appelés autour de l'Assemblée pour la défendre ;

Que les individus arrêtés la veille seraient, aussitôt leur identité constatée, livrés au bourreau ;

Qu'on démentirait une rumeur présentant comme fusillées par ordre de la Convention les femmes qui avaient paru à la barre ;

Que le général Dubois prendrait le commandement de la cavalerie parisienne ;

Que toutes les cloches existant dans la commune de Paris seraient fondues et changées en canons ;

Que la cocarde nationale était le seul signe légal de ralliement, et que tout autre signe serait regardé comme l'enseigne du crime[45].

On vota en outre une proclamation dans laquelle le parti dominant, fidèle à son système de concentrer sur Robespierre la responsabilité de tous les maux, même de ceux qui avaient suivi sa chute, s'abritait derrière cette calomnie impudente et inepte : Si Robespierre n'avait pas régné, vous ne seriez pas tourmentés de la disette qui vous afflige aujourd'hui[46]. Le parti dominant ajoutait : Braves Parisiens, c'est en vain que les factieux voudraient organiser le massacre et le pillage... vous combattez pour la république et vos familles. Le rebelles qui maintenant délibèrent à la maison commun sont mis hors la loi. Poursuivons-les dans ce vil repaire où les complices de Robespierre attendent sa destinée[47].

Toujours le massacre, — et la vie de ceux qui en par laient tant avait été, la veille, pendant douze heures entre les mains des prétendus organisateurs de massacre Toujours le pillage ; — et pas une tentative, même individuelle, de vol ne put être citée pour le déshonneur de ces journées, d'ailleurs si funestes ! Toujours Robes pierre ; — et près d'un an s'était écoulé depuis qu'il était mort !

Ce qu'il y avait de vrai dans la proclamation, c'est qu'en effet quelques individus, le 2 prairial, avaient essayé d'établir une municipalité à l'Hôtel de Ville ; mais comment créer un centre d'opérations, quand toutes les conditions pour y parvenir manquaient : entente préalable, organisation politique, chefs reconnus ? L'insurrection fut donc bien vite amenée à concentrer ses forces dans les sections où le peuple l'emportait, c'est à-dire dans celles de Popincourt, de Montreuil et des Quinze-Vingts ; et ce fut de là qu'elle partit, le 2 prairial. Elle avait cette fois un caractère plus formidable que la veille. Les deux grands faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marceau s'étaient levés d'un commun élan, et ils marchaient sur la Convention, précédés d'une artillerie imposante. On envoya, pour les arrêter, la gendarmerie attachée au service des tribunaux de Paris ; mais, loin de leur disputer le passage, cette gendarmerie, en qui avait survécu dans toute son ancienne énergie le sentiment révolutionnaire, se hâta de faire cause commune avec les insurgés[48]. A cinq heures, ils se trouvaient avoir repoussé les colonnes que leur opposait la Convention, et, rangés en bataille sur la place du Carrousel, ils tenaient leurs canons pointés contre l'Assemblée. Toutefois, les sections qui s'étaient repliées en désordre devant eux, avaient réussi à se reformer autour de la Convention et se préparaient au combat.

Rien d'aussi émouvant que l'aspect de Paris dans cette journée. On eût dit un vaste champ de bataille. Toutes les rues qui aboutissaient au château des Tuileries, la rue Saint-Honoré, dans toute sa longueur, celle des Bons-Enfants, celle des Petits-Champs, la place Vendôme, alors nommée place des Piques, regorgeaient d'hommes armés, beaucoup montrant encore écrits sur leurs chapeaux avec de la craie : Du pain et la Constitution de 1793 ! et la plupart ayant la menace sur le front, l'invective sur les lèvres. Jamais, dit le Courrier républicain[49], pareille chose ne s'était vue dans cette grande cité, ni le 14 juillet, ni le 10 août, ni le 31 mai. Paris allait-il être inondé de sang ?

La perspective des horreurs qui naîtraient d'une guerre civile faisait hésiter les courages : deux heures se passèrent en pourparlers. Enfin, les canonniers des sections thermidoriennes prennent leur parti et passent au peuple. C'était un coup mortel pour la Convention que cette défection inattendue. En l'apprenant, Legendre se leva et dit avec une tristesse solennelle : La nature nous a tous condamnés à la mort ; un peu plus tôt, un peu plus tard, qu'importe ? soyons calmes. La plus belle motion que nous ayons à faire, c'est de garder le silence[50].

Et l'assemblée attendit en silence l'arrêt des événements.

Une demi-heure s'écoule. Nul commencement d'attaque. Les esprits se rassurent par degrés. Delmas, qui a été chargé du commandement des forces de la Convention et qui tremble d'être écrasé si la lutte s'engage, envoie dire au président qu'une tentative de conciliation est devenue nécessaire. Les Thermidoriens étaient d'autant plus disposés à y consentir, qu'ils se sentaient placés entre deux écueils. Ils ne dissimulaient pas que la plupart des sectionnaires sur qui reposait, en ce moment, le salut de l'Assemblée, étaient royalistes, et ils craignaient presque autant la victoire des défenseurs de la Convention que celle de ses ennemis[51]. La proposition de fraterniser avec ceux qu'un instant auparavant on désignait sous le nom de rebelles, de scélérats, de pillards, et d'assassins, fut donc décrétée, et une Commission de six membres reçut mission d'aller s'entendre avec les insurgés. Si cette mesure réussit, s'écria ridiculement Legendre, le gouvernement anglais est perdu ; et comme il ajoutait : Il n'appartient plus qu'au Destin de régler l'ordre des choses, Lanjuinais le reprit en ces termes : A Dieu seul[52].

En attendant le résultat des conférences qui venaient de s'ouvrir et pour en faciliter le succès, la Convention décida qu'elle allait s'occuper à l'instant même des subsistances, et que, le 25 prairial, au plus tard, ses Comités lui présenteraient les lois organiques de la Constitution de 1793. Cette idée des lois organiques fut suggérée par Legendre[53]. On verra ce qui advint d'une promesse qui n'était qu'un mensonge de la peur !

A peine la proclamation dont il s'agit était-elle votée, que Delacroix, un des six commissaires, rentre, amenant avec lui une députation de six insurgés. Celui qu'ils avaient chargé de porter la parole en leur nom présenta les mêmes demandes qui, la veille, s'étaient produites au sein de l'Assemblée envahie, savoir : du pain, — la Constitution de 1795, — l'élargissement des patriotes. Il demanda que les scélérats fussent punis — vœu d'un vague effrayant — et qu'on tirât vengeance de ceux qui, par leurs distinctions entre l'assignat et l'argent, assassinaient le peuple. A ces conditions, le peuple regagnerait ses foyers ; sinon, il était décidé à rester là et à y mourir[54].

Ces mots excitant des murmures, l'orateur populaire s'écria : Je ne crains rien, moi en particulier, je me nomme Saint-Ligier. Au surplus, voilà le vœu du peuple. Vive la République ! vive la liberté ! vive la Convention... si elle est amie des principes ![55]

Il était impossible de braver l'Assemblée avec plus d'audace, et les murmures que souleva la déclaration de Saint-Ligier prouvèrent assez qu'on en comprenait la signification menaçante. Mais la question, pour les Thermidoriens, était de mettre à profit la crédulité du peuple, jusqu'à ce que l'heure fût venue de l'en faire repentir. Vernier, qui occupait le fauteuil, se répandit en doucereuses paroles sur la nécessité de s'unir contre l'ennemi commun, et de n'en venir à la guerre, s'il y avait lieu, que pour l'établissement de la République. Il lut la proclamation qui faisait briller aux yeux du peuple l'espoir de l'abondance et celui d'un retour à la Constitution de 1793. Même en ce qui concernait la punition des scélérats, l'élargissement des patriotes, la vengeance à tirer des accapareurs et des agioteurs, Vernier eut soin de n'exprimer rien de formel : c'étaient là des points que la Convention pèserait dans sa sagesse[56].

Pour combler la mesure des actes et des démonstrations de nature à abuser la foule, il ne restait plus qu'à embrasser les députés de l'insurrection : c'est ce que Gossuin proposa sans détour. On murmura, mais l'insurrection n'en reçut pas moins l'accolade fraternelle dans la personne de ses représentants[57].

Le peuple crut avoir tout gagné, il avait tout perdu : il reprit la route des faubourgs, satisfait d'avoir obtenu des promesses qui ne devaient pas être tenues, et laissant dans les fers les hommes généreux qui s'étaient compromis pour lui !

Le lendemain, 3 prairial (22 mai), le premier soin de la Convention, après avoir décrété la peine de mort contre quiconque battrait ou ferait battre sans autorisation la générale, fut d'adjoindre à Delmas deux de ses membres, anciens officiers d'artillerie, Gillet et Aubry[58]. Ceux-ci expédient aussitôt des courriers appelant à Paris en toute hâte les troupes de ligne employées à protéger les convois[59]. Le jour même, trois mille hommes de cavalerie arrivèrent[60]. Un capitaine de cavalerie légère qu'attendaient de brillantes destinées vint se présenter avec un détachement de son régiment à Delmas, qui le reçut à bras ouverts. D'abord républicain farouche, cet officier s'était à ce point montré admirateur du terrible Ami du Peuple, qu'il avait adopté le nom de Marat, n'ayant eu pour cela qu'à changer une lettre de son propre nom[61] ; car il s'appelait Joachim Murat[62].

Un historien allemand observe avec raison que ce fut à partir de prairial que le gouvernement fonda son existence sur l'armée[63]. La force organisée à Paris pour y servir de garde prétorienne à la Convention se composa de vétérans ; elle fut connue sous la désignation de 17e division militaire, et placée sous le commandement du général Menou, personnage qui appartenait à une ancienne famille, avait des manières élégantes, connaissait le monde et se distingua plus comme habitué des salons de madame de Staël que comme soldat.

La journée du 3 prairial fut assez calme ; mais le soir, vers les huit heures, l'arrestation d'un garçon serrurier, nommé Tinel, agita de nouveau Paris[64]. Ce Tinel était l'homme qui avait promené la tête du malheureux Féraud au bout d'une pique. Arrêté en face du Théâtre-Français et livré à l'exécuteur des jugements criminels, on le conduisait au supplice lorsque, sur le pont au Change, la charrette funèbre fut tout à coup entourée par un grand nombre de personnes qui se trouvaient rassemblées là comme à point nommé. Une violente rumeur s'élève. On parle de soustraire Tinel à la mort. A mesure que la charrette s'avançait sur le quai Pelletier, la foule grossissait et s'animait. Sur la place de Grève, elle écarta les gendarmes, qui n'étaient qu'une vingtaine, et l'homme fut enlevé[65].

Le bruit courut que ce mouvement avait été excité sous main par les Comités eux-mêmes, qui, furieux de l'humiliation qui avait été infligée la veille à l'Assemblée, et encouragés par l'arrivée des troupes, ne cherchaient plus qu'un prétexte d'attaquer les faubourgs. Ce fait n'a pas été prouvé[66] ; mais ce qui est certain, c'est que les Comités songèrent à tirer parti de la circonstance. Dans la soirée, les meneurs de la Jeunesse dorée sont mandés aux Tuileries ; on les arme, on met à leur tête le général Kilmaine et on les lance sur le faubourg Saint-Antoine[67]. Ils y pénétrèrent à la pointe du jour, fouillèrent plusieurs maisons, celle du fameux Santerre entre autres, et s'emparèrent, sans rencontrer de résistance, des canons de sa section. Mais voilà que soudain ils s'aperçoivent que derrière eux les habitants barricadent chaque rue qu'ils ont dépassée, de manière à rendre le retour impossible, tandis que devant eux, à quelque distance, se hérissaient déjà piques et baïonnettes. Plus hardis, ces jeunes gens pouvaient continuer leur route dans la grande rue en foudroyant tout ce qui se serait opposé à leur passage, car ils avaient de l'artillerie et étaient formés en colonnes assez nombreuses[68]. Mais ils étaient de ceux qu'un agent des princes décrivait en ces termes : Ces royalistes à collet noir, collet vert et cadenettes, ne savent qu'étaler aux foyers des spectacles leurs fanfaronnades, et le moindre coup de fusil les fait cacher sous le lit des femmes qui les souffrent[69]. La vue des barricades les consterna. Et puis, beaucoup d'entre eux n'avaient pas soupé, excuse que ces héros sybarites jugeaient sans doute suffisante pour couvrir leur répugnance à pousser jusqu'au bout l'entreprise[70]. Ils offrirent donc de rendre les canons dont ils s'étaient emparés si on les laissait rentrer dans l'intérieur de Paris. Le peuple eut pitié d'eux et leur permit d'opérer leur retraite. On a prétendu que, le 2 prairial, des femmes avaient été entendues criant dans les rues : Ce soir, les cravates des muscadins seront à bon marché. Nous aurons de belles chemises. Nous verrons comment ils ont le corps fait. Leurs têtes feront un bel effet au bout des piques ![71] Si cette ignoble menace fut en effet proférée, il faut croire qu'elle ne le fut que par deux ou trois mégères sur une population immense ; car, le 3 prairial, quand l'occasion de la réaliser s'offrit, les femmes du faubourg se contentèrent de huer du haut de leurs fenêtres les muscadins en retraite, à mesure qu'ils passaient un à un par un trou pratiqué à ce dessein dans la barricade qui fermait la grande rue[72].

Cette expédition ridicule irrita fort les royalistes contre les Thermidoriens, leurs alliés. Ils éclatèrent en plaintes amères sur ce qu'on n'avait pas fait soutenir la Jeunesse dorée par de la cavalerie, et sur ce qu'on l'avait de la sorte exposée à être hachée en pièces ; au fond de cette négligence, qui leur parut calculée, ils soupçonnèrent une pensée de trahison, et, de la part des dominateurs du moment, le désir de se fortifier par l'humiliation des royalistes combinée avec le désarmement des Jacobins[73].

Le fait est que rien ne venait plus à propos pour servir la politique à deux tranchants des Comités. Après avoir poussé la Jeunesse dorée à faire preuve d'impuissance, ils se hâtèrent de montrer ce qu'eux, Thermidoriens, ils avaient pouvoir d'accomplir. Le 4 prairial (23 mai), Laporte court présenter à la Convention, au nom des Comités, un projet de décret dont la vigueur contrastait singulièrement, et avec les promesses faites au peuple dans la journée du 2 prairial, et avec la générosité que, dans la nuit du 2 au 3, le peuple avait déployée à l'égard de ses agresseurs.

Les habitants du faubourg Saint-Antoine seront sommés à l'instant de remettre entre les mains de la justice les assassins du représentant du peuple Féraud, et, notamment, celui qui, dans la journée d'hier, a été arraché au supplice.

Ils seront sommés de remettre leurs armes et les canons des trois sections composant le faubourg.

En cas de refus, le faubourg Saint-Antoine sera déclaré en état de rébellion.

En conséquence, les sections de Paris marcheront sous les ordres des généraux pour réduire les rebelles.

Toute distribution des subsistances cessera d'avoir lieu pour ce faubourg[74].

 

Ce décret fut adopté au cri de : Vive la Convention ! On n'avait plus besoin maintenant de s'étudier à flatter le peuple et à le tromper : les troupes soldées étaient là, et l'accolade fraternelle du président pouvait être, avec certitude de succès, remplacée par une décharge à mitraille !

Les Thermidoriens sentaient le prix du temps : ils le mirent à profit. Quoique le faubourg Saint-Antoine fût alors tranquille[75], l'ordre de l'attaquer est donné, absolument comme s'il se fût agi d'une place de guerre appartenant à l'ennemi. Toutes les sections de l'intérieur sont sommées de prendre les armes ; trente mille hommes sont formés en bataillons ; on les fait précéder de quelques détachements de cavalerie, et l'on marche droit au faubourg. Des pièces d'artillerie destinées non-seulement à tuer les hommes, mais à incendier les maisons, sont braquées à l'entrée des principales rues. Les députés Fréron, Delmas, Laporte et Barras, nommés représentants du peuple auprès de cette armée envoyée contre le peuple, choisissent la maison de Beaumarchais pour leur quartier général, et mettent en délibération s'ils mettront le feu au faubourg[76] ! Heureusement ce projet atroce fit horreur au général Menou, qui déclara de telles choses impossibles à oser sans un décret spécial de la Convention[77].

Pendant ces tragiques débats, les propriétaires et chefs d'atelier établis dans le faubourg allaient implorer les autorités municipales des sections, et pressaient les ouvriers de ne pas exposer cet important quartier à une destruction certaine. La Convention n'avait-elle pas décrété, après tout, sur la motion de Bourdon (de l'Oise), deux des mesures proposées par Romme, savoir : l'interdiction de faire plus d'une qualité de pain, et la mise en réquisition des farines qui se trouvaient chez les pâtissiers ? N'avait-elle pas rapporté, en outre, le décret qui déclarait l'argent marchandise ? Pourquoi courir les chances d'une lutte désespérée, lorsqu'un peu de modération pouvait amener, sans effusion de sang, la réalisation des vœux du peuple ? Ces discours calmant peu à peu les esprits, on se décide à parlementer ; des commissaires sont désignés ; Menou leur donne un sauf-conduit ; ils partent. Mais, sans attendre leur retour, les partisans intéressés de la pacification, redoublant d'efforts, obtiennent de la section de Popincourt qu'elle livre, en même temps que ses canons, le capitaine des canonniers, homme d'une force prodigieuse et d'un courage égal à sa force. C'était un mulâtre, nommé Delorme, qui avait déjà figuré dans les mouvements révolutionnaires. L'impulsion une fois imprimée, tout suivit. Comme la section de Popincourt, les autres sections du faubourg se laissèrent désarmer, et, dès huit heures du soir, la Convention apprenait, de la bouche de Fréron et d'Auguis, qu'elle avait vaincu sans avoir eu à combattre[78].

Une demi-heure s'était à peine écoulée lorsque les députés du faubourg se présentèrent au seuil de l'Assemblée[79]. Le danger était passé alors. Aussi furent-ils traités avec cette lâche insolence que la victoire inspire aux âmes vulgaires. André Dumont, qui présidait, défendit aux huissiers de laisser entrer qui que ce soit. Il voulut bien, toutefois, donner connaissance à l'Assemblée de la pétition, qu'il s'était fait remettre ; mais, comme il en commençait la lecture, Bourdon (de l'Oise) l'ayant interrompu, il quitta le fauteuil, descendit à la tribune, et dit : Je suis si éloigné de vouloir que les pétitionnaires soient admis à la barre, que non content de demander, comme le préopinant, que les révoltés soient bombardés demain, je propose de le faire aujourd'hui[80]. On n'avait pas tenu ce langage quand, le 2 prairial, ces mêmes révoltés campaient, mèche allumée, sur la place du Carrousel ! On brûlait, ce jour-là, de fraterniser avec eux, et le président de l'Assemblée était si loin de vouloir les bombarder qu'il donnait à leurs députés l'accolade fraternelle !

Ainsi repoussés et même menacés d'être arrêtés, les commissaires ne cherchèrent plus qu'à s'évader, y réussirent, et coururent se plaindre à leurs compagnons du faubourg de l'accueil qu'ils avaient reçu. Il était trop tard !

 

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Est-il besoin de signaler ici l'analogie saisissante qui existe entre cette insurrection de prairial que nous venons de raconter, et la trop fameuse journée du 13 mai 1848 ? Il est vrai que, dans celle-ci, la faim n'eut pas de rôle et qu'on n'y porta, grâce au ciel, aucune tête au bout d'une pique ; mais, en ce qui touche la situation respective des partis, les circonstances qui caractérisèrent le mouvement, les causes qui le firent échouer, l'avantage qu'en retira la réaction et les vengeances auxquelles il ouvrit carrière, que de traits de ressemblance !

 

 

 



[1] Voyez, sur les journées de prairial l'éloquent et très-complet travail publié par M. Jules Claretie sous le titre de : les Derniers Montagnards. — Paris, 1868.

[2] Nougaret, Histoire abrégée, etc., liv. XXIV, p. 462.

[3] Compte rendu de la séance du 1er prairial. — Moniteur, an III, numéro 241.

[4] Mémoires de Levasseur, t. V, chap. V, p. 16-17.

[5] Mémoires de Levasseur, t. V, chap. V, p. 16-17.

[6] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 171.

[7] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 315 à 318.

[8] Moniteur, an III, n° 244.

Les auteurs de l'Histoire parlementaire font, sur le compte-rendu de la séance du 1er prairial par le Moniteur, les remarques suivantes, qui sont fort justes : Le Moniteur écrivit ce compte rendu après coup, de telle sorte que ce qui fut dit dans les séances du 2 et du 3 lui servit à rédiger celle du 1er. Les mêmes auteurs ajoutent, et avec non moins de raison : Quoique la vérité soit très-facile à apercevoir dans ce compte rendu, nous devons cependant avertir nos lecteurs que le journaliste s'est efforcé de donner à son bulletin une couleur thermidorienne. (Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 313.) Voilà ce qu'il ne faut pas perdre de vue.

[9] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 244.

[10] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 244.

[11] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 244.

[12] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 244.

[13] Voyez dans le Moniteur, an III, n° 245, cette proclamation aussi pompeuse que puérile, pleine d'emphase et de vide.

[14] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 179. — Levasseur, Mémoires, t. V, chap. II, p. 16.

[15] Voyez le Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 245.

[16] Levasseur, Mémoires, t. V, chap. I, p. 17.

[17] Voyez ce que disent sur ce point les auteurs de l'Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 311-312.

[18] D'après le compte rendu du Moniteur, bien qu'il ait été rédigé au point de vue thermidorien, un homme, un seul homme, fut arrêté ayant du pain dans sa poche. Il est curieux de voir comme ce fait s'enfle sous la plume de l'historien contre-révolutionnaire Beaulieu : Les conventionnels, dit-il, parviennent à saisir quelques-uns de ces insurgés qui criaient le plus haut : Du pain ! Ils les fouillent, et ils trouvent que leurs poches en sont remplies ! C'est ainsi que l'esprit de parti falsifie l'histoire.

[19] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 180-181.

[20] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 245.

[21] Beaulieu, Essais historiques, t. VI, p. 180. — M. Jules Claretie attribue le meurtre de Féraud à une folle, Aspasie Carie Migelli, qui l'aurait pris pour Fréron. — Voyez les Derniers Montagnards, p. 153.

[22] Mémoires de Thibaudeau, t. I, chap. XIII, p. 164.

[23] Mémoires de Thibaudeau, t. I, chap. XIII, p. 166.

[24] Voyez le Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 245.

[25] Notes sur un article nécrologique de Boissy-d'Anglas, par le baron Boissy-d'Anglas, son fils, autographe signé, 27 mai 1827, 8 pages grand in-folio.

[26] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 245.

[27] Mémoires de Thibaudeau, t. I, chap. XIII, p. 104.

[28] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 245.

[29] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 185 ; — Moniteur (séance du 1er prairial), an II, n° 245.

[30] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 185 ; — Moniteur (séance du 1er prairial), an II, n° 245.

[31] Moniteur, an III, n° 246.

[32] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 192.

[33] Mémoires de Thibaudeau, t. I, chap. XIII, p. 165.

[34] Ce même Quénet, quand l'heure des vengeances sans courage fut venue, attribua à Duquesnoy un mot qui était de Soubrany, et rapporta les paroles de ce dernier autrement qu'il ne les avait dites. — Voyez l'Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 313.

[35] Telles étaient certainement les sections Lepelletier et de la Butte-des-Moulins, comme le mouvement de vendémiaire devait le prouver.

[36] Voyez le compte rendu officiel de la séance par le Moniteur (an III, n° 216), qui était en ce moment l'organe des Thermidoriens.

[37] Voyez le Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 246.

[38] Voyez le Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 246.

[39] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 246.

[40] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 246.

[41] Moniteur (séance du 1er prairial), an III, n° 246.

[42] Annales patriotiques, citées dans l'Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 366.

[43] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 568.

[44] Thibaudeau, Mémoires, t. I, chap. XIII, p. 169.

[45] Compte rendu de la séance du 2 prairial par les Annales patriotiques. (Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 369-370.)

[46] Voyez le Courrier républicain, n° 566.         

[47] Voyez le Courrier républicain, n° 566.         

[48] Voyez Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 186, et l'arrêté lu par Aubry, dans la séance du 6 prairial, sur le licenciement de la gendarmerie. (Moniteur, an III, n° 251.)

[49] Courrier républicain, n° 565.

[50] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 371.

[51] C'est ce que dit formellement Beaulieu, qui figure comme témoin et acteur dans les événements dont il a retracé le souvenir. Voyez ses Essais historiques, t. VI, p. 187.

[52] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 372.

[53] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 187.

[54] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 373.

[55] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 373.

[56] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 373.

[57] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 373.

[58] Moniteur, an III, n° 248.

[59] Rapport d'Aubry, Moniteur, an III, n° 253.

[60] Rapport d'Aubry, Moniteur, an III, n° 253.

[61] Schlosser, Histoire du dix-huitième siècle (traduction anglaise, t. VI, p. 577).

[62] Schlosser, Histoire du dix-huitième siècle (traduction anglaise, t. VI, p. 577).

[63] Schlosser, Histoire du dix-huitième siècle (traduction anglaise, t. VI, p. 577).

[64] Courrier républicain, n° 566.

[65] Annales patriotiques, citées dans l'Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 374.

[66] Voyez ce que dit à cet égard Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 188.

[67] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 189.

[68] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 189.

[69] Correspondance secrète de Charette, Stofflet, Puisaye et autres, t. I, p. 6-7.

[70] C'est en effet l'excuse que le royaliste Beaulieu semble alléguer en leur faveur. Voyez ses Essais historiques, t. VI, p. 189.

[71] Beaulieu, Essais historiques, t. VI, p. 187.

[72] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 375.

[73] Voyez Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 189-190.

[74] Courrier républicain, n° 566.

[75] Thibaudeau, Mémoires, t. I, chap. XIII, p. 170.

[76] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 190-191. — Thibaudeau, Mémoires, t. I, chap. XIII, p. 170.

[77] Beaulieu, Essais historiques, etc., t. VI, p. 190-191.

[78] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 378 et 379.

[79] Il était huit heures du soir, lorsque Fréron et Auguis annoncèrent à l'Assemblée la soumission du faubourg Saint-Antoine, et huit heures et demie, lorsque les commissaires se présentèrent. Voyez sur ce point l'Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 377 et 379.

[80] Moniteur, an III, n° 249.